Quarantième session

Compte rendu analytique de la 835e séance

Tenue au Siège, à New York, le mercredi 2 juillet 2008, à 15 heures

Présidente :Mme Šimonović

Sommaire

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques de la Lituanie (suite)

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports présentés par les États parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiquesde la Lituanie (suite) (CEDAW/C/LTU/3 et 4; CEDAW/C/LTU/Q/4 et Add.1)

À l’invitation de la Présidente, la délégation de la Lituanie prend place à la table du Comité.

Articles 10 à 14 (suite)

La Présidente invite les membres du Comité à reprendre leurs questions et leurs observations sur l’article 10.

M me Sims dit que, d’après les rapports de l’État partie, le principe de l’égalité est inscrit dans le cadre juridique et les femmes sont plus nombreuses que les hommes à tous les niveaux du système éducatif et pourtant les femmes n’obtiennent pas de bons emplois bien payés. La conclusion à en tirer est que le type d’éducation qu’elles reçoivent perpétue le système patriarcal. Un grand nombre des domaines où le sexe masculin prédomine, comme l’informatique, l’ingénierie, l’architecture et la construction, le transport et la protection de l’environnement, proposent des emplois mieux payés et concernent des domaines comme la sécurité alimentaire et l’environnement qui sont d’une importance vitale pour les femmes autant que pour les hommes. L’État partie a pris un bon départ en ce qui concerne l’égalité en éducation, mais il ne doit pas se satisfaire de pourcentages en inscriptions; il faut qu’il se préoccupe davantage de ce que les filles apprennent. En ce qui concerne l’éducation sexuelle, il semble que les programmes scolaires décrits dans les rapports renforcent les rôles traditionnels des deux sexes au lieu de rendre les femmes capables de se prendre en main.

M me Schopp-Schilling émet l’idée que, compte tenu des plaintes reçues par le Médiateur de l’égalité des chances concernant le fait que les auxiliaires pédagogiques donnent de la femme une image qui est fausse, il faudrait peut-être procéder à un examen plus approfondi des manuels et des auxiliaires pédagogiques. Elle pense, elle aussi, que l’éducation sexuelle dans son sens le plus large devrait être obligatoire dans les écoles.

M. Plikšnys (Lituanie), répondant à une question sur l’égalité des chances dans les sports, dit qu’en vertu du plan général pour l’éducation adopté par le Ministère de l’éducation et de la science en 2003, l’éducation physique est obligatoire dans toutes les classes, depuis la première jusqu’à la douzième année d’études. Les cours ont lieu trois fois par semaine. Les professeurs d’éducation physique sont tenus d’établir un programme individuel pour chaque élève et de parler aux parents sur la condition physique de leur enfant, sur ses préférences et ses résultats. Les sports et l’éducation physique se présentent aussi sous un aspect plus libre, qui va des clubs scolaires et autres activités non prévues dans les programmes à des programmes d’éducation libre en musique, en art, en sport et autres disciplines ouvertes aux élèves à titre facultatif. Il y a en Lituanie plus de 100 écoles de sport, qui attirent, il est vrai, davantage de garçons que de filles. Une étude a montré que les élèves mettent l’éducation physique parmi les matières les plus importantes. Pour répondre à la nécessité d’améliorer les équipements sportifs, la nouvelle stratégie des sports pour 2006-2012 prévoit d’aider les municipalités à moderniser leurs équipements sportifs et à en créer de spéciaux pour les filles.

M me Purvaneckienè (Lituanie), répondant à une question concernant les études de parité des sexes, dit que toutes les grandes universités proposent ce type de programme. Les plus en pointe sont celles de l’université de Siauliai et de l’université de Vilnius. Cette dernière propose, au niveau du premier cycle, des cours facultatif ouverts à tous les étudiants dans toutes les disciplines ainsi que des cours intégrés dans les programmes de sciences sociales. L’université de Romeris se prépare à proposer une maîtrise en budgétisation sensible aux attentes des deux sexes.

