Nations Unies

CRC/C/SR.1526

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr. générale

9 juin 2010

Original: français

Comité des droits de l ’ enfant

Cinquante- quatr ième session

Compte rendu analytique de la 1526 e séance (Chambre B)

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le jeudi 3 juin 2010, à 10 heures

Président: M. Zermatten (Vice-Président)

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques de l ’ Argentine sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l ’ enfant et rapports initiaux de l ’ Argentine au titre du Protocole facultatif à la Convention, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants et du Protocole facultatif à la Convention, concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés (suite)

La séance est ouverte à 10 heures.

Examen des rapports soumis par les États parties (point 4 de l ’ ordre du jour) (suite)

Troisième et quatrième rapports périodiques de l ’ Argentine sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l ’ enfant (CRC/C/ARG/3-4, CRC/C/ARG/Q/3-4 et CRC/C/ARG/Q/3-4/Add.1) et rapports initiaux de l ’ Argentine au titre du Protocole facultatif à la Convention, concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants (CRC/C/OPSC/ARG/1; CRC/C/OPSC/ARG/Q/1 et CRC/C/OPSC/ARG/Q/1/Add.1) et du Protocole facultatif à la Convention, concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés (CRC/C/OPAC/ARG/1; CRC/C/OPAC/ARG/Q/1 et CRC/C/OPAC/ARG/Q/1/Add.1)(suite)

1. Sur l ’ invitation du Président, la délégation argentine reprend place à la table du Comité.

Rapport initial de l ’ Argentine au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant concernant la vente d ’ enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants

2.M me Vessevessian (Argentine) dit qu’en 2008 la loi no 26364 a fait de la traite des personnes un délit de compétence fédérale et marqué le début d’un processus qui s’est amplifié depuis, avec l’ouverture de poursuites contre des personnes accusées de tels faits, qui ont déjà abouti à cinq condamnations ces deux dernières années, la fourniture de services d’assistance et d’aide au retour volontaire aux victimes, ainsi que la systématisation de la collecte de données sur la traite d’êtres humains et une coopération avec les pays de la région, en particulier voisins. L’article 15 de la Constitution interdit la vente d’enfants, tandis que l’article 140 du Code pénal prévoit de lourdes peines d’emprisonnement pour quiconque réduit autrui à la servitude; une révision législative s’impose toutefois pour incriminer expressément la vente d’enfants. En collaboration avec le Secrétariat national à l’enfance, à l’adolescence et à la famille, le Ministère de la justice et des droits de l’homme travaille sur un projet qui sanctionne les intermédiaires et dans certains cas bien précis les acheteurs, mais en aucun cas les victimes. Un important travail sur ce thème est réalisé au sein de la Commission du travail créée par la Cour suprême de justice de la nation, qui rassemble des membres de l’appareil judiciaire, du ministère public et du Secrétariat national.

3.Le Code pénal réprime désormais certains délits informatiques, mais les données statistiques y relatives sont encore peu significatives; pour y remédier, le pays a, notamment, décidé d’adhérer à la Convention sur la cybercriminalité du Conseil de l’Europe et d’inclure dans le dispositif de collecte de données sur les tendances de la délinquance et le fonctionnement des systèmes de justice pénale des modules statistiques sur le thème annuel de la Commission de prévention de la délinquance et de la justice pénale, à savoir pour l’année 2011 «la protection des enfants contre les délits commis en recourant aux nouvelles technologies». L’Argentine entend installer dans différents systèmes informatiques le système d’analyse CETS (Child Exploitation Tracking System), dans sa version 2.1, en vue de prévenir et détecter les cas de pédopornographie.

