Nations Unies

CMW/C/HND/CO/1

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr. générale

3 octobre 2016

Français

Original : espagnol

Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Observations finales concernant le rapport initial du Honduras *

Le Comité a examiné le rapport initial du Honduras (CMW/C/HND/1) à ses 327e et 328eséances (voir CMW/C/SR.327 et SR.328), tenues les 29 et 30 août 2016. À sa 339e séance, le 7 septembre 2016, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité se félicite de la présentation du rapport initial de l’État partie, élaboré en réponse à la liste de points à traiter établie avant la soumission du rapport (CMW/C/HND/QPR/1). Il se félicite également des informations supplémentaires que l’importante délégation multisectorielle dirigée par le Sous-Secrétaire d’État au travail et à la protection sociale, Ramón Fernando CarranzaDiscua, et les représentants de la Mission permanente du Honduras auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève ont fournies pendant le dialogue.

Le Comité se félicite du dialogue qui s’est instauré entre la délégation et les membres du Comité, qui lui a permis de mieux comprendre la mise en œuvre de la Convention dans l’État partie.

Le Comité reconnaît que le Honduras, en tant que pays d’origine de travailleurs migrants et de membres de leur famille, a amélioré la protection des droits de ses ressortissants à l’étranger et celle des migrants étrangers sur son territoire. Toutefois, la protection effective des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille dans les pays de transit et de destination et au moment du retour dans l’État partie continue de se heurter à des obstacles majeurs. Le Honduras connaît aussi des difficultés en tant que pays de transit et de destination.

Le Comité note que certains des pays dans lesquels les travailleurs migrants honduriens sont employés ne sont pas encore parties à la Convention, ce qui pourrait constituer un obstacle à l’exercice des droits que la Convention reconnaît à ces travailleurs.

B.Éléments positifs

Le Comité accueille avec satisfaction les efforts déployés par l’État partie pour promouvoir et protéger les droits des travailleurs migrants honduriens à l’étranger et salue l’entrée en vigueur de la loi relative à la protection des migrants honduriens et de leur famille (2013) et du règlement d’application y relatif (2015).

Le Comité salue également l’adhésion de l’État partie aux instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ci-après :

a)Convention du travail maritime, 2006, de l’Organisation internationale du Travail (OIT), en 2015 ;

b)Convention relative aux droits des personnes handicapées, en 2008, et Protocole facultatif s’y rapportant, en 2010 ;

c)Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en 2008.

Le Comité salue l’adoption des mesures législatives suivantes :

a)Plan stratégique de lutte contre l’exploitation sexuelle de personnes à des fins commerciales et contre la traite (2016-2022) ;

b)Loi sur la traite des personnes (2012) et le règlement d’application y relatif (2016) ;

c)Code de l’enfance et de l’adolescence tel que modifié en 2013 ;

d)Loi sur l’égalité des chances pour les femmes (2000).

Le Comité salue aussi les mesures institutionnelles et de politique générale ci-après :

a)Politique publique et Plan national d’action sur les droits de l’homme (2013‑2022) ;

b)Plan de l’Alliance pour la prospérité du Triangle du Nord (2016-2020) ;

c)Programme stratégique pour la prise en charge globale des enfants et adolescents migrants (2015-2019) et Plan d’action correspondant (2016-2017) ;

d)Protocole concernant la protection immédiate, le rapatriement, l’accueil et le suivi des enfants migrants ;

e)Fonds de solidarité pour les migrants honduriens (FOSMIH) (2015) ;

f)Commission interinstitutions pour la protection des personnes déplacées du fait de la violence (2013) ;

g)Politique nationale de prévention de la violence à l’égard des enfants et des jeunes (2013) ;

h)Régime spécial pour la migration légale des travailleurs honduriens employés dans le secteur agricole des États-Unis d’Amérique et d’autres pays (2010) ;

i)Politique nationale pour la protection des migrants (2008) ;

j)Protocole sur le rapatriement des enfants et des adolescents ayant été victimes de traite des personnes ou risquant de l’être (2006).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1.Mesures d’application générale (art. 73 et 84)

