NATIONS UNIES

CRC

Convention relative aux droits de l’enfant

Distr.

GÉNÉRALE

CRC/C/SR.1233

18 décembre 2009

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L’ENFANT

Quarante-cinquième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 1233e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,

le mercredi 23 mai 2007, à 10 heures.

Présidente: Mme LEE

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (suite)

Deuxième et troisième rapports périodiques des Maldives

La séance est ouverte à 10 h 0 5.

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES (point 6 de l’ordre du jour) (suite)

Deuxième et troisième rapports périodiques des Maldives (CRC/C/MDV/3; CRC/C/MDV/Q/3 et Add.1)

Sur l’invitation de la Présidente, les membres de la délégation des Maldives prennent place à la table du Comité.

Mme DIDI (Maldives), dans sa présentation des deuxième et troisième rapports périodiques (CRC/C/MDV/3), signale qu’au cours des 10 dernières années, les Maldives n’ont pas rempli de manière satisfaisante leurs obligations de rapport car elles ne disposaient pas d’un mécanisme approprié de contrôle de l’application de la Convention. La mise en œuvre d’une approche fondée sur les droits pour planifier, surveiller et instaurer un environnement protecteur pour les enfants, a pris un certain temps, notamment l’adoption d’une législation appropriée.

Aux Maldives, les écoles primaires existent là où vivent des enfants et elles comptent un taux d’inscription voisin de 100 % jusqu’à la septième année. D’après le recensement 2006, l’écart entre sexe dans les taux d’inscription au secondaire a presque disparu. Dans le supérieur, les étudiants des Maldives figurent parmi les meilleurs choisis au niveau international en 2007. Néanmoins, le pays doit encore faire face à un certain nombre d’obstacles dans la mise en place d’un enseignement de qualité. Des initiatives soutenues par le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF) visant à mettre en place un enseignement préscolaire fondé sur le jeu, des écoles primaires amies des enfants et des centres de documentation pour les enseignants au niveau des atolls, contribuent à réduire les disparités dans l’instauration d’un enseignement primaire de qualité.

L’application de mesures spéciales a réduit les taux de mortalité infantile et maternelle respectivement à 16 et 0.69 pour 1000 naissances vivantes. La couverture vaccinale (DTP3 et rougeole) dépasse actuellement 95 %.

Depuis leur ratification de la Convention, les Maldives se sont efforcées de fournir des services adéquats aux enfants nécessitant une protection. Les principales difficultés pour rendre les services accessibles aux enfants tiennent à la dispersion géographique des communautés et aux ressources financières, institutionnelles et humaines limitées, en particulier en matière de professionnels qualifiés. Le Ministère de l’égalité des sexes et de la famille a entrepris un programme de décentralisation pour fournir des services de protection aux enfants et aux familles à risque. Fin 2008, chaque atoll disposera d’un centre de services qui travaillera avec une équipe multidisciplinaire pour fournir aux enfants des services de protection sociale. Le Ministère travaille également avec «Child Helpline International» à la création d’une ligne d’assistance téléphonique pour les enfants aux Maldives.

Les Maldives ont entrepris une réforme politique majeure. La feuille de route du calendrier des réformes, annoncée par le Président en mars 2006, mettra en place une démocratie moderne et donnera un nouvel élan à la promotion et à la protection des droits de l’enfant. Des efforts sont en cours en vue d’incorporer à la législation nationale la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes et la Convention relative aux droits de l’enfant. Le Gouvernement adopte actuellement des mesures pour instaurer un système holistique de justice des mineurs et le Cabinet a récemment approuvé un organe de justice des mineurs. Le Code pénal a été révisé et un projet de législation sur la preuve, l’emploi et la police a pris en compte les normes et les meilleures pratiques internationales en matière de droits de l’homme. La loi de la famille sera révisée d’ici la fin 2007 pour y inclure les questions de droits des enfants.

Les Maldives ont ratifié la Convention contre la torture ou autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et son Protocole facultatif en septembre 2005, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques et son Protocole facultatif et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels en septembre 2006.

La surveillance et les rapports sur la mise en œuvre des droits des femmes et des enfants seront systématiques suite à la création à cette fin d’un service spécial au sein du Ministère de l’égalité entre les sexes et de la famille. Le Ministère de la planification et du développement national est l’organe clef du Gouvernement responsable du recueil des données. Un système de déclaration des naissances et de gestion de l’information destiné aux enfants, aux adolescents et aux familles en danger, est en cours de création avec l’aide de l’UNICEF.

