Trente-quatrième session

Compte rendu analytique de la 703e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 18 janvier 2006, à 10 heures

Présidente:Mme Manalo

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en vertu de l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial, deuxième, troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques combinés du Togo

La séance est ouverte à 10 h 10.

Examen des rapports soumis par les États partiesen vertu de l’article 18 de la Convention (suite)

Rapport initial, deuxième, troisième, quatrièmeet cinquième rapports périodiques combinésdu Togo (CEDAW/C/TGO/1 à 5, CEDAW/C/TGO/Q/1 à 5, CEDAW/C/TGO/Q/1 à 5/Add.1)

Sur l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation togolaise prennent place à la table du Comité.

M me  Sokpoh-Diallo (Togo), présente le rapport initial et les deuxième, troisième, quatrième et cinquième rapports périodiques combinés de l’État partie en indiquant qu’ils ont été élaborés par un comité technique de 13 membres en collaboration avec la Commission interministérielle de rédaction des rapports initial et périodiques en matière des droits de l’homme et avec la participation d’organisations de la société civile.

On trouve dans le rapport une description de l’évolution politique et administrative du Togo depuis la période coloniale jusqu’à 2002. Toutefois, un certain nombre d’événements majeurs sont survenus depuis lors, notamment l’élection d’un nouveau président et la formation d’un gouvernement d’unité nationale. Le nouveau Gouvernement prend actuellement des mesures pour protéger les droits de l’homme et les libertés fondamentales et renforcer l’état de droit conformément aux 22 engagements sur lesquels le Togo et l’Union européenne sont tombés d’accord en avril 2004. Le Gouvernement a accordé la priorité à la promotion de la femme et à la parité entre les sexes dans le programme d’action qu’il a soumis à l’Assemblée nationale et a pris des mesures pour renforcer les lois qui protègent les femmes contre la violence liée à des questions telles que les droits de succession, les mariages forcés et la pratique de mutilations génitales. Il a également adopté un plan stratégique pour offrir un enseignement de qualité et encourager les filles à achever leurs études.

Le Gouvernement espère, en outre, améliorer la condition des femmes rurales par le biais de la technologie et moyennant un accès plus facile à la terre, à l’eau, à la formation et au crédit et ne ménage pas ses efforts pour prendre en compte les préoccupations des commerçantes dans les grands centres urbains. Le chef de l’État, quant à lui, a entrepris de donner aux femmes davantage de responsabilités dans la vie politique, professionnelle et sociale et de donner la priorité à la protection physique des femmes. Des concours ont eu lieu récemment pour pourvoir des postes dans l’enseignement et dans la police. Sur les 615 nouvelles recrues de la police, 68 sont des femmes; et, pour la première fois, le Togo a un commissaire de police femme.

En ce qui concerne le cadre juridique général de la protection des droits de l’homme, le Gouvernement a entrepris de réformer le système judiciaire afin de renforcer le respect des droits de l’homme et des libertés collectives dans le pays et, à cette fin, il a demandé à deux missions internationales d’évaluer le système judiciaire togolais avec le soutien du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Les rapports des experts ont ainsi fourni la base du programme national visant à moderniser l’organisation judiciaire qui vient d’être adopté par le Gouvernement. Par ailleurs, d’importants développements sont survenus en matière législative, notamment l’adoption en 2004 de la loi No 2004/005 sur la protection des personnes handicapées, dont les articles 39 à 41 prévoient une protection spéciale pour les femmes handicapées, et la nouvelle rédaction de certaines dispositions du Code des personnes et de la famille afin de remédier à l’inégalité en matière de nom, domicile, mariage, divorce et adoption ainsi qu’en ce qui concerne les régimes matrimoniaux et la succession. En 2005, le Togo a ratifié le Protocole additionnel à la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples qui porte sur les droits des femmes en Afrique et envisage aujourd’hui sérieusement de ratifier le Protocole facultatif à la Convention.

S’agissant d’information et de publicité, le Togo est fier d’être l’un des pays de la sous-région qui compte un grand nombre d’organes médiatiques privés. À elle seule, la ville de Lomé compte au moins une trentaine de stations radiophoniques privées et dans les grandes agglomérations il existe au moins trois radios privées en plus de la radio officielle. Les préfectures ont des stations radiophoniques locales. Tous ces médias sont activement engagés dans des activités d’information, d’éducation et de communication dans tous les domaines et dans toutes les langues du pays. En 2004, le Togo a adopté un nouveau code de la presse, qui n’érige plus en infraction les délits de presse et, de ce fait, renforce la protection de la liberté d’expression.

