Trente-cinquième session

Compte rendu analytique de la 732e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 24 mai 2006, à 15 heures

Président e:Mme Manalo

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial et deuxième rapport combinés de la Malaisie (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial et deuxième rapport combinés de la Malaisie (suite) (CEDAW/C/MYS/1-2, CEDAW/C/MYS/Q/2 et Add.1)

À l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation de la Malaisie prennent place à la table du Comit é.

Article 11 (suite)

M me  Faizah Mohd Tabir (Malaisie) dit, en réponse aux questions posées lors de la dernière séance, qu’afin d’encourager les femmes à entrer dans la population active, en particulier au niveau des cadres et des postes de direction, le Gouvernement les aide à remplir leurs multiples rôles par des aménagements divers tels que travail à domicile, travail à temps partiel ou selon des horaires adaptés, organisant des programmes de reconversion et mettant en place des équipements de garde d’enfants. Les incitations offertes aux employeurs du secteur public et les allégements fiscaux offerts aux employeurs du secteur privé pour établir des garderies d’enfants sur les lieux du travail n’ont guère donné de résultats; à l’issue de consultations, de nouvelles propositions ont été formulées. Le Ministère de promotion de la femme, de la famille et de la communauté a envisagé aussi de créer des centres communautaires de garderie d’enfants à l’intention des familles à faibles revenus, centres qui seraient dirigés par des organisations non gouvernementales reconnues avec une certaine participation financière de l’État. On en compte 10 jusqu’à présent.

Les travaux de recherche qui ont été faits sur l’inadéquation entre les qualifications académiques des femmes et leurs possibilités d’emplois ont tout d’abord montré que, s’il est vrai que les femmes peuvent être plus qualifiées que les hommes, les employeurs du secteur privé préfèrent engager des hommes parce qu’ils pensent qu’ils feront preuve d’une plus grande indépendance dans leur travail. Tel n’est cependant pas le cas dans le secteur public.

M. Mohd Radzi Harun (Malaisie) dit que la preuve la plus récente que le Gouvernement a donnée de sa volonté de protéger les employées de maison de nationalité étrangère est le Mémorandum d’accord qui a été conclu au bout de deux années de négociations avec l’Indonésie concernant les conditions de travail comme les salaires, les heures de repos, l’offre d’un logement, d’une alimentation, de soins médicaux et d’indemnités acceptables et stipulant qu’un contrat de travail ayant force juridique doit être signé avec l’employée avant de commencer à travailler. Toute exploitation des employées de maison relève du Code pénal malaisien.

M. Aminuddin bin Ab. Rahman (Malaisie) dit que, tout comme les autres, les travailleurs immigrés sont couverts par la législation du travail du pays, à savoir la loi de 1955 sur l’emploi, la loi de 1967 sur les relations de travail et la loi de 1952 sur la rémunération des travailleurs, laquelle contient une disposition spéciale aux termes de laquelle l’employeur est obligé d’assurer tout travailleur immigré qui n’est pas résident permanent contre les accidents liés au travail et d’assurer le rapatriement des invalides. Le prochain rapport périodique donnera des statistiques concernant le nombre de plaintes portées par des travailleurs immigrés. Le Ministère des ressources humaines inspecte périodiquement les lieux de travail et fait régulièrement la lumière sur les plaintes portées par des travailleurs immigrés afin de veiller à ce que les employeurs respectent la législation du travail et les relations employeurs-salariés.

M me  Faizah Mohd Tabir (Malaisie) dit que les hommes et les femmes bénéficient des mêmes droits à pension d’État, dont le montant varie selon le nombre d’années d’activité. En ce qui concerne les allocations de maternité, les femmes payées au jour le jour ont droit à une indemnité journalière de maternité tandis que celles qui sont salariées perçoivent une indemnité mensuelle de maternité. La Malaisie ne fait rien pour inciter les petites entreprises à verser une indemnité de maternité et Mme Faizah Mohd Tabir voudrait en savoir davantage sur le modèle allemand dont on a parlé.

