NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/BIH/CO/1/Add.1*20 mars 2006

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTURE

EXAMEN DES RAPPORTS SOUMIS PAR LES ÉTATS PARTIES EN APPLICATION DE L’ARTICLE 19 DE LA CONVENTION

Observations du Gouvernement de Bosnie ‑Herzégovine au sujet des conclusions et recommandations du Comité contre la torture (CAT/C/BIH/CO/1)

[1er février 2006]

Rapport sur la visite que des représentants de la Bosnie ‑Herzégovine ont rendue aux citoyens bosniaques détenus dans le camp de détention militaire «Delta» de la base navale militaire des États ‑Unis à Guantánamo (Cuba)

Rapport établi par M. Amir Pilav, du Ministère de la justice de Bosnie ‑Herzégovine

1.En vue de donner effet aux décisions que la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine a prises dans les affaires nos CH/02/8679, CH/02/8689, CH/02/8690 et CH/02/8691 du 11 octobre 2002, CH/02/8961 et CH/02/9499 du 4 avril 2003, aux conclusions adoptées par le Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine à sa 31e séance, le 18 novembre 2003, à la décision no 02‑011‑6620/03 du Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine, en date du 8 décembre 2003, à la lettre no 02‑011‑6620/03 du Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine, en date du 8 décembre 2003, à la note du Ministère des affaires étrangères de Bosnie‑Herzégovine no 10621‑01‑26603/2003, en date du 26 décembre 2003, et sur autorisation du Gouvernement des États‑Unis d’Amérique (communiquée dans la note que l’ambassade des États‑Unis d’Amérique à Sarajevo a adressée au Ministère des affaires étrangères de Bosnie‑Herzégovine en réponse à sa note no 10621‑01‑26603/2003 en date du 26 décembre 2003), j’ai effectué, au nom du Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine, un voyage officiel dans le but de rencontrer, du 26 au 29 juillet 2004, les citoyens bosniaques détenus dans le camp de détention militaire «Delta» de la base navale militaire des États‑Unis à Guantánamo (Cuba).

2.Il importe de noter que le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine, dans sa lettre no 02‑011‑6620/03 en date du 18 décembre 2003, avait prié le Ministère des affaires étrangères de Bosnie‑Herzégovine de demander à l’ambassade des États‑Unis à Sarajevo, outre son approbation pour la visite mentionnée ci‑dessus, des réponses aux questions ci‑après:

a)Les autorités compétentes des États‑Unis ont‑elles, conformément à leurs lois, mis en accusation un membre quel qu’il soit du «groupe des Algériens» qui est un citoyen bosniaque?

b)Les autorités compétentes des États‑Unis ont‑elles, conformément à leurs lois, mis en accusation un membre quel qu’il soit du «groupe des Algériens» qui n’est pas un citoyen bosniaque?

c)Les autorités compétentes ont‑elles des informations permettant d’envisager, dans un avenir prévisible, la remise en liberté d’un membre quel qu’il soit du «groupe des Algériens» qui est un citoyen bosniaque ou d’un membre de ce groupe qui n’est pas un citoyen bosniaque?

3.Étant donné que les autorités des États‑Unis, dans la note no 04‑1176/S en date du 15 juillet 2004 transmise par l’ambassade des États‑Unis à Sarajevo au Ministère des affaires étrangères de Bosnie‑Herzégovine, ont accordé l’autorisation sollicitée sans toutefois répondre aux questions ci‑dessus, il conviendrait d’attendre leurs réponses.

4.Dans le cadre de ma mission en qualité de représentant de la Bosnie‑Herzégovine, j’étais tenu de poser aux citoyens bosniaques détenus dans le lieu susmentionné les questions figurant sur la «Liste de questions qu’un représentant de la Bosnie‑Herzégovine devrait poser au cours de sa visite à des membres du “groupe des Algériens”, détenus au camp de détention militaire des États‑Unis à Guantánamo, qui sont citoyens bosniaques». Cette liste avait été préalablement établie par les représentants du Conseil des ministres, du Ministère de la justice et du Ministère de la sécurité de Bosnie‑Herzégovine et transmise par voie diplomatique à l’ambassade des États‑Unis sous couvert de la note no 10621‑01‑26603 du Ministère des affaires étrangères, en date du 26 décembre 2003.