En ce qui concerne la liste des questions figurant dans le document CEDAW/C/TGO/Q/1 à 5, il y a lieu de noter que, comme il est indiqué dans les réponses formulées par le Togo (CEDAW/C/TGO/Q/1 à 5/Add.1), un atelier a été organisé à Lomé en octobre 2005 pour préparer ces réponses, lesquelles ont été présentées selon l’usage établi.

Les questions du Comité ont été regroupées sous quatre rubriques. Sous la rubrique « Élimination de la discrimination à l’égard des femmes et garantie de l’égalité entre hommes et femmes (questions 1, 2, 4, 5, 7, 8, 18 et 19) », les réponses données évoquent la création de comités chargés de réviser la législation nationale à la lumière des conventions internationales ratifiées par le Togo; la ratification de nouvelles conventions internationales relatives à la promotion et à la protection des femmes; et enfin la formation et la mobilisation de l’opinion au sujet des dispositions de la législation nationale et des conventions internationales qui portent sur les droits des femmes.

Sous la rubrique « Lutte contre toutes les formes de violence à l’égard des femmes (questions 9, 10 et 11) », il est question d’une campagne menée pendant une période de 16 jours pour sensibiliser l’opinion aux questions liées à toutes formes de violence à l’égard des femmes; de centres de conseil pour les femmes victimes de violences; de l’adoption de mesures législatives pour empêcher et supprimer le trafic d’enfants; et de la préparation d’un avant-projet de loi relatif à la répression du trafic d’êtres humains adultes. En 2005, a été créé à l’Université de Lomé un centre d’assistance médicale et psychologique à l’intention des femmes victimes de violence familiale et, en novembre 2005, le Ministère de la population, des affaires sociales et de la promotion de la femme a désigné un groupe d’experts chargé d’élaborer une stratégie nationale pour lutter contre la violence fondée sur le sexe.

Sous la rubrique « Favoriser l’accès des femmes à la vie économique, politique et sociale (questions 6, 13, 20, 26, 29 et 30) », les mesures ci-après ont été mises en relief : la révision du Code des personnes et de la famille; l’intégration d’une démarche antisexiste dans les politiques sectorielles et la création au sein des ministères de mécanismes de coordination pour les questions relatives aux femmes; enfin, la mise en œuvre de stratégies permettant aux femmes d’accéder au crédit. S’agissant de l’intégration d’une démarche soucieuse de l’égalité des sexes, il convient de noter, en particulier, la création d’un centre national pour la formation d’animateurs aux questions touchant les femmes et le développement, l’élaboration de 10 modules de formation en matière d’égalité des sexes et de développement; l’offre de stages de formation sur ces questions à l’intention des hauts fonctionnaires des ministères et de représentants de la société civile; la formation de communicateurs; et, enfin, une étude diagnostique accompagnée d’une stratégie nationale pour les questions relatives à l’égalité des sexes.

Enfin, sous la rubrique « Garantir aux femmes un enseignement efficace et une couverture santé adéquate (questions 12, 15, 21, 23, 24, 27 et 28) », les réponses du Togo évoquent des mesures palliatives visant à favoriser l’accès des filles à l’enseignement; des mesures visant à la mise en conformité avec les normes de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en ce qui concerne la couverture santé, les centres de soins etc.; l’adoption de lois visant à protéger les individus contre le VIH/sida qui comportent des dispositions en faveur des personnes les plus vulnérables; et les efforts faits par le Gouvernement pour enrayer la pandémie de VIH/sida moyennant des programmes tels que le Programme national de lutte contre le sida et les maladies sexuellement transmissibles (PNLS). Enfin, les réponses fournies mettent l’accent sur le fait que toutes les femmes – quelle que soit leur situation sociale ou géographique – ont accès, sans discrimination aucune, aux soins de santé, et notamment aux méthodes contraceptives et aux soins prénatals.

