Dix-neuvième session session

Compte rendu analytique de la 392e séance

Tenue au Siège, à New York, le mardi 30 juin 1998 à 15 heures

Présidente :Mme Khan

Sommaire

Examen des rapports présentés par les Etats parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Moyens d’accélérer les travaux du Comite (suite)

La séance est ouverte à 15 heures 10.

Examen des rapports présentés par les Etats parties conformément à l’article 18 de la Convention (suite)

Deuxième et troisième rapports périodiques du Panama (CEDAW/C/PAN/2-3)

À l’invitation de la Présidente, Mme Calderon (Panama) prend place à la table du Comité.

Mme Calderon (Panama), poursuivant les réponses de sa délégation aux questions des experts, dit que la population rurale a un accès limité aux prestations de sécurité sociale, notamment aux pensions. Beaucoup de rurales n’ont toujours pas la sécurité sociale.

Par contre, le projet qui vise à renforcer les réseaux agricoles et entreprenariaux pour les rurales continue à renforcer leur participation à la production et leur accès à la terre. Le programme relatif à la promotion de l’égalité des chances au Panama, qui a été lancé avec le concours de l’Union européenne, a fait entrer une prise de conscience de la problématique des sexes dans les travaux du Ministère du développement agricole et, en particulier, dans son programme de formation pour les fonctionnaires chargés de l’application des programmes agricoles. En outre, la création du Bureau de la condition de la femme au Ministère de l’éducation favorisera le processus permettant aux rurales d’acquérir des titres de propriété foncière dans le cadre d’un plan pilote d’attribution de terres aux rurales du secteur productif.

Les principales dispositions du code de la famille qui se rapportent directement à la Convention sont celles qui proclament l’égalité de droits et de devoirs des époux. D’après le code, la résidence matrimoniale peut se décider par accord mutuel. Le code prévoit aussi l’égalité de droits en ce qui concerne l’acquisition et la cession de biens et dispose que toute stipulation d’accord de mariage qui limite l’égalité de droits et de devoirs des époux est nulle et non avenue et que la contribution aux charges du ménage doit être proportionnelle aux ressources matérielles de chaque époux. Les travaux du ménage sont reconnus comme contribution. Les femmes enceintes ont droit à un traitement préférentiel en ce qui concerne les services publics et les soins médicaux et elles peuvent recevoir une aide du père avant l’accouchement et durant la période de l’allaitement au sein. On ne peut pas prendre de sanctions disciplinaires à l’égard d’élèves enceintes; il faut trouver un moyen qui leur permette de poursuivre leurs études.

En ce qui concerne le système pénitentiaire, Mme Calderon indique que, sur les 10 pénitenciers que compte le Panama, 2 sont exclusivement pour femmes. En 1996, la population carcérale comprenait 424 femmes et 5 925 hommes. De ces femmes, seules 137 avaient été reconnues coupables et les autres étaient en instance de jugement. Les détenues ont droit à des visites familiales mais non conjugales. A propos du système pénitentiaire, Mme Calderon dit que le Gouvernement envisage un programme visant à réinsérer d’anciens détenus dans la société en leur proposant une formation, des lignes de crédit et une assistance technique pour leur permettre de monter de petites entreprises. Il envisage aussi d’améliorer l’infrastructure carcérale dans l’ensemble du pays, de créer des centres de réinsertion sociale des femmes et de mettre en place des dispositifs en ce qui concerne l’éducation, les loisirs, les soins de santé,le travail et les visites de famille. Il sera pourvu également aux besoins de soins et d’éducation des enfants des détenues.

Mme Schopp-Schilling dit que le Panama réalise actuellement divers projets relatifs aux droits des femmes avec le concours d’une aide extérieure. La prochaine étape devrait être de mettre en place des dispositions législatives d’ordre général visant à faire reconnaître les droits des femmes sur la base d’institutions nationales bien dotées en personnel et en moyens financiers. Mme Schopp-Schilling ne voit pas bien la distinction qui est faite dans le rapport entre droits « justiciables » et les autres. La législation panaméenne ne tient pas pleinement compte de toutes les dispositions de la Convention en ce qui concerne la discrimination directe et la discrimination indirecte. Il faudrait que le Panama édicte une loi anti-discrimination inspirée de la Convention afin de faire en sorte que ses dispositions fassent partie intégrante de la législation interne. Il reste beaucoup plus à faire pour mieux sensibiliser les Panaméennes aux droits que leur reconnaissent la Convention et le droit interne.

