Comité pour l’élimination de la discriminationà l’égard des femmes

Vingt-quatrième session

Compte rendu analytique de la 504e séance

Tenue au Siège, à New York, le lundi 29 janvier 2001, à 10 h 30

Présidente :Mme Abaka

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties en application de l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques combinés de la Mongolie

La séance est ouverte à 10 h 40.

Examen des rapports soumis par les États partiesen application de l’article 18 de la Convention (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiquescombinés de la Mongolie (CEDAW/C/MNG/3 et 4)

À l’invitation de la Présidente, M. Enkhsaikhan (Mongolie) et M me  Udval (Mongolie) prennent place à la table du Comité.

M. Enkhsaikhan (Mongolie) dit que le rapport sera présenté par Mme Natsag Udval, Vice-Ministre de la santé de Mongolie et membre de la Commission nationale pour l’égalité entre les sexes.

M me  Udval (Mongolie) rappelle que son pays a été parmi les premiers à ratifier la Convention en 1981 et que le Grand Khoural d’État, le Parlement de la Mongolie, a ratifié le paragraphe 1 de l’article 20 en 1998. En septembre 2000, son gouvernement a signé le Protocole facultatif dont la ratification est en cours d’examen au Parlement. En outre le Parlement a récemment adopté la loi sur la commission nationale des droits de l’homme dont l’application est actuellement en cours. En coordination avec le bureau du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) de la capitale, son gouvernement a également lancé un débat national pour élaborer un programme national relatif aux droits de l’homme.

Au cours des 10 années écoulées depuis la présentation de son deuxième rapport au Comité, son pays a connu des changements radicaux tant sur le plan politique, économique que social. Ils ont abouti à l’instauration de la démocratie, promu les droits de l’homme et les libertés fondamentales et libéré les énergies entrepreneuriales et créatives de la population, facilitant ainsi sa participation active aux processus économiques, sociaux et politiques. La Mongolie est désormais un pays possédant un système parlementaire pluripartite. Les récentes élections ont montré que la démocratie et le respect des droits de l’homme sont devenus un choix irréversible. Le nouveau Gouvernement cherche à poursuivre les réformes démocratiques, renforcer la bonne gouvernance en faveur de la sécurité humaine, promouvoir un développement centré sur l’être humain et lutter contre la corruption. Il est déterminé à coopérer étroitement avec des organisations non gouvernementales et d’autres représentants de la société civile dans le cadre de la mise en œuvre de ces politiques, notamment celles qui améliorent la situation des femmes.

En établissant un cadre légal à cet effet, la Mongolie est devenue partie à 30 conventions et traités internationaux relatifs aux droits de l’homme. Une nouvelle législation a été adoptée et les lois anciennes ont été révisées afin d’intégrer les questions des sexospécificités dans les politiques et programmes nationaux. Dans ce contexte elle cite le nouveau Code du travail de 1998 qui interdit la discrimination sur le lieu de travail, et le Code de la famille de 1999 qui protège l’égalité du droit des femmes à hériter, à utiliser des terres et à posséder des animaux d’élevage et d’autres biens. En partenariat avec le Fonds de développement des Nations Unies pour les femmes (UNIFEM) son gouvernement a préparé un mémorandum d’accord commun visant à autonomiser économiquement et politiquement les femmes de la Mongolie. Dans ce contexte son gouvernement a entrepris une analyse de la situation, notamment au regard de l’incidence de la transition du pays vers une économie de marché sur la situation des femmes. S’appuyant sur ces résultats, le Gouvernement développera avec UNIFEM un programme de pays spécifique.

La pierre angulaire de la protection législative des droits des femmes en Mongolie est la Constitution qui stipule que personne ne peut subir de discrimination fondée notamment sur le sexe et que chacun a le droit d’agir en tant que personne morale. Elle cite de nombreuses lois nationales qui développent cette disposition fondamentale et sont décrites plus loin dans le rapport. La politique de l’État en matière de population, définie en 1996, nécessite un concept de développement centré sur l’être humain, fondé sur les droits de l’homme et la liberté ainsi que sur le développement de la personne et de la famille.

