Examen des rapports soumis par les États partiesen application de l’article 18 de la Convention

Septième et huitième rapports périodiques des États partiesattendus en 2013

Additif

* Le présent document n’a pas été revu par les services d’édition.

France(Nouvelle-Calédonie) *

[Date de réception : 14 février 2014]

Le présent document présente une synthèse du rapport complet sur la mise en œuvre de la Convention sur l’Élimination de toutes les formes de Discrimination à l’Égard des Femmes en Nouvelle-Calédonie, remis à la France en décembre 2013.

Première partie : le contexte de la Nouvelle-Calédonie

1.Données démographiques

La Nouvelle-Calédonie compte 245 580 habitants, recensés en 2009 (statistiques ISEE), dont 121 056 femmes (49,3%) et 124 524 hommes (50,7%). La capitale, Nouméa, est la principale commune et la seule grande ville. Elle compte 97 579 habitants. Le Grand Nouméa (avec les communes voisines de Païta, Dumbéa et Mont-Dore) compte 163 723 habitants. Deux habitants de Nouvelle-Calédonie sur trois vivent dans l’agglomération du Grand Nouméa. Trois sur quatre sont nés en Nouvelle-Calédonie. Deux sur cinq appartiennent à la communauté kanak (40%). La deuxième communauté la plus représentée est celle des Européens, 29%. Suivent les Wallisiens et Futuniens, avec 8,7 %. Regroupées, les autres communautés identifiées représentent 7 % de la population totale (Tahitiens, Indonésiens, Vietnamiens, Vanuatais, autres Asiatiques).

En 2009, la moitié des Calédoniens ont moins de 30 ans. L’évolution de l’espérance de vie à la naissance témoigne de l’allongement de la vie : elle est passée de 70 à 76 ans entre 1990 et 2007.

2.Contexte politique et juridique

La Nouvelle-Calédonie bénéficie d ’ un statut particulier défini par le t itre XIII de la Constitution («  Dispositions transitoires relatives à la Nouvelle-Calédonie ») qui l ’ exclut du champ des collectivités territoriales et la dote d ’ une organisation adaptée à son identité propre constituant un modèle original, inventé pour définir un partage de souveraineté avec la France. La Nouvelle-Calédonie est ainsi une collectivité territoriale à statut particulier au sein de la République française (collectivité sui generis de la République française). De l’Accord de Nouméa, découle la loi organique no 99-209 du 19 mars 1999 qui définit l’organisation des compétences du territoire et la reconnaissance, dans certaines compétences, d’un pouvoir législatif reconnu par les articles 76 et 77 de la Constitution

La spécificité du statut particulier de la Nouvelle-Calédonie tient au fait qu’il prend en compte et reconnaît l’identité kanak, la notion d’un rééquilibrage économique et social du territoire. Les conséquences sont la mise en place des nouvelles institutions, l’établissement d’une citoyenneté calédonienne au sein de la nationalité française, un transfert progressif et irréversible des compétences de l’État vers la Nouvelle-Calédonie, et une consultation sur l’accession à une pleine souveraineté (entre 2014 et 2018).

Les institutions actuelles comprennent notamment le Congrès, qui est l’assemblée délibérante de la Nouvelle-Calédonie et qui vote les délibérations et les lois du pays, le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, exécutif de la Nouvelle-Calédonie qui est élu par le Congrès, qui arrête les projets de délibérations et de lois du pays à soumettre au Congrès, et les Provinces, au nombre de trois (Province Sud, Province Nord et Province des Iles Loyauté), et sont compétentes dans toutes les matières qui ne sont pas explicitement réservées à l’État, à la Nouvelle-Calédonie ou aux communes. D’autres institutions ont également été créées conformément à la loi organique (Sénat coutumier, Conseil économique et social, Comité consultatif des mines et Conseil des mines).

La loi organique no 99-209 du 19 mars 1999 organise la répartition des compétences entre les différentes institutions locales. Elle dispose des modalités de transferts progressifs de compétences de l’État à la Nouvelle-Calédonie. Depuis vingt ans, la Nouvelle-Calédonie poursuit une politique de rééquilibrage économique, social et culturel entre les Provinces avec un double enjeu : consolider une économie stable dans un contexte d ’ indépendance institutionnelle progressive envers la France métropolitaine, et maintenir un climat social apaisé entre les diverses communautés pour construire un « destin commun ».

Il existe trois statuts civils reconnus : le statut civil de droit commun, le statut civil coutumier (pour les Kanak) et le statut civil particulier (pour les Wallisiens et Futuniens).

Institué par un arrêté du 21 juin 1934, le statut civil coutumier est régi par une délibération du 3 avril 1967, complétée par la loi organique du 19 mars 1999. En matière de statut civil, selon l’article 75 de la Constitution française, les citoyens qui ont un statut personnel le conservent tant qu’ils n’y ont pas renoncé.

Le statut civil est défini à la fois par les personnes auxquelles il s’applique et par les domaines qu’il recouvre. Il implique que les personnes de statut civil coutumier ne sont soumises à la coutume que pour le droit civil et rien que le droit civil (état civil, nom, prénom, filiation, successions, rupture du lien du mariage…). Mais la coutume ne s’applique qu’aux rapports entre les personnes de statut civil coutumier. Si l’une des personnes est de droit commun, ce dernier prime. En cas de renonciation, ils passent alors sous statut civil de droit commun.

3.Situation économique

Le produit intérieur brut de la Nouvelle-Calédonie est estimé, pour l ’ année 2010, à 812,098 milliards de francs CFP, soit 6,805 milliards d ’ euros environ. En 2008, le PIB par habitant est estimé à 3 millions de francs CFP (environ 25 000 euros). La structure même de l’économie calédonienne est proche de celle des pays les plus développés puisque le secteur tertiaire représente près de 80 % de la création de richesse. Un tiers de cette valeur ajoutée émane du secteur public, soit une part comprise entre 20 % et 30 % du PIB depuis les années 1980. Dans la zone Pacifique, la Nouvelle-Calédonie se classe en deuxième position en termes de PIB par habitant. Elle se situe entre l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Le nickel et le tourisme sont deux puissants moteurs de l’économie calédonienne. Les réserves estimées de nickel situent le pays au 3e ou 4e rang mondial. En 2011, la montée en puissance de l’usine du Sud et la construction de l’usine du Nord ont stimulé l’activité directe et indirecte, notamment dans le BTP. Le nickel est à l’origine à la fois de la poussée d’exportations mais aussi de l’envol des importations. Cette ressource naturelle représente plus de 90  % des exportations du pays. Le commerce occupe également une place importante avec 10% à 12 % du PIB (soit un niveau comparable à celui de la Métropole). Les autres services marchands, presqu’exclusivement destinés à la consommation locale, sont très dynamiques et témoignent d’un niveau de consommation élevé.

4.Description des institutions gouvernementales et non gouvernementales qui favorisent et défendent les intérêtsde la promotion de la femme

Au niveau institutionnel, le premier service aux droits des femmes a été créé en 1980 auprès du Haut-commissariat. Suite aux Accords de Matignon, il laissera la place en 1988 à la création de services provinciaux des droits des femmes et de la condition féminine. Aujourd’hui, à l’exception du Sénat Coutumier, toutes les institutions du pays disposent de commissions ou de services visant la prise en compte et la promotion des droits des femmes. La portée des actions des différents mécanismes institutionnels de promotion de la femme s’appuie sur la répartition des compétences issue de la loi organique du 19 mars 1999. Ainsi, selon l’organisation institutionnelle prévue par cette loi, c’est aux provinces que revient la compétence générale en matière de condition féminine. Les provinces Sud, Nord et Iles disposent chacune d’une commission de la condition féminine, regroupant des élus chargés de définir leurs politiques en matière de condition féminine, et de services qui les mettent en œuvre sur le terrain, en collaboration avec les associations de femmes et des partenaires du développement. Au Gouvernement, un Secteur de la Condition féminine a été créé en 2004. Il est chargé d’élaborer une politique en faveur de la condition féminine, visant à éliminer toute forme de discrimination à l’égard des femmes, à accroître les garanties d’égalité entre les hommes et les femmes dans les domaines économique, politique, professionnel, éducatif, social, sanitaire et culturel, et à s’assurer que les droits des femmes sont respectés et pris en compte. La direction de la Condition féminine du gouvernement, créée en 2010, met en œuvre la politique décidée par le secteur de la condition féminine du gouvernement. Ce qui est décidé au niveau du gouvernement n’a pas nécessairement d’impact sur les politiques des provinces qui ont compétence pour déterminer leurs actions sur leur territoire. Un Observatoire de la Condition Féminine, instance pluri partenariale de concertation et de mesure de la condition féminine a été créé en 2006.

Le Conseil économique et social de la Nouvelle-Calédonie dispose d’une commission de la femme, créée en 2011,qui peut être saisie par le gouvernement sur tout projet de texte concernant les femmes ou s’autosaisir pour réaliser des études et émettre des propositions et des vœux. Enfin, le Congrès de la Nouvelle-Calédonie a créé en 2013 une commission des droits de la femme et de la famille, qui se saisira de problématiques spécifiques aux femmes et favorisera le vote des lois en faveur de l’émancipation des femmes;

C’est dans les années 70 que les premiers mouvements de femmes se sont mobilisés pour faire entendre leur voix et revendiquer leur participation dans les changements que connaît le pays. De nombreuses associations sont créées et dirigées par des femmes. Ces associations mènent des actions de proximité tant en milieu urbain que rural et tribal.Certaines associations agissent sous l’égide des églises comme de la société laïque. Ces associations de femmes sont souvent regroupées en fédérations communales, notamment dans les Iles et en province nord. Ces fédérations communales sont représentées au sein de conseils de femmes présents dans chaque province. Le pays compte également quelques associations spécialisées, comme l’association Femmes et violences conjugales et l’association SOS violences sexuelles, ou encore l’Union des Femmes Francophones d’Océanie qui regroupe la voix des femmes de Nouvelle-Calédonie, de Wallis et Futuna, de Polynésie Française et du Vanuatu. Toutefois, il n’existe pas à proprement parler d’association féministe en Nouvelle-Calédonie.

Enfin, en matière de promotion de l’égalité entre les sexes, la Nouvelle-Calédonie bénéficie depuis de nombreuses années du soutien technique du Secrétariat Général de la Communauté du Pacifique Sud (CPS).