M me  Shin observe que le Mémorandum d’accord a permis de résoudre un certain nombre de problèmes de base des travailleurs migrants en disposant que l’employeur signe le contrat avec l’employé et non plus, comme avant, avec l’agence. Elle se demande toutefois ce que le nouveau Mémorandum prévoit concernant le comportement de l’employeur et s’il permet à une employée de maison de nationalité étrangère qui a porté plainte pour harcèlement sexuel ou violence de la part de son employeur de changer d’employeur même pendant tout le temps que durent l’enquête et le jugement de son affaire. Les trois foyers d’organisations non gouvernementales qui existent pour accueillir les victimes de violence domestique ne sont pas suffisants pour assurer la protection de ces femmes. Il serait intéressant de savoir si on informe les employées de maison de nationalité étrangère de leurs droits et si on leur indique, avant la signature du contrat, un numéro à contacter en cas d’urgence.

La Présidente, prenant la parole en tant que membre du Comité, demande comment sont protégées les travailleuses migrantes dans les cas où il n’a pas été conclu d’accord de gouvernement à gouvernement.

M.  Mohd Radzi Harun (Malaisie) dit que même si elle a porté plainte contre son employeur, une employée de maison ne peut pas changer d’employeur parce que son permis de travail lui a été délivré pour cet employeur. Le comportement des employeurs fait l’objet de temps à autre d’un contrôle du service de l’immigration, lequel est en possession d’une copie du contrat employeur-employée. Comme le Mémorandum d’accord précise ce que sont les liens entre les deux gouvernements par l’intermédiaire de la mission du pays en Malaisie, un dispositif officiel est en place en ce qui concerne les numéros de téléphone à contacter en cas d’urgence.

Article 12

M me Tavares da Silva fait observer que, si le rapport indique que l’accès des femmes aux soins de santé est généralement bon, le Comité tient de source extérieure que les jeunes femmes ont du mal à obtenir des renseignements de santé sexuelle et génésique et qu’elles sont amenées de ce fait à avoir recours en grand nombre à l’avortement. Elle demande si l’éducation sexuelle existe et si elle est obligatoire, si les jeunes femmes y ont accès de même qu’aux services de santé génésique et s’il y a des pesanteurs culturelles qui conditionnent la vie des femmes et qui risquent de compromettre les chances de succès des politiques et des stratégies gouvernementales. Compte tenu du fait qu’il y a eu une très forte escalade des cas de VIH/sida chez les hommes et que près de la moitie des femmes qui en ont été touchées jusqu’ici sont des femmes mariées, il est également de la plus haute importance de faire prendre aux hommes conscience de leur responsabilité sexuelle.

M me Coker-Appiah dit que, si la Malaisie assure des services de santé dans un certain nombre de domaines, la question est de savoir s’ils sont accessibles à tous en termes de coût ou de facteurs culturels. On ne dispose apparemment pas de données suffisantes, mais il faudrait continuer à recueillir des statistiques afin de pouvoir suivre l’évolution de la situation. Même si les efforts déployés en vue de privatiser les soins de santé sont couronnés de succès, il n’est pas interdit de se demander si les couches vulnérables de la population y auraient encore accès étant donné l’objectif de rentabilité visé. On n’en a pas suffisamment dit sur ce que font les pouvoirs publics eux-mêmes pour promouvoir la pratique de contrats normalisés conformes à l’équité dans lesquels seraient précisées, à l’intention de toutes les employées de maison de nationalité étrangère, les conditions d’accès aux soins de santé, les heures de travail et ainsi de suite.

M me Pimentel aimerait avoir des précisions sur ce que font les pouvoirs publics en vue d’améliorer les services de planification familiale par l’introduction de méthodes modernes de contraception et en cessant d’en interdire la publicité. Elle serait également curieuse de savoir ce qui est fait en vue d’éliminer l’inégalité d’accès à la planification familiale pour des raisons liées à la géographie, à l’âge ou à la nationalité; de réduire le nombre de décès des suites d’un avortement à risques et d’assurer l’application pratique des exceptions légales de santé à l’avortement; de rechercher les causes de plus forte incidence de décès maternels parmi les populations fragilisées; d’assurer l’application des textes législatifs relatifs à la santé génésique des adolescents et améliorer l’accès des adolescents aux services de planification familiale; et d’améliorer la qualité de l’éducation sexuelle dans les écoles.

