Session extraordinaire

Compte rendu analytique de la 572e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 7 août 2002 , à 15 heures

Président :Mme Abaka

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique de l’Arménie

La séance est ouverte à 15 h 10.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique de l’Arménie (CEDAW/C/ARM/2; CEDAW/PSWG/2002/EXC/ CRP.1/Add.2 et CRP.2)

À l’invitation de la Présidente, M. Abelian, M me  Ayvazian et M me Hakobyan (Arménie) prennent place à la table du Comité.

Articles 1-6

M me Habokyan (Arménie) en réponse aux questions posées sur les articles 1 à 6 de la Convention, se félicite des connaissances étendues du Comité à propos de l’Histoire de l’Arménie et du rôle qu’y ont joué les femmes. Elle est déterminée à s’appuyer sur cette tradition et sur les atouts des femmes arméniennes, en particulier leur niveau d’instruction élevé et leur forte participation dans les organisations non gouvernementales. En sa qualité de Ministre déléguée à la condition féminine, elle assume la responsabilité de la coordination de toutes les activités en faveur des femmes des autres ministères ainsi que de promouvoir la coopération avec les ONG. Son Gouvernement s’est engagé à coopérer avec la société civile et à conjuguer les ressources afin d’augmenter l’efficacité de la mise en oeuvre des programmes. Les tâches de son Département comprennent notamment l’élimination de la ségrégation des femmes tant sur le plan de la hiérarchie que des secteurs d’activité sur le marché du travail, l’évaluation de l’impact sur les femmes des programmes de réduction de la pauvreté, la sensibilisation du public à la contribution positive des femmes dans les instances de décision, la reconnaissance et la promotion du rôle des femmes dans des processus d’instauration de la paix ainsi que leur participation dans les organes gouvernementaux ou électifs, ainsi que la formulation de recommandations relatives à de nouveaux projets de loi.

La traite des femmes est étroitement liée au taux élevé de chômage féminin. Son Gouvernement lutte contre la traite notamment en créant des possibilités d’emploi pour les femmes. Le modèle conceptuel proposé contre la violence envers les femmes sera une partie intégrante du Programme national et Plan d’action pour l’amélioration de la condition des femmes et le renforcement de leur rôle dans la société. Un rapport a été établi par le Gouvernement sur sa mise en oeuvre pour la période 1998-2000. Il sera officieusement distribué aux membres du Comité.

M me Ayvazian (Arménie) souligne que la traite et la migration sont deux phénomènes distincts : les migrants exercent leur droit de libre circulation, tandis que la traite constitue un crime. Commentant les dispositions de la loi sur la prostitution et sur la traite, elle note que le Code pénal en vigueur date de 1969 lorsque l’Arménie était une partie de l’Union soviétique. Des amendements sont envisagés.

Comme étape intermédiaire avant la création du poste de Médiateur, la Commission des droits de l’homme a été établie en 1998. À l’heure actuelle, six femmes en sont membres: deux représentent le Gouvernement et les ministères tandis que quatre sont nommées par des ONG. La Commission est habilitée à examiner des plaintes et à les transmettre pour action aux organes compétents du Gouvernement. Ses sessions sont ouvertes aux médias. Bien qu’il n’existe pas d’organes analogues à l’échelon régional, les membres de la Commission se déplacent dans les différentes régions pour y étudier la situation des droits de l’homme. Elles font rapport de leurs observations aux séances de la Commission.

Articles 7-9

M me Corti déclare que la participation croissante des femmes et leur représentation dans les instances de décision sont une condition préalable pour réaliser de véritables progrès dans l’amélioration de leur condition. En outre, la présence d’un nombre important de femmes dans des organes tels que l’Assemblée nationale contribuera à modifier la perception du rôle des femmes dans la société. Selon la Constitution arménienne, les femmes jouissent du même droit de vote que les hommes et sont éligibles à n’importe quel poste de l’État. Toutefois, pour appliquer cette disposition, le Gouvernement doit activement promouvoir la participation des femmes à la vie publique, notamment au moyen de mesures spéciales temporaires telles que décrites au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention. Ces mesures devraient permettre d’augmenter le nombre de candidates présentées par les partis politiques en s’appuyant sur la participation des femmes dans les ONG. Elle invite instamment le Gouvernement à se référer, à cet égard, à la recommandation générale no 23 du Comité.

