Nations Unies

CCPR/C/127/2/Add.2

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

29 janvier 2020

Français

Original : anglais

Comité des droits de l’homme

Rapport sur le suivi des observations finales du Comité des droits de l’homme *

Additif

Évaluation des renseignements reçus au titre du suivi des observations finales concernant le Pakistan

Observations finales (120 e  session) :

CCPR/C/PAK/CO/1, 25 et 26 juillet 2017

Paragraphes faisant l’objet d’un suivi :

18, 20 et 34

Réponse de l’État partie :

CCPR/C/PAK/CO/1/Add.1, 16 mai 2019

Évaluation du Comité :

Des renseignements supplémentaires sont nécessaires sur les paragraphes 18[B][C], 20[C] et 34[C][B]

Informations émanant d’organisations non gouvernementales :

Centre pour la justice sociale, Justice Project Pakistan et Commission internationale de juristes

Paragraphe 18 : Peine de mort

L’État partie devrait rétablir le moratoire et envisager d’abolir la peine de mort et d’adhérer au deuxième Protocole facultatif se rapportant au Pacte. Si la peine de mort est maintenue, l’État partie devrait, à titre prioritaire, prendre toutes les mesures voulues :

a) Pour que la peine de mort ne soit prononcée que pour « les crimes les plus graves », commis avec l’intention de donner la mort, qu’elle ne soit en aucun cas obligatoire, que la grâce ou la commutation de peine puissent être accordées dans tous les cas, quelle que soit l’infraction commise, et que la peine de mort ne soit jamais imposée en violation des dispositions du Pacte, notamment en l’absence de procédure régulière, ni prononcée par des tribunaux militaires, en particulier à l’encontre de civils ;

b) Pour qu’aucune personne âgée de moins de 18 ans au moment de l’infraction ne soit condamnée à la peine de mort et que les personnes accusées d’une infraction passible de la peine capitale bénéficient d’une procédure de détermination de l’âge qui soit rigoureuse et indépendante et soient traitées comme des enfants dès lors que des doutes subsistent quant à leur âge au moment de l’infraction ;

c) Pour qu’aucune personne présentant un handicap psychosocial ou mental grave ne soit condamnée à mort ou exécutée, y compris en mettant en place un mécanisme indépendant chargé d’examiner tous les cas où il existe des raisons de croire que des détenus condamnés à mort sont atteints d’un tel handicap et de réexaminer l’état de santé mentale de tous les condamnés à mort ;

d) Pour que le protocole d’exécution soit conforme aux normes internationales des droits de l’homme et que les exécutions soient menées conformément au protocole établi ;

e) Pour que les travailleurs migrants pakistanais condamnés à mort à l’étranger bénéficient de services consulaires et juridiques suffisants tout au long de la procédure judiciaire.

Résumé de la réponse de l’État partie

a)L’État partie a répété ce qu’il avait dit dans sa réponse à la liste de points (CCPR/C/PAK/Q/1/Add.1, par. 21 à 23), à savoir : que sa politique concernant la peine de mort était conforme à la Constitution et à la législation nationale ainsi qu’aux normes internationales ; qu’il avait décidé de lever le moratoire parce qu’un consensus national s’était dégagé en ce sens à la suite d’un attentat terroriste effroyable qui avait fait plus de 150 morts parmi les élèves et les enseignants ; et que la peine de mort ne pouvait être imposée aux personnes de moins de 18 ans. L’État partie est en train d’examiner les dispositions du Code pénal et du Code de procédure pénale afin de voir s’il est possible de restreindre le champ d’application de la peine de mort. Les tribunaux militaires devaient cesser leur activité en janvier 2017, mais leur mandat a été prorogé de deux ans en vertu d’un amendement constitutionnel et a expiré en mars 2019. Dans le cadre de 869 procédures au niveau des provinces, 59 prisonniers avaient été exécutés à la suite d’une procédure judiciaire régulière. L’État partie a mentionné le pouvoir de grâce dont disposait le Président à l’égard des condamnés à mort.

b)Aucune personne de moins de 18 ans n’a été condamnée à mort. La loi relative au système de justice pour mineurs a été adoptée en 2018. L’une de ses dispositions stipule que les personnes déterminent elles-mêmes leur âge, ce qui fait que c’est à l’accusation qu’il appartient désormais de faire la preuve du contraire.

c)Aucune information n’a été fournie.

d)Aucune information n’a été fournie.

e)Aucune information n’a été fournie.

