Nations Unies

CRC/C/UKR/CO/5-6

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr. générale

27 octobre 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’enfant

Observations finales concernant le rapport de l’Ukraine valant cinquième et sixième rapports périodiques *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport de l’Ukraine valant cinquième et sixième rapports périodiques à ses 2634e et 2635e séances, les 30 et 31 août 2022, et a adopté les présentes observations finales à sa 2668e séance, le 23 septembre 2022.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’Ukraine valant cinquième et sixième rapports périodiques, ainsi que les réponses écrites à la liste de points, qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie.

II.Mesures de suivi adoptées et progrès réalisés par l’État partie

3.Le Comité prend note avec satisfaction des progrès que l’État partie a accomplis dans de nombreux domaines, notamment des mesures législatives et institutionnelles et des mesures de politique générale adoptées pour appliquer la Convention, en particulier l’adoption de la loi no 936-VIII du 26 janvier 2016 portant modification de certains textes législatifs internes, visant à renforcer la protection sociale des enfants et le soutien aux familles avec enfants, qui a introduit la notion d’intérêt supérieur de l’enfant, et de la loi sur les services sociaux, entrée en vigueur en 2020, ainsi que l’interdiction récente des adoptions à l’étranger. Il se félicite en outre des mesures prises par l’État partie depuis le début de l’attaque armée lancée par la Fédération de Russie le 24 février 2022, comme la création du Groupe pour la coordination de la protection des droits de l’enfant dans le contexte de la loi martiale.

III.Facteurs et difficultés entravant la mise en œuvre de la Convention

4.Le Comité note avec une profonde préoccupation que l’agression armée menée par la Fédération de Russie depuis le 24 février 2022 a des effets dévastateurs sur la population ukrainienne, plus particulièrement sur les enfants, et qu’elle fait obstacle à la réalisation de tous les droits de l’enfant définis dans la Convention et ses Protocoles facultatifs. À cet égard, il salue les efforts que fait l’État partie pour atténuer les effets néfastes du conflit armé sur les enfants, mais il est néanmoins vivement préoccupé par les nombreuses informations crédibles, corroborées et concordantes selon lesquelles, depuis le début du conflit armé, des violations flagrantes des droits de l’enfant − notamment des meurtres d’enfants, des déplacements en masse d’enfants à l’intérieur et à l’extérieur du pays et la destruction d’habitations, d’écoles, d’hôpitaux et de systèmes d’approvisionnement en eau et d’assainissement − sont commises, principalement par la Fédération de Russie. Tout en notant que l’État partie n’a pas accès aux zones contrôlées par les forces armées de la Fédération de Russie et par des groupes armés affiliés, le Comité lui rappelle que les droits consacrés par la Convention et ses Protocoles facultatifs s’appliquent à tous les enfants, à tout moment, et qu’il lui incombe au premier chef de protéger sa population, et il l’engage à continuer de prendre toutes les mesures possibles pour protéger les enfants ukrainiens, en particulier les enfants vulnérables.

IV.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

5.Le Comité rappelle à l’État partie le caractère indivisible et interdépendant de tous les droits consacrés par la Convention et souligne l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il appelle son attention sur les recommandations concernant les domaines ci-après, dans lesquels il est urgent de prendre des mesures : droit à la vie, à la survie et au développement (par. 17), violence à l’égard des enfants (par. 23), enfants privés de milieu familial (par. 27), enfants handicapés (par. 29), santé mentale (par. 32) et enfants déplacés, enfants demandeurs d’asile et enfants réfugiés (par. 37).

6.Le Comité prend note de la situation exceptionnelle dans laquelle se trouve le pays en raison de l’agression armée de la Fédération de Russie, et indique qu’un certain nombre des recommandations qu’il formule dans les présentes observations finales renvoient à la situation des droits de l’enfant après le 24 février 2022, tandis que d’autres portent sur la situation en cours depuis le dernier examen de l’État partie par le Comité, en 2011.

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6))

Législation

7. Le Comité prend acte de l’adoption et de la modification de divers textes législatifs relatifs aux droits de l’enfant, notamment de la législation nationale sur la protection de l’enfance, et recommande à l’État partie de prendre, malgré les difficultés liées au conflit armé, toutes les mesures nécessaires pour assurer l’application effective de sa législation, conformément à la Convention et aux Protocoles facultatifs s’y rapportant, et pour informer le grand public de l’évolution de la législation.

Politique et stratégie globales

8. Notant que le dernier plan d’action national relatif à la mise en œuvre de la Convention est arrivé à échéance en 2021, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer une politique globale de protection de l’enfance qui couvre tous les domaines visés par la Convention et, sur la base de cette politique, de définir à court terme et à long terme une stratégie et un plan d’action comprenant les éléments nécessaires à l’exécution de cette politique, en veillant à leur allouer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires.

Coordination

9. Prenant note de la création du Conseil de coordination pour la protection et la sécurité des enfants en tant qu’organe de conseil et de consultation relevant du Président de l’Ukraine, le Comité recommande à l’État partie de renforcer le mandat de ce Conseil ou de la Commission interinstitutionnelle pour la protection de l’enfance pour que l’un de ces deux organes soit clairement chargé de coordonner l’ensemble des activités liées à l’application de la Convention et des Protocoles facultatifs s’y rapportant, aux niveaux intersectoriel, national, régional et local et soit, à cet effet, investi de compétences suffisamment larges, à un niveau interministériel élevé. L’État partie devrait veiller à ce que cet organe de coordination bénéficie des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement.