En ce qui concerne les questions posées sur la place des femmes dans le monde universitaire, l’État s’efforce de s’attaquer au problème avéré de discrimination horizontale et verticale dans les universités et dans la recherche scientifique. Venir à bout de la ségrégation verticale paraît être une affaire de temps étant donné que le nombre de femmes a régulièrement augmenté à tous les niveaux jusqu’à celui de professeur associé. Pour recevoir le titre de professeur, il faut être détenteur d’un diplôme appelé doctor habilitus , mais, comme actuellement environ 60 % des doctorants sont des femmes, celles-ci ne vont pas tarder à accéder au niveau professeur.

La ségrégation horizontale concerne la concentration de femmes dans certaines disciplines. L’université de Vilnius a réalisé une étude sur les chercheurs femmes en science et en technologie. Le Ministère de l’éducation et de la science a également fait faire une étude sur le choix des sciences et de la technologie par les filles au niveau de l’enseignement général et par les femmes au niveau universitaire. Se fondant sur ces études, le Ministère a, au cours du mois dernier, adopté une stratégie de promotion d’égalité des chances pour les femmes en science, stratégie qui s’est notamment fixé pour objectif de faire qu’il y ait 20 % de femmes aux échelons administratifs les plus élevés dans la science et la recherche et 30 % dans les postes de chercheur en science et en technologie. Des études ont montré que l’un des plus grands obstacles aux perspectives de carrière des femmes tient à l’interruption que représente le fait d’avoir à élever des enfants; c’est pourquoi la stratégie prévoit des mesures qui visent à aider les femmes à reprendre leur carrière après cette interruption. Le Ministère de la sécurité sociale et du travail a également lancé un projet sur l’élimination de la ségrégation verticale et horizontale dans deux secteurs du marché du travail; les jeunes et le monde universitaire.

M me Patten se dit heureuse de voir que le chômage des femmes a sensiblement baissé; cependant, la délégation n’a pas dit combien de celles qui sont employées travaillent à temps partiel. Il lui serait agréable de voir une évaluation de l’impact des recommandations sur les arrangements de flexibilité en matière d’emploi; il est possible que ces arrangements expliquent en partie le différentiel de salaire entre les hommes et les femmes. Une information sur les taux de chômage ventilée par âge et par niveau d’instruction serait bienvenue et cela pourrait montrer si le chômage est plus élevé parmi les femmes d’un certain âge très instruites. La gravité de la ségrégation professionnelle a de quoi préoccuper. Mme Patten aimerait savoir quelles mesures, qui pourraient comprendre des mesures spéciales temporaires, sont envisagées par la stratégie sur les femmes en science et en technologie pour accroître leur présence dans des domaines à dominante masculine. L’État partie devrait aussi fournir un complément d’information concernant l’accord conclu en 2003 avec les partenaires sociaux sur une méthode d’évaluation pour les types de travail et les descriptions de poste, plus précisément sur le point de savoir si elle a été mise à l’essai et quand elle sera appliquée. Mme Patten aimerait savoir si le moyen de recours en cas de différent en matière de salaire est de saisir le Cabinet du Médiateur de l’égalité des chances.

M me Tavares da Silva félicite l’État partie de profiter des fonds de l’Union européenne pour la réalisation de projets sur la manière de concilier travail et vie de famille étant donné qu’il est reconnu que la maternité et les obligations de famille sont le plus gros obstacle à l’avancement de carrière des femmes. Le rapport de l’État indique que les conditions se sont améliorées. Toutefois, des organisations de la société civile font savoir qu’en Lituanie le stéréotype selon lequel les femmes sont seules chargées de s’occuper des enfants ainsi que des personnes âgées et des handicapés reste très fort, que les employeurs ont un comportement négatif face aux obligations de famille, demandant par exemple aux demandeuses d’emploi si elles ont des enfants, et que les services de garde d’enfants sont en fait en baisse. De tel problèmes touchent non seulement les femmes, mais le bien- être de chacun dans la société.

M me Juršenienè (Lituanie) dit que la ségrégation professionnelle fondée sur des comportements stéréotypes concernant les rôles des femmes dans l’économie et la vie de famille demeure un grave problème en Lituanie. L’État tente d’y remédier de diverses manières dans le cadre du programme national 2005-2009 d’égalité des chances pour les femmes et les hommes, avec des programmes financés à la fois sur le budget de l’État et les fonds structurels de l’Union européenne et qui visent à en finir avec les stéréotypes quant au sexe dans le grand public, parmi les employeurs, dans les syndicats et dans les agences pour l’emploi. Plusieurs projets, par exemple, visent à inciter les organismes pour l’emploi à ne pas orienter les demandeuses d’emploi vers des domaines qui sont traditionnellement à dominante féminine.

