Vingt-quatrième session

Compte rendu analytique de la 493e séance

Tenue au Siège, à New York, le vendredi 19 janvier 2001, à 15 heures

Présidente:Mme Abaka

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième rapport et quatrième et cinquième rapports groupés de l’Égypte (suite)

La séanceest ouverte à 15 heures.

Examen des rapports présentés par les États partiesconformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième rapport et quatrième et cinquièmerapports groupés de l’Égypte (suite) (CEDAW/C/EGY/3 et CEDAW/C/EGY/4 et 5)

À l’invitation de la Présidente, les représentants de l’Égypte prennent place à la table du Comité.

M me  Tallawy (Égypte), répondant à la question des réserves formulées par l’Égypte vis-à-vis de la Convention, déclare que le Gouvernement égyptien fait tout ce qui est en son pouvoir pour prendre les mesures permettant le retrait des réserves en question. Cependant, un certain nombre de mesures doivent être prises au préalable – notamment une réforme législative, des campagnes de publicité et de sensibilisation, ainsi que des interventions auprès de personnes ou groupes pertinents –, afin de garantir un accueil positif des futures propositions parlementaires concernant le retrait des réserves.

En ce qui concerne la participation des femmes à l’action politique, Mme Tallawy déclare que l’amélioration constatée lors des dernières élections n’a représenté qu’une augmentation relativement modeste – 40 % – du pourcentage de femmes participantes. Cependant, de nouveaux efforts vont être déployés afin de maintenir cette tendance.

Le Gouvernement égyptien a d’ores et déjà appliqué les dispositions du paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, visant à accélérer l’instauration d’une égalité politique de fait entre les hommes et les femmes. À l’époque de la promulgation de la loi de 1987, certains responsables politiques et certains membres de l’appareil judiciaire n’avaient pas pris conscience du fait que, à la suite de la ratification de la Convention, la législation nationale autorisait dès lors, concrètement, l’établissement de quotas. Il s’est alors instauré un débat sur la question de la réforme électorale – processus permettant d’offrir de meilleures chances de réussite aux femmes. Il faut noter en outre que la loi n’interdit nullement la nomination de femmes en tant que magistrates; en fait, l’absence de femmes dans le système judiciaire est due aux pratiques courantes des magistrats en place.

En ce qui concerne les préoccupations de Mme Aouij au sujet des problèmes de nationalité, Mme Tallawy a bon espoir que l’on aborde et que l’on résolve la question des aspects inconstitutionnels du traitement des femmes dans le pays. L’arrêt de la Cour constitutionnelle suprême, qui déclare inconstitutionnelles les dispositions du décret du Ministère de l’intérieur exigeant l’autorisation préalable du mari pour l’obtention d’un passeport par son épouse, est également encourageant, et le Conseil national de la femme compte rester vigilant à cet égard.

En ce qui concerne l’application de lois visant à permettre la mise en œuvre effective de la Convention, Mme Tallawy déclare que le Conseil national de la femme s’efforce de créer des unités chargées de cet aspect au sein des différents ministères, et d’organiser d’autres forums en vue de suivre et de contrôler la mise en œuvre de la Convention. Des stratégies ont déjà été mises en place dans ce but : il s’agit notamment de systèmes de formation et de campagnes de sensibilisation.

M me  Abdel Satar (Égypte ) déclare souhaiter répondre aux observations que Mme Abaka a faites en tant qu’experte, au sujet des sanctions contre le viol. Le viol est passible d’une peine d’emprisonnement à perpétuité ou temporaire. La peine d’emprisonnement à perpétuité, assortie de travaux forcés, est en fait de 20 ans avec libération conditionnelle, tandis que la peine de prison temporaire, également assortie de travaux forcés, est de 3 à 15 ans. Si, en fonction de facteurs circonstanciels, le tribunal opte pour la clémence, la condamnation peut être réduite d’un ou deux degrés et ne pas dépasser six mois d’incarcération.

Le Code pénal ne prévoit pas la peine de mort, excepté si le viol est assorti d’un enlèvement par la force. Dans ce cas, le tribunal peut réduire la peine d’un degré, en la commuant en peine d’emprisonnement à perpétuité avec travaux forcés, ou de deux degrés, en la commuant en peine d’emprisonnement de trois ans minimum avec travaux forcés. Par conséquent, on peut dire que, si elle est prononcée, la peine capitale peut être éventuellement réduite à trois ans d’emprisonnement avec travaux forcés.

S’il n’a aucune justification médicale, l’avortement est puni par le Code pénal. La peine d’emprisonnement prononcée contre la femme jugée coupable ou contre une tierce partie peut aller de 24 heures à trois ans. Si l’avortement en question est encouragé par un médecin, la peine est encore plus sévère, dans la mesure où un tel acte est jugé contraire à l’éthique médicale. Cependant, pour répondre plus précisément à la question de Mme Abaka, Mme Abdel Satar souligne qu’un avortement destiné à protéger la santé et la vie de la mère est autorisé par la loi : dans ce cas, la femme enceinte et la personne qui procède à l’avortement ne sont pas considérées comme des criminelles. En ce qui concerne la responsabilité du Ministère de la santé en matière de prévention et de traitement du sida, Mme Abdel Satar déclare que d’autres instances et organisations participent également à la défense de la santé publique, en présentant des avis et des recommandations sur le traitement de cette maladie.

La Présidente souligne que le sida n’est pas seulement un problème de santé : cette maladie a également des aspects sociaux et liés aux droits de l’homme. Par ailleurs, elle exprime de nouveau ses préoccupations au sujet des lois sur l’avortement : elle se demande notamment si des femmes dont l’état de santé s’est dégradé ne renoncent pas à consulter un médecin précisément en raison de l’existence de telles lois et d’une crainte d’être stigmatisées.