Informations fournies par une organisation non gouvernementale

Justice Project Pakistan

a)Le Ministère de l’intérieur et le Ministère des droits de l’homme élaborent actuellement des règles et réglementations destinées à modifier la procédure de demande de grâce.

b)La loi relative au système de justice pour mineurs, adoptée en 2018, n’accorde pas le bénéfice du doute à l’enfant lorsque les éléments de preuve sont contradictoires ou non concluants. Des délinquants mineurs, comme Muhammad Iqbal, se trouvent toujours dans le couloir de la mort, en dépit de la notification présidentielle lui accordant, ainsi qu’à d’autres, une remise de peine.

c)Justice Project Pakistan et le Ministère du droit et de la justice mènent actuellement une étude sur la révision des règles pénitentiaires applicables au traitement des prisonniers souffrant de troubles mentaux.

d)Le Ministère du droit et de la justice a créé un groupe de travail, qui comprend des représentants de la société civile, pour réviser le Règlement pénitentiaire national.

e)En mars 2018, le Gouvernement a approuvé un accord de transfèrement de prisonniers avec la Chine et l’Arabie Saoudite, mais cet accord doit encore être approuvé par le Cabinet fédéral.

Évaluation du Comité

[B] a) : Notant que l’État partie examine les dispositions juridiques en vigueur pour voir s’il est possible de restreindre le champ d’application de la peine de mort, le Comité souhaiterait en savoir plus à cet égard, notamment sur les mesures concrètes prises ou prévues pour garantir que la peine de mort n’est appliquée que pour les « crimes les plus graves » commis dans l’intention de tuer. Il note également que le Président a le pouvoir de gracier les prisonniers condamnés à mort, mais demande des précisions sur : a) le nombre de peines de mort prononcées ces deux dernières années ; b) le nombre de grâces accordées par le Président et de peines capitales commuées ces deux dernières années ; et c) la question de savoir si un condamné à mort peut bénéficier d’une grâce ou si sa peine peut être commuée, quel que soit le crime commis. Le Comité prend note du fait qu’il a été mis fin à l’activité des tribunaux militaires en mars 2019, mais déplore que 59 prisonniers ont été exécutés après avoir été condamnés par ces tribunaux. Il demande si des civils ont été condamnés à la peine de mort par les tribunaux militaires.

[C] b), c), d) et e) : Le Comité prend note des informations communiquées par l’État partie concernant l’interdiction de la peine de mort pour les personnes de moins de 18 ans et la promulgation en 2018 de la loi relative au système de justice pour mineurs, qui prévoit une procédure pour la détermination de l’âge. Il demande des renseignements sur le nombre de personnes faisant actuellement l’objet d’une condamnation à mort pour des crimes qu’elles ont commis avant l’âge de 18 ans et sur le nombre de sursis à exécution prononcés pour les personnes de moins de 18 ans condamnées à mort, et souhaiterait savoir si la loi a été pleinement appliquée, c’est-à-dire si des personnes de moins de 18 ans ont été condamnées à mort depuis son adoption, et quelles mesures ont été prises pour faire appliquer la procédure de détermination de l’âge prévue par la nouvelle loi relative au système de justice pour mineurs.