Bien que la Constitution prévoie la participation de tous les citoyens à la conduite des affaires de l’État, soit directement soit à travers des organes représentatifs, le nombre de femmes membres du Parlement est toujours faible, aux environs de 10 %. Il y a une femme Vice-Ministre au Gouvernement mais aucune ambassadrice. Le droit des femmes à l’éducation est bien protégé et le pourcentage de femmes dans le système éducatif s’échelonne d’un peu plus de 50 % dans les écoles primaires jusqu’à plus de 60 % dans l’enseignement supérieur. Le droit des femmes à l’emploi est garanti par la Constitution et d’autres lois. Cette protection s’applique aux femmes mariées et à toutes les femmes enceintes, et de nouvelles lois ont été adoptées sur la famille, le travail, la justice pénale, les tribunaux et la Commission nationale des droits de l’homme. Les lois relatives à la protection sociale et à l’assurance sociale ont été amendées.

La question des femmes rurales figure au Programme national pour la promotion des femmes, et des initiatives ont été lancées pour introduire des nouvelles technologies de pointe dans les zones rurales afin de faciliter le travail des femmes. Les droits civils des femmes sont protégés surtout par la Constitution mais également par les lois sur la citoyenneté, la famille, l’état civil et le droit civil.

Parmi les réalisations à noter dans le processus de mise en œuvre des obligations contractées au titre de la Convention, elle cite l’établissement d’un environnement juridique adapté, la participation accrue des organisations non gouvernementales, l’assistance renforcée de la communauté internationale, le développement et la mise en œuvre de politiques en faveur de l’égalité des sexes et le fait que les femmes sont plus nombreuses et ont un niveau plus élevé que les hommes en termes d’éducation. Les insuffisances se rapportent à l’absence d’un mécanisme national spécifique pour la mise en œuvre de la Convention, à l’inégalité entre les groupes sociaux et les zones géographiques, à l’augmentation de la violence domestique contre les femmes, à leur manque de connaissance du système juridique, à l’absence de services de conseil et au recul de certains indicateurs sociaux, tels que la mortalité maternelle, l’impact des maladies sexuellement transmissibles et la participation des femmes aux prises de décisions.

Parmi les leçons retenues du processus, elle énumère la nécessité de planifier, d’orienter et d’améliorer la coordination et l’intégration, la nécessité de renforcer le rôle de chef de file du Gouvernement quant à la présentation des rapports et contribuer à renforcer la capacité nationale, et la nécessité d’amender certains textes de loi existants et d’adopter une loi spécifique sur la violence contre les femmes. À cet effet le Gouvernement cherchera à améliorer encore les mécanismes nationaux de coordination et d’intégration, renforcer la Commission nationale des droits de l’homme, établir une base intégrée de données informatives et un réseau sur la question des femmes, analyser et réviser la législation actuelle, conduire une étude exhaustive du secteur rural, améliorer et systématiser le suivi et l’évaluation et les procédures de présentation des rapports relatifs à la mise en œuvre de la Convention, et renforcer la coopération entre le Gouvernement et les organisations non gouvernementales pour améliorer l’initiation aux rudiments du droit chez les femmes et offrir des services de conseil.

M me  Açar dit que le rapport traduit le haut niveau de conscience et de perspective attesté lors de l’examen des problèmes relatifs à la manière de mettre en œuvre la Convention en Mongolie. Cependant un problème persiste dans les rapports de pays au sujet de l’article 5 de la Convention relatif à l’adoption de mesures adaptées pour modifier les comportements et éliminer les préjugés et les stéréotypes. Le problème des schémas culturels traditionnels de comportement est au cœur du problème de la discrimination à l’égard des femmes dans bien des sociétés. Alors que la Mongolie a déclaré dans son rapport que, dans un effort de promotion de la stabilité sociale, elle cherche à promouvoir le respect des traditions, elle reconnaît que certaines de ces traditions peuvent s’opposer à la mise en œuvre de la Convention, notamment de l’article 5. Elle se demande par exemple si le projet de réintroduire les anciens noms de famille ne va pas tout simplement renforcer les traditions patriarcales qui étaient autrefois discriminatoires. Elle souhaite en savoir plus sur les traditions et les politiques et si le Gouvernement a procédé à une étude pour voir comment ces traditions portent atteinte à la pleine application de la Convention. Un autre problème est le comportement fondamental d’une société à l’égard des femmes. Elle demande quelles mesures ont été prises en Mongolie pour sensibiliser la population au problème et lutter contre les traditions discriminatoires, notamment la violence contre les femmes.