M me  Manalo félicite la délégation égyptienne de sa présentation très inspirée des améliorations institutionnelles et juridiques visant à permettre la mise en œuvre effective de la Convention. Ces améliorations ont notamment illustré la capacité des autorités égyptiennes à promouvoir avec succès la candidature de femmes dans le domaine politique – notamment dans les régions les plus conservatrices du pays. L’approche novatrice de l’Égypte à cet égard s’inscrit véritablement dans la promotion de bonnes pratiques et pourrait constituer un modèle pour d’autres pays.

En ce qui concerne le statut du Conseil national de la femme, Mme Manalo déclare que, si elle a bien compris, cette instance est à la fois un organe semi-public et une institution politique. Dès lors, l’oratrice se demande dans quelle mesure le Conseil national de la femme engage véritablement le Gouvernement égyptien lorsqu’il rend compte de la situation au Comité.

Le Conseil national de la femme a permis de grandes avancées en remportant la bataille sur les forces conservatrices et patriarcales, ainsi qu’en matière de réforme des lois sur le mariage; Mme Manalo ajoute que le Comité est très intéressé par les conclusions selon lesquelles l’islam ne constitue pas un frein à la liberté des femmes. Les études en question ont plutôt prouvé que la religion musulmane était un ardent défenseur des droits de la femme; aussi Mme Manalo juge-t-elle utile que le Comité reçoive, en temps opportun, un exemplaire des études en question. Aux termes de la nouvelle législation, les femmes ont le droit de répudier leur mari; cependant, l’oratrice se demande si ce droit de répudiation a une quelconque incidence sur d’autres droits, tels que la garde des enfants, le soutien financier de l’épouse et l’héritage. En ce qui concerne la question de la violence à l’égard des femmes, Mme Manalo demande si une action a été engagée, au niveau législatif, en vue d’interdire les « crimes d’honneur ». Par ailleurs, existe-t-il également des textes de loi contre le harcèlement sur le lieu de travail?

En conclusion, l’oratrice se félicite de l’adoption de réformes juridiques en Égypte, et considère qu’il serait utile d’examiner les indicateurs statistiques afin d’évaluer l’efficacité de ces réformes.

M me  González se félicite des réponses très sérieuses apportées au Comité, et souligne les progrès accomplis en matière de réforme législative. Mais elle espère également que l’élimination de l’analphabétisme des femmes sera l’un des objectifs des programmes de la Conférence nationale des femmes d’Égypte.

Notant que les lois en vigueur associent, semble-t-il, les allocations/retraites accordées aux femmes et celles de leur époux et de leurs frères, Mme González souhaite savoir pour quelles raisons les femmes sont dépendantes des hommes à cet égard, et, en particulier, ce qui justifie le recours aux frères, outre le mari. Par ailleurs, les femmes actives ont-elles droit à un congé spécial pour s’occuper de leurs enfants, et, dans l’affirmative, y a-t-il des critères particuliers pour obtenir ce type de congé? Enfin, quelle est la durée de ces congés? L’oratrice demande également si le Code pénal contient des dispositions concernant spécifiquement la sanction des actes de violence perpétrés au sein de la famille.

En ce qui concerne la participation politique des femmes, Mme González se demande, d’un point de vue pratique, si les femmes peuvent obtenir une nouvelle carte d’électrice en cas de changement d’adresse. D’autre part, le Gouvernement égyptien envisage-t-il une action destinée à éliminer les conceptions stéréotypées en zone urbaine; de plus, la délégation pourrait-elle fournir davantage d’informations sur les châtiments corporels infligés aux étudiants dans les universités?

M me  González note également que l’Égypte est signataire d’instruments internationaux tels que la Convention pour la répression et l’élimination de la traite des êtres humains et de l’exploitation de la prostitution d’autrui, et que le pays s’est doté de lois contre la prostitution; toutefois, elle demande un complément d’information et de statistiques sur la situation réelle dans ce domaine – afin de savoir, notamment, si les clients des prostituées sont également passibles de sanctions, si le Conseil national de la femme et des organisations non gouvernementales coopèrent en vue de réformer la législation en vigueur, et s’il existe des services ou programmes de réinsertion des prostituées.

Mme González note encore que des organisations de femmes se créent en vue de répondre aux besoins de la population féminine, et d’aider les femmes à développer leur contribution à la collectivité – cette tendance devant être encore encouragée; mais l’oratrice se demande également quel type d’aide est fournie spécifiquement aux organisations de défense des droits de l’homme ou de protection de l’environnement en général. Se référant enfin à la réponse apportée à la question No 54 du Comité – concernant l’article 15 de la Convention –, l’oratrice note que la loi traite de manière très différente un homme et une femme ayant perpétré un acte de violence à l’égard de son conjoint adultérin; si ce type d’acte n’est pas officiellement répertorié dans la catégorie « crimes d’honneur », les dispositions y afférentes sont incontestablement discriminatoires, et les lois en question doivent faire l’objet d’une réforme.

M me  Schöpp-Schilling demande davantage d’informations sur les conséquences matérielles pour une femme répudiant son mari, dans le cadre de la législation en vigueur, et suggère par ailleurs que l’étude concernant le lien éventuel entre la « charia » et les dispositions de la Convention soit traduite en anglais et fournie au Comité. Mme Schöpp-Schilling demande également des éclaircissements au sujet des véritables pouvoirs et de la véritable influence du Conseil national de la femme, ainsi que du mandat de cette instance, consistant notamment à communiquer les conclusions du Comité au Gouvernement égyptien; elle suggère aussi que le Conseil national de la femme recommande la ratification, par le Gouvernement égyptien, du Protocole facultatif à la Convention.