Le Comité regrette qu’aucune information n’ait été fournie sur les mesures destinées à garantir qu’aucune personne présentant un handicap mental ou psychosocial grave ne soit condamnée à mort ou exécutée, sur le protocole d’exécution et sa conformité avec les normes internationales, et sur les travailleurs migrants pakistanais condamnés à mort à l’étranger. Le Comité renouvelle sa demande d’informations et réitère sa recommandation.

Paragraphe 20 : Disparitions forcées et exécutions extrajudiciaires

L’État partie devrait ériger la disparition forcée en infraction pénale et mettre fin à la pratique des disparitions forcées et de la détention secrète. Il devrait également revoir le règlement de 2011 relatif au soutien au pouvoir civil en vue de l’abroger ou de le mettre en conformité avec les normes internationales. Il devrait également veiller à ce que toutes les allégations de disparitions forcées et d’exécutions extrajudiciaires fassent rapidement l’objet d’enquêtes approfondies, à ce que tous les auteurs soient poursuivis et condamnés à des peines proportionnelles à la gravité des infractions commises, à ce que les familles des personnes disparues, leurs avocats et les témoins soient protégés, et à ce qu’un mécanisme soit mis en place pour qu’une réparation intégrale et rapide puisse être accordée aux victimes et à leur famille. Il devrait en outre renforcer l’autorité et les capacités financières et humaines de la Commission d’enquête sur les disparitions forcées pour qu’elle puisse remplir ses fonctions de manière efficace.

Résumé de la réponse de l’État partie

L’État partie a répété ce qu’il avait dit dans sa réponse à la liste de points s’agissant de la création de la Commission d’enquête sur les disparitions forcées (CCPR/C/PAK/Q/1/ Add.1, par. 27 à 33). Il a indiqué qu’à la date du 31 mars 2018, 4 929 cas de disparitions forcées avaient été enregistrés : 3 219 cas avaient été réglés entre 2011 et 2018 et 1 710 faisaient toujours l’objet d’une enquête en février 2018. Il a déclaré que le règlement de 2011 relatif au soutien au pouvoir civil avait rendu punissable le recours excessif ou abusif à la force pendant des opérations. Les personnes appréhendées pendant des opérations étaient placées dans des centres d’internement déclarés et signalés. Leur cas était régulièrement examiné par des conseils de surveillance. La loi contenait des dispositions exhaustives sur les conditions de détention, la déradicalisation et la libération des détenus, ainsi que sur le règlement des cas.

Informations fournies par une organisation non gouvernementale

Commission internationale de juristes

L’État n’a pas encore reconnu les disparitions forcées comme une infraction distincte. Il les enregistre comme des enlèvements, des séquestrations ou des détentions secrètes illégales. En août 2019, l’ordonnance relative au soutien au pouvoir civil dans la province de Khyber Pakhtunkhwa a conféré des pouvoirs très étendus aux membres des forces armées sur tout le territoire de cette province. En septembre 2019, pas un seul auteur de disparition forcée n’avait été traduit en justice. Le mandat de la Commission d’enquête sur les disparitions forcées a été prolongé jusqu’en septembre 2020, mais la Commission n’est plus compétente pour enregistrer les premiers rapports d’information une fois que la victime est retrouvée. La détention secrète n’entre pas dans la définition de la disparition forcée que la Commission utilise, ce qui exclut les cas de disparition forcée autorisée par l’État.

