Nations Unies

CRPD/C/BGD/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

11 octobre 2022

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initial du Bangladesh *

I.Introduction

1.Le Comité a examiné le rapport initial du Bangladesh à ses 600e et 601e séances, les 25 et 26 août 2022. Il a adopté les observations finales ci-après à sa 617e séance, le 7 septembre 2022.

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial du Bangladesh, qui a été rédigé conformément aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports, et remercie l’État partie des réponses écrites apportées à la liste des points.

3.Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie, qui était composée de représentants des ministères concernés.

II.Aspects positifs

4.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures que l’État partie a prises pour appliquer la Convention depuis qu’il l’a ratifiée en 2007.

5.Le Comité prend note que l’État partie accueille temporairement plus de 1,1 million de réfugiés rohingya et qu’il y a parmi eux un grand nombre de personnes handicapées.

6.Le Comité accueille avec satisfaction les mesures législatives et les mesures de politique générale qui ont été prises afin de promouvoir les droits des personnes handicapées, en particulier :

a)L’adoption de la loi sur les droits et la protection des personnes handicapées, en 2013, et des règles sur les droits et la protection des personnes handicapées, en 2015 ;

b)La traduction de la Convention en bengali, la langue officielle du Bangladesh, et l’élaboration d’une version de la Convention adaptée aux enfants ;

c)L’adoption de la loi sur le Fonds de protection contre les troubles du développement neurologique, en 2013, du plan d’action stratégique relatif aux troubles du développement neurologique pour 2016-2030, et la création du Centre de ressources sur l’autisme, en 2010 ;

d)L’élaboration, en 2011, d’une politique sanitaire nationale, dans laquelle les problèmes de santé des personnes handicapées sont reconnus et traités ;

e)L’adoption du quatrième programme du secteur de la santé, de la population et de la nutrition, qui couvre la période 2017-2022, et selon lequel il est nécessaire de rendre les infrastructures accessibles et de développer les ressources humaines pour lever les obstacles comportementaux que les personnes âgées et les personnes handicapées rencontrent dans le secteur de la santé ;

f)L’adoption d’un plan d’action à long terme pour 2018-2025, qui vise à combler les lacunes et à résoudre les problèmes mis en évidence dans le plan d’action actuel.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1er à 4)

7.Le Comité constate avec préoccupation que la loi de 2013 sur les droits et la protection des personnes handicapées n’accorde pas une protection suffisante aux personnes handicapées, en particulier aux femmes et filles handicapées, aux personnes ayant un handicap psychosocial et/ou intellectuel et aux personnes touchées par la lèpre, et que la définition du handicap en usage dans l’État partie ne respecte pas pleinement au modèle de handicap fondé sur les droits de l’homme.

8. Le Comité recommande à l’État partie de revoir la loi de 2013 sur les droits et la protection des personnes handicapées et d’harmoniser effectivement les lois, les politiques, les stratégies et les plans d’action avec la Convention, notamment en prévoyant des dispositions pour les femmes handicapées.

9.Le Comité constate avec préoccupation qu’il n’y a pas de mécanismes de consultation et de participation concrets et efficaces qui permettent que les vues, les opinions et les préoccupations des personnes handicapées, notamment des femmes handicapées, des enfants handicapés, des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial et des personnes touchées par la lèpre, soient dûment prises en considération à toutes les étapes des processus décisionnels des pouvoirs publics, à tous les niveaux, y compris dans les zones rurales.

10. Compte tenu de son observation générale n o  7 (2018) sur la participation des personnes handicapées, y compris des enfants handicapés, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, à la mise en œuvre de la Convention et au suivi de son application, le Comité recommande à l’État partie de se doter de mécanismes officiels grâce auxquels toutes les personnes handicapées, y compris les femmes handicapées et les enfants handicapés, pourront être véritablement consultées au sujet de la mise en œuvre de la Convention et du suivi de son application, et y participer effectivement par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, et lui recommande notamment de remédier au manque de financement desdites organisations.

B.Droits particuliers (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

11.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que la Constitution et les lois de l’État partie ne prévoient pas de mesures législatives ni de dispositions de politique générale qui, en accord avec la Convention, interdisent expressément la discrimination fondée sur le handicap, en particulier à l’égard des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, et la discrimination multiple et intersectionnelle ;

b)Que peu de mesures ont été prises pour abroger toutes les lois et politiques ayant un caractère discriminatoire, en particulier la politique de mise en œuvre des programmes d’amélioration du niveau de vie pour la communauté védique et les populations défavorisées, adoptée en 2013, et l’article 21 de la loi de 2018 sur la santé mentale, relatif à la mise sous tutelle des personnes ayant des problèmes de santé mentale ;

c)Que le projet de loi sur la lutte contre la discrimination, en vertu duquel le refus d’aménagement raisonnable serait considéré comme une forme de discrimination fondée sur le handicap, tarde à être adopté.

12. Compte tenu de son observation générale n o  6 (2018) sur l’égalité et la non ‑discrimination, et rappelant les cibles 10.2 et 10.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De revoir et de modifier la Constitution et la loi de 2013 sur les droits et la protection des personnes handicapées afin que la discrimination fondée sur le handicap, y compris les formes multiples et intersectionnelles de discrimination fondées sur le genre, l’âge, l’origine ethnique, la religion, la caste, la profession, la nature et le type de handicap, soit interdite, conformément à la Convention  ;

b) D’abroger toutes les lois et politiques qui sont discriminatoires à l’égard des personnes handicapées, y compris des personnes touchées par la lèpre et des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial  ;

c) D’adopter sans délai le projet de loi de 2015 sur la lutte contre la discrimination en faisant en sorte qu’il interdise la discrimination fondée sur le handicap dans tous les domaines, prévoie une protection efficace contre la discrimination fondée sur le handicap, y compris la discrimination multiple et intersectionnelle, et définisse le refus d’aménagement raisonnable comme une forme de discrimination fondée sur le handicap.