5.J’étais accompagné de M. Morslav Starovlah, interprète anglophone du Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine.

6.Nous sommes partis le 23 juillet 2004 de l’aéroport international de Sarajevo et sommes arrivés à Washington via Vienne.

7.Pendant notre séjour à Washington, l’ambassade de Bosnie‑Herzégovine à Washington nous a fourni l’assistance nécessaire.

8.Conformément au plan établi par les autorités militaires des États‑Unis, nous avons décollé d’une base militaire proche de Washington, le 26 juillet 2004 au matin (heure locale), à destination de Guantánamo. Nous étions accompagnés de M. Jim Carlton, représentant du Département de la défense des États‑Unis. Nous avons dû nous poser et passer un bref moment à Miami (Floride) pour faire le plein de carburant et remplir les formalités douanières nécessaires. Nous avons atterri à l’aéroport de Guantánamo le 26 juillet 2004 en fin d’après‑midi (heure locale).

9.Le 27 juillet 2004, conformément au plan prévu par le Département de la défense, je me suis entretenu personnellement, dans une salle spécialement réservée à cet effet et en compagnie de MM. Starovlah et Carlton, avec trois citoyens bosniaques, à savoir MM. Nechle Mohamed, Mustafa Ait Idir et Boumediene Lakhdar, qui étaient détenus au camp militaire «Delta». Le procès‑verbal de l’entretien que j’ai eu avec chacun d’eux est joint au présent document (annexes 1, 2 et 3).

10.Le 28 juillet 2004, conformément au plan prévu par le Département de la défense, je me suis entretenu personnellement, dans une salle spécialement réservée à cet effet et en compagnie de MM. Starovlah et Carlton, avec le quatrième citoyen bosniaque, M. Boudella Hadj, qui était détenu au camp militaire «Delta». Le procès‑verbal de l’entretien que j’ai eu avec lui est joint au présent document (annexe 4).

11.Étant donné que, selon le représentant du Département de la défense des États‑Unis, Washington avait autorisé uniquement les entretiens personnels avec les citoyens bosniaques, je n’ai pas pu, en qualité de représentant de la Bosnie‑Herzégovine, rencontrer les deux autres requérants devant la Chambre des droits de l’homme dont la nationalité bosniaque n’est pas établie à ce jour, à savoir:

a)Saber Lahmar, dont le nom est mentionné dans la décision de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine relative aux affaires nos CH/02/8679, CH/02/8689, CH/02/8690 et CH/02/8691 du 11 octobre 2002, et

b)Belkasem Bensayah, dont le nom est mentionné dans la décision de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine relative à l’affaire no CH/02/9499 du 4 avril 2003.

12.Le représentant du Département de la défense des États‑Unis m’a proposé de m’entretenir personnellement (en qualité de représentant de la Bosnie‑Herzégovine), le 28 juillet 2004, avec Tariq Mahmood Ahmed Al‑Sawah, né le 2 novembre 1957 à Alexandrie (Égypte), qui serait un citoyen bosniaque. Cependant, il ne m’a pas été fourni d’élément valide conformément à la législation de Bosnie‑Herzégovine, établissant que cette personne est un citoyen bosniaque. J’ai été informé que Tariq Mahmood Ahmed Al‑Sawah travaillait pour le Secours islamique mondial à Zagreb depuis 1992, qu’il résidait dans la République de Croatie en 1992, qu’il était membre du troisième corps de l’armée de la République de Bosnie‑Herzégovine, qu’il s’était rendu en Afghanistan où il s’était entraîné au maniement des explosifs, qu’il y avait pris part à des combats contre les forces armées des États‑Unis, qu’il y avait été capturé par lesdites forces au cours d’opérations militaires et qu’il aurait été détenteur d’un passeport de la République de Bosnie‑Herzégovine.