S’il est certain que des progrès majeurs ont été accomplis, il reste encore beaucoup à faire. La promotion des droits de l’homme en général et des droits des femmes en particulier est un processus en constante évolution. Le Gouvernement togolais ne renoncera pas à son engagement en faveur de la promotion des droits des femmes. À cet égard, il importe de souligner que, contrairement aux déclarations faites précédemment par certaines ONG, le Gouvernement togolais a toujours coopéré avec les ONG qui œuvrent pour la promotion de la femme, en particulier pour la préparation de rapports.

Articles 1 et 2

M me  Gaspard demande si la délégation togolaise rendra publiques les recommandations du Comité ou si elle les soumettra au Parlement afin d’amener les législateurs à modifier les lois qui continuent de discriminer les femmes.

M. Flinterman demande, d’une part, comment le Gouvernement envisage de faire participer la société civile et les organisations des droits de l’homme aux efforts faits pour lutter contre la discrimination et, d’autre part, comment il peut se prévaloir d’avoir pris des mesures pour appliquer la loi et la Convention (CEDAW/C/TGO/Q/1 à 5/Add.1, par. 1.a.2) alors que la Convention et les autres instruments relatifs aux droits de l’homme n’ont jamais été évoqués devant un tribunal.

M me  Pimentel demande si le Togo a l’intention d’accroître sa coopération avec les ONG, notamment celles qui s’occupent des questions féminines, afin de renforcer l’égalité entre hommes et femmes. Si l’on veut parvenir à des résultats concrets, il faudra élaborer des politiques nationales en la matière et, par la suite, évaluer les résultats de leur mise en œuvre.

M me  Patten, constatant que le rapport de mars 2003 du Comité interministériel sur le Code des personnes et de la famille contient 24 suggestions de réforme de dispositions discriminatoires, demande s’il existe un calendrier pour la révision du Code. De plus, on ne trouve pas dans le rapport de données statistiques sur la violence à l’égard des femmes ni d’exemples de recherche en matière de violence familiale, en dépit du fait qu’il contienne de nombreuses allusions à des programmes tant gouvernementaux que non gouvernementaux dans ce domaine. En outre, il serait utile de connaître les mesures spécifiques qui ont été prises pour que les femmes, notamment en milieu rural, aient accès au système judiciaire.

La Présidente, prenant la parole en tant que membre du Comité, aimerait savoir si la victime d’une violation des droits de l’homme peut s’adresser directement à un tribunal pour obtenir réparation ou doit d’abord épuiser tous les recours existants en dehors de la sphère judiciaire.

M me  Shin souligne la nécessité de former les membres de l’organisation judiciaire de même que les femmes du pays. Il serait intéressant de savoir si l’un ou l’autre des amendements proposés par le Comité interministériel sur le Code des personnes et de la famille a été soumis au Parlement et si des ONG spécialisées dans les questions féminines ou des femmes à titre individuel ont été conviées à participer aux travaux dudit Comité.

M me  Dairiam pose la question de savoir si un niveau plus élevé d’éducation favorise une plus grande prise de conscience du droit des femmes à l’égalité avec les hommes. En effet, si la tendance de la société en général est de ne pas être opposée au droit à l’éducation ni au droit à la santé, on se heurte souvent à de vives objections lorsqu’il s’agit de mettre le droit à l’égalité des sexes sur le même niveau que les autres droits. Il serait utile de savoir si les juges sont conscients du fait qu’ils sont tenus d’interpréter la loi à la lumière de la Convention. Par ailleurs, il ne fait aucun doute que des mesures doivent être prises pour faire respecter la législation existante, par exemple la loi qui n’autorise pas le mariage des filles avant l’âge de 17 ans. Eu égard à ce qui est dit dans le rapport au sujet des grossesses précoces et de la mortalité maternelle, il paraît évident que certaines jeunes mariées sont âgées de moins de 17 ans.

M me  Šimonović estime que les informations contenues dans le rapport montrent que le Code de la famille doit être révisé pour qu’il soit compatible avec la Convention. De plus, il importe qu’aucun doute ne subsiste pour personne quant au fait que les instruments internationaux ont la préséance sur la législation nationale togolaise.