Les rapports que l’on examine ne donnent pas suffisamment de statistiques sur la reconnaissance pratique des droits de la femme. Il faudrait demander au Bureau de la condition de la femme de dire quelles statistiques sont nécessaires pour évaluer les programmes et définir des politiques de nature à répondre aux besoins des femmes. La loi sur l’institution de quotas dans les partis politiques contient beaucoup de lacunes. Il faut mettre en place des mécanismes et prévoir des sanctions pour amener les partis politiques à se conformer à cette loi.

En ce qui concerne l’emploi, Mme Shopp-Schilling incite vivement le Panama à faire un gros effort pour éliminer l’inégalité de salaire pour les femmes,l’utilisation de tests de grossesse et l’institution de contrats à temps partiel pour les femmes enceintes. Il faudrait s’employer davantage à garantir aux femmes le droit à un emploi rémunéré comme celui des hommes et il faudrait porter une plus grande attention à la situation des employés de maison et des femmes indigènes. Enfin, le Panama devrait assurer aux observations finales du Comité la diffusion la plus large possible comme moyen de renforcer une prise de conscience générale de la nécessité de mettre en œuvre les droits de la femme.

Mme. Bernard demande à quoi ont abouti les efforts de sensibilisation de l’Institut de la femme qui a été créé à l’université du Panama. En ce qui concerne l’article 6, elle se demande si les prostituées peuvent aussi invoquer la loi qui pénalise les coups et blessures. Il serait intéressant de savoir si, en plus de contribuer à influer sur les valeurs morales de la société, les medias jouent aussi un rôle dans l’élimination des images stéréotypées de la femme. Notant que les femmes représentent plus de 50 pour cent des catégories de cadres et techniciens du Panama, mais seulement 25 pour cent des cadres de direction et des hauts fonctionnaires, Mme Bernard demande si le Gouvernement a défini un politique visant à assurer l’égalité de rémunération entre hommes et femmes. Les réponses à certaines de ses questions pourraient peut-être trouver place dans le quatrième rapport périodique de l’Etat partie.

Mme Shalev se dit préoccupée de voir que l’avortement n’est pas autorisé en cas de grossesse consécutives au viol et à l’inceste, surtout si l’on considère que, d’après le rapport initial, le viol a été jugé motif d’avortement. Se référant en particulier aux 25 adolescentes mentionnées dans le rapport et aux 11 femmes enceintes qui ont été victimes de violence sexuelle, elle fait remarquer que de nombreux Etats considèrent le grave dommage psychologique comme critère permettant de déroger à leur législation en matière d’avortement. Par ailleurs, elle croit comprendre que la politique du Gouvernement panaméen est une violation de la Convention contre la torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants. Elle engage l’Etat partie à revoir sa position sur l’avortement, notamment en ce qui concerne les grossesses consécutives à un viol ou abus sexuel.

Mme Estrada Castillo se félicite de l’action menée de concert par le Gouvernement et les citoyens du Panama pour créer une société plus ouverte. Elle juge toutefois alarmante la démarcation d’une zone spéciale pour les femmes indigènes, dont 53 pour cent sont illettrées et vivent dans une extrême pauvreté. Elle se demande si le Gouvernement s’efforce d’isoler ces femmes dans des espèces de réserves. Elle se demande aussi si la nouvelle loi qui pénalise la violence domestique primera le code pénal, qui ne permet pas aux femmes de traduire leur époux en justice.

Mme Ouedraogo se félicite de la participation des femmes à la définition du plan d’action pour les femmes et le développement, augmentant ainsi ses chances de succès. Elle se félicite aussi de la démarche multisectorielle du Gouvernement panaméen concernant la mise en application de divers aspects de la Convention. Elle aimerait que le quatrième rapport périodique donne des informations sur la manière dont les activités sectorielles se chevauchent et se complètent. Elle fait valoir l’importance capitale de l’éradication de la pauvreté – jugée prioritaire dans le Programme d’action de Beijing – et de l’accès des femmes à un emploi comme moyen de compenser l’impact de l’ajustement structurel sur la santé, l’éducation et autres services du secteur social. Enfin, elle encourage la diffusion la plus large possible de la Convention, y compris dans les langues autochtones.