La Présidente, parlant en son nom propre, et s’agissant de l’article 5 de la Convention, souligne que si le Gouvernement a le moindre doute quant à ce qui constitue la violence contre les femmes, le Comité l’a formulé dans sa recommandation générale No 19.

M me  Feng Cui dit qu’il semble y avoir un seul responsable des questions féminines au Ministère de la santé et de la protection sociale et elle se demande si ce seul fonctionnaire peut venir à bout de tout le travail. Elle s’interroge également sur le Conseil national pour les femmes, notamment sa composition, sa relation avec le Ministère de la santé et de la protection sociale, ses méthodes de travail et son rôle dans l’élaboration des politiques et des textes de loi. Dans la section du rapport relative à l’élimination de la pauvreté, le sujet des allocations vieillesse versées aux femmes ayant plus de quatre enfants est source de préoccupation. Compte tenu que les sections pertinentes de la loi sur les allocations vieillesse semblent parfois utilisées pour licencier ces femmes, elle se demande si les femmes qui espèrent faire carrière et être promues ne sont pas découragées.

M me  Ferrer Gomez dit que la transition vers une économie de marché, tout en accroissant les capacités et les opportunités économiques en général, présente toutefois un inconvénient dans différents secteurs et groupes sociaux. Malgré les nombreuses lois promulguées pour protéger les droits des citoyens de manière générale et des femmes en particulier, le chômage et la pauvreté ont augmenté durant la période de transition, notamment chez les femmes et tout particulièrement les mères de familles nombreuses dont les emplois sont moins sûrs, dont les conditions de travail sont pires que celles des hommes et qui sont confrontées à un risque accru d’être licenciées. Les réponses de la Mongolie à la liste de questions montrent les résultats de différentes études et enquêtes conduites par le Gouvernement, qui confirment l’impact négatif sur les femmes, en particulier, de la réforme économique et de l’ajustement structurel. Elle demande des statistiques plus complètes sur le pourcentage en hausse de femmes en situation de pauvreté et de pauvreté extrême, et sur l’intégration des femmes dans des programmes de lutte contre la pauvreté et la mesure dans laquelle elles en bénéficient. Compte tenu du grand nombre d’enfants que comptent beaucoup de familles, notamment les femmes en situation de pauvreté, elle est préoccupée de savoir quels efforts sont déployés pour encourager et faciliter l’usage de moyens contraceptifs, qui semble assez marginal. Il semble que les chiffres de la mortalité maternelle soient en augmentation, ce qui peut conduire à une peur de l’accouchement chez les femmes et ainsi à une hausse des avortements non sécurisés. Elle demande où en est la généralisation de l’éducation sexuelle et pourquoi des parts importantes du budget gouvernemental affectées aux questions féminines n’ont, semble-t-il, pas été dépensées. Elle note que les écarts de salaire persistent entre les rémunérations des hommes et des femmes et demande quelle solution est apportée à ce problème. Enfin elle demande ce qui est fait pour le grand nombre d’enfants des rues qui sont toujours exposés aux violences sexuelles et autres.

M me  Udval (Mongolie), répondant aux questions posées par les membres du Comité, dit qu’une étude est actuellement conduite pour identifier les traditions familiales et notamment celles qui ne sont pas en conformité avec la Convention. Aux fins de lutter contre la violence à l’égard des femmes, une organisation non gouvernementale, le Centre national contre la violence, a établi un programme qui offre un conseil psychologique aux hommes violents. En outre un projet de loi sur la lutte contre la violence dans la famille a été proposé et sera bientôt présenté au Parlement pour examen et adoption. Dans le but d’empêcher les unions consanguines, la notion de l’arbre généalogique est beaucoup utilisée dans son pays. Aucune discrimination n’est propre à cette coutume.

