Observations finales concernant les huitième et neuvième rapports périodiques présentés en un seul documentd’El Salvador *

Le Comité a examiné les huitième et neuvième rapports périodiques présentés en un seul document d’El Salvador (CEDAW/C/SLV/8-9) à ses 1478e et 1479eséances (voir CEDAW/C/SR.1478 et 1479), le 17 février 2017. La liste des points et questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/SLV/Q/8-9 et les réponses d’El Salvador dans le document CEDAW/C/SLV/Q/8-9/Add.1.

A.Introduction

Le Comité remercie l’État partie d’avoir présenté, en un seul document, ses huitième et neuvième rapports périodiques. Il le remercie également de ses réponses écrites à la liste de points et de questions soulevés par le groupe de travail d’avant session et accueille favorablement l’exposé oral de la délégation et les précisions apportées en réponse aux questions que le Comité a posées oralement durant l’échange de vues.

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation multisectorielle, dirigée par le Vice-Ministre des affaires étrangères d’El Salvador, Carlos Castaneda Magaña, et qui comprenait la Première Vice-Présidente de l’Assemblée législative, le Représentant permanent d’El Salvador auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève, la Directrice de l’Institut salvadorien pour la promotion de la femme, et des représentants du Ministère de la santé, de l’Institut salvadorien de la réforme agraire, de la Mission permanente d’El Salvador auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité prend note avec satisfaction des avancées réalisées depuis l’examen en 2008 du septième rapport périodique de l’État partie (CEDAW/C/SLV/7) dans l’adoption de réformes législatives, notamment des textes suivants :

a)La loi sur la promotion, la protection et le soutien de l’allaitement maternel, en juin 2016;

b)La loi sur l’égalité, l’équité et l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, en 2016, et la loi sur la protection intégrale de l’enfance et de l’adolescence, en avril 2009, qui prévoit que le Ministère de l’éducation est chargé de dispenser une éducation sur des sujets tels que l’égalité des sexes, la santé procréative et la discrimination à l’égard des femmes dans le système éducatif;

c)La loi sur la promotion, la protection et le développement des micro et petites entreprises, en 2014, qui vise à favoriser la création d’entreprises par des femmes;

d)La loi spéciale contre la traite des personnes, en 2014;

e)La loi spéciale intégrale visant à garantir aux femmes une vie sans violence, en 2012.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et normatif dans le but d’accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des sexes, grâce à l’adoption ou la mise en place des éléments suivants :

a)Le Pacte pour la défense des droits civils et politiques des femmes, en 2014;

b)Le Système national de promotion de l’égalité réelle et son plan national, en 2013;

c)Le Système de statistiques et de surveillance en faveur de l’égalité, en 2013;

d)La Politique nationale pour une vie sans violence pour les femmes, en 2013, et ses plans nationaux portant sur les périodes 2013-2015 et 2016-2020;

e)Le planEl Salvador Seguro, en 2015, contre la violence sexiste;

f)Le Plan national de promotion de l’égalité et de l’équité en faveur des femmes salvadoriennes, en 2012;

g)La Politique de santé sexuelle et procréative, en août 2012, axée sur la sensibilisation aux méthodes de planification de la famille et qui comprend une section spécifique sur la santé des adolescents;

h)Le Plan stratégique national pour la réduction de la mortalité maternelle, périnatale et néonatale, en 2011.

Le Comité se félicite du fait qu’au cours de la période qui a suivi l’examen du rapport précédent, l’État partie a ratifié les instruments internationaux suivants ou y a adhéré :

a)La Convention relative au statut des apatrides, en février 2015;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, en février 2015.

C.Parlement

Le Comité souligne le rôle essentiel joué par le pouvoir législatif pour garantir la pleine mise en œuvre de la Convention (voir la déclaration du Comité relative à ses relations avec les parlementaires, adoptée à sa quarante-cinquième session, en 2010). Il invite l ’ Assemblée législative, conformément à son mandat, à prendre les mesures nécessaires concernant la mise en œuvre des présentes observations finales, d ’ ici à la présentation du prochain rapport périodique au titre de la Convention.

