NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l ’ enfant

Distr.GÉNÉRALE

CRC/C/SR.13304 juin 2008

Original: FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante‑huitième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1330e SÉANCE *

tenue au Palais Wilson, à Genève,le jeudi 29 mai 2008, à 10 heures

Présidente: Mme LEE

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Deuxième rapport périodique de la Sierra Leone sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant

La séance est ouverte à 10 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 4 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième rapport périodique de la Sierra Leone sur la mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant [CRC/C/SLE/2; liste des points à traiter (CRC/C/SLE/Q/2); réponses écrites de l’État partie à la liste des points à traiter (CRC/C/SLE/Q/2/Add.1)]

1. Sur l ’ invitation de la Présidente, la délégation sierra ‑ léonaise prend place à la table du  Comité.

2.MmeVAMBOI (Sierra Leone) transmet au Comité les salutations du Président, du peuple et des enfants de la République de Sierra Leone. Elle indique que la délégation se tient à la disposition du Comité pour lui fournir tous les renseignements nécessaires qui n’auraient pas été communiqués dans des réponses écrites à la liste des points à traiter et se dit convaincue que le dialogue avec le Comité sera fructueux et qu’il servira les intérêts des enfants sierra‑léonais.

3.MmeSMITH (Rapporteuse pour la Sierra Leone) rappelle que la Sierra Leone a ratifié la Convention en 1990. Elle a présenté son rapport initial sur la mise en œuvre de la Convention en 1996. La Sierra Leone a connu une terrible guerre civile, qui a officiellement pris fin en 2002. On peut donc comprendre que l’État partie n’ait présenté son deuxième rapport périodique qu’en 2006. Le rapport à l’examen couvre une période de dix ans. Il a été élaboré par le Ministère de la protection sociale, de la condition de la femme et de l’enfance avec le concours de l’UNICEF, de différents ministères, d’ONG et de représentants de la société civile. Le rapport suit les lignes directrices mais ne contient pas suffisamment de données sur les activités visant à mettre en œuvre la Convention. Au cours des premières années qui ont suivi la fin de la guerre civile, le Gouvernement de la Sierra Leone a dû concentrer ses efforts sur les mesures d’intervention d’urgence postconflit, telles que des mesures de réinsertion des enfants des rues, des enfants soldats et des enfants non accompagnés, et le rapatriement d’enfants demandeurs d’asile et d’enfants réfugiés.

4.Mme Smith voudrait savoir si la Commission nationale en faveur des enfants touchés par la guerre fonctionne toujours, et elle souhaiterait des informations complémentaires sur les résultats de ses travaux. La Sierra Leone est l’un des pays les plus pauvres du monde. Plus de 70 % de la population vit avec moins d’un dollar par jour et 26 % de la population vit dans une extrême pauvreté. Le pays dépend de l’aide extérieure pour son développement, pour les biens de consommation, etc. La situation politique est toutefois stable.

5.Mme Smith salue l’adoption de la loi sur les droits de l’enfant, promulguée en 2007, et indique qu’elle est très complète et remplace toute la législation préexistante sur les questions touchant les enfants.

6.Elle souligne que les autorités sierra‑léonaises ont pris conscience de la nécessité de donner la priorité à l’éducation et à la santé des enfants, et précise que le financement des mesures nécessaires est assuré par la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, la Banque islamique de développement, l’UNICEF et l’Organisation mondiale de la santé entres autres. Il existe aussi une aide pour les enfants handicapés.

7.Mme Smith rappelle toutefois que l’État partie a indiqué dans ses réponses écrites que les programmes d’aide aux familles, l’aide aux enfants vivant au‑dessous du seuil de pauvreté, la protection des enfants ayant besoin d’une protection de remplacement, notamment, n’avaient bénéficié d’aucune allocation de fonds en 2007 de la part du Gouvernement, et que les seules ressources affectées dans ces domaines émanaient principalement des ONG, de l’UNICEF et du Gouvernement britannique.

8.Il semble que les enfants aient été quelque peu oubliés dans le processus de rétablissement de la paix. Mme Smith demande s’il serait possible que davantage de ressources soient allouées au Ministère de la protection sociale, et s’il serait envisageable d’utiliser à ces fins les sommes libérées par l’allégement de la dette au titre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés.