La police a connu une évolution en matière de protection des mineurs; l’accent est mis à présent sur les familles à risques plutôt que sur les seuls enfants. L’objectif consiste à préserver l’intérêt supérieur de l’enfant en responsabilisant les parents et en donnant aux enfants un environnement protégé au sein de la famille. Toutefois, les enfants dont l’intérêt supérieur ne peut être garanti de cette manière sont, en dernier recours, confiés aux bons soins de l’État. Améliorer ce type de soins et leur trouver des formes alternatives pose un grand défi au Gouvernement. Des normes minimums ont été fixées pour les institutions et seront expressément appliquées dans les mois à venir. La possibilité d’instaurer le kafalah comme alternative à l’adoption, et les familles d’accueil comme alternative systématique aux soins en institutions, est actuellement à l’étude.

Peu a été fait pour familiariser les enfants à la Convention. L’habitude de les impliquer dans la mise en œuvre et dans la surveillance de leurs droits n’est pas encore établie, bien que les écoliers aient été consultés sur la rédaction du plan national d’action pour le bien-être de l’enfant maldivien 2001-2010. Les écoles autorisent les enfants à former des associations et des clubs, mais il n’y a aucune association qui encourage la participation des enfants à la mise en œuvre de leurs droits.

Aux Maldives, les enfants handicapés ont un accès minimal à l’école et aux autres services publics. Pour remédier à une telle situation, une politique nationale du handicap est mise en place et un groupe de travail technique prépare un plan d’action. Des mesures sont adoptées pour assurer que chaque atoll dispose au moins d’une école qui assure un enseignement aux enfants handicapés grâce à une approche intégrée. Un registre national des enfants handicapés sera créé d’ici fin 2007. Mme Didi se félicite du travail de l’ONG «Care society» pour ses efforts en faveur des enfants handicapés aux Maldives.

Les autres questions majeures dont le Gouvernement doit s’occuper sont la fréquence de la toxicomanie chez les jeunes et l’implication des enfants dans la violence d’origine politique. La réinsertion des jeunes toxicomanes n’est pas satisfaisante et, dans un pays où près de 42 % de la population a moins de 18 ans, cette situation doit être traitée en urgence.

M. SIDDIQUI (Rapporteur de pays) souligne que les Maldives ont, au cours des dernières années, réalisé des progrès économiques, sociaux et politiques importants. Leurs progrès sociaux se traduisent par le fait qu’elles obtiennent le meilleur résultat parmi les pays d’Asie du sud dans la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le développement des Nations Unies.

Il note avec satisfaction que quelques-unes des préoccupations et des recommandations du Comité relatives au rapport initial des Maldives (CRC/C/8/Add.33) ont été suivies d’effet, par l’adoption d’une législation et de politiques. Toutefois, les recommandations du Comité relatives aux réserves, à l’harmonisation de la législation nationale avec la Convention, à la discrimination à l’encontre d’enfants handicapés et d’enfants nés hors mariage, à la prévention des mauvais traitements aux enfants, notamment des abus sexuels, au problème de la toxicomanie et de l’administration de la justice des mineurs, n’ont pas été suffisamment traitées. La délégation devrait expliquer la raison pour laquelle les Maldives n’ont pas appliqué ces recommandations et quand elles prévoient de le faire. Il invite l’État partie à retirer ses réserves aux articles 14 et 21 de la Convention.

Il souhaite savoir si des ressources financières et humaines adéquates ont été allouées au Plan d’action national en faveur du bien-être de l’enfant maldivien 2001-2010, et si ce plan sera mis en œuvre par un organe public, ou en coopération avec la société civile. Il souhaite aussi savoir si une évaluation à moyen terme a été effectuée et, si oui, comment elle a été suivie.

Il aimerait avoir des précisions en ce qui concerne les observations selon lesquelles d’une part, les organes responsables de la surveillance et de la mise en œuvre de la Convention ne disposaient pas des ressources humaines et financières suffisantes et d’autre part, le Groupe de travail multisectoriel sur la protection de l’enfance avait cessé ses activités en 2005.

Bien qu’il se félicite des efforts du Ministère de la planification et du développement et du Ministère des rapports entre les sexes et de la famille, en coopération avec l’UNICEF, en vue de recueillir des données sur la situation des enfants, il note que le système national de collecte des données ne couvre pas tous les aspects de la Convention, mais s’attache essentiellement aux enfants en situation de conflit avec la loi. En outre, les données concernant la situation des enfants dans les atolls éloignés sont rares. Le recueil des données est freiné par un manque de personnel formé et par la mauvaise coordination entre pouvoirs publics et services sociaux. Il demande de quelle manière l’État partie prévoit de traiter ces problèmes.