Mme Gonzalez se félicite des progrès accomplis depuis le rapport initial de l’Etat partie, en particulier de la part prise par la société civile dans la mise en application de la Convention et des mesures de politique nationale. Elle voudrait savoir à combien de femmes s’applique la législation panaméenne en matière de maternité et combien ne bénéficient que d’une protection limitée en raison de la nature de leur travail. Elle demande aussi des informations concernant les programmes de formations et de réinsertion sociale des détenues. Elle se félicite de l’action engagée pour réprimer les violences sexuelles sur mineurs, ce qui est un problème grave dans les pays en développement, en particulier dans ceux qui ont une industrie active du tourisme. Il a été largement reconnu, notamment par le Congrès mondial contre l’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales, tenu à Stockholm en 1996, que les touristes de pays développés sont à l’origine de la demande d’exploitation sexuelle des enfants à des fins commerciales. Mme Gonzalez accueille avec satisfaction le rapport présenté par des organisations non gouvernementales panaméennes, qui vient compléter utilement le rapport de l’Etat partie.

Mme Aouij se félicite de l’adoption du Plan d’action pour les femmes et le développement, qui intègre les problèmes relatifs aux femmes dans les politiques sectorielles nationales, en particulier dans les domaines de l’éducation, de la santé, de la formation professionnelle, de la prise des décisions et de la participation à la vie politique et économique. L’intégration des préoccupations des femmes dans des programmes gouvernementaux déjà en place garantit l’existence de ressources nécessaires pour éliminer ces préoccupations.

Mme Aouij loue le programme d’information, d’éducation et de communication du Panama sur les droits de la femme et, à cet égard, ce que font les medias pour tenter de faire évoluer les mentalités. On peut en dire autant des femmes pour la part qu’elles prennent, de la conception à l’exécution, à la réalisation des programmes orientés vers un développement équilibré et durable.

Mme Aouij ne se dit pas moins préoccupée de la persistance d’inégalités dans le domaine de l’emploi, notamment en matière de salaire, de conditions de travail et de prestations de maternité. Elle félicite l’Etat partie pour l’action qu’il mène avec le concours d’organisations non-gouvernementales pour combattre la violence contre les femmes et les filles, pour la législation qu’il a adoptée à cet égard et pour sa décision de présenter un rapport national sur la violence au rapporteur spécial sur la violence contre les femmes, ses causes et ses conséquences. Il serait utile de savoir si l’établissement de ce rapport se fait uniquement à l’initiative du Gouvernement panaméen ou s’il le lui a été demandé par le rapporteur spécial. Elle voudrait aussi savoir si les préoccupations des femmes indigènes, notamment en ce qui concerne l’éducation et la santé, sont prises en considération dans le plan d’action pour les femmes et le développement.

Mme Ferrer salue la création du Bureau national de la femme comme étant une mesure des plus positives. Elle remercie les organisations non-gouvernementales panaméennes du complément d’information qu’elles ont fourni. Elle se félicite des dispositions législatives récemment adoptées, ce qui comprend le code de la famille et la loi sur l’égalité des chances, et elle souligne l’importance de sa mise en application tout en faisant savoir qu’il faut poursuivre les réformes législatives, y compris de celles qui concernent la maternité, afin d’éliminer la discrimination. L’éducation sera déterminante pour la réalisation de cet objectif de même que pour la mise en application de la nouvelle législation du travail.

Une attention spéciale doit être portée à l’amélioration de la situation socio-économique des femmes touchées par la pauvreté, qui représentent une forte proportion de la population. Mme Ferrer note, à cet égard, qu’il n’a pas été fourni d’informations supplémentaires sur un programme pour les femmes pauvres dont il est fait état dans le rapport initial. Il faut que les dispositions du Programme d’action de Beijing relatives à l’éradication de la pauvreté, à la santé, à l’éducation et à l’élimination de la violence contre les femmes soient appliquées en faveur des catégories de population les plus pauvres, et en particulier des femmes autochtones et des femmes des zones rurales, qui représentent 44 pour cent de la population.