9.La Stratégie de lutte contre la corruption adoptée en 2006 a pris du retard. Il semblerait que la volonté politique de poursuivre les personnes soupçonnées de corruption soit insuffisante. Des informations complémentaires sur cette question seraient utiles.

10.Le Ministère de la protection sociale semble être l’organe du Gouvernement chargé de coordonner tous les programmes, politiques et activités de protection de l’enfance, assisté en cela par l’UNICEF. Il semble que ce Ministère manque cruellement de ressources humaines et financières. Mme Smith voudrait savoir s’il existe une collaboration entre le Ministère de la protection sociale et les Ministères de la santé, de l’éducation, de la justice et des finances. La loi sur les droits de l’enfant prévoit la création de la commission nationale pour l’enfance, organe de coordination et de contrôle. Il serait utile de savoir si cette commission a bien été créée, et si elle a commencé ses travaux.

11.La délégation pourrait indiquer si le Ministère de la protection sociale a des contacts avec les autorités régionales et locales et fournir des renseignements sur les comités pour la protection de l’enfance. Il faudrait aussi savoir comment travaille le Réseau de protection de l’enfance et où en sont les travaux de la Commission des droits de l’homme. D’après les réponses écrites de l’État partie, cet organe fonctionne depuis 2006, mais selon certaines informations, il serait toujours dans sa phase de création. Les membres qui ont été désignés pour y siéger seraient encore en formation. Des informations complémentaires seraient bienvenues.

12.Mme Smith croit comprendre que la Commission nationale pour l’enfance, relevant du Ministère de la protection sociale, ne serait pas un organe de contrôle indépendant. Elle souhaiterait alors savoir s’il est prévu de mettre en place une unité consacrée à l’enfance au sein de la Commission des droits de l’homme.

13.La Politique nationale pour l’enfance, adoptée en 2006, paraît destinée à compléter la loi sur les droits de l’enfant. Il serait intéressant de savoir si la mise en œuvre de cette politique a déjà commencé.

14.L’article 31 de la loi sur les droits de l’enfant est tout à fait conforme à l’article 12 de la Convention. Mme Smith demande si, dans la pratique, les enfants participent réellement aux décisions les concernant, notamment dans les écoles, dans les procédures judiciaires et en matière d’adoption. Elle demande aussi comment fonctionne le Réseau du forum des enfants.

15.M. POLLAR (Rapporteur pour la Sierra Leone) rappelle que la Sierra Leone est partie à la Charte africaine des droits et du bien‑être de l’enfant. Il voudrait savoir quels mécanismes efficaces existent pour faire appliquer la législation sur les droits de l’enfant.

16.Il souhaiterait que la délégation apporte des éclaircissements sur la coexistence du droit coutumier et de la législation, car la vie de 80 % de la population de l’État partie est gouvernée par le droit coutumier.

17.M. Pollar voudrait aussi savoir ce que l’État partie entend faire pour améliorer la collecte et l’analyse des données, en vue d’effectuer un meilleur contrôle du respect des droits de l’enfant.

18.Notant que des ONG œuvrent pour la promotion des droits de l’enfant, M. Pollar voudrait savoir si l’État partie a l’intention de faire participer les organisations de la société civile à l’évaluation globale de la mise en œuvre de la Convention.

19.M. PARFITT, relevant que la loi sur les droits de l’enfant est fondée sur l’intérêt supérieur de l’enfant, fait observer que cela ne semble pas être le cas de la Constitution de l’État partie, dont le paragraphe 4 de l’article 27 contient des dispositions discriminatoires.

20.Il voudrait des explications complémentaires sur la législation relative aux relations familiales, notamment au divorce, et demande si cette législation fait référence à l’intérêt supérieur de l’enfant. Il demande aussi si ce principe pourrait être introduit dans le droit coutumier.

21.M. Parfitt voudrait savoir s’il existe une possibilité d’élaborer des directives à l’intention des magistrats, en particulier des juges locaux, qui souligneraient l’importance de tenir compte de l’intérêt supérieur de l’enfant. Le Comité est préoccupé par le fait que de nombreux procès se déroulent de manière informelle, et que les jugements sont rendus par d’importants chefs locaux. Il voudrait savoir s’il serait possible que cette forme de pouvoir judiciaire soit guidée par l’intérêt supérieur de l’enfant.