13.Ni les trois décisions de la Chambre des droits de l’homme mentionnées ci‑dessus, ni la conclusion du Conseil des ministres à sa 31e séance, tenue le 18 novembre 2003, ni la décision no 02‑011‑6620/03 du Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine, en date du 8 décembre 2003, dans laquelle mes attributions sont définies, ni la «Liste de questions qu’un représentant de la Bosnie‑Herzégovine devrait poser au cours de sa visite à des membres du “groupe des Algériens”, détenus au camp de détention militaire des États‑Unis à Guantánamo, qui sont citoyens bosniaques» (préalablement établie par les représentants du Conseil des ministres, du Ministère de la justice et du Ministère de la sécurité de Bosnie‑Herzégovine) ne font référence à Tariq Mahmood Ahmed Al‑Sawah. Pour les raisons indiquées ci‑dessus, et étant donné qu’il ne m’a pas été fourni d’élément valide conformément à la législation de Bosnie‑Herzégovine, établissant que cette personne était un citoyen bosniaque, je ne suis pas entré en contact avec le dénommé Tariq Mahmood Ahmed Al‑Sawah.

14.Après avoir vu les citoyens bosniaques et m’être entretenu avec eux dans les lieux mentionnés ci‑dessus, nous avons quitté l’aéroport de Guantánamo le 29 juillet 2004, à bord d’un appareil de l’armée des États‑Unis à destination de Washington. Nous avons dû nous poser et rester un court moment à Miami (Floride) pour faire le plein de carburant et remplir les formalités douanières nécessaires. Nous sommes arrivés à Washington le soir (heure locale), accompagnés de M. Carlton. Le Département de la défense des États‑Unis communiquera ultérieurement à l’ambassade de Bosnie‑Herzégovine à Washington le coût du vol aller‑retour Washington‑Guantánamo effectué par les représentants de la Bosnie‑Herzégovine à bord d’un appareil de l’armée des États‑Unis, conformément aux conditions fixées pour la visite (que l’ambassade des États‑Unis à Sarajevo a transmises au Ministère des affaires étrangères de Bosnie‑Herzégovine dans la note no 04‑1176/S en date du 15 juillet 2004). Ces frais doivent obligatoirement être pris en charge par le Gouvernement de Bosnie‑Herzégovine.

15.Pendant notre séjour à Washington jusqu’à notre retour à Sarajevo, l’ambassade de Bosnie‑Herzégovine à Washington nous a fourni l’assistance nécessaire.

16.Nous avons décollé de Washington à destination de Vienne le 31 juillet 2004. Dans la matinée du 1er août 2004, nous avons atterri à Vienne où nous avons emprunté un nouveau vol pour arriver à l’aéroport international de Sarajevo dans l’après‑midi.

17.Conformément au point 5 de la décision du Ministre de la justice de Bosnie‑Herzégovine no 02‑011‑6620/03 en date du 8 décembre 2003, j’étais tenu, en qualité de représentant de la Bosnie‑Herzégovine désigné pour effectuer la visite en question, de ne pas révéler publiquement l’identité des personnes concernées et de ne pas divulguer d’informations jusqu’à la fin de la visite. Avec l’autorisation du Ministre de la justice, c’est‑à‑dire conformément à sa décision no 01‑02‑657/04 en date du 2 août 2004, et en qualité de chef de la délégation chargée de se rendre auprès des citoyens bosniaques détenus à Guantánamo, j’ai fait une déclaration aux médias bosniaques sur cette visite, qui suscitait un vif intérêt.

18.Pour rédiger le présent rapport, j’ai utilisé des informations recueillies par le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine préalablement à la visite ainsi que des informations que j’ai reçues en qualité de représentant de la Bosnie‑Herzégovine au cours de ma visite à Guantánamo, du 26 au 29 juillet 2004, et qui figurent dans le présent rapport et dans ses annexes. J’ai également pris en considération certaines obligations que les décisions prises par la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine dans les affaires nos CH/02/8679, CH/02/8689, CH/02/8690 et CH/02/8691 du 11 octobre 2002, CH/02/8961 du 4 avril 2003, CH/02/8691 du 11 octobre 2002 et CH/02/961 du 1er avril 2003 imposent à la Bosnie‑Herzégovine (par exemple, l’obligation d’avoir recours aux services d’un conseil ayant une expérience reconnue dans un domaine juridique pertinent et devant les cours, tribunaux et autres autorités compétentes en vue de prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les droits des requérants pendant leur détention aux États‑Unis d’Amérique et de faire en sorte que chaque partie poursuivie (c’est‑à‑dire la Bosnie‑Herzégovine et la Fédération de Bosnie‑Herzégovine) assume la moitié des frais d’avocat et de conseil, ce que la Bosnie‑Herzégovine n’a pas encore fait.

