NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/CAF/Q/2/Add.123 juin 2006

Original: FRANÇAIS

COMITE DES DROITS DE L’HOMME

Quatre-vingt-septième session

10-28 juillet 2006

LISTE DES POINTS A TRAITER A L’OCCASION DE L’EXAMEN DU DEUXIEME RAPPORT PERIODIQUE DE LA REPUBLIQUE CENTRAFRICAINE (CCPR/IC/CAF/2004/2)

REPONSES AUX QUESTIONS

1.Le Pacte a été consacré dans le préambule de la Constitution du 27 décembre 2004. Il a donc acquis une valeur supra légale, c’est-à-dire constitutionnelle. Cependant, il n’a pas encore été invoqué devant les tribunaux ou les autorités administratives, à défaut de plaintes individuelles.

Au lendemain du 15 Mars 2003, date du sursaut patriotique, les autorités judiciaires notamment le Parquet près le Tribunal de Grande Instance de Bangui, avaient ouvert une enquête judiciaire aux fins de mener une évaluation exhaustive des violations massives des droits de l’homme et du droit internationale humanitaire commises courant 2002-2003. Le résultat de cette enquête qui a été réalisée grâce à l’appui du Système des Nations Unies (PNUD) a permis aux autorités exécutives la saisine de la Cour Pénale Internationale. Très récemment, la Cour de Cassation Centrafricaine, saisie de la question a décidé du renvoi des présumés auteurs, coauteurs et complices devant la Cour Pénale Internationale

Le Dialogue National de 2003 a effectivement adopté une recommandation forte sur la création d’une Commission vérité et réconciliation et d’un fonds d’indemnisation des victimes. La mise en œuvre de cette recommandation qui était confiée à la Vice-Présidence de la République sous la Transition, vient d’être dévolue au Conseil de la Médiation. Le Responsable de cette Institution n’est autre que l’Ancien Vice-Président de la République. La Loi relative à cette structure a été adoptée par l’Assemblée nationale au mois de Mai 2006. Le gouvernement est toujours à la recherche des fonds nécessaire pour la mise en œuvre de la recommandation relative à la Commission Vérité et Réconciliation et au fonds d’indemnisation des victimes.

Aussi, un appui de la communauté internationale est- il hautement souhaité.

GE.06-42820

3 et 4.Nombreuses ont été les procédures judiciaires déclenchées, soit par suite des plaintes individuelles soit d’office par les autorités judiciaires, à l’encontre des auteurs des violations des droits de l’homme (cf. statistique en annexe). Ces procédures ont aussi abouti à diverses condamnations aux peines pécuniaires ou de privation de liberté.

Malheureusement, la plupart des coupables restent démunis et ne peuvent par conséquent répondre positivement aux condamnations pécuniaires dont ils sont coupables. L’atteinte à la vie et à l’intégrité physique constitue des crimes graves au regard de la législation pénale en vigueur. Les auteurs de telles violations sont poursuivis devant la Cour Criminelle qui se réunit deux fois par an en session ordinaire. Cette juridiction est composée des Magistrats professionnels et des Jurés qui sont les représentants de la population.

Egalité entre hommes et femmes, lutte contre la discrimination (art. 3 et 26).

5.Les dispositions du Code de la Famille relatives à l’autorité parentale, le choix de la résidence des époux et la polygamie sont actuellement en discussion. Toutefois, l’autorité parentale, le choix de la résidence des époux appartiennent au mari qui est le Chef de la famille. L’épouse peut cependant exercer ces droits en cas d’absence du mari ou sur autorisation expresse du Juge, en ce qui concerne le choix de la résidence dans l’intérêt de la famille (art. 254 et 255 du Code de la famille).

6.Il n’existe pas une disposition spéciale visant à garantir une représentation équitable des femmes dans la vie politique. Toutefois dans la pratique le Gouvernement s’efforce de réserver un quota relatif à la participation des femmes dans les affaires publiques et politiques au regard du principe d’égalité entre l’homme et la femme consacré dans les instruments internationaux ratifiés par la RCA et intégrés dans la Constitution du 27 Décembre 2004 (art. 5).

Conscient du rôle important que joue la femme dans le processus du développement économique et social du pays, la République Centrafricaine a adopté en 1989 une politique nationale de promotion de la femme qui a été ensuite révisée en 1999.

