Taux de flux

1 re année

2 e année

3 e année

4 e année

5 e année

6 e année

% promotion

65,7

70,0

71,4

68,8

77,8

65,9

% redoublement

18,7

18,2

18,7

16,3

14

16

% abandon

15,6

11,8

9,9

14,9

8,2

18,1

Le problème de la qualité se pose dans les mêmes termes au niveau du secondaire. Selon des données, qui remontent à 1990, sur 2 747 enseignants du secondaire, 366 seulement ont un diplôme de l’École normale supérieure, 500 ont un diplôme universitaire, 1 315 ne possèdent que le certificat de fin d’études secondaires. Ce manque de qualification s’explique, à ce niveau, notamment par le fait que dans un marché de l’éducation où le besoin ou la demande est très fort et l’offre très limitée, le côté business l’emporte souvent au détriment des règles minima de qualité.

Le rendement interne des cycles secondaires illustre aussi ce rapport à la déperdition. Sur 288 entrants en 7e année fondamentale, 164 seulement réussissent la 9e; les autres auraient abandonné leurs études. Et, quand on considère l’obtention du diplôme du Bac II, on constate que moins d’un quart de la cohorte initiale arrive en bout de cycle.

Par exemple, pour l’ensemble du pays, sur 69 555 élèves en 6e année l’on enregistre seulement un taux de réussite de 60,4 % et en 9e année 16,3 % en 1996, en Bac I et II respectivement 6,8 % et 22,67 % en 1998.

La faiblesse du système de contrôle ou d’encadrement mis en place par l’État représente l’un des facteurs importants d’explication de la faible qualité de l’éducation dans le pays. En se référant aux critères de ratio élèves par enseignant, de ratios écoles par inspecteur et de ratios enseignants par inspecteur, l’on se rend compte que pour l’ensemble du pays les inspecteurs ne sont pas en nombre suffisant pour offrir un encadrement systématique aux écoles (1 inspecteur pour 31 écoles) et aux enseignants (1 inspecteur pour 117 enseignants).

b) La mise en œuvre du processus

En 1995, le Gouvernement a entrepris la généralisation du programme de l’école fondamentale. La démarche participait aussi bien du souci de non–discrimination que de celui de la gouvernance qui exigerait que toutes les écoles du pays, à l’exception des enclaves étrangères, suivent et appliquent le programme officiel du MENJS.

Pourtant, cette généralisation devra souffrir de l’absence de mesures d’accompagnement capables d’assurer l’enchaînement des cycles et des autres filières. Par exemple, le nouveau secondaire devrait permettre à l’enfant sorti du troisième cycle de choisir la filière classique ou la filière professionnelle. Mais, bien que prévu, il n’est pas encore réalisé à cause de l’existence d’un certain nombre d’écueils.

En effet, outre le manque de ressources de tous genres, la mise en place de l’approche s’est heurtée à la nécessité de tenir compte des aspirations de toute la société réclamant une école de qualité et adaptée aux exigences des temps nouveaux. Pour cela, il a fallu mettre du temps pour concevoir un projet adéquat. À cette fin, des actions dont la mise sur pied de la Commission nationale pour les programmes d’études et des groupes techniques par champ disciplinaire sont maintenant en cours.

c) La gouvernance

La gouvernance du système éducatif haïtien est assurée par le Ministère de l’éducation nationale, de la jeunesse et des sports (MENJS). Structure centrale, il est relayé par les directions départementales (10) en ce qui concerne sa déconcentration territoriale. Cependant, avant l’établissement du Plan se posaient des problèmes de coordination, de clarté des procédures, de centralisation extrême, de contrôle et d’encadrement.

Le diagnostic technique qui précède le Plan soutient, par exemple, que les directions départementales ont très peu d’impact sur l’organisation et le fonctionnement des établissements d’enseignement à cause du manque de ressources humaines et financières suffisantes pour accomplir leurs tâches de contrôle, de gestion, de supervision, d’encadrement et d’appui pédagogique. Le même problème se rencontrait aux niveaux du rectorat de l’Université d’État, de l’Institut national de formation professionnelle et d’autres institutions de l’administration.

L’ensemble de ces questions n’a pas encore trouvé toutes les réponses qu’il faut. Mais le processus engagé par l’État avec le Plan se poursuit dans cette perspective. En effet, au cours de la période 1996–1998, un certain nombre d’initiatives ont été prises dans le sens de l’opérationalisation de l’axe de la gouvernance. Citons, entre autres:

L’élaboration d’un projet de loi d’orientation de l’éducation qui attend aujourd’hui la sanction du parlement en vue de fournir le cadre légal dans lequel vont s’inscrire les différentes interventions programmées dans le PNEF;

L’élaboration d’un projet de loi organique sur la restructuration du ministère;

L’établissement d’un schéma directeur dont l’application amènera à une gestion plus rationnelle des ressources mobilisées;

La reprise de la collecte systématique de données sur le fonctionnement et l’évolution du système éducatif aux niveaux du préscolaire, du fondamental et du secondaire;

Le lancement du Programme d’appui au renforcement de la gouvernance du système éducatif haïtien (PARGSEH);

Le renforcement de la direction départementale;

La mise sur pied du Centre de formation des cadres de l’éducation (CFCE) et aussi du Centre de formation pour l’école fondamentale (CFEF), etc.