M me Saiga dit partager les préoccupations exprimées à propos de la sous-représentation des femmes dans les organes électifs. Selon les réponses de l’État partie à la liste des questions soulevées (CEDAW/PSWG/2002/EXC/CRP2), des propositions ont été formulées et sont actuellement à l’examen. Elle serait intéressée de connaître les mesures spécifiques envisagées.

M me Tavares da Silva note que l’État partie aurait également dû fournir des chiffres sur le nombre de femmes aux postes électifs aux niveaux régional et local. Elle croit savoir qu’une tentative récente de faire adopter un projet de loi instituant un quota minimal de 5 % de femmes éligibles a échoué. Le chiffre de 5 % est particulièrement faible et ne fait pas honneur à la démocratie arménienne. Elle demande qui est à l’origine de cette mesure et si le Gouvernement a l’intention de poursuivre encore une politique de quotas. En dernier lieu, elle fait remarquer que si les femmes représentent environ 70 % des fonctionnaires dans les secteurs de la santé, de la culture et de l’éducation, il n’est mentionné nulle part dans le rapport de l’État partie si elles occupent des postes de décision de rang supérieur.

M me Kapalata exprime sa surprise de constater qu’en dépit de leur niveau élevé d’instruction, peu de femmes arméniennes sont représentées au Gouvernement à l’échelon international et qu’il n’existe pas de statistiques sur le nombre de femmes employées par les organisations internationales. Le monde ne peut pas se permettre de laisser les femmes arméniennes en dehors des enceintes internationales. Elle prie par conséquent instamment le Gouvernement de recourir aux mesures spéciales temporaires pour rectifier cette situation.

M me Gaspard (France) rappelle que si les arméniennes ont été parmi les premières à obtenir le droit de vote et à être représentées au Gouvernement déjà en 1918, la situation actuelle semble avoir régressé : aujourd’hui, à l’Assemblée nationale, elles n’occupent que 4 des 131 sièges et il n’y a pas de femmes ministres dans le Gouvernement. Sans une masse critique de femmes dans les lieux de pouvoir, les questions qui touchent les femmes sont négligées. L’idée que les femmes ne souhaitent pas entrer dans la vie publique et politique constitue une contre-vérité soutenue par les hommes en vue de protéger leurs positions. Il s’avère nécessaire de changer les attitudes à cet égard en soulignant les contributions positives des femmes aux décisions. Finalement, elle demande pourquoi l’État partie n’a pas fourni de données ventilées selon le sexe sur la représentation des femmes dans la fonction publique, ainsi que demandé à la question 11 de la liste (CEDAW/PSWG/2002/EXC/CRP.1/Add.2).

M me Ayvazian dit qu’un débat est en cours au sein du Gouvernement et de la société civile à propos du bien-fondé d’imposer des quotas. Les enquêtes montrent que le public n’y est pas favorable. Son Gouvernement n’envisage pas de présenter un projet de loi sur les quotas électoraux dans un futur proche. Expliquant l’absence de femmes dans les postes de décision de rang supérieur dans la fonction publique, elle fait remarquer qu’il est difficile pour les femmes d’obtenir une promotion, non seulement en raison des stéréotypes mais également en raison de problèmes pratiques pour combiner la vie familiale et la vie professionnelle. Son Gouvernement reconnaît la valeur du rôle des ONG, notamment les ONG féminines. La voix de ces organisations se fait entendre. Elle relève dans ce contexte, le débat à propos de l’accession de l’Arménie à la Convention sur les droits politiques des femmes, initiative lancée par les organisations non gouvernementales de femmes.