22.Enfin, il souhaiterait savoir si les autorités administratives tiennent compte de l’intérêt supérieur de l’enfant dans la préparation du budget car, comme cela a déjà été mentionné, très peu de ressources ont jusqu’à maintenant été consacrées à l’amélioration de la protection sociale des enfants.

23.MmeKHATTAB, rappelant que l’État partie a la chance de bénéficier d’une aide internationale, fait observer que cette aide ne peut garantir à elle seule que la situation des droits de l’enfants s’améliore à long terme, et qu’elle doit être accompagnée d’une forte détermination du Gouvernement sierra‑léonais de faire de la politique de l’enfance une priorité et d’y allouer les ressources voulues. Les activités de formation à l’intention des professionnels qui travaillent avec les enfants ne semblent concerner qu’un très petit nombre de personnes. Il ne semble pas que la question des droits de l’enfant soit intégrée dans les programmes scolaires. Il faudrait savoir ce que font les médias pour diffuser une culture respectueuse des droits de l’enfant.

24.Malgré la gratuité de l’enseignement, le taux de scolarisation des filles est nettement inférieur à celui des garçons, et le taux d’abandon scolaire des filles est de plus en plus élevé. La délégation pourrait peut‑être fournir un complément d’information à ce sujet.

25.Enfin, le Service d’aide aux familles a indiqué qu’il existait une forte discrimination à l’encontre des filles. La pratique des mutilations sexuelles féminines en fait partie. La délégation voudra bien préciser les mesures prises pour lutter contre ce phénomène.

26.M. ZERMATTEN constate avec préoccupation que, d’après les informations fournies dans le rapport, le taux d’enregistrement des naissances est largement insuffisant, en particulier dans les zones rurales, où il n’atteint que 40 %. Il souhaiterait donc savoir si l’État partie a pris des mesures concrètes afin d’encourager les parents à déclarer la naissance de leurs enfants aux autorités compétentes et si ces formalités sont gratuites.

27.M. Zermatten se dit également préoccupé par le fait que l’acquisition de la nationalité sierra‑léonaise par les enfants étrangers nés sur le territoire de l’État partie est soumise à des conditions très contraignantes, notamment en ce qui concerne la durée et la continuité du séjour dans le pays, ce qui signifie que ces enfants doivent attendre de longues années avant de pouvoir demander leur naturalisation.

28.En ce qui concerne l’accès à une information appropriée et la protection de la vie privée, il voudrait savoir quelles mesures l’État partie a adoptées afin de protéger les enfants contre certains contenus transmis par la télévision ou véhiculés par l’Internet. Enfin, sachant que des reportages ont été réalisés sur d’anciens enfants soldats, il demande si l’État partie exerce un certain contrôle sur les activités des médias sierra‑léonais afin de préserver la vie privée de ces enfants.

29.M. FILALI dit que, d’après des informations portées à la connaissance du Comité, les enfants de moins de 17 ans qui ont commis un délit peuvent être condamnés à recevoir jusqu’à 12 coups de fouet. La délégation pourrait indiquer si ces informations sont exactes et quelles mesures concrètes l’État partie a adoptées afin d’éradiquer les pratiques coutumières incompatibles avec le droit écrit, en particulier les châtiments corporels.

30.Lisant dans le rapport que la loi sur la prévention des actes de cruauté envers les enfants ne vise que les enfants de moins de 16 ans, M. Filali souhaiterait savoir quelle protection est offerte aux mineurs de 16 à 18 ans. Il voudrait également savoir si la Commission nationale des droits de l’homme est en activité et, dans l’affirmative, souhaiterait des précisions sur la façon dont elle traite les affaires de violations des droits de l’homme dont elle est saisie ainsi que sur la suite donnée aux études sur la violence qu’elle a réalisées.

