Observations finales concernant le cinquième rapport périodique de la Chine pour ce qui est de Hong Kong *

Le Comité contre la torture a examiné le cinquième rapport périodique de Hong Kong (Chine) (CAT/C/CHN-HKG/5) à ses 1368e et 1371e séances, les 17 et 18 novembre 2015 (voir CAT/C/SR.1368 et 1371), et a adopté les présentes observations finales à ses 1392e et 1393e séances, le 3 décembre 2015.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de Hong Kong (Chine), qui fait partie du cinquième rapport périodique de la Chine. Il accueille également avec satisfaction les réponses écrites à la liste de points à traiter (CAT/C/CHN-HKG/Q/5/Add.1) et les renseignements complémentaires apportés après l’examen du rapport.

Le Comité se félicite de la qualité du dialogue qu’il a eu avec la délégation multisectorielle ainsi que des réponses apportées oralement aux questions et préoccupations soulevées lors de l’examen du rapport.

B.Aspects positifs

Le Comité prend note avec satisfaction de l’adoption des mesures législatives ci-après dans des domaines intéressant la Convention :

a)L’adoption de l’ordonnance de 2012 portant modification de l’ordonnance relative à l’immigration (ordonnance no 23 de 2012), qui institue une procédure officielle de demande de protection au titre du principe de non-refoulement consacré par l’article 3 de la Convention;

b)Les modifications apportées en 2008 et en 2010 à l’ordonnance relative à la violence intrafamiliale, qui étendent la protection conférée par celle-ci aux anciens époux, aux ex-concubins, aux concubins de même sexe et aux ex-concubins de même sexe.

Le Comité salue également les initiatives prises par Hong Kong (Chine) en vue d’adopter des mesures ou de modifier des politiques et des mesures administratives afin de donner effet à la Convention, notamment :

a)La mise en place progressive depuis 2012 de scanners corporel à rayons X à faible rayonnement dans les centres d’accueil pour remplacer l’examen des cavités corporelles;

b)L’extension, en 2014, par voie de réglementation administrative (le « Mécanisme unifié de sélection »), de la procédure de demande de protection au titre du principe de non-refoulement aux requêtes fondées sur : a) la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants au sens de l’article 3 de l’ordonnance relative à la Charte des droits de Hong Kong; b) les persécutions, eu égard au principe de non-refoulement tel qu’il est consacré à l’article 33 de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés;

c)L’organisation de programmes de formation spécifiques destinés aux professionnels de la santé et aux agents des services de l’immigration portant sur le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul);

d)Les modifications apportées en 2013 au Code des poursuites, qui fournit aux procureurs des lignes directrices sur le traitement des cas de travail forcé;

e)La mise en place d’un groupe de travail interdépartemental sur la reconnaissance du genre en vue de réfléchir à la législation et aux mesures administratives ponctuelles qui pourraient être nécessaires pour protéger les droits des transsexuels à Hong Kong (Chine).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Questions en suspens issues du cycle précédent

Le Comité relève avec satisfaction que Hong Kong (Chine) a appliqué la procédure de suivi. Il apprécie à leur juste valeur certaines mesures positives d’ordre législatif (voir par. 4 a) ci-dessus) et administratif (voir par. 5 b) ci-dessus) qui ont été prises, mais note avec préoccupation que, selon les données fournies par Hong Kong (Chine), entre décembre 2009 et mai 2015, seules 32 des 6 628 demandes de protection ont été considérées comme fondées, ce qui semble indiquer que les critères fixés pour l’octroi d’une protection sont très exigeants. Le Comité prend également note de certaines informations sur les difficultés rencontrées par les demandeurs pour accéder aux décisions de la Commission chargée des recours contre les décisions relatives aux demandes présentées au motif de la torture, qui ne sont pas publiées, ce qui les empêche de préparer efficacement leur dossier. Le Comité s’inquiète en outre de ce qu’il soit prévu d’accélérer la procédure afin de résorber l’arriéré important de demandes à traiter (qui dépasse actuellement les 10 000), étant donné que cela pourrait compromettre l’équité et l’exhaustivité de la procédure de sélection. Il prend note avec préoccupation de la position de Hong Kong (Chine) selon laquelle l’extension à Hong Kong de l’application de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés « exposerait son régime d’immigration à des abus et, partant, irait à l’encontre de l’intérêt public », ce qui à première vue fait passer tous les demandeurs ayant besoin d’une protection pour des personnes qui profitent du système. À cet égard, le Comité est préoccupé par le fait que les demandes au titre du principe de non-refoulement ne sont examinées que si la personne concernée reste sur le territoire après l’expiration de son visa et se trouve de ce fait officiellement en situation irrégulière, ce qui oblige les victimes potentielles d’actes de torture à attendre que ce délai expire pour s’enregistrer auprès du Mécanisme unifié de sélection et accéder à une aide à la réadaptation et à une assistance humanitaire. Le Comité constate également avec préoccupation qu’en n’accordant pas le statut de réfugié aux personnes qui présentent des demandes par la voie du Mécanisme unifié de sélection, l’État partie prive celles-ci de la possibilité de travailler en toute légalité, les contraignant à dépendre d’une assistance en nature et à vivre en deçà du seuil de pauvreté pendant de longues périodes (art. 3).