M. Abelian (Arménie) rappelle que malheureusement l’Arménie au début du siècle n’est restée indépendante que durant deux ans, de 1918 et 1920, avant de devenir une République socialiste soviétique. Après la chute de l’Union soviétique, l’Arménie a dû créer son corps diplomatique du jour au lendemain, le plus souvent avec des personnes qui n’avaient pas été formées à HNocette fonction. Et les nouveaux partis politiques constitués à la hâte pour combler le vide, se sont tout naturellement fondés sur les alliances politiques traditionnelles locales. L’égalité des sexes avance lentement, mais la volonté politique est là pour suivre l’exemple français en visant la représentation paritaire. En ce qui le concerne, il souhaiterait qu’il y ait davantage de femmes dans le corps diplomatique et il est heureux de signaler qu’une femme vient d’être nommée Première Secrétaire à la Mission permanente. L’équilibre entre les sexes dans le service diplomatique est aujourd’hui presque aussi élevé que dans l’Organisation des Nations Unies : sur 188 fonctionnaires des Affaires étrangères, 72 sont des femmes. Leur proportion hors du pays est plus faible. Il n’y a que 12 Ambassadrices en poste à l’étranger.

M me Ayvazian (Arménie) signale que les réponses à certaines questions de la liste sont manquantes en raison de la carence de données ventilées selon le sexe, une situation que la délégation espère corriger dans le prochain rapport.

M me Ferrer Gómez demande dans quelle mesure les femmes sont actives dans les partis politiques, en termes de proportion de membres et aux postes de direction. Si ces données ne sont pas disponibles, la délégation pourrait-elle les fournir dans son prochain rapport?

M me Kwaku dit que le rapport reconnaît que la participation des femmes à la vie publique est faible en Arménie. Elle a été heureuse d’entendre lors de la présentation orale que le Gouvernement et les organisations non gouvernementales s’attachent à corriger cette situation et elle espère, elle aussi, que le prochain rapport fera état des progrès réalisés.

M me Schöpp-Schilling exprime son empathie avec les difficultés éprouvées par l’Arménie dans sa reconstruction sociale. Elle encourage la Ministre déléguée à identifier des hommes tels que l’Ambassadeur qui appuieront les stratégies requises pour créer des institutions dans lesquelles les femmes auront leur mot à dire.

Si elle peut se permettre de suggérer un cadre pour ces stratégies, la première chose à faire serait de mettre en place un organisme national de promotion des droits des femmes. Ensuite, il est crucial d’augmenter la participation des femmes dans les organismes gouvernementaux; pour chaque poste vacant, deux noms de sexe différent devraient être proposés pour faire échec à l’affirmation que l’on ne trouve pas de femmes qualifiées. Enfin, en cherchant à augmenter le nombre de femmes au Parlement, il est important que le nom des candidates ne soit pas placé en queue de liste.

L’appui bilatéral ainsi que celui de la communauté internationale devraient être mobilisés pour appuyer leur formation et fournir des conseils aux femmes qui se lancent dans la politique pour renforcer leurs capacités de réussite. Il y a suffisamment de temps d’ici les prochaines élections dans un an et demi pour faire appel à l’aide internationale ainsi que pour identifier les personnes au sein du Gouvernement susceptibles d’appuyer un plan d’action. Afin d’augmenter la présence des femmes au Gouvernement et dans les départements ministériels, il convient de recourir à une discrimination positive telle que mentionnée au paragraphe 1 de l’article 4. Sans participation des femmes, un pays n’est pas une véritable démocratie et n’est pas en mesure d’être efficace pour assurer le bien-être de la moitié de sa population.