Seconde partie : examen en fonction des articlesspécifiques de la convention

1.Politiques et lois visant à mettre fin à la discriminationet à assurer l’épanouissement et la promotion de la femme(articles 1 à 3)

Le régime législatif et réglementaire applicable en Nouvelle-Calédonie est un régime spécifique.

Les conventions et instruments juridiques internationaux en faveur de l’égalité entre les hommes et les femmes ratifiés par la France s’appliquent de plein droit en Nouvelle-Calédonie. Depuis 1994, la Nouvelle-Calédonie est par ailleurs signataire de la Plateforme d’action du Pacifique en faveur des femmes et de l’égalité entre les sexes. Adapté aux réalités du Pacifique, cet engagement régional établit les priorités d’actions à mettre en œuvre en faveur de l’égalité et fait l’objet d’un examen régional tous les 3 ans, sous l’égide de la Communauté du Pacifique Sud.

Concernant les dispositions nationales, le principe de spécialité législative s’applique. Principe selon lequel les lois adoptées en France, à l’exception des « lois de souveraineté », ne sont pas applicables de plein droit sauf si elles y ont été expressément étendues. A ce titre, de nombreux textes en faveur de l’égalité hommes-femmes ont été étendus à la Nouvelle-Calédonie comme la loi sur la parité, la répression des discriminations de genre au travail, les dispositions en faveur de l’égalité professionnelle, à la maternité ou à l’adoption, la reconnaissance du harcèlement sexuel et moral au travail, ou la légalisation relative à l’IVG médicamenteuse.

Cependant, certaines dispositions, pourtant nécessaires, n’ont pas été étendues ou ne l’ont été que partiellement. C’est le cas pour la prise en charge des violences conjugales, la loi du 9 juillet 2010 n’étant que partiellement applicables. Il revient au Congrès d’adopter des résolutions demandant que soient complétées ou modifiées certaines dispositions législatives ou réglementaires en fonction des spécificités locales.

Certains textes sont en cours de finalisation : un projet de loi sur la dévolution successorale (droit coutumier kanak) est en phase de finalisation. Il prévoit de prendre en compte les spécificités coutumières locales et de favoriser la reconnaissance d’une place pour l’épouse bénéficiaire de la succession.

2.Mesures temporaires (actions affirmatives) en vue d’accélérer l’égalité entre hommes et femmes (article 4)

La Nouvelle-Calédonie bénéficie de l’application des lois françaises sur les quotas en politique (loi sur la parité) et d’une loi du pays concernant les quotas pour l’emploi des personnes handicapées. Il n’existe pas, dans la législation calédonienne, de mesures temporaires spéciales visant l’instauration d’une égalité de fait entre les hommes et les femmes en Nouvelle-Calédonie conformément à ce que prévoit la CEDEF.

3.Rôles des sexes et stéréotypes (article 5)

La construction sociale des sociétés océaniennes est marquée par une forte division sexuelle des rôles des hommes et des femmes.

Dans la société kanak en particulier, cette division sexuelle se retrouve notamment dans la coutume.

La coutume kanak n’est pas figée. Elle évolue dans le temps et dans l’espace et tente de s’adapter aux changements profonds que connaît la société kanak depuis l’arrivée des colons et des missionnaires. Elle doit également faire face aux changements liés aux évolutions politiques, économiques et juridiques que connaît la Nouvelle-Calédonie, lesquels impactent nécessairement la place et le rôle des femmes. Les femmes, suivant cette évolution, accèdent au monde du travail salarié, aux études, à la formation professionnelle, à la politique, et sont ainsi amenées à gérer de nouveaux rôles venant s’ajouter à ceux qu’elles géraient déjà dans la sphère familiale traditionnelle. Les hommes kanak ne s’opposent pas systématiquement aux revendications d’émancipation des femmes mais souhaitent que le changement se fasse au rythme du temps coutumier pour préserver les fondamentaux de la coutume. Mais selon les femmes kanak, seule une accélération du rythme du temps coutumier peut réguler les changements et préserver certains fondamentaux. Elles estiment nécessaire d’être présentes lors des discussions et des débats relatifs aux droits spécifiques les concernant aux côtés de leurs autorités coutumières. Certains sénateurs coutumiers défendent cette position, d’autres sont plus enclins à penser qu’elle risquerait de déstabiliser les fondements de la coutume et l’ordre social kanak si elle n’est pas maîtrisée. Des réunions et des rencontres avec des responsables coutumiers ont eu lieu en 2010 afin de recueillir leurs avis sur la présence des femmes au sein des institutions coutumières. Imaginer des procédures et des dispositifs dans ce sens fait partie de la réflexion menée par certaines autorités coutumières et les femmes.

Le Sénat coutumier entreprend depuis 2013 un travail sur le socle commun des valeurs kanak avec la participation des femmes. Ce travail permet de se pencher sur les impacts de l’évolution politique, socio-économique et juridique du pays sur l’organisation sociale traditionnelle kanak, notamment sur la répartition traditionnelle des rôles des hommes et des femmes, et sur la nécessaire évolution des réponses que doit apporter la coutume. Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, et notamment les services de la condition féminine, a participé à ces travaux.

Le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a par ailleurs engagé en 2010 une vaste campagne de promotion pour favoriser l’accès des femmes aux métiers « dits masculins », notamment dans les métiers de la mine et du BTP, secteurs particulièrement porteurs d’emploi.

4.Traite et prostitution des femmes (article 6)

En Nouvelle-Calédonie, il n’existe pas de trafic de femmes et d’exploitation de la prostitution connus, à l’image des grands pays. Cependant le phénomène de la prostitution est réel puisqu’une association de prostituées existe. À ce jour, aucune étude n’a été réalisée dans ce domaine, d’où l’absence de statistiques qui permettraient de mesurer ce phénomène naissant et de le traiter de manière adéquate.

5.Vie politique et publique (article 7)

En 2012, la commission de la femme du Conseil Économique et Social de Nouvelle-Calédonie s’est autosaisie d’une étude relative à la gouvernance des femmes calédoniennes et a livré un premier rapport d’étape relatif à l’exercice du pouvoir décisionnel des femmes d’un point de vue politique, institutionnel et administratif.

I.Les femmes en politique

Grâce à la loi sur la parité, le nombre de femmes dans les instances politiques en Nouvelle-Calédonie a fortement progressé depuis 2004. Votée en France le 6 juin 2000 et étendue à la Nouvelle-Calédonie, elle est appliquée pour la première fois en Nouvelle-Calédonie en 2004, lors des élections communales.

Selon une étude menée conjointement par la Communauté du Pacifique Sud et le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie en 2007, l’application de la loi sur la parité a eu pour effet une augmentation significative des femmes dans les institutions politiques, notamment au Congrès et dans les assemblées de provinces. Aux élections municipales de 2008, 5 femmes ont été élues maires sur les 33 communes que compte la Nouvelle-Calédonie.Aux élections territoriales de 2009, les femmes représentent 47% des élus aux assemblées de Provinces, 44% des membres du Congrès. Cependant, cette loi ne s’applique pas au niveau du gouvernement où les femmes sont encore très minoritaires (3 sur 11 membres). En 2012, pour la première fois en Nouvelle-Calédonie, une femme a été élue députée à l’Assemblée nationale de France. La même année, une femme a été portée à la présidence de la Province Sud. Ce qui constitue une véritable avancée en faveur de l’émancipation des femmes calédoniennes en politique et devrait motiver davantage les femmes à ambitionner de tels postes.

II.Femmes dans la fonction publique de la Nouvelle-Calédonie et de l’État

En 2011, selon l’ISEE, les femmes occupent 47 % des emplois de la fonction publique. 44 % des postes de cadres sont occupés par des femmes. En 2012, au niveau de la collectivité Nouvelle-Calédonie, les 3 secrétaires généraux sont des hommes. Le pourcentage des femmes occupant un poste de directrice est de 14,3 % et 40 % sont directrices adjointes. Les cheffes de service sont 46% et les cheffes de service adjointes sont 64 %. Enfin 55 % sont cheffes de bureau. Au haut-commissariat en 2012, les postes du secrétariat général sont très féminisés. La parité s’observe dans les postes au niveau du cabinet du haut-commissaire et une femme est conseillère diplomatique du haut-commissaire. Dans les subdivisions administratives, les trois commissaires délégués de la République sont des hommes. Une femme est secrétaire générale.

III.Femmes et instances représentatives (syndicats de salariés – fédérations,ordres ou syndicats professionnels – chambres consulaires)

Les femmes sont faiblement représentées à la présidence des instances représentatives : 15% au niveau des syndicats de salariés, 21% chez les syndicats et fédérations patronaux. Aucune femme n’est présidente d’une chambre consulaire.

Selon un sondage réalisé par le Mouvement des Entreprises de France en Nouvelle-Calédonie (MEDEF-NC) auprès de 58 entreprises en 2012, 23 entreprises déclarent avoir 39,7 % de femmes dirigeantes d’entreprises, 28,1 % de femmes dans leur CA et 31,6 % de femmes aux postes de direction. À plus grande échelle, les écarts risquent de se creuser davantage.

Il est à noter que 2 femmes assument la présidence et la vice-présidence du Syndicat Patronal de la Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises (CGPME). Par ailleurs, une femme a été secrétaire générale du MEDEF-NC et la direction de cette fédération est assurée actuellement par une femme.

Sur une dizaine de syndicats de travailleurs, 2 syndicats sont dirigés par des femmes.

Si la place des femmes dans les instances dirigeantes a tendance à évoluer ces dernières années, il manque cependant crûment de données statistiques.

Il est à noter que la loi Copé-Zimmerman du 27 janvier 2011, imposant une représentation équilibrée des femmes et des hommes dans les conseils d’administration et de surveillance des entreprises publiques ainsi que celles cotées en bourse, n’est pas applicable en Nouvelle-Calédonie.