Femmes handicapées (art. 6)

13.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que les femmes et filles handicapées continuent de faire l’objet d’une discrimination multiple et intersectionnelle, fondée sur le sexe et l’âge et/ou l’appartenance à une communauté ethnique, linguistique ou religieuse ;

b)Que la loi de 2013 sur les droits et la protection des personnes handicapées et la politique nationale de 2011 de promotion des femmes n’ont pas été revues afin que les droits des femmes et filles handicapées appartenant à des groupes marginalisés et/ou minoritaires soient pris en considération et que la protection de ces droits donne lieu à l’élaboration de programmes inclusifs ;

c)Que les lois et politiques n’ont pas été modifiées de façon à prendre systématiquement en considération les droits des femmes et filles handicapées, par exemple en mettant fin aux coutumes familiales et sociales qui sont discriminatoires à l’égard des femmes handicapées, en particulier des femmes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial et des femmes touchées par la lèpre ;

d)Que de sérieux obstacles empêchent les organisations qui représentent les femmes handicapées de participer pleinement et effectivement à la prise de décisions dans tous les domaines.

14. Compte tenu de son observation générale n o 3 (2016) sur les femmes et les filles handicapées, et rappelant l’objectif de développement durable n o 5, le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’adopter et d’appliquer les mesures qui s’imposent pour lutter contre les formes multiples et intersectionnelles de discrimination à l’égard des femmes et filles handicapées, en particulier des femmes handicapées appartenant à des minorités religieuses ou ethniques, des femmes touchées par la lèpre, des femmes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial et des réfugiées handicapées, et de recueillir des données ventilées par sexe, âge, origine ethnique, religion et appartenance à une communauté linguistique  ;

b) De modifier la loi de 2013 sur les droits et la protection des personnes handicapées afin qu’elle tienne compte des droits des femmes handicapées appartenant à des groupes marginalisés, et la politique de 2011 sur la promotion des femmes afin qu’elle tienne compte des droits des femmes handicapées appartenant à des minorités et d’élaborer des programmes inclusifs de protection de ces droits  ;

c) De modifier toutes les lois et politiques afin qu’elles prennent systématiquement en considération les droits des femmes et filles handicapées, par exemple en mettant fin aux coutumes familiales et sociales qui sont discriminatoires à l’égard des femmes handicapées, en particulier des femmes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial et des femmes touchées par la lèpre  ;

d) De lever tous les obstacles à la participation pleine et effective des organisations qui représentent les femmes handicapées à la prise de décisions, notamment en consacrant des ressources suffisantes à cette participation.

Enfants handicapés (art. 7)

15.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que les lois et politiques sur la protection des enfants handicapés, en particulier la politique nationale de 2011 sur l’enfance et la loi de 2013 (modifiée en 2018) sur l’enfance, ne sont pas suffisamment connues ;

b)Que les enfants handicapés font généralement l’objet d’une stigmatisation, d’une discrimination, d’attitudes négatives, de pratiques préjudiciables et de stéréotypes, qui peuvent entraver leur accès aux soins de santé, à l’éducation et à d’autres services, et que des châtiments corporels sont exercés sur les enfants, en particulier sur les enfants handicapés, y compris ceux qui sont réfugiés.

16. Rappelant sa déclaration conjointe avec le Comité des droits de l’enfant sur les droits des enfants handicapés (2022), le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’élaborer une stratégie nationale de promotion et de protection des droits des enfants handicapés et de lui affecter des crédits budgétaires et des moyens humains, techniques et financiers suffisants  ;

b) D’adopter et d’appliquer des mesures pour lutter contre la stigmatisation, la discrimination, les attitudes négatives, les pratiques préjudiciables et les stéréotypes visant les enfants handicapés, de faire en sorte que ceux-ci aient accès aux soins de santé, à l’éducation et à d’autres services sans discrimination et dans des conditions d’égalité avec les autres enfants, et d’interdire toute forme de châtiment corporel sur les enfants, en particulier sur les enfants handicapés.

Sensibilisation (art. 8)

17.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Qu’il n’y a guère de campagnes et d’initiatives sur les questions de handicap qui visent à sensibiliser le grand public et les agents de la fonction publique aux préjugés, aux stéréotypes, aux désignations dépréciatives, à la stigmatisation et à la discrimination que continuent de subir les personnes handicapées, en particulier les femmes et filles handicapées, les personnes touchées par la lèpre et les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, et que peu d’informations concernant ces campagnes et initiatives sont disponibles sous des formes accessibles à l’ensemble des personnes handicapées, notamment dans les zones rurales et reculées ;

b)Que les personnes handicapées participent peu, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, aux programmes et campagnes de sensibilisation et que les lois et politiques devant décourager la représentation négative et ridicule des personnes handicapées, en particulier des personnes touchées par la lèpre, dans les médias ne sont pas appliquées efficacement.

18. Le Comité recommande à l’État partie d’agir, en concertation avec les organisations qui représentent les personnes handicapées, afin  :

a) D’adopter une stratégie nationale de sensibilisation du grand public et des agents de la fonction publique aux questions de handicap afin de lutter contre les préjugés, les stéréotypes, les désignations dépréciatives et les actes de stigmatisation et de discrimination visant les personnes handicapées, notamment les personnes touchées par la lèpre, les femmes et filles handicapées et les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, et d’intensifier les campagnes et initiatives relevant de cette stratégie, en particulier dans les zones rurales et reculées  ;

b) De définir et de mettre en œuvre des programmes de sensibilisation aux préjugés, aux stéréotypes et aux actes de stigmatisation et de discrimination visant les personnes handicapées, y compris les préjugés, les stéréotypes et les actes de stigmatisation et de discrimination qui découlent de superstitions, de croyances ou de coutumes  ; de faire plus pour promouvoir et protéger les droits des personnes handicapées, par exemple en utilisant la terminologie des droits de l’homme, en faisant appel aux médias et en mobilisant tous les fonctionnaires nécessaires.

Accessibilité (art. 9)

19.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Qu’aucune stratégie précise n’a été définie en vue de l’application des lignes directrices pour l’accessibilité des bâtiments publics, de l’environnement physique, des technologies et systèmes d’information et de communication, des sites Web publics et privés et des autres équipements et services ouverts au public, et qu’il n’existe pas de lignes directrices applicables au secteur des transports, notamment dans les zones rurales, et surtout à l’intention des réfugiés ;

b)Que les organisations qui représentent les personnes handicapées ne participent pas à la conception, à la mise en œuvre et au suivi de l’application des normes d’accessibilité de l’environnement bâti, des transports, des technologies et systèmes d’information et de communication, et des autres équipements et services ouverts au public.