31.M. CITARELLA invite la délégation sierra‑léonaise à décrire comment les dispositions de la nouvelle loi sur les droits de l’enfant sont appliquées concrètement par les autorités compétentes et si ces dernières sont dotées de ressources humaines et financières suffisantes pour s’acquitter de cette tâche. Il demande quels moyens l’État partie a mis en œuvre afin que cette loi soit effectivement respectée dans tout le pays, y compris dans les régions du nord et du centre où la vie de la collectivité est régie essentiellement selon le droit coutumier. La délégation pourrait indiquer en outre quel est le statut de la Convention dans l’État partie et, le cas échéant, comment les tribunaux ont tranché les conflits entre la Convention et la loi sur les droits de l’enfant. Enfin, compte tenu du fait que le pays a été déchiré par une guerre civile pendant une dizaine d’années, il serait intéressant de savoir si certains groupes de la population font l’objet d’une discrimination, notamment en matière d’accès aux soins de santé et à l’éducation.

32.MmeAIDOO relève avec satisfaction que, depuis 2005, l’État partie a adopté cinq lois sur des questions d’une importance capitale pour les enfants, à savoir la traite des êtres humains, les droits de l’enfant, les droits de succession, le mariage coutumier et la violence familiale. Il serait utile de savoir si l’État partie a prévu d’allouer des crédits aux organes chargés de surveiller l’application de ces lois, dont le Ministère de la justice, les services de police et le Ministère chargé de la protection sociale et des femmes et des enfants, de façon à ce que l’ensemble de la population soit informé des droits consacrés dans ces lois, en particulier dans les zones rurales, et puisse ainsi les invoquer devant les tribunaux en cas de violation.

La séance est suspendue à 11 heures; elle est reprise à 11 h 35.

33.MmeVAMBOI (Sierra Leone) indique que, depuis 2005, les ressources budgétaires affectées au Ministère de la protection sociale, des femmes et des enfants restent très insuffisantes. Malgré cela, le Ministère poursuit ses activités grâce au soutien de partenaires internationaux, dont l’UNICEF et le Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), sans l’aide desquels la Sierra Leone ne serait pas en mesure de présenter de rapports périodiques aux organes de suivi des traités, dont le Comité.

34.Le rapport périodique a été élaboré par un comité directeur, qui a assuré la coordination entre les divers acteurs associés à la préparation de ce document. La coordination des activités de promotion des droits de l’enfant est assurée par le Comité national de la protection de l’enfant, qui se compose de représentants des divers ministères concernés (Ministère de la santé, Ministère de l’éducation et Ministère du développement et de la planification économique). Ce comité coordonne les travaux des équipes spéciales placées sous son autorité, qui sont notamment chargées de lutter contre la traite, la violence à l’égard des femmes et l’exclusion des enfants marginalisés. Il assure aussi le suivi de l’application de la Convention relative aux droits de l’enfant.

35.La PRÉSIDENTE demande si le Comité national de la protection de l’enfant dispose d’un budget suffisant pour mener à bien les tâches qui lui incombent.

36.MmeMUSA (Sierra Leone) précise que les équipes spéciales relevant du Comité national sont composées de représentants de ministères, de départements et d’organismes publics, dont les activités sont financées par le budget de l’État, et de représentants d’organisations non gouvernementales, qui ont leurs propres sources de financement. Le Comité national n’a donc pas besoin d’avoir son propre budget.

37.MmeVAMBOI (Sierra Leone) dit que la Commission nationale en faveur des enfants touchés par la guerre est encore en activité, mais qu’elle est appelée à être relayée par la Commission nationale des droits de l’enfant instituée en vertu de la loi de 2007 sur les droits de l’enfant. Un plan tendant à promouvoir l’application de ladite loi a été élaboré et approuvé par le Cabinet, mais la date de son lancement n’a pas encore été fixée.

38.Une version adaptée de la loi de 2007 sur les droits de l’enfant a été présentée au Ministère de l’éducation en vue d’incorporer un enseignement sur ce thème dans les programmes scolaires. Des discussions sont en cours afin de déterminer si cet enseignement devra être dispensé au niveau primaire ou secondaire.

39.Malgré les campagnes de sensibilisation sur l’importance de la scolarisation des filles et sur les mariages précoces lancées dans tout le pays et l’instauration de la gratuité de l’éducation, force est de reconnaître que les fillettes continuent d’être victimes de discrimination dans l’accès à l’éducation. Cet échec s’explique par le fait que la réticence des parents à envoyer leurs filles à l’école s’enracine dans les traditions culturelles et que les mentalités évoluent très lentement. Le Gouvernement continue néanmoins à ne pas ménager ses efforts pour améliorer le taux de scolarisation des filles.

