NATIONS

UNIES

CRC

Convention relative aux

droits de l'enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/SR.629

30 mai 2000

Original : FRANÇAIS

COMITÉ DES DROITS DE L'ENFANT

Vingt-quatrième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 629ème SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le mercredi 24 mai 2000, à 10 heures.

Présidente : Mme OUEDRAOGO

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

______________

Le présent compte rendu est sujet à rectifications.

Les rectifications doivent être rédigées dans l'une des langues de travail. Elles doivent être présentées dans un mémorandum et être également incorporées à un exemplaire du compte rendu. Il convient de les adresser, une semaine au plus tard à compter de la date du présent document, à la Section d'édition des documents officiels, bureau E.4108, Palais des Nations, Genève.

Les rectifications aux comptes rendus des séances publiques du Comité seront groupées dans un rectificatif unique qui sera publié peu après la session.

GE.00-42481 (F)

La séance est ouverte à 10 h 10.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉsentÉs par les États parties (point 4 de l'ordre du jour) (suite)

Rapport initial du Cambodge [CRC/C/11/Add.16; CRC/C/Q/CAM/1; réponses écrites du Gouvernement cambodgien aux questions du Comité (document sans cote distribué en séance, en anglais seulement)]

1.Sur l'invitation de la Présidente, M. Im Sethy, M. NouvPhearith et Mme Chan Haranvaddey prennent place à la table du Comité.

2.M. IM SETHY(Cambodge) rappelle que son pays a ratifié la Convention relative aux droits de l'enfant en 1992 sans aucune réserve et est partie aux principaux instruments internationaux de protection des droits de l'homme. Le rapport initial à l’examen a été élaboré par un comité ministériel, qui a travaillé en coopération avec des ONGm. im sethyet l'ONU.

3.Trois décennies de guerre, de tueries et de crises ont laissé un Cambodge dévasté. Les infrastructures sont insuffisantes et vétustes. Certaines régions sont toujours affectées par les mines. Beaucoup d'intellectuels ont péri du temps des Khmers rouges et le Cambodge manque cruellement de ressources humaines qualifiées.

4.Malgré ces obstacles, de nombreux efforts ont été consentis afin de mettre en application la Convention. Dans le domaine législatif, par exemple, la loi sur l'enlèvement, le trafic et l'exploitation des êtres humains adoptée en 1996 a déjà permis d'arrêter et de juger de nombreux trafiquants. Le Ministère de la justice a rédigé un projet de code de procédure criminelle et un projet de code pénal qui contiennent des dispositions sur la justice pour mineurs et fixent l'âge de la responsabilité pénale à 18 ans. Un nouveau code civil et un nouveau code de procédure civile sont également en projet pour couvrir de nombreux domaines où la législation fait encore défaut, tels que l'enregistrement des naissances et le placement des enfants auprès de familles d'accueil ou dans des institutions. Le Ministère des affaires sociales a élaboré un projet de loi sur l'adoption internationale conforme tant à la Convention relative aux droits de l'enfant qu’à la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale, dont la ratification est à l'étude. Le Cambodge a en outre ratifié la Convention No 138 de l’OIT.

5.En 1995, le Cambodge a créé le Conseil national cambodgien pour les enfants (CNCE), chargé de coordonner les activités du Gouvernement dans ce domaine et de surveiller l'application de la Convention. Bien que faiblement doté en personnel et en moyens, le CNCE a rédigé de nombreux rapports sur la situation des enfants. Il a aussi élaboré un plan quinquennal de lutte contre l'exploitation sexuelle des enfants qui doit être mis en œuvre par tous les ministères et dont il assurera la coordination et le suivi.