Évaluation du Comité

[C] : Le Comité prend note des informations communiquées par l’État partie mais regrette que les mesures décrites aient été prises avant l’adoption des observations finales. Tout en prenant note des statistiques fournies par l’État partie, il regrette qu’aucun renseignement n’ait été donné sur les mesures concrètes prises depuis l’adoption des observations finales pour faire en sorte que tous les cas de disparitions forcées et d’exécutions extrajudiciaires allégués donnent rapidement lieu à des enquêtes approfondies et que les victimes obtiennent une indemnisation adéquate. Le Comité demande aussi des informations sur : a) les mesures prises pour ériger la disparition forcée en infraction pénale et pour mettre fin aux pratiques de la disparition forcée et de la détention au secret ; b) la question de savoir si l’État partie a l’intention d’abroger le règlement de 2011 relatif au soutien au pouvoir civiloude le mettre en conformité avec les normes internationales; c) les mesures adoptées pour faire en sorte que tous les auteurs d’infractions soient poursuivis et sanctionnés par des peines proportionnelles à la gravité de ces infractions ; d) les mesures prises pour garantir la protection des familles des personnes disparues, de leurs avocats et des témoins ; e) les mesures prises pour mettre en place un mécanisme permettant aux victimes et à leur famille d’obtenir une réparation intégrale et rapide ; f) les mesures prises depuis l’adoption des observations finales pour renforcer encore l’autorité et les moyens (financiers et humains) de la Commission d’enquête sur les disparitions forcées ; et g) les cas traités par la Commission d’enquête sur les disparitions forcées.

Paragraphe 34 : Liberté de religion, de conscience et de conviction

L’État partie devrait :

a) Abroger toutes les dispositions législatives relatives au blasphème ou les modifier conformément aux prescriptions strictes du Pacte, y compris celles qui sont développées au paragraphe 48 de l’observation générale n o  34 (2011) du Comité, sur la liberté d’opinion et la liberté d’expression ;

b) Faire en sorte que quiconque incite ou se livre à la violence contre autrui sur la base d’allégations de blasphème, ou porte de fausses accusations de blasphème soit traduit en justice et dûment sanctionné ;

c) Prendre toutes les mesures nécessaires pour offrir une protection adéquate à tous les juges, procureurs, avocats et témoins concernés par des affaires de blasphème ;

d) Faire en sorte que toutes les affaires de discours haineux et de crimes motivés par la haine donnent rapidement lieu à des enquêtes approfondies et que les auteurs des faits soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, sanctionnés ;

e) Réviser les manuels et les programmes scolaires afin d’en supprimer tous préjugés religieux et d’y intégrer l’éducation aux droits de l’homme, et continuer à réglementer les madrassas ;

f) Se conformer pleinement à l’arrêt rendu par la Cour suprême le 19 juin 2014.

Résumé de la réponse de l’État partie

a)L’État partie a répété ce qu’il avait dit dans sa réponse à la liste de points (CCPR/C/PAK/Q/1/Add.1, par. 68). Diverses mesures ont été adoptées dans le cadre d’un processus consultatif pour contrôler les abus dans l’utilisation de la loi sur le blasphème. Il s’agissait dans l’ensemble de favoriser un consensus entre toutes les parties prenantes pour déterminer les faiblesses de la loi et y remédier de façon à empêcher que de tels abus se reproduisent. Le Ministère de l’intérieur a introduit, avec l’approbation du Cabinet fédéral, des modifications au règlement de l’Agence fédérale d’enquête en vertu desquelles cette dernière a compétence pour examiner toute plainte au titre des articles 295-A, 295-C, 298 et 298-A du Code pénal et empêcher les utilisations abusives de la loi sur le blasphème, parallèlement aux services de police provinciaux. L’État partie a décrit les autres garanties mises en place pour empêcher les abus de cette loi.

b)L’État partie a répété ce qu’il avait dit dans sa réponse à la liste de points (CCPR/C/PAK/Q/1/Add.1, par. 72) en ce qui concerne la violation de la loi sur le blasphème. Il a par ailleurs évoqué une affaire portée devant la Cour suprême en 2002 (PLD 2002 SC 1048), dans laquelle le principe du bénéfice du doute avait été invoqué et considéré comme une règle d’or et une règle de prudence. Des statistiques ont été fournies sur les cas de blasphème enregistrés dans les provinces du Pendjab, du Sind et du Khyber Pakhtunkhwa au cours de la période 2011‑2015. Il a été souligné que nul n’avait été exécuté à ce jour sur la base d’allégations de blasphème. L’arrêt rendu par la Cour suprême en 2018 dans l’affaire Asia Bibi est très utile pour améliorer encore les mesures juridiques et administratives concernant l’application de la loi sur le blasphème.