4.Le Président, s’exprimant en tant queRapporteur pour l’OPSC, se félicite de l’introduction dans la loi no 26061 d’une disposition interdisant l’exploitation sexuelle des enfants. La prostitution des enfants, phénomène longtemps resté invisible faute de données, la première étude consacrée à ce phénomène ayant été réalisée par l’UNICEF en 2000, est une réalité qui n’existerait pas en l’absence en amont de la pauvreté, du chômage, des abandons ou des violences familiales. Face à ce fléau, l’État partie a pris diverses mesures, dont l’adoption de la loi sur la traite et l’assistance aux victimes de traite, d’autres dispositions législatives − visant en particulier les délits informatiques −, de lignes directrices et d’un protocole pour l’aide aux victimes, la création de deux unités spécialisées (relevant l’une du Ministère de l’intérieur et l’autre des services du Procureur de la nation) ou encore la constitution d’un groupe chargé d’éradiquer le travail des enfants. Le tout soulève des questions en termes de coordination, s’agissant en particulier d’un État fédéral, et la délégation voudra donc préciser comment s’articulent, d’une part, la loi no 26061 et la loi relative à la traite des personnes, et, d’autre part, les travaux et services des différentes entités, et comment est assurée la coordination des actions menées en la matière dans les différentes provinces, sachant que les régions frontalières sont sans doute plus touchées que d’autres.

5.Il faudrait en outre indiquer si les questions touchant à l’exploitation sexuelle font l’objet d’un plan spécifique ou ont été intégrées dans le plan d’action national global. Regrettant le peu de statistiques disponibles sur ce sujet, le Président fait observer que les unités spécialisées pourraient se charger de constituer une base de données.

6.Le rapport donne l’impression que la législation définit la servitude et la traite d’enfants, mais pas la vente d’enfants en tant que telle, et que l’adoption relève du Code civil et non du Code pénal. Si tel est le cas, il faudra mettre cette législation en conformité avec le Protocole. Il faudrait savoir si une limite est fixée au nombre d’auditions des enfants victimes et témoins et si des enregistrements audio ou vidéo sont utilisés, pour leur éviter d’être confrontés aux accusés et si des mesures prises pour protéger les enfants des images nuisibles à leur développement.

7.M me El-Ashmawy demande comment l’État partie assure la diffusion du Code de conduite pour la protection des enfants contre l’exploitation sexuelle dans le tourisme et comment est assurée la réadaptation des victimes d’exploitation sexuelle.

8.M. Koompraphant aimerait avoir des renseignements plus détaillés sur les poursuites engagées et les peines prononcées en matière de prostitution des enfants, en particulier savoir combien de proxénètes et de membres de réseaux de criminalité transnationale organisée ont été condamnés et ce qui est fait pour prévenir la traite et identifier les enfants à risque. Il serait aussi utile de savoir si les enfants témoins dans les procédures judiciaires bénéficient d’une attention particulière, notamment d’un programme de protection des témoins.

9.M me Maurás Pérez (Rapporteuse pour l’Argentine) note avec préoccupation que le délit de traite n’est pas constitué si la victime est une personne adulte consentante, faisant valoir qu’une personne adulte peut avoir été recrutée enfant et avoir grandi dans le système, ce qui amène à demander si les délinquants échappent aux poursuites si le crime est découvert après la majorité de la victime; elle aimerait savoir si les cinq personnes condamnées à ce jour étaient des intervenants directs, des intermédiaires ou des membres des réseaux.

10.Elle demande quand pourrait intervenir la réforme législative mentionnée par la délégation et si elle sera précédée d’un débat national et de consultations.

11.M. Filali, revenant sur la confusion entre traite et vente d’enfants, souligne que le temps n’est plus aux débats: une fois le Protocole ratifié, en incorporer les définitions dans l’ordre juridique interne devient une obligation, de même que faire connaître le Protocole et les crimes visés par lui; il aimerait donc savoir si des formations sont assurées aux juges et aux policiers, notamment, et quel rôle les médias jouent dans la sensibilisation de la population.

12.Il demande si l’Argentine a établi sa compétence pour toutes les infractions visées par le Protocole facultatif, notamment si elles sont commises à l’étranger par ou contre des ressortissants argentins ou si l’auteur présumé se trouve sur le territoire argentin, et si la possession de matériel pédopornographique conduit à l’ouverture de poursuites pénales.