La ségrégation professionnelle a des incidences sur l’écart de salaire entre les sexes. Dans les domaines à dominante féminine, notamment dans le travail social, les soins de santé et l’éducation, les salaires sont plus faibles qu’ils ne devraient l’être. Entre autres projets, le Conseil tripartite, qui réunit des représentants du Gouvernement, des syndicats et des employeurs, a mis au point une méthodologie permettant d’évaluer les emplois et les postes, et ces recommandations sont largement diffusées auprès des employeurs au moyen de séminaires. Si on ne peut pas forcer les employeurs à adopter la méthodologie, on procède par le dialogue social. Malgré l’existence de la loi de 1998 sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes, seul un petit nombre de plaintes pour égalité de salaire ont été portées devant le Médiateur de l’égalité des chances. La loi définit les obligations des employeurs à cet égard, mais un effort d’éducation s’impose pour leur faire prendre conscience de leurs obligations.

C’est également par le dialogue avec les partenaires sociaux que l’on procède pour concilier travail et vie de famille. La loi dispose que les hommes peuvent, comme les femmes, prendre un congé parental et le Gouvernement s’emploie à changer les mentalités, non seulement parmi les employeurs, mais aussi parmi les syndicats, étant donné que très peu de syndicats ont un conseil de femmes. Le dialogue tripartite sur les questions de parité des sexes ne réussira que si au moins deux des trois parties y sont favorables.

M. Plikšnys (Lituanie) dit que, parmi les mesures concrètes à prendre au titre de la stratégie pour les femmes en science et en technologie, figure la mise au point d’indicateurs pour évaluer l’égalité des sexes dans les programmes des établissements supérieurs, condition préalable à l’éligibilité au financement de la recherche et à celui des quotas et des salaires des chercheurs femmes. Les fonds structurels de l’Union européenne sont disponibles pour ces projets.

En ce qui concerne la stratégie d’éducation pour les zones rurales, dans le cadre d’un modèle de financement connu sous l’appellation de « panier de l’étudiant », l’État finance l’éducation rurale à un niveau deux ou trois fois supérieur par élève à ce qu’il est dans les zones urbaines. Les écoles rurales bénéficient du programme « autobus jaune » ainsi que des services des travailleurs sociaux, des psychologues et des professeurs d’éducation spéciale financés sur le budget de l’État. Des études ont montré que l’écart de taux d’achèvement des études secondaires entre zones urbaines et zones rurales est descendu de près de 7 % en 2000 à presque rien en 2007. Une étude réalisée dans le cadre du programme d’évaluation internationale des élèves a montré que les résultats des filles sont supérieurs à ceux des garçons sauf en mathématiques.

Le programme d’éducation familiale et sexuelle approuvé par le Ministre de l’éducation et de la science en 2007 est le résultat de plusieurs années de consultations entre représentants de ministères, partenaires sociaux, organisations non gouvernementales, universités et municipalités. Le programme comprend des recommandations de méthodes, des auxiliaires pédagogiques et des activités de formation pour les enseignants. Si les recommandations sur la manière d’intégrer un programme d’éducation sexuelle dans l’ensemble du programme ne sont pas obligatoires, des programmes sont mis en place pour les faire connaître.

En ce qui concerne la question de l’image que l’on donne de la femme dans les manuels scolaires, la plainte portée devant le Cabinet du Médiateur de l’égalité des chances ne concernait qu’un seul, alors que les experts du ministère en ont évalué mille au cours de l’année écoulée pour voir s’ils répondaient aux critères de tolérance quant aux deux sexes.

M me Murauskaitè (Lituanie) dit, en ce qui concerne les soins nécessités par les personnes âgées et les handicapés, que l’État accorde des subventions aux municipalités pour les aider à venir en aide aux handicapés, y compris à ceux qui sont atteints de démence. Avec l’aide de l’État, les municipalités, parfois par l’intermédiaire d’organisations non gouvernementales, administrent des centres d’accueil journalier pour les enfants gravement handicapés et pour les personnes âgées. Le nombre des bénéficiaires de ces services a augmenté, passant d’environ 18 000 en 2003 à environ 75 000 en 2007. Ce programme aide les femmes qui ont à s’occuper d’enfants handicapés ou de membres âgés de la famille à réintégrer le marché du travail.

