Nations Unies

CAT/OP/MKD/1

Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

10 mai 2019

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Visite en ex-République yougoslave de Macédoine* menée du 23 au 29 avril 2017 : observations et recommandations adressées à l’État partie

Rapport établi par le Sous-Comité ** , ***

Table des matières

Page

I.Introduction3

A.Facilitation de la visite et coopération4

B.Représailles4

II.Torture et mauvais traitements5

III.Garde à vue5

A.Garanties fondamentales5

B.Conditions matérielles6

IV.Établissements pénitentiaires7

A.Soins de santé en prison7

B.Surpopulation9

C.Petite corruption9

D.Détention provisoire10

E.Détention des condamnés11

V.Détention des mineurs13

VI.Détention de migrants15

VII.Mécanisme national de prévention16

VIII.Recommandations finales18

Annexes

I.Government officials and other persons with whom the Subcommittee on Prevention of Torture met19

II.Places of deprivation of liberty visited by the Subcommittee21

III.Places of deprivation of liberty visited jointly by the national preventive mechanism and the Subcommittee22

I.Introduction

1.Conformément au mandat qui lui incombe en vertu du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après « le Protocole facultatif »), le Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci‑après « le Sous-Comité ») s’est rendu en ex-République yougoslave de Macédoine du 23 au 29 avril 2017.

2.La délégation du Sous-Comité était composée des membres suivants : Aisha Shujune Muhammad (chef de la délégation), Mari Amos, Sir Malcolm Evans et June Lopez.

3.Elle était assistée de deux spécialistes des droits de l’homme du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), de deux agents de sécurité et de quatre interprètes locaux.

4.L’État partie a adhéré à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants le 12 décembre 1994 et il a ratifié le Protocole facultatif le 13 février 2009. Le 11 avril 2011, il a désigné le Médiateur comme mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

5.Les principaux objectifs de la visite étaient les suivants : a) fournir des conseils et une assistance technique au mécanisme national de prévention comme prévu à l’article 11 du Protocole facultatif en vue de repérer les problèmes et les difficultés auxquels le mécanisme était confronté et d’y remédier, compte tenu des Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention (CAT/OP/12/5) ; et b) aider l’État partie à s’acquitter pleinement des obligations que lui impose le Protocole facultatif en renforçant sa capacité de protéger les personnes privées de liberté et de régler les problèmes liés aux établissements pénitentiaires et, en particulier, aux lieux de détention provisoire.

6.Le Sous-Comité a rencontré des fonctionnaires et d’autres parties prenantes (voir annexe I) et s’est rendu dans des lieux de détention (voir annexe II). Les réunions organisées avec les membres du mécanisme national de prévention lui ont permis d’examiner leur mandat et leurs méthodes de travail et de débattre des moyens de renforcer leur efficacité. Afin de se faire une meilleure idée de la façon dont le mécanisme s’acquittait concrètement de ses tâches, le Sous-Comité s’est rendu avec des membres de cet organe dans un lieu de privation de liberté choisi par celui-ci (voir annexe III). Cette visite a été conduite par des membres du mécanisme et les experts du Sous-Comité y ont participé en tant qu’observateurs.

7.Le présent rapport contient les observations, conclusions et recommandations du Sous-Comité et, conformément au paragraphe 2 de l’article 16 du Protocole facultatif, il demeurera confidentiel, à moins que les autorités macédoniennes ne décident de le rendre public.

8.Le Sous-Comité rappelle que les États qui décident de publier les rapports du Sous‑Comité peuvent demander au Fonds spécial créé en vertu de l’article 26 du Protocole facultatif de leur allouer une aide aux fins de l’application des recommandations du Sous‑Comité.

9.Le Sous-Comité tient à exprimer sa gratitude aux autorités macédoniennes pour le soutien et l’assistance qu’elles lui ont apportés dans la planification et la réalisation de sa visite.

10.Le Sous-Comité tient également à exprimer sa gratitude au Coordonnateur résident de l’ONU et au Représentant résident du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) pour l’assistance qu’ils lui ont fournie avant et pendant sa visite.

A.Facilitation de la visite et coopération

11.Le Sous-Comité tient à remercier les autorités macédoniennes pour leur coopération et leur contribution au bon déroulement de la visite. En particulier, il tient à remercier l’État partie pour les informations reçues avant, pendant et après la visite. Il lui sait gré de l’avoir laissé exercer effectivement son droit d’accéder sans restriction à tous les lieux qu’il souhaitait visiter, exception faite de certains véhicules, et de s’entretenir en privé avec les détenus dans tous les établissements où il s’est rendu en vertu de son mandat. L’autorisation d’accéder aux véhicules susmentionnés a été donnée ultérieurement mais elle a malheureusement été notifiée trop tard à la délégation pour que celle-ci puisse visiter ces véhicules.

12.Le Sous-Comité a constaté que nombre de dispositions avaient été prises dans les lieux de privation de liberté en préparation de la visite : les murs avaient été repeints, des ateliers avaient été créés, quelques lits superposés avaient été enlevés et des fleurs avaient été plantées. Le Sous-Comité apprécie les efforts déployés pour entretenir et rénover les centres de détention, mais il considère que ces préparatifs, lorsqu’ils précèdent de peu une visite, de même que le transfert de détenus d’une prison à l’autre et les propos incitant les détenus à se dire satisfaits de leur situation en détention sont de nature à déformer la réalité des conditions de détention. L’objectif des visites inopinées est de permettre au Sous‑Comité de voir comment le système fonctionne en temps normal.

13.À son arrivée dans certains établissements, les membres du Sous-Comité ont été soumis à ce qu’ils ont considéré comme des fouilles intrusives, notamment à un examen de leurs documents personnels et à des palpations. Le Sous-Comité a relevé que, dans au moins une prison, les membres du mécanisme national de prévention ont également été fouillés de la sorte. S’il est admis que les mesures de sécurité essentielles doivent être respectées dans l’intérêt de toutes les parties concernées, ces pratiques sont inappropriées, non conformes à l’esprit du Protocole facultatif et contraires aux privilèges et immunités dont bénéficient les experts de l’ONU en mission. De même, il importe que les personnes qui travaillent pour le mécanisme national de prévention ne soient en aucune manière limitées dans leurs travaux et qu’elles n’aient pas le sentiment qu’elles risquent d’être soumises à des formes de pression (CAT/C/57/4 et Corr.1). En outre, la liste des lieux de privation de liberté fournie par l’État partie était incomplète. Le Sous-Comité rappelle à celui-ci la définition large énoncée à l’article 4 du Protocole facultatif.

B.Représailles

14.Le Sous-Comité s’inquiète du risque de représailles auquel sont exposées les personnes avec lesquelles il s’est entretenu. Il tient à souligner que toute forme d’intimidation ou de représailles envers des personnes privées de liberté constitue une violation de l’obligation qui incombe à l’État partie de coopérer avec lui en vertu du Protocole facultatif. Conformément à l’article 15 du Protocole facultatif, le Sous-Comité demande aux autorités de faire en sorte que nul ne soit l’objet de représailles à la suite de la visite de sa délégation. À ce propos, il appelle l’attention des autorités macédoniennes sur sa politique concernant les représailles en lien avec son mandat d’inspection (CAT/OP/6/Rev.1).

15. Le Sous-Comité condamne catégoriquement tout acte de représailles. Il souligne que les personnes qui fournissent des informations à des institutions ou des organismes nationaux ou internationaux ou qui coopèrent avec eux ne doivent pas être punies ni pénalisées d’une quelconque manière. Le Sous-Comité demande à être tenu informé des mesures que l’État partie aura adoptées pour prévenir les représailles et enquêter sur les cas éventuels de représailles. En outre, il prie l’État partie de lui donner dans ses réponses au présent rapport des informations détaillées sur les mesures qu’il aura prises pour prévenir le risque de représailles que pourraient courir les personnes que la délégation a rencontrées ou auxquelles elle a rendu visite ou qui lui ont donné des renseignements pendant sa visite, et d’indiquer ce qui aura été fait pour enquêter sur les allégations de représailles.