IV.Participation aux organisations et associations non gouvernementales

En Nouvelle-Calédonie, les femmes s’investissent volontiers dans les organisations associatives. Qu’il s’agisse d’associations caritatives, culturelles, sportives ou au sein des églises, le mode associatif correspond bien au fonctionnement collectif des communautés océaniennes. Les femmes y trouvent un espace d’expression, d’échanges, de partage et d’action qui constitue un prolongement de leur vie communautaire, notamment hors de l’espace purement coutumier. C’est aussi en raison de la mutation de la société sur des questions émergentes comme celle de leurs droits spécifiques, de la scolarité, de l’insertion sociale et professionnelle de leurs enfants, de la politique, de leur émancipation économique et autres préoccupations au quotidien, qu’elles sont actives dans les associations ou dans les syndicats.

En Nouvelle-Calédonie, il n’existe pas de mouvement féministe à l’exemple des pays européens. Il n’existe pas non plus de mouvements des droits des femmes comme dans certains pays du Pacifique. Il apparait difficile pour les associations de femmes de se réunir autour de problématiques « universelles ». Selon les communautés, le combat des femmes ne se portent pas sur les mêmes objectifs, ce qui peut engendrer une division du mouvement des femmes.

6.Représentation et participation internationale (article 8)

Le statut institutionnel de la Nouvelle-Calédonie, régi par l’Accord de Nouméa de 1998 et la Loi organique de 1999, lui confère de larges compétences et institue en matière de relations internationales une souveraineté partagée avec l’État français. Cela implique que la Nouvelle-Calédonie, par l’intermédiaire du président du gouvernement, négocie directement, dans le respect des engagements internationaux de la République, des accords avec un ou plusieurs États, territoires ou organismes régionaux du Pacifique et avec les organismes régionaux dépendant des institutions spécialisées des Nations unies. Elle peut être membre, membre associé ou membre observateur d’organisations internationales, avec l’accord des autorités de la République. Enfin, elle dispose de représentations auprès de l’Union européenne et des États et territoires du Pacifique. La Nouvelle-Calédonie est ainsi dotée d’outils juridiques lui permettant d’élaborer sa propre politique extérieure, toujours dans le respect des obligations internationales de la France. Elle est par exemple membre à part entière d’organisations internationales et régionales comme la Communauté du Pacifique (CPS), le Programme Régional Océanien pour l’Environnement (PROE), l’Organisation océanienne de lutte contre le dopage (ORADO) et l’Association des Pays et Territoires d’Outre-mer (OCTA). Elle est de même membre associée du Forum des îles du Pacifique et de la Commission Économique et Social de l’Asie-Pacifique (CESAP). Si les femmes calédoniennes n’ont pas d’obstacles légaux à y représenter leur pays, elles ne sont pas systématiquement conviées à ces événements internationaux. Aussi, les intérêts et les priorités des femmes calédoniennes ne sont-ils pas toujours pris en compte dans les processus de négociation et les ententes régionales.

7.Nationalité (article 9)

Les Calédoniens ont la nationalité française. La nationalité française est essentiellement régie par les articles 17 à 33-2 du Code civil et par le décret no 93-1362 du 30 décembre 1993 (JO du 31 décembre 1993), modifié par l’article R.321-30-1 du Code de l’organisation judiciaire (JO du 17 mars 1998 et JO du 27 novembre 2003), par la loi n° 2006-911 du 24 juillet 2006 et la loi n° 2009-526 du 12 mai 2009. Ces décrets et lois s’appliquent à la Nouvelle-Calédonie.

8.Éducation (article 10)

I.Accès à l’éducation

La Nouvelle-Calédonie bénéficie d’une école gratuite et généralisée. Le taux d’alphabétisation des adultes dépasse les 96 % et le taux de scolarisation (tous niveaux confondus) avoisine les 89 %.

La population scolaire en 2012 dans les établissements publics et privés du premier degré, second degré et classes post-bac est d’environ 68 554 élèves (statistiques du Vice-Rectorat).

En 2012, les établissements scolaires du 1 er degré (public et privé) scolarisent 35 335 élèves, dont 48 % de filles et 52 % de garçons.Dans le second degré, le nombre total d’élèves est de 22 442, dont 49 % de filles et 51 % de garçons. À ces chiffres s’ajoutent 3 498 étudiants : 2 598 à l’Université de la Nouvelle-Calédonie (UNC), 108 à l’Institut universitaire de formation des maîtres (IUFM) et 792 en classes supérieures des lycées (techniciens supérieurs, classes préparatoires, études comptables et financières).

Les filles ont accès aux mêmes programmes scolaires que les garçons et présentent les mêmes examens que les garçons à tous les niveaux de l’enseignement. Les statistiques montrent que les filles réussissent mieux aux examens que les garçons de manière générale et notamment au baccalauréat.

L’enseignement dans les zones rurales profite autant aux filles qu’aux garçons tant sur le plan de l’accès que de la qualité. Aucune discrimination n’est faite aux filles concernant l’entrée dans les internats en milieu urbain et rural. Ces structures accordent les mêmes conditions de vie et de travail aux filles qu’aux garçons. Il n’existe aucune discrimination basée sur le sexe concernant l’accès aux services dans les établissements scolaires. Les filles autant que les garçons bénéficient de consultations gratuites auprès des personnels de la santé scolaire (médecins, infirmiers, psychologues, assistantes sociales). Il existe un égal accès aux cantines, aux études du soir en internat et aux loisirs.

En 2012, parmi les élèves inscrits en terminale, les filles sont majoritaires dans deux filières sur trois (bacs généraux et technologiques). On retrouve une surreprésentation des filles avec une prédominance dans la série générale (660 femmes pour 432 hommes) et un équilibre proche dans la filière professionnelle (835 femmes pour 838 hommes). À l’inscription, les lycéennes sont majoritaires dans seulement 19 spécialités sur 42 (avec une prédominance des spécialités lettres et tertiaires). Elles réussissent mieux que les hommes dans 31 spécialités sur 42 dont notamment les spécialités professionnelles techniques (maintenance, bâtiment…) lorsqu’elles y sont présentes. Le taux de réussite au baccalauréat est plus élevé parmi les femmes que parmi les hommes sauf dans la filière technologique puisqu’il est équivalent. Cet écart de réussite est le plus marqué dans la série professionnelle (12 points de différence). Une enquête réalisée en 2010 par l’Institut de développement des compétences en Nouvelle-Calédonie auprès d’élèves de terminale, donne des informations sur les secteurs de prédilection des filles : la comptabilité, l’enseignement, le secrétariat et la santé.

En 2012, les femmes poursuivant des études universitaires dans les licences et les masters sont plus diplômées que les hommes. Master ME (Métiers de l’enseignement) : femmes 63 %, hommes 37 %; licences LLSH (Lettres, langues et sciences humaines) : femmes 69,3 %, hommes 30,7 %; licences DEG (Droit, économie, gestion) : femmes 63,03 %, hommes 36,97 %. En revanche, les hommes sont plus diplômés dans les licences + DEUST Sciences et techniques et le Master LLSH.

Les femmes sont plus nombreuses à poursuivre les études à l’extérieur du pays après un master. Les hommes se dirigeant vers l’emploi.

II.Les dispositifs de soutien

Un système de bourses scolaires performant permet aux jeunes garçons comme aux jeunes filles de poursuivre une scolarité normale du primaire aux études supérieures. Il n ’ y a pas de disparité dans l ’ attribution des bourses scolaires, les filles en bénéficient autant que les garçons du moment que les demandes correspondent aux critères exigés (lieux de résidence, revenus familiaux, choix des études…).

La mise en place d ’ un juvénat il y a une vingtaine d’années permet de préparer des jeunes garçons et des jeunes filles au baccalauréat scientifique en internat. Cette préparation est très importante pour les filles qui généralement se destinent à des bacs littéraires ou ES. Les résultats au bac S sont très élevés (entre 80 % et 90 % de réussite) pour les élèves fréquentant cette structure. Les filles réussissent autant que les garçons.

D’autre part, la Province Sud a mis en place en 2011 cinq internats d ’ excellence. Ce dispositif d’accompagnement vise à promouvoir l’égalité des chances pour les élèves et les étudiants d’origine modeste et à favoriser la mixité sociale. L’internat d’excellence propose un enseignement de qualité par une pédagogie innovante et un accompagnement personnalisé renforcé. Un grand nombre de filles bénéficie de ces dispositifs.

Il existe depuis 1984 une Association de femmes diplômées de l ’ université (AFDU). Cette associationprésidée par une femme calédonienne depuis plus de vingt ans aide les étudiantes en difficulté sociale, financière et morale afin de les encourager et de les sécuriser dans leur cursus universitaire. Cette association a également organisé plus d’une centaine de conférences sur des thèmes locaux en relation avec la culture, l’économie, l’éducation, les droits des femmes et la condition féminine.

Pour ce qui est de l ’ abandon des études, l’étude INSERM de 2008 réalisée auprès de 1 400 jeunes souligne que parmi les 53 % des jeunes enquêtés qui ne sont pas scolarisés, un sur cinq (21 %) a quitté l’école sans diplôme. Il n ’ y a pas de différence significative entre les filles et les garçons sortis de l ’ école sans aucun diplôme.

III.Principaux obstacles rencontrés

Il n’existe plus de véritables freins pour les filles dans le système d’enseignement en Nouvelle-Calédonie. Les obstacles culturels ont été levés depuis longtemps et les freins matériels et logistiques n’existent pratiquement plus. Ce qui pourrait cependant être assimilé à un obstacle, c’est l’orientation massive des filles vers des disciplines moins porteuses d’emploi et moins rémunérées, comme celles du social, de l’éducation, de la santé, du secrétariat, de la gestion ou des filières littéraires ou linguistiques. L’orientation vers les filières techniques et technologiques reste encore très limitée pour les filles, alors que les secteurs économiques porteurs du développement de la Nouvelle-Calédonie relèvent de ces filières.

La Direction de l’enseignement de la Nouvelle-Calédonie se dit prête à entamer des mesures pour la révision des manuels scolaires en vue de la déconstruction des stéréotypes hommes-femmes et d’assurer la culture de l’égalité des sexes à l’école.

9.Emploi (article 11)

L’un des domaines les plus préoccupants en matière de discriminations envers les femmes en Nouvelle-Calédonie est celui de l’emploi et du travail.

En effet, la réalité montre que les filles réussissent mieux que les garçons dans les études. Elles sont plus diplômées, cependant elles ont plus de difficultés à trouver des emplois et sont très minoritaires dans les postes à responsabilité. Enfin, malgré un arsenal de lois, les femmes continuent de subir des inégalités de traitement souvent très subtiles dans ces domaines.