Mme Taya note que le Gouvernement panaméen a pris d’importantes mesures pour promouvoir l’amélioration de la condition de la femme, notamment par l’établissement d’un système de quotas pour les fonctions électives. Et pourtant, d’après ce que rapportent les organisations non-gouvernementales, bien que l’on trouve davantage de femmes dans la direction des organismes autonomes et semi autonomes, leur représentation au niveau de l’exécutif a diminué. En fait, bien que le rapport dise que le nombre d’hommes et de femmes employés par l’Etat est à peu près le même, peu de femmes interviennent dans la prise des décisions. Le Panama a-t-il envisagé de prendre des mesures en vue de redresser ce déséquilibre, comme en créant un système de quota pour les hautes fonctions gouvernementales?

Mme Kim dit que le rapport indique qu’en 1995, 71 pour cent des diplômés d’université étaient des femmes. Il serait utile de savoir si un succès aussi impressionnant est lié au travail de l’Institut de la femme. A-t-on fait des études pour évaluer son impact sur l’éducation des femmes? Le Panama devrait dire quelles mesures ont éventuellement été prises pour fixer un calendrier concernant la révision de manuels scolaires qui perpétuent les traditionnelles images stéréotypées de la femme. Il est d’une importance capitale que les femmes commencent à recevoir une formation à l’exercice d’activités non-traditionnelles.

Félicitant l’Etat partie d’avoir établi un système de quota pour les femmes candidates à des fonctions électives, Mme Kim dit attendre avec intérêt les résultats des prochaines élections. Enfin, elle espère que le Gouvernement panaméen collaborera avec les organisations non-gouvernementales à l’utilisation des medias comme moyens de diffusion et de promotion de la Convention.

Mme Bustelo dit que, si le Panama a beaucoup fait pour intégrer les dispositions de la Convention dans sa législation interne et si les Panaméennes ont atteint un niveau relativement élevé d’instruction et de formation, il faudrait affiner la législation du travail pour mieux l’aligner sur les dispositions de l’article 11. Le prochain rapport devrait fournir suffisamment de données statistiques permettant de mesurer les progrès accomplis dans le domaine de l’emploi. Le Comité est particulièrement préoccupé par le manque de protection de la maternité au sens de l’article 11. Il faudrait s’efforcer d’encourager les hommes à s’investir davantage dans l’éducation des enfants; des mesures comme l’attribution d’un congé parental, bien que coûteuses, sont en fin de compte bonnes pour la société.

Mme Calderon (Panama) dit que la Convention a acquis valeur de loi au Panama en 1981, année de sa ratification. Elle reconnaît qu’il faut continuer à tout mettre en œuvre pour en faire appliquer les dispositions, notamment celles de l’article 11. Le Service national de la statistique a réuni des informations ventilées par sexe, mais leur analyse a entraîné des retards. La création de l’Institut de la femme à l’université du Panama a certes représenté un progrès notable dans la sphère académique. On lui doit les publications de Panaméennes dans le domaine des sciences, l’attribution d’importants prix internationaux à des Panaméennes et l’attribution du Prix de l’Université du Panama – la distinction universitaire la plus prestigieuse – à des femmes. Un programme d’études relatives à la condition de femme a été lancé au niveau du troisième cycle et d’importantes chaires universitaires ont été établies pour ces études.

Il n’y a pas de lois ou règles qui empêchent les prostituées de porter plainte pour acte de violence commis contre elles. Les rapports entre les pouvoirs publics et les medias sont étroits mais difficiles et il s’est révélé malaisé de s’entendre sur l’élimination des stéréotypes sexuels. Bonne note est prise des préoccupations de Mme Shalev concernant l’avortement; on s’efforcera de fournir davantage d’informations dans le prochain rapport.