La démarche subit, toutefois, le contrecoup de la crise économique et financière qui limite les interventions publiques. Le nouveau parlement devrait voter de nouvelles lois budgétaires et allouer de plus importantes ressources à la hauteur des ambitions du Gouvernement en matière d’éducation.

d) La question curriculaire: des problèmes de mise en œuvre

Au niveau du curriculum, deux problèmes se posent. Le premier prend corps dans la rareté ou l’inexistence d’enseignants formés à la passation d’un certain nombre de matières dont l’initiation aux technologies et aux activités productives (ITAP), l’éducation physique et sportive, ou encore l’éducation artistique qui se voient enseignées seulement dans quelques écoles de la capitale ou des plus grandes villes de province. Il s’ensuit, dans ces conditions, une école à double vitesse tant du point de vue de la qualité de l’enseignement dispensé que de celui de l’application des programmes.

Le second problème est les curricula actuellement en application qui présentent des difficultés en rapport avec la définition des profils de sortie, les contenus et compétences eu égard à la formation de l’homme nouveau comme fondement de la nouvelle éducation haïtienne. En ce sens, le ministère est en train de préparer le Livre blanc du curriculum de l’École haïtienne. Quant à la formation des enseignants, elle reste l’une des priorités de l’État. La mise sur pied du Centre de formation pour l’école fondamentale (CFEF) devra permettre de combler progressivement les vides.

e) La formation professionnelle

La formation professionnelle et technique fait face à un ensemble de problèmes qui bloquent son développement. Il faut citer notamment son inadéquation par rapport à la demande du marché (le verdict des entreprises est lourd: pour chaque 1 000 travailleurs employés, seulement 6 d’entre eux ont reçu une formation professionnelle sanctionnée par un diplôme sans que cela ne témoigne de la maîtrise réelle d’une quelconque compétence. C’est pourquoi les techniciens qui viennent de l’étranger se voient vite sollicités par les entreprises du pays), le foisonnement des centres privés de formation ne faisant l’objet d’aucun contrôle, la mauvaise représentation de la société la considérant comme une option de rechange à ceux qui ne peuvent pas réussir les filières classiques, etc.

L’Institut national de formation professionnelle (INFP), entité du MENJS chargée de définir, d’orienter et de gérer la politique de l’État en matière de formation professionnelle, est dépourvu de tous les moyens pour intervenir. Cependant, comme tous les autres secteurs, il bénéficie de la mouvance globale des réformes du système éducatif haïtien.

En effet, le ministère a conçu et élaboré en 1998 un projet de réforme du système de la formation professionnelle actuellement à l’exécution dont l’objectif global consiste à en moderniser la structure et la conception par le renforcement de la gouvernance du système, l’amélioration de la qualité et de l’efficacité de la formation, l’offre d’un accès plus grand et plus équitable, etc.

Des études, recherches et consultations se réalisent actuellement en vue de définir le cadre normatif et pratique de la formation technique et professionnelle dans le pays.

f) Le problème des enfants handicapés

Seulement 1,7 % des 120 000 enfants handicapés en âge de scolarisation fréquentent des écoles spéciales aujourd’hui. Outre le manque de personnel formé comme facteur explicatif, il faut avouer que, jusqu’en 1993, la problématique des enfants handicapés ne figurait pas au nombre des priorités du Ministère de l’éducation nationale; ceci explique que les rares centres qui existent appartiennent au secteur privé. De même, l’état d’ignorance de la société par rapport à cette question la porte à faire très peu d’investissements dans les enfants handicapés.

Aujourd’hui, l’intérêt de l’État est bien manifeste. En 1993, le ministère institue la Commission de l’adaptation scolaire et d’appui social dont le mandat consiste à faciliter la scolarisation et l’intégration des enfants handicapés et aussi à venir en aide aux élèves défavorisés du système éducatif.

L’année 1994 a vu les premières interventions fortes telles que l’intégration des enfants handicapés dans le système éducatif, l’accès de ces derniers aux examens officiels du baccalauréat et à l’université. Depuis cette date, en partenariat avec la Société haïtienne d’aide aux aveugles (SHAA), le ministère a entrepris d’intégrer des enfants handicapés visuels dans les classes ordinaires. Ce programme se déroule dans des conditions normales.

De 1997 à 1999, le ministère, en partenariat avec le Centre d’éducation spéciale (CES), a élaboré un curriculum pour les déficients mentaux légers en vue de leur intégration dans des écoles publiques. Une formation spéciale en psychopédagogie a été donnée à un groupe d’éducateurs devant travailler avec ces enfants.

Les 2 et 3 décembre 1999 a été organisé, sous le patronage du Ministère de l’éducation, de la Faculté des sciences humaines et de l’Université Quisqueya (UNIQ), un colloque sur l’intégration/réintégration des personnes handicapées. En matière d’éducation et de formation professionnelle, de pertinentes recommandations sont faites au ministère en ce qui concerne leur accès, leur encadrement, la formation spéciale des éducateurs et la participation des secteurs non publics aux processus de décisions. Ces derniers représentent déjà les plus importants opérateurs dans le domaine de l’assistance aux personnes handicapées dans le pays.