Article 3

M me  Schöpp-Schilling ne voit pas clairement à qui revient la responsabilité de prendre en compte les préoccupations des femmes dans les divers plans et programmes. Il convient de fixer des objectifs et de mettre en place des systèmes de contrôle afin d’évaluer si ces objectifs sont atteints. Il serait intéressant de savoir quel pourcentage du budget de la nation est consacré à la promotion de la femme. Si le Togo fait partie des pays qui ont vu leur dette extérieure annulée, il serait utile de savoir si une partie des ressources ainsi libérées servira à faire progresser la cause des femmes. Lorsque des changements s’imposent, le rôle des chefs de tribu est capital. Aussi convient-il de savoir par quels moyens l’on s’efforce de les convaincre pour qu’ils participent à ce processus.

M me  Saiga aimerait connaître le nom exact du ministère responsable de la promotion de la femme. Les questions féminines sont une priorité du nouveau plan d’action du Premier Ministre mais il n’apparaît pas clairement quelle institution est responsable de la mise en œuvre des orientations tant à l’échelon national que local.

M me  Sokpoh-Diallo (Togo) répond que le nouveau Gouvernement a déjà un plan de stratégie en matière de parité des sexes. Un atelier a été organisé en décembre pour harmoniser le Code de la famille avec la Convention et le nouveau texte sera prochainement soumis au Conseil des ministres pour adoption. Le ministère chargé de la promotion de la femme est aujourd’hui le Ministère de la population, des affaires sociales et de la promotion de la femme; il comprend la Direction générale de la promotion féminine (DGPF) au sein de laquelle se trouve la Direction du statut juridique de la femme (DSJF).

M. D’Almeida (Togo) répond à la question concernant l’accès des femmes au système judiciaire en indiquant que le texte fondamental sur ce sujet institue des « audiences foraines » qui visent à permettre aux femmes en général, et à celles des zones rurales en particulier, d’avoir accès à la justice. Il explique, en outre, que le sous-programme 6 du programme de modernisation 2005-2010 prévoit un financement spécial pour élargir les conditions de l’assistance juridique dont les femmes peuvent bénéficier de façon à englober les affaires civiles; en effet, cette assistance n’était auparavant disponible que pour les affaires pénales.

S’agissant des délais envisagés pour l’adoption du nouveau Code des personnes et de la famille, le Gouvernement prévoit de confier à une commission spéciale la tâche de relire et reformuler le texte et il est prévu que la révision complète du Code civil sera achevée en 2006.

Pour ce qui est des questions concernant les recours disponibles aux femmes, les recours de type non judiciaire se font auprès de la Commission nationale des droits de l’homme ou d’organisations non gouvernementales qui s’occupent des droits des femmes. Si les femmes n’avaient auparavant que peu de possibilités de s’adresser aux tribunaux pour introduire des recours, elles sont aujourd’hui habilitées à intervenir directement auprès d’un juge pour présenter leurs griefs. Toutefois, il est fréquent que la Commission nationale des droits de l’homme serve d’instrument de réconciliation ou saisisse la justice d’affaires liées à des actes de violence commis à l’égard des femmes.

Quant à la formation des juges en matière d’application de la Convention, un atelier a été organisé à cet effet. Si l’article 50 stipule que les droits et devoirs énoncés dans les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme font partie intégrante de la Constitution togolaise, la question se pose de savoir si une femme peut se prévaloir de ces dispositions devant les tribunaux. Ainsi, il est dit expressément dans la Convention sur les droits de l’enfant que ladite Convention peut être invoquée devant les tribunaux des États parties. En revanche, la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes ne contient aucune disposition expresse à cet effet. Il conviendrait donc d’adopter une loi qui intègre cette convention dans la législation togolaise. Par ailleurs, l’article 140 précise que, lorsque les dispositions d’un traité auquel le Togo est partie diffèrent de la législation togolaise, le juge doit partir du principe que les dispositions du traité ont la préséance sur la législation nationale. Il découle donc de ce principe que les dispositions de la Convention qui se démarquent des dispositions discriminatoires contenues dans la législation nationale peuvent être appliquées.

M me  Ayeva-Traoré (Togo) donne en exemple sa propre position de conseillère en matière d’égalité des sexes pour illustrer les efforts faits par le Gouvernement pour instaurer l’égalité entre hommes et femmes. De plus, le Premier Ministre a lui-même désigné les membres du conseil devant faire rapport au Comité national de suivi de Beijing. Tous les ministères ont été invités à présenter une ventilation par sexe des données concernant leurs effectifs en vue de la création d’une banque de données relatives aux femmes fonctionnaires supérieures susceptibles d’être nommées à des postes de responsabilité.