Faisant la lumière sur la question de l’attribution d’une partie du territoire Panaméen à des populations autochtones, Mme Calderon indique que le Panama compte 6 ethnies et 4 districts autochtones. Le premier entre eux, pour le peuple Cuna, a été créé il y a 50 ans et il jouit d’une autonomie organisationnelle et électorale. Peu à peu se mettent en place des régions autochtones, ce qui ne veut pas dire, toutefois, que les membres de ces communautés sont obligés de demeurer à l’intérieur de ces territoires. L’Etat est certes détenteur en dernier ressort du pouvoir civil, mais il est tenu de gouverner ces régions avec la coopération des autorités autochtones choisies par les populations autochtones elles-mêmes.

Les époux peuvent en fait porter plainte l’un contre l’autre; on y reviendra plus en détail ultérieurement.

Le Gouvernement panaméen reconnaît que la lutte contre la pauvreté doit être un élément clé de l’effort pour améliorer la condition des femmes.

L’économie panaméenne est fortement liée à la présence de la zone du canal, qui draine gens et ressources vers Panama City, et qui est cause de la grave inégalité de revenu entre la zone urbaine et les régions rurales autochtones. Le Panama n’ignore nullement l’existence de ce problème et il espère que l’on finira par trouver les moyens de l’atténuer.

La délégation panaméenne apportera des précisions concernant les contractuelles que leur état prive de prestations de maternité suffisantes. Un grand nombre de femmes des villes travaillent comme temporaires dans le secteur des services et manquent de ce fait des protections nécessaires.

Le Panama n’ignore pas que l’augmentation du tourisme, qu’il s’emploie à promouvoir, suppose un risque supplémentaire d’abus sexuel d’enfants qui vient s’ajouter à celui que connaît le Panama comme pays de transit pour de nombreuses populations. Il se fait un travail intense et coordonné à la Direction d’aide à l’ enfance et dans celle de la police des jeunes pour définir des stratégies de prévention.

Mme. Calderon promet que des informations plus détaillées seront fournies en réponse à une question soulevée par Mme Aouij sur l’absence d’égalité dans le travail. Un engagement institutionnel est pris de reprendre la réforme du droit du travail, à commencer par un processus élargi de négociations pour en améliorer les chances d’adoption par l’Assemblé législative.

Mme Calderon souligne le fait que le Panama va remettre, de sa propre initiative, un rapport au Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur la violence contre les femmes : le rapport n’a pas été demandé.

Elle fait valoir par ailleurs que les femmes autochtones sont représentées dans le Conseil national de la femme (Consejo Nacional de la Mujer), où elles trouvent en permanence des services consultatifs et où elles peuvent toujours intervenir dans la prise des décisions.

Le Panama partage les préoccupations de Mme Ferrer concernant la lutte contre la pauvreté, indissolublement liée à l’élimination des inéquités et des disparités dans la structure économique du pays. Il promet à cet égard de faire un plus gros effort pour mettre en œuvre les droits de la femme.

Se référant à un point soulevé par Mme Taya, Mme Calderon dit que les femmes sont plus présentes à des postes de direction dans les instances gouvernementales autonomes ou semi-autonomes. On n’en trouve pas toutefois aux niveaux les plus élevés, ceux de ministres ou ministres adjoints. Le Gouvernement est résolu à faire adopter le projet de loi sur l’égalité des chances, lequel, une fois devenu loi, devrait permettre de mettre en place de nouvelles mesures de nature à promouvoir la présence des femmes dans les postes de décision.

En réponse à une question de Mme Kim concernant le rôle de l’Institut de la femme, Mme Calderon dit que l’Institut a beaucoup fait pour l’avancement de la femme et qu’il joue un rôle important dans le monde universitaire du Panama. En ce qui concerne la révision des manuels scolaires, il a été décidé qu’il y en aura une tous les cinq ans afin de les épurer de tout sexisme. A ce sujet aussi, des contacts continus et étroits sont maintenus avec les medias, ce qui ne veut pas dire que les relations sont faciles, mais on y travaille.

Passant à un point soulevé par Mme Bustelo, Mme Calderon réaffirme que le Panama est résolu à améliorer et à appliquer la législation en place et elle promet de fournir des informations plus précises sur le monde du travail.

En ce qui concerne la responsabilisation de l’homme, il y a deux semaines seulement le Panama organisait une semaine de la famille sur le thème : responsabilité paternelle. La raison en est que le Panama est convaincu qu’un processus préparatoire de négociation et de sensibilisation renforcera l’impact de la coercition. On n’ignore pas pour autant que l’amélioration de la responsabilité paternelle est un problème dont la solution demande la promulgation de dispositions législatives qui en définissent avec précision les paramètres.