D.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Ratification du Protocole facultatif à la Convention

Le Comité salue les efforts déployés par le Gouvernement pour qu’il soit demandé à nouveau à l’Assemblée législative de ratifier le Protocole facultatif à la Convention. Il est toutefois préoccupé par les difficultés rencontrées pour ratifier cet instrument.

Le Comité recommande que l ’ État partie accélère le processus de ratification du Protocole facultatif à la Convention.

Cadre institutionnel et légal

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour adopter et réviser les lois, programmes et plans destinés à lutter contre la discrimination à l’égard des femmes et à promouvoir leurs droits. Il est toutefois préoccupé par l’insuffisance de l’harmonisation des instruments juridiques avec la Convention et le manque de coordination entre les institutions chargées de sa mise en œuvre.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ harmoniser de manière systématique sa législation interne avec la Convention et d ’ assurer la coordination interinstitutionnelle entre les branches législative, exécutive et judiciaire pour sa bonne mise en œuvre.

Accès à la justice

Le Comité note avec satisfaction la création d’une juridiction spécialisée pour les délits commis à l’encontre des femmes et des unités de prise en charge spécialisée des femmes au sein de la police. Il est toutefois préoccupé par les stéréotypes patriarcaux au sein de l’appareil judiciaire et de la force publique et les obstacles dans la mise en œuvre de la loi visant à garantir aux femmes une vie sans violence.

Conformément à sa recommandation générale no 33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ allouer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires au bon fonctionnement de la nouvelle juridiction spéciale pour les délits commis à l ’ encontre des femmes;

b) D e renforcer les capacités de la Police nationale civile, du Bureau du Procureur général et de l ’ Institut médico-légal pour que ceux-ci puissent appliquer les protocoles et suivre leur mise en œuvre;

c) D e systématiquement harmoniser toute la législation avec la loi spéciale intégrale visant à garantir aux femmes une vie sans violence et la Convention ;

d) D e surveiller l ’ application de la loi sur l ’ égalité, l ’ équité et l ’ élimination de la discrimination à l ’ égard des femmes et de sensibiliser les juges, les avocats et les agents de la force publique au cadre relatif à l ’ égalité des sexes, notamment à la signification et à la portée de la discrimination directe et indirecte.

Les femmes, la paix et la sécurité et les accords de paix

Le Comité salue la création d’un comité national pour la mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité et des résolutions ultérieures sur les femmes et la paix et la sécurité et l’arrêt de la Cour Suprême frappant d’inconstitutionnalité la loi d’amnistie de 1993. Néanmoins, il est préoccupé par le fait que les femmes qui ont subi des violations de leurs droits pendant et après le conflit armé pourraient, en dépit de ces mesures, ne pas recevoir une indemnisation et un dédommagement suffisants.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D e faire en sorte que les femmes qui ont été victimes du conflit armé bénéficient de mesures de réparation;

b) D ’ établir un calendrier précis pour l ’ élaboration du plan d ’ action national de mise en œuvre de la résolution 1325 (2000) du Conseil de sécurité sur les femmes, la paix et la sécurité, en coopération avec les organisations de femmes.

Défenseuses des droits de l’homme

Le Comité salue les efforts déployés pour protéger et soutenir toutes les défenseuses des droits de l’homme mais demeure préoccupé par le harcèlement, la discrimination, la violence et les assassinats dont sont victimes ces femmes et par l’absence de poursuites dans un grand nombre de cas.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ accélérer les enquêtes et les poursuites dans tous les cas de harcèlement, de discrimination, de violence et d ’ assassinat qui ont pour victimes des défenseuses des droits de l ’ homme, de mettre en place des voies de recours pour les victimes et de leur offrir une réparation, et d ’ établir un registre de ces incidents auprès du Bureau du Procureur général;

b) D e mieux faire connaître la contribution de ces défenseuses des droits fondamentaux à la matérialisation des droits des femmes et de prendre les mesures législatives et pratiques nécessaires pour prévenir les attaques et les menaces contre ces femmes et assurer leur protection;

c) D e renforcer la collaboration entre l ’ Institut salvadorien pour la promotion de la femme et les réseaux de défenseuses des droits de l ’ homme.