M me Litvinavičienè (Lituanie) dit que les taux de chômage des deux sexes sont descendus à 4,3 % en 2007, contre 14 % pour les hommes et 19 % pour les femmes en 2000. Cependant, 31 % des chômeuses étaient sans travail depuis plus d’un an. Environ 10 % des femmes travaillent à temps partiel, contre 7 % environ dans le cas des hommes. L’écart des salaires entre les femmes et les hommes est plus prononcé dans le secteur public et les femmes qui travaillent dans l’hôtellerie et la restauration ainsi que dans l’enseignement et l’agriculture sont les moins bien payées.

M me Arocha Dominguez dit, se référant à l’article 12 de la Convention, que les rapports ne renseignent pas suffisamment sur la qualité des services de planning familial dans l’État partie ni sur l’accès des femmes à ces services. D’après une étude réalisée par une organisation privée, 51 % des femmes de 15 à 25 ans n’utilisent aucune forme de contraception. Toutefois, ces chiffres datent de 2003 et, comme le soulignent le Comité des droits de l’enfant, le Comité des droits de l’homme et le Comité des droits économiques, sociaux et culturels, il est essentiel d’avoir une information détaillée et actualisée concernant la situation sur le terrain. Si ces données ne sont pas actuellement disponibles, il faut que l’État partie s’efforce de les recueillir et de les inclure dans son prochain rapport.

Mme Arocha Dominguez saurait gré à la délégation de faire connaître ses vues sur les rapports entre le faible taux d’utilisation de contraceptifs en Lituanie et la prévalence d’infections transmises sexuellement, en particulier du VIH/sida. Enfin, sur la question de l’avortement, le quatrième rapport périodique montre qu’il y a eu une forte baisse dans le nombre d’avortements thérapeutiques entre 1997 et 2006. Cependant, Mme Arocha Dominguez tient d’autres sources que le Parlement est actuellement saisi d’un projet de loi conçu pour limiter les cas où l’avortement est autorisé. Elle demande ce qu’il en est de l’état de cette initiative et elle demande aussi si le dispositif national pour la promotion des femmes et/ou des organisations non gouvernementales ont pris part à des consultations concernant le projet de loi. Elle est particulièrement préoccupée par le fait que le projet de loi en question semble être directement contraire à la résolution 1607 (2008) de l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe, qui demande à tous les États membres de garantir aux femmes l’accès à un avortement sans danger et légal.

M me Hayashi dit que les réponses de l’État partie à la liste des points et questions (CEDAW/C/LTU/Q/4/Add.1) ne traitent pas assez en profondeur la question de l’utilisation des contraceptifs. Aucune analyse n’est faite des causes possibles de la faiblesse de leur taux d’utilisation et aucune description claire n’est donnée des mesures de sensibilisation adoptées. Mme Hayashi voudrait savoir si toutes les femmes de Lituanie ont accès, à des coûts abordables, aux méthodes modernes de contraception, y compris le recours à des contraceptifs d’urgence.

Le projet de loi sur la protection de la vie durant la phase prénatale a de quoi préoccuper, étant donné qu’il limite strictement les cas où l’avortement est possible. Bien que plus de 110 membres du Parlement européen aient déjà envoyé une lettre au Parlement lituanien pour l’engager à ne pas adopter le projet de loi, celui-ci est toujours en instance. Il serait intéressant de savoir ce que pense le Gouvernement de cette situation. Comme les femmes ne peuvent pas aisément se procurer des contraceptifs, Mme Hayashi craint que la limitation des possibilités d’avortement ait des conséquences désastreuses. En outre, l’adoption du projet de loi reviendrait à violer les droits sexuels et génésiques protégés par la Convention.