M me Hajjab Rosnah bt. Hj. Ismail (Malaisie), reconnaissant que les informations sur les besoins de santé des adolescents sont rares, dit qu’au cours des cinq dernières années des dispensaires spéciaux pour adolescents ont été créés dans les centres de santé du pays dans le cadre de l’expansion des soins de santé primaires. L’éducation sexuelle des adolescents est assurée dans ces dispensaires ainsi que dans les écoles avec le concours du Ministère de l’éducation.

Le programme de sensibilisation à l’existence du VIH/sida vise à répondre aux besoins des hommes et des femmes. Des mesures sont prises pour prévenir la transmission du VIH/sida de la mère à l’enfant, notamment par le dépistage de l’infection chez les femmes enceintes et la fourniture de renseignements sur les effets de l’infection et ses modes de transmission. En outre, le titre « les femmes et le VIH » a une fois été choisi comme thème de l’année pour la campagne en faveur d’un mode de vie sain.

Il faudrait davantage de données sur l’accessibilité des services de santé. Le système d’information sur la gestion de la santé a été créé pour recueillir des données aux niveaux du district, de l’État et de la Fédération, et on prévoit de les ventiler par sexe.

Les travailleurs étrangers doivent payer pour se faire soigner, mais ils ont droit à un traitement d’urgence pour raisons humanitaires. Toutefois, étant donné le coût élevé des soins de santé, on leur fera subir à l’avenir un examen de santé dès leur entrée dans le pays et ils seront renvoyés dans leur pays d’origine si leur état de santé n’est pas jugé satisfaisant.

Aucun effort ne sera épargné pour faire en sorte que les catégories de population fragilisées ne se voient pas interdites d’accès aux soins de santé du fait de leur privatisation. Les dépenses de santé sont élevées : le Ministère de la santé vient au troisième rang de tous les ministères pour l’importance du budget. Jusqu’ici, les soins de santé ont été fortement subventionnés, mais à l’avenir il est probable que les personnes qui en ont les moyens auront à payer pour se faire soigner.

En ce qui concerne les questions de planification familiale, Mme Hajjah Rosnah bt. Hj. Ismail dit que seule une très faible proportion d’avortements entraîne le décès de la mère.

M me Faizah Mohd Tabir (Malaisie) dit que l’on a, par l’intermédiaire de l’office national pour le progrès de la population et de la famille, mis en place 50 dispensaires un peu partout dans le pays afin de faire connaître les méthodes modernes de planification familiale. Des directives nationales sur l’éducation sexuelle dans les écoles paraîtront dans un proche avenir.

M me Hajjah Rosnah bt. Hj. Ismail (Malaisie) dit que des efforts sont faits dans le cadre de l’initiative de maternité sans danger en vue de réduire la mortalité maternelle. Il s’est créé un grand nombre de centres d’accouchement alternatifs dotés d’équipements modernisés et d’un personnel hautement qualifié. L’institution d’un système de carnets de santé a permis d’assurer la continuité des soins pour les femmes enceintes. Un système confidentiel d’enquête a également été mis en place pour rechercher les causes de décès maternel.

Article 14

M me Zou dit qu’il est regrettable qu’une grande partie des données du rapport sur les femmes rurales date de 1995. Avec les progrès de la mondialisation, il y a tout lieu de penser que les problèmes qui concernent ces femmes ont changé de manière appréciable depuis lors. Étant donné qu’un dixième des ménages ruraux vit encore sous le seuil de pauvreté, Mme Zou aimerait recevoir des renseignements sur les mesures qui seraient éventuellement prises en vue d’éradiquer la pauvreté dans les zones rurales et sur le nombre d’hommes et de femmes qui ont bénéficié du programme d’atténuation de la pauvreté mentionné dans le rapport. Elle demande également si, pour pouvoir avoir accès au crédit, les femmes doivent figurer sur la liste des très pauvres établie par les pouvoirs publics. Enfin, elle demande si les femmes des zones rurales ont aisément accès aux équipements de santé, aux services de planification familiale et à l’information sur la prévention du VIH/sida et si les femmes qui sont victimes de violence domestique ont droit à l’assistance judiciaire.

M me Tan dit que le grand nombre de femmes rurales qui travaillent pour leur famille sans être payées sont soumises de ce fait à une forme d’exploitation. Elle voudrait savoir quelles mesures on prend pour faire en sorte que ces femmes soient payées pour leur travail. Elle demande aussi si on leur assure des prestations de sécurité sociale et, si tel n’est pas le cas, si on envisage de le faire. Notant le peu de part que prennent les femmes à la prise des décisions dans les organisations rurales, elle voudrait savoir ce que font les pouvoirs publics pour aider les femmes rurales à former leurs propres associations dans le but de trouver réponse aux grandes questions qui les agitent, comme la maîtrise des ressources et le développement des villages.