13.Le Président, s’exprimant en tant queRapporteur pour l’OPSC, demande si la compétence extraterritoriale de l’État partie pour les infractions considérées est sujette au principe de double incrimination et à la réciprocité en matière d’extradition, et ce qu’il en est de la responsabilité pénale des personnes morales impliquées dans des affaires de prostitution, de vente et de traite d’enfants.

14.M me Maurás Pérez (Rapporteuse pour l’Argentine) demande si l’Argentine envisage de lever sa réserve aux alinéas b à e de l’article 21 de la Convention vu que les conditions que l’État partie jugeait nécessaire de remplir au préalable, à savoir établir un mécanisme de protection juridique de l’enfant afin d’empêcher la vente et le trafic des enfants, semblent réunies.

La séance est suspendue à 10 h 50; elle est reprise à 11 heures.

15.M me Graham (Argentine) dit que son pays fait clairement la distinction entre traite et vente d’enfants. Il n’existe pas de loi interdisant expressément la vente d’enfants mais en vertu de l’article 15 de la Constitution tout contrat d’achat ou de vente de personnes constitue un crime. L’examen de la jurisprudence montre que beaucoup de tribunaux argentins considèrent que l’article 140 du Code pénal, relatif à l’esclavage, est applicable à la vente d’enfants. L’éventuelle adoption d’une loi relative à la vente d’enfants a suscité un débat passionné car les affaires de vente d’enfants sont souvent liées à des adoptions frauduleuses et bien des personnes craignent qu’une telle loi pénalise les parents démunis qui donnent leur enfant en adoption plutôt que les intermédiaires ou des organismes peu scrupuleux. Le Ministre de la justice et le Secrétariat national à l’enfance, l’adolescence et la famille travaillent sur un projet de loi synthétisant les positions des différentes parties. Depuis trois ans, une commission d’étude composée d’experts de la Cour suprême, du ministère public et des organismes de protection de l’enfance se penchent sur une réforme des articles 316 à 318 du Code civil visant à décourager la vente d’enfants. Des lettres signées par des juges de la Cour suprême ont été adressées à tous les travailleurs sociaux, avocats et autres parties intervenant dans les procédures d’adoption afin de les exhorter à s’abstenir de toute transaction dans laquelle le mineur est considéré comme un objet.

16.Le Président,s’exprimant en tant queRapporteur pour l’OPSC, juge intéressant de revoir les dispositions du Code civil pour décourager l’achat et la vente d’enfants, tout en soulignant que l’Argentine doit surtout ériger la vente d’enfants en infraction pénale.

17.M me Graham (Argentine) dit qu’un projet de loi à cet effet devrait être adopté prochainement.

18.La collaboration contre la traite se fait d’abord avec les provinces, notamment en vue de la création de centres d’accueil, de prise en charge et de réadaptation des victimes; des efforts particuliers sont déployés dans la province de Misiones, où l’État argentin a recensé de nombreux points de transit de personnes. La coopération avec les pays frontaliers a donné lieu à de nombreuses rencontres et à des activités de sensibilisation et de formation auprès des forces de sécurité. Plutôt que d’adopter plusieurs plans sectoriels contre la traite et éparpiller ainsi ses efforts, l’Argentine a préféré adopter un seul plan national et collaborer directement avec les provinces.

19.M me Beloff (Argentine) dit que les questions liées à l’extradition sont régies par le droit international public, les accords bilatéraux conclus entre l’Argentine et des dizaines de pays et les traités multilatéraux en matière d’extradition ratifiés par l’Argentine.

20.En vertu de l’article 250 bis du Code de procédure pénale, les mineurs ne sont pas tenus de comparaître lors d’un procès, ils font une seule déposition, afin de leur éviter de revivre les traumatismes subis, et leurs témoignages et déclarations peuvent être filmés. L’intérêt supérieur de l’enfant est toujours pris en considération, ce qui explique que les mineurs ont aussi la possibilité d’être interrogés dans des salles séparées.