Allocation de ressources

10. À la lumière de son observation générale n o  19 (2016) sur l’élaboration des budgets publics aux fins de la réalisation des droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie  :

a)De veiller à ce que la priorité soit accordée aux enfants et à leurs besoins, dès à présent et après le conflit, dans les budgets alloués aux activités de relèvement et de reconstruction, notamment en procédant à une évaluation complète des ressources budgétaires requises et en affectant les crédits en toute transparence  ;

b)D’élaborer le budget de l’État suivant une approche axée sur les droits de l’enfant et de mettre en œuvre, pour l’ensemble du budget, un système de suivi de l’affectation et de l’emploi des ressources pour l’enfance. L’État partie devrait également utiliser ce système de suivi pour les études d’impact portant sur la manière dont les investissements dans les différents secteurs peuvent servir l’intérêt supérieur de l’enfant  ;

c)De définir des lignes budgétaires au profit de tous les enfants, en prêtant une attention particulière aux enfants défavorisés et aux enfants vulnérables pour lesquels des mesures sociales volontaristes pourraient se révéler nécessaires, et de faire en sorte que ces lignes budgétaires soient toujours garanties, même en temps de conflit armé.

Collecte de données

11. Le Comité prend note des efforts que l’État partie fait pour recueillir des données dans différents domaines et, compte tenu de son observation générale n o  5 (2003) sur les mesures d’application générales de la Convention et bien que l’État partie n’ait pas accès à certaines parties de son territoire, il lui recommande  :

a)De prendre des mesures pour renforcer son système de collecte de données. Les données devraient couvrir toutes les questions visées par la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant et être ventilées par âge, sexe, handicap, zone géographique, origine ethnique et situation socioéconomique, de manière à faciliter l’analyse de la situation de tous les enfants, en particulier des enfants vulnérables  ;

b)De veiller à ce que les données et les indicateurs soient communiqués aux ministères compétents et utilisés pour élaborer, suivre et évaluer les politiques, programmes et projets visant à assurer l’application effective de la Convention  ;

c)De tenir compte du cadre conceptuel et méthodologique établi dans le rapport du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme intitulé « Indicateurs des droits de l’homme  : Guide pour mesurer et mettre en œuvre » au moment de définir, de recueillir et de diffuser des données statistiques.

Mécanisme de suivi indépendant

12. Le Comité recommande à l’État partie  :

a)De faire en sorte que le bureau du Médiateur dispose d’un mécanisme spécialement conçu pour surveiller le respect des droits de l’enfant et recevoir, examiner et traiter les plaintes des enfants d’une manière adaptée à leurs besoins  ;

b)De veiller à ce que les activités de la Commissaire du Président de l’Ukraine pour les droits de l’enfant ne fassent pas double emploi et à ce qu’elles soient coordonnées avec celles que mène le Médiateur conformément à son mandat et aux pouvoirs dont il est investi, ainsi qu’avec les activités de son mécanisme relatif aux droits de l’enfant  ;

c)De renforcer l’indépendance du Médiateur, notamment s’agissant de son financement, de son mandat et de ses immunités, de façon à respecter pleinement les Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et à lui permettre de conserver le statut « A ».

Diffusion, sensibilisation et formation

13. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour que tous les professionnels travaillant au contact ou au service d’enfants bénéficient systématiquement d’une formation et pour faire largement connaître la Convention et les Protocoles facultatifs s’y rapportant, au moyen de programmes de sensibilisation, notamment de campagnes.

B.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

14. Le Comité se félicite de l’adoption, en 2012, de la loi sur les principes de la prévention et de la répression de la discrimination en Ukraine, et compte tenu de la cible 10.3 des objectifs de développement durable, il rappelle sa recommandation précédente et exhorte l’État partie à veiller à ce que tous les enfants du pays jouissent des droits qui leur sont reconnus par la Convention sans discrimination fondée sur quelque motif que ce soit. Il exhorte également l’État partie  :

a)À prendre des mesures efficaces pour combattre les actes racistes et xénophobes chez les jeunes, notamment en appuyant les organisations d’enfants et de jeunes qui promeuvent le dialogue interculturel, la tolérance et le respect de la diversité  ;

b)À renforcer la surveillance de la situation des enfants marginalisés et défavorisés, notamment les enfants roms, et, sur la base des résultats obtenus, à mettre au point une stratégie globale prévoyant des actions spécifiques et ciblées visant à éliminer toutes les formes de discrimination contre les enfants vulnérables.

Intérêt supérieur de l’enfant

15. Le Comité se félicite de l’adoption de la loi n o  936-VIII de 2016, qui a introduit la notion d’intérêt supérieur de l’enfant, et, renvoyant à son observation générale n o  14 (2013) sur le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, il recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour que ce droit soit dûment pris en considération et interprété et respecté de manière uniforme dans toutes les procédures et décisions législatives, administratives et judiciaires, ainsi que dans toutes les politiques et tous les programmes et projets qui concernent les enfants ou ont des incidences sur eux. À cet égard, l’État partie est invité à définir des procédures et des critères propres à aider toutes les personnes compétentes à déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant dans tous les domaines, notamment en ce qui concerne les enfants touchés par le conflit armé, et à en faire une considération primordiale.

Droit à la vie, à la survie et au développement

16.Le Comité se dit profondément préoccupé par les informations crédibles, corroborées et concordantes selon lesquelles, depuis le début de l’agression armée de la Fédération de Russie, des centaines d’enfants ont été tués et beaucoup d’autres ont été blessés, dans la plupart des cas en raison de l’utilisation d’engins explosifs à large rayon d’impact dans des zones peuplées. Il prend note de la mise en place de nombreux mécanismes de responsabilisation, notamment la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine, chargés d’enquêter sur toutes les allégations de violations des droits de l’homme et d’atteintes à ces droits, et de violations du droit international humanitaire, ainsi que sur les crimes connexes, commis dans le contexte de l’agression de l’État partie par la Fédération de Russie, y compris les meurtres de civils, en particulier d’enfants, et exprime tout son soutien à ces mécanismes dans le cadre de leurs travaux.