20. Compte tenu de son observation générale n o 2 (2014) sur l ‘accessibilité et des objectifs de développement durable n os  9 et 11, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De définir et de mettre en œuvre une stratégie nationale d’accessibilité afin de faciliter l’accès des personnes handicapées, y compris des personnes handicapées réfugiées, à l’environnement physique, aux transports, aux technologies et systèmes d’information et de communication et aux autres équipements et services ouverts au public, à la fois dans les zones urbaines et dans les zones rurales  ;

b) De garantir l’application effective des politiques et dispositions existantes, en particulier de la loi de 2013 sur les droits des personnes handicapées, et d’élaborer, en concertation avec les organisations qui représentent les personnes handicapées et avec leur participation pleine et effective, un mécanisme de suivi pour mesurer les progrès réalisés.

Droit à la vie (art. 10)

21.Le Comité est préoccupé par le nombre d’infanticides qui ont été commis au motif du handicap de l’enfant.

22. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures juridiques et stratégiques contre les infanticides motivés par le handicap.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

23.Compte tenu de la vulnérabilité de l’État partie face aux catastrophes naturelles, le Comité constate avec préoccupation :

a)Que les personnes handicapées ne participent guère, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, à la conception et à la mise en œuvre des stratégies de réduction des risques de catastrophe, notamment du Plan national d’urgence et du Règlement national de gestion des catastrophes, et qu’il n’existe pas de politiques ni de mesures qui concernent spécifiquement les personnes handicapées en situation d’urgence humanitaire, telles que des programmes d’évacuation, de sauvetage, d’hébergement, de secours et de réadaptation ;

b)Que les personnes handicapées, en particulier les femmes et filles handicapées et les personnes handicapées appartenant à des communautés ethniques ou religieuses, y compris les réfugiés rohingya, sont particulièrement lésées dans les situations de risque, d’urgence humanitaire et de catastrophe naturelle, et ont besoin d’une protection spéciale.

24. Compte tenu du Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe (2015-2030), de l’Accord de Paris sur les changements climatiques et des objectifs de développement durable n os 11 et 13, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De garantir l’inclusion et la participation effectives des personnes handicapées et des organisations qui les représentent dans la conception et la mise en œuvre des stratégies de réduction des risques de catastrophe, en particulier du Plan national d’urgence et du Règlement national de gestion des catastrophes, et d’adopter et d’appliquer des politiques et mesures à l’intention des personnes handicapées en situation d’urgence humanitaire, y compris celles qui sont réfugiées, telles que des programmes d’évacuation, de sauvetage, d’hébergement, de secours et de réadaptation  ;

b) De faire en sorte que les personnes handicapées, en particulier les femmes et filles handicapées et les personnes handicapées appartenant à des communautés ethniques ou religieuses, y compris les réfugiés rohingya, bénéficient d’une meilleure protection humanitaire et soient prises en considération dans tous les programmes d’évacuation, de sauvetage, d’hébergement, de secours et de réadaptation en cas de catastrophe.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

25.Le Comité constate avec préoccupation que la loi de 1872 sur les contrats, la loi de 1882 sur le transfert de propriété et la loi de 1928 modifiant le droit hindou des successions et abrogeant l’exclusion des personnes handicapées privent les personnes handicapées, en particulier les personnes ayant un handicap intellectuel, les femmes handicapées et les personnes handicapées appartenant à des groupes religieux ou ethniques, de la capacité juridique de conclure un contrat ou d’hériter d’un bien, et prévoient un régime de prise de décisions substitutive.

26. Conformément à son observation générale n o  1 (2014) sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité, le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’abroger la loi de 1872 sur les contrats, la loi de 1882 sur le transfert de propriété, la loi de 1928 modifiant le droit hindou des successions et abrogeant l’exclusion des personnes handicapées et toutes les autres lois et politiques qui privent les personnes handicapées, en particulier les personnes ayant un handicap intellectuel, les femmes handicapées et les personnes handicapées appartenant à des groupes religieux ou ethniques, de la capacité juridique de conclure un contrat, d’hériter d’un bien, de contrôler leurs finances et d’avoir accès aux prêts bancaires, hypothèques et autres formes de crédit financier dans des conditions d’égalité avec les autres  ;

b) D’instaurer un régime de prise de décisions accompagnée qui tiendra dûment compte de l’autonomie, de la volonté et des préférences des personnes handicapées.

Accès à la justice (art. 13)

27.Le Comité est préoccupé par :

a)L’absence d’aménagements procéduraux et d’aménagements en fonction du genre et de l’âge dans les procédures judiciaires et administratives visant des personnes handicapées, notamment des femmes handicapées, des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial et des personnes sourdes, malentendantes ou sourdes et aveugles, et, en particulier, l’absence de mesures garantissant la diffusion de l’information sous des formes accessibles (braille, langage facile à lire et à comprendre (FALC) et langue des signes) et l’accessibilité physique des tribunaux et de tous les bâtiments judiciaires et administratifs, y compris dans les zones rurales et reculées ;

b)Les préjugés et stéréotypes à l’égard des femmes handicapées et les actes d’intimidation dont celles-ci font l’objet de la part des autorités judiciaires lorsqu’elles cherchent à accéder à la justice ;

c)Le manque de sensibilisation et de formation des professionnels de la justice aux droits des personnes handicapées et l’absence d’aménagements procéduraux qui permettraient aux personnes handicapées d’intervenir en qualité de juré ou à d’autres titres, ou d’exercer les fonctions d’avocat ou de juge ou d’autres professions juridiques.