L’État haïtien n’a pas encore défini une politique nationale d’éducation spéciale. Mais il y est fermement engagé. Des démarches sont entreprises, en ce sens, dans le cadre de la coopération bilatérale. C’est dans cette perspective aussi que s’inscrit le projet de loi d’orientation de l’éducation qui fixe les règles pour l’égalisation des chances pour les personnes handicapées.

4. Les progrès généraux réalisés

En valeur relative, compte tenu des limitations de moyens et du cadre global de réforme du système éducatif haïtien, l’action de l’État a permis d’apporter des solutions à un ensemble de problèmes qui affectent le système.

Le ministère a constitué une cellule de pilotage du PNEF qui opère actuellement dans le plateau central. Ce programme vise à faire rentrer à l’école 47 143 enfants âgés de 6 à 12 ans. La réalisation de la première partie du mandat de la cellule a ouvert l’accès à 17 000 enfants avec la création de 372 nouvelles salles de classe. Tout est déjà mis en place pour que, d’ici septembre 2000, tous les enfants soient entrés à l’école dans le plateau central. Cette expérience devra permettre à l’État de poursuivre ses objectifs d’arriver aux horizons 2004 à la scolarisation de tous les enfants à travers tout le pays.

La Direction du contrôle et de la qualité (DCQ) et la Direction de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique (DESRS) sont aussi créées au sein du ministère en vue de renforcer la capacité du système.

Le Programme d’appui à l’éducation en Haïti (PAEH) se réalise dans le cadre de la coopération bilatérale.

L’ouverture du premier Centre de formation pour l’école fondamentale (CFEF) en 1999 et la transformation progressive des Écoles normales d’instituteurs (ENI) en CFEF témoignent du souci du MENJS de former des maîtres efficaces capables d’intervenir de manière systématique dans les salles de classe.

Le problème des surâgés bénéficie d’une attention particulière. Actuellement, avec l’appui de la coopération bilatérale, le MENJS est en train de développer un curriculum sur quatre ans pour les surâgés de l’École fondamentale. Ce programme est maintenant en expérimentation dans le plateau central.

La création de la Commission nationale pour l’éducation des filles (CONEF) ainsi que de la Commission nationale pour le développement de la petite enfance (CODEPE) sont des initiatives entreprises par le ministère dans le but de mettre en place toutes les structures pouvant permettre d’éliminer toutes les formes de discrimination, d’une part, et de prendre en charge l’éducation de tous les enfants du pays, d’autre part.

Le Programme national de cantine scolaire (PNCS), mis en œuvre depuis 1997, permet à environ 105 000 enfants de l’école fondamentale du secteur public de prendre un repas chaud chaque jour.

Chaque année, le ministère accorde une subvention et distribue des centaines de milliers d’uniformes et du matériel scolaire de tout genre aux enfants.

En matière de gouvernance, outre les réformes précédemment rapportées, il faut faire remarquer que le ministère s’est engagé dans sa propre décentralisation en facilitant la responsabilisation et l’autonomisation des directions départementales. De même, compte tenu du poids du secteur non public dans l’éducation haïtienne, il a été institué en décembre 1999 la Commission nationale du partenariat. Le souci du ministère est à ce niveau de développer des liens réticulaires entre les différents partenaires et/ou opérateurs en vue de rétablir le leadership de gouvernance du secteur.

La Commission du partenariat, appelée à se transformer en un office du partenariat selon ses propres propositions, continue une tradition de collaboration avec les opérateurs non publics initiée depuis l’élaboration du PNEF.

Malgré les faiblesses qu’accuse encore le système éducatif haïtien, il n’y a pas lieu de mettre en doute la volonté du Gouvernement de répondre aux exigences du système. Cependant, les difficultés budgétaires ne permettent pas de faire des interventions adéquates à la mesure de tous les problèmes.

En fait, les problèmes de manque de ressources humaines, matérielles et informationnelles sembleraient entretenus par l’insuffisance relative du budget alloué à l’éducation. Au cours de l’exercice 1996/97, en effet, les fonds destinés au Ministère de l’éducation représentaient 9,35 % du budget national, soit 41,58 % de toute l’allocation destinée au secteur socioculturel, tandis que pour l’exercice 1999/00, ils s’élèvent à 22 % du budget de l’État; c’est là la manifestation de l’intérêt porté à l’éducation des enfants et des jeunes du pays.

Par contre, il faut mentionner le non–respect des engagements internationaux envers Haïti comme contrainte pesant sur les interventions publiques. Le cadre d’action de Dakar adopté en avril 2000 stipule en son paragraphe 17 que «partout où ces processus sont engagés…chaque partenaire apportera sa contribution en fonction de ses avantages comparatifs à l’appui des plans nationaux (de l’éducation pour tous) pour combler le déficit des ressources».