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité salue les progrès accomplis dans l’allocation de ressources humaines, techniques et financières à l’Institut salvadorien pour la promotion de la femme, la participation de l’Institut aux réunions du Gouvernement et l’élaboration d’un projet de loi visant à renforcer son rôle prépondérant dans la promotion de la femme. Il salue également le renforcement du programme Ciudad Mujer, qui est dirigé par le Secrétariat à l’intégration sociale. Néanmoins, le Comité reste préoccupé par le fait que les ressources humaines, techniques et financières allouées à l’Institut ne sont pas à la hauteur de ses responsabilités croissantes en matière de coordination et de suivi. Il prend également note de l’augmentation des besoins budgétaires pour la mise en œuvre rapide des objectifs de développement durable. En outre, le Comité est préoccupé par le fait que le mandat de l’Institut en matière de collecte de données n’a pas été pleinement rempli à ce jour, malgré le projet de création d’un système national de statistiques ventilées par sexe.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ accélérer l ’ adoption d ’ une législation renforçant le rôle prépondérant de l ’ Institut salvadorien pour la promotion de la femme;

b) D e faire appliquer la budgétisation tenant compte de la problématique hommes-femmes pour les organismes gouvernementaux;

c) D e continuer à renforcer l ’ Institut salvadorien pour la promotion de la femme en lui donnant les ressources humaines, techniques et financières nécessaires pour assurer la coordination efficace et la mise en œuvre des politiques publiques de promotion de la femme et, en particulier, pour remplir son mandat dans le domaine de la collecte de données.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité prend note de l’introduction d’un quota temporaire sur les listes électorales au sein des différents partis politiques en 2013. Néanmoins, il demeure préoccupé par l’absence de stratégie globale pour l’application de mesures temporaires spéciales visant à atteindre l’égalité des sexes dans tous les domaines visés par la Convention.

Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer à prendre des mesures concrètes, y compris des mesures temporaires spéciales, conformément à la recommandation générale No 25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, et de fixer des objectifs et des calendriers concrets pour que les femmes soient mieux représentées dans toutes les sphères de la vie publique, et accèdent notamment à des postes de responsabilité au niveau local et à des fonctions élevées du service diplomatique. Une attention particulière devrait être portée à la participation des femmes autochtones.

Stéréotypes

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour faire disparaître les comportements patriarcaux et les stéréotypes profondément ancrés. Néanmoins, il reste préoccupé par l’omniprésence de ces croyances concernant les attributions des femmes et des hommes dans la vie familiale et sociale, qui sont, d’autre part, véhiculées par les médias.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ élaborer une stratégie vaste et globale pour tous les secteurs afin d ’ éliminer les stéréotypes discriminatoires, en collaboration avec une grande diversité de parties prenantes, notamment les organisations de femmes;

b) D e prendre toutes les mesures appropriées pour sensibiliser l ’ opinion, y compris dans les médias et le secteur de la publicité, afin d ’ éliminer les stéréotypes sexistes et de représenter les femmes avec objectivité, participant activement à la vie sociale, culturelle, économique et politique.

Violence à l’égard des femmes

Le Comité se félicite de la mise en place d’un cadre législatif et normatif visant à garantir une vie sans violence à toutes les femmes et la création d’un cadre institutionnel pour sa mise en œuvre. Il est néanmoins préoccupé par ce qui suit :

a)L’insuffisance des ressources allouées à la mise en œuvre de la loi spéciale intégrale visant à garantir aux femmes une vie sans violence, en particulier au vu de la hausse des taux de féminicide et des taux élevés de violence familiale et sexuelle dont sont victimes les femmes et les adolescentes dans l’État partie;

b)Le peu d’informations sur la manière dont les affaires de violence familiale sont traitées;

c)Le faible nombre de poursuites dans les affaires de violence à l’égard des femmes et de féminicides et le nombre encore plus faible de condamnations;

d)L’application limitée du Protocole d’intervention pour les enquêtes sur les féminicides et des ordonnances de protection et le fait que la réconciliation des victimes et de leurs agresseurs est généralement privilégiée;

e)Le manque de dispositifs pour la protection, l’aide, le rétablissement et la réinsertion sociale des femmes victimes de violence sexiste;

f)Le peu de mesures prévues dans le plan national de sécurité actuel pour assurer la protection et le rétablissement des femmes et des filles qui sont victimes de la violence des bandes organisées et des membres de leurs familles, compte tenu en particulier du lien entre la violence sexiste et les activités criminelles des bandes.

