Nations Unies

CCPR/C/128/3/Add.3

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

22 septembre 2020

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Rapport sur le suivi des observations finales du Comité des droits de l’homme *

Additif

Évaluation des renseignements sur la suite donnée aux observations finales concernant la Pologne

Observations finales (118 e  session) :

CCPR/C/POL/CO/7, 31 octobre 2016

Paragraphes faisant l’objet d’un suivi :

8, 24 et 32

Réponse sur la suite donnée aux observations :

CCPR/C/POL/CO/7/Add.1, 10 novembre 2017

Évaluations du Comité :

Des informations complémentaires sont nécessaires au sujet des paragraphes 8[C], 24[C] et 32[C]

Informations émanant d’organisations non gouvernementales :

Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris (Institut de culture juridique Ordo Iuris)

Paragraphe 8 : Cadre constitutionnel et juridique de l’application du Pacte

L’État partie devrait veiller au respect et à la protection de l’intégrité et de l’indépendance de la Cour constitutionnelle et de ses juges et veiller à donner effet à tous ses arrêts. Le Comité prie instamment l’État partie d’assurer immédiatement la publication officielle de tous les arrêts de la Cour, de s’abstenir de prendre des mesures qui l’empêchent de fonctionner efficacement, et de garantir la transparence et l’impartialité de la procédure de nomination de ses membres et leur inamovibilité, conformément à l’ensemble des critères de légalité prévus par le droit national et le droit international.

Résumé de la réponse de l’État partie

La Cour constitutionnelle est indépendante et rien ne l’empêche d’exercer ses fonctions. Les textes de loi adoptés fin 2016 sont conformes aux normes européennes relatives aux cours constitutionnelles et tiennent compte des recommandations formulées par la Commission européenne pour la démocratie par le droit.

Informations émanant du Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris

La législation polonaise en vigueur ne menace pas l’indépendance de la Cour constitutionnelle. Par une loi du 13 décembre 2016, toutes les réglementations antérieures relatives à la Cour ont été déclarées nulles et non avenues. Bien que la composition actuelle de la Cour fasse l’objet de controverses, la loi consacre la pleine indépendance des juges.

Les arrêts de la Cour qui n’ont pas été publiés concernent des lois abrogées.

Évaluation du Comité

[C] : Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni davantage d’informations sur les mesures qu’il a prises depuis l’adoption des observations finales pour veiller au respect et à la protection de l’intégrité et de l’indépendance de la Cour constitutionnelle et pour en faire publier tous les arrêts. Le Comité demande des précisions sur le contenu de la loi du 13 décembre 2016. Il renouvelle ses recommandations.

Paragraphe 24 : Interruption volontaire de grossesse

L’État partie devrait :

a)Veiller à ce que sa législation ne pousse pas les femmes à avoir recours à des avortements clandestins qui mettent leur vie et leur santé en danger. Il devrait entreprendre une étude et fournir des statistiques sur le recours à l’avortement illégal. Il devrait assurer l’accès effectif des femmes à l’avortement sûr et légal dans tout le pays et faire en sorte que les femmes ne soient pas obligées, à la suite de l’invocation de la clause de conscience ou de délais prolongés dans l’examen des plaintes pour refus de procéder à un avortement, de recourir à l’avortement clandestin qui met leur vie et leur santé en danger. À cet effet, il devrait notamment : i) à titre prioritaire, élaborer et mettre en œuvre des directives normalisées en matière de santé publique régissant la fourniture de services d’avortement légal dans tout le pays ; ii) améliorer l’efficacité du mécanisme d’orientation pour garantir l’accès à l’avortement légal dans les cas où les médecins invoquent la clause de conscience ; iii) faciliter l’accès aux tests génétiques prénataux afin de déterminer, conformément à la loi du 7 janvier 1993, si un fœtus souffre d’une malformation grave et irréversible ou d’une maladie incurable qui menace sa vie ; iv) veiller à l’examen en temps opportun des recours contre un refus de procéder à un avortement, y compris en réduisant encore sensiblement le délai qu’a la Commission des médecins pour rendre une décision ; v) veiller à ce que les mécanismes permettant d’obtenir des certifications du procureur et le règlement d’hôpitaux donnés ne fassent pas obstruction à l’accès à l’avortement légal ;

b) S’abstenir d’adopter toute réforme législative qui équivaudrait à une régression de la législation déjà restrictive sur l’accès des femmes à l’avortement légal et sûr ;

c) Accroître les programmes d’éducation et de sensibilisation aux droits en matière de santé sexuelle et procréative et faciliter l’accès effectif aux contraceptifs.