S’agissant de la tâche extrêmement importante que constitue la réalisation de l’égalité entre les sexes dans le secteur de l’éducation, le Premier Ministre a prié les ministères concernés d’élaborer un programme de « discrimination positive » afin de faciliter l’accès des filles à l’éducation.

M me  Sokpoh-Diallo (Togo) tient à ajouter qu’une étude a été entreprise conjointement par le PNUD et la société civile pour déterminer pourquoi la situation des femmes est inférieure à celle des hommes et qu’à la fin du mois une réunion sera organisée sur cette question et sera présidée par le Premier Ministre.

Article 4

M me  Patten dit, à propos des réponses formulées par le Gouvernement togolais au sujet de la question posée par le Comité sur l’article 4, qu’elle aimerait avoir des renseignements détaillés sur les mécanismes qui permettent d’évaluer et de contrôler la mise en œuvre et l’efficacité des mesures prises dans le secteur de l’éducation, par exemple des précisions sur l’effet des mesures spécifiques adoptées, sur le nombre de filles qui en bénéficient et sur les délais envisagés pour l’application des mesures en général. Elle aimerait également savoir si le fait que l’adoption d’une nouvelle législation est nécessaire pour que les mesures temporaires spéciales puissent être appliquées à d’autres secteurs signifie que la Constitution pourrait être modifiée. En outre, il serait intéressant de savoir s’il existe des mesures spéciales en faveur des filles des zones rurales, si de nouvelles mesures temporaires de quelque nature que ce soit ont été prises dans le secteur de l’éducation afin d’assurer aux filles un démarrage sur un pied d’égalité avec les garçons et, enfin, si l’on se préoccupe d’une manière ou d’une autre de donner aux filles la possibilité d’accéder un jour à des fonctions de responsabilité et à des postes dans les organisations internationales.

M me  Sokpoh-Diallo (Togo) répond que le Togo procédera sous peu à un recensement et que, selon toute vraisemblance, il pourra à l’avenir fournir davantage d’informations sur l’effet des mesures temporaires spéciales dans les domaines de l’emploi et de l’éducation. Cela étant, une loi a été adoptée en décembre 2005 qui prévoit le financement nécessaire pour étendre le rayon d’action de l’enseignement dans le pays et, ce faisant, parvenir à l’objectif du Millénaire pour le développement, à savoir 100 % d’enfants scolarisés en 2015. D’une façon générale, la scolarité est moins onéreuse pour les filles que pour les garçons et les frais sont moins élevés dans les zones rurales qu’ailleurs.

L’intervenante confirme que deux articles de la Constitution empêchent l’application effective de la Convention et indique que des propositions seront soumises au Gouvernement visant à modifier certaines dispositions, comme par exemple celle qui stipule qu’une veuve n’a le droit d’hériter des biens de son conjoint que si ce dernier en avait ainsi décidé de son vivant.

S’il est certain qu’il reste beaucoup à faire, des progrès ont cependant été réalisés. Ainsi, 30 % des effectifs du Ministère de la promotion de la femme sont des femmes et, pour la première fois, une femme a été nommée Secrétaire générale du Ministère des affaires étrangères. Il est important que l’État et les organisations non gouvernementales s’efforcent de convaincre les dirigeants traditionnels et la société civile que les femmes doivent être visibles dans tous les secteurs de la société.

Article 5

M me  Tavares da Silva se dit préoccupée par le décalage qu’elle constate entre les objectifs et la réalité au Togo. Même si les autorités sont déterminées à agir et à jouer un rôle dynamique, les changements ne surviennent que très lentement. Les femmes ne sont pas conscientes de leurs droits et semblent se résigner aux inégalités qui découlent de la tradition et de la coutume. Il serait intéressant de savoir si l’égalité des sexes est vraiment une priorité du Gouvernement et comment celui-ci a l’intention de remédier au déphasage qui existe entre ses ambitions et la réalité. Par ailleurs, il importe que les hommes comprennent davantage l’urgence de la situation et qu’ils participent dans une mesure accrue au processus de changement.

M me  Simms dit que les rôles et stéréotypes sociaux sont les obstacles les plus redoutables auxquels se heurtent les femmes en ce début de siècle. Elle aimerait avoir davantage d’informations sur la stratégie envisagée pour sensibiliser les hommes aux droits des femmes et sur le genre de ressources qui ont été mobilisées pour mettre en œuvre la vision du Premier Ministre dans ce domaine.