19.Dans la période comprise entre le moment, en janvier 2002, où des représentants de la Bosnie‑Herzégovine ont remis aux forces armées des États‑Unis présentes à Sarajevo les six requérants (devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine) et l’élaboration du présent rapport, fondé sur les informations et documents récents dont disposait alors le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine, un certain nombre de procédures précédemment engagées contre les requérants (devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine) n’ont pas été achevées, ou les décisions des institutions compétentes de Bosnie‑Herzégovine qui se sont prononcées sur les droits des requérants n’ont pas été communiquées en bonne et due forme aux intéressés. Sont notamment visées les procédures ci‑après:

a)Procédure pénale engagée devant la Cour suprême de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine dans l’affaire no Ki‑101/01, dans le cadre de laquelle les requérants (devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine) avaient été, en qualité d’accusés, condamnés à une peine de plusieurs mois d’emprisonnement qui a été annulée en janvier 2002 juste avant que les intéressés soient remis aux forces armées des États‑Unis présentes à Sarajevo par des représentants de la Bosnie‑Herzégovine. Une fois que les accusés (requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine), ayant quitté la Bosnie‑Herzégovine, n’étaient plus atteignables pour la Cour suprême de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine, celle‑ci, sur proposition du Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine en date du 4 avril 2002, a décidé, dans son arrêt no Ki‑101/01 du 9 avril 2002, de mettre un terme à l’enquête préliminaire qui les visait. À ce jour, cet arrêt n’a pas été notifié aux accusés mais seulement à leurs défenseurs. Leur droit d’interjeter appel étant un droit sui generis, l’arrêt en question n’a pas force obligatoire (cité par la Cour suprême de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine dans la lettre no So‑1590/03 en date du 30 décembre 2003 adressée au Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine). Les défenseurs des accusés Belkasem Bensayah et Boudella Hadj ont formé contre cette décision une requête qui a été rejetée par la Cour suprême de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine dans son arrêt no Kv‑8/02 du 8 mai 2002. Après l’entrée en vigueur du nouveau Code de procédure pénale, le 1er août 2003, la Cour suprême de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine, conformément au paragraphe 2 de l’article 452 dudit Code, a transmis cet arrêt au Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine à Sarajevo, pour suite à donner. Cependant, elle n’a communiqué ce document que le 30 décembre 2003 alors que, conformément aux dispositions mentionnées ci‑dessus, elle aurait dû le faire en août 2003;

b)Le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine avait, dans la période comprise entre janvier 2004 et le 19 juillet 2004, c’est‑à‑dire immédiatement avant le départ de représentants de la Bosnie‑Herzégovine pour Guantánamo, prié à plusieurs reprises le Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine de prendre une décision dans cette affaire au titre du Code de procédure pénale (requête enregistrée au Bureau du Procureur sous le numéro KT‑115/01), autrement dit de rendre une décision d’abandon des poursuites ou d’ordonner l’ouverture d’une enquête sur les requérants en qualité d’accusés;

c)La réponse du Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine, en date du 21 juillet 2004 (adressée au Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine), n’ayant été communiquée au représentant de la Bosnie‑Herzégovine que le 9 août 2004, c’est‑à‑dire postérieurement à sa visite à Guantánamo, du 26 au 29 juillet 2004, ce dernier ignorait la teneur de la lettre du Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine avant d’entrer en contact avec les citoyens bosniaques détenus à Guantánamo;