17.Le Comité demande instamment à l’État partie de prendre, à titre hautement prioritaire, toutes les mesures nécessaires pour protéger les enfants et de donner aux forces armées et aux forces de sécurité des instructions claires pour empêcher que des enfants soient tués ou blessés, conformément aux principes de distinction, de proportionnalité et de précaution du droit international humanitaire. Il demande en outre qu’une enquête rapide, indépendante, efficace et transparente soit menée sur les violations du droit international des droits de l’homme et du droit international humanitaire commises depuis le 24 février 2022 et avant cette date. À cet égard, il recommande à l’État partie de continuer de coopérer pleinement avec la Commission d’enquête internationale indépendante sur l’Ukraine et les autres mécanismes de responsabilisation en place, quels que soient les auteurs des violations commises.

Respect de l’opinion de l’enfant

18. Le Comité prend note des modifications apportées en 2017 au Code de procédure civile et de la nouvelle loi sur l’éducation et, renvoyant à son observation générale n o  12 (2009) sur le droit de l’enfant d’être entendu, il recommande à l’État partie  :

a)De prendre des mesures propres à garantir l’application effective de sa législation, comme l’article 9 de la loi relative à la protection de l’enfance et les dispositions pertinentes du Code de la famille, qui consacre le droit de l’enfant d’être entendu dans les procédures judiciaires et administratives pertinentes  ;

b)D’encourager la participation effective et active de tous les enfants dans la famille, dans la communauté et à l’école et d’associer les enfants à la prise de décisions sur toutes les questions qui les concernent.

C.Définition de l’enfant (art. 1er)

19. Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa législation de manière à supprimer toutes les dérogations à l’interdiction du mariage de personnes de moins de 18 ans, et de prendre des mesures pour prévenir les mariages d’enfants et sensibiliser la population à leurs conséquences néfastes.

D.Libertés et droits civils (art. 7, 8 et 13 à 17)

Enregistrement des naissances, nom et nationalité

20. Le Comité se félicite des mesures prises pour faciliter l’enregistrement de la naissance des enfants déplacés ou vivant sur le territoire contrôlé par les forces armées de la Fédération de Russie ou par des groupes armés affiliés et, compte tenu de la cible 16.9 des objectifs de développement durable, recommande à l’État partie  :

a)De veiller à ce que les mesures visant à faciliter l’enregistrement des naissances soient étendues à tous les enfants nés sur son territoire, y compris les enfants de demandeurs d’asile  ;

b)De modifier sa loi sur la citoyenneté de manière à faciliter l’acquisition de la nationalité pour les enfants qui sans cela seraient apatrides  ;

c)De garantir l’enregistrement des naissances des enfants roms nés de parents qui n’ont pas de documents d’identité ou de documents délivrés par l’établissement médical concerné attestant la naissance, et de supprimer les amendes prévues en cas de manquement à l’obligation d’enregistrer la naissance dans les délais.

Droit à l’identité

21. Notant que l’État partie prend des mesures législatives pour réglementer la gestation pour autrui, le Comité lui recommande de faire en sorte que l’intérêt supérieur des enfants conçus par procréation médicalement assistée, en particulier en particulier ceux nés d’une gestation pour autrui, soit une considération primordiale et que ces enfants aient accès aux informations sur leurs origines. Ce faisant, l’État partie devrait envisager de fournir aux mères porteuses et aux futurs parents l’accompagnement et le soutien voulus.

E.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 (al. a)) et 39)

22.S’il prend note de l’adoption de la loi de 2017 sur la prévention et la répression de la violence domestique, qui reconnaît le statut de victime aux enfants témoins de cette forme de violence, le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles :

a)Des enfants continuent d’être victimes de violence dans leur famille et dans les institutions pour enfants ;

b)Il n’existe pas suffisamment d’infrastructures permettant de repérer les victimes de violences et de maltraitance, d’intervenir de façon adaptée et d’offrir aux enfants victimes et à leur famille les services de protection et de réadaptation voulus ;

c)Le manque de réglementation empêche le secteur social, le secteur de la santé et le secteur judiciaire de collaborer pour mettre fin à la violence à l’égard des enfants, y compris la violence domestique et la violence sexuelle ;

d)Des parents continuent d’avoir recours aux châtiments corporels, malgré leur interdiction ;

e)Selon des allégations, des enfants seraient victimes de violence sexuelle liée au conflit, et les mécanismes d’orientation ne fonctionnent pas sur l’essentiel du territoire ukrainien.