M me  Coker-Appiah relève que, parmi les pratiques traditionnelles qui sont mentionnées dans le rapport comme étant un obstacle au progrès des femmes, il est question notamment des servitudes rituelles impliquant le placement des petites filles dans les couvents des fétichistes. Eu égard à la porosité des frontières entre le Togo et ses voisins – le Ghana et le Bénin – l’absence d’action de la part des autorités togolaises ne pourrait qu’avoir un effet défavorable sur ces pays. Il serait utile de connaître les mesures qui sont prises pour éliminer cette pratique.

M me  Morvai demande si les effets d’une activité sexuelle précoce chez les fillettes et les jeunes filles ont été étudiés, de même que ceux d’une grossesse ou d’un avortement précoce.

M me  Sokpoh-Diallo (Togo) reconnaît que beaucoup reste à faire avant que les femmes prennent conscience de leurs droits et indique que le Ministère de la promotion de la femme se propose de mettre en œuvre, avec le concours du FNUAP, un projet visant à assurer aux femmes une formation dans ce domaine. Chaque ministère a désigné un coordonnateur chargé des questions féminines et un atelier a été organisé récemment qui portait sur le renforcement du cadre juridique et institutionnel pour que ces coordonnateurs deviennent plus opérationnels. S’il semble que la mise en œuvre de la Convention ne progresse que lentement, cela est dû en partie aux bouleversements politiques et sociaux que le pays a connus depuis 1990; cependant, il ne fait pas de doute que l’égalité des sexes est un élément de la stratégie actuelle de développement du Gouvernement.

M me  Akakpo (Togo) fait observer qu’avec le concours d’organisations de la société civile, les femmes sont informées de leurs droits par la radio et la télévision et que des activités d’éducation, d’information et de communications sont organisées dans les ministères, de sorte que les hommes soient eux aussi sensibilisés aux droits des femmes. En outre, en partenariat avec la société civile, le Gouvernement a organisé des journées d’information sur le Code révisé des personnes et de la famille. Au niveau régional, le FNUAP a parrainé un projet, mis en œuvre avec la collaboration des autorités locales, qui vise à informer les femmes de leurs droits.

Le plan de stratégie en matière d’égalité des sexes, qui est en cours d’élaboration, est une étude diagnostique des disparités entre les sexes dans tous les secteurs de la société. Une fois que les obstacles et défis majeurs auront été recensés, les ministères compétents participeront à la mise en œuvre du plan à tous les niveaux par l’intermédiaire de leurs coordonnateurs en matière de parité des sexes.

M me  Sokpoh-Diallo (Togo) indique, à propos des stéréotypes en matière d’éducation, que les manuels scolaires ont été révisés pour en supprimer les stéréotypes sexistes. Par ailleurs, le nouveau Gouvernement a créé un ministère chargé expressément des questions de l’approvisionnement en eau des zones rurales. Un programme d’action a été élaboré et des jalons posés en vue de garantir l’accès à l’eau en milieu rural, ce qui libérera les femmes de la corvée traditionnelle de l’eau.

L’évolution des mentalités exige du temps et des efforts à tous les niveaux – chez les dirigeants et les administrateurs, chez les enseignants et les éducateurs et chez les chefs traditionnels et religieux. Bon nombre de chefs traditionnels approuvent la notion de l’égalité des sexes et œuvrent auprès de leurs communautés pour que les filles soient scolarisées.

S’agissant de l’avortement, un nouveau projet de loi sur la santé dont l’Assemblée nationale est actuellement saisie interdit tout avortement autre que thérapeutique. Il n’est pas prévu à l’heure actuelle d’effectuer une étude des effets d’une grossesse précoce. En ce qui concerne la lutte contre le trafic d’enfants aux fins du travail forcé et de l’exploitation sexuelle, une loi a été adoptée en août 2005; par ailleurs, une loi similaire concernant les adultes sera prochainement examinée. En outre, le Togo est partie à un accord multilatéral signé par neuf pays de la région d’Afrique de l’Ouest dont l’objectif est de lutter contre le trafic des enfants et le travail forcé.