Le Ministère de la santé et de la protection sociale est responsable des questions féminines. À cet égard il conviendrait de renforcer la capacité nationale. En conséquence, le Conseil national pour les femmes sera bientôt restructuré en une commission nationale pour l’égalité entre les sexes qui relèvera du Premier Ministre. La loi sur les allocations n’est pas discriminatoire à l’égard des femmes; elle stipule que les hommes qui ont atteint l’âge de 60 ans et les femmes qui ont atteint l’âge de 55 ans et qui ont cotisé à l’assurance vieillesse pendant une durée d’au moins 20 ans sont en droit de percevoir une allocation vieillesse.

M. Enkhsaikhan (Mongolie) dit que si les hommes et les femmes sont en droit de percevoir une allocation vieillesse, il peut assurer que cette disposition ne sera pas utilisée comme prétexte pour contraindre des salariés à prendre leur retraite ou les licencier. Actuellement il n’y a aucun projet d’amendement à cet égard.

M me  Udval (Mongolie) reconnaît qu’à la suite des récents changements socioéconomiques, la majorité des chômeurs et des pauvres se trouve être des femmes. Quarante-quatre pour cent de toutes les femmes et 60 % de toutes les femmes mariées utilisent un moyen contraceptif ou un autre. Toutefois l’utilisation généralement peu fréquente de contraceptifs dans le pays est imputable à l’hésitation des femmes rurales à utiliser les dispositifs contraceptifs. Les IVG sont légales en Mongolie et de nombreux hôpitaux publics et privés les pratiquent, avec un taux de mortalité maternelle très bas en raison de la procédure appliquée; en outre le programme de santé génésique s’attache à réduire les complications et à améliorer la qualité de l’intervention. Il existe un programme d’éducation sexuelle et sanitaire dans les établissements scolaires primaires et secondaires ainsi qu’au niveau universitaire.

Le budget de l’État n’affecte pas suffisamment de fonds au Programme national d’action pour la promotion des femmes. Toutefois un soutien financier est apporté par des organismes des Nations Unies, y compris le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP) et le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Le Programme a des liens avec beaucoup d’autres projets nationaux, y compris des programmes d’éducation sexuelle et sanitaire. Dès lors on peut considérer que toutes les femmes en sont bénéficiaires dans une certaine mesure.

Le chiffre de 30 000 enfants des rues n’est pas correct; selon les statistiques officielles, leur nombre est d’environ 1 000. Le Gouvernement élabore actuellement une stratégie communautaire pour résoudre ce problème. Cette stratégie comprend des campagnes de vaccination, d’éducation et de prévention du VIH/sida et d’autres maladies sexuellement transmissibles; et également des bilans de santé, l’accès à des foyers, notamment en hiver. Des efforts sont également déployés pour faire revenir les enfants dans leur famille et comprendre pourquoi ils ont quitté leur domicile.

M me  Goonesekere félicite la Mongolie de la transparence de son système de gouvernance et de son intérêt à ratifier et mettre en œuvre de nombreux traités internationaux, y compris la Convention (CEDAW). Bien que le niveau élevé d’éducation des femmes soit louable, il ne leur offre malheureusement pas vraiment d’opportunités professionnelles. Au contraire, les femmes sont exclues des postes à responsabilités et à la suite des changements économiques actuels, elles sont repoussées en dehors du marché du travail, ce qui entraîne la féminisation de la pauvreté.

À cet égard, elle demande si la politique gouvernementale visant à encourager les femmes à avoir davantage d’enfants n’est pas un facteur de marginalisation. Contrairement à ce que dit le rapport, la parentalité devrait être une responsabilité partagée et le Gouvernement devrait s’employer à développer la notion de parentalité et de responsabilités familiales en tant que responsabilité sociale n’étant pas exclusivement du ressort des femmes. En bref, le Gouvernement a raison de s’intéresser aux contradictions existant entre les réalisations des femmes de Mongolie, les problèmes sociaux auxquels elles sont confrontées, compte tenu de la violence qui est exercée contre elles, et les processus économiques qui les excluent.