En Novembre 2005, les nouvelles autorités issues des élections démocratiques de Mars et Mai 2005, ont adopté, au regard de l’insuffisance des résultats de cette politique de promotion de la femme, une Politique Nationale de Promotion de l’Egalité et de l’Equité de Genre. Cette politique est le fruit des connaissances acquises depuis l’adhésion du pays au principe de l’égalité comme un des piliers des actions à mener pour un développement humain durable.

En effet, malgré les progrès importants enregistrés au plan législatif dans le cadre de l’engagement pour conférer des droits égaux à l’homme et à la femme, nombreuses sont encore les centrafricaines qui, plus que les hommes, méconnaissent leurs droits et devoirs. Handicapées par le poids des traditions, elles souffrent encore de violences, de discriminations et de marginalisation par rapport aux hommes.

Pour corriger cette situation, garantir les droits fondamentaux de chacun et promouvoir le bien être individuel et collectif, le Gouvernement Centrafricain a opté pour une nouvelle stratégie visant la réduction des disparités entre les hommes et les femmes. Il s’agit de la promotion de l’Egalité et de l’Equité de Genre. Il faut néanmoins noter le peu d’intérêt des femmes pour les questions politiques en dépit des actions du Gouvernement et des ONG féminines dans ce domaine.

On peut compter actuellement la présence des femmes dans le gouvernement(2), à l’Assemblée Nationale (11). Dans les cabinets de la Présidence et de la Primature, les femmes sont aussi à l’honneur. Le Comité de Suivi des Actes du Dialogue National qui est un organe de référence est dirigé par une femme, sans oublier que la direction de cabinet du Premier Ministre est dirigée également par une femme, ayant rang et prérogatives de Ministre.

Droit à la vie et interdiction de la torture (art. 6 et 7)

7.Les crimes sanctionnés par la peine capitale prévus dans le nouveau Code Pénal sont :

- Tous les crimes relevant du Statut de Rome (génocide, crimes de guerre, crimes contre l’humanité) ;

- L’atteinte à la vie : assassinat, meurtre, empoisonnement, parricide, infanticide, terrorisme.

La question de l’abolition de la peine de mort est encore en discussion. Les opinions y relatives sont très diverses et mitigées. La majorité de la population s’oppose à cette abolition en raison du taux élevé de criminalité, conséquence directe des multiples crises qu’a connues le pays et de la création des milices dotées d’armes par le régime défunt sans oublier que le pays est entouré par plusieurs Etats en conflits armés.

8-10.Le Parquet de Bangui a entrepris, en l’absence des plaintes des parents des victimes, des poursuites judiciaires systématiques avec arrestation et détention des auteurs d’exécutions sommaires et extrajudiciaires exerçant à l’Office Central de Répression du Banditisme (OCRB).

Cette mesure a visé également tous les agents des forces de défense et de sécurité coupables de telles pratiques. Les résultats obtenus sont encourageants. En effet, depuis fin 2005 jusqu’à ce jour, aucun cas d’exécution sommaire et extrajudiciaire n’a été enregistré.

La même procédure a été employée pour les cas de torture.

Sécurité de la personne et droit de ne pas faire l’objet d’une détention arbitraire (art. 9).

9.Par manque de moyens adéquats de travail, les Services judiciaires de la RCA en général et de ceux de Bangui en particulier, éprouvent des difficultés réelles quant à l’établissement des statistiques criminelles. Cependant, au niveau de Bangui, et ce depuis Janvier 2006, un effort remarquable a été réalisé en cette matière. Ainsi de Janvier à Avril 2006, nous avons enregistré 224 condamnations prononcées par le tribunal correctionnel pour diverses infractions commises.

Au niveau du Tribunal Militaire Permanent, de 2003 à 2005, 3 sessions ont été tenues. Il en résulte 190 condamnations infligées aux éléments des forces de défense et de sécurité pour les infractions d’assassinat, meurtres, coups mortels, viols, coups et blessures volontaires, arrestations arbitraires, destruction de la carte nationale d’identité et autres crimes et délits.

Pour l’année 2006, une session avec 32 affaires inscrites au rôle est prévue pour la période allant du 15 Juin au 17 Juillet 2006.