I.Les lois du pays du Code du travail

L’ensemble du droit du travail a été transféré à la compétence de la Nouvelle-Calédonie au 1er janvier 2000. Le Code du travail de Nouvelle-Calédonie est entré en vigueur le 1er mai 2008.

Le code du travail calédonien garantit l’égalité entre les femmes et les hommes, notamment dans les champs suivants : les discriminations et l’égalité professionnelle, le harcèlement moral et sexuel au travail, l’égalité de rémunération entre les femmes et les hommes, la protection de la grossesse, de la maternité et l’adoption et l’allaitement.

II.L’emploi

En Nouvelle-Calédonie, selon l’ISEE, le nombre total de salariés (tous métiers confondus) en 2011 est de 83 582, dont 55% d ’ hommes et 45% de femmes.

Taux d’emploi

La part des femmes dans la population active est passée de 31,8 % en 1969 à 43,4 % en 2009 et 45 % en 2011.L’élévation de leur niveau de formation, la croissance du secteur tertiaire, l’expansion du salariat, l’ouverture de certains métiers aux femmes mais également le désir accru d’émancipation ont favorisé la féminisation progressive du travail. À l’inverse, le taux d’emploi des hommes a peu évolué en vingt ans. Il demeure néanmoins encore à celui des femmes.

Cette féminisation s’est opérée de manière homogène entre les trois provinces. Elle concerne également toutes les communautés, par-delà les disparités de modes de vie.

Pourtant l’orientation vers des secteurs et des métiers peu porteurs prédispose les femmes à plus de difficultés lorsqu’elles se présentent sur le marché du travail et ce, malgré des niveaux de qualification souvent plus élevés que ceux des hommes.

Chômage et demande d’emploi

15 500 chômeurs ont été recensés en Nouvelle-Calédonie en 2009. En 2009, le taux de chômage s’établit à 14 % de la population active contre 16 % en 1989. Les taux de chômage restent très disparates d’une province à l’autre : 11,4 % pour la province Sud, mais 28,4 % pour la province Nord et 38,9 % pour la province des Iles Loyauté. La proportion de femmes parmi les chômeurs est passée de 40  % en 1989 à 52  % en 2009. Les femmes autochtones sont les femmes les plus touchées par le chômage (près de 40 %) pour seulement 10 à 15 % des autres. Cette situation est la conséquence directe d’un manque de qualification et de diplômes chez les femmes autochtones. L’isolement géographique de certaines tribus éloignées des bassins d’emploi et des pôles d’activités ne favorise pas non plus l’accès à l’emploi de ces femmes.

Les demandeurs d’emploi en 2009 sont au nombre de 6 981. 6 demandeurs d ’ emploi sur 10 sont des femmes. Ceci s’explique en partie par l’entrée massive des femmes sur le marché du travail « formel » ces dernières années. Un peu plus de la moitié des femmes en âge de travailler occupent un emploi, taux largement supérieur à celui rencontré dans le reste de la région Pacifique. En Nouvelle-Calédonie, les femmes en demande d ’ emploi présentent un niveau de formation supérieur à celui des hommes. Un tiers des femmes inscrites dans les services de placement ont un niveau bac ou supérieur au bac, contre 18 % des hommes; quant à l’absence de formation, elle concerne un peu plus du tiers des femmes et près de la moitié des hommes. Ce qui signifie que le vivier représenté par les femmes disponibles est potentiellement plus qualifié que celui représenté par les hommes.

Postes à responsabilités et salaires

Selon les données ISEE de 2011, il apparaît que les femmes salariées sont plus nombreuses sur des postes qui nécessitent au minimum un baccalauréat (54 %) que sur ceux qui requièrent un CAP/BEP (22 %). Pour les hommes, cette différence est moindre avec respectivement 45 % et 34 %.

Si on observe les emplois occupés, on constate que les postes de direction sont encore peu féminisés et que la partialisation du temps de travail touche plus les femmes que les hommes. En 2009, 2 cadres sur 5 sont des femmes contre moins d’1 sur 5 en 1989.Dans le secteur public comme dans le secteur privé, les femmes exerçant des postes à responsabilité gagnent en moyenne 25 % de moins que leurs homologues masculins. Entre 2007 et 2010, l’écart se creuse légèrement dans le secteur privé tandis qu’il se réduit dans le secteur public.

Secteurs d’activités

Une enquête prospective emploi-formation menée en 2011 permet d’identifier les secteurs d’activités occupés par les femmes salariées. On observe ainsi qu’un tiers (34 %) des femmes recensées exercent un des 10 métiers suivants : personnel polyvalent en restauration 5 %, secrétariat 5 %, soins infirmiers généralistes 5 %, nettoyage de locaux 4 %, comptabilité 3 %, personnel de caisse 3 %, opérations administratives 3 %, soins d’hygiène, de confort du patient 2 %, assistance auprès d’adultes 2 %, assistanat technique et administratif 2 %, autres métiers 66 %.

Entreprenariat

Au 31 décembre 2011, environ 4 000 entreprises individuelles sont tenues par des femmes et 2 800 par des hommes. Dans les 3 provinces, l’aide aux microprojets bénéficie presqu’autant aux hommes qu’aux femmes (hommes : 53 % et femmes : 47 %). Le soutien aux microprojets par l’Association pour le droit à l’initiative économique(ADIE) et Nouvelle-Calédonie Initiative (NCI) connaît un rééquilibrage progressif ces dernières années (hommes : 57 %; femmes : 43 %). En 2011, 903 hommes et 297 femmes ont reçu de l’aide à l’investissement par les provinces, l’ADIE et NCI. Ce qui représente 1 projet d’investissement aidé sur 4 porté par une femme.

Dispositifs d’accès à l’emploi

De nombreux dispositifs institutionnels et associatifs sont en place dans les différentes provinces pour l’accompagnement à la recherche d’emploi, l’orientation, l’insertion professionnelle, le placement, le reclassement, et la création d’entreprises. Le Centre d ’ actions pour l ’ emploi (CAP Emploi) en province Nord, la Mission d ’ insertion des jeunes (MIJ) et le Service de l ’ emploi de la Province Sud, l’ EPEFIP (Établissement provincial de l’emploi, de la formation et de l’insertion professionnelle) pour les Iles loyauté. Certains de ces organismes favorisent l’insertion professionnelle des femmesau travers de programmes spécifiques d’accompagnement vers l’emploi.

III.La formation professionnelle

Selon le Code du travail de Nouvelle-Calédonie, la formation professionnelle permanente en Nouvelle-Calédonie s’inscrit dans le cadre du principe de l’obligation nationale d’éducation permanente.

En Nouvelle-Calédonie, environ 2 500 personnes entrent en moyenne chaque année en formation professionnelle continue (1 600 en FPC et 900 en apprentissage). Depuis 2006, la part des femmes est en constante progression. Entre 2006 et 2012, elle est ainsi passée de 32  % à 45  % des effectifs inscrits. La mise en relation du nombre de demandeuses d’emploi avec le nombre de femmes entrées en formation professionnelle en 2011 aboutit à un ratio de 31 % (ce rapport n’était que de 18 % en 2006).

La hausse régulière de la part des femmes au sein des actifs occupés et dans les effectifs de la formation professionnelle continue depuis 2006 ne doit cependant pas masquer des inégalités persistantes. Si les volumes globaux laissent entrevoir que les écarts tendent à se réduire, il n’en reste pas moins que les femmes bénéficient moins de la formation professionnelle que les hommes.

En Nouvelle-Calédonie, quel que soit le dispositif de formation professionnelle (FPC ou apprentissage), les femmes s ’ orientent massivement vers les secteurs liés aux services à la personne, à la santé et au tourisme. Largement majoritaires à plus de 75 % dans ces secteurs, les femmes deviennent, en revanche, minoritaires dans les spécialités liées à la mine, au BTP, aux industries diverses et aux métiers de la mer. Le rapport du gouvernement sur genre, formation, emploi – « L’accès des femmes aux métiers porteurs » – confirme cet état de fait, les hommes représentant 76,6 % des salariés dans le secteur mine-métallurgie et 90,9 % dans le BTP.

Les freins à la formation professionnelle continue

Les informations sur les dispositifs de la FPC ne parviennent pas suffisamment jusqu’aux milieux défavorisés, notamment par manque de relais communautaires (associations de femmes, de jeunes, d’églises, autorités coutumières, amicales de tribus). Les femmes des milieux ruraux, pour la plupart autochtones ou océaniennes, utilisent peu les services administratifs en charge de la formation et de l’emploi. Elles ne maîtrisent pas la compréhension du système administratif occidental, et la langue française pour certaines est un problème. Enfin, le problème de la garde des enfants se pose dans les foyers obligeant les femmes à renoncer à des formations même si l’homme n’exerce pas une activité professionnelle. Les coûts et l’irrégularité des transports constituent également des freins ainsi que les horaires de formation qui ne sont pas adaptés aux femmes (pas de cours du soir par exemple).

Les dispositifs mis en place

Face à ces disparités hommes-femmes au niveau de la formation et de l’emploi des femmes, le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie a pris certaines mesures : mise en place depuis 2004 d’un vaste programme de formation professionnelle continue pour lequel il a bénéficié de fonds octroyés par le IXe Fonds européen de développement, soumis au respect de certaines priorités transversales dont l’égalité des sexes, et des campagnes médiatiques de sensibilisation en faveur des femmes pour des formations aux métiers dits masculins (chauffeur d’engins sur mine, carreleur, maçon, électricien…), métiers porteurs en Nouvelle-Calédonie.

En province Sud, une aide aux frais de garderie de l’ordre de 175 euros (20 000 FCFP) par enfant est attribuée pendant la formation des mères de famille. Au titre des mesures incitatives, une bourse de la 2ème chance a été accordée à des femmes poursuivant des formations. Ce dispositif mis en place en 2008 a duré trois ans.

10.Santé (article 12)

En Nouvelle-Calédonie, le système de santé est performant et la technicité médicale satisfaisante.

En matière de santé publique, selon la DASS, le véritable problème qui préoccupe les autorités médicales en Nouvelle-Calédonie est l ’ accessibilité aux soins notamment pour les populations éloignées des centres médicaux. L’absence de transport public et les faibles revenus de ces populations les privent de l’accès aux soins et de suivi médical. Parmi cette population se trouvent un grand nombre de femmes.