Elle souhaite savoir pourquoi la Constitution n’est pas invoquée pour faire respecter les normes reconnues. Elle présume qu’il n’y a aucune réponse sur le nombre d’affaires judiciaires qui ont permis aux femmes de faire respecter leurs droits en vertu des lois dites non discriminatoires parce que la Mongolie n’a pas de mécanisme d’application. En conséquence, elle préconise que lors de la révision de ses lois, la Mongolie examine la perspective d’utiliser la Constitution comme un instrument d’application.

S’agissant de l’éducation, elle note que le rapport a indiqué une augmentation des droits d’inscription à la suite de la privatisation de l’enseignement, compliquant encore plus l’accès à l’éducation pour les familles à faible revenu. Si cette situation n’est pas surveillée, elle peut empêcher beaucoup de filles d’avoir accès à l’école. Il conviendrait de remédier à l’absence de programmes gouvernementaux de sensibilisation aux sexospécificités pour la magistrature. S’agissant du mariage, elle demande si le Gouvernement envisage de reconnaître la cohabitation non maritale.

M me  Schöpp-Schilling souhaiterait davantage de renseignements sur la situation des femmes rurales, y compris les conséquences de l’accession à la propriété du bétail et de la privatisation des terres. Elle aimerait également savoir si le rapport a été soutenu par le Gouvernement. Sur la question de mécanismes nationaux en charge des questions féminines, elle dit que des informations sur le suivi des lois touchant aux questions féminines serait utiles dans tous les ministères, avec des mécanismes de contrôle pour veiller à ce que les lois n’aient pas d’effet discriminatoire direct ou indirect, ainsi que le définit l’article premier de la Convention. Alors que la coopération entre le Gouvernement et les organisations non gouvernementales est importante, elle exprime sa préoccupation du fait que le Gouvernement délègue peut-être trop de ses responsabilités à ces organisations. À cet égard elle se demande s’il existe des plans de financement des organisations non gouvernementales lorsque leurs programmes couvrent le propre mandat du Gouvernement.

Elle suggère qu’il soit davantage fait usage de l’article 4.1 de la Convention qui représente un engagement clair du Gouvernement à accroître la représentation des femmes dans les organismes gouvernementaux, et si possible introduire des quotas en matière de formation professionnelle, notamment dans des secteurs professionnels orientés sur l’avenir. Elle demande si des plans existent pour incorporer l’enseignement des droits de l’homme dans les programmes d’enseignement à distance du Gouvernement qui connaissent un grand succès, si des études ont été menées sur le microcrédit et en particulier si les femmes gagnent le minimum vital de la petite entreprise qu’elles ont pu créer.

Elle s’interroge sur les plans du Gouvernement s’agissant du segment de la population qui n’a plus accès aux soins de santé. Il serait intéressant de savoir s’il existe des allocations de sécurité sociale, telles que les allocations chômage, fixées selon les revenus perçus par les individus plutôt que selon ceux des familles.

M me  Livingstone Raday exprime sa préoccupation concernant l’apparente disparité entre l’acceptation par le Gouvernement des principes énoncés dans la Convention et le grand potentiel de promotion des femmes en Mongolie, ainsi que le prouve le niveau d’études remarquablement élevé, et la situation difficile de facto des femmes en termes politiques et économiques.

La pauvreté des femmes semble renforcée par les comportements et les stéréotypes culturels, leur situation sur le marché du travail en étant un exemple typique. Quant au principe d’un salaire égal pour un travail égal, ce qui signifie également un travail de même valeur, il est nécessaire de prendre des mesures pour contrebalancer l’a priori selon lequel les hommes seraient mieux payés parce qu’ils occupent des postes haut placés et qu’ils ont un travail physique plus difficile. Elle demande ce qui est fait pour assurer l’égalité des femmes aux postes de direction, s’il existe des données sur des femmes occupant de tels postes et s’il y a un mécanisme favorisant l’égalité professionnelle et permettant ainsi aux femmes d’évaluer leur position par rapport aux hommes pour un travail de valeur égale, et s’il existe un texte de loi qui leur accorde des recours identiques devant les tribunaux. Elle demande ce qu’on doit entendre par « études spécialisées », pourquoi on trouve très peu de femmes parmi les bénéficiaires, pourquoi les programmes éducatifs des femmes reçoivent relativement moins de fonds que ceux des hommes et s’il y a des programmes relatifs à la garde des enfants.

