Trente-cinquième session

Compte rendu analytique de la 728e séance

Tenue au Siège, à New York, le vendredi 19 mai 2006, à 15 heures

Présidente:Mme Belmihoub-Zerdani (Vice-Présidente)

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en vertu de l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième, troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques combinés du Malawi (suite)

En l’absence de M me  Manalo, M me  Belmihoub-Zerdani, Vice-Présidente, assume la présidence.

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports soumis par les États partiesen vertu de l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième, troisième, quatrième et cinquièmerapports périodiques combinés du Malawi(suite) (CEDAW/C/MWI/2 à 5 et CEDAW/C/MWI/Q/5 et Add.1)

Articles 10 à 14 (suite)

M me  Namasasu (Malawi), répondant aux questions soulevées lors de la précédente séance, précise que les programmes de santé génésique englobent des services communautaires et cliniques de planification familiale et des services de santé maternelle et néonatale, de soins après avortement, de prévention des maladies sexuellement transmissibles, de dépistage du cancer et de santé rurale, y compris l’utilisation d’ambulances motocyclettes pour accéder aux zones reculées. Le Malawi espère réduire de moitié son taux de mortalité maternelle d’ici à 2015.

Il y a des campagnes de promotion de l’éducation pour les filles et des programmes de santé scolaires pour fournir des informations sur la santé génésique et la santé en général et pour dispenser des conseils en matière de carrière en mettant l’accent sur le fait qu’il est important de terminer ses études. Les informations sur la santé génésique, l’hygiène et autres questions liées à la santé sont diffusées principalement par la presse écrite, les médias électroniques et les émissions de radio.

Le Malawi compte 446 hôpitaux, qui offrent gratuitement les services de base. La Christian Health Association of Malawi (CHAM) gère un certain nombre d’hôpitaux privés accessibles au titre d’un accord entre le Gouvernement et la CHAM en vertu duquel le Gouvernement paie les soins dispensés aux femmes qui ne pourraient autrement en assumer la charge.

M me  Nyasulu (Malawi) déclare que l’étude effectuée par la Commission des droits de l’homme du Malawi a débouché sur des recommandations concernant des changements de politique dont certains sont déjà appliqués. Les conclusions de cette étude ont également servi de base à des campagnes d’éducation destinées à susciter une prise de conscience des droits de la femme en regard des pratiques culturelles négatives.

M. Silungwe (Malawi) précise que la Commission du droit créée pour élaborer un statut d’égalité entre hommes et femmes examine les recommandations de la Commission des droits de l’homme relatives à l’élimination des pratiques sociales et culturelles nuisibles.

M. Silungwe (Malawi), se référant aux questions de la pauvreté et de l’inégalité vis-à-vis de l’accès à la terre, ajoute que le Gouvernement est en train d’examiner la question de la redistribution des terres afin de faire face au problème de l’absence de propriété foncière.

M me  Mchiela (Malawi) signale que la nouvelle loi relative au régime foncier permet aux femmes d’accéder à la propriété foncière, surtout dans le nord où cet accès était jusque-là impossible. Par ailleurs, des parcelles de terrain sont offertes aux femmes au titre d’un programme destiné à faire face au problème de l’absence de propriété foncière. En outre, le document de stratégie de réduction de la pauvreté a prévu de dégager des fonds pour un programme d’émancipation économique des femmes défavorisées. En ce qui concerne l’analphabétisme, elle ajoute qu’un certain nombre de programmes d’alphabétisation ont été entrepris avec des fonds du Gouvernement malawien, de la Banque africaine de développement (BafD), du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et même d’organisations religieuses.

