NATIONS UNIES

CCPR

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr.GÉNÉRALE

CCPR/C/SMR/Q/2/Add.210 juillet 2008

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’HOMME

RÉPONSES DU GOUVERNEMENT DE SAINT-MARIN À LA LISTE DES POINTS À TRAITER (CCPR/C/SMR/Q/2) À L ’OCCASION DE L ’ EXAMEN DU DEUXIÈME RAPPORT PÉRIODIQUE DE SAINT ‑MARIN (C CPR/C/SMR/2)

[9 juillet 2008]

APPLICATION DU PACTE INTERNAT IONAL RELATIF AUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES

Réponses du Gouvernement de Saint ‑Marin à la liste des points à traiter à l’ occasion de l’examen du deuxième ra pport périodique de Saint ‑Marin

Question 1. Donner des informations sur la place exacte du Pacte et du Protocole facultatif dans la législation de Saint ‑Marin, en particulier par rapport à la place de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

1.Étant donné que les réponses aux questions qui suivent illustrent également «la place exacte du Pacte et du Protocole facultatif dans la législation de Saint‑Marin […] par rapport à la place de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales», il est utile de formuler ici quelques commentaires et observations d’ordre général sur les mesures adoptées par la République de Saint‑Marin afin de garantir la pleine application des dispositions de la Convention au niveau national.

2.À cet égard, il convient de souligner qu’en vertu de la loi no 36 de 2002 la République de Saint‑Marin adhère pleinement aux règles du droit international généralement reconnues, qui font partie intégrante de l’ordre constitutionnel interne et auquel elle conforme ses actes et sa conduite (par. 1 de l’article premier de la Déclaration des droits des citoyens) afin de mieux protéger les droits de l’homme (qui étaient déjà largement protégés dans le projet initial de déclaration des droits des citoyens de 1974) et plus particulièrement d’adapter les formes et les méthodes de protection aux besoins nouveaux liés aux nouvelles expressions de ces droits. Ces dernières découlent des changements radicaux et soudains intervenus sur le plan social, culturel et économique sous l’effet de la mondialisation des marchés et de la libre circulation des personnes.

3.Outre la référence générale aux «[…] dispositions des déclarations internationales relatives aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales» (deuxième partie de la Déclaration des droits des citoyens, par. 1 de l’article premier), mention est faite explicitement et spécifiquement des droits et libertés fondamentales consacrés «[…] par la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales» (par. 3 de l’article premier, Déclaration des droits des citoyens). La Déclaration dispose que «les accords internationaux dûment signés et appliqués concernant la sauvegarde des droits de l’homme et des libertés l’emportent sur la législation interne en cas de conflit avec cette dernière» (par. 4 de l’article premier, Déclaration des droits des citoyens).

4.Ces dispositions ont eu une incidence considérable sur la hiérarchie des normes dans l’ordre constitutionnel saint‑marinais, qui a été révisé afin d’incorporer les dispositions de la Convention européenne dans la législation nationale. D’une part, celles-ci sont reconnues comme des normes constitutionnelles et ont donc un rang supérieur à celui des autres normes ou règles; d’autre part, elles s’appliquent (non seulement au législateur, pour tout ce qui touche simplement aux programmes, mais aussi) aux personnes qui les pratiquent et les interprètent (aux juges en particulier), en étant immédiatement accessibles et revêtant une dimension interindividuelle.

5.Cela signifie qu’elles sont reconnues non seulement comme des critères pour l’interprétation de la législation nationale ou pour l’adoption de dispositions législatives mais aussi comme des normes directement applicables, même en l’absence de décret d’application spécifique. Comme indiqué dans la réponse à la question no 2, des décisions de justice fondées directement sur les dispositions de la Convention ont déjà été rendues.

Question 2. Y a-t-il eu une évolution quelconque dans la législation ou la jurisprudence s’agissant de la mise en œuvre des dispositions du Pacte à Saint ‑Marin depuis l’examen du rapport initial de l’État partie? Donner des exemples d’affaires dans lesquelles le Pacte a été directement invoqué devant les juridictions internes.