6.Le Cambodge s'est doté de systèmes de collecte de données, principalement sur la santé et l'éducation, domaines dont les budgets, encore faibles, ont pourtant été régulièrement augmentés. Dans le domaine de la santé, le pays connaît encore de graves difficultés. Ainsi, la mortalité infantile, la mortalité maternelle et la mortalité des enfants de moins de cinq ans restent très élevées, et l'épidémie de sida progresse rapidement. Dans le domaine de l'éducation, le nombre d'écoles insuffisant fait obstacle à l'établissement de l'obligation scolaire et les taux d'absentéisme et de redoublement sont élevés. Le travail des enfants, l'exploitation sexuelle, le trafic d'enfants et la justice pour mineurs sont autant de domaines de préoccupation pour le Gouvernement en matière de protection de l'enfance.

7.Le Cambodge manque cruellement de ressources humaines et financières et a besoin de l'assistance technique des organismes et des institutions spécialisées de l'ONU. Le Gouvernement cambodgien entend faire tout son possible pour appliquer la Convention et assure au Comité que ses conseils et recommandations seront pris en considération.

8.Mme TIGERSTEDT-TÄHTELÄ constate que le Cambodge a suivi les directives du Comité pour élaborer son rapport et ses réponses écrites; le rapport pèche par un certain formalisme mais les réponses écrites, qui citent de nombreuses législations et politiques, donnent une idée plus complète de la mise en œuvre de la Convention au Cambodge. Les enfants ne semblent toutefois pas avoir été associés au processus d’élaboration du rapport initial.

9.Le suivi de la Convention et la coordination incombent avant tout au Gouvernement mais la société civile doit être associée à ce suivi car elle est à même d'être plus objective et plus critique. Comment est assuré dans la pratique le suivi de l'application de la Convention et quel est le rôle joué à cet égard par le CNCE ? Plusieurs ministères ainsi que des organisations internationales sont représentés au sein du CNCE et la question se pose de savoir comment les différents plans et projets adoptés par celui-ci sont coordonnés en pratique. Le Cambodge envisage-t-il de créer un poste de médiateur des enfants ?

10.Elle souhaiterait savoir si le CNCE  a procédé à l'évaluation régulière de la mise en œuvre du plan d'action national triennal pour les enfants et du plan d'action quinquennal de lutte contre l'exploitation sexuelle. Les responsables cambodgiens envisagent-ils de recourir à l'avenir à un système de plans à horizon mobile qui lui permettrait de commencer l'évaluation pendant la période d'exécution des programmes ?

11.M. FULCI demande si des efforts sont faits pour traduire en justice les responsables du génocide, dont tant d'enfants ont été victimes.

12.Le rapport du Cambodge ne donne pas de renseignements sur la formation des professionnels travaillant auprès des enfants. D'autre part, il semblerait que peu ait été fait pour associer la société civile, les ONG et les enfants eux-mêmes aux activités visant à protéger ces derniers. Les médias n'auraient pas non plus été suffisamment associés à la diffusion de la Convention, et les enfants ne seraient pas bien informés au sujet de la Convention et de ses principes. La délégation cambodgienne pourrait-elle apporter des précisions sur tous ces points ?

13.Le Comité pour l'élimination de la discrimination raciale a fait état de graves discriminations et violations à l'égard des nombreux Vietnamiens vivant au Cambodge. Par exemple, très peu de facilités seraient offertes aux enfants vietnamiens pour apprendre la langue khmère. Eu égard au principe de non-discrimination énoncé à l'article 2 de la Convention, quelles sont les mesures prises pour que tous les enfants puissent, quelle que soit leur origine, jouir des droits qui leurs sont reconnus dans la Convention ?

14.Mme MOKHUANE aimerait avoir des précisions sur les activités de coordination du CNCE : comment sont-elles répercutées à l'échelon provincial ou local ? Est-il fait rapport au Parlement, et par qui : le Ministère des affaires sociales, le CNCE pour les enfants ou les gouverneurs de province ? Est-il envisagé de créer un poste de médiateur des enfants ? Chaque ministère semble être chargé d'élaborer les lois de son ressort sans véritable coordination interministérielle. Il manque un fil conducteur qui permettrait de faire de la législation un tout cohérent et de traiter de façon globale les questions visées par la Convention.