Le Comité engage Hong Kong (Chine) à revoir la procédure de contrôle préalable des demandes au titre du principe de non-refoulement pour garantir que les personnes ayant besoin d’une protection internationale, y compris celles qui fuient une violence aveugle, soient pleinement protégées contre le refoulement. Hong Kong (Chine) devrait, en particulier :

a) Garantir l’accès sans entrave au Mécanisme unifié de sélection à toutes les personnes souhaitant demander une protection, quel que soit leur statut au regard de la législation sur l’immigration;

b) Rendre le processus de sélection plus équitable et plus transparent, notamment en veillant à ce que les demandes au titre du principe de non-refoulement soient examinées soigneusement et individuellement; en accordant suffisamment de temps aux demandeurs pour motiver pleinement leur demande et pour obtenir et présenter des éléments de preuve essentiels, tels que ceux qu’ils auront fait eux-mêmes établir par un expert médical; et en publiant des versions caviardées des décisions de la Commission chargée des recours contre les décisions relatives aux demandes présentées au motif de la torture;

c) Concevoir des mécanismes de repérage précoce des victimes de torture permettant à celles-ci d’avoir un accès prioritaire au Mécanisme unifié de sélection et d’avoir immédiatement accès à une réparation;

d) Accorder aux réfugiés et aux personnes qui font une demande motivée par la voie du Mécanisme unifié de sélection un statut au regard de la législation sur l’immigration qui soit différent de celui qu’ils ont actuellement et qui leur permette de séjourner légalement à Hong Kong (Chine) jusqu’à la fin de la procédure du Mécanisme unifié de sélection et qui leur permette de travailler en toute légalité afin de leur éviter de vivre dans le dénuement et de subir un traitement dégradant;

e) Envisager d’étendre l’application de la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et du Protocole de 1967 à Hong Kong.

Le Comité rappelle sa recommandation précédente (voir CAT/HKG/CO/4, par. 12) et se déclare préoccupé par le fait que les enquêtes sur les plaintes contre la police continuent d’être conduites par le Bureau des plaintes contre la police, qui est une division distincte des forces de police. Il s’inquiète également de ce que le Conseil indépendant des plaintes contre la police reste un organe consultatif, qui est chargé de contrôler les enquêtes du Bureau des plaintes contre la police et n’est pas habilité à procéder lui-même à des enquêtes. Le Comité regrette que Hong Kong (Chine) ne lui ait pas fourni de données statistiques complètes sur le nombre de plaintes pour torture ou mauvais traitements (y compris les brutalités policières) reçues par le Bureau des plaintes contre la police au cours de la période considérée, ainsi que sur leur issue. Il est également préoccupé par l’absence de mécanisme indépendant et efficace permettant de déposer plainte sans crainte de représailles dans les lieux de détention relevant de la police, du Département de l’immigration et de l’administration pénitentiaire (art. 12 et 13).