M me  Chimzimu (Malawi) souligne que le Gouvernement a pris des mesures en vue de réduire les taux d’abandon scolaire, notamment par le biais de ses programmes de repas scolaires qui sont complétés par un programme destiné à aider les parents à se procurer de la nourriture pour leurs enfants. Certains groupes confessionnels fournissent également des produits vivriers de base à ceux qui s’occupent d’orphelins. L’enseignement primaire est en fait gratuit aussi bien en milieu rural qu’urbain. Plusieurs programmes de formation d’enseignants et de sensibilisation de ceux-ci au VIH/sida, à la problématique hommes-femmes et aux droits de l’homme sont mis en œuvre dans des établissements d’enseignement, y compris les universités.

M me  Tan, se référant aux réponses du Gouvernement à la liste de questions (CEDAW/C/MWI/Q/5/Add.1, par.16), demande si la stratégie nationale concernant la violence à l’égard des femmes a fait l’objet d’une étude d’impact et si cette stratégie se poursuivra au-delà de 2006.

L’État partie devrait donner des détails sur le nouveau régime de succession conçu pour remplacer la loi relative aux testaments et aux successions et sur les peines infligées en cas de saisie de propriété, et une explication de la façon dont les nouvelles procédures seraient plus conviviales.

M me  Tavares da Silva déplore vivement les pratiques traditionnelles préjudiciables et leur impact sur la santé et les droits génésiques des femmes, en particulier la vulnérabilité croissante à l’infection par le VIH causée par les pratiques sexuelles. Le Gouvernement ayant indiqué dans son rapport initial que ces pratiques étaient appelées à disparaître peu à peu, la persistance de ce problème est préoccupante. À cet égard, il faudrait peut-être adopter une approche plus dynamique, allant au-delà des mesures éducatives et des changements de comportement.

M me  Dairiam demande quelles mesures sont envisagées pour intégrer les questions étroitement liées de l’activité sexuelle et la santé génésique, des rapports de pouvoir entre les hommes et les femmes et du contrôle qu’ont les femmes sur leur corps et le VIH/sida. Étant donné le nombre élevé d’infirmières qualifiées qui quittent le pays et la difficulté d’assurer un accès adéquat aux services d’hygiène sexuelle et de santé génésique, surtout dans les zones rurales, l’État partie devrait indiquer quelles mesures budgétaires spéciales il a prises pour retenir les infirmières et sages-femmes et quelles incitations il leur offre pour qu’elles restent et acceptent de travailler dans les zones rurales.

M me  Simms demande s’il est prévu de créer des programmes spéciaux de bourses pour permettre aux filles et aux jeunes femmes d’entreprendre des carrières dans les domaines des sciences et des mathématiques. À cet égard, il serait intéressant de savoir si des bourses de la Fondation Rhodes (Rhodes Scholarship Trust) ont jamais été affectées à de jeunes Malawiennes.

M me  Nyasulu (Malawi) confirme que les pratiques traditionnelles préjudiciables ont des effets négatifs sur la santé des femmes, notamment du fait de la transmission du VIH/sida. Souvent, les femmes n’acceptent d’aller à l’hôpital qu’accompagnées d’un homme. Le Gouvernement a lancé des campagnes de sensibilisation visant les chefs de tribus, afin de tenter d’éliminer ces pratiques.

M me  Namasasu (Malawi) souligne que les femmes peuvent maîtriser leur fécondité grâce à la planification familiale et à des soins de santé complets, et qu’elles peuvent avoir accès à des services de conseil et de dépistage du VIH/sida à condition d’aller à l’hôpital. Pour ce qui est d’assurer la présence de personnel de santé dans les zones reculées, le Gouvernement étudie actuellement un ensemble d’incitations à cet effet. Les bailleurs de fonds ont annoncé un volume considérable de contributions pour faciliter le maintien du personnel de santé dans les régions isolées.

M me  Chimzimu (Malawi) ne peut fournir de statistiques concernant les bourses de la Fondation Rhodes. Le Gouvernement a plusieurs programmes de bourses, dont un au titre duquel des bourses ont été attribuées à 32 filles et 32 garçons de la huitième année d’études pour qu’ils poursuivent leurs études dans une école privée spécialisée dans les études mathématiques et scientifiques. Il a également un programme de parrainage pour les filles des populations défavorisées et un fonds spécial d’éducation pour les orphelins.