M me Ayvazian (Arménie) exprime la reconnaissance de son Gouvernement pour les suggestions qu’il s’attachera à mettre en oeuvre. Elle note par exemple que la participation des femmes dans les partis politiques, dans les grandes lignes, est inférieure à 20 % dans l’ensemble. En général, les femmes ne sont pas actives dans la politique en Arménie, mais le Gouvernement est conscient de ses responsabilités pour créer un climat qui leur soit plus favorable. Au cours de ces dernières années, plusieurs programmes ont été lancés pour développer les compétences politiques des femmes en vue de leur participation dans la vie publique, et le Ministère espère que ces programmes porteront leurs fruits.

Articles 10-14

M me Corti déclare que les réalisations de l’Arménie dans le domaine de l’éducation sont dignes d’éloges. Elle accueille avec une grande satisfaction l’observation de l’augmentation notable du nombre de filles ayant choisi d’étudier des matières techniques telles que la chimie, l’informatique et d’autres sujets qui ne sont habituellement pas associés aux filles. Elle serait intéressée de connaître les motifs de la popularité des écoles privées ainsi que les catégories d’étudiants qui les fréquentent vu que leurs diplômes ne sont pas toujours équivalents à ceux des établissements de l’enseignement public.

En ce qui concerne l’emploi, le congé de maternité très généreux que la loi accorde aux femmes peut inciter les employeurs à ne pas recruter de femmes dans des périodes de chômage croissant. Dans le secteur privé, certaines mesures souhaitables en soi sont susceptibles d’entraîner des discriminations à l’égard des femmes.

elle se déclare préoccupée par la détérioration de la santé des femmes arméniennes, par les réductions du budget de la santé et par la baisse de la qualité des soins liée à la privatisation. Elle aimerait connaître les divers motifs qui incitent de nombreuses femmes à accoucher à la maison, si cela est dû des raisons de coût, à des services d’accès difficile ou à d’autres raisons. Le recours à l’avortement qui semble être une pratique répandue de planification familiale est préoccupant, vu les effets néfastes d’avortements répétés sur la santé. Ceci donne lieu de croire que les moyens contraceptifs ne sont pas disponibles. Il serait également intéressant de connaître les projets du Gouvernement pour lutter contre la recrudescence de la gonorrhée et de la syphilis.

M me Feng Cui estime que la partie du rapport consacré aux femmes rurales est trop succincte vu le grand éventail de mesures réservé dans la Convention aux femmes rurales. Le Comité est pleinement conscient des problèmes liés à la transition économique de l’Arménie ainsi que des immenses défis posés par le grand nombre de personnes réfugiées, près de 219 000 dans les zones rurales; le Gouvernement doit les nourrir, les loger et leur trouver du travail. Le rapport ne fait pas mention de nombreuses préoccupations figurant dans la Convention, telles que le problème de la discrimination à l’égard des femmes dans les zones rurales où prévalent les stéréotypes traditionnels, le fardeau de plus en plus lourd porté par les femmes rurales en raison de l’émigration des hommes et de l’exode des jeunes vers les villes, l’exclusion des femmes de l’arène politique et leur difficultés d’accès aux soins de santé, à la sécurité sociale et au crédit. Elle note que les femmes constituent la très grande majorité des enseignants en zones rurales, ce qui porte à croire qu’elles possèdent un niveau d’instruction élevé. Toutefois, l’impression générale est que le Gouvernement accorde peu d’intérêt aux zones rurales. Elle espère que dans le prochain rapport ces domaines bénéficieront d’une plus grande attention.

M me Kwaku fait sienne l’observation de Mme Feng Cui sur l’insuffisance des mesures mentionnées pour améliorer la situation des femmes rurales.

M me Saiga fait remarquer que si la majorité des chômeurs sont des femmes hautement qualifiées dans leur cinquantaine, le pays gaspille des ressources humaines précieuses. Il est également préoccupant qu’il ne semble pas y avoir de moyens de pression à l’égard des employeurs qui refusent d’employer des femmes approchant de l’âge de la retraite. Leur préférence évidente pour des femmes non qualifiées et plus jeunes manifeste des attitudes stéréotypées à l’égard des femmes. L’examen de la question par le Comité serait facilité si la délégation arménienne voulait bien préciser si l’âge de retraite en Arménie est le même pour les hommes pour les femmes tout en confirmant les chiffres de l’espérance de vie moyenne.