Le Comité renouvelle sa recommandation précédente tendant à ce que Hong Kong (Chine) envisage d’instaurer un mécanisme pleinement indépendant ayant pour mandat de recevoir et d’instruire les plaintes contre tous les agents publics et veille à ce qu’il n’y ait pas de lien institutionnel ou hiérarchique entre les enquêteurs de cet organe et les auteurs présumés des actes sur lesquels ces plaintes sont fondées. Le Comité engage également Hong Kong (Chine) :

a) À veiller à ce que le Bureau du Procureur soit dûment informé de toutes les allégations de torture ou de mauvais traitements qui ont été reçues par cet organe et à ouvrir des enquêtes de sa propre initiative chaque fois qu’il y a des motifs raisonnables de croire que des actes de torture ou des mauvais traitements ont été infligés à une personne;

b) À garantir que les auteurs présumés d’actes de torture ou de mauvais traitements soient immédiatement suspendus de leurs fonctions et le restent pendant toute la durée de l’enquête, sous réserve du respect du principe de la présomption d’innocence;

c) À instaurer des mécanismes de plainte confidentiels dans tous les lieux de détention pour faciliter le dépôt de plaintes par les victimes de torture et de mauvais traitements auprès de l’organe chargé de l’enquête, y compris en ce qui concerne l’obtention d’éléments de preuve médicaux à l’appui de leurs allégations, et à garantir dans la pratique que les personnes qui déposent des plaintes soient protégé e s contre toutes représailles du fait de leur pl ainte ou des éléments de preuve soumis;

d) À veiller à ce que les personnes soupçonnées de tels actes soient dûment poursuivies, jugées et, si elles sont reconnues coupables, condamnées à des peines proportionnées à la gravité de leurs actes.

Définition de la torture

Bien que Hong Kong (Chine) estime que l’expression « désigne, entre autres », qui figure au paragraphe 1 de l’article 2 de l’ordonnance relative aux infractions (torture) indique clairement qu’une personne n’occupant pas l’une des fonctions énumérées à l’annexe peut être un « agent public », le Comité s’inquiète de ce que l’absence d’une définition plus large de l’expression « agent public » puisse, dans la pratique, faire obstacle à l’engagement de poursuites contre d’autres agents publics qui ne sont pas explicitement mentionnés dans l’annexe. En outre, le Comité constate avec préoccupation que Hong Kong (Chine) n’a pris aucune mesure pour supprimer le moyen de défense – prévu au paragraphe 4 de l’article 3 de cette même ordonnance – consistant, pour une personne à qui on impute un acte prohibé par la loi hongkongaise ou la loi applicable sur le territoire où il a été commis, à invoquer une autorité, une justification ou une excuse légitime. À cet égard, le Comité répète que l’interdiction de la torture est absolue et non susceptible de dérogation et qu’elle n’autorise aucun moyen de défense quel qu’il soit. Il considère également que le moyen de défense consistant à invoquer « une autorité, une justification ou une excuse légitime » a une portée plus large que la deuxième phrase du paragraphe 1 de l’article premier de la Convention, et qu’il pourrait donc donner lieu à des interprétations abusives et contraires à la Convention (art. 1er et 4).

Le Comité renouvelle sa précédente recommandation tendant à ce que Hong Kong (Chine) modifie sa législation pour y inclure une définition de la torture qui soit pleinement conforme à la Convention et qui couvre tous les éléments figurant à l’article premier de celle-ci. À cet effet, Hong Kong (Chine) devrait envisager à nouveau :

a) D’adopter une définition plus large de l’expression « agent public », afin de garantir que tout agent public ou toute autre personne agissant à titre officiel puisse être poursuivi pour acte de torture;

b) De supprimer le moyen de défense prévu au paragraphe 4 de l’article 3 de l’ordonnance relative aux infractions (torture). Le Comité appelle l’attention de Hong Kong (Chine) sur son observation générale n o  2 (2007) concernant l’application de l’article 2 de la Convention, dans laquelle il souligne notamment que l’interdiction de la torture est absolue, qu’il est impossible d’y déroger et qu’aucune circonstance exceptionnelle, quelle qu’elle soit, ne peut être invoquée pour justifier la torture (par. 5). Il rappelle également que si la définition de la torture en droit interne est trop éloignée de celle énoncée dans la Convention, le vide juridique réel ou potentiel qui en découle peut ouvrir la voie à l’impunité (par. 9).

Détention et garanties juridiques fondamentales

Le Comité est préoccupé par les informations concordantes faisant état de détentions massives de personnes lors de manifestations et par les restrictions qui seraient apportées aux garanties juridiques applicables aux détenus. À cet égard, le Comité prend note des informations fournies par Hong Kong (Chine) selon lesquelles 511 personnes ont été arrêtées dans le contexte d’un rassemblement qui a suivi une marche annuelle le 1er juillet 2014 et relève avec préoccupation que seulement 39 avocats se sont entretenus avec les personnes arrêtées pendant leur détention (art. 2 et 16).