15.Elle constate le même manque de coordination dans le domaine de la collecte des données, qui semble être assurée individuellement par les différents ministères. Il serait utile d'avoir un cadre commun de collecte des données afin de couvrir toutes les questions visées par la Convention.

16.Quelle est la part du budget consacrée aux enfants vulnérables ? Qui fixe les priorités en matière budgétaire, les ministères ou les autorités provinciales ? Les salaires des enseignants n'ont pas été revalorisés bien que le budget ait augmenté, ce qui risque de nuire à leur motivation; qu’entend faire l’État partie pour remédier à ce problème ?

17.M. RABAH souhaiterait savoir pourquoi la coopération et la coordination entre le Gouvernement et les ONG semblent faire défaut au Cambodge et quelle est la situation exacte en la matière ? Les ONG ont-elles participé, directement ou indirectement, à l'élaboration du rapport initial ? Les droits des enfants font-ils l'objet d'une véritable politique au Cambodge ? Existe-t-il une centralisation des services offerts aux enfants cambodgiens, aussi bien dans les grandes villes qu'en dehors ?

18.Il demande pourquoi l'âge nubile est de 18 ans pour les filles et de 20 ans pour les garçons. Il demande des éclaircissements sur la disposition de l'article 177 de la législation du travail autorisant un enfant de moins de 18 ans à travailler moyennant le consentement de ses parents ou tuteurs. Enfin, l'âge minimum pour entrer dans les forces armées n'est pas indiqué et il serait utile de le connaître.

19.M. DOEK demande quelle suite le Gouvernement cambodgien entend donner aux conclusions de l'étude réalisée par le CNCE faisant apparaître que la législation ne prévoit aucun suivi de la mise en œuvre de Convention et qu’il y aurait donc lieu d'élaborer une loi de portée générale sur l'enfance et de créer une équipe nationale à cette fin.

20.La moitié du budget national serait consacrée à la défense et à la sécurité, ce au détriment d'autres secteurs; le Gouvernement peut-il justifier cette situation ? En outre, le montant des crédits décaissés au titre de certaines activités serait inférieur au montant initialement prévu; des éclaircissements à ce sujet seraient souhaitables.

21.Quels sont les objectifs du Plan d'action national pour les enfants, qui semble être une compilation des différentes mesures prises par les ministères visant à faciliter la surveillance et l'évaluation de la situation des enfants ? Fixe-t-il des objectifs généraux, dont le degré de réalisation permettrait au Comité d’apprécier les progrès réalisés dans sa mise en œuvre ?

22.Mme RILANTONO souligne la nécessité de coordonner les activités des différents ministères ayant des attributions en rapport avec l’enfance et de les sensibiliser, de même que la population, à la Convention. Les structures traditionnelles locales du type assemblée de village que l'on rencontre dans les pays asiatiques ne constitueraient-elles pas un bon moyen de diffusion de la Convention au Cambodge si ce pays en est doté ? Pour faire face à la pénurie de personnel qualifié, le Cambodge a-t-il mis en place un programme national pour la formation de spécialistes, juristes et enseignants par exemple ?

23.La PRÉSIDENTE demande comment le Gouvernement cambodgien procède pour diffuser la Convention et comment il parvient à surmonter les difficultés que pose son attitude traditionnelle par rapport à l’acceptation, notamment, du principe selon lequel l’enfant est un sujet de droit.

24.Il est regrettable que l’âge légal pour le consentement aux relations sexuelles n’ait pas été indiqué dans les réponses écrites car dans cette région se pose le problème crucial de l’implication des enfants dans la prostitution. L’article 434 du Code pénal est-il suffisant pour garantir la protection des enfants sur ce plan ?

25.Mme CHAN HARANVADDEY (Cambodge) précise que la création du CNCE est récente, tout comme l’application de la Convention relative aux droits de l’enfant. Le CNCE s’efforce de coordonner les mesures élaborées dans le domaine de la protection de l’enfance, en surveille l’application et examine la législation sur cette question. Le travail de coordination s’effectue non seulement au niveau des activités des différents ministères mais aussi au niveau de celles du Gouvernement et des ONG. Le CNCE assure également la coordination des activités nationales et des activités menées par les comités chargés des questions de l’enfance à l’échelon provincial et local.