Les réformes juridiques déjà entreprises sont les bienvenues, et, s’il est vrai que les dispositions de la Convention se situent au-dessus de celles de la Constitution égyptienne, il convient d’appliquer pleinement le paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention en vue d’assurer davantage encore la promotion des femmes égyptiennes. Dans le domaine judiciaire, si les responsables décident de nommer des femmes à des postes de magistrat, il faudra effectivement en nommer un nombre suffisamment significatif pour marquer une véritable évolution. En ce qui concerne la loi No 153, relative aux organisations non gouvernementales, Mme Schöpp-Schilling se demande si ce texte de loi contribue vraiment à multiplier les limitations d’ordre bureaucratique imposées à ces organisations – comme l’affirment certaines d’entre elles –, et pour quelles raisons la Cour suprême a jugé cette loi inconstitutionnelle.

L’oratrice demande également davantage d’informations sur la situation globale des femmes en matière d’emploi – notamment dans un secteur privé croissant –, et si les lois en vigueur sont véritablement appliquées, dans la mesure où les privatisations croissantes conduisent souvent à des situations discriminatoires à l’égard des femmes – par exemple en cas de grossesse. Notant la création de zones de libre-échange, Mme Schöpp-Schilling se demande quel est le nombre de femmes employées dans ces secteurs, et quelles sont leurs conditions de travail : bénéficient-elles, par exemple, de contrats syndicaux?

En ce qui concerne l’article 14 de la Convention, l’oratrice note que les plans de développement rural tiennent compte de la nécessité d’améliorer la condition des femmes rurales; mais, étant donné que ces dernières représentent plus de 50 % de la population féminine totale du pays, Mme Schöpp-Schilling souhaite davantage d’informations sur la situation des femmes rurales – en particulier les jeunes femmes et les femmes d’âge moyen – et notamment sur la manière dont elles ont pu être touchées par les privatisations. Le Conseil national de la femme doit également faire tout ce qui est en son pouvoir pour modifier les stéréotypes concernant les femmes et leur charge de responsable principale de la famille; le Conseil doit aussi – éventuellement – imiter d’autres pays en vue de promouvoir la notion de parentalité, car, dans une économie mondialisée, il est capital que les femmes bénéficient d’une véritable égalité sur le marché du travail. Par ailleurs, Mme Schöpp-Schilling reconnaît que, sur le plan juridique, des procédures ont été instaurées en vue de prévenir et de sanctionner les violences perpétrées dans le cadre de gardes à vue; mais elle se demande si, dans les faits, les femmes sont véritablement encouragées à porter plainte dans de tels cas et si elles ont le droit de revendiquer d’être traitées par des officiers de police de sexe féminin; enfin, l’oratrice demande quelles mesures prend le Conseil national de la femme dans ce domaine.

M me  Goonesekere note les progrès importants accomplis en matière de promotion des droits de la femme; mais elle souligne également l’importance de l’application des instruments internationaux, et la nécessité d’éliminer les vestiges de la tradition coloniale – par exemple, l’âge de la majorité fixé à 21 ans. Il serait très utile d’obtenir davantage d’informations sur les mariages d’enfants et d’adolescentes – question liée aux taux élevé d’abandon scolaire et au phénomène du développement de la violence à l’égard des adolescentes enceintes (autant de questions qui doivent être abordées d’un double point de vue : éducatif et sanitaire); Mme Goonesekere demande également davantage d’informations sur le problème de la violence à l’égard des femmes en général, sur la prostitution, le viol, les crimes d’honneur et les violences perpétrées dans le cadre de gardes à vue ou de périodes de détention. En ce qui concerne ce dernier point, Mme Goonesekere reconnaît que la police égyptienne bénéficie d’une formation aux questions de droits de l’homme; en revanche, elle se demande s’il en est de même dans l’armée. Étant donné que le viol est défini comme « un rapport sexuel sans le consentement de la victime », l’oratrice se demande s’il est vraiment nécessaire d’exiger des preuves du recours à la force de la part de l’agresseur; d’autre part, elle demande de quelle manière sont définies, sur le plan juridique, d’autres graves agressions d’ordre sexuel. Elle est également préoccupée par le phénomène des violences à l’égard de femmes enceintes, et se demande par ailleurs si le fait de sanctionner une prostituée ne revient pas à sanctionner la victime, et si les clients des prostituées sont également passibles de sanctions.

La loi interdisant à une mère de transmettre sa nationalité à son enfant alors que le père a été identifié – mesure visant prétendument à éviter les problèmes de double nationalité – devrait être remise en cause; l’une des solutions, adoptée par certains pays, est d’autoriser l’enfant ayant atteint l’âge de la majorité (21 ans) à choisir l’une des deux nationalités en question. Mme Goonesekere ajoute, à cet égard, que les enfants doivent être considérés comme une responsabilité de la société dans son ensemble, et non pas seulement des mères; dans ce contexte, l’expérience d’autres pays pourrait servir d’exemple. En ce qui concerne la loi sur les organisations non gouvernementales – qui a été annulée par la Cour suprême, il importe que le Gouvernement ne tente pas d’imposer une autre législation en vue de contourner l’arrêt de la Cour.

M me  Tallawy (Égypte ) déclare, en réponse aux préoccupations de Mme Manolo, que le Conseil national de la femme, créé par décret présidentiel, dispose de son propre budget et a un statut spécifique; cette instance jouit d’une grande liberté en matière de dépenses; elle est le seul et unique organe chargé de traiter des questions d’égalité entre les sexes, et, à ce titre, représente l’Égypte au niveau international. L’étude effectuée au sujet de la « charia » et des questions féminines sera traduite en anglais et adressée au Comité; quant à la question des crimes d’honneur, Mme Tallawy précise que la loi les interdit, et que ces crimes sont traités, par les autorités égyptiennes, de la même manière que tout autre crime. Enfin, au sujet de la question No 64 du Comité – concernant les droits d’héritage –, Mme Tallawy déclare ne disposer, à l’heure actuelle, d’aucune information supplémentaire susceptible d’être communiquée au Comité.