21.L’Argentine ne dispose pas encore des outils et moyens techniques lui permettant, par exemple, d’identifier les principaux réseaux responsables de la traite et de faire une distinction entre les différents intermédiaires en cause. En outre, la traite est une infraction fédérale alors que les maisons closes dans lesquelles des personnes sont exploitées et soumises à la traite relèvent de la compétence des autorités locales.

22.M. Lerner (Argentine) dit que dans les affaires de prostitution de mineurs c’est l’âge de la personne au moment des faits en cause dont il est tenu compte. La protection que la loi no 26364 confère aux enfants victimes de la traite a suscité un consensus unanime, mais la protection des personnes majeures fait encore débat.

23.M me Graham dit que, dans le cadre de l’initiative «Niño Sur», lancée par les pays du MERCOSUR pour combattre l’exploitation sexuelle et la traite des enfants, l’Argentine mène depuis deux ans une vaste campagne de diffusion de matériels de prévention, publiés en trois langues, tandis que dans tous les pays du MERCOSUR se déroule une campagne télévisée, conçue en partenariat avec l’UNICEF, le numéro d’assistance téléphonique d’urgence 102 permettant de recueillir les signalements de mauvais traitements envers les enfants et d’autres types de violences familiales.

24.M me Maurás-Pérez (Rapporteuse pour l’Argentine) demande si les travailleurs sociaux qui répondent aux appels reçus au no 102 sont à même de cerner et différencier les problèmes signalés et de prendre les mesures s’imposant pour assurer une prise en charge coordonnée. Elle aimerait en savoir plus sur le programme de lutte contre le tourisme sexuel et ce qui a été fait pour y associer le personnel des hôtels et autres professionnels du tourisme.

25.M me Graham dit que le service d’assistance téléphonique d’urgence emploie des travailleurs sociaux formés à l’écoute et au conseil, qui orientent les intéressés vers les différents services d’aide à l’enfance, dont le niveau de prise en charge varie selon les provinces. La traite étant un délit fédéral, le traitement des cas signalés incombe à toutes les provinces et les autorités entendent augmenter le nombre d’antennes régionales prenant les victimes en charge.

26.Le Code de conduite pour la protection des enfants contre l’exploitation sexuelle dans le tourisme est assorti d’un plan, exécuté en partenariat avec le Secrétariat au tourisme, le Conseil fédéral du tourisme, la Chambre argentine du tourisme et l’Association des professionnels du tourisme, en conformité avec les principes des instruments internationaux pertinents et les dispositions de la loi no 26061, dans le cadre duquel les parties prenantes se sont engagées à prendre les mesures voulues pour protéger les enfants contre l’exploitation sexuelle, à savoir: adopter une politique axée sur l’éthique et la protection de la jeunesse contre les risques d’exploitation, former le personnel des organismes publics concernés, les intervenants du secteur hôtelier et les opérateurs de tourisme au contenu de la loi no 26061 et du Protocole facultatif. Des efforts portent aussi sur la création d’alliances avec les entreprises de tourisme et de transport, mais les intérêts financiers en jeu étant très importants, la démarche est loin d’être aisée. L’État argentin s’efforce d’associer l’Union des transports argentins à ses efforts de sensibilisation et de prévention, notamment les actions de prévention dans le secteur du transport routier.

27.Les poursuites ouvertes ces dernières années pour infraction aux articles 128 et 125 bis du Code pénal, qui répriment les délits relatifs à la diffusion de matériel pornographique mettant en scène des mineurs et la facilitation de la prostitution des mineurs, ont le plus souvent abouti à des condamnations.

28.Le dispositif actuel de collecte de données statistiques sur la criminalité, élaboré en collaboration avec l’ONU, date de 1993 et mériterait d’être repensé en vue de recueillir des statistiques précises sur les délits que vise le Protocole facultatif, notamment la traite; à la demande du Ministère des affaires étrangères argentin, une réunion d’experts internationaux s’est d’ailleurs tenue à Buenos Aires en février pour examiner les mesures à prendre pour l’actualiser en y incluant la traite et l’exploitation sexuelle des mineurs. L’Argentine est résolue à adhérer à la Convention sur la cybercriminalité du Conseil de l’Europe et le mécanisme CETS (Child Exploitation Tracking System) permettant aux parents d’installer des filtres parentaux sur les ordinateurs a été mis en place.