40.L’Équipe spéciale chargée de la lutte contre la violence à l’égard des femmes mène des activités au plan régional, avec le soutien de l’UNICEF. En collaboration avec le Ministère de la protection sociale et la police, elle est déjà intervenue dans des affaires de violence contre les femmes et de torture infligées à des mineurs et les résultats obtenus à ce jour sont encourageants.

41.Grâce à un projet pilote lancé par l’UNICEF dans le nord du pays puis étendu à l’ensemble du territoire, l’enregistrement des naissances est désormais gratuit, s’il a lieu dans les six mois suivant la naissance de l’enfant. Passé ce délai, les parents doivent s’acquitter d’une taxe administrative, mesure qui pousse les parents à déclarer la naissance de leur enfant le plus tôt possible.

42.S’agissant de la lutte contre la pauvreté, il convient de rappeler que le Gouvernement a adopté un Document de stratégie de réduction de la pauvreté dont l’un des éléments clefs est l’incorporation dans le droit interne des traités internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels la Sierra Leone est partie. C’est dans ce cadre que diverses lois ont été promulguées, dont la loi sur la restitution des biens, la loi sur le droit coutumier, la loi sur le mariage et le divorce et la loi sur la lutte contre le VIH/sida. Enfin, la Commission nationale des droits de l’homme est toujours en activité et pleinement opérationnelle.

43.Mme SMITH (Rapporteuse pour la Sierra Leone) demande si la Commission des droits de l’homme a déjà reçu des plaintes concernant des enfants, si elle peut intervenir dans ce genre d’affaire, et si le Gouvernement a l’intention de mettre sur pied des équipes spéciales au sein de la Commission pour traiter les affaires relatives aux enfants ou aux femmes ayant des enfants.

44.M. FILALI souhaite savoir si la Commission des droits de l’homme peut demander des informations au Ministère de la justice ou au Ministère de l’intérieur concernant des affaires sur lesquelles elle pourrait enquêter, et si elle peut transmettre des affaires au Ministère de la justice.

45.M. PARFITT demande si la loi sur le mariage et le divorce envisage la question de la garde des enfants et, le cas échéant, si le critère de l’intérêt supérieur de l’enfant prime dans les prises de décisions.

46.Mme VAMBOI (Sierra Leone) explique que la loi sur le mariage et le divorce prend en considération l’intérêt supérieur de l’enfant, notamment en augmentant la part d’héritage des enfants, qui était établie à 60 % dans la loi sur la sécurité sociale nationale. La transmission des biens du défunt peut être compliquée par le fait que celui‑ci avait parfois plus de deux épouses.

47.Mme MUSA (Sierra Leone) explique que la Commission est déjà intervenue de manière très efficace dans des affaires concernant des actes de violence à l’école. En revanche, elle ignore si des équipes spéciales ont été mises sur pied en faveur des enfants et des femmes avec enfants. Quoiqu’il en soit, la réalisation de plans en la matière nécessite des allocations budgétaires. Une discussion est en cours pour établir un budget favorable aux enfants et faire en sorte que les institutions travaillant dans le domaine des droits de l’enfant aient les ressources nécessaires pour mettre en œuvre leurs programmes.

48.M. PARFITT demande si l’établissement d’un budget favorable aux enfants signifie que, dans la répartition du budget entre les différents ministères, les programmes en faveur des enfants sont favorisés.

49.Mme MUSA (Sierra Leone) explique qu’il s’agit de donner aux différents ministères traitant les questions liées aux enfants des ressources pour qu’ils mettent en œuvre des programmes en la matière. Mais le fait est que l’État dispose de ressources budgétaires limitées et qu’il doit compter sur l’appui des donateurs pour réaliser des projets. Au total, 64 % du budget national provient de soutiens extérieurs.

50.Mme SMITH (Rapporteuse pour la Sierra Leone) explique que si le Gouvernement est disposé à allouer des fonds à des questions particulières relatives aux enfants, des organisations telles que l’UNICEF apportent le double du budget octroyé. Elle suggère donc à la délégation d’encourager son Gouvernement à agir dans ce sens pour obtenir des ressources.