M me Kapalata demande à son tour des éclaircissements, en disant que son interprétation du paragraphe 69 du rapport signifie la persistance d’une discrimination à l’égard des femmes ayant des enfants nés hors mariage. La délégation aimerait peut-être développer davantage sa référence sur les changements d’attitude à cet égard (par. 69).

Des informations sur des politiques et des programmes spécifiques en faveur des femmes réfugiées seraient également les bienvenues. Les termes de « réfugiés » et « migrants » semblent être utilisés de façon interchangeable dans le rapport.

M me Livingstone Raday déclare qu’il y a manifestement besoin de mesures législatives positives pour prévenir la discrimination à l’égard des femmes lors du recrutement, de la promotion et du licenciement et pour rendre illégal le harcèlement sexuel sur les lieux de travail. Il est préoccupant qu’il ne semble pas exister de procédures au pénal ou au civil permettant au Gouvernement, aux ONG ou à des femmes individuelles d’intenter une action en justice pour discrimination tant dans le secteur public que dans le secteur privé.

L’unique disposition contre la discrimination semble avoir trait à la grossesse et au congé de maternité. Les dispositions légales en vigueur et la politique gouvernementale portant sur d’autres questions sociales semblent simplement renforcer les stéréotypes sexuels traditionnels. Les dispositions relatives à la maternité semblent inciter les employeurs à ne pas recruter de femmes, vu que les coûts sont en majeure partie à la charge des employeurs plutôt qu’à celle de la sécurité sociale. Elle a appris avec surprise que le Code du travail interdisait l’emploi de nuit ainsi que les heures supplémentaires des femmes enceintes ainsi que des femmes avec des enfants de moins de deux ans. Une telle option ne devrait-elle pas être facultative? Par ailleurs, il n’est fait mention nulle part dans le rapport de mesures pour assurer l’application de l’alinéa c) du paragraphe 2 de l’article 11 concernant les services sociaux d’appui pour permettre aux parents de combiner les obligations familiales avec d’autres responsabilités. Elle souhaite également souligner que toutes les dispositions relatives aux soins aux enfants ne devraient être réservées à l’un des deux sexes, mais être neutres à cet égard.

Il serait désirable que le Gouvernement réunisse des statistiques ventilées selon le sexe en matière de conditions de travail. Le rapport affirme sans en apporter de preuves que l’Arménie a réalisé la parité salariale, une affirmation dont ne peut se targuer aucun pays au monde.

La Présidente prenant la parole en sa qualité d’experte, note avec inquiétude que l’avortement est décrit dans le rapport comme l’une des « méthodes de contraception », et de surcroît, l’une des plus répandues. La population masculine et la population féminine ont droit à l’information sur les méthodes modernes de contraception. En outre, le Gouvernement devrait promouvoir l’usage des préservatifs masculins et féminins afin de limiter la propagation du VIH/sida.

Bien que le cancer des poumons et le fait de fumer soient cités comme l’une des principales causes de mortalité, le rapport ne mentionne pas de mesures visant à sensibiliser les femmes à ce risque grave pour leur santé. Il affirme, de surcroît, qu’il n’existe pas de données chiffrées sur l’usage des drogues, car ce phénomène n’est pas étendu. L’Arménie serait une exception parmi les pays si tel était le cas. Le Gouvernement devrait favoriser la recherche sur la toxicomanie et l’alcoolisme, tout particulièrement dans le contexte d’une situation économique qui ne fait qu’empirer.