d)Parmi les informations qu’il a communiquées au Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine dans sa lettre no KT‑115/01 du 21 juillet 2004, le Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine indiquait avoir analysé toutes les mesures d’instruction prises pendant l’enquête et les faits établis. Le 24 juin 2005, il a rendu une ordonnance qui mettait fin, pour les raisons énoncées au paragraphe 1 a) et b) de l’article 239 du Code de procédure pénale de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine, à l’enquête visant Belkacem Bensayah, Saber Lahmar, Ait Idir Mustafa, Khaled El Arbed (dont le nom n’apparaît pas dans les décisions susmentionnées de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine), Boudella Hadj, Boumediene Lakhdar et Nechle Mohamed; ceux‑ci étaient soupçonnés de terrorisme international, infraction qui est réprimée au paragraphe 1 de l’article 168 compte tenu du paragraphe 1 de l’article 20 du Code pénal de Bosnie‑Herzégovine;

e)Dans la même lettre, le Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine indiquait qu’il y avait des raisons de croire que Saber Lahmar avait fait certifier un faux, infraction visée au paragraphe 1 de l’article 353 du Code pénal de la Bosnie‑Herzégovine, et que l’extradition ne pouvait être demandée que pour lui, qui n’était pas citoyen de Bosnie‑Herzégovine, mais ressortissant algérien. Dans une lettre en date du 9 août 2004, le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine a demandé au Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine de lui communiquer les documents nécessaires pour demander l’extradition de Saber Lahmar des États‑Unis d’Amérique vers la Bosnie‑Herzégovine;

f)La procédure engagée à la suite de l’acte no 642/01 du 26 octobre 2001 (qui est devenu obligatoire) du Procureur municipal de Tuzla devant le tribunal municipal de Zenica (affaire no K‑529/01) contre Belkacem Bensayah (requérant devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine), poursuivi du chef d’usage de faux certifié, lequel est visé au paragraphe 2 de l’article 353 du Code pénal de la Bosnie‑Herzégovine, lu conjointement avec le paragraphe 1 dudit article; à ce jour, le tribunal municipal de Zenica n’a pas prié le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine, qui est compétent en la matière, de demander l’extradition de Belkacem Bensayah des États‑Unis d’Amérique vers la Bosnie‑Herzégovine. Dans la lettre du 8 mars 2004 relative à l’affaire no K‑529/01 qu’il a adressée au Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine, le tribunal municipal de Zenica a indiqué qu’il ne pouvait prier le Ministère de demander l’extradition de Belkacem Bensayah car l’identité de ce dernier n’avait pas été établie au cours de la procédure. En l’occurrence, le tribunal avait demandé à Interpol Algérie, via le Ministère des affaires civiles et des communications de l’ex‑Bosnie‑Herzégovine, de lui communiquer l’original ou une copie des empreintes digitales du prévenu, aux fins d’établir son identité. À ce jour, cependant, il n’a pas reçu ces informations;

g)Dans une lettre datée du 24 mars 2004, le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine a soumis au Ministère de la sécurité de Bosnie‑Herzégovine la requête no K‑529/01 du tribunal municipal de Zenica, en date du 29 janvier 2004, dans laquelle il était demandé à Interpol Algérie de communiquer l’original ou la copie des empreintes digitales du prévenu Belkacem Bensayah. Au moment de la rédaction du présent rapport, le document du Ministère de la justice no 02‑011‑6620/03 ne contenait pas la réponse d’Interpol Algérie à la demande que lui avait transmise le Ministère de la sécurité de Bosnie‑Herzégovine;

h)Les procédures administratives engagées au Ministère de l’intérieur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine, c’est‑à‑dire les contentieux administratifs pendants devant la Cour suprême de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine qui doit déterminer si les requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine sont ou non des citoyens bosniaques;

i)À ce jour, les institutions compétentes en Bosnie‑Herzégovine n’ont pas communiqué aux requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine, qui sont placés sous l’autorité des forces armées des États‑Unis depuis le 18 janvier 2002, les décisions qui ont été prises à leur égard conformément à la procédure prévue par la législation de la Bosnie‑Herzégovine, c’est‑à‑dire par voie diplomatique. Par conséquent, les requérants n’étaient pas informés des décisions pertinentes que la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine a prises à leur égard ni des décisions des tribunaux et des organes directeurs dans les procédures mentionnées ci‑dessus (procédure pénale, procédure administrative et contentieux administratif) avant leur entretien avec un représentant de la Bosnie‑Herzégovine à Guantánamo;