c)Aucune information n’a été fournie.

d)Les droits et intérêts des minorités sont protégés au Pakistan. La discrimination fondée sur l’origine ethnique n’est pas un phénomène répandu dans la société pakistanaise. L’État partie a mentionné les garanties prévues par la Constitution pour protéger les droits des minorités ainsi que les mesures législatives et les politiques traduisant les principes constitutionnels dans les faits. Il a aussi évoqué les dispositions du Code pénal concernant les atteintes aux droits fondamentaux des minorités, l’ordonnance de la police de 2002, qui contient dans son chapitre II des dispositions visant à assurer la protection des droits des catégories vulnérables de la société, et les dispositions relatives aux médias électroniques.

e)En mai 2019, le Cabinet fédéral a approuvé un programme d’enseignement uniforme pour tous les établissements d’enseignement du pays, qui comptent 30 000 madrassas. En février 2018, la question des droits de l’homme et de la tolérance est devenue un sujet à part entière dans le programme obligatoire des études pakistanaises/études islamiques au niveau du Bachelor of Arts et du Bachelor of Science, et ce, à compter de l’année universitaire commençant en 2018. Une campagne publique d’information sur l’éducation et la sensibilisation aux droits de l’homme a été lancée dans le cadre du plan d’action pour les droits de l’homme de 2016, avec des séminaires et des annonces dans la presse écrite et électronique. Elle est dirigée vers le grand public, la société civile, les chercheurs, les milieux universitaires, les étudiants, les fonctionnaires et différentes catégories de la société. Le plan d’action pour les droits de l’homme prévoit des mesures destinées à lutter contre les discours de haine et les contenus extrémistes et contre la persécution religieuse, à favoriser l’enregistrement et la réglementation des madrassas et à interdire l’apologie du terrorisme et des organisations terroristes dans la presse écrite et électronique. À cet égard, 1 373 cas de discours de haine ou de publication de contenus haineux ont été enregistrés.

f)La Cour suprême du Pakistan, dans son arrêt décisif du 19 juin 2014 rendu dans le cadre de la procédure qu’elle a ouverte de sa propre initiative au titre de l’article 184 3) de la Constitution sur la base d’une lettre d’une ONG évoquant l’attaque perpétrée contre une église de Peshawar, a clairement considéré que la profanation de lieux de cultes de minorités était une infraction au regard de cet article.

Informations émanant d’organisations non gouvernementales

Centre pour la justice sociale

a)Des dispositions visant à prévenir une utilisation excessive et abusive de la loi sur le blasphème sont envisagées, mais aucune mesure concrète n’a été prise et l’efficacité des dispositions en question n’a pas été pratiquement évaluée. Les garanties adoptées pour prévenir les abus dans l’utilisation de la loi sur le blasphème sont insuffisantes. Dans la pratique, le commissaire de police ouvre rarement des enquêtes.

b)En février 2017, le Parlement a adopté un amendement qui porte de six mois à cinq à sept ans la peine sanctionnant les fausses accusations. Cet amendement s’est avéré inefficace et n’a pas permis de lutter contre l’utilisation abusive de la loi sur le blasphème, comme plusieurs cas l’ont montré depuis qu’il est entré en vigueur.

c)Au moins 75 personnes ont été victimes d’exécution extrajudiciaire pour blasphème présumé jusqu’en 2017, les auteurs de ces crimes demeurant impunis. D’autres personnes ont été placées en détention, souvent à l’isolement.

d)Les mesures visant spécialement à lutter contre la haine et les persécutions religieuses ont été relativement peu appliquées et des progrès sont attendus dans ce domaine. L’action entreprise en 2015 par les pouvoirs publics pour faire appliquer dans les provinces et les territoires fédéraux la loi portant réglementation des systèmes de sonorisation a perdu de sa dynamique.