Répondant aux questions de Mme González, Mme Tallawy signale que les chiffres figurant dans le rapport datent de 1996, et que les statistiques de janvier 2001 indiquent une chute du taux d’analphabétisme – de 63 % à un niveau situé entre 47 et 50 %; par ailleurs, plus de 3 000 écoles intégrées, destinées à accueillir des filles, ont été créées dans les secteurs les plus reculés du pays, et l’on continue à déployer des efforts en vue d’encourager les filles à se scolariser. En ce qui concerne la question des veuves bénéficiant non seulement de leur retraite, mais aussi de l’allocation de leur frère, Mme Tallawy déclare que cette pratique est tout à fait compréhensible, dans la mesure où, dans le monde musulman, la femme est à la charge de son parent masculin le plus proche, notamment lorsqu’elle n’a elle-même aucune source de revenus. D’autre part, l’oratrice confirme le fait que les femmes qui changent de circonscription transfèrent automatiquement leur droit de vote dans la circonscription électorale correspondant à leur nouvelle adresse – à condition qu’elles fassent la demande de leur nouvelle carte d’électrice avant la date butoir fixée avant l’élection en question.

En réponse aux questions de Mme Schöpp-Schilling, Mme Tallawy déclare notamment que le Conseil national de la femme va faire pression sur le Gouvernement égyptien pour que ce dernier signe le Protocole facultatif à la Convention et poursuive la promotion de l’adoption de mesures temporaires spéciales, conformément au paragraphe 1 de l’article 4 de la Convention, dans le sens de l’égalité entre les sexes. En ce qui concerne la loi No 153 sur les organisations non gouvernementales, l’oratrice déclare qu’en réalité, ce texte ne limite nullement leur liberté et que, tout au contraire, cette loi élimine un certain nombre d’obstacles au fonctionnement de ces organisations et réduit le contrôle du Gouvernement en la matière. En fait, cette loi a été annulée par la Cour suprême non pas au motif de son contenu, mais pour des raisons procédurales, car l’exécutif n’avait pas présenté ce texte devant la Chambre haute du Parlement aux fins de débat. Dès lors, un nouveau projet de loi ayant substantiellement le même contenu, et, pour la première fois, élaboré conjointement par le Gouvernement et des organisations non gouvernementales, sera présenté au Parlement dans un proche avenir.

En ce qui concerne la question de Mme Goonesekere au sujet du rapport de l’Égypte, Mme Tallawy précise qu’il n’y a pas eu participation d’organisations non gouvernementales à l’élaboration de ce document; mais il faut noter aussi qu’au moment de la rédaction du rapport, le Conseil national de la femme n’existait pas encore. Depuis lors, le Conseil a tout à fait conscience de la nécessité de la participation des organisations non gouvernementales, et, en fait, cette coopération a déjà lieu de manière concrète. Mme Tallawy déclare encore qu’elle n’a pas de position bien arrêtée sur le fait de baisser l’âge de la majorité à 18 ans. Enfin, au sujet d’une éventuelle formation des militaires aux questions de droits de l’homme – sur le modèle de la formation de la police –, l’oratrice déclare que cela serait inutile dans la mesure où l’armée ne s’immisce pas dans les affaires civiles.

M me  Abdel Satar (Égypte ) déclare – au sujet des droits des femmes en cas de divorce – que, lorsqu’une femme répudie son époux simplement pour des raisons d’incompatibilité, et conformément aux dispositions de la « charia », elle doit renoncer à toute pension alimentaire et rembourser sa dot. En revanche, en cas de non-respect, par le mari, de l’obligation de soutenir financièrement son épouse, ou de comportement non conforme dans ce domaine – y compris si l’épouse purge une peine de prison de plus d’un an ou qu’elle est atteinte d’une maladie chronique dont elle n’avait pas connaissance avant le mariage –, l’épouse a le droit de demander le divorce devant un tribunal et conserve tous ses droits financiers. L’épouse peut également conserver son droit de garde des enfants, puisqu’il est considéré que l’enfant a le droit de rester de préférence avec sa mère. Enfin, en ce qui concerne les droits d’héritage, si l’épouse les perd au fil du temps, en revanche, les enfants les conservent.

Abordant ensuite la question des crimes d’honneur, Mme Tallawy souligne qu’ils sont strictement interdits dans le cadre du Code pénal, mais reconnaît que celui-ci contient des dispositions plus sévères à l’égard d’une femme adultère ou d’une femme qui a assassiné son mari adultère qu’à l’égard d’un homme commettant les mêmes crimes. Mme Tallawy reconnaît encore que ces dispositions sont discriminatoires et doivent être révisées. En ce qui concerne la prostitution, l’oratrice reconnaît que c’est la prostituée – et non pas le client – qui est sanctionnée, mais précise que c’est surtout la récidive en matière de prostitution qui donne lieu à des sanctions. Toutefois, les lois relatives à la prostitution font l’objet d’un réexamen, et seront éventuellement modifiées s’il s’agit de garantir l’égalité entre les hommes et les femmes.

M. Khalil (Égypte ) déclare que la violence conjugale ou familiale est sanctionnée par la législation relative aux actes de violence ou aux agressions en général, qu’ils soient perpétrés à l’égard d’hommes ou de femmes et quels qu’en soient les motifs. De tels actes de violence peuvent constituer un motif de divorce. En ce qui concerne les procédures d’interrogatoire de femmes accusées d’un crime, c’est la police qui est chargée de la procédure initiale et qui, dans ce contexte, doit respecter les règles et réglementations du Code pénal. La fouille au corps d’une femme n’est autorisée qu’en présence d’un agent de police de sexe féminin, et les femmes incriminées doivent être détenues exclusivement dans des prisons de femmes. Les premiers interrogatoires ne doivent pas durer plus de 24 heures; passé ce délai, ce sont des fonctionnaires du parquet qui effectuent un second interrogatoire.