Il invite la délégation à formuler des observations sur les rapports selon lesquels les crédits publics de santé et d’éducation diminuent. Cela doit avoir un impact négatif sur les enfants. En outre, les associations d’enfants ne sont pas consultées sur l’élaboration du budget et il n’y a pas de relevés des crédits alloués aux enfants et des dépenses réelles engagées pour eux.

Les administrations des atolls ne sont pas représentatives de la population locale et leur capacité à répondre aux besoins des enfants sont très limitées. M. Siddiqui demande comment le Gouvernement envisage de remédier à cette situation.

Il a été signalé que la Convention n’était pas diffusée de manière systématique et ciblée; en conséquence, peu de parents, enfants, enseignants et soignants en connaissent bien le contenu. Le Gouvernement n’a pas publié ou distribué le rapport initial des Maldives ou les observations de conclusion du Comité. La délégation devrait s’exprimer sur ces observations.

Malgré les recommandations d’un éminent érudit islamique visant à rendre la législation nationale conforme à la Convention, la loi relative à la protection des droits de l’enfant n’a pas été amendée pour élever l’âge légal de 16 à 18 ans.

Mme VUCKOVIC-SAHOVIC (Rapporteuse suppléante de pays) dit que depuis l’examen du rapport initial des Maldives, la société civile semble s’être beaucoup développée. Elle demande dans quelle mesure les ONG ont été impliquées dans la rédaction des deuxième et troisième rapports périodiques. Elle souhaite obtenir un complément d’informations sur le nombre d’ONG spécifiquement chargées de questions liées aux enfants. Un partenariat avec ces organisations devrait être instauré car les ONG peuvent fournir des services aux enfants qui vivent dans les régions éloignées. Les autres gouvernements pourraient apporter une aide technique.

Certaines ONG expriment leurs préoccupations au sujet des difficultés relatives aux procédures de déclaration à l’état civil. Il appartient au Gouvernement d’aider la société civile et elle renvoie l’État partie à l’observation générale no 5 du Comité sur les mesures générales de mise en œuvre de la Convention relative aux droits de l’enfant. Les Maldives devraient favoriser les associations d’enfants, car les enfants qui ont leur mot à dire sur leurs propres affaires à l’école, sont susceptibles d’avoir davantage confiance en eux pour exprimer leurs opinions plus tard dans la vie.

M. KOTRANE note que les Maldives ont un système juridique dualiste; de ce fait, les instruments internationaux doivent être incorporés à la législation nationale et ne peuvent être directement invoqués devant les tribunaux. À cet égard, il demande si les juges et les experts judiciaires connaissent suffisamment les dispositions de la Convention pour soutenir les réformes législatives nécessaires.

Il est préoccupé de la coexistence du Code civil et de la loi islamique, ce qui signifie que tous les enfants ne sont pas soumis aux mêmes dispositions légales. Il s’enquiert des éventuelles mesures adoptées pour unifier la législation maldivienne.

Il note les réserves formulées par les Maldives en ce qui concerne la liberté de religion ou de croyance en vertu de la Convention relative aux droits de l’enfant et de la Convention concernant l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes. Il demande s’il y a des perspectives d’une plus grande tolérance religieuse dans l’État partie. Le Rapporteur spécial sur la liberté de religion ou de croyance recommande que les prisonniers soient autorisés à pratiquer leur religion dans les centres de détention, et il demande si les Maldives prévoient des mesures concrètes pour favoriser la tolérance et la coexistence. S’agissant du travail des enfants, il souligne que les Maldives doivent envisager d’adhérer à l’Organisation internationale du Travail (OIT).

La définition de l’enfant dans la législation maldivienne devrait être rendue plus précise. Bien qu’il faille se louer que l’âge minimum du mariage soit passé de 16 à 18 ans, l’âge de la responsabilité pénale est encore trop bas. L’âge d’achèvement du cycle primaire est également trop bas et devrait être élevé à 15 ans.

Mme ALUOCH signale que le Comité a reçu des informations selon lesquelles les services de police maldiviens ont, à diverses reprises, fait des commentaires aux médias, enfreignant ainsi le droit à la vie privée et à la dignité des enfants. Elle demande s’il existe des restrictions ou des directives à l’intention des médias en ce qui concerne les cas impliquant des enfants. Elle a été informée du fait que les délinquants sexuels aux Maldives restaient souvent impunis et étaient même pardonnés à l’occasion, et elle demande si une nouvelle législation traitera de cette question.