26.Malgré l’insuffisance des ressources humaines et matérielles disponibles, le CNCE est parvenu à mettre sur pied un plan d’action national pour les enfants. Les rapports établis par les ONG et les organes gouvernementaux ainsi que les médias sont des sources d’information précieuses pour le Conseil. Son rôle de surveillance s’exerce auprès des organes gouvernementaux et des ONG au niveau provincial, ce qui lui permet de formuler ensuite des recommandations au Gouvernement. Il travaille en collaboration étroite avec les ONG, les institutions internationales telles que l’UNICEF, le secteur privé et la société civile. Il a mené des enquêtes dans les provinces, notamment sur le problème de l’exploitation sexuelle des enfants.

27.M. IM SETHY (Cambodge) souligne le rôle de coordination du CNCE qui rassemble plus de 18 ministres et secrétaires d’État ayant des attributions en rapport avec la situation de l’enfance. Après examen de la législation en vigueur, le CNCE peut adresser des recommandations au Conseil des ministres. Compte tenu des difficultés énormes auxquelles le Cambodge est confronté, après avoir vécu une très longue période de conflits armés, le Gouvernement doit engager un travail de reconstruction dans tous les domaines, à commencer par la législation. Depuis 1993, plus de 120 textes législatifs ont été adoptés mais il reste beaucoup à faire pour élaborer des lois visant à assurer le bien-être des enfants tout comme celui de l’ensemble de la population. Le CNCE joue donc un rôle essentiel à cet égard et a notamment recommandé au Gouvernement de légiférer en vue de lutter contre le trafic d’enfants et leur exploitation sexuelle.

28.Le CNCE travaille en étroite collaboration avec les ONG, dont le nombre atteint au moins 400. Plus d’une vingtaine sont d’ailleurs spécialisées dans la défense des droits de l’homme et des droits de l’enfant. Lors de forums organisés par le CNCE, ces ONG ont la possibilité d’expliquer comment leurs activités complètent le travail du Gouvernement.

29.Le CNCE exerce aussi un rôle de promotion, notamment en ce qui concerne la Convention. Il s’efforce de sensibiliser l’opinion publique en organisant des séminaires et diverses manifestations consacrées à l’enfance, telles que la célébration de la Journée de l’enfant, le 1er juin. S’agissant du renforcement de l’éducation, il importe avant tout d’assurer la participation active des parents et de la communauté à l’échelon local.

30.La création d’un poste de médiateur des enfants est une idée très intéressante qui sera dûment étudiée, mais d’autres questions doivent être traitées en priorité.

31.Les Khmers de souche représentent 95 % de la population du Cambodge mais les enfants de la minorité musulmane, des différentes minorités autochtones et des communautés d’origine vietnamienne et chinoise ne font l’objet d’aucune discrimination.

32.La démobilisation des troupes des quatre factions armées, dont des enfants soldats, a commencé très tôt sur une base prioritaire et s’est poursuivie au rythme annuel de 10 000 démobilisés. Ce problème est aujourd'hui presque réglé.

33.L'importance du budget de défense et de sécurité s'explique notamment par les dépenses occasionnées par le regroupement des factions. Beaucoup de ressources sont également consacrées aux activités de démobilisation qui au-delà de la réduction des effectifs portent sur la formation et la réinsertion des ex-soldats. Cela étant, le Gouvernement reste fermement résolu à augmenter le budget du secteur social, à commencer par l'éducation et la santé.

34.Le CNCE a préconisé la création d'un comité d'action national pour garantir la réalisation du droit à l'éducation pour tous. Il est prévu d'augmenter le budget de l'éducation en 2000 et 2001. Des mesures sont prises depuis 1993 pour garantir le versement des salaires des fonctionnaires, à commencer par les enseignants. Ces derniers, qui représentent plus de la moitié des effectifs de la fonction publique, touchent également des primes pédagogiques. Dans le cadre de la réforme de l'administration, on procède actuellement au recensement informatisé des fonctionnaires. De nouvelles revalorisations du salaire des enseignants sont prévues.