Hong Kong (Chine) devrait faire en sorte que tous les détenus bénéficient dans la pratique de toutes les garanties juridiques fondamentales dès le début de leur privation de liberté, y compris le droit d’être assisté par un avocat sans délai; le droit d’être examiné et soigné immédiatement par un médecin indépendant, sans que cela soit soumis à l’autorisation d’un agent public; le droit d’être informé des raisons de son arrestation et de la nature des charges pesant contre soi; le droit de voir sa détention enregistrée; le droit d’informer immédiatement un proche ou un tiers de son arrestation; le droit d’être présenté à un juge sans délai. Hong Kong (Chine) devrait adopter des mesures efficaces pour garantir le respect des procédures d’arrestation légalement prescrites et surveiller le respect des garanties juridiques par les agents publics. Elle devrait également veiller à ce que les personnes soupçonnées de ne pas respecter les garanties juridiques ou d’arrêter des personnes sans motif valable fassent l’objet d’une enquête et, si elles sont reconnues coupables, punies comme il convient.

Usage excessif de la force dans le cadre du contrôle des manifestations

Le Comité est préoccupé par les informations concordantes faisant état d’un usage excessif du gaz lacrymogène, des matraques et des vaporisateurs contre les manifestants au cours des soixante-dix-neuf jours de manifestations qui se sont déroulées dans le contexte de ce que l’on a appelé le « mouvement des parapluies » ou « mouvement Occupy », en 2014. Il est également préoccupé par les informations concordantes selon lesquelles la police a usé de violence contre plus de 1 300 personnes, dont environ 500 ont ensuite été hospitalisées. Le Comité se déclare également préoccupé par les allégations indiquant que des policiers ont menacé des manifestants de violences sexuelles et les ont agressés alors qu’ils obtempéraient à l’ordre de quitter les lieux. En outre, il prend note avec inquiétude des divers cas de violences perpétrées par des contre-manifestants. En ce qui concerne les plaintes reçues par le Bureau des plaintes contre la police au cours des manifestations et des enquêtes sur celles-ci, le Comité constate avec préoccupation que seules 172 des 527 plaintes déposées par 2 078 personnes au total ont été considérées comme « pouvant être retenues ». Le Bureau des plaintes a transmis un rapport d’enquête sur 151 de ces 172 plaintes, qu’il a déclaré dénuées de fondement, au Conseil indépendant des plaintes contre la police, lequel s’est rangé à son opinion dans 104 cas. Le Comité est également préoccupé par l’absence d’informations sur la suite donnée aux 47 plaintes qui n’ont pas été acceptées par le Conseil indépendant des plaintes contre la police (art. 12, 13 et 16).

Hong Kong (Chine) devrait :

a) Ouvrir une enquête indépendante sur les allégations d’usage excessif de la force par la police et par les contre-manifestants pendant les manifestations du « mouvement des parapluies » ou « mouvement Occupy », en 2014;

b) Dûment poursuivre et juger les auteurs présumés des faits, y compris les agents publics qui ont été complices de ces actes ou y ont consenti, et, s’ils ont été reconnus coupables, les condamner et leur imposer des peines à la mesure de la gravité de leurs actes;

c) Accorder une réparation complète aux victimes, y compris une indemnisation juste et adéquate;

d) Rendre publiques les ordonnances générales de police et autres lignes directrices sur l’usage de la force, et veiller à ce qu’elles soient conformes aux normes internationales en la matière;

e) Renforcer les programmes de formation destinés aux agents des forces de l’ordre, portant sur l’interdiction absolue de la torture, les normes internationales relatives à l’usage de la force, ainsi que la responsabilité en cas d’usage excessif de la force.

Surveillance et inspection des lieux de détention

Le Comité a noté les renseignements donnés par Hong Kong (Chine), selon lesquels des agents de permanence ont été chargés d’inspecter quotidiennement les conditions de détention dans chaque centre de détention de la police, mais il est préoccupé par le manque d’informations concernant l’indépendance de ces agents dans l’accomplissement de leur mandat et leur obligation de rendre compte du résultat de leurs inspections. En ce qui concerne les juges de paix nommés par le Chef de l’exécutif pour visiter les établissements pénitentiaires, le Comité regrette de ne pas avoir reçu d’informations concernant l’efficacité de leurs recommandations. Hong Kong (Chine) n’a pas non plus donné d’informations sur les mécanismes de suivi existants dans les centres relevant de l’autorité du Département de l’immigration (art. 11, 13 et 16).