Conformément à sa recommandation générale n o 19 (1992) sur la violence à l ’ égard des femmes, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ allouer des ressources humaines, techniques et financières suffisantes à la mise en œuvre des politiques et des plans d ’ action nationaux pour une vie sans violence pour les femmes et au suivi de leur mise en œuvre (voir CEDAW/C/SLV/CO/7 , par 24);

b) D e recueillir des données sur le traitement des cas de violence familiale du signalement des faits jusqu ’ au jugement final et d ’ étudier l ’ impact et l ’ efficacité des mécanismes pour traiter de tels cas;

c) D ’ accélérer l ’ élaboration de protocoles pour l ’ application de la loi spéciale intégrale visant à garantir aux femmes une vie sans violence, conformément à l ’ article 56 de la loi, en garantissant l ’ adoption d ’ une approche axée sur la victime et l ’ application du devoir de précaution;

d) D e renforcer les capacités des juges, des avocats et des agents de la force publique à appliquer strictement la loi spéciale intégrale visant à garantir aux femmes une vie sans violence et la loi sur la protection intégrale de l ’ enfance et de l ’ adolescence et leurs directives d ’ application correspondantes;

e) D e renforcer la protection, l ’ aide, le rétablissement et la réintégration sociale des femmes et des filles qui sont victimes de la violence sexiste, en particulier de celles qui sont victimes de violence familiale;

f) D e répondre aux besoins spécifiques des filles et femmes déplacées à l ’ intérieur du pays et expulsées et de leurs familles en matière de protection contre toutes les formes de violence, en particulier la violence liée aux bandes organisées.

Traite et exploitation sexuelle

Le Comité accueille avec satisfaction les dispositions relatives à la protection des femmes victimes de la traite énoncées dans la loi spéciale intégrale visant à garantir aux femmes une vie sans violence et la conclusion d’accords de coopération bilatéraux et multilatéraux sur la poursuite des trafiquants et la protection des victimes. Il note également la création d’un centre d’accueil pour les victimes de la traite. Toutefois, le Comité est alarmé par des signalements faisant état de cas d’exploitation sexuelle de jeunes femmes et de filles par des bandes organisées, qui menacent de les tuer ainsi que leurs familles. Il demeure préoccupé par l’absence de stratégie visant à protéger les femmes et les filles de la traite et de l’exploitation sexuelle et à réinsérer les victimes. Le Comité est également inquiet de l’insuffisance des efforts déployés pour surveiller et combattre la traite et l’exploitation sexuelle, l’absence d’enquêtes sur les cas de traite de femmes et de filles et le très faible nombre de poursuites et de condamnations des auteurs.

Le Comité rappelle sa précédente observation finale ( CEDAW/C/SLV/CO/7 , par. 26) et recommande à l ’ État partie :

a) D ’ élaborer une stratégie et un plan d ’ action complets en vue de prévenir et de combattre la traite et l ’ exploitation sexuelle des femmes et des filles, en accordant une attention particulière aux actions des bandes organisées;

b) D ’ inclure dans cette stratégie des programmes de prévention et de protection et des mesures de réadaptation et d ’ intégration sociale des victimes;

c) D e fournir, dans son prochain rapport périodique, des données sur la traite, l ’ exploitation et la prostitution des femmes et des filles, le nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées dans les affaires de traite et d ’ exploitation sexuelle et l ’ incidence des mesures adoptées pour lutter contre ces problèmes.

Le Comité note avec inquiétude que la législation relative à la traite est appliquée sans distinction aux femmes travaillant de manière autonome dans la prostitution, ce qui donne lieu à un traitement discriminatoire de la part des agents de la force publique. Il est également préoccupé par des signalements de cas de discrimination de la part du personnel sanitaire envers des femmes qui se livrent à la prostitution.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ interdire tout traitement discriminatoire à l ’ égard des femmes par les forces de l ’ ordre au niveau local;

b) D ’ établir un protocole pour les services de santé qui garantisse le traitement non discriminatoire de toutes les femmes et d ’ en surveiller correctement son application.