j)En agissant ainsi, c’est‑à‑dire en ne prenant pas les mesures nécessaires, les institutions de Bosnie‑Herzégovine ont de nouveau porté atteinte à l’exercice des droits et des libertés des requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine;

k)En vue de donner effet à la partie des décisions de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine dans les affaires nos CH/02/8679, CH/02/8689, CH/02/8690 et CH/02/8691 du 11 octobre 2002, CH/02/8961 du 4 avril 2003, qui n’a pas été entièrement appliquée à ce jour, de prévenir d’éventuelles violations supplémentaires des droits et libertés des requérants et de faire en sorte que les organes de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine parviennent à donner effet à certaines parties des décisions de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine relatives aux affaires mentionnées ci‑dessus qui n’ont pas été appliquées à ce jour, il est proposé que le Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine adopte les mesures ci‑après:

i)Après avoir examiné le rapport rédigé par Amir Pilav, représentant de la Bosnie‑Herzégovine et chef de la délégation qui s’est rendue auprès des citoyens bosniaques détenus dans le camp de détention militaire «Delta» de la base navale militaire des États‑Unis à Guantánamo, le Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine adopte ledit rapport;

ii)Conformément au paragraphe 2 de l’article 8 de la loi sur les organismes de la fonction publique de Bosnie‑Herzégovine et en vue de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner pleinement effet aux décisions de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine dans les affaires nos CH/02/8679, CH/02/8689, CH/02/8690 et CH/02/8691 du 11 octobre 2002, et CH/02/8961 et CH/02/9499 du 4 avril 2003, de prévenir d’éventuelles violations supplémentaires des droits et libertés des requérants en Bosnie‑Herzégovine et d’assurer la coordination des opérations menées par les institutions de Bosnie‑Herzégovine et les institutions et organes compétents de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine pour donner effet aux décisions susmentionnées de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine, le Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine désigne un secrétaire chargé d’une mission spéciale au sein du Ministère de la justice à compter du jour où la présente décision est adoptée;

iii)Le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine fournit au secrétaire tout l’appui technique, administratif et financier nécessaire pour lui permettre de mener à bien sa tâche découlant du point 2;

iv)Le secrétaire rend compte au Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine de ses travaux et de sa gestion des tâches et est tenu de lui présenter des rapports trimestriels sur les mesures qu’il a prises et les résultats qu’il a obtenus jusqu’à l’achèvement de toutes les tâches découlant du point 2;

v)Le secrétaire est chargé d’obtenir toutes les preuves nécessaires pour établir si Tariq Mahmood Ahmed Al‑Sawah, né le 2 novembre 1957 à Alexandrie (Égypte), est un citoyen bosniaque, et, si tel est le cas, de prendre toutes les mesures nécessaires pour rendre visite à l’intéressé, qui est détenu dans le camp de détention militaire «Delta» de la base navale militaire des États‑Unis à Guantánamo;

vi)Le Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine, lorsqu’il désigne le secrétaire chargé de la mission spéciale découlant du point 2 conformément à la loi sur les organismes de la fonction publique de Bosnie‑Herzégovine, nomme secrétaire par intérim…

Première possibilité

20.Si le Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine considère, pour une raison quelconque, qu’il n’est pas souhaitable de confier au secrétaire chargé de la mission spéciale au sein du Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine l’exécution de toutes les activités proposées dans le présent rapport, je propose qu’un groupe d’experts, composé de représentants du Ministère de la justice (Coordonnateur du groupe d’experts), du Ministère des affaires étrangères, du Ministère la sécurité, du Ministère des droits de l’homme et des réfugiés et du Ministère des finances et du Trésor de Bosnie‑Herzégovine, en soit chargé. Dans ce cas, compte tenu de l’ampleur des obligations prévues (qui incomberont en premier lieu au Coordonnateur), il faudra préciser que le Coordonnateur ne sera pas en mesure d’accomplir d’autres tâches au sein du Ministère de la justice.