Résumé de la réponse de l’État partie

a)L’État partie rappelle les renseignements fournis dans son septième rapport périodique (CCPR/C/POL/7, par. 72) concernant l’absence de données officielles sur les avortements illégaux. Il rappelle également les informations fournies dans son septième rapport périodique (ibid., par. 76) concernant la « clause de conscience », selon laquelle un médecin peut s’abstenir d’assurer un service de santé contraire à sa conscience, sauf en cas d’urgence. Il rappelle en outre les informations fournies dans son septième rapport périodique (ibid., par. 79) concernant le droit des patients d’émettre des réserves au sujet de l’avis d’un médecin devant le Médiateur pour les droits des patients. La fonction de Commissaire aux droits des patients a été instituée par la loi y relative adoptée le 6 novembre 2008 et le droit d’émettre des réserves au sujet d’avis médicaux a été instauré afin de donner effet aux arrêts que la Cour européenne des droits de l’homme a rendus dans les affaires Tysiąc c. Pologne, R. R. c. Pologne et P. et S. c. Pologne.

Les tests prénataux sont régis par l’arrêté du Ministre de la santé en date du 6 novembre 2013. Ils permettent de déceler ou d’exclure des défauts ou des maladies chez l’enfant à naître, et on ne saurait partir du principe qu’ils sont pratiqués dans le seul but de fournir des motifs pour justifier un avortement.

b)Aucune information n’a été fournie ;

c)Aucune information n’a été fournie.

Informations émanant du Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris

a)Il ressort des recherches médicales que l’accès limité à l’avortement a pour effet positif de réduire le taux de mortalité maternelle. Un niveau de protection plus élevé de la vie de l’enfant s’accompagne d’une diminution du risque pour la vie et la santé de la mère.

D’après des estimations fiables, le nombre d’avortements illégaux se situe entre 7 000 et 13 000 par an, ce qui est nettement inférieur aux 80 000 à 200 000 avortements illégaux par an dont font état les médias.

L’article 53 de la Constitution dispose que droit à la liberté de conscience et de religion est garanti à chacun. L’accès aux tests prénataux en vue d’un avortement constitue une forme de discrimination à l’égard de l’enfant à naître fondée sur la suspicion d’une maladie ou d’un risque de handicap, ce qui est contraire aux normes constitutionnelles, internationales et législatives relatives à la protection des droits de l’enfant ;

b)Le 30 novembre 2017, le Comité d’initiative législative « Stop à l’avortement » a présenté un projet de loi visant à modifier la loi du 7 janvier 1993 sur la planification familiale, la protection du fœtus humain et les conditions dans lesquelles une grossesse peut être interrompue. Le projet de loi visait à interdire la discrimination à l’égard des enfants à naître dont on soupçonne qu’ils sont porteurs d’une maladie ou d’un risque de handicap ;

c)Aucune information n’a été fournie.

Évaluation du Comité

[C] a), b) et c) : Le Comité regrette que l’État ait répété les informations fournies dans son septième rapport périodique et qu’aucun renseignement n’ait été fourni sur les mesures prises depuis l’adoption des observations finales. Il renouvelle ses recommandations.

Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni davantage d’informations sur les mesures qu’il a prises pour éviter qu’une réforme législative rétrograde soit adoptée et demande des précisions sur le projet de loi présenté le 30 novembre 2017 tendant à modifier la loi du 7 janvier 1993. Il renouvelle ses recommandations.

Le Comité regrette que l’État partie n’ait fourni aucune information sur les mesures qu’il a prises depuis l’adoption des observations finales pour renforcer les programmes d’éducation et de sensibilisation aux droits en matière de santé sexuelle et procréative et faciliter l’accès effectif aux contraceptifs. Il renouvelle ses recommandations.