Elle demande s’il y a, dans les zones rurales, suffisamment de centres auxquels s’adresser quand on est victime de viol et autres formes de violence et, sinon, ce que les pouvoirs publics envisagent de faire pour assurer les services nécessaires à cet égard.

Il ressort d’informations de source indépendante qu’en vertu des traditions propres à une communauté de l’État de Sabah une épouse ne peut prétendre à aucun gain de survie en cas de décès de son mari ni revendiquer le droit à aucun bien acquis par l’une ou l’autre des parties durant le mariage. Mme Tan aimerait savoir si des études ont été faites concernant l’impact de ces lois sur la vie des veuves de la communauté.

M me  Shin demande quels critères on utilise pour calculer la participation à la population active. Étant donné que la participation des femmes rurales (43 % en 2000) était légèrement inférieure à ce qu’elle est pour l’ensemble des femmes, elle se demande si ce chiffre ne comprend pas les membres non payés de la famille qui travaillent à temps partiel dans leur propre exploitation.

Elle voudrait savoir si une épouse qui travaille à temps partiel dans une exploitation familiale a le droit d’adhérer à l’association nationale des exploitants agricoles si son mari en est déjà membre et si quelque chose est fait pour encourager les femmes à adhérer à l’association et à y jouer un rôle de premier plan.

Elle félicite l’État partie des efforts qu’il fait pour améliorer la formation des femmes rurales à l’exercice d’un emploi et à l’art de la direction et demande s’il est tenu compte de l’intérêt des deux sexes dans cette formation de même que dans celle qui est assurée aux formateurs.

M me  Faizah Mohd Tahir (Malaisie) dit que des efforts sont faits pour tenir compte de la situation des femmes rurales dans la collecte de données ventilées par sexe mais que l’on ne dispose pas encore de données exhaustives sur ce point. Les pouvoirs publics ont mis en place un certain nombre de mesures visant à atténuer la pauvreté parmi les femmes rurales, comme en les encourageant à prendre part à l’activité économique, en assurant une formation en informatique et autres compétences et en réalisant des programmes sur la santé, l’hygiène et des questions d’ordre social comme la sensibilisation à la drogue. Les femmes rurales peuvent obtenir des prêts de l’État. Celles qui figurent sur la liste des cas de pauvreté extrême établie par le Ministère du développement rural et régional bénéficient, elles aussi, d’une aide de l’État.

Il n’est pas prévu, dans l’état actuel des choses, d’accorder le bénéfice des prestations de sécurité sociale aux personnes qui travaillent pour leur famille sans être payées. La délégation malaisienne sera heureuse de recevoir des conseils du Comité à cet égard. En 2004, les femmes représentaient 26 % des membres de l’organisation locale des exploitants agricoles, mais seulement 6 % des membres du conseil d’administration. Il n’a pas été fait d’études concernant l’impact des lois coutumières sur les veuves.

Le Ministère de la promotion de la femme, de la famille et de la communauté assure des programmes de formation des femmes rurales à l’exercice d’un emploi et à l’art de la direction par l’intermédiaire des conseils pour la promotion de la femme et de la famille qui ont été mis en place un peu partout dans le pays. Mme Faizah Mohd Tahir n’est pas en mesure de donner des précisions sur la méthode utilisée pour calculer la participation à la population active, mais pour autant qu’elle sache, on ne tient pas compte des personnes qui travaillent pour leur famille sans être payées

M me  Hajjah bt. Hj. Ismail (Malaisie) dit que les services de planification familiale ont, avec les années, vu leur portée s’étendre à un nombre croissant de zones rurales et leur intégration se faire de plus en plus avec les centres de santé et les dispensaires un peu partout dans le pays. Il existe des centres de crise dans tous les hôpitaux de district et d’État.