35.M. NOUV PHEARITH (Cambodge) dit que l'âge légal du mariage est fixé à 18 ans pour les femmes et à 20 ans pour les hommes. Les jeunes filles peuvent toutefois se marier plus tôt (en cas de grossesse, par exemple) avec le consentement des parents. L'âge minimum d'admission à l'emploi est actuellement fixé à 16 ans mais compte tenu des rigueurs de la situation économique et de la pauvreté on prévoit d'abaisser cet âge à 14 ans, afin que les jeunes puissent aider leur famille.

36.La PRÉSIDENTE constate que la délégation n’a pas encore répondu aux questions concernant les résultats de l'étude comparative de la législation nationale et de la Convention, la contribution des assemblées traditionnelles à la diffusion de la Convention, la coordination entre les ministères, l'âge légal du consentement à des relations sexuelles et l'attitude traditionnelle à l'égard de la Convention.

37.Mme CHAN HARANVADDEY dit, au sujet de la coordination des textes législatifs, que le CNCE a demandé la mise en place d’une équipe spéciale, composée notamment de représentants du secteur privé, des ONG, des organisations internationales et des organismes gouvernementaux, avec pour mission d’examiner tous les projets de loi établis par les ministères techniques afin de s'assurer que les droits de l'enfant y sont pris en considération. L'UNICEF a été contacté pour financer les services d'un consultant juridique. Les ressources financières nécessaires restent toutefois à trouver.

38.En coopération avec l'UNICEF, le CNCE a établi un calendrier d'activités pour la promotion des droits des enfants, qui doit être examiné au niveau central et à celui des villages. La diffusion de la Convention se fait notamment par le biais d'émissions de télévision, y compris sur une chaîne privée, notamment à l'occasion de la Journée de l'enfance. Un effort de sensibilisation à la Convention ainsi qu’aux problèmes que constituent l'exploitation sexuelle et le travail des enfants a été entrepris.

39.On s'efforce par ailleurs de sensibiliser et de former les fonctionnaires à tous les niveaux, notamment pour qu'ils aillent au-delà des aspects purement techniques de l'application de la Convention. Des groupes de volontaires viennent en aide aux enfants dans le cadre d'un programme d'aide au renforcement des capacités des collectivités mis en oeuvre par le Département du développement rural avec l'appui de l'UNICEF.

40.Aucune disposition législative ne fixe l'âge légal du consentement à des relations sexuelles.

41.La PRÉSIDENTE invite les membres du Comité à poser des questions se rapportant aux principes généraux et aux libertés et droits civils.

42.M. DOEK voudrait de plus amples renseignements sur les cas de brutalité policière à l'égard d'enfants qui se seraient produits dans la rue et dans certains postes de police et demande quelles mesures ont été prises pour lutter contre de telles pratiques.

43.M. FULCI souhaiterait des précisions sur la situation des tribus des collines. Trois garçons ayant, selon certaines sources, été torturés dans un centre de redressement, il demande ce qui est fait pour que la police change de comportement. Enfin, il voudrait savoir quand se termineront les opérations de déminage sur le territoire cambodgien.

44.Mme TIGERSTEDT-TÄHTELÄ demande ce qu'on entend par citoyenneté et nationalité au Cambodge. Elle aimerait savoir qui possède la nationalité cambodgienne en dehors des Khmers et ce qu'il en est des Vietnamiens de souche. En matière de lutte contre la discrimination, l’objectif ne doit pas simplement être d'assurer un traitement uniforme pour tous mais aussi d’accorder un traitement préférentiel aux populations défavorisées. Elle aimerait connaître les mesures prises pour faire évoluer les mentalités en vue d’en finir avec les pratiques discriminatoires traditionnelles à l'égard des fillettes.