Paragraphe 32 : Droits des étrangers

L’État partie devrait :

a) S’abstenir de placer en détention les demandeurs d’asile et les migrants et appliquer d’autres solutions, notamment avant de les expulser et, dans les cas où les intéressés sont détenus, s’assurer que la détention est raisonnable, nécessaire et proportionnée compte tenu des circonstances, et réévaluer la mesure si elle est maintenue ;

b) Garantir que les enfants ne soient privés de liberté qu’en dernier recours et pour une période appropriée aussi brève que possible, et que leur intérêt supérieur soit pris en considération ;

c) Veiller à ce que l’accès à l’asile ne soit pas entravé pour des motifs fondés sur la discrimination religieuse ou d’autres motifs interdits par le Pacte, et mettre en place un système de filtrage approprié qui garantisse que les demandeurs d’asile ne seront pas renvoyés de force vers un pays où il y a des motifs sérieux de croire qu’ils courent un risque réel de préjudice irréparable, tels que ceux énoncés aux articles 6 et 7 du Pacte.

Résumé de la réponse de l’État partie

a)Le recours aux mesures de substitution a augmenté en 2016. Parallèlement, la durée moyenne de la détention a diminué. La légalité de la détention est examinée par les juges de l’application des peines des tribunaux de district ;

b)Les mineurs non accompagnés sont placés, sur décision d’un juge, dans des établissements de soins et d’enseignement ou dans des familles d’accueil, ou encore dans des centres surveillés s’ils ont au moins 15ans et n’ont pas demandé une protection internationale.

L’infrastructure des établissements surveillés pour les étrangers a été adaptée aux besoins des mineurs.

En mai 2017, le Gouvernement a commencé de coopérer avec Empowering Children Foundation en vue d’élaborer une stratégie de protection des enfants ;

c)Les gardes frontière soumettent toutes les demandes de protection internationale au chef du Bureau des étrangers dans un délai de quarante-huit heures après la réalisation, dans le cadre des procédures de contrôle aux frontières, d’une évaluation détaillée et personnelle visant à déterminer si les conditions d’entrée ont été remplies. En vue de garantir le plein respect du principe de non-refoulement, les gardes frontière ont pour ordre de s’efforcer de détecter les signes qui peuvent indiquer qu’un étranger est en quête de protection internationale, et sont formés à cela.

Informations émanant du Fundacja Instytut na rzecz Kultury Prawnej Ordo Iuris

a)Il ressort d’études indépendantes que la détention de migrants qui font l’objet d’une mesure d’expulsion est de moins en moins fréquente car les mesures non privatives de liberté sont privilégiées ;

b)Aucune information n’a été fournie ;

c)En 2016, 585 969 premiers permis de séjour ont été délivrés en Pologne. Même s’il arrive que des migrants rencontrent des difficultés au passage des frontières, la grande majorité d’entre eux se voient accorder le droit de rester en Pologne.

Évaluation du Comité

[C] a), b) et c) : Le Comité prend note de l’augmentation, en 2016, du recours aux mesures de substitution, mais souhaiterait recevoir des informations supplémentaires sur le nombre exact de demandeurs d’asile et de migrants détenus et sur les mesures de substitution utilisées au cours des quatre dernières années, entre autres. Il demande aussi un complément d’information sur les mesures que l’État partie a prises depuis l’adoption des observations finales pour s’assurer que la détention est raisonnable, nécessaire et proportionnée. Il renouvelle ses recommandations.

Le Comité prend note des informations fournies sur les enfants privés de liberté, mais regrette qu’aucun renseignement n’ait été communiqué sur les mesures prises depuis l’adoption des observations finales pour que les enfants ne soient pas privés de liberté. Il renouvelle ses recommandations.

Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni davantage d’informations sur les mesures qu’il a prises depuis l’adoption des observations finales pour veiller à ce que l’accès à l’asile ne soit pas entravé pour des motifs discriminatoires et pour respecter le principe de non-refoulement. Il renouvelle ses recommandations.

Mesures recommandées : Une lettre devrait être adressée à l’État partie pour l’informer de l’arrêt de la procédure de suivi. Les renseignements demandés devraient être communiqués par l’État partie dans son prochain rapport périodique.