51.Mme KHATTAB demande comment la campagne de sensibilisation au problème de la discrimination envers les filles a pu être réalisée avec un budget total de 200 000 dollars et, notamment, comment les équipes spéciales chargées de cette question ont pu fonctionner.

52.Mme MUSA (Sierra Leone) indique que, lorsque des donateurs financent un projet, l’État partie montre qu’il s’engage lui aussi à mettre en œuvre le projet en apportant une contribution parallèle qui vient compléter le financement.

53.Le suivi de la mise en œuvre des projets et la préparation de rapports à ce sujet ne sont pas assurés uniquement par le Ministère des affaires sociales mais par chacun des acteurs en jeu qui reçoivent des allocations pour mener à bien des projets.

54.Mme AIDOO souhaite savoir si le Ministère des affaires sociales s’occupe de questions comme l’équité entre les sexes et la réduction des disparités et si les autres ministères ont une approche axée sur les droits de l’homme.

55.La PRÉSIDENTE demande si des mesures sont prises pour lutter contre la corruption et garantir que les fonds alloués aux projets en faveur des enfants y sont réellement consacrés.

56.MmeMUSA (Sierra Leone) dit que des formations sont organisées pour sensibiliser les agents de l’État à la question des droits de l’homme. Ils ont d’ailleurs pour instruction de tenir compte de cette question lorsqu’ils élaborent des documents nationaux tels que la stratégie de réduction de la pauvreté.

57.Le nouveau gouvernement a décidé de revoir la stratégie nationale de lutte contre la corruption. Auparavant, dans les affaires de corruption, seul le Bureau du Procureur général était habilité à engager des poursuites. Désormais, des poursuites sont systématiquement entreprises. Des fonctionnaires ont déjà été traduits en justice, même si la plupart des affaires sont encore en suspens. Cela étant, ces procès ont eu un rôle dissuasif.

58.MmeVAMBOI (Sierra Leone) explique qu’une stratégie nationale d’élaboration de données statistiques a été définie. Les différents ministères ne réussissant pas à présenter leurs statistiques conformément aux directives du Centre national de statistiques, ils délégueront cette tâche à un agent du Centre à qui ils réserveront un bureau dans leurs locaux.

59.MmeMUSA (Sierra Leone) ajoute que l’un des objectifs de la stratégie nationale d’élaboration de données statistiques est de disposer d’un statisticien dans chacun des ministères. Le Ministère des affaires sociales dispose de nombreuses données mais elles ne sont pas ventilées. Il ne sera pas en mesure de présenter rapidement des statistiques répondant aux critères fixés par le Comité.

60.Mme Musa souligne que la Constitution de 1991 ne contient pas de dispositions discriminatoires. La discrimination à l’égard des filles trouve sa source dans des pratiques et des croyances culturelles qui diffèrent selon les régions. Par exemple, conformément au droit coutumier en vigueur dans certaines régions de l’Est du pays, les femmes ne peuvent pas participer à la prise de décisions. S’agissant de la discrimination envers les filles dans le domaine de l’éducation, il convient de rappeler qu’en vertu de la Constitution tout citoyen a droit à l’éducation. Si, en proportion, les filles sont moins scolarisées que les garçons, c’est que les familles pauvres qui ne peuvent pas envoyer tous leurs enfants à l’école privilégient leurs enfants de sexe masculin. Mais comment sanctionner cette discrimination?

61.MmeKHATTAB estime que le Gouvernement doit faire de cette question une priorité et y associer tous les acteurs concernés, à savoir les médias, les écoles et les chefs traditionnels.

62.M. FILALI demande pourquoi la Constitution s’applique dans certaines régions du pays et non dans d’autres.

63.M. CITARELLA demande si l’âge du mariage est différent pour les garçons et pour les filles.

64.MmeVAMBOI (Sierra Leone) répond que, conformément à la loi, l’âge du mariage est le même pour les garçons et les filles. Le Gouvernement espère pouvoir rendre la scolarité gratuite jusqu’à l’âge de 18 ans pour les deux sexes.