23. Compte tenu de son observation générale n o  8 (2006) sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments et de son observation générale n o  13 (2011) sur le droit de l’enfant d’être protégé contre toutes les formes de violence, ainsi que de la cible 16.2 des objectifs de développement durable, le Comité exhorte l’État partie  :

a)À élaborer une stratégie globale de lutte contre la violence à l’égard des enfants dans tous les contextes, y compris la violence domestique, et les abus sexuels et la violence dans les institutions, l’accent devant être mis sur la détection rapide des situations de violence et l’intervention précoce  ;

b)À renforcer l’infrastructure de protection de l’enfance au niveau local, à garantir des mesures d’intervention multisectorielles adaptées aux enfants, suivant le modèle du «  barnahus  » par exemple, dans tous les cas de maltraitance d’enfants, notamment en procédant à des entretiens médico-légaux spécialisés et des examens médicaux et en fournissant des services de santé mentale et de réadaptation appropriés, et à veiller à ce que les témoignages des enfants fassent l’objet d’un enregistrement audiovisuel qui sera accepté comme élément de preuve dans la procédure judiciaire  ;

c)À établir une base de données nationale recensant toutes les affaires de violence à l’égard d’enfants, en particulier la violence domestique et les abus sexuels, et à procéder à une évaluation complète de l’ampleur, des causes et de la nature de cette violence  ;

d)À appliquer les dispositions législatives interdisant les châtiments corporels, en menant des campagnes de sensibilisation à l’échelle nationale et en encourageant le recours à des formes positives, non violentes et participatives d’éducation et de discipline  ;

e)À mettre en place, à l’intention des travailleurs sociaux, des policiers et des professionnels travaillant dans les établissements d’enseignement, les services de santé, les services pénitentiaires, les internats et d’autres secteurs du domaine de la protection des droits de l’enfant, des programmes de formation sur la détection des cas de violence, les actions interinstitutionnelles concertées menées pour y faire face et la prévention de la violence  ;

f)À enquêter sur les allégations selon lesquelles des enfants seraient victimes de violences sexuelles liées au conflit et à émettre des instructions internes concernant la manière d’enquêter efficacement sur ces allégations, conformément au Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul) et au Protocole international relatif aux enquêtes sur les violences sexuelles dans les situations de conflit, en tenant dûment compte des droits et des besoins des enfants victimes, et à rétablir les mécanismes d’orientation et veiller à leur bon fonctionnement dans l’ensemble du pays.

Services d’assistance téléphonique

24. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place une plateforme numérique et un service d’assistance téléphonique s’accompagnant d’un mécanisme d’orientation efficace, de soutenir le service d’assistance téléphonique existant, qui est géré par la société civile et accessible à tous les enfants à l’échelle nationale, de faire savoir aux enfants comment ils peuvent accéder au service d’assistance téléphonique et d’allouer les ressources humaines, financières et techniques nécessaires à son bon fonctionnement.

F.Milieu familial et protection de remplacement (art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4))

Milieu familial

25. Le Comité rappelle ses recommandations précédentes et prie instamment l’État partie  :

a)De redoubler d’efforts pour apporter le soutien et les ressources nécessaires au renforcement de la famille, en particulier en passant de l’adoption de mesures punitives contre les parents qui manquent à leurs devoirs au renforcement des systèmes de soutien et des prestations sociales en faveur des familles avec enfants de manière à aider ces dernières à mieux assumer leurs responsabilités éducatives  ;

b)De faire en sorte que les enfants ne fassent l’objet d’une protection de remplacement qu’en cas de nécessité et qu’à la condition que cela soit dans leur intérêt supérieur  ;

c)D’instituer un système permettant de surveiller et d’évaluer efficacement les services et l’appui offerts par l’État aux familles qui en ont besoin, notamment aux familles monoparentales.

Enfants privés de milieu familial

26.Le Comité prend note avec satisfaction de la Stratégie nationale de réforme du système de placement en institution 2017-2026 et du plan d’action adopté en 2017 par l’État partie, mais il est préoccupé par le nombre important d’enfants qui vivaient en institution avant le 24 février 2022 et qui, pour beaucoup, s’y trouvent encore à ce jour. Il est en outre vivement préoccupé par des allégations crédibles selon lesquelles, depuis le début de l’agression armée de l’État partie par la Fédération de Russie :

a)De grands groupes d’enfants privés de milieu familial ayant été déplacés ou ayant demandé l’asile à l’étranger ont été placés en institution, notamment dans le cadre de mémorandums d’accord signés avec les pays d’accueil ;

b)Des enfants ukrainiens ont été transférés de force sur le territoire de la Fédération de Russie ou sur un territoire contrôlé par les forces armées de cette dernière et par des groupes armés affiliés.

27. Appelant l’attention de l’État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplacement pour les enfants , le Comité lui recommande  :

a)De renforcer encore ses processus de désinstitutionnalisation  ;

b)De soutenir et de faciliter la prise en charge des enfants en milieu familial chaque fois que cela est possible, y compris pour les enfants ayant été déplacés ou ayant demandé l’asile à l’étranger, et de développer son système de placement en famille d’accueil pour les enfants qui ne peuvent pas rester dans leur famille  ;

c)De prévoir des garanties suffisantes et de définir des critères précis, fondés sur les besoins et l’intérêt supérieur de l’enfant, permettant de déterminer si un enfant doit faire l’objet d’une protection de remplacement, et de réexaminer régulièrement les placements  ;

d)De revoir de toute urgence la position de l’État selon laquelle les enfants placés temporairement en institution dans un pays étranger doivent rester ensemble, car cela empêche les pays d’accueil de trouver pour ces enfants un lieu d’accueil adapté et de leur apporter le soutien dont ils ont besoin, conformément au système de protection sociale de ces pays  ;

e)De négocier avec les pays qui accueillent des enfants privés de milieu familial en provenance de l’État partie afin que ces enfants soient placés dans une structure familiale ou dans des petits foyers collectifs de qualité et que des mesures soient prises pour préserver leurs pratiques culturelles et sociales d’origine, y compris leur langue  ;

f)De prendre toutes les mesures nécessaires, en coopération avec la communauté internationale, pour faciliter le retour des enfants qui auraient été transférés de force sur le territoire de la Fédération de Russie ou sur un territoire contrôlé par les forces armées de cette dernière ou par des groupes armés affiliés.