Participation à la vie politique et à la vie publique

Le Comité prend note de l’adoption du Pacte pour la défense des droits civils et politiques des femmes et des campagnes de sensibilisation aux droits des femmes. Il accueille avec satisfaction le projet de loi sur la parité, actuellement en cours de discussion à l’Assemblée législative, l’amendement à la loi sur les partis politiques, qui introduit de manière temporaire un quota de 30 % de femmes sur les listes électorales, ainsi que l’accroissement consécutif de la représentation des femmes à l’Assemblée législative, qui est de 32,1 % depuis 2015. Néanmoins, le Comité note que seulement 10,3 % des maires et 23,1 % des ministres sont des femmes.

Le Comité recommande à l ’ État partie de poursuivre ses efforts pour atteindre la parité dans toutes les institutions, y compris en développant l ’ utilisation de mesures spéciales, selon que de besoin, pour promouvoir la représentation des femmes au sein des administrations locales, du pouvoir exécutif, du Parlement et du corps diplomatique. À cet égard, une attention particulière devrait être accordée aux femmes victimes de discriminations multiples et croisées.

Éducation

Le Comité se félicite de l’amendement apporté à la loi sur la profession d’enseignant, punissant le harcèlement et les sévices sexuels. Il est néanmoins préoccupé par ce qui suit :

a)Le faible taux de fréquentation scolaire des filles et des signalements faisant état d’un taux élevé d’absentéisme en raison de grossesses d’adolescentes;

b)La formation insuffisante du personnel enseignant en matière d’éducation sexuelle complète;

c)Des signalements faisant état de recrutement forcé dans les écoles par des bandes organisées et de parents empêchant leurs filles d’aller à l’école afin de les protéger contre cette violence;

d)La persistance des écarts entre les taux d’alphabétisation des hommes et des femmes et, en particulier, des zones rurales et des zones urbaines;

e)La faible diversification des choix scolaires et professionnels pour les filles, y compris la faible disponibilité des régimes d’enseignement flexibles dans les zones rurales.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D e mettre en place un mécanisme de contrôle de la législation récente interdisant et sanctionnant les discriminations à l ’ égard des filles enceintes et le harcèlement et les sévices sexuels des filles à l ’ école. Des informations doivent être fournies aux élèves et aux parents sur le droit de demeurer à l ’ école et d ’ y retourner pendant et après la grossesse;

b) D ’ améliorer la formation du personnel enseignant en matière d ’ éducation sexuelle complète et de continuer de renforcer les interventions scolaires adaptées à l ’ âge sur la santé sexuelle et procréative et les droits des adolescents, filles et garçons, par l ’ intermédiaire du programme de préparation à la vie familiale, conformément aux précédentes observations finales du Comité ( CEDAW/C/SLV/CO/7 , par 36);

c) D e protéger les filles contre la violence et le recrutement dans des bandes organisées dans les écoles afin de les empêcher d ’ abandonner leurs études;

d) D ’ intensifier les efforts pour éliminer l ’ analphabétisme, en particulier chez les femmes et les filles des zones rurales;

e) D ’ assurer l ’ égalité d ’ accès des filles et des jeunes femmes à tous les niveaux d ’ éducation et d ’ accroître les efforts visant à diversifier leurs choix scolaires et professionnels.

Emploi

Le Comité se félicite de la création d’un mécanisme d’enregistrement des travailleurs domestiques au sein du système de sécurité sociale et d’un mécanisme de surveillance des droits du travail des femmes dans les maquiladoras. Il est néanmoins préoccupé par ce qui suit :

a)La division du travail en fonction du sexe, la faible proportion de femmes au sein de la population active, leur forte présence dans le secteur informel et l’écart de salaire entre femmes et hommes;

b)Le faible nombre de travailleurs domestiques officiellement enregistrés et pouvant de la sorte avoir droit à la sécurité sociale et le fait que l’État n’a pas ratifié la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (no 189), de l’Organisation internationale du Travail;

c)Le manque de données sur l’efficacité du mécanisme de surveillance en matière de détection des violations des droits des travailleuses dans les maquiladoras;