Mme KHATTAB, suite aux réserves formulées par les Maldives à l’article 14 de la Convention au motif que la Constitution stipule l’obligation pour tous les maldiviens d’être musulmans, s’enquiert d’un éventuel amendement de la Constitution, avec le processus de démocratisation en cours. Les individus ne devraient pas être contraints d’adopter la religion musulmane mais avoir la liberté de choisir leur foi. De nombreux pays musulmans ne formulent pas de réserves à l’article 14, tandis que d’autres tels le Maroc et la République arabe syrienne, les ont retirées ou envisagent de le faire.

S’agissant des réserves à l’article 21 de la Convention, elle note que les Maldives devraient s’interroger sur l’exemple de l’Égypte, qui a retiré ses réserves sur l’adoption et la kafalah lorsqu’elle a pris conscience du fait que celles-ci n’étaient pas en contradiction avec la sharia. Elle espère que les Maldives suivront cet exemple en soumettant la question au Parlement.

Elle exprime sa préoccupation au sujet de la discrimination à l’encontre des enfants nés hors mariage, qui n’ont aucun droit. Il importe d’intégrer ces enfants dans la société et de défendre leur intérêt supérieur. Elle a entendu dire que l’on avait tenté récemment d’empêcher les filles d’aller à l’école. Elle souhaite savoir ce qui est fait pour éviter de tels comportements, car il est essentiel que les filles jouissent de droits égaux en matière d’éducation.

Mme AL-THANI signale que des cas d’infanticides ont été rapportés dans les médias des Maldives. En cas de grossesse, les filles mineures recourent souvent à l’avortement clandestin, ou tuent leurs nouveau-nés. La délégation doit indiquer si le Gouvernement prévoit de traiter ce problème.

M. PARFITT signale qu’en dépit de la création d’une commission des droits de l’homme aux Maldives en 2003, celle-ci n’est pas encore pleinement opérationnelle et ne comporte pas de volet afférent aux droits de l’enfant. Par ailleurs, il semble qu’un enfant ne puisse porter plainte que par l’intermédiaire de son tuteur. Il demande des informations complémentaires sur ce qui est fait aux Maldives pour mettre en place un dispositif de recours indépendant et accessible pour les enfants.

Mme SMITH souligne qu’il importe de faire prendre conscience aux enfants de leurs droits à la dignité et à l’intégrité physique et psychologique. Il semble plutôt contradictoire que, bien qu’aux Maldives, les mineurs jouissent de la liberté d’association, ils ne soient pas autorisés à adhérer aux parties politiques ou aux associations d’adultes. Elle souhaite savoir pourquoi ils ne peuvent adhérer aux partis politiques. La délégation devrait expliquer ce que signifie «association d’adultes». Les Maldives devraient indiquer les mesures adoptées pour favoriser la liberté d’expression des enfants, notamment en les faisant participer à des émissions télévisées et aux autres médias.

S’agissant de la réserve à l’article 14, elle demande si l’on a envisagé de lever cette réserve dans le cadre de l’actuelle révision de la Constitution.

M. ZERMATTEN souligne que la participation des mineurs aux questions juridiques semble se limiter essentiellement aux procédures afférentes à leur garde; leur participation en matière de justice des mineurs est très restreinte. Des dispositions de procédure devraient donc être instaurées pour corriger une telle situation. Il semble qu’aucun dispositif ne garantisse la participation effective des enfants dans les écoles et beaucoup reste à faire pour qu’ils collaborent réellement à la vie publique. M. Zermatten accueillera avec intérêt des exemples spécifiques de formules de participation, tels les parlements d’enfants ou autres institutions.

M. FILALI demande si, lors de sa révision de la Constitution, l’Assemblée constitutionnelle propose des alternatives au principe selon lequel tous les Maldiviens doivent être musulmans. La manière dont les Maldives traitent les étrangers ou les non musulmans n’est pas claire. Il importe avant tout de tenir compte de l’incidence de la religion sur l’éducation des enfants.

Il demande si les Maldives ont inclus les dispositions d’instruments internationaux à leur loi nationale. La délégation devrait indiquer si des juges reçoivent une formation en matière de conventions internationales, telle la Convention relative aux droits de l’enfant.