Hong Kong (Chine) devrait habiliter les juges de paix à surveiller et visiter tous les lieux de détention, ou mettre en place un organe indépendant mandaté pour procéder à des visites inopinées effectives dans tous les lieux de détention relevant de la police, de l’administration pénitentiaire et du Département de l’immigration. Les recommandations d’un tel organe devraient être publiées en temps opportun et de manière transparente, et les autorités de Hong Kong (Chine) devraient prendre des mesures pour y donner suite.

Placement à l’isolement et recours aux mesures disciplinaires

Nonobstant l’information donnée par la délégation, selon laquelle la durée moyenne du placement à l’isolement décidée par procédure disciplinaire était de 7,45 jours en 2014, le Comité demeure préoccupé par le fait que cette mesure peut être imposée jusqu’à un maximum de vingt-huit jours, en application du paragraphe 1 b) de l’article 63 du Règlement pénitentiaire. De plus, le Comité trouve inquiétant que la mesure d’« écartement de l’association avec d’autres détenus » figurant dans l’article 68B du Règlement pénitentiaire puisse être imposée pour des motifs aussi vagues que « le maintien de l’ordre ou de la discipline ou l’intérêt du détenu », d’abord pour une durée de soixante-douze heures au maximum, puis pour un mois au maximum, cette mesure pouvant être renouvelée indéfiniment de mois en mois. En ce qui concerne les mesures de contention mécanique, le Comité regrette de ne pas avoir reçu d’informations sur les modes de contention utilisés, ni sur la durée et la fréquence moyenne de leur utilisation, malgré sa demande expresse de précisions (art. 16).

Hong Kong (Chine) devrait :

a) Réduire le plus possible la durée du placement à l’isolement et n’appliquer ce rég ime qu’en dernier recours, pour une période aussi brève que possible, sous une stricte supervision et en ménageant la possibilité d’un contrôle juridictionnel comme le prévoient les normes internationales. Hong Kong (Chine) devrait établir des critères clairs et précis dans ses règlements s’agissant de la décision du placement à l’isolement, et y préciser les conduites répréhensibles, le type de régime et la durée maximale de l’application de ce régime;

b) Interdire le recours au placement à l’isolement des mineurs ainsi que des détenus présentant des déficiences intellectuelles ou psychosociales, des femmes enceintes, des mères de nourrissons et des femmes qui allaitent;

c) Veiller au respect du droit des détenus à une procédure régulière dont le droit à une audience devant un tiers et le droit de présenter un recours, lorsqu’ils sont soumis au placement à l’isolement;

d) Éviter l’usage de moyens de contention autant que faire se peut ou y recourir en dernier ressort, lorsque les autres mesures de contrôle portant moins atteinte à l’intégrité de la personne ont échoué, et pour le laps de temps le plus court possible;

e) Rassembler des données d’ensemble ventilées sur le recours à l’isolement cellulaire, y compris sur les tentatives de suicide et actes autodestructeurs qui y sont liés.

Traite des personnes et travail forcé des travailleurs domestiques

Le Comité salue la modification du Code des poursuites par laquelle le travail forcé figure désormais dans la définition de la traite des êtres humains (voir par. 5 d) ci-dessus), mais il note avec préoccupation que le cadre législatif n’a pas été modifié en conséquence. À ce sujet, il trouve préoccupants les nombreux signalements de cas d’exploitation de migrants engagés comme domestiques. Il regrette que Hong Kong (Chine) continue de maintenir des politiques d’immigration qui pourraient contribuer au travail forcé, dont l’obligation de vivre chez l’employeur et la « règle des deux semaines », en vertu de laquelle les migrants engagés comme domestiques sont tenus de quitter le territoire dans les deux semaines qui suivent l’expiration de leur contrat. Nonobstant la possibilité d’accorder l’immunité de poursuite aux immigrants illégaux dont il s’est avéré qu’ils étaient victimes de la traite, le Comité trouve préoccupant qu’une telle possibilité soit laissée à la discrétion de la police et des Départements de l’immigration et du travail, et que les victimes de la traite ou du travail forcé continuent d’être poursuivies pour séjour illégal (art. 2, 12, 13, 14 et 16).