M me Pimentel appelle l’attention sur la recommandation générale 24 du Comité et fait valoir que l’accès aux services appropriés est essentiel à la protection de la santé sexuelle et génésique des femmes et à la prévention d’avortements risqués. Aux termes du projet de loi sur la protection de la vie durant la phase prénatale, l’avortement ne serait autorisé que dans les cas où la poursuite de la grossesse poserait un risque pour la santé de la mère ou lorsque la grossesse est le résultat d’un acte criminel. Mme Pimentel est curieuse de savoir, toutefois, pourquoi la législation envisagée ne s’étend pas aux cas de malformation du fœtus et elle demande s’il serait possible d’incorporer dans le projet de loi des dispositions relatives à cette éventualité.

Mme Pimentel est préoccupée par le concept de famille tel qu’il figure dans le cadre national de la politique de la famille, qui semble ne concerner que les couples hétérosexuels mariés et sert à renforcer le stéréotype traditionnel selon lequel la femme est faite pour avoir des enfants. Cette politique aussi conçoit le fœtus comme entité séparée de la mère, créant ainsi un obstacle à l’avortement, et échoue à dire l’importance d’une éducation sexuelle complète.

M me Dairiam aimerait recevoir un complément d’information sur les mesures prises pour assurer la fourniture de services de soins de santé génésique appropriés aux adolescents. L’État partie devrait fournir une information statistique sur les taux de grossesse et d’avortement parmi les adolescentes et indiquer comment ces phénomènes affectent l’éducation des filles.

Mme Dairiam se demande si le Gouvernement arrive à tenir la balance égale entre services de soins de santé préventifs et soins curatifs. À cet égard, elle appelle l’attention sur la recommandation générale no 24 et souligne que l’obligation de promouvoir et de protéger le droit des femmes à la santé implique plus que la fourniture de soins de santé sexuelle et génésique.

Sur la question de l’emploi, la représentante de l’État partie a indiqué que l’État ne peut rien contre la ségrégation professionnelle et l’écart de salaire dans le secteur privé. Toutefois, en vertu des dispositions de l’alinéa e) de l’article 2 de la Convention, les États parties ont pour obligation de prendre toutes les mesures appropriées pour éliminer la discrimination contre les femmes de la part de toute personne, organisation ou entreprise. Mme Dairiam saurait gré à la délégation de clarifier la position du Gouvernement sur cette question. Enfin, tout en se félicitant du fait que les femmes rurales ont accès aux services fournis par le Médiateur de l’égalité des chances, il ne serait pas moins utile de savoir combien d’entre elles ont effectivement porté plainte par téléphone ou par courriel.

M me Juršenienè (Lituanie) dit que, bien que le Médiateur de l’égalité des chances recueille des statistiques sur le nombre de plaintes déposées, ces données sont ventilées par comté plutôt que par zone urbaine ou rurale. Des efforts seront faits pour y remédier. La loi sur l’égalité des chances pour les femmes et les hommes interdit la discrimination contre les femmes sur les lieux de travail. En outre, des dispositions de planification de l’égalité des sexes ont été incorporées dans le nouveau projet de loi pour le secteur privé, projet qui a déjà été approuvé par le Conseil tripartite et dont le Parlement est saisi pour adoption.

M me Armonavičienè (Lituanie) reconnaît que le projet de loi sur la protection de la vie durant la phase prénatale est très controversé et qu’il a fait l’objet de débats à tous les niveaux. Il a été demandé au Ministère de la santé de présenter ses observations au Parlement sur le projet et le Ministère a exprimé son opposition. Étant donné l’influence considérable de l’église dans la société lituanienne, il est difficile de prédire ce que sera en fin de compte le résultat du processus législatif.

Les statistiques montrent que le taux d’avortement est en baise. Ce sont essentiellement les médecins de famille et les sages-femmes qui sont chargés de fournir les soins de santé sexuelle et génésique et, comme le réseau de centres de soins de santé primaires est assez développé, tous les citoyens ont, quel que soit leur âge ou leur sexe, accès à des services de planning familial. La faiblesse du taux d’utilisation des contraceptifs pose certes un problème et la question est sujette à controverse. Certaines femmes préfèrent recourir à des méthodes naturelles de contraception en raison de leurs croyances personnelles. Par ailleurs, les contraceptifs hormonaux, y compris les contraceptifs d’urgence, ne peuvent s’obtenir que sur ordonnance d’un gynécologue.