Rapport initial de l ’ Argentine au titre du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant, concernant l ’ implication d ’ enfants dans les conflits armés

29.M me Vessevessian dit que l’Argentine a ratifié le Protocole facultatif à l’examen par la loi no 25616 du 17 juillet 2002, s’engageant ainsi à s’abstenir de recruter dans les forces armées des personnes de moins de 18 ans. Il a été décidé récemment de procéder à une réforme intégrale des lycées militaires reposant sur le plan «Lycées 2010» lancé suite à l’adoption par le Ministère de la défense des résolutions 228 et 516 visant à moderniser le contenu des enseignements et à démocratiser l’accès à ces lycées. Une commission consultative de représentants de l’exécutif, de législateurs et d’experts a été chargée en 2009 d’élaborer des lignes directrices pour la réorganisation de l’enseignement dispensé dans les lycées militaires. Cette réforme a permis de mettre les programmes et le plan d’études des lycées militaires en conformité avec la loi sur l’éducation nationale, d’interdire certaines sanctions disciplinaires et de relever à 17 ans l’âge de l’instruction au maniement des armes à feu. Le Ministère estime qu’il serait souhaitable de porter à 18 ans l’âge de l’instruction au maniement d’armes à feu de tous calibres.

30.Le Président, s’exprimant en tant que rapporteur pour l’OPAC, note avec satisfaction que l’Argentine a aboli le service militaire obligatoire pour le remplacer par un service volontaire, en 1995: il demande si l’article 19 de la loi no 24429 relative à ce service, qui prévoit une exception au critère d’âge en cas de manque d’effectifs et permet d’appeler des citoyens de 17 ans à une conscription volontaire, a déjà été appliqué.

31.Il demande si, comme l’impose l’article 4 du Protocole facultatif, la loi réprime le recrutement de personnes de moins de 18 ans, si le risque posé par l’éventuel recrutement de jeunes Argentins par des groupes armés étrangers a déjà été pris en compte et pourquoi aucun texte de l’État partie n’incrimine l’enrôlement d’enfants de moins de 15 ans dans des conflits armés, alors qu’il est partie au Statut de Rome de la Cour pénale internationale qui qualifie cette situation de crime de guerre. Il aimerait savoir si l’extradition de personnes mises en cause dans des affaires de recrutement d’enfants à des fins de conflits armés est possible et si la double incrimination est nécessaire.

32.La délégation pourrait en outre préciser si dans l’État partie l’exportation d’armes légères vers des pays susceptibles d’utiliser des enfants dans des conflits armés est interdite, comment sont identifiés les enfants demandeurs d’asile ayant été impliqués dans un conflit armé, si ces enfants bénéficient d’une prise en charge appropriée.

33.Des précisions sur la réforme des programmes des lycées militaires, notamment sur l’instruction au maniement des armes, seraient utiles.

34.M. Koompraphant demande si des programmes de prise en charge psychosociale sont en place pour les enfants demandeurs d’asile susceptibles d’avoir été impliqués dans un conflit armé.

35.M. Filali aimerait avoir des précisions sur le contenu des cours dispensés dans les lycées militaires et savoir si le corps enseignant se compose de militaires ou de civils, s’il y a des entraînements avec des armes légères et si un module d’éducation à la paix est dispensé.

36.Il demande si l’extradition passive est conditionnée par la conclusion d’accords bilatéraux entre l’Argentine et l’État requérant et s’il a déjà été envisagé d’accorder une extradition sur la base du Protocole facultatif.

37.M me Graham dit qu’à ce jour il n’a pas été nécessaire de recruter des jeunes de 17 ans pour le service militaire volontaire, les circonstances exceptionnelles visées à l’article 19 de la loi no24429 ne s’étant jamais présentées.