6.Pour ce qui est de l’évolution de la législation et de la jurisprudence s’agissant de la mise en œuvre des dispositions du Pacte à Saint‑Marin, on se reportera aux réponses aux questions 4, 5, 6 et 7.

7.En ce qui concerne les mesures législatives les plus récentes, il convient de signaler l’adoption de la loi no 97 du 20 juin 2008 sur la violence à l’égard des femmes (intitulée «Prévention et répression de la violence à l’égard des femmes et des violences à motivation sexiste»). Cette loi revêt une importance particulière et vise à s’attaquer à un problème actuel. Elle contient une définition de la violence qui couvre: a) tout acte ou comportement entraînant des dommages ou des souffrances de nature physique, sexuelle ou psychologique chez la personne visée; b) la simple menace de tels actes ou comportements; c) la contrainte et la privation arbitraire de liberté dans la vie publique et privée.

8.Il est en outre établi que l’État assure la protection des victimes de violence dans la famille ou de violences sexuelles et leur apporte une assistance dans toutes les procédures civiles, pénales ou administratives, y compris par une aide juridictionnelle gratuite. L’Autorité pour l’égalité des chances veille à ce qu’aucune image ou expression portant atteinte à la dignité humaine ou à l’identité de l’individu ne soit employée. L’article 181 bis du Code pénal définit le harcèlement psychologique et le harcèlement sexuel comme des actes de persécution, c’est‑à‑dire comme un harcèlement répété entraînant de graves souffrances morales et portant atteinte à la dignité humaine. Le fait de se livrer à de tels actes sur le lieu de travail peut constituer une circonstance aggravante et être sanctionné par une peine plus lourde. En outre, le juge d’instruction a le pouvoir d’ordonner à l’accusé de quitter le domicile familial ou de lui interdire les lieux qui sont habituellement fréquentés par la victime.

9.Il convient de rappeler l’adoption récente de la loi sur les garanties de procès équitable (loi no 93 du 17 juin 2008), qui a introduit un changement radical par rapport au régime antérieur, notamment pour ce qui est des procédures pénales. Cette réforme a pour but de garantir et faire appliquer la règle du contre-interrogatoire, les droits de la défense et l’obligation d’agir avec diligence dès le début de toute procédure, y compris pendant les enquêtes préliminaires.

10.Pour ce qui est de la jurisprudence dans l’application des dispositions du Pacte, certaines décisions rendues par les autorités judiciaires peuvent être citées à l’appui de ce qui est affirmé au paragraphe 1 ci-dessus (décision du Commissaire juridique en date du 12 avril 2008 dans l’affaire civile no 45 de 2008; décision du Commissaire juridique en date du 1er avril 2008 dans l’affaire no 378 de 2007). Dans ces affaires, l’article 12 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales («À partir de l’âge nubile, l’homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille selon les lois nationales régissant l’exercice de ce droit.») a été invoqué et directement appliqué afin de garantir à des ressortissants étrangers le droit de se marier avec des citoyens saint-marinais, même en l’absence de l’autorisation prévue dans la législation nationale (dans les deux cas, le juge a décidé que la présentation d’autres documents démontrant clairement qu’il n’existait aucun obstacle au mariage était suffisante).

11.Dans un autre jugement (décision du Commissaire juridique en date du 12 février 2005 dans l’affaire civile no 3 de 2004), il a été fait directement et expressément référence au principe de la présomption d’innocence énoncé au paragraphe 2 de l’article 6 de la Convention européenne («Toute personne accusée d’une infraction est présumée innocente jusqu’à ce que sa culpabilité ait été légalement établie.»).