II.Torture et mauvais traitements

16.Le Sous-Comité prend acte des renseignements fournis par l’État partie concernant sa politique de « tolérance zéro » de la torture et d’autres formes de mauvais traitements, mais il est préoccupé par les informations selon lesquelles les gardiens de prison infligeraient des mauvais traitements aux détenus et cibleraient principalement les personnes appartenant à un groupe minoritaire. D’après ces informations, les agents pénitentiaires feraient un usage excessif de la force ; les détenus qui n’obtempèrent pas aux ordres seraient roués de coups ; les détenus condamnés pour certains types d’infraction, notamment des infractions sexuelles, seraient systématiquement passés à tabac à leur arrivée à la prison ; et les gardiens de prison toléreraient tacitement la violence entre détenus. Le Sous-Comité est préoccupé par le fait, relevé par le Comité contre la torture, que peu d’enquêtes et de poursuites ont été ouvertes sur les actes de ce type (voir CAT/C/MKD/CO/3). Il est également préoccupé par le nombre limité de mécanismes permettant de signaler les cas de torture et de mauvais traitements et par le fait que les victimes craignent de subir des représailles de la part des gardiens de prison au cas où elles signaleraient ces actes.

17. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de réviser le Code pénal afin de le mettre en conformité avec la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants comme l’avait recommandé le Comité contre la torture (voir CAT/C/MKD/CO/3, par. 15). Il lui recommande également de mettre en place des mécanismes simples et efficaces permettant de signaler les cas de torture et de mauvais traitements, et de veiller à ce que toutes les allégations de torture et de mauvais traitements fassent rapidement l’objet d’enquêtes impartiales et à ce que les responsables soient traduits en justice comme le préconise l’article 12 de la Convention. Les détenus devraient être informés de l’existence de ces mécanismes et les individus qui portent plainte pour torture et mauvais traitements devraient être protégés contre d’éventuelles représailles physiques, disciplinaires ou administratives. Le Sous-Comité rappelle que la lutte contre l’impunité est un moyen important de prévenir la torture et les mauvais traitements.

III.Garde à vue

A.Garanties fondamentales

18.Le Sous-Comité note avec satisfaction qu’on ne lui a signalé aucun cas de personnes retenues en garde à vue pendant plus de vingt-quatre heures et qu’après avoir été présentées à un juge, les personnes placées en détention provisoire sont systématiquement transférées dans un autre lieu (et non ramenées au poste de police). Toutefois, bien que le droit d’informer un tiers de son arrestation, de bénéficier de l’assistance d’un conseil et d’être examiné par un médecin de son choix soit notifié aux personnes arrêtées, ces garanties ne sont pas toutes respectées dans la pratique.

19.Le Sous-Comité relève que, bien que les suspects soient apparemment informés de leur droit de se faire assister par un avocat dès leur arrestation, ils ne font généralement pas appel aux services d’un conseil, soit parce qu’ils n’en ont pas les moyens, soit parce qu’ils pensent que cela n’en vaut pas la peine. L’État partie a reconnu pendant la visite de la délégation que le système d’aide juridictionnelle gratuite (instauré par la loi relative à l’aide juridictionnelle gratuite, Journal officiel no 161/09 et no 185/11) n’était pas encore opérationnel. Les services de représentation en justice sont fournis uniquement par des avocats bénévoles (dont une liste est établie par le barreau), souvent inexpérimentés, qui tardent généralement beaucoup à venir au poste de police et, parfois, ne viennent tout simplement pas. Le Sous-Comité craint que cette situation ne renforce l’apparente tendance à favoriser le plaider-coupable et que cela n’amène la police et les tribunaux à accorder un poids excessif aux aveux.

20.Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que les personnes arrêtées ne sont pas systématiquement soumises à un examen médical à leur arrivée au poste de police et que les détenus ne voient un médecin que s’ils en font la demande ou lorsque la police constate que le suspect présente des séquelles appelant un examen médical. Il a relevé en outre que, dans un cas concret, la police n’avait pas informé les proches du suspect de son arrestation.

21. Le Sous-Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les détenus puissent faire appel aux services d’un avocat de leur choix dès leur arrestation et à ce que l’avocat en question puisse assister à l’interrogatoire ;

b) De rendre opérationnel le système d’aide juridictionnelle afin que tous les détenus bénéficient sans délai et dans des conditions d’égalité d’une représentation en justice efficace et de qualité ;

c) D’offrir des garanties juridiques satisfaisantes aux personnes placées en détention provisoire dans le cadre du plaider-coupable, afin de garantir la transparence de la procédure et de prévenir tout acte de violence et toute forme de contrainte ;

d) De dispenser une formation appropriée au personnel médical et judiciaire sur le Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul), y compris aux avocats commis par des organismes professionnels indépendants ;

e) De soumettre systématiquement les détenus à un examen médical lorsque cela est nécessaire, conformément au Protocole d’Istanbul ;

f) De faire en sorte que toutes les allégations ou plaintes portant sur des actes de torture et des mauvais traitements soient transmises aux autorités compétentes et fassent immédiatement l’objet d’une enquête impartiale et efficace comme préconisé à l’article 12 de la Convention.

B.Conditions matérielles

22.Le Sous-Comité relève que, dans la plupart des postes de police qu’il a visités, les conditions matérielles étaient relativement bonnes. Il est toutefois préoccupé par le fait que toutes les cellules de garde à vue qu’il a inspectées se trouvaient au sous-sol et qu’en conséquence certaines cellules n’avaient presque pas d’éclairage naturel, voire aucun, étaient mal ventilées et, dans certains cas, n’étaient pas chauffées. En outre, la délégation a été informée de certains cas dans lesquels les gardés à vue ne recevaient que peu de nourriture et d’eau.

23.Le Sous-Comité est gravement préoccupé par les deux cellules de garde à vue situées au sous-sol du poste de police de Kičevo, qui consistent dans un local sombre rénové mais dépourvu d’éclairage naturel (hormis de rares rayons de lumière passant à travers une plaque métallique perforée), ce qui fait que le bouton d’appel n’est pas visible. Il constate avec préoccupation que ces cellules ne sont pas chauffées, que les toilettes se trouvent deux étages plus haut et que les gardés à vue les partagent avec les policiers et que l’accès à la nourriture, à l’eau potable et aux articles d’hygiène y est limité. D’une manière générale, le Sous-Comité considère qu’il serait inhumain de détenir une personne dans l’une de ces cellules pour une durée qui ne soit pas extrêmement brève.

24. La délégation recommande que les cellules de poste de police de Kičevo soient immédiatement mises hors service. En outre, le Sous-Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour améliorer les conditions matérielles dans tous les locaux de la police, en se concentrant en particulier sur l’éclairage, la ventilation, le chauffage et l’accès aux sanitaires.

IV.Établissements pénitentiaires

A.Soins de santé en prison

25.Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que les registres médicaux de tous les établissements pénitentiaires qu’il a visités montraient que les détenus n’étaient pas systématiquement soumis à examen médical approfondi à leur arrivée et que, lorsqu’ils sollicitaient une consultation médicale, leur demande n’était pas nécessairement agréée. L’examen médical n’avait lieu qu’en cas de blessure grave ou manifeste, ou à la demande du détenu ou des autorités. Même dans des cas de ce type, il était arrivé, d’après des allégations reçues par le Sous-Comité, que le détenu n’ait pas été soigné parce qu’il n’y avait pas de personnel médical sur place ou que les gardiens avaient empêché le détenu de voir un médecin. Le Sous-Comité constate avec préoccupation que, de manière générale, les dossiers médicaux laissent à désirer, ceux-ci ne rendant pas compte de l’état de santé physique et psychique des détenus à leur arrivée dans l’établissement et de leur situation actuelle à cet égard. Par exemple, dans un établissement, un décès consigné dans le registre central n’avait pas été inscrit dans le dossier médical du détenu concerné. Si les registres ne contiennent pas de renseignements détaillés, les cas de torture ou de mauvais traitements risquent de ne pas être détectés.

26. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de garantir aux détenus la possibilité de contacter un médecin indépendant et de se faire examiner par lui dès que possible après leur arrestation ou leur transfert dans un centre de détention, et de mettre au point un système plus cohérent et plus complet d’enregistrement des données médicales, dans le plein respect de l’éthique et de la déontologie médicales. Il recommande également à l’État partie d’élaborer un formulaire type afin que tous les détenus subissent un examen médical complet à leur arrivée et qu’une synthèse de leurs antécédents médicaux soit établie, et de regrouper ce document avec les dossiers médicaux des établissements par où le détenu est passé avant son arrivée ou avec les dossiers du système central. Ce registre pourrait être incorporé dans la base de données médicales du système de soins de santé. Parmi les éléments qui devraient y figurer, on peut citer :

a) Les antécédents médicaux du détenu, y compris ses allégations éventuelles d’actes de violence, de torture ou de mauvais traitements récents ;

b) L’existence de douleurs ou de symptômes ;

c) Le résultat de l’examen clinique, notamment la description des éventuelles blessures constatées et un descriptif de la manière dont les blessures ont été infligées ;

d) Une mention indiquant si le corps du détenu a été examiné intégralement ou non ;

e) Les conclusions du professionnel de la santé concernant la cohérence de tous les éléments consignés.

27.Le Sous-Comité est préoccupé par le fait qu’en raison de l’insuffisance des ressources allouées, le personnel médical ne peut dispenser que des soins de santé primaires. Son travail consiste essentiellement à donner des analgésiques, des sédatifs ou des antidépresseurs, qui sont souvent prescrits à mauvais escient. La délégation a rarement vu d’autres types de médicaments dans les locaux qu’elle a visités et elle a constaté qu’il n’y avait que du matériel de base, qui souvent se résumait à un manomètre pour la mesure de la pression artérielle, un stéthoscope et des bandages. Dans un établissement, les examens médicaux se déroulaient sur une table au sous-sol du bâtiment, où l’accès à l’eau courante était limité et où le chauffage était insuffisant. Le Sous-Comité a constaté qu’il était très difficile pour la plupart des détenus de consulter un spécialiste et que cela dépendait généralement de la disponibilité du véhicule de l’établissement et de la capacité du détenu à payer ces services de sa poche.

28.Le Sous-Comité est préoccupé en outre par le fait que des traitements à la méthadone et des médicaments psychoactifs sont prescrits à tout va, alors que, dans la plupart des lieux de détention, le suivi psychiatrique est limité ou inexistant et qu’aucune prise en charge psychosociale n’est proposée parallèlement à ces traitements, ce qui parfois entraîne des décès par overdose de méthadone. Bien que des « éducateurs » soient employés dans les prisons, leur rôle et leurs compétences ne sont pas clairs et les détenus avec lesquels la délégation s’est entretenue ont dit n’avoir bénéficié d’aucune forme d’accompagnement, et encore moins d’un programme officiel de désintoxication.

29.Tout en se félicitant de la qualité des installations médicales dans la prison de Kumanovo, le Sous-Comité est préoccupé par le fait que, dans les autres établissements qu’il a visités, les locaux de l’infirmerie laissaient à désirer et étaient insalubres. Par exemple, l’infirmerie de l’établissement pénitentiaire d’Idrizovo, surnommée « la prison dans la prison », était surpeuplée, 120 personnes devant se partager 70 lits, en conséquence de quoi nombre de détenus dormaient par terre, alors que le sol était sale. Les toilettes empestaient l’urine, il n’y avait pas d’eau courante et aucun programme d’activités n’était prévu. Des détenus malades côtoyaient des détenus en bonne santé et les détenus atteints de maladies telles que la tuberculose ou porteurs du VIH ne pouvaient pas être isolés des autres si nécessaire.

30. Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que, d’une manière générale, les effectifs et les compétences du personnel médical sont insuffisants et que, bien que celui-ci ait dit avoir suivi divers cours de formation, notamment dans le domaine de la prise en charge des patients atteints de maladies contagieuses et des toxicomanes, il ne connaissait généralement pas le Protocole d’Istanbul. Le Sous-Comité relève que les professionnels de la santé travaillant dans les institutions pénales relèvent du Ministère de la justice et non du Ministère de la santé, ce qui selon lui est susceptible de limiter leur indépendance, de créer des conflits d’intérêts et de les décourager de signaler les blessures qui constituent manifestement des séquelles d’actes de torture ou de mauvais traitements. Dans une prison, un médecin a reconnu avoir été sommé de « laisser tomber » une affaire dans laquelle un détenu avait été sévèrement battu.

31. Le Sous-Comité recommande que, dans tous les lieux de privation de liberté, l’État partie :

a) Veille à ce que des soins médicaux, y compris des soins spécialisés, soient garantis et accessibles à tous les détenus qui en font la demande ;

b) Dote chaque lieu de détention de suffisamment de personnel médical et de fournitures médicales (produits pharmaceutiques et matériel) et améliore les conditions dans les services médicaux des établissements pénitentiaires, en particulier dans l’infirmerie de la prison d’ Idrizovo ;

c) Veille à ce que, en cas de nécessité, les détenus atteints de maladies contagieuses puissent être isolés des autres ;

d) Élabore des protocoles clairs pour la prescription de médicaments, fondés sur les normes pharmacologiques internationales ;

e) Place le personnel médical sous l’autorité du Ministère de la santé, lequel devrait être associé au suivi des questions liées à la santé dans les prisons et au recrutement des professionnels de la santé destinés à y travailler ;

f) Améliore la formation du personnel médical travaillant dans les lieux de détention, en particulier concernant le Protocole d’Istanbul et d’autres normes internationales pertinentes, et le sensibilise à l’obligation qui lui incombe de détecter et de signaler les séquelles d’actes de torture et de mauvais traitements ;

g) Veille à ce que les professionnels de la santé saisissent immédiatement les autorités compétentes lorsqu’ils soupçonnent que des actes de torture et des mauvais traitements ont été commis, afin qu’un examen indépendant puisse être effectué conformément au Protocole d’Istanbul ;

h) Mette en place des hôpitaux pénitentiaires, en particulier celui dont la création au sein de la prison de Skopje serait envisagée depuis 2007 ;

i) Adopte d’urgence des mesures afin de faire bénéficier les toxicomanes et les détenus atteints de troubles psychiatriques d’une prise en charge.

B.Surpopulation

32.Le Sous-Comité prend acte avec satisfaction de la stratégie adoptée par l’État partie pour tenter de remédier à la surpopulation carcérale. Il prend note en particulier de la stratégie en matière de probation de 2013 ainsi que de la loi de 2015 relative à la probation, qui a été élaborée avec l’assistance de l’Union européenne et prévoit l’acquisition de 300 bracelets électroniques. Il relève que de nouveaux établissements ont été construits ou sont en cours de construction à Skopje, Idrizovo, Bitola (début des travaux prévu en 2018), Tetovo (fin des travaux prévue en 2018) et Kumanovo (projet achevé). Il constate toutefois que l’application de la loi relative à la probation a été reportée à 2016 et que ce texte n’a pas encore été mis en œuvre. Il souligne que des efforts supplémentaires devraient être fournis pour remédier au grave problème de la surpopulation carcérale, qui sévit dans la plupart des prisons qu’il a visitées. Dans plusieurs établissements, certains détenus en attente de jugement étaient placés en cellule d’isolement en raison du manque de cellules ordinaires et plusieurs établissements étaient confrontés à une série de problèmes graves en raison de la surpopulation carcérale (voir par. 34 à 36 ci-après), parmi lesquels l’indisponibilité de cellules adéquates. En outre, dans certaines prisons, dont celle d’Idrizovo (quartiers 7 et 8), les cellules étaient pourvues de lits superposés triples très hauts, dont la troisième couchette était difficile d’accès. La délégation a été informée d’au moins un cas dans lequel un détenu s’était gravement blessé en tombant de la troisième couchette.

33. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de ne recourir à la détention qu’en dernier ressort. Il rappelle que la détention avant jugement doit reposer sur une évaluation au cas par cas déterminant qu’elle est raisonnable et nécessaire au regard de toutes les circonstances, par exemple pour éviter que l’intéressé ne prenne la fuite, ne modifie des preuves ou ne commette une nouvelle infraction . Il encourage vivement l’État partie à poursuivre sa stratégie en matière de probation et, en particulier, à mettre en œuvre la loi relative à la probation et appliquer plus souvent des mesures de substitution à la détention telles que la probation, la mise en liberté sous caution, la médiation, le travail d’intérêt général et les peines avec sursis. Les prévenus ne devraient pas être détenus dans des cellules d’isolement (voir par. 34 à 36 ci-après). En outre, le Sous-Comité recommande à l’État partie de faire un meilleur usage du parc pénitentiaire, la délégation ayant constaté que les détenus étaient mal répartis et, notamment, que certains étaient placés dans des cellules où les conditions étaient mauvaises alors que d’autres cellules plus appropriées ou adaptées étaient libres. Les lits superposés triples décrits précédemment ne devraient plus être utilisés.

C.Petite corruption

34.Le Sous-Comité prend note avec satisfaction des mesures prises pour combattre la corruption, notamment de la mise à pied d’agents pénitentiaires impliqués dans des trafics de drogues et de téléphones mobiles, mais il est préoccupé par les informations montrant que les détenus ne peuvent recevoir des produits de première nécessité (eau potable, nourriture et articles de toilette) et bénéficier de soins médicaux que s’ils donnent de l’argent aux membres du personnel pénitentiaire, y compris aux responsables de l’établissement. Dans pratiquement tous les lieux visités, le Sous-Comité a entendu dire que des privilèges (permissions de retour dans les foyers et autorisation de visites de proches) et des marchandises illicites (alcool et drogue) pouvaient être obtenus moyennant le versement de pots-de-vin. La délégation a constaté que la plupart des détenus dépendaient de leur famille pour se procurer des produits de première nécessité, y compris de la nourriture, ce qui manifestement encourageait ce type de pratique. Plusieurs détenus ont déclaré que, si l’on était disposé à payer entre 300 et 400 euros par mois, on pouvait avoir une vie plus confortable en prison. Cette affirmation semble être confirmée par les disparités constatées par la délégation pour ce qui est du confort, qui variait d’une cellule à l’autre d’une même prison, certaines cellules étant pourvues d’un réfrigérateur, d’appareils de chauffage, de télévisions, d’un accès au réseau télévisuel câblé et de divers objets personnels.

35. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que l’administration pénitentiaire réponde aux besoins élémentaires de tous les détenus dans tous les lieux de privation de liberté, et de fixer des règles claires et transparentes sur les privilèges, qui doivent être attribués sans discrimination. Il recommande à l’État partie de prendre des mesures pour mettre fin au trafic de drogues et d’alcool, notamment en versant un salaire adéquat aux agents pénitentiaires, et en veillant à ce que toutes les affaires de corruption fassent immédiatement l’objet d’enquêtes efficaces et à ce que les fonctionnaires concernés soient sanctionnés.

D.Détention provisoire

36.Le Comité est gravement préoccupé par la situation des personnes placées en détention provisoire. Dans presque tous les établissements qu’il a visités, les conditions de détention provisoire constituaient un traitement inhumain, portaient atteinte au principe de la présomption d’innocence et favorisaient une culture des aveux. Dans la prison de Skopje, où certaines cellules étaient surpeuplées, la délégation a remarqué ce qui suit : il n’y avait pas d’eau courante ; le taux d’humidité était beaucoup trop élevé ; les murs s’effritaient ; l’éclairage et l’aération étaient insuffisants ; les matelas et les draps étaient sales ; les cellules étaient infestées d’insectes ; les aliments étaient stockés à l’air libre ; les détenus avaient un accès limité aux buanderies ; l’hygiène laissait à désirer ; des douches de fortune avaient été installées par les détenus eux-mêmes en raison du nombre limité de douches disponibles ; et il n’y avait pas de salle à manger, ce qui faisait que les détenus devaient prendre leurs repas dans leur cellule, voire, pour certains, sur leur lit. Des problèmes similaires ont été constatés dans les prisons de Bitola et de Prilep, dont les cellules sont tellement exiguës (1,92 m sur 2 m, pour les cellules individuelles et doubles, et 3,1 m sur 1,9 m pour les cellules triples), que ce soit pour un, deux ou trois détenus, qu’elles ne devraient même pas être utilisées à des fins de détention. La plupart des détenus avaient des provisions et des articles personnels apportés par leur famille, ce que le Sous‑Comité a pu observer dans tous les lieux de détention.

37.Le Sous-Comité a constaté que les personnes en attente de jugement étaient souvent soumises à un régime carcéral plus pénible que celui des condamnés et que leurs conditions de détention étaient nettement plus mauvaises. Ces conditions sont d’autant plus préoccupantes que la durée de la détention provisoire est manifestement longue et qu’en vertu du régime carcéral qui leur est imposé, ces détenus passent vingt-trois heures en cellule (une heure de promenade seulement), ce qui est contraire à la loi de 2006 relative à l’exécution des peines, qui dispose que les détenus doivent pouvoir passer « au moins deux heures par jour à l’extérieur des locaux fermés ». De l’avis du Sous-Comité, ce régime est assimilable au placement à l’isolement et comporte un risque important de provoquer de graves troubles psychologiques. Dans au moins une prison, les détenus devaient également faire leur toilette de base, notamment se raser, pendant l’heure qu’ils passaient à l’extérieur de leur cellule.

38. Le Sous-Comité recommande à l’État partie :

a) De fermer immédiatement les cellules de détention provisoire des prisons de Bitola et de Prilep et de cesser d’utiliser les cellules de détention provisoire de la prison de Skopje, dans leur état actuel, pour y placer des détenus ;

b) De veiller à ce que les personnes placées en détention provisoire bénéficient de conditions de détention et d’un traitement adaptés à leur statut d’individus en attente de jugement, conformément au principe de la présomption d’innocence ;

c) De veiller à ce que, dans tous les lieux de privation de liberté, les besoins fondamentaux des détenus soient satisfaits, et notamment à ce qu’on leur donne une nourriture suffisante, de l’eau et des articles de toilette ;

d) De s’assurer que les détenus ne soient pas contraints de faire leur toilette de base, notamment de se raser, pendant les heures passées en dehors des cellules ;

e) De ne plus placer systématiquement les suspects en détention provisoire et d’examiner la possibilité d’appliquer des mesures de substitution (voir par. 30 et 31 ci-dessus).

39.Un autre sujet de préoccupation pour le Sous-Comité est la façon dont certains détenus en attente de jugement sont amenés au tribunal. Certains détenus se sont plaints de ce qu’ils avaient été transportés dans des véhicules blindés et d’autres moyens de transport inappropriés, les poignets menottés dans le dos, soulignant que la durée du trajet avait été excessivement longue et que, souvent, aucun aménagement raisonnable n’était prévu pour les détenus handicapés, ce qui constituait un traitement inhumain et dégradant.

40. Le Sous-Comité recommande que les détenus soient transportés avec humanité et uniquement au moyen de véhicules adaptés, dotés d’un éclairage et d’aménagements raisonnables pour les personnes handicapées, et suffisamment chauffés ou climatisés, selon les cas.