G.Enfants handicapés (art. 23)

28.Le Comité est profondément préoccupé par les informations selon lesquelles :

a)Des enfants handicapés sont victimes d’abandon affectif pendant des années dans certaines institutions, où le manque de ressources et de personnel qualifié nuit à la qualité des soins et, dans certains cas, favorise le recours à des pratiques préjudiciables pour les enfants, telles que les mesures de contention ;

b)L’État partie n’a pas suffisamment pris les enfants handicapés en considération dans son programme de désinstitutionnalisation ;

c)Depuis le début de l’attaque armée lancée par la Fédération de Russie le 24 février 2022, de nombreux enfants handicapés ayant besoin d’un accompagnement important sont abandonnés dans des institutions de l’État partie en mauvais état et sous-dotées en effectifs, et dans certains cas, sont attachés ou laissés dans leur lit dans un état d’inactivité presque totale, dans des pièces sombres et mal ventilées, avec un accès limité à des services d’hygiène ;

d)Les hostilités ayant entraîné la fermeture des internats et des institutions d’accueil, de nombreux enfants handicapés sont renvoyés chez eux sans que leur situation familiale ne soit dûment évaluée.

29.Le Comité exhorte l’État partie à solliciter l’appui des États, des organismes des Nations Unies, de la société civile et des autres parties participant à l’action humanitaire afin de déterminer les besoins particuliers des enfants handicapés touchés par les hostilités et d’y répondre. Les besoins particuliers de ces enfants devraient être définis, notamment en fonction du sexe et de l’âge, et être pris en considération dans toutes les mesures adoptées pour faire face à la crise. Dans ce contexte, renvoyant à son observation générale n o  9 (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité exhorte l’État partie  :

a)À adopter une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme en élaborant une stratégie gouvernementale qui accorde une attention particulière à l’adoption d’une politique visant à assurer l’inclusion pleine et entière de tous les enfants handicapés dans tous les domaines, en renforçant les programmes de détection et d’intervention précoces, en procédant à la collecte de données pertinentes ventilées et en prenant des mesures pour lutter contre la discrimination et la stigmatisation dont sont victimes les enfants handicapés  ;

b)À prendre des mesures urgentes pour empêcher que les enfants handicapés soient victimes de maltraitance, de négligence et de violence, et à renforcer encore sa politique de désinstitutionnalisation en offrant davantage de services de type familial ou communautaire  ;

c)À assurer l’accès à des couloirs humanitaires et faire en sorte que les plans d’évacuation et de riposte face à la crise soient inclusifs, notamment en prévoyant des abris antibombes accessibles et des services d’information et de communication d’urgence  ;

d)À accorder une attention particulière au recensement et à la satisfaction des besoins immédiats en matière de sécurité et de santé des enfants handicapés ayant besoin d’un accompagnement important. L’aide et l’assistance internationales devraient cibler directement et en urgence ces enfants et contribuer à la fourniture de produits de première nécessité et de soins médicaux et thérapeutiques, ainsi qu’à la dotation en personnel, pour permettre aux enfants de rester en vie et de bénéficier de soins. Les aides devraient être expressément ciblées pour que les enfants soient pris en charge en milieu familial ou placés dans des foyers collectifs de qualité et qu’un appui soit fourni afin de préserver la culture d’origine des enfants, y compris leur langue  ;

e)À veiller à ce que le milieu familial soit dûment évalué avant que les enfants soient réunis avec leur famille  ;

f)À offrir aux enfants handicapés réfugiés ou déplacés une protection et un soutien adaptés à leurs besoins propres, et à mettre à leur disposition et celle de leur famille des structures d’accueil et d’hébergement pour éviter la séparation des familles.

H.Santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Santé et services de santé

30. Au vu des centaines d’attaques perpétrées par les forces armées de la Fédération de Russie et des groupes armés affiliés contre des établissements de santé de l’État partie, y compris des hôpitaux pour enfants et des maternités, le Comité exhorte l’État partie à prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les biens de caractère civil, notamment les établissements de santé, contre toute agression, conformément au droit international humanitaire. Il prend note de l’adoption de la loi de 2017 sur l’amélioration de l’accessibilité et de la qualité des soins médicaux dans les zones rurales et, renvoyant à son observation générale n o  15 (2013) sur le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible ainsi qu’à l’objectif de développement durable n o  3, il recommande à l’État partie de veiller à ce que des soins de santé primaires soient fournis à tous les enfants qui en ont besoin et à ce que la réforme du système de santé qui sera entreprise après le conflit armé porte aussi sur les zones et établissements reculés, dans lesquels des petits postes sanitaires ont été supprimés ou sont sur le point d’être fermés, de manière à assurer la prestation de services de soins préventifs et curatifs aux familles avec enfants.

Santé mentale

31.Prenant note des répercussions profondes du conflit armé sur le développement normal des enfants et de ses conséquences dévastatrices sur leur santé mentale, le Comité salue la mise en place du Programme national de services de santé mentale et de soutien psychologique, qui vise à répondre aux besoins des enfants en matière de santé mentale. Il note néanmoins avec une vive inquiétude que les enfants et leur famille vivent dans un état de stress aigu et chronique et connaissent des moments de peur et de désespoir extrêmes, ce qui aggrave la situation des enfants qui présentent déjà des troubles mentaux et accroît, pour nombre d’enfants, le risque de souffrir de problèmes de santé mentale, notamment de troubles post-traumatiques, de dépression et d’anxiété, dans l’immédiat et à plus long terme. Il est également préoccupé par les effets néfastes que cela a sur la santé mentale des mères pendant la grossesse et après l’accouchement, ainsi que sur le développement affectif des milliers d’enfants nés pendant les hostilités.