Il semble qu’il y ait une disposition inadaptée pour les mères qui travaillent et sont en situation de pauvreté, en partie à cause des pressions traditionnelles qui restreignent l’usage de méthodes de planification familiale, mais également en raison des lacunes de la loi qui, par exemple, ne prévoit pas d’allocations de maternité. Elle espère qu’il sera remédié rapidement à cette omission. Elle demande si le Gouvernement envisage de convertir les droits maternels en droits parentaux, avec notamment une disposition concernant le congé de garde d’enfant.

Elle exprime sa préoccupation concernant la déclaration selon laquelle beaucoup de femmes ayant fait des études supérieures préfèrent ne pas travailler, car elle laisse entendre que ce serait simplement une affaire de choix personnel, et elle demande quelles pressions peuvent expliquer que les femmes choisissent ce mode de vie. La conclusion de l’étude selon laquelle presque 30 % des femmes déclarent que leur mari ne leur permettrait pas de travailler donne à penser que dans bien des cas les femmes sont contraintes de ne pas travailler.

Dans un contexte de pauvreté et de chômage des femmes, il conviendrait de clarifier l’attitude apparemment inconsidérée du Gouvernement à l’égard du Centre « Oulen », institution privée dont l’objectif déclaré est de former des militantes pour des organisations de femmes et des femmes au foyer soucieuses d’évolution et de progrès. Les programmes de création d’emplois du Gouvernement sont louables, bien que le fait que beaucoup de femmes ne s’inscrivent pas comme demandeurs d’emploi puisse aboutir à des chiffres du chômage des femmes en deçà de la réalité. Afin d’assurer que le potentiel des femmes soit pleinement utilisé, les emplois créés devraient inclure des emplois de haut niveau habituellement occupés par des hommes.

Malgré la disposition du Code civil qui affirme pour l’essentiel la séparation des biens des époux lorsque les revenus de la famille proviennent du travail d’un seul époux, il conviendrait de se rendre compte que les problèmes rencontrés par les femmes au sein de la famille se traduisent par l’absence des femmes sur le marché du travail, les revenus beaucoup plus élevés des hommes et la division traditionnelle du travail. Cette situation désavantage à coup sûr les femmes divorcées, notamment les femmes âgées, et les met en situation de pauvreté. Notant l’augmentation du taux de divorce, elle demande s’il est envisagé de réviser les dispositions pertinentes du Code de la famille. La violence dans la famille et le viol marital peuvent également contribuer à la paupérisation, ainsi que le reconnaît le rapport.

Il faudrait avoir davantage de renseignements sur la fréquence de mise en application des procédures de poursuites existantes dans la pratique, avec des chiffres sur le nombre d’affaires et de condamnations et le type de verdict prononcé. Au vu de la nécessité de régler ces problèmes, la baisse préoccupante de la représentation des femmes aux postes à responsabilités et notamment au Parlement peut nécessiter l’introduction d’un système temporaire de quotas. Elle demande combien de femmes candidates à la députation ont été élues.

M me  Tavares da Silva dit que, compte tenu de la disparité existant entre la situation de jure et de facto des femmes, elle est satisfaite d’entendre qu’une étude a été engagée sur les pressions culturelles et traditionnelles auxquelles elles sont soumises et que les résultats seront traduits dans les politiques tournées vers l’avenir. Elle s’interroge sur le sous-entendu selon lequel la non-participation des femmes à la vie politique est due à leur propre absence d’initiative, et se demande si cet état de fait ne serait pas imputable aux conditions dans lesquelles vivent les femmes et aux mythes culturels dominants concernant les rôles et les capacités des hommes et des femmes. Quoi qu’il en soit il conviendrait de prendre des mesures plus efficaces pour encourager la participation des femmes.