S’agissant de la question du divorce, il note que les restrictions à la liberté des hommes de divorcer en dehors du tribunal ne représentent pas une avancée, car les tribunaux entérinent rarement la décision prise par le mari sans examiner la situation des deux époux. Il demande ce qu’il advient des enfants issus de «mariages non enregistrés» lorsque les parents sont séparés ou décédés, en particulier en raison du fait que de tels mariages ne sont pas dûment déclarés.

Bien que des recours légaux existent lorsque les droits afférents à la Convention sont violés, il n’y a aucun système d’évaluation car le système des plaintes n’est pas clair. De toute évidence le système des recours ne fonctionne pas.

Mme AIDOO demande si les dispositions de la Convention concernant l’élimination de toutes les formes de discrimination contre les femmes ont été incluses à la loi nationale. Elle demande si le Conseil de l’égalité entre les sexes fait quelque chose pour éliminer les obstacles socioculturels et religieux qui empêchent les filles de jouir de leurs droits.

Mme ORTIZ signale que dans certains pays, les médias ont un code d’éthique qui inclut l’obligation de respecter les droits des enfants et elle demande si les Maldives ont pris des mesures dans ce sens.

La séance est suspendue à 11 h 15 et reprend à 11 h 40

La PRÉSIDENTE souhaite savoir si les Maldives prévoient d’interdire les châtiments corporels à la maison et en tant que peine pour les délits. Elle sollicite davantage d’informations sur les mariages précoces.

Mme DIDI (Maldives) signale que l’âge de la majorité a été élevé à 18 ans en 2002. Dans le cadre du projet de loi d’éducation, la scolarité sera obligatoire pendant 12 ans et l’enseignement sera dispensé jusqu’à au moins 16 ans. Elle reconnaît que la grâce accordée même à une personne coupable d’abus sexuel sur enfant est inacceptable; les modifications proposées au Code pénal permettront de punir plus sévèrement que par le passé les délinquants sexuels. Les cas de délits sexuels concernant des enfants sont systématiquement transmis au Ministère de la justice.

Mme JAMEEL (Maldives) dit que, bien que les ONG n’aient pas autorité aux Maldives, elles ont été consultées dans l’élaboration des rapports périodiques, sur un pied d’égalité avec les intervenants gouvernementaux et leur rôle lors des consultations est appelé à devenir plus important. Bien que le fait de soumettre un rapport alternatif soit nouveau pour les ONG, elles ont pleinement participé au travail du Comité d’organisation créé pour coordonner la rédaction des rapports destinés au Comité des droits de l’enfant. Les ONG ont aussi joué un rôle majeur dans de nombreuses initiatives publiques liées aux enfants, telles la préparation d’une politique nationale du handicap et la mise en place d’une ligne d’assistance téléphonique pour les enfants.

S’agissant de la participation des enfants à l’élaboration de politiques, elle note que le Gouvernement a attendu les conclusions des études pour distinguer entre bonnes pratiques et formes symbolique de participation des enfants. Selon une étude de l’UNICEF, les bonnes pratiques de participation des enfants sont déjà appliquées dans les écoles aux Maldives. En outre, les enfants ont joué un rôle actif dans la création d’une ligne d’assistance téléphonique. Dans le cadre des préparatifs de la conférence nationale à venir relative à la protection de l’enfant, les enfants auront la possibilité d’exprimer leurs préoccupations.

Au cours des années récentes, le Gouvernement a porté son attention sur l’amélioration de la formation des personnes impliquées dans la réinsertion des enfants victimes d’abus sexuels, filles et garçons. Les autorités se sont efforcées de traiter chaque plainte pour abus sexuel et exploitation d’enfants et elles ont pris en compte les opinions des parents et des enfants pour traiter de ces questions. Les forces de l’ordre sont encouragées à accorder une attention particulière à l’élimination des stigmatisations relatives aux enfants victimes d’abus sexuels. Les progrès réalisés à cet égard se traduisent dans les propositions d’amendements au Code pénal.

Les entretiens entre le Ministère de l’information, des arts et de la culture et les groupes de médias se sont traduits par l’élaboration de directives conformes aux principes de l’UNICEF sur la diffusion responsable des questions ayant trait aux enfants. Une fois adoptées, ces directives seront diffusées pour être utilisées dans toutes les formations liées aux médias.

Mme ALUOCH demande si les fonctionnaires de police et le personnel du bureau du Ministre de la Justice reçoivent également une formation en matière de déclarations responsables formulées eu égard aux questions ayant trait aux enfants.