Hong Kong (Chine) devrait :

a) Procéder aux modifications législatives voulues afin d’adopter la définition de la traite figurant dans le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée;

b) Abolir la « règle des deux semaines » et autoriser le logement ailleurs que chez l’employeur pour prévenir la torture et les mauvais traitements infligés aux migrants engagés comme domestiques;

c) Modifier la législation pour interdire les solutions financières liées à la servitude pour dettes avec les agences d’emploi et les sociétés financières, éliminer l’obligation de passer par l’intermédiaire d’agences d’emploi et réduire les tarifs excessifs;

d) Faire appliquer strictement le cadre législatif pertinent et ouvrir immédiatement des enquêtes approfondies, efficaces et impartiales sur les affaires de traite et de travail forcé et, lorsque des poursuites sont intentées et des condamnations prononcées, imposer des peines appropriées aux responsables de ces actes, dont les agences et les fonctionnaires impliqués;

e) Dispenser une formation spécialisée aux fonctionnaires directement confrontés à la traite des personnes afin qu’il s soient en mesure de détecter les victimes de cette pratique, en particulier parmi les femmes arrêtées pour prostitution ou violation des règles de l’immigration, et offrir immédiatement à ces victimes une assistance et des moyens de réadaptation;

f) Offrir un recours utile à toutes les victimes de traite et de travail forcé et veiller à ce qu’elles bénéficient rapidement d’un accompagnement psychologique adapté et de soins médicaux et à ce qu’elles aient accès à des prestations d’aide sociale, à un logement convenable et à un permis de travail, indépendamment de leur capacité de participer aux procédures judiciaires contre les auteurs de la traite;

g) Renforcer la coopération bilatérale, régionale et internationale pour prévenir la traite et le travail forcé, particulièrement avec les pays d’origine des migrants travaillant comme domestiques, afin d’éliminer de facto les contrats entraînant la servitude pour dettes, les accords de prêt agressifs et les tarifs excessifs pratiqués par les agences.

Remise des délinquants en fuite et transfèrement des condamnés

Le Comité prend note de la position de la délégation selon laquelle les négociations avec la Chine continentale sur les arrangements concernant la remise des délinquants en fuite et le transfèrement des condamnés sont d’ordre interne et que de tels arrangements ne peuvent être considérés comme des accords d’extradition relevant des articles 3 et 8 de la Convention. Le Comité considère cependant que Hong Kong (Chine) est tenue d’empêcher que les délinquants remis ou les condamnés transférés ne soient exposés au risque d’être soumis à la torture ou à des mauvais traitements lorsqu’ils sont renvoyés en Chine continentale ou transférés via Macao (Chine) (art. 2 et 3).

Le Comité prie instamment l’État partie de veiller à ce que tout arrangement sur la remise des délinquants en fuite et le transfèrement de condamnés de Hong Kong vers la Chine continentale ou via Macao (Chine) soit conforme aux obligations de la Convention et comporte des garanties juridiques suffisantes, des mécanismes judiciaires appropriés de contrôle et des arrangements de suivi après renvoi, afin de protéger les délinquants en fuite contre le risque d’être soumis à la torture ou à des mauvais traitements après leur remise ou leur transfèrement indirect. Hong Kong (Chine) ne devrait pas transférer de fugitifs vers la Chine continentale lorsqu’il y a des motifs sérieux de croire qu’ils risquent d’y être soumis à la torture ou à des mauvais traitements après leur remise ou leur transfèrement indirect via Macao (Chine).

Formation

Le Comité salue l’action menée par Hong Kong (Chine) pour former les professionnels de la santé et les agents des services de l’immigration au Protocole d’Istanbul (voir par. 5 c) ci-dessus), mais il regrette de ne pas avoir reçu d’informations sur la mise au point de lignes directrices concernant son utilisation dans la pratique. Il regrette aussi de ne pas avoir reçu de données concernant la proportion de personnes formées aux dispositions de la Convention et à la prévention de la torture (art. 10).