M me Schöpp-Schilling relevant que l’Arménie a mentionné son taux élevé de ratification de traités internationaux, aimerait savoir ce qui empêche l’Arménie de ratifier le Protocole facultatif et d’accepter l’amendement à l’article 20 de la Convention.

M me González Martínez demande des éclaircissements à la délégation sur ce qu’elle a voulu dire par sa déclaration que les dispositions du Code du travail ne sont d’application que dans la mesure où elles ne contredisent pas la législation arménienne ni les traités internationaux pertinents. Elle devrait également donner des informations supplémentaires sur les chiffres alarmants relatifs aux méthodes contraceptives et à l’avortement.

M me Ayvazian (Arménie) répondant aux questions adressées à sa délégation, explique que le congé maternité s’applique de façon identique aussi bien au secteur public qu’au secteur privé. Il est contraire à la loi en Arménie pour un employeur de refuser de recruter une femme au motif qu’elle est enceinte ou de la pénaliser si elle prend son congé de maternité. Le principal problème est que les femmes s’adressent trop peu souvent aux tribunaux. En outre, de nombreuses femmes ne veulent pas bénéficier de la totalité de leurs congés de maternité afin de progresser dans leur carrière.

Le Programme national d’action relatif aux droits de l’enfant contient un certain nombre de dispositions portant sur la maternité, la nutrition et le bien-être familial. En outre, des changements notables dans la législation et l’administration sont en voie d’être adoptés. Un plan plus détaillé de la mise en oeuvre sera élaboré en temps voulu.

En fait, plusieurs programmes ont été lancés par le Gouvernement pour sensibiliser les populations aux méthodes contraceptives, notamment le nouveau programme d’éducation sexuelle dans les écoles. Le principal obstacle réside dans le préjugé largement répandu à l’égard de la contraception.

De fait, les hommes et femmes en Arménie ont effectivement droit aux mêmes salaires pour une même tâche. Toutefois, de façon typique, les hommes occupent des postes plus élevés et par conséquent perçoivent des salaires plus importants. Vu que le secteur privé est de formation récente, il n’existe pas encore de données sur les salaires. Le recueil de données exactes sur les conditions d’emploi s’avère plus ardu en raison de l’habitude de recruter dans le secteur privé, encore balbutiant, des employés sans contrat de travail formel.

Il n’existe pas de programmes spécifiques destinés aux femmes rurales, mais des efforts sont menés pour améliorer la situation des zones rurales, notamment en exemptant les villageois du payement de la TVA et des services publics.

Le taux élevé de chômage parmi les femmes dans leur cinquantaine peut être attribué au changement de nature de l’économie arménienne suite à la disparition de l’Union soviétique. La pénurie dans le domaine de la formation sera corrigée dans les futurs programmes ainsi que dans le document de stratégie pour la réduction de la pauvreté.

Les réfugiés vivant dans les zones rurales d’Arménie proviennent principalement des zones urbaines d’Azerbaïdjan. Des programmes de recyclage sont clairement nécessaires, mais leurs bénéfices ne sont pas nécessairement visibles à court terme.

En ce qui concerne la retraite, il s’avère malheureusement exact que les dispositions liées à l’âge sont différentes pour les hommes et pour les femmes.

M. Abelian (Arménie) déclare que l’Arménie, en dépit de ses maigres ressources, présente un taux d’alphabétisation exceptionnellement élevé et s’appuie principalement sur les compétences de sa population. Le système qui a succédé à l’ère de la domination soviétique a été marqué par l’introduction de sujets tels que les droits de l’homme et l’éducation sexuelle dans les programmes scolaires, mais le secteur de l’éducation continue de souffrir de restrictions budgétaires et d’une pénurie de matériel d’enseignement. En outre, au cours de ces dernières années, suite à un examen gouvernemental approfondi des normes éducatives dans les établissements d’enseignement privé récemment créés, l’accréditation a été retirée à nombre d’entre eux. Un processus similaire est actuellement en cours à l’égard des établissements privés de l’enseignement secondaire. Le public bénéficiera de cette réglementation plus stricte et aura la liberté de choix entre l’enseignement privé et public sans devoir sacrifice de qualité.