12.Enfin, cinq ordonnances (voir l’ordonnance du Commissaire juridique en date du 7 juin 2007 dans l’affaire civile no 242 de 2006) ont été rendues directement sur la base de l’article 3 du premier Protocole additionnel, qui a été invoqué par le juge pour rejeter la question de la légitimité constitutionnelle de l’article 6 de la loi no 6 de 1996 (modifié par l’article 7 de la loi no 114 de 2000 et par l’article 4 de la loi no 84 de 2004) concernant le droit de vote des personnes nées à l’étranger de parents saint-marinais et résidant à l’étranger. À cette occasion, le juge a également tenu compte des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme no 31981/1996 du 7 septembre 1999, no 35385/1997 du 21 mai 1997 et no 8987/1980 du 6 mai 1981.

Question 13. Donner des informations sur:

a) Le nombre de plaintes pour mauvais traitements imputés à des agents de la force publique enregistrées ces cinq dernières années

13.Aucune plainte pour mauvais traitements imputés à des agents de la force publique n’a été enregistrée ces cinq dernières années.

Question 14. D’après le rapport de l’État partie, l’avortement continue de faire l’objet de sanctions pénales en vertu des articles 153 et 154 du Code pénal. En outre, les peines peuvent être plus sévères lorsque l’avortement est pratiqué par une personne travaillant dans le système de santé. Expliquer s’il existe des exceptions à cette interdiction générale. Faire des observations sur la compatibilité de la criminalisation de tout avortement avec l’article 6 du Pacte.

14.Saint-Marin est partie à la Convention sur les droits de l’homme et la biomédecine (Convention d’Oviedo) du Conseil de l’Europe, dont l’article 8 dispose que dans les situations d’urgence il peut être procédé immédiatement à toute intervention médicalement indispensable pour le bénéfice de la santé de la personne concernée.

15.En vertu de cette disposition, qui figure également au paragraphe 2 de l’article premier de la loi no 43 du 28 avril 1989 (Charte des droits et des devoirs des personnes malades), même l’avortement est permis s’il est nécessaire pour protéger la santé de la mère dans des situations d’urgence particulières où sa vie est en danger.

16.Dans les situations et les cas particuliers susmentionnés, l’avortement ne peut pas être considéré comme un crime, conformément à l’article 42 du Code pénal qui dispose qu’une personne ne peut pas être poursuivie pour un acte visant à protéger sa vie ou celle d’autrui contre un danger réel d’atteinte grave, lorsque ce danger n’est pas causé par sa volonté ou est autrement inévitable et à condition que l’acte soit proportionné au risque.

Question 15. Donner des renseignements sur les progrès des travaux de la Commission parlementaire spéciale chargée de rédiger un nouveau code de procédure pénale en vue de remplacer le système inquisitorial actuel par une nouvelle procédure pénale. Indiquer en particulier quelles modifications le nouveau code entraînera pour le rôle du Procuratore del Fisco . Combien de temps un individu peut - il rester en détention avant d’être déféré devant un juge? L’intéressé est - il gardé dans les locaux de la police? À quel moment peut - il communiquer avec le monde extérieur, en particulier avec un avocat?

17.En ce qui concerne les trois points évoqués dans la deuxième partie de la question (a) Combien de temps une personne peut-elle rester en détention avant d’être déférée devant un juge? b) L’intéressé est-il gardé dans les locaux de la police? c) À quel moment peut-il communiquer avec le monde extérieur, en particulier avec un avocat?), les réponses sont les suivantes:

a)Au maximum vingt-quatre heures;

b)À l’heure actuelle, la détention se fait dans les locaux de la prison; toutefois, une structure spéciale est en cours de construction;

c)Immédiatement.

18.En ce qui concerne l’élaboration du nouveau code de procédure pénale et le nouveau rôle du Procuratore del Fisco, une nouvelle Commission (présidée par M. Glauco Giostra, professeur de droit pénal à l’Université de Rome «La Sapienza») a récemment été formée. Celle-ci doit élaborer un projet de réforme concret à brève échéance. Le rôle qui sera assigné au Procuratore del Fisco dépendra des décisions politiques prises quant au modèle de procédure (accusatoire ou inquisitoire, etc.).

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