Articles 15 et 16

M me  Bokpe-Gnacadja se dit préoccupée par les amendements apportés au projet de loi de 2005 relatif au droit islamique de la famille (territoires fédéraux) (amendement). Le fait d’autoriser un mari polygame à déposséder son ou ses épouse(s) et à utiliser les biens matrimoniaux détenus en copropriété pour préparer la dot pour une nouvelle épouse revient à obliger ces femmes à choisir entre entretien et partage des biens matrimoniaux. Pourquoi les femmes n’auraient-elles pas le droit, de leur côté, de prendre plus d’un mari? Il est troublant de constater que les nouvelles dispositions renforcent le droit qu’a un homme de contracter un mariage polygame si un tribunal estime que cela est « juste ou nécessaire », le terme « ou » ayant remplacé le terme « et » (CEDAW/C/MYS/1-2, par. 405). Mme Bokpe-Gnacadja demande pourquoi ce changement a été fait. L’État partie devrait donner des précisions concernant les dispositions législatives et procédurales qui ont été adoptées en vue de maîtriser la pratique de la polygamie. Il semblerait que les nouvelles dispositions rendent l’exercée de cette maîtrise plus difficile et que cela ouvre plus grande la porte aux abus.

Sans doute la Constitution dispose-t-elle que tous sont égaux devant la loi, mais on peut se demander ce qu’il en est dans les faits. Par exemple, dans le cas où un mari non musulman se convertit à l’islam, convertit aussi ses enfants et épouse une seconde femme qui est musulmane, qu’en est-il du premier mariage devant un tribunal de la charia? L’État partie devrait dire de quels recours dispose la première épouse pour se voir attribuer la garde de ses enfants étant donné que le code civil n’a pas juridiction pour connaître d’affaires de conversion à l’islam. Ce sont là des questions auxquelles il importe d’urgence de trouver réponse.

M me  Tan , se référant au paragraphe 380 du rapport de l’État partie, demande si l’on peut discerner une tendance au recul de la discrimination à l’égard de la femme dans le cadre familial, en particulier du fait de programmes tels que SMARTSTART et de la formation à l’épanouissement de la famille organisée par l’office national pour le progrès de la population et de la famille (CEDAWC/MYS/Q/2/Add.1, p. 29). L’égalité de fait commence par une évolution des mentalités. En ce qui concerne l’âge minimum au mariage, on aimerait savoir si le Gouvernement prend des mesures tendant à lever ses réserves concernant l’article 16, paragraphes 1 a) et 2, de la Convention en vue de fixer à 18 ans l’âge minimum au mariage sans distinction de sexe. Pareille mesure permettrait aux filles et aux jeunes femmes d’améliorer leur condition par l’instruction et le travail, renforçant ainsi leur indépendance économique et améliorant leur pouvoir de négociation à l’intérieur du mariage. Leur dépendance économique, notamment, empêche les femmes de sortir d’un mariage qui ne leur a valu que problèmes ou violence et de commencer une vie nouvelle.

M me Nizam Zakaria (Malaisie) dit que ce que l’on peut constater dans les États de la Malaisie qui ont institué la loi modèle relative à l’Islamic Family Law Enactments/Act, c’est qu’on n’y fait pas de discrimination contre les femmes et que le code de la charia y est administré avec de bien meilleurs résultats en ce qui concerne les affaires de famille. Et le mari ne jouit pas d’un avantage inéquitable dans le partage des biens matrimoniaux. Historiquement, haria sepencarian (biens matrimoniaux communs) relève de la pratique du droit coutumier plutôt que de la charia. D’après cette pratique, les biens acquis par la femme seulement durant le mariage ne sont pas considérés comme biens matrimoniaux communs. La contribution de la femme à l’entretien de la famille et du foyer et son intervention dans toutes autres affaires relatives à l’acquisition de biens sont considérées comme efforts communs; elle a droit à sa part des biens même si elle ne gagne rien. La contribution du mari à l’entretien de la famille et du foyer ne serait pas considérée comme effort commun; c’est pourquoi il n’a droit à aucune part des biens de sa femme si elle est la seule à travailler. Toutefois, toute contribution du mari à l’amélioration des biens de sa femme serait considérée comme effort commun, lui donnant ainsi droit à une part des biens communs. S’il n’y apporte pas d’améliorations, il ne pourra revendiquer aucune part de biens qui appartenaient déjà à sa femme avant leur mariage.