Deuxième possibilité

21.Si le Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine considère, pour une raison quelconque, qu’il n’est pas souhaitable de confier au secrétaire spécial au sein du Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine l’exécution de toutes les activités proposées dans le présent rapport, je propose que l’on demande au Ministère de la justice de désigner une personne qui sera chargée de cette mission. Dans ce cas, compte tenu de l’ampleur des obligations prévues (qui incomberont en premier lieu au Coordonnateur), il faudra préciser que le Coordonnateur ne sera pas en mesure d’accomplir d’autres tâches au sein du Ministère de la justice.

22.Au bout d’un an, la procédure de révision peut être engagée et la décision annulée. Le Conseil de révision des décisions administratives soumet un rapport ou des recommandations administratives à M. Gordon England, Secrétaire adjoint à la défense, qui prend la décision finale.

23.On peut conclure, à partir des contacts que j’ai eus en qualité de représentant de la Bosnie‑Herzégovine avec les quatre citoyens bosniaques détenus à Guantánamo, qu’ils savaient jusqu’à un certain point que la procédure de révision mentionnée ci‑dessus serait bientôt engagée.

ANNEXES

1.Procès‑verbal de l’entretien avec le citoyen bosniaque Nechle Mohamed(pièces jointes 1 et 2)

2.Procès‑verbal de l’entretien avec le citoyen bosniaque Mustafa Ait Idir(pièces jointes 1 et 2)

3.Procès‑verbal de l’entretien avec le citoyen bosniaque Boumediene Lakhdar(pièces jointes 1 et 2)

4.Procès‑verbal de l’entretien avec le citoyen bosniaque Boudella Hadj(pièces jointes 1 et 2)

Proposition de conclusions du Ministère de la justice de Bosnie ‑Herzégovine concernant le rapport sur la visite rendue par des représentants de la Bosnie ‑Herzégovine à des citoyens bosniaques détenus dans le camp de détention militaire «Delta» de la base navale militaire des États ‑Unis à Guantánamo (Cuba)

I

24.Après avoir examiné le rapport daté du 10 août 2004, complété par l’annexe I au rapport, en date du 18 août 2004, qu’a établi M. Amir Pilav, représentant du Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine et chef de la délégation qui s’est rendue auprès des citoyens bosniaques détenus dans le camp de détention militaire «Delta» de la base navale militaire des États‑Unis à Guantánamo, le Conseil des ministres a approuvé ledit rapport.

II

25.Le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine est chargé de désigner une personne qui devra mener à bien les tâches suivantes:

a)Fournir les traductions en anglais et en arabe des décisions pertinentes de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine concernant les requérants détenus dans le camp de détention militaire «Delta» de la base navale militaire des États‑Unis à Guantánamo, et les communiquer par voie diplomatique aux États‑Unis d’Amérique afin qu’elles soient notifiées à Nechle Mohamed, Mustafa Ait Idir, Boumediene Lakhdar, Boudella Hadj, Saber Lahmar et Belkacem Bensayah;

b)Obtenir toutes les décisions pertinentes du Ministère de la justice et de la Cour suprême de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine et d’autres institutions de Bosnie‑Herzégovine ayant trait aux procédures engagées contre les requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine concernant la déchéance de la citoyenneté bosniaque, c’est‑à‑dire l’infirmation de ces décisions, ainsi que les décisions relatives au refus de laisser entrer les requérants sur le territoire;

c)Fournir les traductions en anglais et en arabe des décisions pertinentes prises au titre du point 2 de la présente annexe, et les communiquer par voie diplomatique aux États‑Unis d’Amérique afin qu’elles soient notifiées à Nechle Mohamed, Mustafa Ait Idir, Boumediene Lakhdar, Boudella Hadj, Saber Lahmar et Belkacem Bensayah;

d)Obtenir toutes les décisions pertinentes prises par la Cour suprême et le Bureau du Procureur de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine ayant trait aux procédures en cours contre tout requérant devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine;

e)Fournir les traductions en anglais et en arabe des décisions pertinentes prises au titre du point 4 de la présente annexe, et les communiquer par voie diplomatique aux États‑Unis d’Amérique afin qu’elles soient notifiées à Nechle Mohamed, Mustafa Ait Idir, Boumediene Lakhdar, Boudella Hadj, Saber Lahmar et Belkacem Bensayah;