Article 6

M me  Morvai constate que, bien que le rapport présente la prostitution comme un phénomène de dépravation morale, il y est question de « professionnels du sexe », ce qui donne l’impression que c’est là une forme de travail comme une autre et librement choisie par ceux et celles qui la pratiquent. De plus, il n’est fait nulle part allusion aux clients des prostituées. Il serait opportun d’effectuer une étude centrée sur l’aspect de la demande en matière de prostitution, à savoir sur les hommes qui estiment de leur bon droit d’utiliser les femmes comme objets. Enfin, il serait utile de savoir si le Togo a ratifié la Convention de 1949 pour la répression de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui.

M me  Sokpoh-Diallo (Togo) répond que le Togo a ratifié ladite Convention le 14 mars 1990. En outre, le 31 juillet 2005, les autorités ont lancé une opération contre les souteneurs et les clients des prostituées et placé en sécurité un grand nombre de prostituées dont la plupart étaient mineures. Des ONG ont participé à cette action. À cet égard, il existe un centre, dirigé par des religieuses, sous le nom de « La providence » qui s’occupe très activement de ces questions et s’efforce de soustraire les jeunes filles à la prostitution. Certes, il reste beaucoup à faire mais les autorités togolaises sont en bonne voie dans ce domaine.

Articles 7 et 9

M me  Zou Xiaoquiao constate le faible taux de participation des femmes à la vie publique et politique et note que le manque de solidarité des femmes entre elles est présenté comme étant l’une des raisons pour lesquelles les femmes n’ont pas les mêmes chances que les hommes d’être élues. Or, il ne fait aucun doute qu’il existe d’autres raisons tout aussi importantes. Elle aimerait savoir quelles mesures ont été prises ou sont envisagées pour remédier à cette situation.

M me  Popescu demande si les données qui figurent dans le rapport à propos de la sous-représentation des femmes au niveau national et au niveau local ont été mises à jour depuis 2001 et si des tendances différentes sont apparues au cours des dernières années. Elle aimerait connaître les mesures prises pour encourager la participation des femmes dans les organes locaux et, notamment dans les comités de développement de création récente. En outre, elle voudrait savoir ce qui a été fait pour encourager les femmes à voter et si, au Togo, un homme a le droit de voter pour le compte de son épouse.

M me  Belmihoub-Zerdani dit que le Togo doit pouvoir compter sur tous ses citoyens, sur les femmes autant que sur les hommes; aussi faut-il que, dans la société togolaise, les femmes deviennent visibles. Ce processus pourrait être facilité par l’instauration d’un système de quotas et en exerçant des pressions d’ordre financier moyennant le retrait des subventions dont bénéficient les associations et les partis dans lesquels les femmes sont insuffisamment représentées.

M me  Arocha Domínguez fait observer que, tout en étant important en soi, le rôle que les femmes doivent jouer dans la vie communautaire est aussi un moyen de garantir leur participation accrue à des niveaux plus élevés de responsabilité dans la vie publique. Elle aimerait savoir si l’augmentation du nombre de femmes dans des institutions nationales telles que la police s’inscrit dans une stratégie globale ou s’il s’agit d’un phénomène isolé. Elle aimerait également connaître les résultats de l’étude diagnostique sur l’égalité des sexes effectuée en 2005. Le Gouvernement a-t-il examiné ces résultats et, dans l’affirmative, quelles sont les mesures de suivi qu’il envisage de prendre?

M. Flinterman demande pourquoi le Code de la nationalité de 1978 n’a pas encore été mis en conformité avec la Constitution de 1992 en ce qui concerne la transmission de la nationalité des parents à leurs enfants. À cet égard, il aimerait savoir ce qu’il est advenu du projet de loi sur les enfants et si la loi a maintenant été promulguée. Il constate qu’une femme togolaise ne peut, de facto, donner sa nationalité à son conjoint. De même, une étrangère mariée à un Togolais perd la nationalité togolaise en cas de divorce. En va-t-il de même dans une situation inverse? De plus, il serait intéressant de savoir s’il est vrai que la nationalité togolaise est refusée à l’enfant d’une Togolaise né de père inconnu. Enfin, on trouve dans le rapport une indication qui laisse entendre qu’une Togolaise qui porte le nom de son conjoint doit avoir le consentement de celui-ci pour faire une demande de passeport. Il serait intéressant de savoir si le consentement de l’épouse est aussi nécessaire au mari pour obtenir un passeport.

La séance est levée à 13 heures.