Concernant la santé des femmes, les cancers féminins atteignent des proportions préoccupantes. Cette situation a conduit le gouvernement à adopter et prendre des mesures politiques et juridiques en matière de santé publique dans les domaines suivants jugés comme prioritaires : le cancer du sein, le cancer du col de l ’ utérus et le VIH/S ida .

Outre les maladies spécifiques aux femmes, le diabète, l’hypertension, les maladies cardio-vasculaires, la tuberculose, la santé bucco-dentaire et l’obésité sont également des priorités. Ces maladies, loin d’épargner les femmes, exigent des programmes de prévention spécifiques.

I.Le cancer du sein

Le cancer du sein est le plus fréquent des cancers et la première cause de mortalité par cancer chez la femme en Nouvelle-Calédonie. En 2006, 82 femmes ont été touchées par le cancer du sein. 62 % d’entre elles avaient entre 50 et 74 ans. En 2008, c ’ est 91 femmes qui sont touchées par ce cancer indépendamment de leur appartenance ethnique.

Grâce au vote par le Congrès de la délibération no 425 du 26 novembre 2008 relative au dépistage du cancer du sein, une grande campagne de dépistage, organisée par l’Agence Sanitaire et Sociale de Nouvelle-Calédonie (ASS-NC), a débuté à la en 2009, invitant toutes les femmes de 50 à 74 ans à réaliser gratuitement un examen clinique des seins et une mammographie. Dans le cas où des examens complémentaires sont nécessaires, ils sont également pris en charge à 100 %. En 2009, 17 055 femmes sur la province Sud ont été dépistées, 3 340 femmes sur la province Nord et 1 476 femmes en province des Iles. En 2010, on estime qu’un peu plus d ’ une femme sur deux ont répondu à l ’ invitation de la cellule de dépistage.

La possibilité récente de réaliser des mammographies dans certains centres hospitaliers en province Nord constitue une grande avancée en matière de prévention de la santé féminine.

II.Le cancer du col de l’utérus

Le cancer du col de l’utérus représente le troisième cancer féminin, après le cancer du sein et de la thyroïde, soit environ 10 % de l’ensemble des cancers chez la femme.

La délibération no 490 du 11 août 1994 portant plan de promotion de la santé prévoit la prise en charge en totalité de la consultation, du frottis et de son interprétation, ainsi que la remise du résultat du frottis, pour la réalisation de deux premiers frottis à un an d’intervalle puis d’un frottis tous les trois ans, pour les femmes âgées de 17 à 65 ans. Environ 71 000 femmes en 2004 et 77 000 en 2008 ont bénéficié d’un dépistage du cancer du col de l’utérus. Le taux de couverture actuellement atteint en Nouvelle-Calédonie (2006-2008) est de 58,5 %, encore inférieur aux recommandations de la Haute autorité de santé (70 %). Cependant, il varie de 70 % chez les 25-39 ans à 40 % chez les 60-65 ans.

III.Le VIH/sida

Depuis 1992, la commission permanente du Congrès a mis en place un dispositif de consultation pour le dépistage anonyme et gratuit (CDAG) de l’infection par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) (délibération n° 211/CP du 30 octobre 1992).

Au 31 décembre 2007, 316 cas ont été enregistrés depuis 1986 et 116 d’entre eux sont passés au stade de sida avéré (soit 36,7 %). Parmi les 116 cas de sida avéré (82 hommes, 33 femmes et 1 cas de sexe inconnu), 60 sont décédés (57 décès sont dus au sida et 3 à une autre cause).

En 2010, 122 cas ont été diagnostiqués sur 1 783 tests effectués. 64 hommes sont touchés contre 58 femmes. Le sex-ratio des cas de VIH/ sida cumulés est de 3 hommes pour 1 femme.

Si sur l’ensemble des CDAG la consultation féminine est légèrement supérieure à celle des hommes (51,7 % contre 47,6 %), les consultantes sont pratiquement 2,5 fois plus nombreuses que leurs homologues masculins parmi les moins de 20 ans (71,6 % contre 27,9 % et 0,5 % de transsexuels). La répartition hommes/femmes de la tranche des 20-24 ans est relativement équilibrée. Puis, à partir de 30 ans, les hommes sont légèrement plus nombreux que les femmes dans les tranches d’âge supérieures. À noter que chez les plus de 50 ans, les hommes sont 2,3 fois plus nombreux. Chez les jeunes des Iles, garçons et filles, le taux de dépistage est beaucoup plus bas que dans les autres régions (19 % des filles sexuellement actives ont réalisé un test contre 33 % dans les deux autres provinces), et pour les garçons le recours au test est quasi inexistant aux Iles (5 %), très bas en province Nord (12 %) comparé à la province Sud (20 %).

IV.La santé sexuelle

Selon une enquête INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale) de 2002 sur la santé des femmes calédoniennes, seulement 28 % des femmes considèrent avoir été bien informées sur la sexualité pendant leur adolescence, 36 % jugent cette information approximative et 36 % la considère inexistante. Les différences ne tiennent ni à la communauté d’appartenance, ni à la province de résidence, ni à la zone urbaine ou rurale, mais plutôt à l’âge et au niveau d’éducation. C ’ est chez les plus jeunes (18-24 ans) et chez les plus diplômées, avec un bac ou un diplôme universitaire, que l ’ information a été la meilleure. Cependant même dans ces groupes, moins de la moitié des femmes interrogées estiment avoir été tout à fait informées sur la sexualité.

Il existe encore des freins à en parler dans les familles. Des supports d’informations sur la sexualité sont mis à la disposition des jeunes dans les collèges, les lycées et les hôpitaux. Des personnels de santé interviennent dans les quartiers et des ateliers de discussion sont organisés au niveau provincial sur des thèmes en lien avec la sexualité. Des émissions radios hebdomadaires abordent également les questions relatives à la sexualité.

V.La santé reproductive

En Nouvelle-Calédonie, les problèmes de santé génésique sont directement liés au manque d’information et à la difficulté d’accès aux services de santé, à l’inégalité des sexes, à la violence à l’égard des femmes et à un manque de moyens (ressources humaines et financières). Ils sont plus accentués en zone rurale.

Selon une étude INSERM réalisée en 2008 sur la situation sociale et comportements de santé des Jeunes, 8 % des filles n’utilisent aucun moyen de contraception et 9 % une méthode peu efficace. L’absence de contraception peu efficace est plus présente aux Iles Loyauté (24 % des filles contre 11 % ailleurs). Elle est de 26 % chez les Polynésiennes, de 15 % chez les Kanak et plus rare chez les Européennes métropolitaines (7 %) et calédoniennes (9 %). L’immense majorité des jeunes est d’accord avec l’idée que la contraception est autant une affaire de garçons que de filles.

Parmi les filles interrogées, 14 % ont eu leur première grossesse avant 16 ans. La proportion des filles qui ont déjà été enceintes apparaît relativement homogène selon les communautés, sauf chez les Européennes métropolitaines où elle est moindre. Beaucoup de grossesses sont non désirées. La proportion des 18-24 ans dont la dernière grossesse n’était pas désirée s’élève à 44 %.

En Nouvelle-Calédonie le taux d’IVG est deux fois supérieur à celui de la Métropole et s’établit à 22,7 IVG pour 1 000 femmes en 2009. Les IVG représentent 26,2 % des conceptions soit 1 479 IVG en 2009, en augmentation chez les mineures par rapport aux années précédentes. La nouvelle réglementation permet d’améliorer l’accès à l’IVG en augmentant le nombre de structures autorisées à pratiquer l’IVG médicamenteuse avant la fin de la cinquième semaine de grossesse, en particulier dans certains centres médico-sociaux hors de Nouméa. Cette possibilité n’est ouverte qu’aux médecins formés dans les centres disposant d’une possibilité d’échographie de datation et pas aux sages-femmes. La réglementation facilite également la démarche en supprimant l’obligation d’un entretien social préalable (sauf pour les mineures) mais qui devrait toutefois être systématiquement proposé. La proportion de femmes qui ont déjà eu une ou plusieurs IVG parmi celles qui ont déjà eu des rapports sexuels est de 17 % (proportion équivalente à la Polynésie). La distribution des IVG est relativement équilibrée entre les provinces Sud et Nord mais apparaît nettement moindre aux Iles (6 %). Parmi les femmes qui ont eu au moins une IVG, 67 % avaient moins de 25 ans lorsque la première IVG a été pratiquée.

La distribution des femmes qui ont déjà utilisé un préservatif montre que les plus concernées sont les plus jeunes (64 % des 18-24 ans). C’est aux Iles que le préservatif a été le moins expérimenté par les femmes, les différences entre le Nord et le Sud ne sont pas significatives. Dans le Sud, le préservatif a été autant expérimenté dans le Sud rural que dans le Grand Nouméa, autant par les femmes kanak que par les Européennes. Comparativement aux autres provinces, c’est aux Iles qu’on parle le plus de contraception entre conjoints, mais c’est aussi là que la proportion d’hommes qui l’interdisent à leur femme est la plus forte. Les débats au sein des Églises sur la contraception n’ont pas été sans impact en Nouvelle-Calédonie puisque c’est chez les femmes qui n’ont pas de religion que les utilisatrices sont proportionnellement plus nombreuses (84 %). Viennent ensuite les catholiques, puis les protestantes, puis les membres des religions non chrétiennes suivies de loin par les affiliées aux nouvelles églises chrétiennes.

Concernant les femmes pendant leur grossesse, des mesures ont été prises pour toutes les femmes habitant dans les Iles afin de réduire les taux de mortalité. Au septième mois de leur grossesse, elles sont appelées à venir sur Nouméa pour accoucher car dans les Iles il n’existe pas de structures médicalisées pour les accouchements et de médecins spécialisés. Une structure d’accueil a été mise en place, proche de la maternité publique pour recevoir ces femmes à Nouméa. Leur suivi est assuré sur place avant et pendant l’accouchement et dans les centres médicaux de leurs îles d’origine après leur accouchement.