B. Loisirs, sports, activités récréatives et culturelles

1. Loisirs et activités récréatives

Il n’existe pas dans la législation haïtienne des dispositions systématiques se rapportant aux loisirs, aux sports et aux activités récréatives à l’intention des enfants. On mentionnera, cependant, l’article 325 du Code rural de 1963 qui fait obligation à chaque section communale d’affecter aux loisirs une aire de 150 x 150 m. Néanmoins, même lorsque des textes de lois ne le définissent pas tel que le fait la Convention en son article 31, le droit des enfants aux loisirs constitue une pratique traditionnelle.

Les loisirs, les sports et les activités récréatives sont un secteur relevant de la compétence de la Secrétairerie d’État à la jeunesse, aux sports et au service civique (SEJSSC). On notera que ce secteur se classe parmi les plus dynamiques du pays aujourd’hui, même si les écoles ne sont pas toujours bien équipées pour permettre aux enfants de jouer pendant la journée.

En effet, malgré ses moyens limités, la SEJSSC s’est engagée depuis 1997 dans la réalisation d’un ensemble d’activités qui témoigne de sa volonté d’encadrer les jeunes. L’Académie nationale de football est appelée à former les jeunes de 7 à 12 ans; l’éducation physique et sportive à l’école et l’école nationale des talents sportifs sont elles aussi des structures permanentes de développement du sport et de la culture physique.

Le projet OPÉRATION 2006 prend corps dans l’organisation d’un ensemble d’activités ou de compétitions à travers les différentes régions sportives du pays dans le but de recruter des jeunes talents du football auxquels la SEJSSC donne une formation soutenue en vue de relever le niveau du football haïtien. Cette formation ne se borne pas seulement à la discipline sportive à laquelle s’adonnent ceux–ci, mais aussi elle s’accompagne de la poursuite des études au plan scolaire. L’expérience est actuellement menée au ranch de la Croix–des–Bouquets.

En effet, depuis 1995 la SEJSSC organise régulièrement les «camps d’été de l’excellence». A cette activité réalisée pendant 21 jours au centre de formation de la SEJSSC à la Croix–des–Bouquets, participent des enfants âgés de 12 à 15 ans, invités sur la base de leur performance académique. Ils viennent de toutes les communes du pays. Cet espace d’expression, d’échanges, de création et d’apprentissage facilite l’intégration sociale et la découverte de talents cachés.

Par ailleurs, dans le but de favoriser les échanges interculturels et de renforcer les liens de fraternité et de solidarité entre les jeunes de différents pays, la SEJSSC a organisé, toujours à la Croix–des–Bouquets, deux camps d’été internationaux: Eté 98 et 99, réunissant des enfants âgés de 12 à 17 ans venus de Cuba, de la République dominicaine, du Québec (Canada), de la Guadeloupe, de la Martinique et d’Haïti.

Des tournois scolaires dans différentes disciplines sont aussi organisés chaque année tandis que d’autres activités sportives et récréatives telles que l’animation de quartier se déroulent tout au long de l’année. L’animation dans les écoles, quoique réalisée à une échelle relativement réduite, se fait en vue de permettre aux enfants non seulement de développer leur savoir ou d’intégrer les notions apprises mais aussi et surtout d’exercer leur créativité et leurs talents naturels.

Toutefois, ce n’est pas sans difficulté que la SEJSSC réalise ces activités. Elle reste une institution centrale qui facilite la participation des populations sur le plan local. Elle est principalement relayée à ce niveau par les agents multiplicateurs de changement (AMC) et les moniteurs dans chaque commune du pays.

Le problème des ressources humaines, tant du point de vue du nombre que de celui de la formation, limite l’étendue des activités de la SEJSSC. Cependant, il faut reconnaître l’importance de la coopération bilatérale qui accorde des bourses de formation à l’étranger à des jeunes moniteurs ou techniciens sportifs haïtiens.

L’autre handicap au fonctionnement de l’institution demeure l’éternelle question budgétaire. En ce sens, les moyens ne permettent pas d’intervenir de manière optimale, voire satisfaisante. Là encore la coopération internationale joue un rôle de premier plan.

Les infrastructures manquent aussi. Un seul stade réunissant les conditions minimales exigées par la Fédération internationale de football. Les stades au niveau des communes sont dépourvus de tout équipement et sont de capacité très limitée; seule la région métropolitaine dispose de deux centres sportifs, encore sans infrastructures. À cause de cette situation, les jeunes organisent leurs activités de quartier là où ils trouvent le moindre espace, parfois en pleine rue.

2. Activités culturelles et artistiques

Le secteur culturel et artistique relève de la compétence du Ministère de la culture. En ce qui concerne les enfants, cette institution, toute récente d’ailleurs, n’a pas encore défini de projet systématique.

Le diagnostic et le plan directeur établis pour le secteur témoignent à la fois d’une certaine centralisation des activités récréatives et culturelles (il existe très peu de cinémas, de centres culturels ou de récréations) à Port–au–Prince et d’une marginalisation de l’art en général.