38.La question du recrutement d’enfants de moins de 18 ans par des groupes armés ne s’est encore jamais posée en Argentine, mais une réflexion législative et préventive s’impose à ce sujet.

39.L’exportation d’armes est régie par une loi mais aucune disposition n’interdit expressément d’exporter des armes vers un pays où des enfants sont susceptibles d’être impliqués dans un conflit armé. Le programme d’appui psychosocial offrant une assistance complète aux demandeurs d’asile mis en place en application d’une nouvelle loi n’a encore bénéficié à aucun mineur identifié comme ayant été impliqué dans un conflit armé.

40.La résolution 228 du Ministère de la défense prévoit une refonte totale des programmes et du fonctionnement des lycées militaires qui aboutira à l’assouplissement des mesures disciplinaires et à l’introduction d’un enseignement aux droits de l’homme et aux valeurs citoyennes. Il est prévu d’en transférer la responsabilité du Ministère de la défense au Ministère de l’éducation, mais dans l’intervalle un conseil consultatif composé de représentants du Ministère de l’éducation et du Ministère du développement social apporte, en collaboration avec d’autres experts, un appui au Ministère de la défense aux fins de la réforme de l’enseignement et de la formation des enseignants de ces lycées.

41.Le pays compte sept lycées militaires, dont le plus prestigieux, le lycée du district de San Martin, dispense gratuitement un enseignement de qualité et est donc accessible aux classes moyennes et modestes. Moins de 1 % des jeunes diplômés de ces lycées embrassent une carrière militaire, la plupart poursuivant leurs études à l’université et trouvant ensuite un emploi dans le civil.

42.Le Ministère de la défense envisageait une loi interdisant toute instruction au maniement des armes avant l’âge de 18 ans, mais il s’est heurté à la vive opposition de membres du Parlement sensibles aux pressions de lobbies puissants; elle reste donc en vigueur dans les lycées militaires, mais en dernière année, soit à des élèves de 17 ans et plus.

43.M. Perczyk (Argentine) dit que le programme d’enseignement des lycées militaires et les diplômes qu’ils délivrent sont agréés par le Ministère de l’éducation nationale. Les matières enseignées et les buts pédagogiques sont les mêmes que dans les établissements d’enseignement traditionnels; des cours d’éducation civique, des cours sur les droits de l’homme et sur les droits que consacre le Protocole facultatif sont dispensés aux élèves de ces lycées.

44.Les lycées militaires sont très prisés parce qu’ils relèvent de l’enseignement public gratuit: ils sont souvent fréquentés de génération en génération, par tradition familiale. Leurs élèves ne sont pas des militaires.

45.M me Beloff (Argentine) dit que la possibilité d’extrader une personne est subordonnée à l’existence d’un traité bilatéral d’extradition entre l’Argentine et l’État requérant. Il n’est pas possible d’extrader quiconque sur la seule base des deux protocoles facultatifs.

46.Le Président, s’exprimant en tant queRapporteur pour l’OPSC et l’OPAC, demande ce qu’a fait l’État partie pour traduire et diffuser les deux Protocoles facultatifs, qui semblent bien moins connus que la Convention, et sensibiliser la population, en général, et les enfants, en particulier, aux principes qu’ils consacrent.

47.M me Graham (Argentine) reconnaît que le Protocole facultatif concernant l’implication d’enfants dans les conflits armés a été peu diffusé car l’Argentine n’est partie à aucun conflit et les droits des mineurs argentins dans ce domaine ne risquent donc pas d’être violés.

48.M me Varmah, notant que les élèves ayant suivi une instruction militaire dans un établissement administré par les forces armées sont appelés à faire partie de la réserve militaire et que suivre ce cursus et être intégré à la réserve résultent d’une décision des parents, demande si le mécanisme que le Ministère de la défense envisageait d’instituer pour permettre aux intéressés d’entériner ou révoquer cette décision à 18 ans est opérationnel et, dans l’affirmative, si ce mécanisme a déjà été saisi et si les jeunes subissent la pression de leurs parents ou tuteur au moment de faire leur choix.