Mme SMITH demande si les filles victimes d’abus sexuels peuvent faire face à une procédure pénale.

Mme JAMEEL (Maldives) signale que les filles qui n’ont pas l’âge nubile peuvent quelquefois être poursuivies pour «inconduite sexuelle» et sont passibles d’une sanction pénale. Le Ministère de l’égalité entre les sexes et de la famille a travaillé avec les tribunaux et avec les forces de l’ordre à mettre un terme à cette pratique.

Mme SMITH demande une définition de «l’inconduite sexuelle».

M. ANIL (Maldives) dit qu’une fois adoptés, les amendements au Code pénal rendront la définition de l’inconduite sexuelle conforme aux normes internationales. En vertu du Code pénal amendé, les tribunaux ne pourront plus prendre en cause le consentement, dans les cas impliquant un mineur qui a prétendu avoir été sexuellement abusé. Le Gouvernement rédige actuellement une législation qui permettra au témoignage, notamment celui donné par des mineurs, d’être valablement présenté en justice. Les forces de l’ordre reçoivent déjà une formation spéciale sur la manière d’enquêter dans les cas de délits sexuels à l’encontre d’enfants, et pour assurer que les délinquants n’échappent pas aux poursuites. En vertu du Code pénal amendé, des peines plus sévères seront prononcées à l’encontre de ce type de délinquants, en particulier dans les cas impliquant des mineurs.

Il espère que la réserve du Gouvernement à l’article 21 de la Convention sera levée d’ici la fin 2007. Il se peut que la législation soit adoptée pour permettre aux Maldives d’adhérer à l’OIT avant la fin 2007, après quoi le Gouvernement sera en mesure de signer et de ratifier toutes les conventions afférentes.

Bien que ni la Convention relative aux droits de l’enfant, ni la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes n’aient été incorporées à la législation nationale, le Gouvernement prévoie d’adopter une législation qui corrige cette situation. Certaines dispositions de la Convention relative aux droits de l’enfant ont été incluses dans la législation relative à la protection de l’enfant. M. Anil appelle les organisations internationales à fournir une aide pratique aux Maldives pour inclure les deux conventions à leur législation.

Bien que la Commission des droits de l’homme des Maldives ait mal débuté en 2003, elle a acquis un statut indépendant, en vertu de la loi sur la Commission des droits de l’homme 2005, qui inclut la majorité des Principes de Paris et accorde aux mineurs le droit d’en appeler directement à la Commission.

Mme SHAKOOR (Maldives) signale qu’en dépit du fait que près de 740 ONG soient enregistrées auprès du Ministère de l’intérieur, moins de 10 s’occupent directement de questions liées aux enfants. Lors de l’amendement de la législation sur les associations, les sociétés civiles devaient se développer. Bien que rien n’interdise la participation des mineurs aux ONG, la situation sera plus claire à la fin de 2007, lors de l’entrée en vigueur des nouvelles réglementations.

La loi a été modifiée afin d’élever l’âge minimum de conscription dans la police et les forces armées à 18 ans.

Aucun cas d’infanticide n’a été signalé à la police en 2005, trois cas l’ont été en 2006 et trois autres en 2007. Le Ministère de l’intérieur travaille avec les autres ministères à traiter ce problème en voie d’expansion.

La Commission des libérations conditionnelles, créée en 2005 et rattachée au Ministère de l’intérieur, dispose du seul droit constitutionnel de remise de peines. Depuis 2005, une seule personne accusée de délit sexuel impliquant un mineur en a bénéficié. Aux Maldives, les détenus peuvent pratiquer leur religion. Un hindou a demandé à recevoir une nourriture particulière. Le Ministère de l’intérieur étudie la façon de satisfaire tous les impératifs religieux des détenus.

M. MOHAMED (Maldives) signale que les mineurs ne sont pas autorisés à participer aux activités politiques. Bien que la démocratie pluraliste soit un phénomène récent aux Maldives, des directives précises existent en matière de droits et de responsabilités politiques. Le Ministère de l’éducation estime que les écoles sont le meilleur endroit pour apprendre les droits de l’homme et la liberté d’expression.

Aux Maldives, les enfants non musulmans vont à l’école mais ne sont pas astreints à participer aux études et aux activités religieuses. Le Ministère de l’éducation s’est attaqué au cas par cas à la tendance de plus fréquente consistant à ne pas envoyer les filles à l’école. Suite à ses consultations avec les délégués étudiants, les conseillers, les élèves des écoles religieuses et les parents, toutes les filles concernées sont retournées à l’école. Le Ministère de l’éducation contrôle activement la participation des élèves à la gestion scolaire et il sollicite l’aide du Comité pour trouver d’autres manières d’impliquer les enfants et les parents dans la gestion scolaire.