M me  Mchiela (Malawi) dit que le pays n’a pas effectué d’évaluation de la stratégie de lutte contre la violence fondée sur le sexe.

M me  Dafter (Malawi) précise que le nouveau programme concernant l’héritage – appelé Projet de loi relatif à la succession des personnes défuntes (Testaments, Héritage et Protection) – a été présenté au Parlement. Ce projet de loi met l’accent sur l’héritage revenant au conjoint et personnes à charge survivants.

Articles 15 et 16

M me  Coker-Appiah souhaiterait que la délégation réponde d’abord à deux questions concernant l’article 4. Premièrement, elle aimerait savoir si le projet de loi relatif à la nationalité a été amendé et, dans l’affirmative, à quel moment. Deuxièmement, elle se demande si une Malawienne mariée à un ressortissant étranger peut transmettre sa nationalité à ses enfants.

S’agissant des articles 15 et 16, elle aimerait avoir des éclaircissements sur le paragraphe 15.4.3 du rapport, qui dit que « le droit coutumier souligne l’importance de l’engagement de l’homme dans les affaires civiles et que les femmes doivent souvent avoir recours aux hommes pour leurs transactions ». Elle aimerait savoir si les femmes sont habilitées à effectuer d’elles-mêmes des transactions civiles et si le mot « homme » signifie le mari, le père ou un fils. Enfin, elle souhaiterait un complément d’information concernant la place du droit coutumier dans le cadre juridique malawien. Plus précisément, certains domaines juridiques sont-ils régis exclusivement par le droit coutumier?

Étant donné que les transactions foncières et les demandes de crédit ne sont pas aisément accessibles aux femmes en raison de leur manque de connaissances juridiques, il serait utile de savoir si le Gouvernement envisage des mesures en vue de simplifier les procédures juridiques et d’offrir des programmes d’initiation aux questions juridiques pour les femmes.

Elle prend note avec satisfaction du fait que le Malawi a entrepris d’amender une série de lois discriminatoires sur le mariage, les droits de propriété et l’héritage. Il serait intéressant de savoir si le projet de loi proposé sur le mariage, le divorce et les relations familiales reconnaît les mariages coutumiers et si les personnes ayant contracté un tel mariage jouissent des mêmes droits que celles qui sont mariées en vertu du droit civil. Elle aimerait également savoir si le Gouvernement envisage de faire connaître les termes de ce projet de loi. Enfin, elle demande si l’enregistrement des mariages coutumiers confère des avantages ou des droits et si des mesures sont prises pour encourager cet enregistrement.

M me  Banda (Malawi), répondant aux questions sur l’article 4, précise que les amendements proposés à la loi sur la nationalité disposent qu’une Malawienne mariée à un étranger conserve sa nationalité et peut la transmettre à ses enfants, ce qui n’est pas le cas actuellement. Toutefois, ces amendements n’ont pas encore été examinés par le Parlement.

M. Silungwe (Malawi), à propos du droit des femmes d’effectuer elles-mêmes des transactions juridiques, confirme que la Constitution confère ce droit aux femmes et qu’elle a préséance sur le droit coutumier. Enfin, le projet de loi proposé sur le mariage, le divorce et les relations familiales reconnaît tous les types de mariage et exige qu’ils soient enregistrés.

M me  Nyasulu (Malawi) souligne que le Gouvernement a élaboré le projet de loi de prévention de la violence domestique pour dénoncer une fois pour toutes l’idée que ce qui se produit au sein de la famille est une affaire purement privée. En revanche, la question de l’ignorance de la loi reste d’actualité. C’est pourquoi a été créé le Comité des droits de la femme et de l’équilibre entre les sexes, qui comprend des représentants de la Commission juridique et de la société civile et qui a pour mission de sensibiliser la population à la nécessité de mettre en place des moyens de protection contre la violence domestique et de recueillir des informations auprès du public. Comme la plupart des femmes sont illettrées au Malawi, ce sont elles qui tiennent à ce que des hommes effectuent leurs transactions pour elles, mais le Comité s’emploie également à populariser l’idée que les femmes pourraient néanmoins défendre elles-mêmes leurs droits en tant qu’individus.