La Présidente dit que le rapport combiné met trop l’accent sur ce que projette le Panama pour améliorer la condition de la femme comparé avec ce qu’il a fait durant les 14 années qui se sont écoulées depuis sa présentation du rapport initial. Toutefois, la représentante du Panama a expliqué cet écart en reconnaissant franchement les carences de son pays en ce qui concerne l’application des mesures administratives et législatives nécessaires, carence imputable à des mentalités ancrées dans la culture et à des faiblesses de l’appareil administratif.

Le rapport combiné ne porte pas une attention suffisante aux femmes autochtones et aux autres femmes des minorités ethniques, qui souffrent de multiples formes de discrimination. Le rapport aurait été plus riche d’avoir prévu davantage de consultations avec les nombreuses organisations non-gouvernementales de femmes autochtones dont la représentante du Panama a fait état.

Les réalisations du Panama dans le domaine de l’éducation sont remarquables. Le chiffre de 94 pour cent de femmes dotées d’un niveau d’instruction de base est à noter et peu d’autre pays peuvent se vanter d’avoir, pour leurs filles, un taux de décrochage scolaire inférieur à celui des garçons. C’est pourquoi la discrimination dont souffrent les femmes en termes de possibilités d’emploi et de salaire est, bien qu’elles soient plus instruites et que leur participation à l’économie soit élevée, préoccupante et conduit à juger nécessaire l’adoption de nouvelles mesures spéciales au sens de l’article 4 de la Convention. Il y a aussi plus à faire avant que soit atteint l’objectif de 30 pour cent de participation des femmes.

Que le Panama ait bien ou mal appliqué l’article 2 de la Convention, le rapport combiné montre que peu de Panaméennes connaissent l’existence de dispositions législatives et réglementaires pour l’avancement de la femme parce qu’il en est fait si peu de publicité.

Sur la question de la violence domestique et autre contre les femmes, la Présidente demande à la représentante du Panama de faire en sorte que le Comité reçoive le rapport destiné au Rapporteur spécial de la Commission des droits de l’homme sur la violence contre les femmes. Le prochain rapport périodique devrait fournir des données sur les violences de même que sur l’exploitation des femmes par les trafiquants de drogues et les « touristes ». Le grand nombre de femmes, en particulier de femmes autochtones, qui sont en prison témoigne de leur vulnérabilité économique.

Les statistiques de mortalité maternelle et infantile sont des indicateurs essentiels de développement et des besoins de soins de santé. Le Panama n’a pas fait ce qu’il fallait pour recueillir les données de base nécessaires pour établir de telles statistiques et il lui faut remédier à cette carence.

La séance, suspendue à 17 h 05, est reprise à 17 h 10.

Rapport du groupe de travail d’avant-session (CEDAW/C/1998/II/CRP.1)

Mme. Ouedraogo (Présidente du groupe de travail d’avant- session) appelle l’attention sur le document CEDAW/C/1998/II/CRP.1, qui contient le rapport du Groupe de travail qui s’est réuni à New York du 15 au 19 juin. Des quatre membres du Comité choisies pour y participer, seule Mme Kim (représentant l’Asie) a pu le faire. Mme Gonzalez a remplacé Mme Estrade Castillo (représentant l’Amérique latine et les Caraïbes) et elle a elle-même remplacé Mme Sinegiorgis (représentant l’Afrique). Comme l’Europe n’y était pas représentée (Mme Bustelo et sa suppléante n’ayant pas été disponibles), Mme Khan a assisté à la réunion pendant trois des quatre jours. Le Groupe de travail a été saisi de six rapports, à savoir les deuxième et troisième rapports de la Corée, du Nigeria, du Panama et de la Tanzanie ainsi que des troisième et quatrième rapports périodiques de la Nouvelle Zélande et du Pérou. Le Secrétariat a fourni des exemplaires des documents de travail de base du Comité, des rapports précédents de ces pays au Comité et des observations finales d’autres organismes créés en vertu de traités concernant ces Etat parties.