E.Détention des condamnés

41.Le Sous-Comité réaffirme ses préoccupations et renouvelle les recommandations formulées plus haut (voir par. 14 et 15) concernant les actes de torture et les mauvais traitements infligés dans les lieux de détention, et en particulier l’insuffisance, voire l’absence, de mécanismes de surveillance et de procédures permettant aux détenus de porter plainte, ainsi que l’absence de procédures permettant de signaler les mauvaises conditions matérielles dans les lieux de détention. Bien que la délégation ait vu de nombreuses boîtes aux lettres pour le dépôt des plaintes dans les prisons, le Sous-Comité relève avec inquiétude que l’installation de ces boîtes dépend fortement du bon vouloir des agents pénitentiaires, que le respect de la confidentialité est limité lorsque ces boîtes se trouvent dans une cellule ou qu’elles sont placées juste en face du bureau des gardiens, et que certains détenus ignorent qu’il existe un mécanisme de plainte ou doutent de la crédibilité de cette procédure car ils ne reçoivent apparemment jamais d’information sur la suite donnée à leurs plaintes. En outre, les entretiens que la délégation a eus avec les détenus ont fait clairement ressortir que certaines de leurs « plaintes » consistaient simplement dans des demandes d’information sur leur situation individuelle et que les intéressés ne sont pas parvenus à obtenir de réponse de l’administration pénitentiaire à ce sujet.

42. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de revoir l’actuelle procédure d’examen des plaintes afin d’en garantir la confidentialité et l’efficacité et de faire le nécessaire pour que tous les détenus soient informés de l’existence de procédures permettant de porter plainte sans avoir à craindre des représailles. Il renouvelle ses recommandations formulées précédemment concernant la torture et les mauvais traitements dans les lieux de détention.

43.Le Sous-Comité se réjouit de la fermeture de certaines cellules d’isolement, notamment dans la prison de Shtip, des bonnes conditions offertes dans les cellules de ce type à la prison de Struga et du fait que la durée du placement à l’isolement ne dépasse pas dix à quinze jours, ce qu’attestent les registres, mais il relève avec préoccupation qu’il arrive que des détenus soient placés à l’isolement pour infraction au règlement, y compris pour des infractions de gravité mineure, et qu’il n’y a souvent ni eau chaude, ni chauffage dans ces cellules. Dans au moins un cas, cette mesure avait été appliquée deux fois en peu de temps. Des détenus ont indiqué en outre qu’ils ne savaient pas qu’il existait une procédure permettant de contester une décision de placement à l’isolement.

44. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les conditions matérielles dans toutes les cellules d’isolement soient conformes aux normes internationales, notamment que ces cellules soient suffisamment chauffées et les détenus aient accès à l’eau chaude et, si tel n’est pas le cas, de prendre les mesures voulues pour que ces cellules ne soient plus utilisées. Le placement à l’isolement ne devrait être imposé qu’en dernier ressort, dans des cas exceptionnels, pour une durée aussi brève que possible et uniquement sur autorisation d’une autorité compétente. En outre, cette mesure devrait être susceptible de réexamen par un organe indépendant. L’État partie devrait veiller à ce que la mise à l’isolement reste une mesure exceptionnelle et à ce qu’elle ne soit jamais imposée pendant de longues périodes (plus de quinze jours d’affilée), notamment par le biais de placements successifs, séparés par quelques jours d’intervalle, et veiller à ce que les détenus puissent contester le bien-fondé d’une décision de mise à l’isolement dont ils font l’objet.

45.Le Sous-Comité a relevé qu’il existait des disparités plus ou moins importantes au sein des prisons et d’une prison à l’autre en ce qui concerne l’état des locaux ou des bâtiments et les conditions matérielles. Il a notamment constaté que, dans la prison d’Idrizovo, les conditions matérielles étaient meilleures dans le quartier des femmes que dans celui des hommes et que, bien que récent, l’établissement de Kumanovo présentait déjà des signes d’usure. Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que, dans la plupart des prisons visitées, l’accès à l’eau potable et à l’eau courante pour la douche posait problème (ce que confirmait la présence dans plusieurs établissements d’un nombre considérable de bouteilles d’eau en plastique) et le chauffage était insuffisant. Dans la prison de Skopje et la nouvelle prison de Kumanovo, des bouteilles en plastique étaient utilisées pour réchauffer de l’eau pendant la journée afin de lutter contre le froid. Le Sous-Comité a constaté que l’accès à des douches en bon état était très limité dans plusieurs prisons et que quelques détenus avaient installé eux-mêmes des douches de fortune au-dessus des toilettes et des éviers. L’hygiène était également un sujet de préoccupation dans certaines prisons, dont celle de Shtip, où l’administration ne distribuait plus de paquets contenant des articles d’hygiène aux détenus.

46.Le Sous-Comité relève avec préoccupation que la plupart des détenus interrogés se sont plaints de l’insuffisance et de la mauvaise qualité de la nourriture (celle-ci provenant souvent de boîtes de conserve dépourvues de date de péremption) fournie par l’administration pénitentiaire et du fait que les questions d’ordre médical ou religieux n’étaient que peu prises en considération par les personnes chargées des repas. Presque tous les détenus qui avaient de la famille dans les environs recevaient d’elle des vivres et d’autres provisions et, en conséquence, les détenus qui n’avaient pas de proches vivant dans la région ni de moyens financiers suffisants étaient nettement défavorisés par rapport aux autres. L’absence de dispositif de stockage hygiénique (la nourriture était posée sur des étagères aménagées un peu partout dans les cellules), notamment de moyens de réfrigération, était un motif de préoccupation car cela risquait d’attirer les rongeurs et d’avoir des incidences sur la santé. Selon les détenus, même dans les établissements pénitentiaires dotés de moyens de cuisiner des repas, il arrivait que les détenus ne reçoivent pas de nourriture et que les menus affichés dans l’établissement ne correspondent pas toujours aux repas qui étaient distribués. La prison de Kumanovo est le seul établissement où tous les détenus interrogés se sont dits satisfaits de la nourriture.

47. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour garantir que, dans toutes les prisons et tous les lieux de détention, y compris les nouvelles prisons (qui devraient être entretenues), les conditions matérielles soient conformes aux normes internationales, indépendamment du régime carcéral . L’État partie devrait aussi s’employer en priorité à améliorer l’accès à l’eau, à une nourriture suffisante du point de vue quantitatif et qualitatif et à des articles d’hygiène. Tous les besoins fondamentaux devraient être satisfaits par l’administration pénitentiaire.

48.Le Sous-Comité est préoccupé par le manque d’activités récréatives, les possibilités très limitées de travail et l’insuffisance des programmes de réadaptation sociale et de formation professionnelle dans l’ensemble du système pénitentiaire. Même dans les prisons où il existait des ateliers de formation dans certains domaines (menuiserie, métallurgie ou production de papier hygiénique), très peu de détenus participaient à ces activités, voire aucun. Le Sous-Comité est également préoccupé par le fait que certains détenus, en particulier ceux qui étaient soumis à un régime fermé, passaient vingt-deux ou vingt‑trois heures sur vingt-quatre dans leur cellule sans avoir rien à faire. Des détenus placés dans les quartiers fermés ont indiqué qu’ils n’avaient droit qu’à une heure par jour d’exercice physique en dehors des cellules, en violation des dispositions de la loi de 2006 relative à l’exécution des peines. Le Sous-Comité relève que si dans certains établissements (dont ceux de Kumanovo, Shtip, Bitola et Prelip), certains détenus avaient la possibilité de travailler dans la prison ou au sein d’une entreprise privée, souvent moyennant rémunération, certaines tâches effectuées en prison n’étaient pas rémunérées.

49. Étant donné qu’il est capital pour le bien-être physique et psychologique et la réinsertion des détenus que ceux-ci bénéficient d’un programme d’activités satisfaisant (fondé notamment sur le travail, l’éducation et le sport), le Sous-Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les détenus puissent passer une partie raisonnable de la journée, huit heures ou davantage, à l’extérieur des cellules ou des dortoirs, avec les autres détenus, et qu’ils mènent des activités constructives et variées quel que soit le régime auquel ils sont soumis . Le Sous-Comité recommande en outre que les détenus reçoivent une formation professionnelle et se voient offrir la possibilité de travailler, le but étant de maintenir ou d’accroître leur capacité de pourvoir à leurs besoins après leur remise en liberté.