Elle espère que les mesures proposées pour engager des poursuites contre les agresseurs amélioreront la situation de la violence contre les femmes. Faisant observer qu’il s’agit d’une question cruciale en termes de droits de l’homme, elle se demande si l’insertion de la section pertinente dans le rapport sous le chapitre « Questions diverses » ne reflète pas le stéréotype selon lequel la violence contre les femmes serait une question secondaire.

Il convient de noter que certaines mesures ou dispositions adoptées avec les meilleures intentions peuvent avoir des conséquences néfastes lorsqu’on considère le nombre de femmes mères d’une nombreuse progéniture qui ont glissé vers la pauvreté, et les conséquences éventuelles, pour les femmes qui travaillent, des dispositions relatives aux femmes enceintes. S’agissant de la référence aux mères en tant que groupe vulnérable dans la réponse à une question posée, elle demande si toutes les mères, ou simplement quelques-unes sont considérées comme telles et si elles sont jugées vulnérables parce qu’elles sont seules à assumer la responsabilité des tâches domestiques. Le fait que les femmes passent beaucoup plus de temps que les hommes aux tâches domestiques est injuste envers les hommes, car cela signifie qu’ils ne peuvent pas exercer pleinement leurs droits domestiques et parentaux et que cela pérennise les rôles stéréotypés. Ces rôles peuvent être renforcés par l’élaboration de certaines dispositions ou politiques. Elle cite par exemple la déclaration figurant dans les réponses selon laquelle l’État entend poursuivre la politique de renforcement du rôle de chef de famille en développant et en promouvant la famille. En conclusion, malgré les difficultés rencontrées par la Mongolie, elle exprime l’espoir que le prochain rapport rendra compte des efforts du Gouvernement pour traduire dans la réalité les politiques élaborées dans le domaine de l’égalité des sexes en impliquant tous les services gouvernementaux concernés et en suivant leurs actions.

M me  Udval (Mongolie), répondant aux questions posées par Mme Goonesekere, dit que son gouvernement reconnaît que les femmes ont été particulièrement frappées par les changements économiques et sociaux de la dernière décennie et que leur présence sur le marché du travail ne traduit pas leurs capacités et leur niveau d’éducation élevé. Concernant l’argument selon lequel les femmes sont économiquement marginalisées parce qu’elles supportent une part disproportionnée de la responsabilité de la garde des enfants et des tâches domestiques, elle explique qu’il existe une disparité entre le Code de la famille de la Mongolie, qui stipule que les deux époux ont les mêmes obligations au regard de l’éducation des enfants et de l’entretien et du soutien des membres de la famille, et la situation de facto. Les juges suivent actuellement une formation de sensibilisation à l’égalité entre les sexes en vue d’améliorer la mise en œuvre de la législation interdisant la discrimination à l’égard des femmes sur le marché du travail et partout ailleurs.

Selon une étude réalisée sur les emplois du temps et conduite par l’Institut national des statistiques, la charge des femmes rurales s’est accrue avec la privatisation. Elles sont responsables non seulement de la garde des enfants et des tâches ménagères, mais également elles doivent s’occuper des animaux d’élevage. En raison du coût élevé du pétrole et du transport, elles ont un accès limité aux soins de santé, et des entreprises privées ont déjà comblé le vide laissé par la suppression de nombreux services publics dans les zones rurales. Les femmes rurales sont parmi les bénéficiaires du programme d’enseignement à distance de son gouvernement, qui aura bientôt une composante sur les droits de l’homme. Une étude doit être conduite pour évaluer les résultats des projets de microcrédit dont a parlé Mme Schöpp-Schilling. Le cinquième rapport périodique de la Mongolie contiendra des renseignements sur ces projets ainsi que davantage de données issues de l’enquête sur les emplois du temps et sur la situation des femmes rurales de manière générale.