VI.Le suicide des jeunes

Selon l’étude INSERM réalisée en 2008 sur la situation sociale et comportements de santé des Jeunes, il s’avère que le taux de suicide chez les jeunes est très élevé. En effet, un jeune sur huit (12 %) a déjà fait une tentative de suicide, les filles plus souvent que les garçons (16 % versus 8 %). Deux tiers des jeunes ayant déjà fait une tentative de suicide sont des filles. Pour les deux sexes, l’expérience d’une enfance malheureuse, les problèmes d’alcool dans la famille, les maltraitances physiques augmentent le risque d’idées suicidaires. D’autres facteurs s’y ajoutent chez les filles : le fait d’avoir été adoptée, d’avoir eu des problèmes de santé sévères dans l’enfance, et d’avoir subi des violences sexuelles avant l’âge de 16 ans. 68 % des filles abusées sexuellement lors des 12 derniers mois ont eu des idées suicidaires au cours de leur vie contre 39 % des autres filles. En Nouvelle-Calédonie, le suicide des jeunes est un phénomène émergent auquel les autorités compétentes s’intéressent ainsi que les églises. Des programmes de sensibilisation et de formation commencent à être entrepris mais il n’existe pas véritablement de politiques institutionnelles ciblées sur le suicide.

VII.Le tabac et l’alcool

L’expérimentation du tabac continue de progresser chez les jeunes de Nouvelle-Calédonie selon un processus général qui voit le comportement des filles rejoindre le modèle masculin. On remarque une précocité croissante du tabagisme nettement marquée chez les filles. L’augmentation du tabagisme dans la population féminine est, de façon générale, un phénomène qui accompagne l’accès des femmes à l’éducation et à l’emploi.

La consommation d’alcool débute dès la jeunesse et est présente chez les deux sexes. Le niveau élevé de cette consommation extrême est un phénomène généralisé dans le pays et plus accentué chez les garçons sans emploi. L’alcool est un des facteurs aggravant la violence à l’égard des femmes.

VIII.La violence à l’égard des femmes

Les données connues

L’enquête INSERM sur la santé des femmes calédoniennes menée en 2002 auprès de 1 012 femmes de 18 à 54 ans permet de montrer que le phénomène de la violence à l’égard des femmes est une question très préoccupante et touche toutes les catégories sociales et toutes les communautés ou groupes socioculturels en Nouvelle-Calédonie. Elle indique ainsi un taux de violence élevé avec 24 % de femmes ayant subi un harcèlement psychologique (dont 96 % constamment), 22 % des insultes à répétition, 22 % des brutalités physiques et 9 % des agressions sexuelles graves. Celle étude révèle qu’1 femme sur 8 a été victime d’attouchements sexuels, de tentative de viol ou de viol avant l’âge de 15 ans. Dans 35 % des cas, les auteurs étaient de l’entourage et dans seulement 10 % des cas, les auteurs étaient des inconnus.

Les agressions physiques en Nouvelle-Calédonie sont autant rurales qu’urbaines et les violences sexuelles graves sont davantage rurales. Leur niveau est alarmant. En ce qui concerne les violences physiques, il s’élève à 4 %. C’est un peu moins qu’en Polynésie (5 %), mais cependant deux fois plus qu’à Paris (2 %) et quatre fois plus qu’en France métropolitaine dans son ensemble (0,9 %). Les violences sexuelles (tentatives de viol et viols) concernent 2 % des femmes (contre 1 % en Polynésie et 0,1 % en France). Les brutalités physiques sont nettement plus fréquentes chez les femmes autochtones (32 %), et encore davantage si elles vivent en zone rurale, aux Iles plus qu’ailleurs. Elles sont suivies des « Autres communautés » (15 %) et des Polynésiennes (11 %) puis des Européennes (qui sont cependant quatre fois plus exposées qu’en France : 8 % contre 2 %, Enquête nationale sur les violences envers les femmes en France ENVEFF 2000).

Ce sont les moins de 24 ans et, plus encore les moins de 20 ans, qui subissent le plus de violences dans les espaces publics, qu’il s’agisse d’intimidations sexuelles, d’agressions sexuelles graves ou de brutalités physiques.

Les victimes de tentatives de viol ou de viols dans l’espace public sont elles aussi beaucoup plus nombreuses parmi les moins de 20 ans (7,8 %), et dans une moindre mesure parmi les 20-24 ans (4,5 %), que parmi leurs aînées. Les femmes vivant en zone rurale paraissent plus exposées. Les femmes autochtones sont deux fois plus touchées que les Polynésiennes et quatre fois plus que les Européennes. Les viols et autres pratiques sexuelles imposées sont eux aussi très significativement liés à la province et à la communauté. Ils sont deux fois plus fréquents chez les femmes autochtones qu e chez les Polynésiennes, les « Autres  » et les Européennes. Ces dernières sont cependant en Nouvelle-Calédonie un peu plus exposées qu’en France : 1,4 % contre 0,8 % (ENVEFF 2000).

De manière générale, quelle que soit la communauté, les femmes qui ont un niveau d’études élevé apparaissent moins exposées que les autres. Les brutalités sont également corrélées au faible niveau d’études du conjoint.

Les femmes handicapées, encore plus vulnérables, subissent des violences au sein de leurs familles et de leur entourage. Ces femmes sont très mal informées de leurs droits. Peu d’entre elles entament les démarches nécessaires en cas de violences, en raison de freins liés à leur handicap. L’Association calédonienne des handicapés (ACH) s’efforce de les aider dans ce sens en leur apportant l’assistance et le soutien requis. Ces femmes sont orientées vers les dispositifs de prise en charge des victimes de violences et bénéficient de tous les soins et services appropriés.

Les résultats de l’étude donnent également la mesure de la sous-déclaration aux autorités judiciaires des violences sexuelles et de la faiblesse des recours.

L ’ enquête de l ’ INSERM de 2008 sur les jeunes indique que les violences sexuelles subies dans l’enfance sont fréquentes : 11 % des jeunes interrogés déclarent qu’on les a forcés, ou qu’on a essayé de les forcer, à des actes sexuels contre leur gré dans leur enfance (avant l’âge de 16 ans). Il s’agit clairement de violences de genre : les filles sont 17 % dans ce cas et les garçons 5 %. Au cours des douze derniers mois, 5 % des jeunes ont subi des viols ou des tentatives de viol. Là encore les filles sont plus touchées (8 % versus 3 %).

Les réponses associatives et institutionnelles

La formation des acteurs

Des formations des personnels de santé, des gendarmes, des policiers, des responsables coutumiers, des assesseurs coutumiers, des responsables associatifs en matière de droits et de violences à l’égard des femmes ont lieu régulièrement. Une formation sur les droits de la personne et la violence à l’égard des femmes a notamment été organisée en collaboration avec la CPS et des programmes régionaux en 2009 afin d’œuvrer à la prévention des violences. Des femmes et des hommes issus des institutions et de la société civile ont participé à cette formation.

La prévention

Les actions de prévention se multiplient dans les trois provinces. Elles associent les autorités coutumières, religieuses, associatives et institutionnelles.

Les programmes de sensibilisation aux violences à l’égard des femmes se poursuivent dans les collèges et les lycées par les associations d’aide et d’accompagnement aux victimes de violences. Des supports d’informations sont mis à la disposition des élèves dans les établissements scolaires de tout le pays (affiches, brochures, livrets, revues). En 2011, l’association « Femmes et violences conjugales » est intervenue auprès de 1 022 scolaires, 155 adultes et 200 jeunes hors scolarité. Le nombre des interventions dans les établissements scolaires passe de 17 en 2008 à 140 en 2011. Les demandes d’interventions augmentent d’année en année.

De son côté, le gouvernement accentue les actions de sensibilisation en faveur de l’élimination de la violence à l’égard des femmes par des campagnes médiatiques. Grâce à ces campagnes, les associations et les services provinciaux traitant de la violence à l’égard des femmes ainsi que la gendarmerie, la police et la justice ont enregistré une augmentation du nombre d’écoutes, de consultations, de dépôts de plainte, de recours en justice, de placements en maisons d’accueil des victimes de violences.

Pour la première fois en 2009, la Nouvelle-Calédonie s’est jointe aux pays du monde entier pour célébrer les 16 Jours d ’ activisme contre les violences faites aux femmes. Ces 16 Jours d’activisme qui constituent une véritable sensibilisation aux violences à l’égard des femmes, se sont déroulés du 25 novembre au 10 décembre 2009, autour du thème principal « Hommes et femmes UNIS pour lutter contre les violences faites aux femmes ».

La prise en charge des victimes et des auteurs

Le travail des associations se professionnalise avec le concours de psychologues, juristes, spécialistes du droit coutumier, spécialistes des violences conjugales et intrafamiliales, assistantes sociales et éducateurs spécialisés. Le travail mené par les associations « Femmes et violences conjugales », « SOS Violences sexuelles », l’Association pour l’accès aux droits et d’aide aux victimes (ADAVI), et par les centres d’accueil des femmes victimes de violences dans les provinces, s’intensifie et est mieux connu des femmes. Par ce biais, les femmes bénéficient de soutien médical et psychologique, de conseils, d’assistance juridique, d’assistance sociale, d’accompagnement à l’insertion professionnelle, de logements d’urgence, des secours de la police ou de la gendarmerie et de voies de recours judiciaire simplifiées. Lamise en place de points écoute dans les collèges et de lieux d’écoute dans les quartiers de Nouméa et la mise en place d’un numéro vert « SOS Écoute » contribuent nettement à améliorer la prise en compte des victimes.

Depuis quelques années, la prise en charge des auteurs de violence est une nouvelle stratégie de lutte contre les violences faites aux femmes. Le Service de traitement des violences conjugales et des violences intrafamiliales de la Province Sud, chargé de l’accompagnement et de la prise en charge gratuite des victimes et des auteurs de violences, a reçu 2 306 personnes en 2012, dont 457 ont bénéficié d’un suivi (269 victimes et 188 auteurs).

La création du Bureau d ’ aide aux victimes (BAV) au sein des services de la Police en 2005 permet de prendre en charge les femmes victimes de violences et de les accompagner dans le suivi des plaintes lorsqu’elles en font la demande.

La mise en place de l ’ ordonnance de protection (entrée en vigueur en octobre 2010) – mesure d’éloignement, éviction du conjoint violent, obligation de ressource – est une grande avancée en faveur des femmes victimes de violences. Cela est désormais possible à Nouméa grâce à une convention passée récemment entre le Relais de la Province Sud et la RAPSA (association de Réinsertion des Anciens Prisonniers dans une Société plus Accueillante) permettant de mettre à disposition des appartements pour les conjoints violents. Cela n’est malheureusement pas le cas pour les deux autres provinces qui n’ont pas de structures d’accueil équivalentes.