Ce secteur connaît alors un très faible développement qui s’explique notamment par la faiblesse des interventions publiques et l’absence d’éducation et de formation artistique. Car, ni l’administration centrale, ni les pouvoirs locaux ne sont encore arrivés à remplir leur rôle stratégique d’organisation de la vie culturelle. Évidemment, le Ministère de la culture n’est vieux que de cinq ans et les pouvoirs locaux ne sont pas fonctionnels. Ce qui signifie que le secteur cherche encore à se structurer. D’où un très insignifiant soutien à la création encore circonscrit dans l’aire métropolitaine à partir de demandes formulées par les bénéficiaires, donc des professionnels.

En matière de réglementation et de législation, n’existent que les lois sur le fonctionnement des médias mettant l’accent sur l’obligation d’une information à valeur culturelle, éducative et morale. Mais, là encore, aucun contrôle ne s’exerce au point d’entendre ou de lire des choses des plus violentes, des plus choquantes et portant atteinte à la pudeur. Les activités des stations de radio se limitent principalement, ou presque exclusivement, à la diffusion de la musique dansante.

Dans le système scolaire, par contre, il existe un module à l’école fondamentale intitulée «Éducation artistique». De toute évidence, son contenu est de nature à développer le goût de l’art et le développement de la créativité des enfants. Mais, comme indiqué précédemment, il n’est pas passé. Certaines écoles du pays dispensent à leur gré des cours de dessin et de solfège. Rares sont les écoles (trois au total) de la capitale où sont dispensés des cours d’art.

Les perspectives sont, par contre, définies dans le plan directeur de la culture élaboré par le ministère en février 1999. En effet, l’axe éducation–formation–communication constitue la deuxième priorité, après le renforcement légal et institutionnel. L’action culturelle, à ce niveau de la hiérarchie des priorités, vise à valoriser la culture nationale tout en la dynamisant et à identifier et concevoir les actions d’éducation, de formation et de communication devant permettre la mise en œuvre du plan.

La démocratisation de la culture s’inscrit parmi les buts et les finalités de ce plan. Ce dernier prétend donner aux citoyens les moyens de réaliser pleinement leur dignité d’être humain: la création des valeurs se fonde sur la libre expression des activités culturelles. De même, sans la garantie de l’accès de tous à la culture, aucune culture nationale ne peut se constituer et se développer.

La difficulté majeure à laquelle fait face le Ministère de la Culture réside dans ses faiblesses structurelles et l’indisponibilité de ressources de tous genres en vue d’une action efficace. Il faudra attendre que le parlement vienne voter les lois sur l’organisation et le fonctionnement de ce ministère, tout comme l’allocation budgétaire pour lui permettre de mener à bien sa politique en la matière. Ce ministère devra aussi se pencher de manière spécifique sur le droit culturel des enfants reconnu par la Convention. Le besoin d’encadrement des enfants se fait de plus en plus sentir.

VI. MESURES SPÉCIALES DE PROTECTION DE L’ENFANT

A. Les enfants en situation d’urgence

1. Les enfants réfugiés

L’administration n’enregistre pas de cas d’enfants réfugiés en Haïti. Mais cette question est prévue par la Constitution du pays particulièrement. Deux prescrits la règlent: le premier concerne le droit d’asile qui est reconnu aux réfugiés politiques (art. 157) et le second portant sur le droit des étrangers se trouvant sur le territoire de la République de bénéficier de la même protection que celle accordée aux nationaux, conformément à la loi.

Les lois haïtiennes manifestent un certain mutisme à l’endroit des enfants en ce qui concerne certains droits relevant du registre politique, il est tout simplement correct d’affirmer que les mineurs réfugiés ou enfants de réfugiés jouissent du droit à la protection. Et, l’État haïtien a l’obligation de la leur garantir: l’Office national de la migration (ONM) est l’instance étatique ayant pour mandat d’encadrer, de fournir aide et assistance aux réfugiés, ainsi que de les intégrer dans leur communauté.

Cependant, mis à part les faiblesses structurelles et procédurières, certaines décisions de placement d’enfants étrangers prises par le tribunal pour enfants, même lorsqu’elles ne concernent pas des enfants réfugiés, montrent clairement l’intérêt de la justice haïtienne pour la protection de cette catégorie d’enfants. Il s’agit, par exemple, selon des renseignements fournis par le tribunal pour enfants, d’enfants américains placés provisoirement dans des familles d’accueil ou sous le régime de la liberté surveillée.

2. Les enfants des rues

Les enfants des rues en Haïti représentent une catégorie très fragile des points de vue social, sanitaire et éducationnel. Selon les estimations, en 1991 leur nombre variait entre 1 500 et 2 000. Ces enfants, qui vivent totalement dans les rues, proviennent de familles très défavorisées logées dans des bidonvilles. Leur situation ne leur permet pas d’aller à l’école et ils sont ainsi obligés de chercher durant la journée une occupation pouvant leur rapporter de l’argent pour leur survie. Aujourd’hui, leur nombre aurait augmenté de 300 %. Leur âge moyen se situe entre 10 et 14 ans selon la même étude.