Législation et mise en œuvre

Le Comité prend note des initiatives prises par l’État partie en faveur de la protection et du développement complet des migrants et des membres de leur famille, et prend note avec satisfaction de la signature d’un accord avec le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) visant à promouvoir l’adoption d’une nouvelle loi relative aux migrations. Il constate néanmoins avec préoccupation que :

a)La loi relative aux migrants et aux étrangers (2003) et son règlement d’application (2004), qui ont été promulgués avant la ratification de la Convention par l’État partie en 2006, n’ont pas encore été révisés afin d’être mis en conformité avec les normes internationales relatives à la protection des travailleurs migrants et des membres de leur famille et, surtout, avec la Convention, bien que plusieurs de leurs articles soient contraires aux dispositions de la Convention ;

b)La loi de 2013 relative à la protection des migrants honduriens et des membres de leur famille a été adoptée sans que les représentants des principales organisations et institutions intéressées par la question des migrations n’aient été véritablement consultés, et qu’il n’y a pas été tenu compte des femmes et de certains groupes, dont les enfants et les adolescents, les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexuées (LGBTI), les personnes d’ascendance africaine, les autochtones et les migrants disparus et non localisés.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues pour adopter et mettre en œuvre une législation relative aux migrations pleinement conforme aux dispositions de la Convention et des autres instruments internationaux des droits de l’homme ratifiés par l’État partie. Il lui recommande aussi d’adopter les mesures voulues pour garantir la participation effective des organisations de la société civile à l’élaboration de ce cadre législatif, ainsi que celle des institutions spécialisées internationales telles que le nouveau b ureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) au Honduras, l’OIT, le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), le HCR et l’ Entité des Nations Unies pour l’égalité des sexes et l’autonomisation des femmes ( ONU-Femmes ) .

Articles 76 et 77

Le Comité note que l’État partie n’a pas encore pris de mesure pour faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention.

Le Comité engage l’État partie à faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention dans les meilleurs délais.

Politique et stratégie générales

Le Comité prend note des informations touchant les progrès réalisés dans la mise en œuvre du Plan d’action relatif aux droits de l’homme en ce qui concerne les droits des migrants en 2014 et des réformes institutionnelles prévues dans la loi relative à la protection des migrants honduriens et de leur famille, en particulier la création du Conseil national de protection des honduriens migrants et de l’équipe d’intervention conjointe chargée des enfants migrants. Néanmoins, il regrette que l’État partie n’ait pas fourni suffisamment d’informations sur les mesures concrètes qu’il a adoptées pour appliquer la Convention dans le cadre de ces initiatives. Tout en prenant note des efforts que l’État partie a déployés pour résoudre les différents problèmes liés aux migrations, le Comité note avec préoccupation qu’il n’y a pas de politique publique migratoire complète fondée sur le respect, la protection et la garantie des droits de l’homme des migrants et des membres de leur famille reconnus par la Convention et les autres instruments en vigueur dans l’État partie. En outre, il est préoccupé par l’absence d’informations sur une politique migratoire nationale complète prévoyant la mise en place de mesures globales et d’une approche fondée sur les droits pour répondre aux besoins des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui se trouvent dans l’État partie et de ceux qui sont en transit dans l’État partie, même de façon irrégulière, et aux besoins des travailleurs migrants ressortissants de l’État partie et des membres de leur famille à l’étranger. Il note aussi avec préoccupation qu’il n’y a pas d’informations détaillées sur les activités de coordination que mènent les institutions compétentes au sujet des migrations, tant au niveau national qu’au niveau des collectivités locales.

Le Comité recommande à l’État partie de donner suite à la révision et à l’approbation du projet de politique nationale de migration du Honduras, que le Congrès national examine depuis 2009. Il lui recommande également d’appliquer une approche globale et fondée sur les droits dans le cadre de la mise en œuvre intégrale des initiatives de coordination lancées par le biais du Conseil national de protection d es honduriens migrants et de l’É quipe d’intervention conjointe chargée des enfants migrants. Pour être conforme à la Convention, une telle politique doit intégrer les questions de genre de façon transversale et dans la pratique, être assortie de mécanismes d’application et être dotée des ressources suffisantes. Le Comité engage instamment l’État partie à faire figurer dans son deuxième rapport périodique des informations à jour, assorties de statistiques, sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour garantir, dans la législation et dans la pratique, l’exercice des droits énoncés dans la Convention par les travailleurs migrants. Il lui recommande de prendre les mesures voulues pour formuler et mettre en œuvre une politique migratoire tenant compte de toutes les questions relatives aux migrations internationales, comme prévu à l’article 65 de la Convention. Il l’engage aussi instamment à définir clairement les rôles des organes compétents en matière migratoire et de faire davantage d’efforts pour parvenir à une coordination efficace et effective entre ses organes, aussi bien au niveau national qu’au niveau local, en particulier dans les zones frontalières.