f)Prendre toutes les mesures nécessaires pour que le Ministère de la justice de Bosnie‑Herzégovine soit en mesure de demander aux institutions compétentes des États‑Unis d’Amérique d’extrader vers la Bosnie‑Herzégovine Belkacem Bensayah, poursuivi devant le tribunal municipal de Zenica, ainsi que Saber Lahmar, poursuivi par le Bureau du Procureur de Sarajevo;

g)Mener toutes les activités nécessaires, en coopération avec le Gouvernement de la Fédération de Bosnie‑Herzégovine, pour permettre à celle‑ci de s’acquitter le plus rapidement possible de ses obligations conformément aux décisions pertinentes de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine, en dédommageant les requérants du dommage non financier qu’ils ont subi;

h)Par l’intermédiaire du Ministère des affaires étrangères de Bosnie‑Herzégovine, demander par voie diplomatique les informations ci‑après:

i)Les autorités compétentes des États‑Unis ont‑elles, conformément à leurs lois, mis en accusation un requérant devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine qui est un citoyen bosniaque?

ii)Les autorités compétentes des États‑Unis ont‑elles, conformément à leurs lois, mis en accusation un requérant devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine qui n’est pas un citoyen bosniaque?

iii)Les autorités compétentes ont‑elles des informations permettant d’envisager, dans un futur prévisible, la remise en liberté d’un requérant devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine qui est un citoyen bosniaque ou d’un requérant qui n’est pas un citoyen bosniaque?

iv)Dans quelle phase est la procédure concernant les requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine engagée auprès du Conseil de révision des décisions administratives?

i)En fonction de la phase de la procédure concernant les requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine engagée auprès du Conseil de révision des décisions administratives, prendre toutes les mesures nécessaires en vue d’engager des négociations visant à obtenir l’extradition vers la Bosnie‑Herzégovine des détenus en question, s’il est possible de parvenir à un tel accord avec le Gouvernement des États‑Unis;

j)Obtenir tous les éléments nécessaires pour établir si Tariq Mahmood Ahmed Al‑Sawah, né le 2 novembre 1957 à Alexandrie (Égypte), est un citoyen bosniaque, et si tel est le cas, prendre toutes les mesures nécessaires en vue de rendre visite à cette personne qui est détenue dans le camp de détention militaire «Delta» de la base navale militaire des États‑Unis à Guantánamo;

k)Selon qu’une procédure concernant l’un quelconque des requérants a été ou doit être engagée dans un avenir prévisible, prendre toutes les mesures nécessaires pour avoir recours aux services d’un conseil ayant une expérience reconnue dans un domaine juridique pertinent et devant les cours, tribunaux et autres autorités compétents afin de ne rien négliger pour protéger les droits des requérants pendant leur détention aux États‑Unis d’Amérique et de faire en sorte que chaque partie poursuivie (la Bosnie‑Herzégovine et la Fédération de Bosnie‑Herzégovine) assume la moitié des frais d’avocat et de conseil, ce que la Bosnie‑Herzégovine n’a pas encore fait;

l)En fonction des jugements éventuellement prononcés aux États‑Unis d’Amérique contre les requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine, prendre d’autres mesures complémentaires conformément aux décisions pertinentes de ladite Chambre;

m)Prendre toutes les mesures nécessaires qui ne sont pas expressément énoncées dans les présentes conclusions en vue d’appliquer pleinement toutes les décisions pertinentes concernant les requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine;

n)Prendre contact avec les épouses des requérants devant la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine et les informer de la visite que des représentants de Bosnie‑Herzégovine ont rendue à leur époux. Les informer également des prochaines mesures que le Conseil des ministres de Bosnie‑Herzégovine compte prendre pour donner pleinement effet à toutes les décisions pertinentes de la Chambre des droits de l’homme de Bosnie‑Herzégovine, et donner à chacune les photos de leur époux prises par les autorités compétentes des États‑Unis, qui figurent dans les annexes au rapport rédigé par M. Amir Pilav le 10 août 2004.

III

26.Une personne investie des fonctions énoncées dans la deuxième partie des conclusions proposées au Ministère de la justice ne peut en être démise que sur décision motivée.

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