M me  Bokpé-Gnacadja fait observer que, comme au Malawi, la Constitution l’emporte toujours sur les lois contraires, on ne voit pas clairement ce que ferait le Gouvernement dans une situation telle que celle décrite dans le rapport (CEDAW/C/MWI/2 à 5, par. 16.3.2) où, dans la question des mariages d’enfants, c’est la Constitution et non la loi qui viole les normes internationales.

M me  Gaspard, se référant aux cinq types de mariage reconnus au Malawi, dont certains comportent manifestement des dispositions discriminatoires (rapport, sect. 16.4), estime qu’un régime juridique uniforme régissant le mariage t le divorce est essentiel à l’application de l’article 16 de la Convention. Elle demande si le nouveau projet de loi sur le mariage, le divorce et les relations familiales vise à établir un régime uniforme au Malawi et, si tel est le cas, si ses dispositions s’appliqueront rétroactivement aux mariages existants, en exigeant, par exemple, l’enregistrement des mariages coutumiers.

M me  Tan remarque que les hommes et les femmes ne jouissent pas de l’égalité des droits de propriété dans le mariage et qu’il n’existe aucune loi sur cette question. Elle aimerait savoir si la Commission juridique examinera la question des droits de propriété afin d’éliminer toute discrimination, et si elle prendra également des mesures en vue de sauvegarder les droits des veuves et des enfants dans les mariages coutumiers.

M. Silungwe (Malawi) tient à assurer les membres du Comité que le processus de réforme juridique s’est efforcé de répondre à toutes les questions soulevées. La nouvelle loi sur le mariage interdit la polygamie, et fixe à 18 ans l’âge minimum au mariage, sans autoriser de consentement des parents pour un mariage à un plus jeune âge. Un processus d’examen constitutionnel traitera de la disparité entre le droit international et la section 22 de la Constitution concernant le mariage des enfants.

M me  Gabr souligne qu’un grand nombre des réformes juridiques et des amendements discutés se présentent encore sous forme de projets de loi, et elle aimerait avoir l’assurance qu’ils déboucheront prochainement sur des lois entérinées par le Parlement.

M me  Banda (Malawi) précise que le Parlement a déjà été saisi du projet d’amendement à la loi sur la citoyenneté et du projet de loi sur le mariage, le divorce et les relations familiales. En outre, la question de l’abolition du mariage des enfants a été vivement débattue au sein du Gouvernement, et elle a bon espoir que la Constitution sera amendée.

M me  Belmihoub-Zerdani souligne qu’après avoir indiqué qu’il avait sérieusement l’intention de retirer ses réserves sur la Convention, le Malawi a fait des progrès sensibles dans beaucoup de domaines. Elle estime que les commentaires du Comité pourraient être utiles au Gouvernement alors qu’il continue de réviser sa législation. Le Malawi peut compter sur tous les membres du Comité pour lui offrir l’aide spécialisée nécessaire. L’objectif commun doit être la ratification universelle de la Convention.

M me  Banda (Malawi) déclare que la délégation a tiré de nombreuses leçons de son dialogue avec le Comité, et elle se rend compte que le pays a encore beaucoup de chemin à parcourir. La démocratisation a commencé il y a un peu plus de 10 ans, et les libertés commencent à peine à se faire sentir, surtout parmi les Malawiennes. Nul n’aurait pu imaginer, il y a encore quelques années, que le Malawi aurait prochainement une commission des droits de l’homme présidée par une femme ou que le Parlement serait saisi d’un projet de loi sur la violence domestique. Les textes de projets de loi débattus seront transmis au Comité. Le prochain rapport devrait montrer que tous les textes de loi critiques ont été adoptés.

La séance est levée à 16 h 40.