d)Des signalements d’employeurs demandant la preuve que les candidates ne sont ni enceintes ni séropositives à l’embauche.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) de mettre en place des mesures spécifiques visant à créer des possibilités d ’ emploi structurés pour les femmes et à surveiller efficacement l ’ application de la législation garantissant l ’ égalité de salaire pour un travail de valeur égale, conformément à la recommandation générale n o 13 (1989) sur l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale et aux précédentes observations finales du Comité ( CEDAW/C/SLV/CO/7 , par. 32);

b) de redoubler d ’ efforts pour enregistrer les travailleuses domestiques et d ’ accélérer la ratification de la Convention de 2011 sur les travailleuses et travailleurs domestiques (n o 189);

c) de renforcer et développer les inspections des lieux de travail et d ’ entreprendre des études sur les conditions de travail et le respect des droits des travailleuses dans le secteur des maquiladoras;

d) de surveiller l ’ application de la législation interdisant le dépistage du VIH et les tests de grossesse obligatoires comme condition de recrutement.

Santé

Le Comité salue l’élaboration d’un projet de loi sur la santé sexuelle et procréative en décembre 2016, le développement d’une stratégie visant à réduire le nombre de grossesses d’adolescentes, la mise en place de réseaux de services de santé complets et intégrés et les efforts visant à rendre les services de santé procréative disponibles en permanence dans la plupart des maternités. Il note que ces mesures ont permis de faire augmenter le nombre de visites prénatales et d’élargir la couverture institutionnelle, ce qui a conduit à une baisse notable de la mortalité maternelle. Tout en notant les nombreuses mesures prises pour améliorer l’accès des femmes et des filles aux services de santé procréative, y compris au programme Ciudad Mujer, le Comité demeure préoccupé par l’impact limité de ces mesures, en particulier au vu des taux élevés de fécondité et de grossesse précoce chez les adolescentes. Le Comité est également préoccupé par la stigmatisation des prostituées et des femmes vivant avec le VIH/sida qui font appel aux services de santé sexuelle et procréative.

Conformément à sa recommandation générale no 24 (1999) sur les femmes et la santé, le Comité recommande à l ’ État partie :

a) d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi sur la santé sexuelle et procréative et d ’ une stratégie visant à réduire les grossesses chez les adolescentes;

b) de renforcer les mesures visant à garantir l ’ accès des filles, des adolescentes et des femmes, y compris celles qui vivent dans les zones rurales, à des services de santé sexuelle et procréative satisfaisants, y compris des méthodes modernes de contraception et de planification familiale, tout en accordant une attention particulière à la prévention des grossesses précoces et des avortements pratiqués dans des conditions dangereuses et à une éducation appropriée sur les droits à la santé sexuelle et procréative et les comportements sexuels responsables;

c) de procéder à une évaluation complète de l ’ accès aux services de santé sexuelle et procréative et à la contraception, en rassemblant des informations sur les effets des programmes visant à limiter et prévenir les grossesses chez les adolescentes en vue de l ’ inclure dans son prochain rapport périodique;

d) de sensibiliser les réseaux des services de santé à la nécessité de lutter contre la stigmatisation des femmes qui font appel aux services de santé sexuelle et procréative, en particulier les femmes prostituées et les femmes vivant avec le VIH/sida.

Avortement

Le Comité est préoccupé par l’interdiction absolue de l’avortement, énoncée à l’article 133 du Code pénal, et par le fait que les femmes ont souvent recours à des méthodes d’avortement dangereuses qui mettent en péril leur santé et leur vie. Le Comité déplore également :

a)les poursuites à l’encontre des femmes ayant avorté, la durée des séjours en détention provisoire pour celles-ci et les sanctions pénales disproportionnées appliquées aux femmes nécessitant un avortement et à celles qui ont fait une fausse couche;

b)l’incarcération des femmes qui se sont rendues dans un hôpital parce qu’elles nécessitaient une prise en charge, signalées aux autorités par un personnel sanitaire qui craint les sanctions.