32.Le Comité demande instamment à l’État partie et aux pays qui accueillent des réfugiés de cet État de donner la priorité aux programmes visant à protéger la santé mentale des enfants et des personnes qui ont la charge d’enfants, et de leur allouer des ressources. Ces programmes devraient comprendre des interventions à plusieurs niveaux qui mettent l’accent sur la santé mentale et les traumatismes des enfants, et viser à promouvoir le bien-être psychosocial des enfants et à renforcer leur résilience. Des mesures d’intervention spécifiques devraient être prévues pour répondre aux besoins des jeunes enfants et des adultes qui en ont la charge.

Santé des adolescents

33. À la lumière de son observation générale n o  4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention, le Comité recommande à l’État partie  :

a)De renforcer sa stratégie en matière de santé sexuelle et procréative, notamment en faveur des adolescents, et d’accélérer l’adoption de la loi sur la santé des adolescents, conformément aux normes internationales  ;

b)De continuer de veiller à ce que l’éducation à la santé sexuelle et procréative fasse partie du programme scolaire obligatoire et s’adresse spécialement aux adolescents, filles et garçons, l’accent devant être mis tout particulièrement sur la prévention des grossesses précoces et des infections sexuellement transmissibles  ;

c)De combattre la consommation de substances psychoactives chez les enfants et les adolescents, notamment en fournissant à ceux-ci des informations exactes et objectives et en leur inculquant des compétences pratiques de façon à prévenir la consommation de substances psychoactives, tabac et alcool compris, et de mettre en place des services de traitement de la toxicomanie et de réduction des risques qui soient accessibles et adaptés aux jeunes  ;

d)De mettre au point des normes et des protocoles de réadaptation pour les adolescents usagers de drogues et d’améliorer ceux qui sont déjà en place. D’améliorer la qualité des services de réadaptation en définissant des critères d’efficacité, en créant un système approprié pour l’habilitation de ces services et en contrôlant la qualité des services fournis.

Niveau de vie

34. Le Comité prend note avec satisfaction de la Stratégie de réduction de la pauvreté de 2016 et des plans d’action annuels visant à en assurer l’application, mais il appelle l’attention de l’État partie sur la cible 1.3 des objectifs de développement durable et lui recommande de renforcer ses mesures de réduction de la pauvreté et de veiller à ce que la priorité soit accordée aux enfants et à leurs familles dans les processus nationaux de relèvement et de reconstruction, afin que les personnes vivant dans la pauvreté reçoivent un soutien financier suffisant et bénéficient de services gratuits et accessibles, sans discrimination.

I.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles

35. Notant que certaines écoles ont repris l’enseignement en présentiel tandis que d’autres poursuivent l’enseignement en ligne, et, compte tenu des cibles 4.1, 4.2 et 4.a des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie  :

a)De veiller à ce qu’il soit tenu compte, au moment de décider de la réouverture des écoles, de la sécurité et du bien-être physique et mental des enfants  ;

b)De faire en sorte, autant que possible, que les enfants appartenant à des groupes minoritaires qui vivent dans les territoires contrôlés par le Gouvernement aient accès à un enseignement dans leur langue maternelle  ;

c)De prendre les mesures nécessaires pour améliorer l’accessibilité et la qualité de l’enseignement, en particulier pour les enfants roms et les enfants de parents demandeurs d’asile ou réfugiés dont le lieu de résidence n’est pas enregistré  ;

d)De modifier sa réglementation de manière à ce que tous les enfants vivant sur son territoire aient accès à l’enseignement préscolaire dans des conditions d’égalité, indépendamment du lieu d’enregistrement du domicile de leurs parents, en s’appuyant sur une politique globale et complète de prise en charge et de développement de la petite enfance  ;

e)De protéger les établissements d’enseignement contre les attaques, y compris les bombardements, et de décourager l’occupation et l’utilisation des écoles et des hôpitaux à des fins militaires ainsi que les attaques contre ces établissements, conformément à la Déclaration sur la sécurité des écoles, et, le cas échéant, d’accélérer la reconstruction de ces établissements.

J.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 (al. b) à d)) et 38 à 40)

Enfants déplacés, enfants demandeurs d’asile et enfants réfugiés

36.Le Comité note avec une profonde préoccupation que le conflit armé en cours a entraîné le déplacement interne d’environ 7 millions de personnes et que 7 millions de réfugiés, principalement des femmes et des enfants, ont fui l’Ukraine pour demander une protection temporaire dans d’autres pays. Il prend note des mesures prises par l’État partie, comme la création du système Diia qui permet d’obtenir le statut de personne déplacée, mais reste particulièrement préoccupé par les faits suivants :

a)De nombreuses personnes déplacées, y compris des enfants, éprouvent des difficultés à accéder aux services ;

b)Lorsqu’elles sont en situation de déplacement, aux points de passage des frontières, dans des centres de transit ou des centres collectifs, ou encore dans des abris antibombes, les femmes et les filles sont particulièrement exposées à l’insécurité et à la violence, notamment au risque d’être victimes de traite des personnes ;

c)De nombreuses familles ont été séparées pendant le déplacement, et les enfants non accompagnés ou séparés sont particulièrement exposés au risque d’être victimes de traite, de violence, de mauvais traitements et d’exploitation ;

d)L’accès à l’aide humanitaire est entravé pour les demandeurs d’asile, les étrangers sans papiers et les personnes apatrides, ce qui fait que leurs enfants de ces derniers ne bénéficient d’aucune aide pour subvenir à leurs besoins essentiels et urgents ;

e)Malgré la mise en place de la plateforme Children of War (Enfants de la guerre), peu de données sont disponibles sur le nombre d’enfants déplacés à l’intérieur du pays ou ayant traversé la frontière pour se rendre dans des pays voisins.