Se référant aux préoccupations suscitées par l’utilisation des mots « juste ou nécessaire » en ce qui concerne le mariage polygame, Mme Nizam Zakaria dit que le terme « juste » ne prétend pas traduire le concept de justice établi par l’islam.

M me Azailiza Mohd Ahad (Malaisie) dit, à propos des amendements à la loi de 1976 sur la réforme du droit (mariage et divorce), qu’un comité relevant du Cabinet du Ministre de la justice a été mis sur pied pour réfléchir, notamment, sur l’age au mariage, sur les questions qui tournent autour de la conversion à l’islam ou de l’abjuration de l’islam, de la dissolution du mariage pour cause de conversion et des compensations qui s’y rapportent. Reconnaissant la nature sensible et complexe des questions de conversion et compte tenu des opinions émises par diverses catégories de population à cet égard, le Gouvernement s’applique à traiter cette question selon une démarche holistique afin d’éviter de créer du mécontentement au sein de la population malaisienne.

M me Simms demande, à propos des biens matrimoniaux, pourquoi la contribution d’un mari à l’entretien de la famille n’est pas considérée comme ayant autant de valeur que celle de sa femme. Pareille inégalité de traitement équivaut à de la discrimination à l’égard des hommes. L’État partie devrait indiquer clairement ce qui constitue des biens matrimoniaux, en particulier dans les familles pauvres dont les membres féminins ne sont pas en mesure de contribuer à l’achat de terres. Il est préoccupant de savoir que les biens qu’un mari a reçus de sa famille en cadeau avant son mariage ne font pas partie des biens matrimoniaux communs parce que cela met la femme dans une situation de faiblesse. La question des biens matrimoniaux rend aussi très compliqué le problème de la polygamie.

Il serait utile de faire une analyse de l’influence des facteurs socioéconomiques et autres sur l’âge au mariage, en particulier sur les mariages précoces. Le fait que des enfants qui ont entre 10 et 14 ans peuvent se marier est tout à fait inacceptable. À cet égard, Mme Simms demande quel est l’âge du consentement et si la notion de violence charnelle est prise en compte dans la législation malaisienne étant donné que des hommes qui épousent des enfants devraient être considérés comme des violeurs plutôt que comme des maris. L’État partie devrait indiquer quels programmes sont en place pour protéger les filles qui tombent enceintes tout en fréquentant l’école, étant donné en particulier que les garçons qui en sont cause peuvent poursuivre leurs études, ce qui peut être considéré comme de la discrimination. Il serait intéressant de savoir quels facteurs influent sur la décision de ces filles de cesser d’aller à l’école – comme, par exemple, l’opprobre qui s’attache au fait d’être enceinte sans être mariée – et quelle est l’importance relative de chacun de ces facteurs, en particulier au sein des minorités ethniques. Ni pratiques religieuses ni dispositions législatives ne devraient porter atteinte au droit qu’ont les enfants d’être enfants.

M me Sch ö pp-Schilling se dit alarmée par les chiffres relatifs au mariage, au divorce et à la séparation parmi les enfants qui ont entre 10 et 14 ans. Le prochain rapport périodique devrait montrer, sous forme de pourcentage, comment se répartissent les femmes mariées en fonction de l’âge au mariage. En raison du fait qu’il est à craindre qu’un mariage précoce ne conduise de jeunes femmes à abandonner leurs études, il serait utile de corréler l’âge au mariage des jeunes femmes avec leur instruction et de dire quelle proportion de ces femmes poursuivent leurs études une fois mariées.

M me Tavares da Silva se dit déconcertée par le débat sur les ambiguïtés de la loi islamique sur la famille et préoccupée par le fait que tant le Comité que les organisations non gouvernementales ont eu du mal à comprendre les dispositions de cette loi. Elle demande, à cet égard, si les juges malaisiens ont bien été mis au courant des implications et des interprétations possibles de cette loi et de ses amendements, ou si, eux aussi, sont susceptibles de mal l’interpréter. Le Gouvernement devrait tenir compte de ce risque.