65.MmeSMITH (Rapporteuse pour la Sierra Leone) souhaite savoir si toutes les communautés conviennent de donner la primauté à la loi sur l’enfance plutôt qu’au droit coutumier.

66.MmeVAMBOI (Sierra Leone) dit qu’avant de promulguer cette loi, le Gouvernement a organisé des réunions consultatives avec les différents acteurs concernés, tels que les chefs traditionnels et les chefs religieux, et que 90 % d’entre eux sont convenus de respecter ce texte.

67.Une loi sur la naturalisation établissant que les enfants nés sur le territoire de la Sierra Leone acquièrent la nationalité sierra‑léonaise va être promulguée, mais cette pratique a déjà cours.

68.Mme SMITH (Rapporteuse pour la Sierra Leone) note que le taux de malnutrition reste élevé dans l’État partie, ce qui atteste une fois encore du fait que le Gouvernement n’alloue pas suffisamment de fonds aux politiques de l’enfance et à la protection sociale. Elle voudrait savoir où en est le projet de créer des comités pour la protection de l’enfance au niveau des chefferies comme le prescrit le projet de loi sur les droits de l’enfant, et si l’ordonnance relative aux lois sur les enfants illégitimes (relèvement des pensions alimentaires) et la loi sur l’entretien des femmes mariées, mentionnées au paragraphe 186 du rapport périodique, sont toujours en vigueur.

69.M. POLLAR (Rapporteur pour la Sierra Leone) demande des informations complémentaires sur les enfants démobilisés, et notamment sur leur réinsertion dans la société, au sein de leur famille, dans le système scolaire ou professionnel, ainsi que des statistiques sur le nombre d’enfants qui ont été blessés ou qui sont décédés au cours du conflit. Il voudrait savoir si des programmes de prise en charge des enfants souffrant de troubles post‑traumatiques ont été mis en place et si les mines terrestres constituent toujours un risque majeur dans le pays.

70.Concernant la justice pour mineurs, la délégation pourrait indiquer quelles sont les attributions de la sous‑commission chargée des mineurs en conflit avec la loi mentionnée au paragraphe 252 du rapport et préciser si l’État partie entend créer un centre de formation aux droits de l’homme − aux droits de l’enfant notamment − qui prendrait le relais une fois que se seront achevés les cours de formation actuellement dispensés à titre temporaire par des organisations non gouvernementales. Dans l’affirmative, il serait souhaitable que ce centre offre une formation diplômante aux juges et aux magistrats, pour que ceux‑ci aient à l’esprit les droits de l’homme au moment de rendre leur décision.

71.Il serait intéressant de savoir si le centre de détention provisoire pour mineurs et les maisons d’éducation surveillée font l’objet d’un suivi régulier.

72.La délégation pourrait également fournir des précisions sur la libération sous caution des mineurs en conflit avec la loi, qui semble être du ressort non pas du magistrat mais du policier qui a procédé à l’arrestation, ainsi que sur la durée maximale de la détention avant jugement pour les mineurs qui, d’après des sources dignes de foi, dépasserait souvent le délai de soixante‑douze heures prescrit par la Constitution.

73.M. KOTRANE se félicite que l’État partie ait élaboré un certain nombre de politiques pour lutter contre diverses formes d’exploitation des enfants, y compris le travail domestique, le travail dans les mines et la mendicité, et serait favorable à ce que le Gouvernement mène des enquêtes sur le terrain pour mesurer l’ampleur de ces fléaux, d’autant plus que l’État partie n’a pas ratifié la Convention no 138 de l’OIT sur l’âge minimum pas plus que la Convention no182 de l’OIT sur l’interdiction des pires formes de travail des enfants.

74.M. Kotrane voudrait savoir quel est l’âge de la responsabilité pénale dans l’État partie et demande un complément d’information sur le projet de loi portant réforme de la législation relative aux enfants en conflit avec la loi.

75.Mme KHATTAB déplore qu’aucune loi n’incrimine les mutilations génitales féminines et que l’article traitant de cette question dans le projet de loi sur les droits de l’enfant en ait été retiré, alors que cette pratique nocive est très répandue dans l’État partie. Elle regrette d’ailleurs que des personnalités du Gouvernement l’aient défendue publiquement et que des associations de femmes fassent en sorte qu’elle se perpétue. Le Gouvernement devrait adopter une loi portant interdiction de cette pratique. Il devrait aussi prendre un train de mesures en vue de son élimination, et notamment lancer des campagnes de sensibilisation et organiser des formations de recyclage pour les professionnels de la santé qui tirent un revenu de cette pratique.