10. En complément des éléments de réponse déjà fournis au point 14 du document CCPR/C/79/L/CAF du 03 Septembre 2003 du Comité, le Gouvernement a adopté en Novembre 2005 un document de Politique Nationale de Promotion de l’Egalité et de l’Equité de Genre dont les objectifs sont entre autres la promotion de la participation des femmes au développement du pays, à titre de décideurs, sur un même pied d’égalité avec les hommes ; la réduction des inégalités entre les femmes et les hommes quant à l’accès aux ressources et aux bénéfices du développement, et au contrôle de ces mêmes ressources et bénéfices ; la mise en place des mesures spécifiques en faveur de certaines catégories de femmes avec des objectifs bien ciblés afin de réduire les inégalités constatées; l’éradication de la tolérance individuelle et collective des violences à l’égard des femmes ; l’appui aux femmes et filles dans la promotion, la protection et la pleine jouissance de leurs droits fondamentaux…

Le Gouvernement vient également de décider de la révision du Plan d’Action pour la lutte contre les pratiques néfastes et les violences à l’égard des femmes et des filles en Centrafrique qui découle de la Politique Nationale de promotion de la femme adoptée en 1999.

A propos des statistiques sur le pourcentage des femmes et filles excisées, les 36% de l’année 2000 ont connu une baisse sinon une stagnation suite aux campagnes de sensibilisation menées aussi bien par le Gouvernement que par les ONG féminines et de défense des droits de l’homme, et essentiellement axées sur les graves conséquences de cette pratique néfaste sur la vie des victimes. C’est pour avoir une meilleure lisibilité des résultats de ces différentes actions menées que le Gouvernement, en partenariat avec le PNUD, a commis une nouvelle enquête à indicateurs multiples (MICS : Multi Indicator Survey), la 3ème après celle de 1994 et 2000. L’équipe des enquêteurs est actuellement à pied d’œuvre.

Toutefois, et en attendant les conclusions de cette enquête, on relève parmi les femmes et filles excisées que les groupes ethniques les plus touchés sont par ordre :

les BANDA (83,9%)

les MANDJA (71%)

les HAOUSSA (42%)

les SARA (35,8%)

Les GBAYA (31,7%).

Cependant cette pratique (excision) reste un phénomène presque marginal au niveau des autres groupes ethniques comme les NGBAKA-BANTOU (5,6%) ; les ZANDE-NZAKARA (3,9%), les MBUM (3,1%) et les YAKOMA-SANGO (3%). Elle est nulle chez les autres groupes ethniques.

12.Le texte du projet du nouveau Code Pénal qui prévoit la notion de « Travaux les plus pénibles » est l’article 25 au lieu de l’article 27 comme mentionné dans le questionnaire du Comité. Il s’agit d’une erreur qui s’est glissée dans le texte et qui est contraire aux pertinentes dispositions de l’article 7 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques. Par conséquent, nous prenons l’engagement d’apporter la correction nécessaire avant l’adoption du projet du nouveau Code Pénal par l’Assemblée Nationale.

13. Le projet du nouveau Code Pénal a entièrement repris les dispositions de l’actuel Code Pénal en vigueur relatives aux pratiques de charlatanisme et de sorcellerie (articles 162 et 162 bis). Il n’y a pas eu d’innovation particulière.

14.Le Général de Brigade Ferdinand BOMBAYAKE, ancien Directeur Général de l’Unité de Sécurité Présidentielle jouit pleinement de sa liberté depuis le mois d’Octobre 2005.

15.La durée maximale de la garde à vue est de 48 heures pour les délits et 8 jours pour les crimes avec possibilité d’une prorogation égale à la durée initiale.

La détention provisoire n’est pas encore réglementée. Toutefois, le projet du nouveau Code de Procédure Pénale a envisagé sa durée maximale à 6 mois. L’assistance d’avocat et d’un médecin pendant la garde à vue et la détention provisoire est prévue dans le projet du nouveau Code de Procédure Pénale.

Malgré l’absence de texte, cette formalité est respectée dans la pratique.

16.Aucune mesure n’est encore adoptée pour réduire la garde à vue militaire. Il convient toutefois de préciser que le Code de Justice militaire est actuellement en cours de révision grâce à l’appui technique et financier du Bureau des Nations Unies en Centrafrique (BONUCA).