Hong Kong (Chine) devrait étendre la formation au Protocole d’Istanbul à tous les agents publics qui participent à la garde des personnes privées de liberté, et élaborer des lignes directrices ou des règlements obligeant le personnel à utiliser ce Protocole dans la pratique. Hong Kong (Chine) devrait également faire en sorte que la formation sur les dispositions de la Convention et du Protocole d’Istanbul soit régulièrement organisée et soit une obligation pour tous les fonctionnaires, qu’elle soit soutenue par des lignes directrices de mise en œuvre et qu’une méthode soit mise au point pour évaluer l’efficacité de ces programmes éducatifs et de formation.

Réparation et réadaptation

Le Comité regrette le manque d’informations sur le point de savoir si la loi permet de faire valoir le droit à la réadaptation et s’il existe un mécanisme concret permettant d’offrir de tels services aux victimes de la torture (art. 14).

Rappelant son observation générale n o  3 (2013) sur l’application de l’article 14 par les États parties, le Comité exhorte Hong Kong (Chine) à :

a) Prendre les mesures législatives et administratives voulues pour garantir aux victimes d’actes de torture ou de mauvais traitements le bénéfice de toutes les formes de réparation, y compris des mesures de restitution, d’indemnisation, de réadaptation, de satisfaction et les garanties de non-répétition;

b) Évaluer pleinement les besoins des victimes de la torture et faire en sorte que des services spécialisés de réadaptation complète soient disponibles et rapidement accessibles sans discrimination.

Transgenres et intersexués

Le Comité accueille avec satisfaction la mise en place d’un groupe de travail interdépartemental sur la reconnaissance du genre (voir par. 5 e) ci-dessus), mais il est préoccupé par les informations reçues selon lesquelles les transgenres doivent avoir subi une opération chirurgicale de modification du sexe, qui passe par l’ablation des organes génitaux, la stérilisation et la reconstruction génitale, pour obtenir la reconnaissance légale de leur identité sexuelle. Le Comité est aussi préoccupé par le fait que les enfants intersexués sont soumis à des interventions chirurgicales irréversibles ne présentant pas un caractère de nécessité, qui visent à déterminer leur sexe à un âge précoce. Il s’inquiète en outre des souffrances physiques et psychologiques à long terme provoquées par de telles pratiques (art. 10, 12, 14 et 16).

Hong Kong (Chine) devrait :

a) Prendre les mesures législatives, administratives et autres nécessaires pour garantir le respect de l’autonomie et de l’intégrité physique des transgenres et des intersexués, notamment en supprimant les conditions préalables abusives d’intervention chirurgicale à la reconnaissance de l’identité de genre des transgenres, telles que la stérilisation;

b) Garantir des services de conseils impartiaux à tous les enfants intersexués et à leurs parents, afin de les informer des conséquences des interventions chirurgicales qui ne présentent pas de caractère de nécessité ou d’urgence médicale, visant à déterminer le sexe de l’enfant, et de la possibilité de reporter toute décision sur tel traitement ou intervention chirurgicale jusqu’à ce que les intéressés puissent décider par eux-mêmes;

c) Garantir que le consentement plein, libre et éclairé soit garanti s’agissant des traitements médicaux et chirurgicaux appliqués aux intersexués et veiller à ce que tout traitement médical ou chirurgical irréversible qui ne présente aucun caractère d’urgence médicale soit proposé jusqu’à ce que l’enfant soit assez mûr pour participer à la décision et donner son consentement plein, libre et éclairé;

d) Accorder la réparation voulue aux intersexués pour les souffrances physiques et psychologiques qu’ils ont subies en raison de l’application de telles pratiques.

Procédure de suivi

Le Comité demande à Hong Kong (Chine) de lui faire parvenir d’ici au 9 décembre 2016 des renseignements sur la suite donnée aux recommandations figurant aux paragraphes 7 b), 9 et 13 du présent document. De même, Hong Kong (Chine) est invitée à informer le Comité des mesures qu’il prévoit de prendre pour mettre en œuvre, d’ici la soumission de son prochain rapport, tout ou partie des autres recommandations formulées dans les présentes observations finales.

Questions diverses

Hong Kong (Chine) est invitée à diffuser largement le rapport soumis au Comité ainsi que les présentes observations finales, dans les langues voulues, par le biais des sites Web officiels, des médias et des organisations non gouvernementales.

Hong Kong (Chine) est invitée à présenter son prochain rapport périodique, qui sera inclus dans le sixième rapport périodique de la Chine, le 9 décembre 2019 au plus tard.