En province Nord, des programmes de prévention sur les violences dont la violence à l’égard des femmes ont débuté en 2012 sur le site de Vavouto (usine du Nord). Deux mairies soutiennent financièrement ces actions ainsi que des partenaires locaux du développement.

Le traitement judiciaire

Les violences constituent une infraction pénale réprimée par le Code pénal. Ce n’est que sur le plan civil concernant la réparation des dommages que les victimes de violences conjugales auront un traitement différent selon qu’elles sont de statut de droit commun ou de droit coutumier. Ce traitement procédural différent amène les victimes de droit coutumier devant une juridiction composée d’un juge de droit commun et d’assesseurs coutumiers. Si pour les victimes de droit commun le procès pénal est directement suivi du procès civil, jusqu’en 2013, les victimes de droit coutumier devaient saisir la juridiction coutumière après le procès pénal, rendant les démarches difficiles. En 2013, une modification de la loi a permis de rendre la saisine de la juridiction coutumière automatique. Cette juridiction est chargée de statuer sur la réparation au civil en se basant sur les principes coutumiers en vigueur dans l’aire coutumière dont la victime est ressortissante. Ceci peut ainsi amener à des décisions très différentes d’une aire coutumière à une autre.

11.Avantages sociaux et économiques (article 13)

I.Le droit aux prestations familiales

La CAFAT (Caisse d’allocations familiales et des accidents du travail), organisme de protection sociale en Nouvelle-Calédonie, assure pour les salariés du pays la gestion des régimes accidents du travail et maladies professionnelles, famille, chômage, invalidité et décès, vieillesse et veuvage. Cet organisme gère également le régime unifié d’assurance maladie-maternité (RUAMM) dont bénéficient l’ensemble des actifs de Nouvelle-Calédonie (salariés, fonctionnaires et travailleurs indépendants). Ces assurances sont alimentées à plus de 80 % par les cotisations sociales. La CAFAT en 2012 couvrait 250 432 personnes, soit 41 000 familles pour plus de 76 000 enfants.

II.Le droit aux prêts bancaires

Les femmes ont autant l’accès aux prêts bancaires et autres formes de crédit que les hommes en Nouvelle-Calédonie si elles présentent les conditions requises. Elles peuvent librement contracter un prêt sans avoir besoin du consentement du mari, avoir un compte bancaire personnel. Cependant, lorsqu’il s’agit d’un prêt hypothécaire, elles doivent obtenir l’accord de leur mari si l’immeuble fait partie de la communauté. Cette condition s’applique également au mari. Cela ne s’applique pas pour les biens en terres coutumières du fait du régime de ces terres (inaliénables, incessibles, incommutables, insaisissables).

III.Participation sportive et culturelle des femmes

Il n’existe aucune discrimination ou frein à la participation des femmes aux activités récréatives, aux sports et à tous les aspects de la vie culturelle. Le nombre important de licenciées dans les clubs, fédérations ou ligues sportives montre que les femmes sont bien représentées au niveau du sport local. Cependant, elles accèdent encore rarement aux responsabilités techniques ou décisionnelles dans le domaine du sport. Les femmes occupent 27 % des comités directeurs sportifs.

Dans les établissements scolaires, les filles sont fortement encouragées à intégrer l’Union nationale du sport scolaire (UNSS) et certaines concourent au niveau du Pacifique et au niveau national. Leur activité sportive scolaire leur permet plus tard d’intégrer facilement le monde sportif local.

Les femmes de Nouvelle-Calédonie, toutes ethnies confondues, contribuent fortement à la vie culturelle du pays (foires artisanales, expositions d’art, échanges de savoir-faire culturels, festivals des arts, marchés traditionnels…). Elles sont au cœur du succès et de la réussite des événements culturels à tous les niveaux (commune, province, pays, région, nation). Elles contribuent également au renforcement de la transmission des savoir-faire culturels dans les collèges et les lycées du pays. Un projet de loi pour la protection des savoir-faire traditionnels est en cours. Cette loi tant attendue bénéficiera tant aux hommes qu’aux femmes artistes.

12.Femmes des régions rurales (article 14)

En Nouvelle-Calédonie, toute population vivant en dehors de la ville principale de Nouméa et vivant d’une économie vivrière est considérée comme population rurale. C’est donc dans les provinces Nord et Iles que se trouve la majorité de cette population formée principalement d’autochtones (Kanak), environ 80 % sur les 63 000 habitants de ces provinces.Une partie de la province Sud se situe également dans ces zones. Les femmes des zones rurales représentent à peu près 50  % de cette population.

I.Les difficultés des femmes des régions rurales

Les conditions de vie de certaines femmes dans les zones rurales restent très difficiles. Le manque de confort (eau courante, électricité) pour celles vivant dans des zones éloignées, le manque de transport pour l’acheminement de leurs produits et pour l’accès aux services administratifs, de santé, aux commerces sont des obstacles qu’elles doivent surmonter au quotidien.

Lors des débats menés par les femmes des zones rurales et des tribus concernant leur accès aux projets économiques, il ressort que certains obstacles entravent leur contribution au développement:

Les habitudes culturelles de ces milieux qui portent davantage les hommes que les femmes dans les projets de développement;

Les femmes doivent nécessairement avoir l’aval de la famille pour mener un projet en milieu communautaire. Certaines femmes ne reçoivent pas toujours un accord favorable de la famille (impact des stéréotypes culturels);

Les femmes se découragent face aux lenteurs administratives et à la complexité des démarches à entreprendre. l’éloignement/l’isolement de certaines tribus (pas d’accès à l’électricité, à l’eau potable, pas de réseau téléphonique, pas d’accès aux nouvelles technologies) ne favorise pas le développement, dont les projets économiques des femmes;

Le manque de transports et leur coût sont des problèmes majeurs (pour leur déplacement et l’acheminement de leurs produits).

II.Le secteur agricole

Selon une étude sur l’agriculture calédonienne réalisée par la Direction des affaires vétérinaires, alimentaires et rurales (DAVAR) du gouvernement en 2002, la population agricole familiale vivant et/ou travaillant sur les exploitations agricoles représente 10 % de la population totale de la Nouvelle-Calédonie (23 % en 1991). Sur l’ensemble de la Nouvelle-Calédonie, 1 112 salariés permanents de la population agricole familiale ont été recensés, représentant au total 938 UTA (unité de travail agricole). Un quart de ces employés sont des femmes. Sur terre coutumière, les femmes apportent 42 % des UTA, cette proportion est de 31 % sur terre non coutumière. La situation est intermédiaire sur foncier mixte où 37 % des UTA sont féminines. 1/3 d ’ entre elles ont déclaré avoir un revenu monétaire issu de l ’ exploitation agricole, lequel forme l ’ intégralité de leurs revenus. Les études de la DAVAR très détaillées concernant l’agriculture calédonienne et le développement en milieu rural ne prennent pas en compte la contribution des femmes dans le monde rural. Cette contribution pourtant non négligeable ne figure pas dans les statistiques et dans les résultats de ces études, ce qui ne permet pas de connaître réellement le travail des femmes dans l’économie rurale.

Le Conseil économique et social de Nouvelle-Calédonie a attiré l’attention sur les femmes d’agriculteurs qui exercent aux côtés de leurs maris et qui ne perçoivent pas de salaires. Sur 15 % de travailleurs indépendants, seuls 3 % salarient leurs conjointes qui travaillent dans leurs entreprises.

Les exploitations en terres coutumières sont dirigées à 98  % par des hommes. C’est le cas pour la quasi-totalité des exploitations de la province des Iles Loyauté, pour 96 % des exploitations de la province Nord et pour 97 % des exploitations de la province Sud. De plus en plus, les femmes sont encouragées à développer des projets en terres coutumières par les institutions, les organismes de crédit et les ONG.

Enfin, bon nombre de femmes rurales développent des activités non marchandes leur permettant d’avoir un revenu, tout en pérennisant les savoirs traditionnels et les techniques traditionnelles agricoles, de pêche garantissant en même temps une sécurité alimentaire pour leurs familles.

III.Les femmes rurales et les projets miniers

En province Nord, de réels efforts ont été entrepris pour favoriser la contribution des femmes au développement économique. Avec l’arrivée de l’usine du Nord (Koniambo Nickel SAS), le monde de l ’ emploi s ’ est intensifié et les femmes, qui jusque-là n ’ avaient pas de travail, ont été recrutées dans divers pôles d ’ activités sur et autour de la mine (services d’administration, métiers liés à l’environnement, création de pépinières, restauration, services de propreté, services de transport, petits projets économiques, services à la personne…).

C’est également le cas en province sud avec la création récente de l’usine Vale NC. Les femmes sont de plus en plus visibles dans les centres miniers de la SLN et de la SMSP. Ces nouveaux métiers porteurs favorisent largement l’émancipation des femmes des zones rurales et tribales pour lesquelles le schéma de l’emploi prend un autre visage.

En rapport avec le développement minier, des associations de femmes travaillent en collaboration étroite avec des responsables des sociétés minières afin de prévenir les effets néfastes de l’activité minière susceptibles de porter atteinte aux droits humains, à la santé des populations, à l’éducation, à la transmission des valeurs culturelles et à l’environnement. Ces partenariats débouchent également sur des actions porteuses de progrès pour les populations vivant près des sites d’exploitation minière.

IV.Les aides au développement en zone rurale

Dans les trois provinces, de grands efforts ont été réalisés en matière de santé, de logements sociaux, de services à la personne pour améliorer les conditions de vie des femmes et des familles vivant en zone rurale. Le service provincial du développement social des tribus en province Nord travaille à la promotion des femmes dans les petits projets de développement (marchés, services à la personne, artisanat, restauration…). Les femmes sont accompagnées pour l’aide au montage de leurs projets et bénéficient de formations à la gestion de leurs projets. Des aides financières leur sont également accordées par la province, comme des prêts à taux préférentiels accordés aux femmes pour des projets économiques.