50.La délégation a constaté que la répartition des détenus en fonction du régime (ouvert, semi-ouvert ou fermé) auquel ils étaient soumis manquait de transparence et ne résultait pas d’un examen objectif et que les détenus qui en faisaient le plus souvent les frais étaient manifestement ceux qui appartenaient à un groupe minoritaire et les étrangers. Cette question est cruciale car elle a des incidences directes sur les privilèges et les activités accessibles aux détenus. La délégation a également constaté que, dans nombre de prisons, y compris dans les cellules d’isolement, les registres n’étaient pas toujours très complets, qu’ils étaient difficiles à déchiffrer et qu’ils étaient souvent dispersés en différents endroits.

51.Le Sous-Comité recommande à l’État partie de mettre en place un système clair et transparent prévoyant qu’un examen objectif de la dangerosité du détenu soit effectué avant de lui attribuer un régime carcéral. Les registres devraient être simplifiés et harmonisés et les renseignements relatifs aux détenus devraient pouvoir être consultés dans une base centrale de données alimentée par des renseignements complets et de manière systématique.

V.Détention des mineurs

52.Le Sous-Comité se félicite de l’achèvement de la construction du centre de rééducation pour mineurs de Tetovo, qui a été créé au sein de la prison d’Ohrid en septembre 2015 et qui accueille deux catégories de détenus mineurs : ceux soumis au régime rééducatif en centre fermé et ceux condamnés pour une infraction. Les mineurs placés dans l’aile réservée à la première catégorie sont tous des garçons qui ont entre 14 et 18 ans et dont environ 80 % sont Roms. La délégation a constaté avec préoccupation qu’en dehors de l’existence de deux ailes distinctes, les deux régimes ne présentaient guère de différences. Le régime rééducatif est apparemment axé sur la correction plutôt que sur la réinsertion, la réadaptation et l’éducation, ce qui n’est manifestement pas conforme au paragraphe 1 de l’article 45 de la loi no 07-4101/1 du 24 octobre 2013 relative à la justice pour mineurs.

53.Le Sous-Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures afin que l’environnement dans l’aile réservée aux mineurs soumis au régime rééducatif ressemble davantage à celui d’un établissement de rééducation plutôt qu’à un environnement carcéral et, à cette fin, de proposer des loisirs et des activités adaptées aux mineurs et de doter le centre du matériel nécessaire. Des mesures devraient également être prises pour remédier à la surreprésentation des jeunes roms dans ce centre. Le Sous-Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures de substitution à la détention des mineurs, qui ne devrait être utilisée qu’en dernier ressort. Lorsque le placement en détention est une nécessité absolue, l’État partie devrait veiller à ce que chaque mineur bénéficie de possibilités de rééducation et de loisirs, dans des conditions d’égalité.

54.Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que, dans l’aile réservée au régime rééducatif, aucun des mineurs n’est tenu de suivre des cours, bien que plusieurs soient encore en âge d’être assujettis à l’obligation scolaire. Les deux régimes ne prévoient qu’un accès extrêmement limité − lorsqu’il y en a un − à des activités utiles telles que l’apprentissage scolaire, la formation professionnelle et le travail. À part jouer au football dans une petite cour sur laquelle donnent des immeubles résidentiels, ces mineurs passent le plus clair de leur temps à ne rien faire dans les dortoirs, à regarder la télévision ou à bavarder. En conséquence, nombre de mineurs dorment pendant la journée et, de ce fait, n’arrivent pas à se reposer la nuit. Le Sous-Comité est préoccupé par la prescription systématique de sédatifs (une combinaison de Diazepam et de Sanval) à ces mineurs, dont environ 50 % prennent ces médicaments trois fois par jour. Compte tenu de la fréquence de la prescription et du dosage quotidien de ces médicaments, le Sous-Comité estime que cette pratique pourrait être considérée comme un traitement inhumain.

55. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de faire en sorte qu’une large palette d’activités et un programme d’acquisition de compétences pratiques soient proposés aux mineurs quel que soit le régime auquel ils sont soumis − ce qui leur est aussi utile après leur remise en liberté − conformément aux Règles des Nations Unies pour la protection des mineurs privés de liberté (Règles de Beijing) et aux Principes directeurs des Nations Unies pour la prévention de la délinquance juvénile (Principes directeurs de Riyad). Ces mesures sont cruciales pour leur réinsertion et permettent de réduire considérablement le risque de récidive et de répondre à leurs besoins particuliers en matière de stimulation intellectuelle. Tout mineur d’âge scolaire jouit du droit à l’éducation et devrait être scolarisé hors de l’établissement pénitentiaire, dans une école ordinaire, dans la mesure du possible. L’administration de l’établissement devrait accorder une attention particulière à l’éducation des mineurs d’origine étrangère ou présentant des besoins particuliers d’ordre culturel ou ethnique. Un enseignement spécial devrait être dispensé aux mineurs illettrés ou ayant des difficultés d’apprentissage. Les mineurs qui ont dépassé l’âge de la scolarité obligatoire et qui souhaitent continuer leurs études devraient être autorisés et encouragés à le faire et avoir accès aux programmes appropriés d’enseignement. Une formation professionnelle devrait également leur être dispensée. Compte tenu du nombre élevé de mineurs d’origine rom placés dans l’établissement, une attention particulière devrait être accordée à ce groupe afin de favoriser son inclusion. Le Sous ‑Comité recommande à l’État partie de mettre immédiatement fin à la prescription inappropriée de médicaments psychoactifs et de remplacer ces traitements médicamenteux par des activités quotidiennes équilibrées .

56.Bien que les conditions matérielles dans l’aile réservée aux mineurs condamnés pour une infraction soient relativement décentes, le Sous-Comité demeure préoccupé par les différences notables qu’il a constatées dans l’aménagement des trois chambres qui étaient occupées au moment de sa visite. Ces disparités étaient probablement liées à la présence ou l’absence de soutien de la part des parents des intéressés et d’autres personnes extérieures à l’établissement, voire à un traitement préférentiel accordé à certains mineurs. En effet, l’une des chambres avait été rénovée peu de temps auparavant et son sol avait été refait, et elle était agréablement meublée et décorée avec des objets personnels, tandis que les deux autres chambres étaient nettement plus spartiates et ne présentaient que peu de touches personnelles.

57.Le Sous-Comité recommande à l’État partie d’autoriser la possession d’effets personnels en ce qu’elle constitue un élément fondamental du droit à la vie privée, qui est essentiel au bien-être psychologique du mineur.

58.Le Sous-Comité relève avec préoccupation qu’il n’existe pratiquement pas dans l’État partie de système d’aide sociale, notamment de programme de thérapie familiale, auquel les mineurs peuvent s’adresser après leur remise en liberté. Des services d’orientation sont ponctuellement fournis dans l’établissement, mais ces efforts sont vains si le mineur n’est plus suivi après sa sortie.

59. Le Sous-Comité recommande à l’État partie d’élaborer des stratégies appropriées prévoyant des mesures efficaces permettant de réinsérer les mineurs dans la société, l’objectif étant de prévenir la récidive et le retour à la délinquance. Il recommande également à l’État partie d’améliorer l’accompagnement des personnes privées de liberté et de garantir notamment que des services d’assistance sociale tels qu’une aide à l’autonomisation et des services d’orientation soient disponibles et coordonnés afin de favoriser la réinsertion des personnes concernées et d’éviter un retour en détention.

VI.Détention de migrants

60.Le Sous-Comité a constaté qu’en raison du nombre plus faible de migrants entrés sur le territoire de l’État partie depuis mars 2016, le centre d’accueil pour étrangers de Skopje, dénommé « Gazi Baba », le centre de transit temporaire « Vinojug » et le centre d’accueil du Service jésuite des réfugiés de Skopje étaient pratiquement vides lorsqu’il les a visités.

61.Le Sous-Comité est satisfait d’apprendre que des modifications sont actuellement apportées à la loi relative aux étrangers en vue de réduire la durée maximale de la détention des migrants en situation irrégulière. Il note toutefois avec préoccupation que, bien que le fondement juridique de la détention soit généralement l’établissement de l’identité, des migrants seraient détenus pour garantir leur participation en tant que témoins à des audiences auxquelles des trafiquants sont entendus par des juges.

62. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de ne placer des migrants en détention qu’en dernier ressort, après avoir établi un examen au cas par cas que cette mesure est strictement nécessaire, proportionnée, légitime et non arbitraire, en veillant à ce que sa durée soit aussi brève que possible (voir CAT/OP/ITA/1, par. 23 c)). La détention de ces personnes devrait avoir lieu dans un environnement qui ne rappelle pas la prison, doté du matériel nécessaire à la pratique d’activités récréatives, physiques et culturelles, et ces activités devraient être effectivement accessibles aux intéressés. Les migrants ne devraient pas être privés de liberté pour témoigner dans le cadre de procédures intentées contre des personnes soupçonnées d’infractions.

63.Le Sous-Comité prend note avec satisfaction des conditions régnant dans le centre d’accueil du Service jésuite des réfugiés de Skopje, structure ouverte qui accueille des migrants vulnérables. Bien qu’aucune plainte pour mauvais traitements n’ait été déposée, tous les migrants avec lesquels la délégation s’est entretenue se sont dits frustrés et désespérés de ne pas savoir quand leur situation pourrait être régularisée, ce qui fragilisait encore davantage leur santé mentale déjà précaire. Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que les migrants n’ont pas la possibilité de bénéficier de l’aide juridictionnelle ou d’autres formes de représentation en justice gérées par l’État, ce qui signifie que la fourniture de ce type de service dépend dans une trop large mesure de la société civile. Le Sous-Comité relève avec inquiétude que les migrants méconnaissent leur statut juridique et que certains risquent de ce fait de retomber sous la coupe de trafiquants.

64. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les migrants puissent solliciter une aide juridictionnelle et obtenir facilement des renseignements sur leur situation personnelle, dans une langue qu’ils comprennent. Ils devraient en outre être informés en bonne et due forme des possibilités de bénéficier d’une aide et des autres services à leur disposition.

65.Le Sous-Comité relève que, pendant sa visite, des travaux de rénovation de base étaient en cours au centre d’accueil « Gazi Baba » et que l’État partie a indiqué qu’il entendait fermer cet établissement une fois qu’un nouveau centre d’accueil aurait été construit. Dans l’état dans lequel il se trouvait alors, cet établissement n’était absolument pas adapté pour accueillir des migrants en raison des conditions matérielles déplorables qui y régnaient, de l’absence d’activités, de la taille exiguë des espaces de promenade et du fait que les migrants y étaient soumis à un régime fermé. Le Sous-Comité a été surpris de constater lors de sa visite qu’un seul migrant y était hébergé, mais qu’il était logé dans l’une des chambres les moins confortables, qui n’avait pas encore été rénovée.

66. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de ne pas placer de migrants et, a fortiori, de familles de migrants ou de mineurs non accompagnés, dans le centre «  Gazi Baba » dans son état actuel.

VII.Mécanisme national de prévention

67.Comme suite à la ratification en février 2009 du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, le Médiateur a été désigné comme mécanisme national de prévention en vertu de la loi no 07-5829/1 portant ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, nomination qui a ensuite donné lieu à la création au sein du Bureau du Médiateur du service du mécanisme national de prévention. Le Sous-Comité relève avec satisfaction que le mécanisme effectue régulièrement des visites, souvent inopinées, dans les lieux de détention et qu’il a publié quelques rapports dans lesquels il a adressé aux autorités compétentes des recommandations visant à améliorer la situation dans les lieux visités.

68.Le Sous-Comité prend acte de l’excellent travail accompli par le mécanisme malgré l’insuffisance des ressources dont il dispose, qui restreint sa marge de manœuvre et nuit à son bon fonctionnement. Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que la désignation du Médiateur en tant que mécanisme national de prévention ne s’est pas accompagnée de mesures visant à lui affecter suffisamment de ressources supplémentaires, notamment humaines, ce qui est contraire au paragraphe 3 de l’article 18 du Protocole facultatif. Un seul fonctionnaire permanent est employé pour accomplir les tâches afférentes à ce mandat. Comme l’a reconnu le mécanisme lui-même, le manque de ressources l’empêche de s’acquitter efficacement de sa mission.

69.Le Sous-Comité relève que le mécanisme tire profit de ses relations avec des donateurs internationaux, qui l’ont aidé à renforcer ses capacités, en particulier pendant les périodes où il devait faire face à un afflux de migrants. Il relève également que le mécanisme fait régulièrement participer des acteurs de la société civile et des experts à ses visites et ses activités. Tout en se réjouissant de cette collaboration, le Sous-Comité craint que l’autonomie du mécanisme ne soit compromise si l’efficacité de son fonctionnement est tributaire du soutien de donateurs internationaux.

70. Le Sous-Comité recommande à l’État partie d’allouer, à titre prioritaire et en consultation avec le mécanisme national de prévention, les ressources financières dont celui-ci a besoin comme le prévoient le paragraphe 3 de l’article 18 du Protocole facultatif, les directives du Sous-Comité concernant ces mécanismes (voir CAT/OP/12/5, par. 11) et la grille d’évaluation des mécanismes nationaux de prévention . Le Sous-Comité recommande qu’une ligne budgétaire spécifique soit créée à cet effet dans le budget annuel national (voir CAT/C/57/4, annexe, par. 12).

71. Le Sous-Comité rappelle à l’État partie que le mécanisme national de prévention devrait avoir son propre secrétariat et son propre personnel et qu’il devrait pouvoir faire appel aux services d’experts externes lorsque certaines compétences font défaut en interne. Il recommande à l’État partie de prendre des mesures pour organiser des formations à l’intention des membres du mécanisme. Ces formations devraient porter sur les techniques d’entretien, les procédures de visite et les compétences nécessaires pour détecter les séquelles et les risques de torture et de mauvais traitements ainsi que sur le suivi de l’application des recommandations et la mise au point de méthodes de travail et d’une marche à suivre pendant les visites qui permettent de détecter les problèmes institutionnels et systémiques, en particulier ceux touchant les groupes ou les minorités victimes de discrimination. En outre, le mécanisme devrait continuer de renforcer ses capacités en intensifiant sa coopération avec le Sous-Comité et en collaborant avec d’autres mécanismes nationaux de prévention et des réseaux de mécanismes, en particulier le réseau de mécanismes nationaux de prévention de l’Europe du Sud-Est.

72.Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que, malgré les nombreuses recommandations adressées à l’État partie par le mécanisme national de prévention, peu de mesures ont été prises pour y donner suite. Il relève qu’il n’existe pas de procédure écrite ni de cadre institutionnel pour la présentation aux organes publics des recommandations formulées par le mécanisme à l’issue de ses visites et le suivi de leur mise en œuvre.

73. Le Sous-Comité recommande aux autorités publiques compétentes de rencontrer directement le mécanisme national de prévention, à titre de priorité, afin de débattre de l’application de ses recommandations, comme prévu à l’article 22 du Protocole facultatif. Il recommande aussi que l’État partie et le mécanisme national de prévention nouent un véritable dialogue et soient constamment en contact afin de donner suite aux recommandations du mécanisme. En particulier, il encourage l’État partie à mettre en place, de concert avec le mécanisme, un cadre institutionnel pour l’examen et le suivi des rapports de visite du mécanisme.

74.Il est ressorti des réunions que le Sous-Comité a eues avec les autorités compétentes et des visites qu’il a effectuées dans les lieux de détention que le mécanisme national de prévention était méconnu. Le Sous-Comité considère que les activités de prévention du mécanisme pourraient être renforcées si des activités de sensibilisation à son mandat et à ses travaux étaient menées, et que les quelques affiches aperçues dans certains des lieux de détention qu’il a visités ne suffisent pas à cet égard. En particulier, le Sous-Comité relève que le mécanisme ne constitue pas une unité administrative à part entière au sein du Bureau du Médiateur, contrairement à ce que prévoit la loi relative au Médiateur. De plus, le public devrait être plus largement informé de la publication des rapports du mécanisme et de la suite qui a été donnée à ses recommandations.