45.Mme MOKHUANE considère qu'il n'a pas été véritablement répondu aux questions figurant au paragraphe 6 de la liste des points à traiter. Elle aimerait savoir si la Constitution et la législation prévoient des recours pour les populations non khmères victimes de discrimination et si des activités d'information et de sensibilisation ont été organisées pour que les personnes séropositives ou atteintes du sida ne soient pas défavorisées. Elle demande si les tribus des collines ont accès à tous les services sociaux.

46.Elle voudrait aussi savoir comment l'intérêt supérieur des enfants est pris en considération en matière pénale et en droit de la famille, notamment lors de décisions se rapportant à la garde des enfants dans les affaires de divorce. Enfin, que fait-on pour que les mères séropositives ne transmettent pas le virus à leurs enfants ?

47.Mme RILANTONO souhaite savoir si une loi énonce spécifiquement le droit pour les enfants d'exprimer librement leur opinion. Dans le rapport, il est indiqué que dans la pratique les enfants expriment leur opinion à l'école par les réponses aux questions posées par leurs maîtres pendant les réunions; s’agit‑il là des seuls cas où ils peuvent exprimer leur opinion ? Peuvent‑ils aussi faire connaître leurs vues dans le cadre familial ou bien la culture cambodgienne veut‑elle qu'ils écoutent plutôt les anciens ? En cas de divorce des parents, l'enfant peut-il, à partir d'un certain âge, indiquer s'il préfère vivre avec son père ou avec sa mère ?

48.M. DOEK demande quand seront introduites les dispositions des codes civil et pénal devant rendre obligatoire la déclaration des enfants à la naissance et ce qui sera fait dans l’intervalle vu qu’il est indispensable que l'enfant soit enregistré pour être pris en compte dans toute politique et dans l'application de diverses mesures pour lesquelles l'âge est un critère déterminant.

49.Mme TIGERSTEDT‑TÄHTELÄ demande si les livrets de famille et livrets de résident dont il est question dans les réponses écrites sont d'une certaine façon des documents d'enregistrement des enfants. Ces livrets sont apparemment établis pour les enfants nés à l'hôpital à Phnom Penh. Cette procédure peut‑elle être étendue à l'ensemble du pays ?  Les naissances peuvent‑elles être aussi enregistrées dans les régions très reculées ? Le pays dispose‑t‑il de ressources humaines suffisantes pour effectuer ce travail ?

50.Mme MOKHUANE souhaite savoir comment les autorités ou les fonctionnaires déterminent dans la pratique l'identité et l'âge d'un enfant, par exemple dans le cadre des procédures judiciaires, de la justice pour mineurs et de l'enseignement. Par ailleurs, comment est‑il tenu compte des opinions des enfants dans la planification des services qui leur sont destinés ainsi que dans l'élaboration des politiques ?

La séance est suspendue à 12 h 25; elle est reprise à 12 h 35.

51.M. IM SETHY (Cambodge) souligne que la part du budget de l'État consacrée à la défense et à la sécurité ne saurait être réduite brutalement mais que les ressources économisées dans ce secteur seront réorientées vers le secteur social et profiteront donc aussi aux enfants.

52.Les cas de brutalités policières ne relèvent pas d'une politique du Gouvernement ou de la police, il s'agit d'actes individuels. De grands efforts sont faits par les autorités, avec la coopération active d'ONG, pour former les policiers et les membres des services de sécurité afin qu'ils connaissent et respectent les droits de l'homme, les lois et les règlements.

53.Des mesures ont été prises pour améliorer le traitement des délinquants juvéniles. Des prisons en mauvais état ont été rasées et de nouvelles construites, notamment avec l'aide d'organisations internationales et de plusieurs pays, l'Australie en particulier. À Phnom Penh, les jeunes détenus ont été séparés des adultes. Certains centres pour délinquants juvéniles fonctionnent comme des centres de formation professionnelle, le but étant de faciliter la réinsertion sociale des détenus. Les conditions de détention des délinquants juvéniles restent moins bonnes dans les provinces que dans la capitale.