En réponse à une question sur le statut de la Convention par rapport à la législation égyptienne, M. Khalil déclare que la Constitution égyptienne est la loi suprême du pays. Cependant, lors de l’adoption de cette constitution, en 1971, l’Égypte était déjà un État partie à de nombreux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, et les droits protégés par ces instruments ont été alors inscrits dans la Constitution. Par conséquent, aucune autre loi ne peut les entamer. La Cour constitutionnelle suprême est chargée du contrôle administratif de l’ensemble de la législation égyptienne. Cette cour déclare nulle et non avenue toute loi contraire aux dispositions constitutionnelles. Les décisions de la Cour constitutionnelle suprême sont publiées au Journal officiel et ne peuvent faire l’objet d’aucun appel. En cas de tentative de reformulation d’une loi déjà jugée inconstitutionnelle, la Cour déclarera également nul et non avenu le nouveau texte. En résumé, le pouvoir égyptien n’a éprouvé aucune difficulté à adhérer aux instruments internationaux en question dans la mesure où le contenu de leurs dispositions était déjà inscrit dans la Constitution.

Les châtiments corporels ont pu être autrefois autorisés dans le système éducatif; mais, aujourd’hui, le Ministère de l’éducation les a interdits. Par ailleurs, M. Khalil déclare partager totalement le point de vue du Comité au sujet de la nécessité d’appliquer les lois relatives à l’emploi des femmes. Les magistrats et autres membres du système juridique ont reçu une formation en vue d’appliquer correctement ces lois, et cela a donné des résultats très positifs.

M me  Zoul Fokkar (Égypte ) déclare – en réponse à une question posée par Mme Acar lors de la précédente séance – qu’au cours des trois premiers mois ayant suivi l’adoption de la loi sur la répudiation (« khul »), 1227 dossiers ont été déposés. Cette loi établit qu’il ne doit pas s’écouler plus de six mois entre le début de la procédure de divorce par répudiation et le divorce officiellement prononcé. Les procédures prévues dans le cadre de la loi ont toujours eu lieu sans difficultés, et l’on peut dire qu’à ce jour, la réalité des expériences liées à cette loi s’est révélée très positive.

En ce qui concerne la question des biens conjugaux, la législation égyptienne ne reconnaît pas le concept de « biens communs ». Les épouses conservent leur nom de jeune fille et les biens qu’elles possédaient avant leur mariage. Cependant, aux termes de la nouvelle loi, promulguée en 2000, les contrats de mariage peuvent contenir une clause d’accord entre les époux, qui, en cas de divorce, consentent à partager les biens acquis au cours de leur union.

En réponse à Mme Schöpp-Schilling, Mme Zoul Fokkar ajoute que 32 % des femmes actives sont des employées de l’État, que 12 % de femmes travaillent dans le secteur public et 16 % dans le secteur privé. Dans ce qu’il est convenu d’appeler le « secteur informel », 41 % des femmes actives travaillent dans les domaines de l’agriculture et des services. Le pourcentage de femmes employées dans le secteur formel tend à augmenter ou reste stable, alors que celui des hommes, dans ce même secteur, tend à baisser progressivement. Le Conseil national de la femme accorde la priorité aux femmes employées dans le secteur informel et aux femmes chefs de famille. Les zones de libre-échange ont été privatisées. Bien que ce processus de privatisation ait eu des effets négatifs en matière d’emploi des femmes, des programmes sociaux et des projets de microcrédit sont mis en place afin d’aider les femmes qui se sont retrouvées au chômage en raison des privatisations.

Par le passé, il y avait des différences entre les secteurs public et privé en ce qui concernait les congés sans solde que les femmes étaient amenées à demander pour élever leurs enfants. Mais, aux termes de la nouvelle loi, adoptée en 1996 et conforme à la Convention des Nations Unies relative aux droits de l’enfant, toutes les mères qui viennent d’avoir des enfants ont droit à un congé sans solde d’une durée pouvant aller jusqu’à deux ans, et ce, jusqu’à trois fois par période d’emploi. Aucune condition particulière n’est attachée à cette disposition; le droit en question est accordé de manière automatique, sur demande de la mère. Il faut noter toutefois que le Conseil national de la femme envisage de soutenir une révision de la loi en question, afin qu’elle puisse s’appliquer à toutes les mères ayant des enfants – et non pas seulement à celles qui viennent d’accoucher.

En ce qui concerne la place des femmes dans le système judiciaire, il ne s’est pas passé une seule année – depuis 1951 – où l’on n’ait assisté à la requête, devant les tribunaux, d’une femme demandant à être nommée magistrate. À l’heure actuelle, le Conseil national de la femme participe de manière active à la résolution d’un cas examiné par la Cour suprême; de plus, le Conseil envisage la création d’un poste de médiateur des femmes : il s’agira de soutenir toutes les femmes qui lutteront pour la reconnaissance de leurs droits devant un tribunal – notamment dans des cas relatifs à des questions de nationalité –, ainsi que celles qui souhaitent obtenir un poste dans l’appareil judiciaire.

M me  Shin déclare que la description qui a été faite du Conseil national de la femme indique que cette instance a la capacité de représenter les Égyptiennes dans les forums bilatéraux et multilatéraux. Mais l’oratrice espère que le Conseil national de la femme a également un pouvoir et une influence considérables en Égypte même. D’autre part, elle demande à être informée des effectifs dont dispose le Conseil national de la femme. Elle note qu’à l’heure actuelle, les 30 membres du Conseil sont issus d’organisations non gouvernementales ou des milieux universitaires. Mme Shin espère que les membres du Conseil originaires d’organisations non gouvernementales participent aux travaux du Conseil à ce titre et peuvent ensuite présenter un compte rendu des activités et projets du Conseil aux organisations dont ils font partie.