Coordination

Le Comité prend note des informations données par l’État partie relatives à la création d’un groupe de travail composé de membres du Secrétariat d’État au travail et à la sécurité sociale et de représentants de l’Institut national des migrations, dans le cadre de programmes visant la promotion de conditions de travail décentes pour les travailleurs migrants dans le triangle nord de l’Amérique centrale, afin de coordonner l’application de la Convention, et de donner la suite voulue aux recommandations du Comité. Il salue cette initiative ainsi que les autres actions engagées par l’État partie pour améliorer la coordination. Néanmoins, il constate avec préoccupation que les institutions publiques manquent d’efficacité et d’efficience lorsqu’il s’agit de donner effet aux droits des travailleurs migrants reconnus dans les instruments nationaux et internationaux pertinents.

Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour améliorer la coordination entre les ministères et organismes de l’administration publique à tous les niveaux, afin de parvenir à une application effective des droits protégés par la Convention, notamment en veillant à doter de ressources humaines et financières et de capacités appropriées la Direction générale de la protection des migrant s honduriens , le Conseil national de protection des migrants honduriens et les autres institutions importantes qui s’occupent de questions liées aux migrations, au travail, à la protection de l’enfance, à l’égalité des sexes et à d’autres domaines sur lesquels portent les droits reconnus dans la Convention et dans les autres instruments ratifiés par l’État partie.

Collecte de données

Le Comité prend note des efforts faits pour améliorer la collecte de données sur les flux migratoires, en particulier en ce qui concerne les travailleurs migrants honduriens à l’étranger. Néanmoins, il regrette l’absence de statistiques et de renseignements de qualité sur les travailleurs migrants d’Amérique centrale et d’autres régions, y compris d’autres continents, se trouvant dans l’État partie en situation irrégulière, et en particulier l’absence de mécanisme permettant de recueillir et d’échanger des informations sur les droits que la Convention reconnaît aux travailleurs migrants et à leur famille, notamment à ceux qui résident ou sont en transit de façon irrégulière dans l’État partie. En outre, le Comité note avec préoccupation l’absence d’informations sur les critères servant à évaluer l’efficacité de la mise en œuvre de la Convention, en particulier en ce qui concerne les migrants en transit, les migrantes, les enfants migrants non accompagnés et les travailleurs migrants frontaliers et saisonniers.

Le Comité recommande à l’État partie de créer un système qui lui permette de compiler des informations et des statistiques au sujet des migrations, tant sur le plan qualitatif que quantitatif, qui couvre nt explicitement tous les aspects de la Convention, dont celui des travailleurs migrants en situation irrégulière et des membres de leur famille, et qui permette de réunir des données ventilées sur la situation des travailleurs migrants qui résident sur son territoire ou qui y sont en transit , notamment s’ils sont en situation irrégulière. Il engage l’État partie à collecter des informations et des statistiques ventilées par sexe, par âge, par nationalité, par motif d’entrée dans le pays et de sortie du pays, et par catégorie de travail réalisé, pour pouvoir éclairer efficacement les politiques menées dans ce domaine et la mise en œuvre de la Convention, conformément à la cible 17.18 des O bjectifs de développement durable. Lorsqu’il n’est pas possible d’obtenir des informations précises, par exemple sur les travailleurs migrants en situation irrégulière, le Comité souhaite recevoir des informations fondées sur des études ou des estimations.

Surveillance indépendante

Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements qui figurent dans le rapport de l’État partie selon lesquels la Commission nationale des droits de l’homme est habilitée à ouvrir des enquêtes sur toutes les plaintes formées par des travailleurs migrants, y compris les travailleurs migrants en situation irrégulière. Néanmoins, il constate avec préoccupation :

a)Que la Commission nationale des droits de l’homme a été rétrogradée au niveau d’accréditation B au regard des Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) en2011 ;

b)Qu’il n’y a pas de ligne budgétaire correspondant au rôle constitutionnel de la Commission nationale des droits de l’homme en tant que défenseur du peuple, ce que le Comité considère incompatible avec l’efficacité du rôle qui est celui de cet organe et avec les engagements internationaux pris par l’État partie et les Principes de Paris.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter les mesures nécessaires, en faisant le cas échéant appel à l’assistance technique du HCDH, afin que  :