Le rapport présenté au Comité a été préparé par un groupe de travail sous la présidence du Vice-Ministre de la protection sociale et du travail et avec la participation de représentants d’autres ministères. La version finale du rapport a été diffusée dans tous les ministères et à tous les membres du Cabinet. S’agissant de l’intégration d’une démarche soucieuse de l’égalité entre les sexes, elle dit que l’élaboration de la politique sociale et la mise en œuvre des programmes sont supervisées par un groupe de suivi et d’évaluation dans chaque ministère.

Son gouvernement est engagé dans une coopération fructueuse avec plus de 1 500 organisations non gouvernementales de Mongolie. Un certain nombre de missions leur sont déléguées, notamment dans les domaines de la santé et de la protection sociale. Les organisations non gouvernementales ont montré qu’elles sont extrêmement efficaces dans la mise en œuvre des programmes visant des groupes cibles spécifiques, y compris les initiatives de prévention du VIH/sida. Quelques représentants des 40 organisations non gouvernementales de femmes sont membres du Conseil national pour les femmes. Toutes les organisations non gouvernementales sont autofinancées.

Son gouvernement s’est engagé dans son manifeste à régler le problème de l’accès aux services de santé des personnes non assurées. S’agissant de l’assurance sociale, il n’existe aucune disparité entre les montants des allocations chômage versées aux hommes et aux femmes.

En réponse aux questions posées par Mme Livingstone Raday, elle dit que l’objet des études spécialisées, mises en place par le Gouvernement, est de permettre à des professionnels hautement qualifiés d’accroître leur expertise dans une discipline particulière. En raison de la disponibilité limitée des ressources, peu de professionnels, hommes ou femmes, suivent cette formation.

Le nombre réel de femmes sans emploi est peut-être plus élevé que les chiffres officiels parce que certaines femmes ne se déclarent pas sans emploi. Les programmes de création d’emplois mis en œuvre par son gouvernement visent à créer des emplois pour les ouvriers non qualifiés ou semi-qualifiés; il faut que des initiatives gouvernementales apportent une solution au chômage des femmes instruites. Elle convient que le marché du travail ne met pas pleinement à profit le haut niveau d’éducation des femmes. Parallèlement, les femmes elles-mêmes choisissent de ne pas occuper des emplois salariés en raison du bas niveau des salaires, notamment dans le secteur public, choisissant à la place de créer des petites entreprises. Un petit nombre de femmes ne travaille pas à cause de la pression exercée par les maris. Les deux parents peuvent choisir de prendre l’un ou l’autre le congé de garde d’enfant.

Le Centre Oulen est une institution privée qui est la seule du pays à proposer des cours de gestion ménagère, de travail social et d’administration des entreprises. Il faut espérer qu’à l’avenir des institutions d’État offriront des cours de cette nature.

Répondant aux questions soulevées par Mme Tavares da Silva, elle convient que le rapport manque de données dans un certain nombre de domaines. Il est difficile de justifier le faible niveau de participation des femmes à la vie politique. Le nombre de femmes élues au Parlement est resté stable tout au long de la décennie écoulée malgré les efforts d’organisations non gouvernementales auprès des directions des principaux partis politiques. Il est manifeste que son gouvernement doit adopter une démarche plus active pour régler ce problème. Une recherche est actuellement en cours sur l’incidence de l’image traditionnelle des femmes et sur leur rôle dans la société; les résultats seront traduits dans le cinquième rapport périodique de la Mongolie. La politique de renforcement du rôle de chef de famille ne doit pas être considérée comme un renforcement des stéréotypes parce qu’en Mongolie on ne présuppose pas que le chef de famille est un homme.

Le texte de loi sur la violence dans la famille est en cours d’élaboration et, après son adoption, son gouvernement élaborera une politique sur ce sujet. Le Centre national contre la violence a récemment conduit une étude sur les victimes de la violence dans la famille mais l’échantillon était insuffisant pour le considérer représentatif du pays dans son ensemble. Les statistiques de la police ne sont pas fiables car beaucoup de femmes ne déclarent pas les violences subies, peut-être à cause du manque de connaissance de leurs droits.

La séance est levée à 13 heures.