La législation égyptienne ne tient pas compte du sexe des personnes, et ne fait aucune différence entre les hommes et les femmes en matière d’actes de violence considérés comme criminels. Cependant, il importe de bien comprendre la psychologie et la dynamique liées à la violence à l’égard des femmes si l’on souhaite éliminer ce fléau. Par conséquent, on peut dire que la législation égyptienne n’a pas la force souhaitable dans son approche des violences conjugales et familiales, du viol ou encore des mutilations génitales de femmes. En outre, le crime de « viol » fait l’objet d’une définition trop étroite. Il conviendrait de réaliser une enquête nationale sur l’ensemble des formes de violence à l’égard des femmes. De plus, les autorités égyptiennes devraient prendre des mesures afin d’aider les femmes à vaincre leur peur d’aller signaler à la police les actes de violence dont elles ont pu être victimes. Au sein de la police, il faudrait créer des unités spéciales chargées de recevoir les plaintes de femmes, et les organisations non gouvernementales devraient être encouragées à apporter leur concours dans ce domaine. Enfin, étant donné le taux élevé de femmes analphabètes en Égypte, il conviendrait d’avoir recours aux médias et à des unités mobiles pour une plus grande sensibilisation à la question de la violence à l’égard des femmes.

M me  Feng Cui déclare que le troisième rapport et les quatrième et cinquième rapports groupés de l’Égypte décrivent de manière quasiment identique l’action du Gouvernement égyptien en vue de l’application de l’article 14 de la Convention – bien que plusieurs années se soient écoulées entre ces différents rapports, et que, dans l’intervalle, la population rurale ait augmenté. L’oratrice se demande s’il y a eu évolution de l’action gouvernementale visant à aider les femmes rurales. Les quatrième et cinquième rapports groupés indiquent que le nombre de foyers ayant bénéficié du projet « Familles productives » du Ministère des affaires sociales dépassait les 50 000 en 1990, mais n’était plus que d’environ 20 000 en 1998; par conséquent, l’oratrice se demande quelles sont les raisons de cette baisse spectaculaire. Le troisième rapport de l’Égypte indiquait qu’en 1992, quelque 1 500 femmes avaient été formées dans le cadre du projet « Femmes rurales dirigeantes »; les quatrième et cinquième rapports groupés indiquent exactement le même chiffre. Mme Feng Cui demande, par conséquent, si cela signifie qu’il n’y a plus de nouvelles femmes rurales qui bénéficient de cette formation. Bien qu’elles aient répondu aux questions du Comité au sujet des microcrédits, les autorités égyptiennes n’ont pas donné de précisions au sujet de la mise en œuvre des programmes de microcrédit ou du nombre de femmes rurales en bénéficiant. Ce type d’informations devrait figurer dans le prochain rapport périodique de l’Égypte , de même que des informations concernant le pourcentage de femmes rurales qui accouchent dans des hôpitaux.

M me  Hazelle déclare qu’une approche globale est nécessaire en matière de prévention et de traitement du sida. Les implications juridiques, sociales et culturelles de la violence à l’égard des femmes, et l’importance donnée au rôle procréatif des femmes risquent de contribuer à un développement du sida chez les femmes égyptiennes. Par ailleurs, Mme Hazelle se félicite de l’assurance qui a été donnée au sujet du réexamen de la question de la nationalité – en particulier dans la perspective d’autoriser les femmes à transmettre leur nationalité à leurs enfants. D’autre part, l’oratrice reste préoccupée par les violences sexuelles sous toutes leurs formes, par la situation des femmes détenues, et par la question des crimes d’honneur. Tout en se félicitant de la pénalisation des crimes commis par des maris en liaison avec un adultère, Mme Hazelle souligne que ces crimes dits d’honneur peuvent également impliquer d’autres membres de la famille, et demande, par conséquent, s’il existe des programmes de sensibilisation des magistrats dans ce domaine. Enfin, elle se dit préoccupée par l’enquête évoquée lors de la précédente séance et selon laquelle les actes de violence conjugale ou familiale ont lieu essentiellement dans les milieux peu instruits. Étant donné que chacun sait que ce type de violence existe dans toutes les catégories sociales, Mme Hazelle se demande quel a été le mode d’opération de l’enquête en question, sur quels secteurs les enquêteurs ont concentré leurs efforts et si l’on n’a pas complètement négligé d’interroger des femmes appartenant à d’autres milieux sociaux.

M me  Taya souligne que les quatrième et cinquième rapports groupés indiquent des pourcentages différents en ce qui concerne l’abandon des études par les filles, au niveau de l’enseignement primaire : ces pourcentages sont respectivement de 1,21 % (Part. 1, sect. I) et de 7 % (Part. 2, art. 10, sect. II); par conséquent, elle demande quel est le bon chiffre. Par ailleurs, Mme Taya se félicite de l’exposé détaillé au sujet de l’action du Gouvernement égyptien visant à réduire l’analphabétisme féminin et les taux d’abandon scolaire chez les filles, et à propos des facteurs historiques et sociaux ayant pu entraver cette action. Les pays tels que l’Égypte, qui ont mis en œuvre des politiques d’ajustement structurel, ont souvent eu du mal à maintenir en l’état ou à augmenter le budget de l’éducation. En conséquence, les taux d’abandon scolaire – en particulier chez les filles – et la qualité de l’enseignement ont eu tendance à se dégrader dans ces pays. Au vu de l’importance des programmes d’alphabétisation, des programmes de réduction du taux d’abandon scolaire et des réformes des programmes scolaires, Mme Taya demande que soit précisé le pourcentage des ressources budgétaires consacré au secteur éducatif en général. Elle demande également quelles difficultés a rencontrées l’Égypte pour le maintien d’une volonté politique de non réduction du budget de l’éducation.