Le Comité recommande à l ’ État partie de modifier l ’ article 133 du Code pénal afin de légaliser l ’ avortement, au moins dans les cas de viol, d ’ inceste, de menace pour la vie ou la santé de la femme enceinte ou de graves malformations fœtales. Le Comité rappelle sa précédente observation finale ( CEDAW/C/SLV/CO/7 , par . 36) et recommande à l ’ État partie :

a) de mettre en place un moratoire sur l ’ application de la loi actuelle et de revoir la mise en détention des femmes pour des infractions liées à l ’ avortement, afin de s ’ assurer de leur libération et de faire respecter la présomption d ’ innocence et l ’ application régulière de la loi dans les procédures liées à l ’ avortement;

b) de veiller à ce que le principe du secret professionnel soit appliqué à l ’ ensemble du personnel sanitaire et que le principe de la confidentialité soit garanti aux patientes.

Autonomisation économique des femmes

Le Comité accueille avec satisfaction le renforcement des compétences entrepreneuriales des femmes par le biais du programme Ciudad Mujer, en particulier pour les métiers non traditionnels, et les initiatives économiques mises en place par le biais du fonds financier du Ministère de l’économie et du programme Banca Mujerde la Banque de développement d’El Salvador. Il est néanmoins préoccupé par ce qui suit :

a)La couverture limitée et le manque de fonds pour les initiatives en faveur de l’autonomie économique des femmes et des revenus durables;

b)Les femmes continuent de consacrer trois fois plus de temps que les hommes au travail domestique;

c)L’absence de structures d’accueil pour les enfants;

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ étudier la répartition des fonds versés par le biais du fonds financier du Ministère de l ’ économie et du programme Banca Mujer et de renforcer ces mécanismes en vue d ’ améliorer l ’ appui pour l ’ autonomisation économique durable des femmes;

b) D e sensibiliser les femmes et les hommes au fait qu ’ ils ont des responsabilités familiales égales, d ’ e ncourager les hommes à participer autant que les femmes à l ’ éducation des enfants et aux tâches ménagères et d ’ instaurer des horaires de travail flexibles pour les femmes et les hommes dans les secteurs public et privé;

c) D ’ offrir des structures d ’ accueil appropriées pour les enfants sur l ’ ensemble de son territoire.

Femmes des zones rurales

Le Comité salue l’élaboration d’un plan national en faveur des femmes des zones rurales et les efforts déployés pour améliorer les infrastructures de base dans les zones rurales. Il est toutefois préoccupé par les disparités entre zones urbaines et zones rurales en ce qui concerne l’accès à l’éducation, aux services de santé et à l’emploi, ce qui a des répercussions disproportionnées sur les femmes des zones rurales. Le Comité regrette également l’absence de données détaillées sur les taux d’analphabétisme, d’emploi et d’accès à la santé et le manque d’informations sur les zones rurales. Notant les efforts déployés pour garantir l’accès des associations agricoles de femmes à des prêts à taux préférentiels, le Comité est préoccupé par le fait que seulement 20 % des bénéficiaires du programme de la Banque de développement agricole soient des femmes.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ accélérer l ’ adoption d ’ un plan national global en faveur des femmes des zones rurales qui s ’ attaquerait aux problèmes structurels auxquelles celles-ci continuent d ’ être confrontées;

b) D e fournir des informations détaillées et des données statistiques sur la situation des femmes des zones rurales dans son prochain rapport périodique;

c) D ’ introduire des mesures spéciales temporaires pour permettre aux femmes d ’ être bénéficiaires de prêts à taux préférentiels afin que ces prêts contribuent de manière plus significative à l ’ autonomisation économique des femmes rurales.

Femmes lesbiennes, bisexuelles, et personnes transgenres et intersexuées

Le Comité prend note des modifications apportées au Code pénal augmentant les peines pour les crimes haineux fondés sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre, comme le prévoient les articles 129 et 155 du Code, et la mise en place d’un service téléphonique d’urgence et d’un espace dédié à la sécurité et à l’accès à la justice des femmes lesbiennes, bisexuelles et des personnes transgenres et intersexuées. Néanmoins, le Comité est inquiet du nombre croissant d’actes de harcèlement, de menaces, d’intimidation et de violence, y compris commis par des agents de la force publique. Il est également préoccupé par la forte vulnérabilité des femmes lesbiennes, bisexuelles et des personnes transgenres et intersexuées à la violence des bandes organisées et par les signalements faisant état de violence envers leurs familles, partenaires, employeurs et clients.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) de mettre en place des mécanismes pour veiller à l ’ application de la législation contre les actes de discrimination commis par des agents de la force publique, de surveiller que les crimes haineux fondés sur l ’ orientation sexuelle et l ’ identité de genre soient dûment poursuivis et punis comme il convient;

b) de redoubler d ’ efforts pour lutter contre la discrimination à l ’ égard des femmes en raison de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre, y compris pour sensibiliser le grand public, et de garantir le renforcement continu des capacités des agents de la force publique et des prestataires de soins de santé.