28. Rappelant les Principes et directives internationaux sur l’accès à la justice des personnes handicapées, que la Rapporteuse spéciale sur les droits des personnes handicapées et l’Envoyée spéciale du Secrétaire général pour les questions de handicap et d’accessibilité avaient établis en 2020 et que lui-même a approuvés, ainsi que la cible 16.3 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’adopter et d’appliquer des mesures propres à garantir des aménagements procéduraux et des aménagements en fonction de l’âge et du genre dans les procédures judiciaires et administratives visant des personnes handicapées, notamment des femmes handicapées, des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial et des personnes sourdes, malentendantes ou sourdes et aveugles, et des mesures garantissant la diffusion de l’information sous des formes accessibles et l’accessibilité physique des tribunaux et des tribunaux et de tous les bâtiments judiciaires et administratifs, y compris dans les zones rurales et reculées  ;

b) De lutter contre les préjugés et stéréotypes sur le handicap et contre la stigmatisation des personnes handicapées, y compris les actes d’intimidation visant les femmes handicapées, afin d’éliminer tout obstacle à l’accès à la justice et de faire en sorte que la procédure judiciaire soit adaptée au regard du handicap et du genre  ;

c) De faire en sorte que le personnel judiciaire et pénitentiaire, y compris la police, reçoive une formation qui lui permette d’assimiler les droits des personnes handicapées et de fournir un accompagnement individualisé et des aménagements raisonnables aux personnes handicapées qui souhaitent intervenir en qualité de juré ou à d’autres titres, ou exercer les fonctions d’avocat ou de juge ou d’autres professions juridiques.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

29.Le Comité constate avec préoccupation que les personnes handicapées, en particulier les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, continuent d’être fréquemment harcelées, arrêtées ou détenues du fait d’une mauvaise application des lois existantes. Il constate aussi avec préoccupation que des personnes ayant un handicap intellectuel sont entravées et séquestrées à leur domicile par leurs proches et que des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial sont placées en institution sans leur consentement libre et éclairé.

30. Rappelant ses directives relatives au droit à la liberté et à la sécurité des personnes handicapées, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De modifier le Code pénal de 1860, l’ article 54 du Code de procédure pénale de 1898, les ordonnances de la police métropolitaine, la loi de 2010 sur la prévention de la violence domestique et la protection contre cette violence, et la loi de 2011 sur la réadaptation des vagabonds et des sans-abri afin que les personnes handicapées, en particulier les femmes handicapées et les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, ne soient plus harcelées, ni arrêtées ou détenues sans raison, ni séquestrées illégalement  ;

b) De prendre des mesures concrètes pour empêcher que des personnes ayant un handicap intellectuel ne soient séquestrées à leur domicile et de fournir des données statistiques, ventilées par âge, sexe et type de handicap, sur le nombre de personnes handicapées placées en institution contre leur gré.

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (art. 15)

31.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que des cas de torture et de décès en détention ont été signalés parmi les personnes handicapées placées en institution, qu’il n’y a pas d’informations ni de données, ventilées par âge et par sexe, sur la question et qu’il n’existe pas de mesures de protection, de recours exécutoires, de services accessibles, notamment de foyers, ni d’informations sous des formes accessibles pour les personnes handicapées victimes de torture, notamment les personnes handicapées appartenant à des groupes minoritaires, les travailleurs migrants handicapés et les réfugiés handicapés, et leurs familles ;

b)Qu’aucune mesure n’a été prise en vue de punir les auteurs d’actes de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants, y compris de châtiments corporels sur des enfants handicapés, et qu’il n’existe pas de mécanismes de contrôle de l’application des peines.

32. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre des mesures concrètes pour prévenir les actes de torture et les décès en détention parmi les personnes handicapées placées en institution, de recueillir des données ventilées par âge et par sexe sur la question, de mettre en place des mécanismes de plainte, des recours exécutoires, des foyers et des services accessibles, et de fournir des informations sous des formes accessibles aux personnes handicapées victimes de torture, notamment aux personnes handicapées appartenant à des groupes minoritaires, aux travailleurs migrants handicapés et aux réfugiés handicapés, et à leurs familles  ;

b) De mettre en place des mécanismes chargés de punir les auteurs d’actes de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants, y compris de châtiments corporels sur des enfants handicapés, et des mécanismes chargés de contrôler l’application des peines.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

33.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que des personnes handicapées, en particulier des femmes et filles handicapées et des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, sont exploitées, violentées et maltraitées, et que les mesures de protection disponibles ne sont pas suffisantes, s’agissant par exemple de foyers accessibles pour les femmes âgées handicapées qui ont été victimes de violence ;

b)Que les personnes handicapées victimes de violence ne disposent pas de mécanismes de plainte ni de moyens de recours effectifs, et ne bénéficient pas de mesures de réparation, par exemple sous la forme d’une indemnisation ou d’une réadaptation, et que les auteurs des actes de violence en question ne sont pas sanctionnés ;

c)Qu’il n’existe pas de mesures concrètes visant à protéger les enfants handicapés contre toutes les formes de violence et de maltraitance et contre toutes les pratiques préjudiciables, dont celle de la mendicité.

34. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre des mesures concrètes pour assurer la protection des personnes handicapées soumises à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance, en particulier des femmes âgées handicapées, des filles handicapées et des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, notamment en créant des foyers accessibles  ;

b) De mettre en place des mécanismes efficaces qui permettent de déposer des plaintes, de punir les auteurs des faits reprochés et de fournir des moyens de recours et des mesures de réparation aux victimes  ; de créer un mécanisme indépendant chargé de surveiller les équipements et programmes destinés aux personnes handicapées dans le but de prévenir les actes d’exploitation, de violence et de maltraitance, et d’allouer des ressources suffisantes au bon fonctionnement de ces mécanismes  ;

c) De prendre des mesures concrètes et efficaces pour que les enfants handicapés soient protégés contre toutes les formes de violence, de maltraitance et de pratiques préjudiciables, en particulier celle de la mendicité.

Protection de l’intégrité de la personne (art. 17)

35.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que des femmes handicapées placées en institution, en particulier des femmes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, ont subi des avortements ou ont été stérilisées sans leur consentement, et que des personnes handicapées subissent des interventions médicales et/ou psychiatriques forcées et sont admises contre leur gré dans des établissements psychiatriques ;

b)Qu’il n’existe pas de données statistiques, ventilées par sexe, âge et type de déficience, sur les personnes handicapées qui ont subi une stérilisation, un avortement ou des interventions médicales et/ou psychiatriques sans leur consentement et ont été placées dans des établissements psychiatriques contre leur gré ;

c)Qu’il reste courant pour les femmes et filles handicapées de faire l’objet de pratiques préjudiciables, en particulier de mariages forcés.

36. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre des mesures concrètes pour interdire que des avortements forcés et des stérilisations forcées soient pratiqués sur des femmes handicapées, en particulier sur des femmes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, et notamment de mettre fin aux interventions médicales et psychiatriques et aux admissions dans des établissements psychiatriques sans le consentement des intéressés, et de mettre en place des mécanismes de prise de décision s accompagnée afin que les personnes handicapées puissent préalablement consentir à des interventions et traitements en connaissance de cause  ;

b) De recueillir des données statistiques, ventilées par sexe, âge et type de déficience, sur les personnes handicapées qui ont subi une stérilisation, un avortement ou des interventions médicales et/ou psychiatriques sans leur consentement et ont été placées dans des établissements psychiatriques contre leur gré  ;

c) De mettre en œuvre des mesures rigoureuses pour prévenir les pratiques préjudiciables telles que le mariage forcé.

Droit de circuler librement et nationalité (art. 18)

37.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Qu’il n’existe pas de documents d’état civil, tels que des actes officiels de naissance, de mariage et de décès, qui rendent compte de l’existence des enfants handicapés, en particulier des enfants handicapés réfugiés qui appartiennent à la communauté rohingya et des enfants handicapés vivant dans des zones rurales et reculées, ce qui empêche ces enfants d’accéder aux services publics ;

b)Que des personnes handicapées, en particulier des personnes handicapées réfugiées qui appartiennent à la communauté rohingya, ne sont pas libres de circuler, ce qui les empêche de se rendre à l’étranger ou de sortir de leur camp de réfugiés pour bénéficier de services médicaux de réadaptation ;

c)Que l’État partie n’a pas ratifié la Convention relative au statut des réfugiés, le Protocole relatif au statut des réfugiés, la Convention relative au statut des apatrides ou la Convention sur la réduction des cas d’apatridie.

38. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre des mesures concrètes pour que tous les enfants handicapés, en particulier les enfants handicapés réfugiés qui appartiennent à la communauté rohingya et les enfants handicapés vivant dans des zones rurales et reculées, disposent de documents d’état civil qui leur ouvrent l’accès à tous les services publics  ;

b) De prendre des mesures concrètes pour que les personnes handicapées, en particulier les personnes handicapées réfugiées qui appartiennent à la communauté rohingya, soient libres de circuler et puissent se rendre à l’étranger ou sortir de leur camp de réfugiés pour bénéficier de services médicaux de réadaptation  ;

c) De prendre les mesures nécessaires pour ratifier la Convention relative au statut des réfugiés, le Protocole relatif au statut des réfugiés, la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie, et d’abroger la loi de 1946 sur les étrangers, qui vise principalement les musulmans rohingya.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

39.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que les personnes handicapées, en particulier les femmes handicapées, les enfants handicapés, les personnes touchées par la lèpre et les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, font couramment l’objet de discrimination et sont mises à l’écart de la société, du fait de leur stigmatisation ou de barrières comportementales, et ne disposent pas de services de proximité suffisants, ce qui entrave leur capacité de mener une vie autonome dans la société, en particulier dans les zones rurales et reculées ;

b)Que les personnes handicapées, en particulier les femmes handicapées, les enfants handicapés, les personnes touchées par la lèpre et les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, ne disposent pas de ressources financières suffisantes, d’infrastructures physiques accessibles ni de services d’accompagnement adéquats, tels qu’une aide personnelle et des équipements d’assistance à l’autonomie de vie, qui leur permettent de choisir où et avec qui elles souhaitent vivre.

40. Compte tenu de son observation générale n o 5 (2017) sur l’autonomie de vie et l’inclusion dans la société et de ses lignes directrices pour la désinstitutionnalisation, y compris dans les situations d’urgence , le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’élaborer, en étroite concertation avec les organisations qui représentent les personnes handicapées, une stratégie nationale visant à garantir l’accès des personnes handicapées aux services ordinaires de proximité, de lever tous les obstacles à la participation des personnes handicapées, en particulier des femmes handicapées, des enfants handicapés, des personnes touchées par la lèpre et des personnes ayant un handicap psychosocial et/ou intellectuel, à la vie de la société et de consacrer suffisamment de ressources humaines, financières et matérielles à l’exécution de cette stratégie, en particulier dans les zones rurales et reculées  ;

b) De veiller à affecter des crédits budgétaires suffisants à l’achat de services d’aide personnelle et d’équipements d’assistance, de façon à assurer la disponibilité de services d’accompagnement de proximité accessibles et abordables, y compris dans les zones rurales et reculées, afin que toutes les personnes handicapées puissent exercer leur droit à l’autonomie de vie et à l’inclusion dans la société.

Mobilité personnelle (art. 20)

41.Le Comité constate avec préoccupation que les personnes handicapées, notamment les femmes handicapées et les enfants handicapés, se heurtent souvent à des obstacles lorsqu’elles cherchent à obtenir, à utiliser et à préserver des dispositifs d’aide à la mobilité ainsi que des équipements d’assistance et des technologies et services d’assistance, tels que des transports et des infrastructures accessibles, qui sont nécessaires à leur mobilité, en particulier dans les zones rurales.

42. Le Comité recommande à l’État partie d’éliminer tous les obstacles qui empêchent les personnes handicapées d’accéder, pour un coût abordable, à des dispositifs d’aide à la mobilité ainsi qu’à des équipements d’assistance et des technologies et services d’assistance de qualité qui facilitent leur mobilité, tels que des transports et des infrastructures accessibles, et de fournir les informations et la formation nécessaires à l’utilisation et à la préservation de ces dispositifs, équipements, technologies et services. Il recommande aussi à l’État partie de créer des conditions qui permettent aux personnes handicapées d’acheter les dispositifs et équipements susmentionnés à l’étranger, à la faveur d’une réduction des droits de douane, et de continuer à mettre au point, en concertation avec les organisations qui représentent les personnes handicapées, des moyens de fabriquer et de réparer ces équipements et dispositifs à un coût abordable.

Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21)

43.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que la langue des signes bengalie n’est guère considérée comme une langue officielle des personnes sourdes et que peu d’interprètes qualifiés en langue des signes sont employés dans les procédures judiciaires et dans le cadre de fonctions publiques ;

b)Que les informations ne sont pas communiquées sous des formes accessibles aux personnes handicapées telles que le braille, le FALC, la communication tactile et des supports multimédias accessibles, ni selon des modes, moyens et formes de communication améliorée et alternative axés sur les supports écrits, les supports audio et le lecteur humain, à l’exemple de technologies de l’information et de la communication accessibles, en particulier dans les zones rurales et reculées ;

c)Qu’il n’y a pas suffisamment de sites Web privés et publics accessibles ni de programmes télévisés assortis de services de sous-titrage, d’interprétation en langue des signes et d’audiodescription pour répondre aux besoins des personnes sourdes, aveugles et malvoyantes ;

d)Que trop peu de ressources financières sont allouées à la formation d’interprètes en langue des signes et d’autres professionnels au braille, au FALC, à la communication tactile, aux supports multimédias accessibles et à d’autres modes, moyens et formes de communication améliorée et alternative.

44. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) De reconnaître la langue des signes bengalie comme langue officielle  ;

b) De prendre toutes les mesures qui s’imposent, y compris les mesures législatives et les mesures de politique générale, pour que les informations communiquées au grand public soient mises à la disposition des personnes handicapées sous des formes accessibles telles que le braille, la langue des signes et le FALC, grâce à des modes de communication accessibles tels que l’audiodescription, le sous-titrage et la communication tactile, et des moyens de communication améliorée et alternative, notamment dans les zones rurales et reculées  ;

c) D’adopter et de mettre en œuvre des mesures législatives et des mesures de politique générale qui tendent à garantir que les stations de télévision proposent des programmes accessibles aux personnes sourdes, aveugles et malvoyantes, grâce à des services de sous-titrage, d’interprétation en langue des signes et d’audiodescription, et que les sites Web publics et privés sont accessibles  ;

d) D’allouer, en concertation avec les organisations qui représentent les personnes handicapées, des ressources financières à la formation d’interprètes qualifiés en langue des signes et d’autres professionnels à la communication tactile, au braille et au FALC.

Respect du domicile et de la famille (art. 23)

45.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que des lois religieuses sont discriminatoires à l’égard des personnes handicapées, en particulier des femmes handicapées, des personnes touchées par la lèpre et des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, et les privent du droit de se marier, que des lois autorisent le divorce au motif du handicap du conjoint et que les personnes handicapées voient restreints leurs responsabilités et droits parentaux et leur droit d’adopter des enfants ;

b)Qu’aucune mesure n’a été prise pour empêcher que des enfants soient séparés de leurs parents en raison de leur handicap ;

c)Qu’il n’y a pas d’informations sous des formes accessibles sur la santé et les droits des personnes handicapées, en particulier des femmes et filles handicapées, en matière de sexualité et de procréation, que la formation sur le sujet fait défaut au personnel concerné et que les personnes handicapées ne sont pas véritablement consultées sur les programmes d’éducation familiale et n’y participent pas activement.

46. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’abroger les lois religieuses qui sont discriminatoires à l’égard des personnes handicapées, en particulier des femmes handicapées, des personnes touchées par la lèpre et des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, ou qui les privent du droit de se marier, et d’adopter une législation qui interdit le divorce arbitraire des femmes handicapées et autorise les parents handicapés à adopter des enfants  ;

b) De faire en sorte que des enfants ne soient pas séparés de leurs parents en raison de leur handicap et de fournir aux enfants handicapés, à leurs parents et à leur famille, ou aux parents handicapés, tous les services d’accompagnement qui sont nécessaires à l’exercice du droit à la vie familiale dans des conditions d’égalité avec les autres, y compris un soutien financier, des services de conseil et un appui de proximité  ;

c) De faire en sorte que les enfants handicapés et leur famille disposent d’informations exhaustives et de services d’accompagnement, notamment en adoptant et en appliquant des programmes et politiques qui permettent aux personnes handicapées, en particulier dans les zones rurales et reculées, de recevoir une éducation à la planification familiale sous des formes accessibles et de disposer d’informations sur la santé sexuelle et procréative accessibles et adaptées à l’âge.

Éducation (art. 24)

47.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que l’éducation spéciale et ségréguée reste la norme, au vu de la politique de 2019 pour l’éducation spéciale combinée des personnes handicapées, et ce, au détriment du développement de l’éducation inclusive, et qu’il n’y a pas de données statistiques sur le nombre d’enfants inscrits à l’école primaire, en particulier dans les zones rurales et reculées ;

b)Qu’il n’y a pas de supports pédagogiques sous des formes accessibles telles que le braille, la langue des signes et le FALC, pour les personnes aveugles, les personnes sourdes et les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, et que les établissements scolaires et les moyens de transport scolaire ne sont pas accessibles ;

c)Que les enseignants ne sont pas suffisamment formés au braille, à la langue des signes et au FALC et que les élèves handicapés ne bénéficient pas de tout l’accompagnement individualisé ni de tous les aménagements raisonnables dont ils ont besoin ;

d)Que trop peu de crédits budgétaires sont affectés à la promotion de l’éducation inclusive et qu’il n’est pas procédé à une collecte systématique de données, ventilées par sexe et par type de handicap, sur le nombre d’enfants handicapés scolarisés.

48. Compte tenu de son observation générale n o 4 (2016) sur le droit à l’éducation inclusive et de la cible 4.5 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’adopter et de mettre en œuvre un plan d’action national en faveur de l’éducation inclusive et de recueillir des données statistiques sur le nombre d’enfants handicapés scolarisés, en particulier dans les zones rurales et reculées  ;

b) De redoubler d’efforts afin que des supports pédagogiques sous des formes accessibles soient mis à la disposition de tous les élèves handicapés et de veiller à l’accessibilité des infrastructures et des moyens de transport scolaires dans l’ensemble du système éducatif  ;

c) De mettre en place un programme efficace de formation à l’éducation inclusive à l’intention du personnel enseignant, lequel prévoirait notamment l’apprentissage du braille, de la langue des signes et du FALC, et de fournir un accompagnement individualisé et des aménagements raisonnables aux élèves handicapés  ;

d) D’affecter des crédits budgétaires suffisants à la promotion de l’éducation inclusive et à la collecte systématique de données statistiques, ventilées par sexe et par type de handicap, sur le nombre d’enfants handicapés scolarisés.

Santé (art. 25)

49.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que l’État partie manque d’hôpitaux et de centres de santé accessibles aux personnes handicapées, en particulier aux personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, aux femmes et filles handicapées, aux personnes handicapées appartenant à des groupes minoritaires, aux personnes touchées par la lèpre et aux migrants et réfugiés handicapés ;

b)Que les services de santé, en particulier en matière de santé sexuelle et procréative et de prévention du VIH/sida, sont insuffisants pour les femmes et filles handicapées ;

c)Que les organisations qui représentent les personnes handicapées ne sont pas véritablement consultées au sujet des politiques et programmes de santé et ne participent pas concrètement à leur élaboration, comme il ressort de l’élaboration actuelle de la nouvelle politique nationale de santé ;

d)Que les crédits budgétaires alloués au système de santé sont insuffisants pour permettre aux professionnels de la santé de suivre une formation qui les sensibilise aux besoins des personnes handicapées.