75. Le Sous-Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que le mécanisme soit reconnu en tant qu’élément essentiel du système national de prévention de la torture et des mauvais traitements ;

b) De s’employer à mieux faire connaître l’action du mécanisme, notamment en organisant des campagnes de sensibilisation et d’autres activités de promotion, en particulier en élaborant des supports d’information, rédigés en plusieurs langues, sur le mandat et les activités du mécanisme national de prévention, et en les diffusant auprès des personnes privées de liberté, des organes publics, des organisations de la société civile, des avocats, des membres de l’appareil judiciaire et du grand public ;

c) De faciliter la publication de tous les rapports à venir du mécanisme national de prévention, y compris les rapports annuels soumis au Sous-Comité, compte tenu de l’article 23 du Protocole facultatif et du paragraphe 29 des d irectives concernant les mécanismes nationaux de prévention (CAT/OP/12/5).

VIII.Recommandations finales

76.Le Sous-Comité considère que sa visite et le présent rapport marquent le début d’un dialogue constructif avec les autorités macédoniennes. Il est disposé à aider l’ex‑République yougoslave de Macédoine, dans la mesure de ses moyens, à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu du Protocole facultatif, en particulier en lui fournissant une assistance technique et des conseils, afin d’atteindre leur objectif commun, qui est de prévenir la torture et les mauvais traitements dans les lieux de privation de liberté. En particulier, il est prêt à aider l’État partie à donner suite à la remarque d’ordre général du Sous-Comité, qui a constaté un décalage fréquent entre la loi et son application ou sa mise en œuvre, aux fins de la prévention de la torture.

77.Le Sous-Comité souligne que sa visite offre aux autorités macédoniennes une occasion idéale de montrer qu’elles sont disposées et prêtes à s’acquitter des obligations qui leur incombent en vertu du Protocole facultatif.

78.Le Sous-Comité rappelle que la prévention de la torture constitue une obligation permanente et de large portée revenant à l’État partie. Il prie les autorités macédoniennes de le tenir informé de tout changement d’ordre législatif ou politique, ou de tout autre fait nouveau pertinent concernant le mécanisme national de prévention, afin qu’il soit en mesure de continuer à l’aider à s’acquitter des obligations que lui impose le Protocole facultatif.

79.Le présent rapport demeurera confidentiel jusqu’à ce que les autorités de l’État partie décident de le rendre public, conformément au paragraphe 2 de l’article 16 du Protocole facultatif.

80.Le Sous-Comité tient à appeler l’attention de l’État partie sur le Fonds spécial créé par l’article 26 du Protocole facultatif. Les recommandations formulées par le Sous-Comité dans ses rapports de visite qui ont été rendus publics peuvent servir de base pour une demande de financement de projets spécifiques auprès du Fonds spécial.

81. Le Sous-Comité recommande à l’État partie de faire distribuer le présent rapport à tous les départements et organes publics concernés. En outre, il recommande à l’État partie de rendre public le présent rapport comme le prévoit le paragraphe 2 de l’article 16 du Protocole facultatif, considérant que cela constitue en soi une mesure de prévention, et souhaite être informé de la décision que prendra l’État partie à cet égard.

82. Le Sous-Comité prie l’État de lui fournir une réponse dans un délai de six mois à compter de la date de transmission du présent rapport afin de lui rendre pleinement compte des mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations, et de lui communiquer une feuille de route et un calendrier pour l’application des recommandations restées en suspens.

Annexes

[Anglais seulement]

Annex I

Government officials and other persons with whom the Subcommittee on Prevention of Torture met

A.National authorities

Ministry of Defence

Mr. Panche Stefanovski, Advisor for ESDP Cooperation at the Department for International Cooperation

Ministry of Foreign Affairs

Ms. Elena Kuzmanovska, State Secretary

Mr. Igor Djundev, Director for Multilateral Relations

Ms. Svetlana Geleva, Deputy Director for Multilateral Relations

Ms. Elena Bodeva, Desk Officer/Second Secretary at the Directorate for Multilateral Relations (governmental focal point)

Ministry of the Interior

Mr. Agim Nuhiu, Minister of Interior of the Republic of Macedonia

Mr. Jordan Lamanovski, Assistant Minister for Public Relations

Ms. Ljubica Jakimovska, State Counsellor, Cabinet of the Minister

Ms. Merita Shehi, Counsellor, Cabinet of the Minister

Mr. Igor Radeski, Senior Counsellor for Multilateral Affairs, Sector for International Cooperation

Mr. Sashko Gerasimov, Head, Sector for Crime Scene Investigations, Department for Internal Control, Criminal Investigations and Professional Standards

Mr. Nikola Mirchevski, Head, Sector for Border Operations

Ms. Vesna Isajlovska, Head, Unit for Normative and Legal Affairs, Sector for Legal Affairs

Mr. Sashko Kocev, Head, IPA Sector

Ms. Zhaklina Prosaroska, Senior Police Counsellor, Unit for Strategic Planning, Standards and Quality Control

Ms. Danica Dimitrovska, Chief Inspector, Sector for General Police Affairs, Uniformed Police Department

Ministry of Health

Mr. Nasuf Ipçja, State Secretary

Dr. Nikica Panova, Deputy Head, Sector for Secondary and Tertiary Healthcare and Professional Education of the Medical Staff

Ministry of Justice/Directorate for Execution of Sanctions

Ms. Lidija Gavriloska, Director, Directorate for the Execution of Sanctions (MoJ)

Ms. Ana Pletvarec, Counsellor, Directorate for the Execution of Sanctions (MoJ)

Ms. Tanja Kikerekova, Head, Unit for Human Rights

Ministry of Labour and Social Policy

Mr. Gjoko Velkovski, Head, Unit for Internal Audit

Ms. Elena Grozdanova, State Counsellor for Equal Opportunities

Ms. Sofija Spasovska, Deputy Head, Department for Social Protection and Social Policy

Ms. Lidija Shterjov, Department for Social Protection and Social Policy

Ms. Nahida Zekirova, Unit for the Implementation of the Strategy for the Roma

B.National preventive mechanism

Ms. Slavica Dimitrievska, State Counsellor

Ms. Snežana Teodosievska-Jordanoska, State Counsellor (acting Head, national preventive mechanism)

Ms. Irina Aceska, Legal Officer

Mr. Aleksandar Trenkoski, Legal Officer,

Ms. Merita Aliu-Alili, Counsellor

Ms. Vaska Bajramovska-Mustafa, Deputy Ombudsman

C.Civil society

Legis

Macedonian Young Lawyers Association (MYLA)

Macedonian Helsinki Committee

Dr. Vladimir Ortakovski

D.International organizations

Ms. Sonja Bozinovska Petrusevska, Head of Office, and Ms. Ivona Zakoska, International Organization for Migration

Ms. Silva Pesic, OHCHR

Ms. Louisa Vinton, United Nations Resident Coordinator/UNDP Resident Representative

Ms. Valentina Ancevska, Research and Liaison Officer, United Nations Office on Drugs and Crime

Ms. Sonja Tanevska, Assistant Representative, United Nations Population Fund

Mr. Dejan Kladarin, Senior Protection Officer, Office of the United Nations High Commissioner for Refugees

Ms. Elspeth Erickson, Deputy Representative, United Nations Children’s Fund

E.Other organizations

Council of Europe

Organization for Security and Cooperation in Europe

European Union

Annex II

Places of deprivation of liberty visited by the Subcommittee

Bitola Prison

Idrizovo Prison

Kumanovo Prison

Ohrid Prison

Shtip Prison

Skopje reception centre for foreigners “Gazi Bab”

Struga Prison

Prilep Prison

Tetovo educational and correctional institution, Ohrid

Tetovo Prison

Temporary transit centre Vinojug

Kichevo police station

Bit Pazar police station

Gevgelija police station

Skopje police station

Jesuit Refugee Service safe house, Skopje

Annex III

Places of deprivation of liberty visited jointly by the national preventive mechanism and the Subcommittee

Skopje Prison