M me  Tavares da Silva se félicite de la reconnaissance, par l’Égypte, du fait que l’application de la Convention incombe à l’ensemble des pouvoirs publics. Mais elle se demande également si des organisations non gouvernementales participent à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques concernant les questions féminines. L’article 11 de la Constitution égyptienne stipule que l’État doit permettre aux femmes de concilier leur vie familiale et leurs responsabilités professionnelles. Mais les mesures concrètes prises dans ce domaine ne vont pas au-delà de la période de maternité, au sens étroit du terme. Mme Tavares da Silva demande si les hommes bénéficient également des mesures visant à permettre de concilier un métier et des responsabilités familiales; si tel n’est pas le cas, cela signifie que l’on met surtout l’accent sur le rôle stéréotype des femmes en tant que mères. Mme Tavares da Silva est choquée par le fait que le rapport qualifie de « privilèges » les droits des femmes dans ce domaine. Le fait de concilier les tâches familiales et un emploi est un droit et non pas un privilège, précise l’oratrice.

Par ailleurs, elle est préoccupée par la manière dont l’Égypte traite le problème de la prostitution. Les femmes – qui, pour un grand nombre d’entre elles, se prostituent sous la contrainte – sont, en l’occurrence, des victimes; et pourtant, elles sont les seules à être condamnées, alors que les hommes qui les ont exploitées deviennent leurs accusateurs. Une telle approche n’est ni juste ni efficace en termes d’élimination de la prostitution. D’autre part, la législation égyptienne contient également des dispositions discriminatoires en matière de crimes d’honneur. Bien que ce concept n’existe pas dans la lettre de la loi, il est bel et bien présent dans l’esprit des textes puisque, pour de tels crimes, les hommes encourent des sanctions moins sévères que les femmes.

M me  Livingstone Raday se dit préoccupée par le fait que la notion de viol conjugal ne soit pas reconnu par la législation égyptienne, alors que, d’après une étude récente, 93 % des femmes égyptiennes considèrent bel et bien qu’il y a là une forme de violence conjugale – même si 46 % des hommes considèrent, eux, qu’ils sont dans leur droit. Aux termes de la loi No 6 de 1998, les actes de violence à l’égard d’une épouse ne sont considérés comme un crime qu’en cas de circonstances aggravantes. Mme Livingstone Raday ne peut imaginer que la révision d’une telle disposition soit contraire à la charia; par conséquent, on peut en conclure que la résistance à ce type de réforme est plutôt fondée sur une vision patriarcale de la société que sur la religion.

M me  Tallawy déclare que le Conseil national de la femme est très respecté en Égypte et pratique un excellent partenariat avec les organisations non gouvernementales. L’un des 11 comités composant le Conseil et présidé par un ancien ministre a précisément pour mission de traiter avec les ONG, si bien que ce serait une erreur totale que de croire ou d’affirmer que les ONG sont exclues des processus en question. D’autre part, Mme Tallawy réfute totalement l’idée selon laquelle le Gouvernement égyptien ne ferait aucune différence entre les deux sexes en matière de violence. Certes, les chiffres dont on dispose dans ce domaine sont insuffisants; mais les autorités égyptiennes sont tout à fait conscientes de la réalité de ce problème. Autrefois, les femmes ne signalaient pas les actes de violence dont elles pouvaient être victimes au sein de leur foyer; mais aujourd’hui, les attitudes évoluent, et ce type de violence est largement couvert par la presse. Mme Tallawy ne déplore pas le fait que le contenu des deux rapports de l’Égypte soit similaire, car trois ans seulement séparent ces deux documents, et, par conséquent, il suffit d’actualiser les chiffres. En ce qui concerne le projet dit des « familles productives », l’oratrice souligne qu’une erreur s’est infiltrée dans les chiffres indiqués par les quatrième et cinquième rapports groupés (CEDAW/C/EGY/4 et 5) au sujet de l’application de l’article 14 de la Convention : en fait, ce sont 56 545 familles qui ont bénéficié de ce projet en 1998.

Quant à la formation des femmes rurales dirigeantes, ce processus se poursuit; mais il a eu un tel succès qu’il a été repris par le Ministère de la santé, ainsi que d’autres organismes et établissements bancaires; par conséquent, les nouveaux chiffres ne figuraient pas encore dans le rapport de l’Égypte au Comité. En ce qui concerne le budget de l’éducation, celui-ci s’élevait à 17 milliards de livres égyptiennes en 2000 et à 18 milliards en 2001 – ce dernier chiffre étant le plus élevé de toute l’histoire des budgets de l’éducation.

L’article 11 de la Constitution égyptienne vise à permettre de concilier les exigences professionnelles et familiales; mais, en même temps, il ne s’agit pas de faire porter aux femmes toute la charge de l’effort. En effet, la culture égyptienne veut que les hommes partagent les responsabilités dans ce domaine. En ce qui concerne l’importance des normes internationales, le Gouvernement égyptien est de ceux qui ont participé à l’élaboration de la Charte des Nations Unies; par conséquent, il attache une grande importance à la fois à cette Charte et aux conventions internationales, qui inspirent la législation égyptienne. Enfin, Mme Tallawy a du mal à accorder crédit aux chiffres cités par Mme Livingstone Raday : en effet, elle serait très surprise que des personnes constituant un échantillon représentatif soient prêtes à s’exprimer ouvertement sur un sujet aussi sensible que le viol conjugal.