37. Le Comité demande à la communauté internationale et aux donateurs d’apporter un soutien accru et continu à l’action menée comme suite aux déplacements et à l’appel éclair en faveur de l’Ukraine, ainsi qu’aux autres efforts essentiels visant à protéger les droits humains de tous les civils restés en Ukraine ou ayant fui le pays, y compris les enfants, et recommande à l’État partie  :

a)De veiller à ce que l’intérêt supérieur de l’enfant soit une considération primordiale dans tous les accords et décisions portant sur la circulation des enfants, en particulier des enfants non accompagnés  ;

b)De prendre, en coopération avec les pays d’accueil, des mesures visant à renforcer le repérage et l’enregistrement des enfants non accompagnés ou séparés qui fuient le conflit armé, aux fins du regroupement familial  ;

c)De fournir des informations et des services d’accompagnement aux points de passage des frontières, en ligne et dans les lieux où se sont réfugiés les enfants ou les familles avec enfants ayant fui le pays  ;

d)De renforcer son programme d’assistance en espèces et de collaborer avec des organisations internationales fournissant une assistance pécuniaire à buts multiples dans l’est et le centre de l’Ukraine, où les enfants déplacés sont particulièrement nombreux  ;

e)D’accroître son appui dans les lieux accueillant des enfants déplacés afin de renforcer les capacités des centres d’accueil et des centres collectifs en leur fournissant des biens de première nécessité et en les rénovant, tout en prévoyant par ailleurs diverses solutions de logement pour les séjours à moyen et à long terme, et de garantir aux enfants déplacés un accès sûr aux services.

Enfants touchés par des conflits armés

38. Notant que de nombreux enfants restent bloqués dans des zones d’hostilités actives, sans accès à la nourriture, à l’eau et aux soins médicaux de base, et qu’ils risquent d’être victimes de bombardements en raison de l’évacuation tardive de ces zones, le Comité prie instamment l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour réduire au minimum les effets du conflit armé sur les enfants et d’accorder la priorité aux enfants et aux familles avec enfants dans ses plans d’évacuation des zones touchées par les hostilités et dans ses négociations sur la mise en place de couloirs humanitaires.

Enfants appartenant à des minorités

39.Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les droits des enfants appartenant à des groupes minoritaires, en particulier les enfants roms, dans tous les domaines visés par la Convention et ses Protocoles facultatifs. Prenant note de cas de discours de haine et de violence, y compris plusieurs campagnes incitant à l’intolérance à l’égard des Roms et des attaques violentes dirigées contre des campements roms en 2018, il exhorte l’État partie à prendre des mesures pour prévenir ce type de situations et à poursuivre les personnes qui en sont responsables. Le Comité se félicite de l’adoption de la stratégie visant à promouvoir la réalisation des droits et des perspectives dont bénéficient les personnes appartenant à la minorité nationale rom dans la société ukrainienne pour la période allant jusqu’à 2030, et recommande que des ressources humaines, financières et techniques suffisantes soient allouées à sa mise en œuvre.

Enfants en situation de rue

40. Rappelant son observation générale n o  21 (2017) sur les enfants en situation de rue, le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les droits des enfants en situation de rue soient pleinement respectés par les forces de l’ordre, et d’élaborer des programmes propres à faciliter le retour de ces enfants dans leur famille, lorsque cela est possible et compte tenu de l’intérêt supérieur de l’enfant, et à répondre à leurs besoins à long terme en matière d’éducation et de développement, y compris au moyen d’un soutien psychologique.

Vente, traite et enlèvement

41. Notant que les déplacements en masse, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de l’État partie, exposent les femmes et les enfants à un risque accru de traite des personnes, notamment à des fins d’exploitation sexuelle, et prenant note de la cible 8.7 des objectifs de développement durable, le Comité demande instamment à l’État partie  :

a)De mettre en place des mécanismes appropriés pour protéger les groupes qui courent un risque accru d’être victimes de violations des droits de l’homme et les groupes vulnérables, ainsi que pour lutter contre la traite, l’exploitation et d’autres situations potentiellement violentes  ;

b)De continuer de former des spécialistes de différentes institutions, y compris des spécialistes aux postes frontière, afin qu’ils puissent repérer les femmes et les enfants qui risquent d’être victimes d’infractions liées à la traite des personnes et prévenir ce risque  ;

c)De veiller à ce que les enfants victimes de vente et de traite des personnes bénéficient effectivement de services d’orientation et d’appui.

Administration de la justice pour enfants

42. Prenant note de la stratégie nationale de réforme du système de justice pour mineurs et de son plan d’action, et compte tenu de son observation générale n o  24 (2019) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour enfants et des recommandations de l’étude mondiale des Nations Unies sur les enfants privés de liberté, le Comité exhorte l’État partie à mettre son système de justice pour enfants en pleine conformité avec la Convention et les autres normes pertinentes, telles que les Lignes directrices du Comité des Ministres du Conseil de l’Europe sur une justice adaptée aux enfants. En particulier, il le prie instamment  :

a)D’accélérer l’adoption du projet de loi sur une justice adaptée aux enfants et des modifications du Code des infractions administratives, du Code pénal et du Code de procédure pénale  ;

b)De promouvoir la fourniture de services de prévention précoce aux enfants n’ayant pas atteint l’âge de la responsabilité pénale  ;

c)De mettre en place des tribunaux pour enfants et de procédures spécialisées, de mobiliser des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à cet effet, de nommer des juges spécialisés dans la justice pour enfants et de veiller à ce qu’ils soient dûment formés dans ce domaine  ;