M me Juršenienè (Lituanie) dit que le programme national d’égalité des chances pour les femmes et pour les hommes (2005-2009) contient une série de recommandations relatives à la santé génésique et à l’utilisation de contraceptifs. Ces recommandations comprennent diverses mesures de sensibilisations financées sur le budget de l’État et conçues en particulier pour les femmes des zones rurales. Le Ministère de la santé a également lancé des campagnes de sensibilisation et d’ éducation dans les organes d’information de masse et fait paraître des informations sur les possibilités de dépistage du cancer du col de l’utérus.

M me Armonavičienè (Lituanie) dit que le taux de grossesse chez les adolescentes est demeuré constant ces dernières années grâce à une augmentation du nombre de campagnes de sensibilisation. Par ailleurs, le nouveau programme sur la santé de la famille prévoit la fourniture d’une gamme de services de soins de santé génésique, y compris de conseils, spécialement conçus pour les jeunes. Les taux d’infection par VIH/sida et autres maladies transmises sexuellement demeurent relativement bas malgré la faiblesse du taux d’utilisation de contraceptifs. Les taux d’infection par VIH/sida sont trois fois moins élevés parmi les femmes que parmi les hommes.

M me Tan, se référant aux séminaires pour femmes rurales organisés par l’association lituanienne des agricultrices dont il est fait état au paragraphe 189 du quatrième rapport périodique (CEDAW/C/LTH/4), demande ce qu’est l’impact de ces séminaires sur le niveau de vie des participantes. Il serait particulièrement intéressant de savoir combien de femmes rurales ont créé leur propre entreprise et si leur revenu s’en est trouvé accru. On aimerait recevoir quelques exemples de femmes qui ont réussi. L’État partie devrait également indiquer si le Ministère de l’agriculture s’est inspiré des leçons apprises du fait des séminaires pour mettre en place des stratégies concrètes. Une assistance technique ou des financements sont-ils disponibles aux femmes rurales chefs d’entreprise et des plans pour imprévus ont-ils été conçus pour assurer la viabilité des ces programmes en cas d’épuisement des fonds de l’Union européenne? Enfin, Mme Tan voudrait savoir combien de femmes rurales âgées ont bénéficié des mesures susmentionnées.

M me Begum est préoccupée par ce qui est dit concernant les interruptions d’alimentation des zones rurales en eau et demande quelles mesures sont prises pour remédier à ce problème. Il serait intéressant de savoir si le programme national d’égalité des chances pour les femmes et pour les hommes est appliqué d’une manière efficace dans les zones rurales et s’il a été fait une analyse de son impact dans ces zones.

L’État partie devrait indiquer ce qu’est le pourcentage des femmes employées dans les administrations locales des zones rurales ainsi que le pourcentage de celles qui y sont élues à des postes de décision. Il serait utile aussi de savoir si le taux de chômage des femmes a baissé dans les zones rurales et si les femmes rurales qui désirent créer une microentreprise ont accès à des incitations financières tels que dégrèvements fiscaux ou prêts sans intérêt. Enfin, Mme Begum demande ce qu’est la situation dans les zones rurales concernant l’existence de moyens de transport et d’équipements de soins de santé à un coût abordable, en particulier de ceux qui visent à répondre aux besoins des femmes âgées, handicapées et roms.

M me Juršenienè (Lituanie) dit que le programme national d’égalité des chances pour les femmes et les hommes prévoit un certain nombre de mesures conçues pour faciliter la participation de la femme rurale à la prise des décisions et au marché du travail. En outre, les troisième et quatrième rapports périodiques font état de diverses mesures prises par l’agence lituanienne de développement pour les petites et moyennes entreprises afin de promouvoir l’emploi des femmes dans les professions à la fois traditionnelles et non traditionnelles. En ce qui concerne les cas de réussite, Mme Jurseniene indique que le document de programme sur la pêche a été le premier document de ce type à établir un quota pour la participation des femmes à des organismes de prise des décisions dans un secteur non traditionnel.

M me Litvinavičienè (Lituanie) dit qu’en 2007 31 % des chefs d’entreprise de Lituanie étaient des femmes, contre 28 % en 2006. Les femmes montent généralement leur entreprise entre 30 et 50 ans alors que les hommes le font plus tôt. La plupart des Lituaniens montent leur affaire avec leurs propres économies; seul un faible pourcentage d’entre eux empruntent.