Les enfants des rues vivent dans des conditions d’hygiène déplorables: ils mangent peu et de manière irrégulière, ils souffrent de maux de tête, de fatigue, d’insomnie, d’anxiété, et sont plus particulièrement exposés à la tuberculose, à l’anémie, aux maladies de la peau et aux MST. Beaucoup d’entre eux se droguent et se prostituent.

Il n’existe pas de centres publics spéciaux pour encadrer et soigner ces enfants. Ils sont desservis par toutes les institutions publiques. Certaines institutions non publiques, dont le Centre Cornell Geshkio pour la prévention du Sida et les autres MST et la Maison Arc‑en‑Ciel, offrent des services de santé à ces enfants et à ceux qui sont orphelins du sida à partir d’une clinique mobile.

L’effectif des enfants de rue est appelé à grossir compte tenu de la paupérisation croissante dans le pays et le développement continu de l’exode rural. Le Ministère des affaires sociales (MAS) vient d’instituer les points de ralliement en vue d’accueillir ces enfants et leur offrir des conditions de vie capables de leur garantir un environnement vital normal conforme aux préoccupations de la Convention. Le premier fonctionne déjà à Port–au–Prince depuis deux mois. Il est prévu de les disséminer à travers tout le pays.

3. Les enfants en domesticité

Un ou une enfant domestique vit dans un foyer constitué de gens n’appartenant pas à sa famille naturelle. Il/elle rend toutes sortes de services à ces familles d’accueil, sans rémunération et dans des conditions voisines de l’esclavage imposées par ceux ou celles qui tiennent lieu de maîtres ou de maîtresses. En contrepartie, cet/cette enfant, sans gage, se contente du gîte, de la nourriture et des vêtements usagés.

Le Code du travail recommande aux familles d’accueil d’offrir à l’enfant une alimentation et un hébergement décents ainsi qu’un repos quotidien de dix heures et une journée de congé par semaine. Il en est de même pour l’accès à l’éducation, à la santé et aux loisirs. Malheureusement, aucune de ces recommandations n’est suivie par ces familles d’accueil, ce qui rend la vie de ces enfants particulièrement difficile.

Les enfants en domesticité sont le plus souvent affectés par la gale, la typhoïde, la gastro‑entérite, les parasitoses, l’avitaminose A, les IRA, la tuberculose, la méningite, le paludisme, la conjonctivite, les infections urinaires, les mycoses, les MST et, de plus en plus, le sida.

La domesticité est une pratique de fait condamnée par les instances publiques. Autrefois, l’Institut du bien–être social et de recherche (IBESR) devait accorder l’autorisation d’engager ou de prendre un/une enfant en domesticité. De nos jours, il s’y oppose de fait en n’en délivrant aucune. Évidemment, il ne dispose pas de moyens de contrôle des conditions de vie que connaissent ces enfants dans ces familles.

L’idée de l’adoption de mesures contraignantes par l’État pour interdire la domesticité présente l’avantage d’être facile au regard de la Convention. Mais elles seront de nul effet si elles ne s’accompagnent de mesures supplémentaires pour permettre aux parents de répondre à certaines exigences quotidiennes, car les familles qui confient leurs enfants en domesticité le font parce qu’elles n’ont pas les moyens de subvenir à leurs besoins. Il s’ensuit que la domesticité leur apparaît bien souvent aussi comme ascenseur social.

Des réflexions sont engagées par les pouvoirs publics en vue de sensibiliser la société haïtienne sur ce problème. Il est déjà suggéré que la domesticité n’apparaisse point dans le Code du travail que le parlement devra voter prochainement.

B. Les enfants en conflit avec la loi

L’administration de la justice pour mineurs

L’administration de la justice pour mineurs est régie par la loi du 7 septembre et le décret du 20 novembre 1961. Le tribunal pour enfants est institué dans le ressort de chaque cour d’appel depuis 1961. Un juge des enfants est délégué à chaque juridiction civile (il en existe 15 pour tout le pays); des juges d’instruction et des commissaires du Gouvernement sont également prévus. Il existe par ailleurs une cour d’assise des mineurs qui connaît les crimes commis par les mineurs de 16 ans; ceux de moins de 16 ans sont jugés par le tribunal pour enfants.

La loi est alors venue mettre un terme aux anciennes procédures consistant à déférer les mineurs appréhendés pour un délit ou un crime par–devant les juridictions pénales de droit commun.

La législation établit toutefois le principe de l’irresponsabilité pénale du mineur de moins de 13 ans, l’âge de la majorité pénale étant fixé à 16 ans environ. Entre 13 et 16 ans le mineur ayant commis une contravention sera passible d’une simple admonestation ou d’une amende. Celui qui aura commis un délit ou un crime sera passible d’une mesure éducative, le cas échéant, d’une condamnation pénale avec la faculté pour le juge des enfants de rejeter l’excuse atténuante de minorité par décision motivée.

L’article 51 du Code pénal stipule toutefois que lorsque les circonstances de la cause ou la personnalité du mineur inculpé l’exigent, une responsabilité atténuée peut être reconnue. À ce moment, le mineur encourt la condamnation à huit ans de traitement dans un centre d’éducation corrective de l’État ou à trois ans au plus dans un centre professionnel spécialisé.