La migration a modifié la démographie arménienne en accentuant l’écart entre les générations. La baisse régulière de la population a encore aggravé cette situation qui aura des conséquences importantes sur les réserves futures de main-d’œuvre.

Il déclare que l’Arménie a appuyé dès le début de désir du Comité d’augmenter le nombre de sessions et il est clair que la session extraordinaire permettrait de faire disparaître l’arriéré accumulé des rapports à examiner. Pour sa part, l’Arménie recommande que les ressources nécessaires soient allouées pour permettre au Comité d’examiner les rapports des États parties. L’adoption du Protocole facultatif a été retardée par inadvertance en raison de la nature complexe du processus dont l’accélération est en bonne voie.

Les statistiques officielles montrent qu’il y a environ 14 000 toxicomanes en Arménie, mais il n’existe pas de statistiques précises concernant les femmes. Depuis 1993, le nombre de toxicomanes a augmenté en dépit des campagnes de sensibilisation. Fumer est un problème généralisé en Europe de l’Est, mais il y a lieu d’être optimiste suite à l’impact de la campagne nationale contre la cigarette lancée par un membre de l’Assemblée nationale.

Au cours des deux dernières années, le HCR a montré une tendance à une intégration grandissante des réfugiés dans la société arménienne, mais il subsiste encore à proximité des zones de conflit des personnes déplacées ainsi que des réfugiés qui ont encore l’espoir de pouvoir retourner dans leur pays d’origine.

Articles 15 et 16

M me Goonedekere note avec intérêt l’étendue de la législation arménienne reconnaissant des droits égaux aux hommes et aux femmes, notamment le droit à la propriété. Néanmoins, dans un contexte où les femmes hésitent tant à recourir aux procédures judiciaires pour le règlement des différends, elle aimerait des informations complémentaires sur la manière dont le système assure l’application des droits parentaux, ainsi que sur leur déchéance et leur restitution par des procédures judiciaires en faveur des femmes. Elle se demande si les hommes pourraient recourir dans la pratique à ces procédures pour retirer aux femmes leurs droits en tant qu’épouses.

Elle se déclare préoccupée par le fait que la législation arménienne reconnaît l’existence du problème du mariage de mineurs sans chercher à en diminuer la pratique. La Convention, renforcée par le paragraphe 1 de l’article 24 de la Convention relative aux droits de l’enfant, est très nette quant à l’engagement des États d’intervenir pour empêcher les mariages d’enfants.

De surcroît, elle se réfère à l’article 17 du Code du mariage et de la famille qui dispose que les droits et obligations des époux commencent dès l’enregistrement de leur mariage dans le registre de l’état civil. Du fait que cet enregistrement modifie le statut juridique des parties, elle demande si l’enregistrement est général et si des informations sont disponibles à propos de situation non enregistrées.

M me Tavares da Silva dit que les mariages de mineurs devraient être découragés, non seulement parce qu’ils sont en contradiction avec la Convention, mais aussi en raison de leurs effets sur la santé, qui doivent également être pris en compte. De surcroît, les mariages de mineurs s’opposent à la jouissance de droits patrimoniaux et renforcent les stéréotypes culturels tout en contribuant au déséquilibre en termes de pouvoir au sein du couple.

M me Shin constatant la précocité des mariages, rappelle que le mariage contracté trop jeune empêche les filles de continuer leurs études.

Elle suggère que le Gouvernement, lors de l’établissement de ses prochains rapports périodiques, déclare simplement qu’il n’y a pas d’information disponible dans tous les domaines où des statistiques ne peuvent pas être fournies.

M me Kwaku relève que le Code arménien du mariage et de la famille de 1969 a subi plusieurs révisions et amendements qui ont donné lieu à un nouveau projet de Code. Elle aimerait savoir par conséquent si la nouvelle version du Code a été adoptée, et quelles en sont les dispositions susceptibles de bénéficier aux femmes.