M me Bokpe-Gnacadja tient à préciser, en ce qui concerne le projet de loi de 2005 relatif à la loi islamique sur la famille (Territoires fédéraux) (Amendement), que l’interprétation du terme « juste » n’est pas ce qui la trouble. Ce qui la trouble, c’est plutôt le remplacement de « et » par « ou » dans la phrase « Le tribunal peut autoriser la polygamie s’il est convaincu que le mariage envisagé est juste et nécessaire » [annexe IX des réponses à la liste des points et questions, par. iii)], car cela semble rendre la polygamie plus facile pour les hommes. Ce qui est préoccupant en ce qui concerne les biens matrimoniaux communs, c’est qu’il faudrait que les juges saisissent clairement ce que l’on entend par biens matrimoniaux communs.

M me Coker-Appiah, faisant siennes les préoccupations de la précédente intervenante, demande si le droit islamique protège les droits d’une épouse non musulmane dont le mari a décidé de se convertir à l’islam. Il est particulièrement inquiétant de constater que les tribunaux n’ont pas compétence pour connaître d’affaires relatives à des enfants quand une des parties au mariage est soumise au droit de la charia.

M me  T an dit que la disposition de la loi portant promulgation de la loi islamique sur la famille qui établit que la mère est la personne la plus indiquée pour prendre soin de son enfant alors que la tutelle en est confiée au père semble discriminatoire du fait qu’elle ne reconnaît pas à la mère de droits de tutelle sur ses enfants. À cet égard, elle demande si les 11 États malaisiens qui n’ont pas encore adopté la loi de 1961 sur la tutelle des enfants en bas âge pourront adopter cette loi une fois modifiée.

M me Azailiza Mohd Ahad (Malaisie) dit que le projet de loi de 2005 sur le droit islamique de la famille (Territoires fédéraux) (Amendement) contient des dispositions qui tendent à renforcer la protection des femmes, mais elles ne sont pas toujours clairement libellées. Une révision de son libellé est en cours afin d’en faire disparaître toute ambiguïté. En ce qui concerne le pouvoir donné aux tribunaux d’autoriser un mariage polygame s’ils sont convaincus que le mariage envisagé est « juste et nécessaire », le mot « et » a été supprimé parce que le mot « juste » est jugé plus fort que « juste et nécessaire » et que cela est de ce fait plus difficile à prouver.

À la question relative à la loi de 1961 sur la tutelle des enfants en bas âge (loi 351), l’intervenante répond que le Gouvernement a engagé les 11 États dans le processus de consultation, mais qu’ils ne sont jusqu’ici que quatre à avoir adopté la loi.

M me Faizah Mohd Tabir (Malaisie) dit que la délégation malaisienne partage les préoccupations du Comité concernant le fait que des filles qui ont entre 10 et 14 ans sont autorisées à se marier, mais elle tient à faire remarquer que l’âge moyen au mariage est en fait bien plus élevé. En ce qui concerne le taux de décrochages scolaires, il n’y a qu’un faible pourcentage de filles à quitter l’école, ce qu’elles font en général pour des raisons socioéconomiques ou pour cause de grossesse. Les pouvoirs publics font le nécessaire pour introduire des programmes d’éducation sexuelle dans les écoles et pour améliorer la situation socioéconomique des familles concernées.

M me Shin recommande que, dans le prochain rapport périodique, les données sur l’âge au mariage par niveau d’instruction comprennent des statistiques pour les zones tant rurales qu’urbaines. Faisant remarquer qu’il n’a pas été répondu pleinement à sa question, elle voudrait savoir si les travailleuses agricoles dont le travail n’est pas rémunéré ont le droit de devenir membres de l’Association nationale des agriculteurs. Elle aimerait aussi qu’il soit répondu à sa question sur le point de savoir s’il a été tenu compte de la problématique des sexes dans la formation des personnes qui forment en vue d’une profession et de l’exercice de responsabilités.

M me Sch ö pp-Schilling fait remarquer qu’il est difficile d’encourager les employeurs à mettre en place des garderies d’enfants, mais que les entreprises pourraient « acheter des places » dans des garderies publiques. Elle engage vivement le Gouvernement à améliorer l’image de ces garderies, qui passent souvent pour être inférieures et bonnes seulement pour les familles à faibles revenus.

M me Pimentel souhaiterait recevoir des éclaircissements concernant l’interprétation que donne l’État partie du viol marital. Ce qu’il est envisagé d’ajouter au Code pénal ne concerne pas le viol marital mais plutôt le comportement d’un mari qui menace sa femme de violence physique si elle refuse de consentir à des relations sexuelles. La délégation estime-t-elle que ce sont des notions identiques?