49.M me Graham (Argentine) dit que la résolution 228 du Ministère de la défense portant création de ce mécanisme n’est entrée en vigueur que le 5 mars 2010. Il est difficile de déterminer si les jeunes sont influencés par leurs parents ou leur tuteur dans leur choix d’intégrer ou non la réserve militaire, mais davantage de poids a été donné aux conseils pédagogiques de lycée, chargés de veiller à ce que les jeunes prennent leur décision librement.

50.M me Maurás Pérez (Rapporteuse pour l’Argentine) demande quelles sont les responsabilités des entreprises du secteur privé dans les domaines social et environnemental dans l’optique des droits de l’enfant.

51.M. Bustelo (Argentine) dit que les médias − en particulier la télévision − exercent une grande influence sur les jeunes car ils y sont exposés en moyenne quatre heures par jour. Selon des travaux universitaires, les enfants visionneraient chaque année 27 000 épisodes de violence, dont des scènes de guerre ou autres scènes impliquant des armes et seraient exposés à des publicités équivoques ou à caractère sexuel dans les magazines ou par l’intermédiaire de leurs téléphones portables. Au niveau local, certains gouvernements de province ont proposé à des chaînes de télévision de signer un code de conduite par lequel elles s’engageraient à diffuser des films et autres dessins animés portant un message de paix et faisant la promotion des droits fondamentaux, mais sans trouver l’écho espéré.

52.La loi relative aux services de communication audiovisuelle d’octobre 2009 prévoit la création d’un conseil chargé de contrôler les publicités ciblant les enfants et le contenu des programmes diffusés. Les médias nationaux ne se sont pas montrés particulièrement sensibles à cette démarche, craignant que l’État tente, par l’intermédiaire du réseau des médias latino-américains, de restreindre la liberté de la presse et d’expression, voire que la communauté internationale aille plus loin et élabore un nouveau protocole facultatif à la Convention encadrant leurs activités pour tout ce qui touche à l’enfance.

53.M me Maurás Pérez (Rapporteuse pour l’Argentine), se félicitant du dialogue fructueux avec la délégation argentine, dit que l’adoption de la loi no 26061 relative à la protection intégrale des droits de l’enfant et de l’adolescent a constitué un grand pas en avant et que les autres lois et programmes élaborés et lancés ces dernières années par l’État ont concouru à élargir la protection des droits de l’enfant. Le fédéralisme peut certes constituer un frein au processus de mise en œuvre de cette protection intégrale, mais ne saurait le paralyser. Les investissements dans le secteur social sont restés stables, voire ont augmenté, ce qui dénote la volonté politique du Gouvernement argentin et des provinces de combattre les inégalités en dépit de la crise économique et financière. De grands progrès ont été accomplis dans les domaines de la santé et de l’éducation, mais l’Argentine a parfaitement conscience des problèmes restant à résoudre.

54.Il est regrettable que trois questions n’aient pas été suffisamment approfondies: la coordination intersectorielle dans le cadre de la protection intégrale des droits de l’enfant et de l’adolescent; l’éducation spéciale; la résistance culturelle au recours à la médiation et à des mesures alternatives à la privation de liberté. La mise en place d’une base de données relative aux mineurs privés de liberté par la justice pénale et aux enfants sans protection parentale est indispensable et un défenseur des droits de l’enfant doit être nommé.

55.M me Vess eve ssian (Argentine) dit que, dans le cadre de la transformation de ses institutions et de sa législation, la République argentine s’est efforcée d’associer tous les acteurs sociaux de tous les secteurs concernés et de mettre en place un système national de protection intégrale des droits couvrant toutes les provinces et municipalités. L’État argentin a pris des mesures d’ordre social, économique et éducatif, entre autres, pour combattre la pauvreté et accorde la plus grande importance au renforcement de la cellule familiale; il espère rétablir le plein emploi, meilleur moyen de résorber les inégalités et d’améliorer le bien-être de la population, notamment des enfants et des adolescents.

La séance est levée à 13 heures.