En cas de délit ou de crime, le juge pour enfants prendra des mesures de protection, de surveillance ou d’éducation pour les mineurs de 11 ans.

Dans tous les cas, le mineur ne subira aucune peine afflictive ou infamante, ni de traitement inhumain ou dégradant. Quant à la peine de mort, elle est abolie en toute matière par la Constitution (art. 20).

Dans les faits, cette administration de la justice pour mineurs connaît des difficultés d’application. D’abord, il n’existe qu’un seul tribunal pour enfants et trois juges d’instruction pour mineurs nommés sur l’ensemble du territoire. Ensuite, l’IBESR, qui est l’auxiliaire du tribunal pour enfants en ce qui concerne le suivi de placement dans des centres de rééducation et de réinsertion, n’a aucun moyen d’action: pas un centre d’accueil et de protection en général, car, vis–à–vis de la loi pénale, le mineur bénéficie en priorité du principe de l’irresponsabilité. À son endroit ne peuvent être prises que des mesures de contrôle, de placement et de réparation par le juge des enfants.

Or, le manque de centres d’accueil pour ces enfants oblige le plus souvent l’administration à les garder dans des centres de détention. Cette situation se révèle une violation de la loi nationale en la matière, tout comme les alinéas b, c et d de l’article 37 de la Convention. C’est aussi une mesure malencontreuse pour autant que cet univers carcéral ne représente nullement un espace de protection en soi pour le mineur, car dépourvu de toutes structures d’accueil et d’encadrement pour les enfants.

Sortis de prison, ces mineurs regagnent leurs milieux naturels (famille, rue, par exemple) ou sont confiés à l’IBESR afin qu’ils puissent trouver un foyer de réinsertion ou de réadaptation.

Les interventions des pouvoirs publics pour résoudre ces problèmes ne peuvent être que très ponctuels en raison des limitations de ressources de tous ordres. Cependant, le souci du Gouvernement d’y faire face est évident dans la mise sur pied de la Commission interministérielle des droits de l'enfant dont le mandat est notamment d’élaborer une stratégie de lutte contre la délinquance juvénile dans le pays. La réforme de l’IBESR par la mise à sa disposition de nouveaux moyens d’action et la réforme du système pénitentiaire sont déjà entreprises à la suite des recommandations de la Commission nationale pour la réforme administrative (CNRA). Tout cela devra naturellement conduire à une amélioration de l’administration de la justice des mineurs.

C. Les enfants victimes d’exploitation

1. La situation au travail

L’âge du travail rémunéré des enfants est fixé à 15 ans par le Code du travail mais tout engagement d’un enfant doit être précédé d’une autorisation de la Direction du travail du Ministère des affaires sociales (MAS).

Les enfants qui fournissent un travail rémunéré bénéficient des dispositions du Code du travail, celui–ci les protégeant contre les forfaits des employeurs. Le tribunal du travail est appelé à trancher tout différend qui oppose les employeurs et les employés.

Les enfants victimes d’exploitation dans ces conditions de travail n’obtiennent pas de soins spéciaux ni de réhabilitation de la part de l’État. Certaines œuvres privées, dont le Foyer Maurice Sixto, avec le concours de l’État, encadrent les enfants en domesticité, et, là aussi, certaines familles s’y opposent systématiquement.

Bien évidemment, l’État n’a pas les moyens d’intervenir immédiatement pour enrayer ce malaise que représentent le travail et la non‑réhabilitation des enfants victimes d’exploitation. Cependant, le Gouvernement a déjà entrepris des démarches et a souscrit à la résolution de l’OIT préconisant l’élimination du travail des enfants.

2. Les victimes de la drogue

L’usage illicite des stupéfiants est un délit en droit haïtien. Le mineur victime de cet état de fait devrait normalement bénéficier d’un encadrement médico–social sous la surveillance d’une commission composée de médecins au sein de sa famille, s’il est reconnu usager occasionnel. Au cas où il serait un toxicomane, il subira une cure de désintoxication s’il a moins de 16 ans et sera remis à sa famille. Au–delà de cet âge, il sera déféré au parquet et soigné, poursuivi et jugé. Là encore, les mêmes problèmes de moyens d’encadrement à offrir aux enfants se posent, et l’État n’arrive pas à y faire face malgré toutes ces prévisions législatives.

Quant à l’enfant trafiquant de drogue, s’il a moins de 16 ans, des mesures de protection (contrôle, placement et réparation) seront adoptées en sa faveur. S’il a plus de 16 ans, il est exposé à une peine allant de 3 à 15 ans de détention et à une amende de 250 000 à 2 millions de gourdes. S’il s’agit d’importation, d’exportation, de transit, de production et de fabrication illicite, le trafiquant jugé sera puni d’une détention allant de 5 à 20 ans et d’une amende de 500 000 à 10 millions de gourdes.

3. Les cas de violence et d’exploitation sexuelles

La législation haïtienne parle de viol, d’attentat violent à la pudeur, et encore de détournement de mineur. Ces actes constituent des crimes punis conformément à la loi pénale, c’est–à–dire de la peine de réclusion.