e)Le Gouvernement fédéral et le gouvernement du Pendjab ont adopté des lois qui rendent obligatoire l’enseignement du Coran dans les écoles publiques aux niveaux primaire et secondaire, de la première à la douzième classe. Les élèves des minorités religieuses ont cependant la possibilité d’étudier leur religion. L’État partie s’est engagé à réglementer les séminaires religieux mais les progrès ont été limités, en particulier en ce qui concerne la mise en œuvre du plan d’action national.

f)Les progrès enregistrés dans l’application de l’arrêt de la Cour suprême du 19 juin 2014 ont été très limités. Les mesures les plus importantes ordonnées par la Cour, comme la création d’un conseil national pour les minorités, n’ont pas été appliquées par le gouvernement fédéral et les gouvernements provinciaux.

Évaluation du Comité

[C] a), b), c), d) et f) : Le Comité prend note des mesures prises pour déterminer les faiblesses et les abus de la loi sur le blasphème, mais il souhaiterait savoir quand et dans quelle mesure les parties prenantes ont été consultées et à quelles conclusions la concertation a abouti. Le Comité demande aussi des informations sur les mesures précises qui ont été prises depuis l’adoption des observations finales du Comité pour abroger toutes les dispositions sur le blasphème ou les mettre en conformité avec les strictes prescriptions du Pacte.

Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie mais regrette l’absence de renseignements sur les mesures prises depuis l’adoption des observations finales. À cet égard, le Comité demande des informations sur l’application de l’amendement législatif de 2017 portant de six mois à cinq à sept ans la durée de la peine sanctionnant les fausses accusations. Il demande également des informations sur les mesures prises pour faire en sorte que quiconque incite ou se livre à la violence contre autrui sur la base d’allégations de blasphème, ou porte de fausses accusations de blasphème, soit traduit en justice et dûment sanctionné.

Le Comité prend note avec préoccupation des informations selon lesquelles 75 personnes auraient été tuées sur la base d’allégations de blasphème sans que les auteurs de ces actes soient punis et il demande des renseignements à cet égard. Le Comité regrette qu’aucune information n’ait été fournie sur les mesures prises pour offrir une protection adéquate aux juges, procureurs, avocats et témoins concernés par des affaires de blasphème. Le Comité renouvelle sa demande d’informations et réitère sa recommandation.

Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie mais regrette l’absence de renseignements sur les mesures prises depuis l’adoption des observations finales. Le Comité souhaiterait savoir quelles mesures ont été adoptées pour faire en sorte que les affaires de discours haineux et de crimes motivés par la haine donnent rapidement lieu à des enquêtes approfondies et à ce que les auteurs des faits soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, sanctionnés. Le Comité demande des informations sur le nombre d’enquêtes ouvertes, de poursuites engagées et de condamnations prononcées ainsi que sur les peines imposées aux auteurs de tels faits ces trois dernières années.

Le Comité regrette l’absence de précisions concernant l’application de l’arrêt de la Cour suprême du 19 juin 2014.Le Comité renouvelle sa demande d’informations et réitère sa recommandation.

[B] e) : Le Comité salue l’adoption d’un programme d’enseignement uniforme dans tous les établissements d’enseignement, qui comptent 30 000 madrassas, et l’inclusion de la question des droits de l’homme et de la tolérance comme sujet à part entière dans le programme obligatoire des études pakistanaises/études islamiques à compter de l’année universitaire commençant en 2018. Le Comité demande des renseignements sur les mesures prises pour réviser les manuels scolaires afin d’en supprimer tous préjugés religieux et souhaiterait savoir si le programme d’enseignement uniforme actuel est appliqué dans toutes les madrassas.

Mesures recommandées : Une lettre devrait être adressée à l’État partie pour l’informer de l’arrêt de la procédure de suivi. L’État partie devrait communiquer les renseignements demandés dans son prochain rapport périodique.