54.La Constitution et la législation cambodgiennes interdisent toute discrimination raciale. La Constitution fait référence au "peuple khmer", mais cette expression recouvre en fait l'ensemble des populations qui habitent le Cambodge, parmi lesquelles figurent un certain nombre d’ethnies autochtones minoritaires vivant essentiellement dans le nord-est du pays. Les membres de ces minorités sont des citoyens à part entière. Ils ont été enregistrés et ont participé aux deux dernières élections. Ils bénéficient de l'aide d'ONG et des autorités cambodgiennes. Certaines associations s'attachent à revitaliser leur culture. Des Vietnamiens de souche sont installés depuis longtemps dans le pays et sont des citoyens cambodgiens comme les autres. Malheureusement des fanatiques et des extrémistes ainsi que certains partis politiques sont favorables à la discrimination.

55.Pour ce qui est du déminage, des équipes bien formées ont déjà accompli un travail considérable avec l'aide d'experts étrangers et le soutien de nombreux pays. Dans les régions les plus reculées, les techniques les plus modernes sont utilisées pour repérer les zones minées et des panneaux sont installés pour signaler les terrains dangereux.

56.Des disparités entre hommes et femmes existent au Cambodge mais il n'y a pas de discrimination, laquelle serait contraire aux idées de tolérance qui caractérisent le bouddhisme, religion très largement pratiquée dans le pays. Les problèmes tiennent aux mentalités. Des parents jugent par exemple inutile que leurs filles aillent à l'école ou poursuivent leurs études parce qu'elles vont se marier. Cependant, la situation évolue et des efforts sont déployés pour sensibiliser tant les communautés que les parents à la nécessité de traiter les filles sur un pied d'égalité avec les garçons.

57.Une autorité pour la lutte contre le sida a été créée au Cambodge. Elle agit en coopération avec les divers ministères. Des initiatives ont été prises pour diffuser des informations sur cette maladie dans le cadre des programmes scolaires et former les enseignants. La prévention est essentielle. Par ailleurs, le Ministère de la santé coopère avec des organismes internationaux en vue d'aider les jeunes femmes enceintes séropositives et de fournir ensuite une assistance à leurs enfants.

58.Les enfants ne deviennent citoyens à part entière qu'à 18 ans. Il n'y a pas encore au Cambodge de forum pour les enfants. On organise cependant des réunions auxquelles ils sont invités à prendre la parole. Selon les traditions, les enfants doivent surtout écouter les adultes, mais la situation évolue et la majorité des Cambodgiens sont conscients de la nécessité d'écouter aussi les enfants.

59.Il n'y a pas encore de lois proprement dites concernant l'enregistrement des naissances et ce sont donc des circulaires du Ministère de l'intérieur concernant les livrets de famille qui s’appliquent dans ce domaine. Des extraits d'actes de naissance sont désormais établis pour la plupart des nouveau‑nés. Du temps des Khmers rouges, la plupart des documents d'état civil ont été brûlés. Sur tout le territoire, le système actuellement appliqué en matière d'état civil consiste à établir par groupe de maisons des dossiers dans lesquels sont indiqués les noms des chefs de famille, de leur épouse, de leurs enfants et des personnes qui vivent avec eux. Des lois devront bien évidemment être adoptées sur la tenue de registres d'état civil. L'âge d'une personne dont les pièces d'état civil ont été détruites est déterminé sur la base d'une déclaration de l'intéressé. Pour pouvoir faire modifier l'âge indiqué, il faut saisir un tribunal.

60.Les autorités sont conscientes de l'intérêt de développer les activités extrascolaires pour favoriser l'épanouissement des enfants. Des centres de la jeunesse ainsi que des centres d'activités sportives et culturelles ont été créés, mais beaucoup de problèmes se posent faute de ressources. En tout état de cause la priorité reste la scolarisation car le Cambodge ne cache pas que près de 400 000 enfants d'âge scolaire ne sont pas scolarisés.

La séance est levée à 13 heures.

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