Femmes autochtones

Le Comité accueille avec satisfaction l’introduction en 2014 d’un amendement à la Constitution, reconnaissant l’existence des populations autochtones, et prend note de l’élaboration d’un projet de loi et d’un plan national en faveur de ces populations. Il est toutefois préoccupé par l’absence de données sur la situation des femmes autochtones.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi sur les peuples autochtones, d ’ adopter une démarche soucieuse d ’ égalité entre les sexes dans le plan national en faveur des populations autochtones et d ’ introduire la catégorie « peuples autochtones » dans le recensement prévu en 2017.

Femmes privées de liberté

Le Comité se félicite de la fourniture de services de santé aux femmes placées en détention. Il est toutefois préoccupé par les longues périodes de détention provisoire, les difficultés que les femmes rencontrent pour recevoir des conseils juridiques lorsqu’elles sont en détention et les difficultés en matière d’accès à un logement adéquat, à la santé et à des installations sanitaires.

Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D e redoubler d ’ efforts pour garantir une procédure régulière aux femmes en détention;

b) D e veiller à ce que les conditions de détention des femmes soient en conformité avec les normes internationales et les Règles des Nations Unies concernant le traitement des détenues et l ’ imposition de mesures non privatives de liberté aux délinquantes (Règles de Bangkok).

Mariage d’enfants

Le Comité est préoccupé par le fait qu’en vertu du Code de la famille, les grossesses précoces sont reconnues comme une raison de contracter un mariage avant l’âge de 18 ans, ce qui illustre le manque d’harmonisation du Code avec la loi spéciale intégrale visant à garantir aux femmes une vie sans violence. Il est également inquiet du fait que les relations conjugales et sexuelles entre enfants ou adolescents avec des hommes plus âgés sont socialement acceptées.

Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ accélérer la réforme du Code de la famille, pour supprimer les exceptions à l ’ âge minimum pour se marier qui est de 18 ans, permettant ainsi de rendre le Code conforme avec l ’ article 16 de la Convention. Il recommande également de mieux sensibiliser aux effets néfastes du mariage précoce sur la santé et l ’ éducation des filles.

Amendement au paragraphe 1 de l’article 20 de la Convention

Le Comité demande à l ’ État partie d ’ accepter, dans les meilleurs délais, l ’ amendement au paragraphe 1 de l ’ article 20 de la Convention concernant le calendrier des réunions du Comité.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité demande à l ’ État partie de tenir compte de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing dans ses initiatives visant à mettre en œuvre les dispositions de la Convention.

Transformer notre monde : le Programme de développement durable à l’horizon 2030

Le Comité appelle à la réalisation de l ’ égalité effective entre les sexes, conformément aux dispositions de la Convention, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030.

Diffusion

Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à la diffusion rapide des présentes observations finales, dans sa langue officielle, auprès des institutions publiques pertinentes de tous niveaux (national, régional, local), en particulier du Gouvernement, des ministères, du Parlement et de l ’ appareil judiciaire, afin d ’ en assurer l ’ application intégrale.

Suivi des observations finales

Le Comité demande à l ’ État partie de lui fournir, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu ’ il aura prises pour donner suite aux recommandations énoncées aux paragraphes 13, a) et b) et 17, a) et c) ci ‑ dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son dixième rapport périodique en mars 2021. En cas de retard, le rapport devra couvrir toute la période allant jusqu ’ à la date de soumission.

Le Comité demande à l ’ État partie de suivre les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des traités internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, y compris les directives relatives à un document de base commun et à des documents spécifiques aux différents instruments (voir HRI/GEN/2/ R ev.6 , chap. I).