Par ailleurs, y ont participé aussi les représentants d’un certain nombre d’institutions spécialisées telles que Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme, Organisation internationale du Travail (OIT), Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), ainsi que de diverses organisations nationales et internationales. Tous les rapports montrent que les Etats parties en question ont cherché à appliquer la Convention par la promulgation de lois et l’adoption de mesures et ils décrivent les changements d’ordre social, politique et économique qui ont eu lieu dans ces pays depuis la présentation des précédents rapports. Malgré les efforts des gouvernements, les traditions et les pratiques coutumières continuent à faire obstacle à la réalisation de l’égalité des chances et l’éducation, la santé, l’emploi et la nationalité demeurent des domaines de préoccupation.

Au vu de son expérience, le Groupe de travail a recommandé au Comité de revoir le travail confié aux rapporteurs de pays et il déplore l’absence de documents de base. Malgré le grand nombre de rapports, et le petit nombre d’experts, le Groupe de travail a réussi à formuler de nombreuses questions concernant chaque rapport.

Mme Gonzalez fait valoir qu’il faut que le Groupe de travail dispose de la documentation nécessaire pour mener à bien son travail. Par ailleurs, si on ne reçoit les documents que peu de temps avant l’ouverture de la session, il n’est pas possible d’entreprendre une analyse sérieuse et approfondie des rapports dont on est saisi.

Moyens d’accélérer les travaux du Comité (suite)

Mme Cartwright, prenant la parole en qualité de conseil technique désignée pour assister à la session du Groupe de travail du protocole facultatif de la Commission de la condition de la femme, dit que le Groupe de travail s’est réuni parallèlement avec la Commission pendant une période de deux semaines en mars 1998. Des progrès notables ont certes été faits, mais le Groupe de travail n’est pas parvenu à mettre au point et à adopter un texte convenu. On prévoit que cela se fera lors de la prochaine session du Groupe en 1999. Dans sa déclaration à la Commission de la condition de la femme, la Haute Commissaire aux droits de l’homme s’est dite favorable à la préparation et à l’adoption d’un document solide et parfaitement clair.

Les questions demeurées pendantes comprennent la possibilité que pourraient avoir les groupes de présenter des communications au nom de femmes ou de groupes de femmes et celle de savoir s’il sera possible de faire des réserves sur le protocole facultatif. Le Comité a fait valoir que les groupes de femmes devraient pouvoir présenter des communications pour le compte de femmes qui ne sont pas en mesure de le faire parce qu’elles n’en ont pas les moyens financiers, qu’elles sont analphabètes ou qu’elles craignent pour leur sécurité personnelle. Dans sa suggestion No. 7, le Comité a voulu exclure le droit d’exprimer des réserves à l’égard du protocole facultatif au motif que les protections assurées aux Etats parties dans le texte font qu’il n’y a plus lieu de le faire. Une de ces protections est qu’il est exigé d’une personne ou d’un groupe qui présente une communication d’avoir épuisé les possibilités de recours interne avant que le Comité se saisisse de la question. Comme de nombreuses réserves ont été formulées sur la Convention, le Comité et les partisans de la rédaction d’un protocole facultatif ne veulent pas voir les mêmes problèmes se présenter à nouveau.

Le projet de texte considéré a été mis à jour à la lumière de l’expérience tirée de protocoles facultatifs comparables, notamment de celui qui se rapporte au Pacte international relatif aux droits civils et politiques et il anticipe le type de raisons susceptibles d’inciter les pays à formuler des réserves. C’est pourquoi il convient de souligner que le droit de formuler des réserves au protocole facultatif doit susciter une vive opposition. Ces deux points seront d’une grande importance pour les femmes qui cherchent à tirer parti de l’existence de possibilités de recours. Il a été très décevant de voir la force de l’opposition à ces importants principes, en particulier du fait que, dans certains cas, les formulations proposées par les délégations donneraient un instrument plus faible que d’autres protocoles facultatifs qui prévoient des possibilités de recours. Il est donc très important que les membres du Comité se familiarisent avec le texte du projet de protocole facultatif et soutiennent l’adoption d’un instrument qui permettrait aux femmes de revendiquer le respect des droits que leur reconnaît la Convention. Une assistance appréciable a été reçue de membres du Comité présents dans les délégations et d’un certain nombre d’Etats très favorables à l’adoption d’un instrument fort et sans équivoque. C’est grâce à cela que l’on pourra faire que le texte final soit le meilleur instrument possible et que le plus grand nombre possible d’Etats le ratifient.