50. Compte tenu des liens entre l’ article 25 de la Convention et les cibles 3.7 et 3.8 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’adopter et de mettre en œuvre une stratégie nationale pour la mise en place de services de santé de qualité et accessibles, y compris d’hôpitaux et de centres de santé accessibles aux personnes handicapées, en particulier aux personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, aux femmes et filles handicapées, aux personnes handicapées appartenant à des groupes minoritaires, aux personnes touchées par la lèpre et aux migrants et réfugiés handicapés  ;

b) De prendre des mesures concrètes pour que les femmes et filles handicapées aient accès à des informations adaptées et accessibles concernant la santé sexuelle et procréative et la prévention du VIH/sida, notamment à des services de conseil accessibles, inclusifs et adaptés à l’âge et au genre  ;

c) De faire en sorte que les organisations qui représentent les personnes handicapées soient véritablement consultées au sujet des politiques et programmes de santé et participent concrètement à leur élaboration, y compris à l’élaboration actuelle de la nouvelle politique de santé  ;

d) D’allouer des crédits budgétaires à la formation des professionnels de la santé au modèle du handicap fondé sur les droits de l’homme et à la compréhension des besoins des personnes handicapées.

Travail et emploi (art. 27)

51.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que, dans le monde du travail, les personnes handicapées, en particulier les femmes handicapées, les personnes touchées par la lèpre, les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial et les personnes handicapées travaillant dans les plantations de thé, font l’objet de pratiques discriminatoires, y compris de harcèlement, en ce qu’elles ne sont pas traitées dans des conditions d’égalité avec les autres lors du recrutement, ne bénéficient pas d’un accompagnement individualisé ni d’aménagements raisonnables, ne reçoivent pas le même salaire et ne jouissent de conditions d’emploi favorables ni d’avantages sociaux équivalents ;

b)Que des femmes handicapées auraient été harcelées sexuellement sur leur lieu de travail et qu’il n’existe pas de mesures de prévention ni de mesures de protection à cet égard ;

c)Qu’il n’y a pas de mesures incitatives ni de programmes d’action positive qui tendent à promouvoir l’inclusion des personnes handicapées dans le marché du travail ordinaire, aussi bien dans le secteur public que dans le secteur privé.

52. Compte tenu de son observation générale n o 8 (2022) sur le droit des personnes handicapées au travail et à l’emploi, et de la cible 8.5 des objectifs de développement durable, le Comité recommande à l’État partie  :

a) De prendre des mesures pour lever les obstacles physiques et comportementaux à l’emploi des personnes handicapées, y compris les attitudes négatives des employeurs, le manque d’accompagnement individualisé et d’aménagements raisonnables, et les conditions d’emploi défavorables  ;

b) De prendre des mesures pour lutter contre le harcèlement sexuel, l’exploitation et la maltraitance des femmes handicapées sur le lieu de travail, notamment de mettre en place des programmes de sensibilisation du public au problème et de fournir des moyens de recours aux victimes  ;

c) D’adopter et de mettre en œuvre une stratégie nationale visant à garantir l’accès des personnes handicapées au marché du travail ordinaire, à la fois dans le secteur public et dans le secteur privé, y compris par la voie de mesures incitatives et de programmes d’action positive.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

53.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que les personnes handicapées sont nombreuses à ne pas avoir un revenu régulier et à vivre dans la pauvreté, et qu’aucun système global de protection sociale ne leur garantit, à elles et à leur famille, un niveau de vie adéquat, par exemple en compensant les dépenses liées au handicap ;

b)Que les organisations de personnes handicapées ne sont pas associées à l’élaboration de politiques et de programmes visant à lutter contre l’extrême pauvreté et le dénuement des personnes handicapées.

54. Rappelant les liens entre l’ article 28 de la Convention et la cible 10.2 des objectifs de développement durable, qui est d’autonomiser toutes les personnes et de favoriser leur intégration économique indépendamment de leur handicap, le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’adopter et de mettre en œuvre une stratégie nationale de lutte contre la pauvreté des personnes handicapées, qui suppose notamment la mise en place d’un système de protection sociale solide, propre à garantir un niveau de vie adéquat, y compris en aidant les personnes handicapées à faire face aux dépenses supplémentaires liées au handicap  ;

b) De faire en sorte que les organisations qui représentent les personnes handicapées participent pleinement et activement à l’élaboration de tous les programmes et politiques de protection sociale.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

55.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que les articles 66 et 122 de la Constitution et la loi de 2009 sur les listes électorales restreignent la participation des personnes handicapées, en particulier des personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, à la vie politique au motif de leur handicap ;

b)Que les bureaux de vote ne sont pas physiquement accessibles et que les personnes handicapées, en particulier les personnes aveugles et malvoyantes, manquent d’informations sous des formes accessibles concernant le matériel électoral pour pouvoir exercer leur droit de vote ;

c)Que le secret du vote n’est pas garanti pour les personnes handicapées, ce qui compromet le caractère démocratique du scrutin ;

d)Que les personnes handicapées, en particulier les femmes handicapées, sont peu représentées dans la vie politique et la vie publique et ne participent guère à la prise de décisions politiques et publiques.

56. Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’abroger ou de modifier toutes les lois et politiques qui privent les personnes handicapées, en particulier les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial, du droit de voter et de se porter candidat à des fonctions électives, ou qui limitent ce droit  ;

b) De prendre des mesures concrètes pour garantir l’accessibilité physique des bureaux de vote et de fournir des informations sur le matériel électoral sous des formes accessibles à toutes les personnes handicapées  ;

c) De faire en sorte que le secret du vote soit garanti pour les personnes handicapées  ;

d) De promouvoir la participation des personnes handicapées, en particulier des femmes handicapées, à la prise de décisions politiques et publiques, à tous les niveaux, notamment en les incitant à se porter candidates à des fonctions électives.