M me  Mtengeti-Migiro demande des précisions sur la situation liée à la décision de la Cour suprême concernant l’obtention d’un passeport. La représentante de l’Égypte a déclaré que, dans ce domaine, un décret ministériel avait été annulé par la Cour suprême; par conséquent, elle se demande s’il est possible que la Cour suprême revienne sur l’une de ses décisions – comme c’est le cas dans d’autres pays. Le risque de voir adopter des dispositions encore moins favorables aux femmes devrait inciter le Conseil national de la femme à maintenir ses pressions dans le sens de l’élaboration d’une loi sur cette question.

M me  Achmad félicite le Conseil national de la femme pour son action, et en particulier pour le soutien qu’il apporte aux femmes souhaitant s’engager dans la vie politique, et le dialogue qu’il entretient avec les organisations non gouvernementales. Toutefois, Mme Achmad demande également si les hommes qui soutiennent de manière active l’égalité entre les sexes subissent l’opprobre du reste de la population masculine. Si tel est le cas, Mme Achmad se demande s’il existe des stratégies – et de quelle nature – en vue d’aider ces hommes favorables à l’égalité et de multiplier leur nombre. D’autre part, l’oratrice demande s’il existe, dans les universités, des filières d’études féminines; c’est là, selon elle, une question très importante, et qui ne devrait pas intéresser que les femmes.

M me  Regazzoli déclare que, en liaison avec la question No 19 de la liste de thèmes établie par le Comité (CEDAW/PSWG/2001/I/CRP.1/Add.4), il n’a pas été répondu au problème de l’application de l’article 162 du Code de procédure pénale. L’oratrice demande si les fonctionnaires de police et des établissements pénitentiaires ont été suffisamment formés pour éviter de soumettre les femmes à de nouvelles violences lors des interrogatoires. Elle demande également s’il existe des refuges pour les femmes « à risque », et si, éventuellement, des conseillers peuvent leur apporter une aide psychologique. Elle souhaite savoir également si des sanctions appropriées sont prévues à l’égard des hommes coupables d’avoir menacé des femmes sur un plan sexuel. Elle demande encore si, à l’ère de la mondialisation, la situation des femmes s’est dégradée sur le plan de l’emploi, et si certains organismes internationaux ont fait pression sur le Gouvernement égyptien pour qu’il relève l’âge de la retraite pour les femmes – lequel est actuellement de 60 ans, d’après les informations dont elle dispose.

M me  Tallawy souligne qu’il y a, en Égypte, une longue tradition de soutien, par des hommes, du principe d’égalité entre les sexes. Il y a un siècle déjà, un groupe d’hommes défendait ce principe sur la base des préceptes religieux; mais il est vrai que ces hommes ont fait l’objet de persécutions. Par conséquent, Mme Tallawy espère qu’une nouvelle génération d’hommes favorables à l’égalité va émerger. En ce qui concerne les études féminines à l’université, il existe effectivement un cycle d’études de ce type dans une faculté où l’on enseigne les médias. Par ailleurs, pour ce qui est des centres de refuge pour femmes, il en existe notamment un, qui est géré par une organisation non gouvernementale, et a été créé à la fin des années 40 afin d’apporter une aide discrète à des jeunes filles enceintes et non mariées. D’autre part, le Ministère des affaires sociales fournit également une aide de ce type; mais cela ne fait guère l’objet de publicité dans la mesure où l’on souhaite éviter toute réaction négative.

M me  Zoul Fokkal déclare que, indépendamment du crime de « viol » – qui implique la pénétration de la femme –, la législation égyptienne reconnaît un autre délit : celui d’« agression sexuelle ». En ce qui concerne la prostitution, l’oratrice précise que toute personne exploitant une prostituée est également considérée comme un criminel, passible d’une peine d’emprisonnement. En revanche, les clients des prostituées restent impunis – et cela est regrettable; cependant, le Conseil national de la femme s’efforce de faire modifier la loi sur ce point. Enfin, en ce qui concerne ce que l’on appelle les « crimes d’honneur », Mme Zoul Fokkal reconnaît que cette expression désigne couramment toute forme d’agression visant à punir un adultère. Cependant, la législation égyptienne n’établit aucune distinction entre les différentes formes d’agression sexuelle – à l’exception du harcèlement, considéré comme moins grave que le viol ou les violences sexuelles physiques. Il n’en reste pas moins que ces « crimes d’honneur » constituent encore un problème – notamment du fait qu’ils ne font, souvent, l’objet d’aucun signalement aux autorités. Le Conseil national de la femme s’efforce de créer un centre de recherche qui puisse fournir des données plus importantes et plus fiables au sujet de la violence à l’égard des femmes.

En ce qui concerne la liberté de mouvement des femmes, Mme Zoul Fokkal déclare qu’il n’y a aucun risque de voir la Cour suprême réviser ses propres décisions, dans la mesure où elle veille à la conformité de toute disposition avec la Constitution. En revanche, on peut craindre qu’une nouvelle loi n’autorise les maris à avoir leur mot à dire en ce qui concerne la mobilité de leurs épouses. Mais le Conseil national de la femme reste également très vigilant à cet égard. En matière d’emploi, les privatisations et les réformes structurelles ont eu des effets négatifs. Mais des cycles de formation ont été mis en place afin d’y remédier. Pour les femmes, l’âge de la retraite reste fixé à 60 ans; cependant, une possibilité de préretraite, assortie d’indemnisations, existe désormais aussi bien pour les hommes que pour les femmes. Dans ce contexte, l’oratrice se félicite de la proposition consistant à mettre en place des programmes en faveur des femmes âgées.

M me  Tallawy déclare qu’il existe un nombre croissant de centres destinés aux personnes âgées : ils sont gérés par des organisations non gouvernementales et financés par le Ministère des services sociaux.

La séance est levée à 18 h 15.