Mme MUHAMMAD (Maldives) dit que bien que l’âge minimal du mariage ait été élevé à 18 ans, il est autorisé dès 16 et 17 ans dans des «circonstances exceptionnelles». Le Conseil national de protection des droits de l’enfant doit évaluer les circonstances en question pour que le mariage puisse être officiellement reconnu. On a compté quatre cas de ce type au cours des deux dernières années.

Les tribunaux ont reconnu tous les mariages enregistrés, que la cérémonie ait été célébrée aux Maldives ou à l’étranger. Suite au fondamentalisme islamique croissant, les cérémonies de mariage se déroulent quelquefois à la maison et les tribunaux reconnaissent l’intégralité des droits légaux des enfants nés de tels mariages.

Seul le divorce par consentement mutuel prononcé devant un tribunal est légal; les hommes qui divorcent unilatéralement de leurs épouses en dehors d’un tribunal se voient infliger une amende. Suite à la promulgation de la loi de la famille en décembre 2000, le taux de divorce a fortement diminué; toutefois, au cours des années récentes, il a à nouveau augmenté pour atteindre les niveaux antérieurs à 2000. Compte tenu de cette tendance et d’autres problèmes, le Gouvernement examine la législation relative à la famille et envisage l’adoption d’un projet de loi à la fin 2007, pour une protection accrue des droits des femmes et des enfants. Avant le mariage, des conseils sont offerts en vue de réduire le taux de divorce, tandis que des programmes de médiation existent pour résoudre les problèmes associés à la garde, à l’entretien et à d’autres droits.

Conformément aux accords internationaux, le premier projet de loi de justice des mineurs met l’accent sur la justice réparatrice et sur les peines non privatives de liberté. Avec l’aide de l’UNICEF, les juges reçoivent une formation spéciale à la Convention et à l’ensemble de la législation afférente aux enfants.

La PRÉSIDENTE demande confirmation de l’absence de mariage précoce aux Maldives.

Mme DIDI (Maldives) signale que la politique globale du Conseil national pour la protection des droits de l’enfant est de n’approuver que dans des circonstances exceptionnelles les demandes de mariage avant 18 ans. Seules quatre ont été accordées, sur les 32 demandes d’autorisation spéciale formulées depuis que l’âge minimum de mariage a été fixé. Elle regrette que les organisations n’aient pas été impliquées dans le processus d’élaboration du budget et accueillera volontiers toute suggestion dans ce sens. Depuis 2005, les crédits affectés à la protection de l’enfant ont triplé. La coordination de la mise en œuvre de la Convention est difficile en raison de la vaste étendue géographique du pays. Parallèlement, les Maldives ont réussi à élever le nombre de naissances déclarées à l’état civil (de 70 à 95 % depuis 2001), et à financer leur programme de vaccination avec leur propre budget et non avec l’aide internationale.

Les institutions publiques locales sont un nouveau concept aux Maldives et font partie intégrante du programme de réformes. Par exemple, des comités de protection de l’enfant sont établis sur chaque atoll pour veiller au respect des droits des enfants. Toutefois, beaucoup reste à faire pour assurer le développement de ces institutions.

M. SIDDIQUI (Rapporteur de pays) signale que, bien que les Maldives aient eu des institutions publiques locales bien établies dans le passé, l’État moderne a favorisé la centralisation dans ses efforts d’unification du pays. Le niveau actuel de développement des transports et des communications est tel qu’un retour à des institutions publiques locales peut être envisagé sans compromettre l’unité nationale. Des responsables locaux dûment élus peuvent militer en faveur de la mise en œuvre de la Convention et de l’attention accordée aux besoins des enfants.

Mme DIDI (Maldives) indique que les diverses interprétations de l’Islam professées aux Maldives constituent un phénomène récent et très sensible, dû au fait que de nombreux maldiviens ont voyagé dans d’autres pays musulmans et en sont revenus avec des idées qui réfutent les traditions islamiques centenaires dominantes aux Maldives. Elle accueillera favorablement les suggestions du Comité sur la manière de traiter cette question. Bien que tous les comités organisés par les conseillers volontaires locaux depuis 1991 aient inclus des fragments de la Convention, elle reconnaît l’insuffisance des efforts menés pour diffuser celle-ci.