Il existe toutefois des circonstances aggravantes lorsque ces actes sont commis sur la personne d’un enfant. Les auteurs sont alors passibles d’une peine de travaux forcés à temps allant de 3 à 15 ans. Lorsque ces actes sont commis par les personnes ayant autorité sur la victime, la peine consiste en une condamnation aux travaux forcés à perpétuité.

Les données manquent sur la prostitution enfantine et l’éventualité du tourisme sexuel dans le pays. Cependant, en vue de protéger l’enfant contre de tels agissements, la loi pénale fait état du délit d’incitation des mineurs à la débauche à l’encontre de «quiconque aura attenté aux mœurs en excitant, favorisant ou facilitant habituellement la débauche ou la corruption de la jeunesse de l’un ou l’autre sexe au–dessous de 18 ans». Ce délit est puni d’un emprisonnement de 6 mois à 2 ans.

Cependant, les enfants victimes de tels agissements devraient bénéficier d’un encadrement spécial en vue de leur réadaptation et leur réinsertion. La justice, en ce sens, responsabilise l’auteur des actes, de telle sorte que des soins adéquats soient offerts aux victimes. L’IBESR est la structure publique chargée d’aider ces enfants. Mais dans l’état actuel des choses, le manque de moyens bloque l’institution dans ses interventions en faveur des enfants.

Les données manquent aussi sur les enfants victimes (atteints) du sida. Ils bénéficient de soins dans tous les centres de santé. Quand ils en sont orphelins, ils sont pris en charge sur leur demande par l’IBESR qui les place dans des centres d’accueil (Maison Arc–en–ciel notamment).

4. Les vols, ventes et enlèvements d’enfants

L’enlèvement, le recel, la suppression d’un enfant, la substitution d’un enfant à un autre, l’attribution d’un enfant à une femme qui n’en a pas accouché sont des crimes punis de la réclusion. Le crime est constitué si l’enfant est enlevé avec dissimulation de son identité réelle; si cette dernière est maintenue, le crime est tout simplement qualifié d’enlèvement de mineurs.

Des indices de vente et de trafic d’organes d’enfants haïtiens à l’étranger ont motivé le Gouvernement dans l’adoption de mesures permettant de contrôler et éventuellement d’interdire le départ pour l’étranger des enfants haïtiens en compagnie des personnes autres que leurs père et mère. Le cas échéant, une autorisation signée du Ministre des affaires sociales doit être retirée à l’IBESR en vue de permettre le voyage de l’enfant avec une autre personne ou une hôtesse de l’air.

VII. CONCLUSION

L’adhésion de l’État haïtien à la Convention relative aux droits de l'enfant n’en aura pas été une condition suffisante à sa mise en oeuvre. Cette démarche a subi les contrecoups de l’évolution politique caractérisée par l’instabilité, d’une part, et des tentatives de réformes administratives, de l’autre.

En 1995, le pays sortait fraîchement d’une longue crise causée par le coup d’État militaire de 1991. Le retour à l’ordre constitutionnel au dernier trimestre de l’année 1994 n’a guère pu permettre au Gouvernement de la République, préoccupé à mettre de l’ordre, de faire face à un ensemble de problèmes de tous genres qui l’attendaient. Le changement de gouvernement en cette même année 1995 n’a fait que différer certaines politiques déjà initiées.

Le nouveau gouvernement qui est entré en fonction au début de 1996 a continué le travail de celui qui l’avait précédé, consistant à mettre de l’ordre dans les affaires publiques. Il s’est alors engagé dans un vaste programme de modernisation de l’État et a notamment créé la Commission nationale pour la réforme administrative (CNRA) dont l’une des plus grandes tâches a été la redéfinition des missions de l’Etat.

La CNRA a livré ses rapports en 1998. De cette date à aujourd’hui, elle a travaillé avec les différentes institutions de l’État en vue d’opérationnaliser ses recommandations. En 1999 s’est ouverte une nouvelle crise institutionnelle avec la caducité du parlement. Cette absence d’un parlement a quelque peu assombri le paysage politico–administratif par le fait qu’elle a empêché, sur une très longue période, la formation d’un nouveau gouvernement. Il revenait alors au gouvernement démissionnaire, depuis déjà plus d’un an, de continuer à liquider les affaires courantes.

Ce contexte de turbulences politiques n’aura jamais permis aux gouvernements qui se sont succédés d’intégrer de manière systématique toutes les dispositions de la Convention aux stratégies de l’État. Les applications y relatives auront toujours été diluées dans les interventions traditionnelles de l’État en matière sociale, donc de bien–être de tous, notamment de l’enfant haïtien.

Cependant, les avancées ou acquis obtenus depuis la ratification de la Convention illustrent et confortent la position de l’État haïtien, qui se montre très impliqué dans la construction du destin des enfants du pays.

Aujourd’hui, un important mouvement de la société porte au devant de la scène la question des droits de l’enfant haïtien avec, naturellement, le support de la Convention. On doit s’attendre à de nobles résultats dans les années à venir lorsqu’on considère aussi toute la volonté engagée dans ce dossier par l’État.

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