Traitement des personnes privées de liberté (art. 10)

17.Les Etablissements pénitentiaires en RCA ont été construits depuis l’époque coloniale. Ils se trouvent aujourd’hui dans un état de délabrement avancé. La Maison Centrale de Bangui, prison de référence construite aussi par le colonisateur avait été, au lendemain des multiples crises militairo-politiques (1996 à 2003) qu’a connues le pays, détruite du fait des événements. Après le sursaut patriotique du 15 Mars 2003, elle a été réhabilitée partiellement sur fonds propres du Gouvernement en dépit de la conjoncture économique très difficile. Il en est de même pour la prison de Bimbo construite pour les femmes. Ces réhabilitations ont dûment tenu compte des normes minima en la matière.

Les détenus sont alimentés grâce à des crédits alloués hebdomadairement (prisons de Bangui) et trimestriellement (prisons de provinces) par l’Etat. Il est à noter que la plupart des prisons de provinces sont tombées en ruine pour cause de délabrement. Toutefois certaines d’entre elles ont été réhabilitées tandis que d’autres sont en voie de l’être.

Les détenus reçoivent la visite périodique du personnel médical tant à Bangui qu’en provinces.

18.Depuis l’instauration des tribunaux pour enfant en 2001 dans chaque Préfecture, les mineurs ne sont pas incarcérés. Il faut noter l’absence de centres spécialisés pour le traitement des mineurs délinquants.

Droit à un procès équitable (art. 14)

19.La justice constitue un pouvoir dans la loi fondamentale du 27 Décembre 2004. Son indépendance est garantie par l’existence des organes de gestion de la carrière des Magistrats que sont :

le Conseil Supérieur de la Magistrature ;

la Commission Consultative du Conseil d’Etat ;

La conférence des Présidents et du Procureur Général de la Cour des Comptes.

Dans ces organes, on distingue les membres de droit et les membres élus. Il existe aussi des personnalités civiles choisies en raison de leur attachement aux institutions judiciaires. Les Magistrats du siège sont inamovibles tandis que ceux du parquet sont amovibles.

Enfin, les Magistrats disposent d’une amicale pour la défense de leurs intérêts matériels et moraux.

20.Les règles de procédure judiciaires ont prévu des voies de recours qui sont des possibilités offertes aux personnes ayant perdu leurs procès de demander la révision de ceux-ci devant les instances juridictionnelles supérieures. Ce sont : l’appel, l’opposition, le pourvoi en cassation, le recours en révision, le recours en rétractation et la grâce.

21. Il n’existe nulle part en RCA un service alternatif à caractère non punitif depuis la suppression du service militaire obligatoire dans les années 1980. Cependant, une loi sur le travail d’intérêt général comme alternatif à l’incarcération a été adoptée et est actuellement en vigueur.

22.Conformément à la loi sur les associations en République Centrafricaine, les restrictions à la reconnaissance d’une association sont guidées par le souci de la protection de la sécurité nationale, de l’ordre public, des libertés et droits fondamentaux d’autrui.

23.En République Centrafricaine, la liberté de la presse est garantie par la législation nationale, notamment : la Constitution du 27 Décembre 2004, l’Ordonnance n°05.002 du 22 Février 2005 portant loi organique sur la liberté de la presse et de la communication (qui dépénalise les délits de presse), l’Ordonnance n°04.020 du 31 Décembre 2004 portant organisation et fonctionnement du Haut Conseil de la Communication ainsi que son modificatif subséquent.

Les allégations selon lesquelles la liberté d’expression des journalistes est menacée sont sans fondement et dépourvus de preuve. A titre d’exemple cf. discours d’ouverture et de clôture du Président de l’Union des Journalistes Centrafricains (UJCA) à l’occasion du forum des médias dans le cadre de la Journée Internationale de la liberté de la presse (3 Mai 2006) a adresser un satisfecit au Président de la République, Chef de l’Etat.

24.Il n’existe aucune restriction relative aux libertés d’association et d’expression en RCA hormis les cas prévus par la loi et mentionnés au point 22.

Diffusion d’informations relatives au Pacte et au Protocole facultatif (art. 2)

25.Un compte rendu par voie de presse orale et écrite sera fait pour l’information du grand public. A cela s’ajoute une journée de restitution à l’intention des pouvoirs publics, du parlement, des organisations de la société civile y compris les ONG des Droits de l’Homme. Des exemplaires du rapport auquel seront annexées les observations finales du Comité feront l’objet de large diffusion dans les centres de recherches universitaires et de formation professionnelle.

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