Participation à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports (art. 30)

57.Le Comité constate avec préoccupation :

a)Que l’accessibilité n’est pas effective pour tous les musées, centres culturels, centres de loisirs, attractions touristiques et stades, que les bibliothèques publiques ne fournissent pas des informations sous des formes accessibles aux personnes aveugles ou malvoyantes, et que les crédits budgétaires alloués ne sont pas suffisants pour permettre aux personnes handicapées de participer activement à des activités sportives et récréatives, notamment dans les zones rurales et reculées ;

b)Que l’État partie n’a pas encore ratifié le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées.

58. Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures concrètes pour lever tous les obstacles qui empêchent les personnes handicapées de participer à des activités culturelles, récréatives et sportives et de faire en sorte que les personnes handicapées participent à ces activités dans des conditions d’égalité avec les autres, notamment en accélérant la création du centre national handisport, et en ratifiant et en appliquant dans les meilleurs délais le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées.

C.Obligations particulières (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

59.Le Comité constate avec préoccupation que l’État partie manque de données nationales de qualité, exactes, complètes, actualisées et fiables concernant les personnes handicapées, y compris les femmes et filles handicapées, les personnes handicapées appartenant à des groupes minoritaires, les migrants handicapés, les réfugiés handicapés, les personnes âgées handicapées, les personnes ayant un handicap intellectuel et/ou psychosocial et les personnes touchées par la lèpre, que les questions de handicap ne sont pas prises en considération dans les indicateurs de suivi de la réalisation des objectifs de développement durable et qu’aucune information concernant les données statistiques et leur diffusion n’est communiquée sous des formes accessibles aux personnes handicapées.

60. Le Comité rappelle le bref questionnaire du Groupe de Washington sur les situations de handicap ainsi que le marqueur de l’inclusion et de l’autonomisation des personnes handicapées, créé par le Comité d’aide au développement de l’Organisation de coopération et de développement économiques, et recommande à l’État partie  :

a) De prendre les mesures qui s’imposent pour que les organisations qui représentent les personnes handicapées, y compris les personnes appartenant à des groupes minoritaires, soient véritablement consultées et participent à la prochaine campagne nationale de recensement et au programme de détection du handicap mené par le Ministère des affaires sociales, et de concevoir un système de collecte de données actualisées et ventilées sur les personnes handicapées, en envisageant de s’inspirer du bref questionnaire du groupe de Washington sur les situations de handicap  ;

b) D’accorder une attention particulière aux liens entre l’ article 31 de la Convention et la cible 17.18 des objectifs de développement durable, et d’accroître sensiblement la disponibilité de données de qualité, fiables et ventilées par niveau de revenu, sexe, âge, race, origine ethnique, statut migratoire, situation géographique et d’autres caractéristiques pertinentes eu égard au contexte national  ;

c) De prendre des mesures pour analyser les données susmentionnées afin que l’État partie puisse élaborer et mettre en œuvre des politiques qui donnent effet à la Convention, et de faire en sorte que ces données soient disponibles en braille, en langue des signes, en FALC et sous des formes électroniques, y compris pour les personnes handicapées qui vivent dans des zones rurales et reculées.

Coopération internationale (art. 32)

61.Le Comité constate avec préoccupation que les organisations qui représentent les personnes handicapées, notamment les organisations de femmes et filles handicapées, ne participent pas activement et concrètement à la planification, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation des accords et activités de coopération internationale.

62.Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour que les organisations qui représentent les personnes handicapées, notamment les organisations de femmes et filles handicapées, soient véritablement consultées et participent effectivement à toutes les étapes de l’élaboration, de la mise en œuvre, du suivi et de l’évaluation des activités de coopération internationale, et que les droits des personnes handicapées soient systématiquement pris en considération lors de la mise en œuvre du Programme de développement durable à l’horizon 2030 à l’échelle nationale et du suivi de son application.

Application et suivi au niveau national (art. 33)

63.Le Comité constate avec préoccupation que des zones d’ombre demeurent en ce qui concerne les coordonnateurs chargés des questions de handicap et leurs attributions, qu’il n’existe pas de mécanisme de suivi opérationnel clairement identifié qui soit indépendant, conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) et doté de moyens budgétaires et humains suffisants pour promouvoir et protéger les droits consacrés par la Convention et surveiller l’application de celle-ci, et que les personnes handicapées participent peu, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, à la mise en œuvre de la Convention et au suivi de son application.

64. Le Comité recommande à l’État partie d’établir clairement l’identité et les attributions des coordonnateurs chargés des questions de handicap, de se doter d’un mécanisme indépendant de suivi qui soit conforme aux Principes de Paris, de fournir à ce mécanisme les ressources budgétaires et humaines dont il a besoin pour promouvoir la Convention et surveiller son application, et de faire en sorte que les organisations de la société civile, en particulier les organisations qui représentent les personnes handicapées, participent activement à la promotion de la Convention et au suivi de son application, et disposent de crédits budgétaires suffisants à cet effet.

IV.Suivi

Diffusion de l’information

65. Le Comité insiste sur l’importance de toutes les recommandations figurant dans les présentes observations finales. En ce qui concerne les mesures à prendre d’urgence, il tient à appeler l’attention de l’État partie sur les recommandations relatives aux articles 6 et 7 de la Convention.

66. Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre les recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre les présentes observations finales, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et du Parlement, aux responsables des différents ministères, aux autorités locales et aux membres des professions concernées tels les professionnels de l’éducation, de la santé et du droit, ainsi qu’aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale modernes.

67.Le Comité encourage vivement l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de ses rapports périodiques.

68. Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations de personnes handicapées, ainsi qu’auprès des personnes handicapées elles-mêmes et de leurs proches, dans les langues nationales et minoritaires, notamment en langue des signes, et sous des formes accessibles telles que des supports faciles à lire et à comprendre. Il lui demande aussi de les diffuser sur le site Web public consacré aux droits de l’homme.

Prochain rapport périodique

69. Le Comité prie l’État partie de lui soumettre son rapport valant deuxième à sixième rapports périodiques le 30 décembre 2029 au plus tard et d’y faire figurer des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les présentes observations finales. Il invite l’État partie à envisager de soumettre ce rapport en suivant la procédure simplifiée, dans le cadre de laquelle il établit une liste de points au moins un an avant la date prévue pour la soumission du rapport et l’État partie y apporte des réponses qui constituent son rapport périodique.