Articles 15 et 16

M me Halperin-Kaddari demande si une médiation est prévue ou encouragée en cas de rupture d’une relation ou d’un mariage et, si oui, si des mesures de sécurité sont prévues pour protéger les parties vulnérables durant les procédures de médiation. Elle se dit également préoccupée par le fait que le Gouvernement n’a pas prêté une attention suffisante à la violence domestique. Ce qui est dit dans le troisième rapport périodique concernant le fait que certains aspects des relations de famille sont d’une nature exceptionnellement privée (par.366) serait à revoir. Il faudrait fournir un complément d’information sur la protection des biens de la femme et sur ses droits à pension alimentaire et garde des enfants dans une union autre que le mariage traditionnel, sur la protection économique des femmes avec enfants à la suite d’un divorce et sur la situation des mères célibataires. Il serait intéressant de savoir si le Gouvernement fait faire des études en vue de réformer les dispositions législatives et réglementaires sur le mariage et autres types de partenariat. Étant donné qu’en vertu du droit lituanien l’époux responsable de la dissolution du mariage n’a aucun droit à pension alimentaire, il serait utile de connaître les motifs de la décision quant à la responsabilité de l’un ou l’autre époux.

M me Coker-Appiah demande dans quelles circonstances les tribunaux peuvent envisager de réduire l’âge du consentement au mariage. Le fait que l’époux responsable de la dissolution d’un mariage n’a aucun droit à pension pourrait forcer les femmes victimes de violence domestique à demeurer prisonnières d’un mariage et c’est pourquoi il conviendrait d’envisager de modifier cette disposition.

M me Tan demande des données supplémentaires sur le taux de divortialité durant les cinq précédentes années, tant pour les zones rurales que pour les zones urbaines. Il serait intéressant de savoir s’il y a des tribunaux spécialisés dans les affaires de famille et si les femmes qui demandent le divorce ont accès à des conseils juridiques. Mme Tan se demande si des sanctions sont prévues contre les pères qui ne payent pas la pension alimentaire et si l’État vient en aide aux mères célibataires.

M me Mikalauskaitè (Lituanie) dit que l’État ne prévoit pas de médiation pour différends familiaux. Il n’y a pas de tribunaux spécialisés dans les affaires de famille, mais il y a des juges qui le sont. En ce qui concerne la protection et l’entretien des enfants, ceux-ci jouissent de la protection de l’État quelle que soit la situation maritale de leurs parents. Depuis 2001, des dispositions autorisent les couples qui veulent divorcer à parvenir à un accord concernant la garde des enfants et la pension alimentaire. Si le père ne paye pas la pension alimentaire, la mère peut saisir les tribunaux aux fins de soutien financier jusqu’à ce que l’enfant ait 18 ans. En fonction du revenu, une consultation juridique gratuite est prévue pour ceux qui divorcent et le parent célibataire a droit également à certains avantages.

M me Juršenienè (Lituanie) dit qu’il y a trois centres de crise qui proposent une médiation dans les affaires de violence domestique. Si le nombre d’enfants nés hors mariage a augmenté, le nombre des divorces est resté stable : en 2000, il y avait eu 3,1 divorces pour 1000 habitants et, en 2006 il y en a eu 3,3.

La Présidente invite les membres du Comité à poser des questions complémentaires sur les articles dont il est débattu.

M me Pimentel se demande s’il y a un rapport entre ce qui est dit concernant la préférence des Lituaniennes pour les méthodes naturelles de contraception et le fait que les contraceptifs exigent un ordonnance d’un médecin. Elle se demande s’il serait possible de supprimer cette exigence étant donné que les femmes pauvres pourraient avoir du mal à obtenir une ordonnance.

M me Armonavičienè (Lituanie) dit que seuls les contraceptifs hormonaux exigent une ordonnance. Les autres formes de contraception sont en vente libre.

M me Coker-Appiah dit qu’il faut des éclaircissements sur les circonstances qui peuvent conduire un tribunal à réduire l’âge du consentement au mariage.

M me Milasiute (Lituanie) dit que la principale raison de l’abaissement de l’âge du consentement au mariage est la grossesse.

M me Schöpp-Schilling demande s’il est prévu un programme d’éducation sexuelle obligatoire dans les écoles et elle voudrait en savoir davantage concernant le projet de loi sur l’avortement qui a été présenté au Parlement.