Un séminaire a été organisé par le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie en mars 2011 afin d’identifier les préoccupations et attentes des femmes dans le secteur de l ’ économie informelle. Il avait pour objectif principal d’initier la réflexion sur les stratégies à mettre en œuvre pour que l’économie informelle soit davantage prise en compte dans les politiques publiques.

Par ailleurs, l’ensemble des travaux réalisés lors de la Journée internationale de la femme de 2013 ont amené la réflexion sur un projet de banque solidaire des femmes qui a commencé à se concrétiser dans certaines régions afin de structurer le réseau des femmes développant ce type d’économie et valoriser le système d’économie informelle au niveau Pays.

Depuis quelques années, l’Association pour le droit à l’initiative économique (ADIE) intervient comme partenaire du développement en zone rurale. La Chambre des métiers et de l’artisanat (CMA), tout comme la Chambre de commerce et d’industrie (CCI), effectue des permanences régulières en milieu rural et tribal afin de promouvoir des actions de développement

À l’échelon régional, depuis une quinzaine d’années, des femmes de Nouvelle-Calédonie bénéficient des programmes de formation du Centre de formation et d’éducation communautaire de la CPS basé à Fidji. Ces femmes ayant acquis des connaissances et des compétences pour le développement en milieu communautaire s’investissent dans des projets divers (agriculture, restauration, transport, relais santé, animation jeunesse, responsabilités à la tête d’associations, arts…).

13.Égalite devant la loi (article 15)

La Constitution française et les textes subséquents ne font aucune discrimination à l’égard de la femme en ce qui concerne l’exercice des droits et des libertés. Ainsi, sous réserve des conditions liées à la majorité, les femmes peuvent dans les mêmes conditions que les hommes ester en justice comme demanderesses ou défendeurs et intervenir comme témoins. Elles ont accès aux professions judiciaires (magistrats, avocats, notaires, expertes, etc.) sans restriction liée à leur condition de femmes. Les femmes ont les mêmes possibilités d’accès aux services judiciaires notamment en matière d’assistance judiciaire. Elles peuvent librement conclure des contrats en leur nom, administrer leurs biens propres, exécuter des testaments.

La liberté de circuler est un droit fondamental pour tous les citoyens. Les femmes choisissent librement leur résidence et leur domicile.

14.Droit matrimonial et familial (article 16)

I.Le mariage et le divorce de droit commun

Les règles nationales relatives au mariage et au divorce de droit commun sont applicables en Nouvelle-Calédonie en ce qui concerne les citoyens de statut civil de droit commun. Le droit civil qui vient d’être transféré à la Nouvelle-Calédonie n’a pas modifié ces règles.

Le mariage coutumier

Le mariage coutumier qui concerne les Kanak de statut civil coutumier relève de la compétence des autorités coutumières (clans, familles, grands chefs, petits chefs) et est règlementé par la coutume. Les époux ont un délai d’un mois pour enregistrer leur mariage coutumier à la mairie. L’officier d’état civil ne marie donc pas les citoyens de statut civil coutumier, il ne fait qu’enregistrer le mariage coutumier dans le registre d’état civil des citoyens de statut civil coutumier.

La rupture du lien de mariage coutumier

Le terme « rupture du lien du mariage » remplace celui de « divorce » en ce qui concerne le statut civil coutumier kanak. Le tribunal de première instance et la cour d’appel de Nouméa complétés d’assesseurs coutumiers sont compétents en matière de rupture du lien du mariage coutumier. Ils appliquent le droit coutumier, et les assesseurs sont de véritables juges ayant voix délibérative. Ces juridictions peuvent être saisies par l’une ou l’autre des parties. La grande majorité des affaires soumises à ces juridictions relèvent de l’initiative des femmes.

Les femmes se heurtent encore à une forte résistance des hommes, opposés à la rupture du lien du mariage, et qui invoquent, notamment au niveau de la garde des enfants, le principe coutumier de l’appartenance des enfants au clan du père. Les femmes interpellent les autorités coutumières sur ce point qui leur est préjudiciable en soutenant qu’il faut distinguer la garde matérielle des enfants de leur appartenance clanique paternelle. Les pères invoquent souvent le principe de l’appartenance clanique paternelle des enfants pour échapper au paiement de pensions alimentaires. Elles signalent aussi un autre problème qui leur est préjudiciable : la liquidation du patrimoine conjugal notamment pour les immeubles (villas) édifiés sur les terres du mari dans les tribus et auxquels elles ont contribué financièrement. Elles interpellent les autorités coutumières pour trouver des solutions équitables afin qu’elles ne soient pas lésées en cas de rupture du lien du mariage.

Le droit coutumier est en cours d’édification et les réclamations de justice et d’équité des femmes ne peuvent que le renforcer. Les autorités coutumières, dans l’intérêt de la coutume et de l’équilibre social de la société kanak, doivent les considérer comme des questions éminemment prioritaires à traiter.

II.La succession en droit commun

Elle est régie par les règles nationales qui n’ont pas été changées par le transfert récent du droit civil à la Nouvelle-Calédonie.

III.La succession en droit coutumier

Jusqu’en 1980, la dévolution successorale relative aux Kanak de statut civil coutumier était régie par la coutume et les autorités coutumières et ce, pour les biens situés dans ou hors des tribus. En cas de décès du mari, l’épouse et les enfants étaient souvent déshérités par le conseil des anciens au profit d’un frère ou d’un cousin du défunt. En l’absence de norme coutumière précise, il était possible pour l’épouse de faire opposition au palabre du conseil des anciens. La succession restait ainsi en suspens sans possibilité d’être liquidée. Parfois elle renonçait à son statut civil coutumier pour obtenir la liquidation de la succession. Une délibération de 1980 est venue combler ce vide juridique en instaurant une nouvelle dévolution successorale mais limitée aux seuls immeubles acquis selon le droit commun et situés hors des réserves (tribus, districts) et qui permet sous certaines conditions (déclaration par les époux de leur option pour cette nouvelle dévolution en cas de décès de l’un d’entre eux) au conjoint survivant et aux enfants d’en être les seuls héritiers. Par cette option le conseil des anciens n’intervient plus dans la succession. Cette délibération instaure également le conseil de clan en matière de succession et fait remplacer le conseil des anciens dans les tribus par le conseil inter clanique plus représentatif des réalités coutumières.

Cependant, devant l’insuffisance de la dévolution successorale de 1980 à appréhender l’ensemble des réalités en matière de succession coutumière, le Sénat coutumier prépare actuellement avec le Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie un projet de loi sur la dévolution successorale coutumière permettant de prendre en considération l’ensemble des biens (immeubles et meubles) d’une succession ainsi que les intérêts des époux et de leurs enfants dans un esprit de justice et d’équité.

Le Sénat coutumier, pour ce projet, s’intéresse tant aux biens situés hors des réserves qu’à ceux situés dans les réserves (tribus, districts).

Conclusions et recommandations

Le présent rapport a permis de faire un point sur la situation réelle des femmes calédoniennes en 2013, grâce à la précieuse contribution des services administratifs, des associations et des représentants de la société civile, et a donné l’occasion de mettre un accent particulier sur l’importance de la CEDEF et de sa mise en œuvre en Nouvelle-Calédonie.

Malgré les avancées constatées sur la situation des femmes en Nouvelle-Calédonie depuis deux décennies, il existe encore de nombreux freins à leur émancipation qu’il convient d’éliminer pour répondre aux dispositions de la CEDEF.

Les principaux problèmes qui se dégagent au titre de la mise en œuvre de la CEDEF en Nouvelle-Calédonie peuvent être résumés ainsi :

1)Une persistance de la précarité des femmes ayant des impacts négatifs sur l’éducation, la santé, la formation et l’insertion professionnelle des femmes;

2)Une insuffisance de coordination des actions et une insuffisance d’application des textes législatifs;

3)Une connaissance insuffisante des instruments juridiques internationaux relatifs aux droits des femmes;

4)Une insuffisance de données suffisamment désagrégées par sexe;

5)Une insuffisance générale de mesures adaptées aux femmes dans les domaines qui les affectent;

6)Une insuffisance des actions d’information, d’éducation et de communication en faveur de changements de comportements vis-à-vis des femmes et des filles;

7)Une insuffisance d’actions spécifiques en faveur des femmes autochtones et de leurs droits;

8)Une insuffisance d’actions envers les femmes des zones rurales et insulaires;

9)Un manque crucial d’études tant qualitatives que quantitatives sur l’implication des femmes dans le développement du pays.

Recommandations

1)Renforcer la mise en œuvre de la Plate-forme d’action révisée du Pacifique et de la CEDEF par l’adoption de stratégies et de plans transversaux contribuera pleinement aux objectifs de l’autonomisation des femmes dans tous les secteurs du développement.

2)S’intéresser aux secteurs à la fois structurés et non structurés de l’économie afin de tenir compte des besoins et du potentiel des femmes dans l’intérêt de l’économie tout entière doit être une préoccupation des pouvoirs publics et de toutes les parties prenantes du développement.

3)Mettre en place plus d’études spécifiques aux femmes et au développement ainsi que des indicateurs directement en rapport avec l’autonomisation des femmes s’avère nécessaire si on veut mesurer les progrès réalisés et atteindre l’objectif de l’égalité des sexes en Nouvelle-Calédonie.

4)Prendre en compte régulièrement l’avis des femmes kanak dans l’élaboration des lois et la définition des politiques s’avère nécessaire ainsi que le recommande le rapport du rapporteur spécial de l’ONU pour les droits des peuples autochtones.

On peut noter avec satisfaction la volonté politique du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie de faire des droits de la femme et de l’égalité entre les sexes une priorité.

En marge des institutions, on note une mobilisation accrue de la société civile en faveur de la femme pour une synergie d’actions. Il faut également signaler un soutien technique de plus en plus accentuée du Secrétariat général de la Communauté du Pacifique (CPS) dans la miseen œuvre des programmes relatifs aux droits des femmes et à l’égalité des sexes ainsi que la contribution financière de l’État et de l’Union européenne pour l’amélioration de la condition féminine en Nouvelle-Calédonie. Les pays du Pacifique, y compris la Nouvelle-Calédonie, ont réitéré lors de la 12ème Conférence des femmes du Pacifique de 2013, leur volonté de faire progresser l’égalité des sexes dans chacun des domaines critiques du Programme d’action de Beijing et de la Plate-forme d’action révisée pour le Pacifique.