M me Corti dit qu’il serait intéressant de connaître la façon dont est assuré le versement de la pension alimentaire, notamment dans le cas de migration. Quels sont les mécanismes existants contraignant les hommes migrants à l’étranger à ne pas se soustraire à leurs obligations?

M me Ayvazian (Arménie) se référant à la question concernant l’accès des femmes à la justice pour le règlement de leurs différends, dit que toutes les personnes sont égales devant la loi. Elle affirme que la question d’un préjudice ne se pose pas en cas de divorce, car le couple marié aura déjà fait l’objet de diverses procédures judiciaires. Dans la réalité, il n’y a pas d’obstacles pour faire appel à la justice, mais elle ne dispose pas de données spécifiques sur des cas pertinents.

L’âge du mariage est de 18 ans pour les hommes et de 17 ans pour les femmes. Selon la législation en vigueur, dans le cas des mariages enregistrés, la femme jouit de la pleine capacité juridique indépendamment de l’âge, même en cas de divorce. En réponse à la question sur l’enregistrement des mariages, elle confirme qu’il est général et qu’il n’existe aucune autre disposition pour réglementer les relations entre les personnes, indépendamment de leur sexe. Le nouveau Code du mariage et de la famille n’a pas encore franchi le cap de la première lecture et doit faire l’objet de modifications additionnelles. Le non-paiement de la pension alimentaire est punissable par la loi. L’Arménie a signé des conventions sur l’aide judiciaire en matière civile et pénale afin de faire appliquer, par l’intermédiaire des autorités locales, l’exécution des décisions judiciaires, mais il reste encore nombre de pays avec lesquels ces accords n’ont pas été mis en place.

M. Abelian (Arménie) félicite le Comité pour sa direction des débats et déclare que sa délégation trouve ce dialogue plus utile, davantage orienté vers l’action et plus constructif qu’il ne l’était il y a cinq ans.

Bien que l’Arménie, c’est-à-dire l’État, n’a que dix ans d’âge, elle existe comme civilisation depuis 4000 ans. La domination soviétique durant 70 ans a produit un recul mais son pays fait un nouveau départ dans tous les domaines. Il faut reconstruire l’infrastructure et de bâtir des systèmes de recueil de données exempts de considérations idéologiques en vue d’obtenir des statistiques fiables et complètes. Il assure le Comité que le prochain rapport périodique de l’Arménie fournira une information plus précise et plus complète de la situation de son pays.

Il a participé lui-même au plaidoyer en faveur d’une participation accrue des hommes dans les instances nationales de lutte contre la discrimination et cette participation commence déjà à produire ses fruits. L’Arménie s’attache à appliquer pleinement les recommandations du Comité pour améliorer la mise en oeuvre des programmes en faveur des femmes.

M me Hakobyan (Arménie) dit que cet échange fécond d’idées avec le Comité a précisé le défi auquel son Gouvernement est confronté pour améliorer la condition des femmes.

La Présidente remercie la délégation pour sa participation et exprime ses félicitations pour la manière constructive dont le Gouvernement arménien s’attache à surmonter les obstacles. Elle promet le plein appui du Comité à la réalisation d’une mise en oeuvre complète des engagements de l’Arménie en vertu de la Convention. Elle déclare également que le Comité serait reconnaissant au Gouvernement de le maintenir informé des mesures prises suite à ses observations finales. Elle espère que les débats stimuleront l’intérêt de l’ensemble du Gouvernement et que ce dernier continuera à promouvoir la participation de la société civile. Une large diffusion des observations finales en arménien s’avère également nécessaire. Elle attend avec intérêt l’accession de l’Arménie au Protocole facultatif ainsi que son acceptation de l’amendement du paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention.

La séance est levée à 17 h 15.