M Plikšnys (Lituanie) dit que l’éducation sexuelle n’est pas enseignée comme matière séparée mais qu’elle est intégrée dans d’autres matières de la première à la douzième année d’études.

M me Murauskaitè (Lituanie) dit que certains membres du Parlement ont présenté un projet de loi tendant à interdire l’avortement, mais que le Gouvernement est tout à fait résolu à l’autoriser.

M me Shin dit que la délégation n’a pas donné de réponse satisfaisante quant à la raison pour laquelle les coups et blessures et les légères atteintes à la santé sont groupés dans une catégorie unique au tableau 2 de l’annexe du quatrième rapport périodique. Il faudrait en outre des éclaircissements quant à la raison pour laquelle les femmes victimes de violence domestique sont prêtes à continuer à vivre avec leur époux. Il est important que l’on fasse clairement savoir que la violence domestique n’est pas tolérée.

M me Sirgedienè (Lituanie) dit que des cours spéciaux ont été établis pour les auteurs de violence domestique et que des organisations non gouvernementales proposent une aide et des conseils aux femmes victimes, lesquelles se prononcent elles-mêmes sur le point de savoir s’il convient d’engager une enquête de police.

M me Milašiutè (Lituanie) dit que la violence domestique n’est couverte par aucun article particulier du code pénal : si l’acte de violence domestique est relativement mineur, ce sont les dispositions d’un article qui seraient applicables, mais si l’acte de violence est plus grave, ce sont d’autres articles qui le seraient. En ce qui concerne la question qui a été posée concernant les services de médiation et la violence domestique, dans les cas de poursuites d’ordre privé, une audience de réconciliation a lieu au tribunal pour que la victime et l’auteur de la violence puissent tenter de se réconcilier avant ou au lieu d’intenter une action en justice.

La Présidente, prenant la parole en qualité de membre du Comité, dit qu’il faut un complément d’information concernant la manière dont les victimes de violence peuvent demander une ordonnance de protection.

M me Milašiutè (Lituanie) dit qu’une ordonnance de protection peut être rendue en vertu à la fois du code civil et du code pénal; il s’agit, dans les deux cas, de protéger la personne mentionnée dans l’ordonnance.

M me Simms demande si les contraceptifs d’urgence nécessitent une ordonnance d’un médecin et si les agents de police sont formés pour traiter les cas de violences domestiques.

M me Armonavčienè (Lituanie) dit que les contraceptifs d’urgence nécessitent une ordonnance.

M me Sirgedienè (Lituanie) dit que les agents de police reçoivent une formation spéciale dans les écoles de formation de la police.

M me Halperin-Kaddari dit que des éclaircissements devraient être donnés concernant les circonstances dans lesquelles un époux est jugé responsable de la rupture d’un mariage. Dans le cas d’un divorce, il serait intéressant de savoir si les femmes ont droit uniquement aux biens acquis durant le mariage ou si elles peuvent revendiquer une part de ceux qui le sont ultérieurement.

M me Milašiuté (Lituanie) dit que le code civil prescrit ce que sont les obligations maritales, auxquelles on se reporte pour déterminer la responsabilité dans les divorces. En cas de divorce, la femme ne peut prétendre qu’à une part des biens acquis durant le mariage.

M me Murauskaitè (Lituanie) dit que la Lituanie a beaucoup progressé dans l’application de la Convention et qu’elle demeure pleinement résolue à améliorer la condition des femmes. Bonne note sera prise des observations finales du Comité en vue de mettre en place de nouvelles mesures visant à promouvoir l’égalité dans la société lituanienne.

La Présidente dit que le Comité reconnaît que des progrès ont été faits en Lituanie et qu’il y a lieu de se féliciter que le protocole facultatif ait été ratifié. Il reste toutefois quelques tâches à accomplir, et notamment celle qui consiste à incorporer la Convention et le Protocole facultatif dans la législation du pays en vue de leur donner une plus grande visibilité et d’en faire un outil pour soutenir les normes relatives aux droits des femmes. Enfin, le Comité espère que le Gouvernement tiendra compte des recommandations générales concernant la violence contre les femmes et qu’il saura prendre des mesures spéciales temporaires.

La séance est levée à 17 h 5.