76.Mme Khattab salue la signature par l’État partie du plan d’action de la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC) visant à combattre la traite des êtres humains ainsi que les efforts qu’il met en œuvre pour réinsérer les victimes. Notant que l’État partie n’a formulé aucune demande d’extradition concernant des responsables présumés de la traite, elle demande des informations complémentaires. Elle souhaite également obtenir des précisions sur le projet de l’État partie d’élaborer une base de données sur la traite des êtres humains.

77.M. ZERMATTEN demande quelles mesures concrètes l’État partie prend pour combattre le phénomène des enfants des rues, et quel est le nombre de ces enfants à l’échelle du pays, sachant qu’il varie entre 3 000 et 10 000 selon les sources.

78.Notant que le rapport a été soumis en 2006, M. Zermatten se demande si davantage de moyens ont été mis en œuvre depuis cette date pour prendre en charge les enfants qui consomment des drogues, notamment de la marijuana, et de l’alcool, et si des progrès ont été réalisés dans ce domaine.

79.Mme VUCKOVIC‑SAHOVIC se demande comment il est possible que 13,5 % du budget national soient alloués à l’éducation, et voudrait savoir si ces allocations budgétaires sont investies dans les salaires ou encore dans la formation d’enseignants, qui font cruellement défaut, le rapport enseignant/élève étant de 1 pour 66. Rappelant que la loi sur la prévention des actes de cruauté envers les enfants de 1961 qui autorisait les parents et autres représentants légaux à corriger les enfants n’a toujours pas été abrogée et que la loi sur l’éducation de 2004 ne fait pas mention des mesures de correction auxquelles peuvent recourir les enseignants, elle demande si les châtiments corporels sont interdits à l’école.

80.Lisant au paragraphe 258 du rapport qu’en 2003, les établissements d’enseignement technique ou professionnel ont accueilli 21 191 élèves tandis que les établissements d’enseignement secondaire en accueillaient 162 141, elle appelle l’attention de l’État partie sur le fait que les pays pauvres comme la Sierra Leone ont davantage besoin de main‑d’œuvre disposant d’un bagage technique ou professionnel que d’une formation généraliste. La délégation pourrait donner son point de vue à ce sujet.

81.Enfin, la délégation pourrait indiquer quelles structures l’État partie a mises en place pour que les enfants aient accès à des activités récréatives et sportives lors de leur temps libre, afin d’éviter qu’ils ne soient victimes d’exploitation, sexuelle ou autre.

82.M. PARFITT se demande si les 40 % d’enfants qui, d’après les statistiques, ne vivent avec aucun de leurs parents biologiques sont pris en charge par leur famille élargie et quels plans le Gouvernement sierra‑léonais entend élaborer pour offrir à ces enfants une protection de remplacement, soit au sein d’une famille d’accueil, soit dans des institutions spécialisées.

83.Jugeant très regrettable que, contrairement à la Constitution, le droit coutumier n’impose aucun devoir parental au père, M. Parfitt voudrait savoir comment l’État partie entend induire un changement de mentalité au niveau local et faire en sorte d’aligner le droit coutumier sur le projet de loi sur les droits de l’enfant qui est en cours d’élaboration. De la même manière, comment l’État partie entend‑il influer sur le fonctionnement de la justice au niveau local, qui est rendue par des tribunaux coutumiers appliquant des normes souvent contraires aux dispositions de la Convention?

84.Mme AIDOO, rappelant que l’État partie est tristement célèbre pour ses taux records de mortalité maternelle et infantile et de mortalité des moins de 5 ans, demande quel est le montant des crédits budgétaires alloués au titre du plan national stratégique de réduction de la mortalité maternelle et infantile, et si ces crédits ont été débloqués. De la même façon, elle souhaite savoir si les crédits alloués au titre de l’Initiative en faveur des pays pauvres très endettés ont été versés comme prévu.

La séance est levée à 13 heures.

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