Le Comité s’est dit préoccupé par le fait qu’il n’est pas possible d’avorter en toute sécurité en Malaisie et il a fait savoir que le manque d’accès à la planification familiale et l’existence de lois hostiles à l’avortement tendent à coïncider avec la prévalence d’avortements à risques et de taux élevés de mortalité maternelle. C’est pourquoi il serait utile de savoir si le Gouvernement prend des mesures pour assouplir les dispositions législatives sur l’avortement.

M me Tavares da Silva aimerait savoir si la modification qu’il est envisagé d’apporter au Code pénal criminalise l’acte de viol ou l’usage de la force par le mari.

M me Azailiza Mohd Ahad (Malaisie) dit que la délégation n’a pas d’information sur le point de savoir si les femmes peuvent devenir membres de l’Association nationale des agriculteurs mais qu’il y sera pourvu dans le prochain rapport périodique. En ce qui concerne la prise en compte de la problématique des sexes dans la formation des personnes qui forment en vue d’une profession et de l’exercice de responsabilités, c’est là une question qu’étudie le Ministère du développement rural et régional. Mme Azailiza Mohd Ahad prend note des observations relatives aux garderies d’enfants et elle accueille avec satisfaction l’idée de demander aux entreprises de subventionner la réservation de places dans des établissements publics plutôt que de prévoir des aménagements à cet effet sur place. Elle tient aussi à préciser que les centres communautaires de garderie d’enfants sont ouverts à tous, mais subventionnés pour les familles à faibles revenus.

M.  Ahmad Razif Mohd Sidek (Malaisie) dit que la commission d’enquête parlementaire a, après mûre réflexion, conclu que l’on ne saurait faire du viol marital un délit du fait que cela serait contraire au droit de la charia. À titre de compromis, la commission a émis l’idée que le fait de faire violence ou la menace de faire violence à une épouse afin de l’obliger à accepter un rapport sexuel serait constitutif de délit.

M me Rosnah Ismail (Malaisie) dit que l’avortement est illégal sauf si la vie de la mère est en danger ou si le fœtus présente de graves malformations congénitales. Les statistiques montrent que les cas de mortalité maternelle pour cause d’avortement sont en baisse.

La Présidente, prenant la parole en qualité de membre du Comité, dit qu’il semble que le Gouvernement fait des efforts sincères en vue de combattre les mentalités patriarcales présentes dans la société malaisienne. Elle n’en demande pas moins à l’État partie de lever ses réserves sur les articles 15 et 16 de la Convention et de mettre en place, à l’échelle nationale, un dispositif pour la définition et l’application de politiques et de lois de nature à promouvoir la reconnaissance des droits fondamentaux d’êtres humains des Malaisiennes.

En ce qui concerne les réformes législatives en cours, il est impératif de criminaliser sans tarder la traite des personnes. Il faudrait aussi que l’État partie adopte une loi qui définisse la discrimination et qui prévoie l’égalité des femmes; des mesures temporaires spéciales et des actions de discrimination positive seraient utiles dans les domaines où les femmes demeurent désavantagées, comme en politique et en éducation. Il y aura aussi à sensibiliser le judiciaire au respect de la Convention et à son application. Enfin, la Présidente engage vivement le Gouvernement à élaborer des mesures législatives et juridiques garantissant les droits fondamentaux d’êtres humains des travailleuses migrantes.

En ce qui concerne la santé, le Gouvernement est à féliciter de son programme de lutte contre le VIH/sida. Toutefois, étant donné le lien qu’il y a entre avortement et mortalité maternelle, il faudrait revoir les textes relatifs à l’avortement. Il faudrait aussi mettre en place un programme de prestation de soins de santé en faveur des personnes désavantagées.

Enfin, la Présidente aimerait recevoir des informations de date plus récente sur la situation des femmes des zones rurales.

M me Faizah Mohd Tabir (Malaisie) dit que son gouvernement s’est pleinement engagé à assurer pleine protection aux travailleuses migrantes et qu’un comité ministériel sur les travailleurs étrangers a été mis sur pied. Sa délégation a pris note des recommandations de la Présidente et elle ne ménagera aucun effort en vue de promouvoir l’adoption d’une législation et de politiques sensibles à la problématique des sexes.

La séance est levée à 17 h 20.