d)De garantir aux enfants soupçonnés, accusés ou reconnus coupables d’infractions pénales l’assistance d’un conseil qualifié et indépendant dès le début de la procédure judiciaire et tout au long de celle-ci  ;

e)De promouvoir le recours à des mesures non judiciaires, telles que des mesures de déjudiciarisation, de médiation et d’accompagnement, pour les enfants accusés d’infractions pénales et, lorsque cela est possible, l’application de peines non privatives de liberté, telles que la probation ou les travaux d’intérêt général  ;

f)De veiller à ce que la détention soit une mesure de dernier recours imposée pour la période la plus courte possible et que l’opportunité d’y mettre fin soit régulièrement examinée  ;

g)De faire en sorte, dans les cas où la privation de liberté est appliquée en dernier recours, que les enfants ne soient pas détenus avec des adultes et que leurs conditions de détention soient conformes aux normes internationales, notamment en ce qui concerne l’accès aux services d’éducation et de santé.

K.Suite donnée aux précédentes observations finales et recommandations du Comité portant sur l’application des Protocoles facultatifs à la Convention

Suite donnée aux précédentes observations finales du Comité portant sur le Protocole facultatif concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

43. Le Comité regrette le peu d’informations fournies sur la suite donnée aux observations finales qu’il a formulées en 2007 au sujet du rapport initial de l’État partie soumis en application du Protocole facultatif à la Convention, concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants . À la lumière de ses directives de 2019 sur l’application du Protocole facultatif et compte tenu de ses précédentes recommandations, il prie l’État partie de donner des informations complètes sur les mesures prises pour donner suite à ses précédentes recommandations, et l’invite instamment  :

a)À faire en sorte que les enfants victimes d’exploitation et de violence, y compris ceux qui se livrent à la prostitution, ne fassent pas l’objet de sanctions administratives, et que toutes les mesures possibles soient prises pour éviter leur stigmatisation et leur marginalisation sociale  ;

b)À veiller à ce que la législation interne n’impose pas la règle de la double incrimination pour l’extradition et/ou l’ouverture de poursuites contre des auteurs d’infractions commises à l’étranger  ;

c)À mettre fin à l’impunité des infractions visées par le Protocole facultatif, due à l’application de circonstances atténuantes, s’agissant en particulier des infractions liées à la pornographie mettant en scène des enfants sur Internet et d’autres supports technologiques.

Suite donnée aux précédentes observations finales du Comité portant sur le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés

44. Le Comité prend note de la loi de l’État partie sur la protection de l’enfance, qui traite de certaines questions visées par le Protocole facultatif, mais constate que certaines recommandations qu’il a formulées dans ses observations finales du 3 février 2011 au sujet du rapport initial de l’État partie soumis en application du Protocole facultatif à la Convention, concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés ne sont pas suffisamment appliquées. Compte tenu de la situation actuelle de conflit armé, il prie l’État partie de fournir des informations sur l’application des dispositions du Protocole facultatif, notamment sur les mesures prises pour  :

a)Incriminer expressément l’enrôlement d’enfants âgés de moins de 18 ans et leur utilisation dans des hostilités par les forces armées et des groupes armés non étatiques  ;

b)Veiller à ce que les codes, manuels, modes opératoires normalisés et autres directives militaires soient conformes aux dispositions et à l’esprit du Protocole facultatif  ;

c)Veiller à ce que sa législation lui permette d’établir et d’exercer sa compétence extraterritoriale pour les crimes de guerre liés à la conscription ou à l’enrôlement d’enfants pour les faire participer à des hostilités  ;

d)Envisager de ratifier le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

L.Ratification d’instruments internationaux relatifs aux droits del’homme

45. Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier les instruments relatifs aux droits de l’homme fondamentaux ci-après auxquels il n’est pas encore partie, afin de renforcer encore le respect des droits de l’enfant  :

a)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille  ;

b)Le Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels.

M.Coopération avec les organismes régionaux

46. Le Comité recommande à l’État partie de continuer à coopérer avec le Conseil de l’Europe en vue d’appliquer la Convention et d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme, tant sur son territoire que dans d’autres États membres du Conseil de l’Europe.

V.Application des recommandations et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

47. Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que les recommandations figurant dans les présentes observations finales soient pleinement appliquées. Il recommande également que le rapport valant cinquième et sixième rapports périodiques, les réponses écrites de l’État partie et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.

B.Mécanisme national d’établissement des rapports et de suivi

48. Le Comité recommande à l’État partie de mettre en place une structure permanente qui soit chargée de coordonner et d’élaborer les rapports devant être soumis aux mécanismes internationaux et régionaux des droits de l’homme et de nouer un dialogue avec ces mécanismes, et de coordonner et suivre l’exécution des obligations conventionnelles et l’application des recommandations et des décisions émanant desdits mécanismes. Il souligne que cette structure devrait être appuyée de manière appropriée et en permanence par un personnel qui lui soit spécialement affecté et devrait être à même de consulter systématiquement le Commissaire aux droits de l’homme du Parlement ukrainien et la société civile.

C.Prochain rapport

49.Le Comité invite l’État partie à soumettre son rapport valant septième et huitième rapports périodiques le 26 septembre 2027 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ce rapport devra être conforme aux directives harmonisées du Comité concernant l’établissement des rapports spécifiques aux différents instruments et ne pas dépasser 21 200 mots . Si l’État partie soumet un rapport dont le nombre de mots excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur. S’il n’est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d’examen par le Comité ne pourra pas être garantie.