M. SIDDIQUI (Rapporteur de pays) félicite les Maldives pour leurs efforts réussis de lutte contre la pauvreté, notamment pour les plans visant à développer un programme de réseau de sécurité sociale. Il demande quelles mesures le Gouvernement envisage d’adopter pour corriger les disparités importantes qui existent entre Malé, la capitale et les atolls d’une part, et entre les atolls du sud et ceux du nord du pays d’autre part.

Mme VUCKOVIC-SAHOVIC (Rapporteuse suppléante de pays) s’enquiert des dispositifs d’application de la loi de la famille. Elle demande si celle-ci prévoit la possibilité de garde conjointe de l’enfant en cas de divorce. En vertu de l’article 18 de la Convention, qu’ils soient mariés ou non, les parents ont la responsabilité commune de l’élevage et du développement de l’enfant. Elle demande en outre si la loi donne une définition de la famille; sinon, elle encourage le Gouvernement à envisager la formulation d’une définition large qui inclut les membres de la famille élargie, car une telle définition assurera une meilleure protection aux enfants en cas d’abus.

Mme KHATTAB s’enquiert des mesures adoptées pour protéger les enfants de toute exploitation sexuelle. Le sexe étant un sujet traditionnellement tabou aux Maldives, elle demande comment les enfants sont encouragés à signaler toute exploitation sexuelle potentielle. La délégation devrait fournir des informations sur les activités qu’elle a entreprises en vertu de l’étude du Secrétaire général relative à la violence contre les enfants. Pour mener une réforme juridique dans ce domaine, le Gouvernement pourra juger opportun de se référer aux aspects particuliers de l’étude en question.

M. PARFITT s’enquiert des services existants pour les filles qui souhaitent signaler des abus sexuels, de la mise en place d’une ligne d’assistance téléphonique et de sa connexion avec la police ou un centre de réception. Il souhaite connaître les services alternatifs disponibles pour les enfants en situation abusive, mais qui ne peuvent être admis dans l’un des deux établissements publics. Il demande si la législation stipule le placement de ces enfants dans leur famille élargie. Il s’interroge sur l’existence de dispositions qui interdisent de manière spécifique les châtiments corporels des enfants placés dans des établissements de soins alternatifs. Les réglementations qui régissent ces institutions doivent autoriser des organes indépendants à y faire des visites régulières, pour s’assurer que les enfants y reçoivent les soins et le traitement appropriés. Il souhaite savoir si un dispositif de recours a été mis en place pour enquêter sur les plaintes déposées par les enfants placés dans ces établissements, si des programmes de soins y sont prévus et s’ils sont régulièrement réexaminés par les autorités.

M. KRAPPMANN félicite les Maldives pour rendre l’éducation accessible à tous les enfants sur chaque atoll. Il est encourageant de noter que le nombre d’écoles secondaires et leur fréquentation ont augmenté. La délégation devrait expliquer le manque d’installations de loisirs disponibles pour les enfants. Il souhaite savoir à quand remonte l’adoption de la législation rendant obligatoires les enseignements primaire et secondaire.

Les études menées dans un certain nombre de pays ont montré que les coûts liés à l’enseignement constituaient un obstacle à l’égalité des chances en la matière et nuisaient à la réussite scolaire. Etant donné qu’aux Maldives l’enseignement n’est pas gratuit, la délégation devrait indiquer si les élèves et les étudiants qui ne peuvent assumer de tels frais reçoivent une aide.

Il s’enquiert de l’existence de l’enseignement professionnel dans les écoles secondaires et d’une formation adéquate dispensée en conséquence aux enseignants. Il s’interroge sur la coordination d’un tel enseignement à la demande du marché du travail et sur les mesures adoptées pour corriger la formation inadéquate des enseignants aux Maldives. Il souhaite savoir où en sont les plans de développement de l’enseignement préscolaire, compte tenu du fait que le jeu est l’un des meilleurs modes d’apprentissage des jeunes enfants. Il demande si les Maldives prévoient d’adopter une législation qui assure la participation des enfants aux décisions scolaires qui les concernent et il souhaite obtenir davantage d’informations sur les conseils d’élèves et les conseils de classes.

M. FILALI demande à la délégation d’expliquer la signification des «délits haddu». Il s’enquiert de la possibilité de modifier la législation qui considère les enfants de moins de 10 ans pénalement responsables des délits haddu. Il demande un compte rendu détaillé des plans de réforme du système de justice des mineurs.

La séance est levée à 13 heures.

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