Mme Bustelo se demande si d’autres protocoles facultatifs prévoient la possibilité de réserves.

Mme Connors (Chef du Groupe des droits de la femme) dit que dans le cas où un protocole facultatif ne fait que prévoir une procédure de recours, comme le premier protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, si un pays a des réserves à émettre, il lui suffit de ne pas adhérer au protocole. Quand la procédure de recours est interne à l’instrument international, le pays peut signer l’instrument mais introduire une réserve sauf, comme dans le cas de la Convention sur l’esclavage, s’il est dit explicitement que les réserves ne sont pas admises.

Mme Cartwright reconnaît que les dispositions portant interdiction des réserves n’ont rien de nouveau. La triste histoire des réserves relatives à la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, qui pourrait avoir pour effet de neutraliser complètement la Convention, a conduit les partisans du projet de protocole facultatif à vouloir en faire un instrument aussi fort que possible. L’interdiction des réserves pourrait vouloir dire qu’au début il y aurait moins d’Etats à ratifier le protocole facultatif et que leur nombre pourrait croître plus lentement, mais, une fois ratifié, il aurait une force réelle.

Mme Gonzalez indique que le projet de protocole facultatif comprend deux mécanismes : un mécanisme de recours et un mécanisme d’enquête, inutiles l’un sans l’autre. C’est pourquoi elle insiste sur le fait qu’il doit être clairement dit dans le projet de protocole facultatif que les réserves ne sont pas admises.

Il serait utile de disposer d’une étude comparée de protocoles facultatifs de même nature et de savoir à quel stade en sont les négociations sur ces protocoles facultatifs. Une coordination avec la Commission des droits de l’homme serait utile à cet égard. Il faut que les membres soient bien informés afin de savoir où intervenir.

Mme Cartwright reconnaît qu’il serait bon que les intéressés puissent disposer des documents de base dont a été saisi le Groupe de travail du protocole facultatif. Malheureusement, il n’y a pas eu de résumé des débats du fait que les réunions n’ont pas eu de caractère officiel. Mme Cartwright recommande aux membres de demander à leurs gouvernements de veiller à envoyer une forte représentation à la prochaine session du Groupe de travail du protocole facultatif, même s’ils n’ont nulle intention de le ratifier, parce qu’il est de la responsabilité des Etats de faire en sorte que le projet de protocole facultatif devienne un instrument utile.

Mme Cartwright dit qu’aux Etats que préoccupe la partie enquête du projet de protocole facultatif il peut être rappelé qu’on ne peut engager une enquête qu’avec le consentement de l’Etat en question et seulement en cas de violations graves et systématiques de la Convention. C’est pourquoi une plainte individuelle ne peut pas déclencher une enquête.

Mme Cartwright tient à faire savoir aux membres que l’on a pu se rendre compte de temps en temps au sein du Groupe de travail que quelques représentantes estiment qu’un « Comité de femmes » serait mal équipé pour se charger d’un protocole facultatif. Les membres ne devraient pas perdre cela de vue dans leurs activités de lobbying.

Mme Abaka est d’avis qu’il serait particulièrement utile de savoir quels Etats ont adopté quels instruments et protocoles facultatifs; il deviendrait alors possible de faire pression sur eux pour en obtenir le soutien au projet de protocole facultatif en leur faisant observer qu’ils ont ratifié des dispositions semblables quant aux principes et aux procédures.

Mme Connors (Chef du Groupe des droits de la femme) dit que le Secrétariat établira une liste des procédures équivalentes en indiquant quels Etats les ont ratifiées. Elle espère que l’étude comparée qui a déjà été faite pour une précédente session donnera aux membres les autres informations demandées. Elle rappelle aux membres qu’on trouvera les résultats du Groupe de travail en consultant le site Web du Comité, encore que cette possibilité n’ait pas pour intention de se substituer à un texte imprimé.

La séance est levée à 17 h 50.