a) La Commission nationale des droits de l’homme retrouve son niveau d’accréditation  A au regard des Principes de Paris et puisse participer aux activités des instances des droits de l’homme et bénéficier de la coopération internationale pour assurer la surveillance de la situation en matière des droits de l’homme ainsi que le respect de ces droits  ;

b) La Commission jouisse d’une pleine indépendance fonctionnelle et financière par rapport au Gouvernement, conformément aux Principes de Paris, notamment en ce qui concerne la portée de son mandat  ;

c) Le mécanisme national de prévention soit pleinement indépendant et mandaté pour effectuer des visites impromptues dans tous les lieux où des travailleurs migrants et des membres de leur famille peuvent être privés de liberté, y compris les zones de transit des aéroports  ;

d) La Commission nationale des droits de l’homme soit compétente pour intervenir dans toutes les décisions administratives concernant les migrations, telles que la détention, la privation de liberté, les décisions relatives à la résidence et à l’expulsion , ainsi que pour recevoir des plaintes relatives aux droits des migrants honduriens à l’étranger, qu’elle puisse apporter une assistance juridique aux victimes directes ou indirectes (membres de la famille), et faire des démarches administratives et/ou judiciaires aux fins d’empêcher, de prévenir ou de réparer de tels abus en saisissant les autorités nationales ou étrangères compétentes.

Formation et diffusion de la Convention

Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie en ce qui concerne les programmes visant à promouvoir et à diffuser davantage la Convention auprès des citoyens, des fonctionnaires et du personnel des organisations non gouvernementales et des entreprises privées. Il note aussi l’action menée par le Département des migrations à des fins de travail du Secrétariat au travail et à la sécurité sociale pour promouvoir le décret-loi no 110, intitulé loi relative au permis de travail ; il note néanmoins avec préoccupation que les travailleurs migrants et les membres de leur famille n’ont guère accès aux informations sur les droits que leur reconnaît la Convention.

Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer des programmes d’éducation et de formation permanentes portant sur la Convention. C ette formation devrait s’adresse r à tous les fonctionnaires qui s’occupent des questions de migration, y compris au niveau local. Le Comité engage l’État partie à faire en sorte que les travailleurs migrants et les membres de leur famille aient accès aux information s relatives aux droits que leur reconnaît la Convention, et à collaborer avec les organisations de la société civile en vue de diffuser l’information et de promouvoir la Convention, tant sur son territoire que dans les pays de transit et de destination où se trouvent les travailleurs migrants honduriens et les membres de leur famille.

Participation de la société civile

Le Comité prend note de l’information fournie par l’État partie au sujet des consultations multisectorielles qui ont eu lieu lors de l’élaboration du rapport. Il prend également note des accords passés avec des organisations de la société civile, en particulier les accords relatifs aux enfants migrants. Néanmoins, il regrette l’absence de mécanisme garantissant que la société civile et les représentants des principales organisations et institutions concernés par la question migratoire participent à la conception et à la mise en œuvre de la politique migratoire, de la politique de protection des migrants à l’étranger et des politiques de lutte contre les causes de l’émigration. En outre, le Comité prend note de l’adoption de la loi relative à la protection des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des interlocuteurs sociaux et des agents judiciaires (2015) et de son règlement d’application (2016). Toutefois, il prend note avec une profonde préoccupation des informations reçues selon lesquelles les défenseurs des droits de l’homme au Honduras sont la cible d’actes de violence, de harcèlement et de menaces de mort. Il est préoccupé par le fait que quelques organisations de la société civile qui promeuvent les droits de l’homme dans l’État partie ont apparemment peur d’aider les travailleurs migrants sans documents parce qu’ils peuvent être accusés de trafic illicite de migrants et qu’ils ont un accès limité aux centres de détention.

Le Comité encourage l’État partie à renforcer les mécanismes qui permettent à la société civile de participer à l’élaboration des rapports destinés à cet organe et aux activités de suivi et de mise en œuvre des présentes recommandations en tenant compte des Principes directeurs relatifs à la lutte contre l’intimidation ou les représailles (Principes directeurs de San José). En outre, il recommande à l’État partie  :

a) De faciliter la tâche des organisations de la société civile qui s’occupent des travailleurs migrants, que ceux-ci soient en situation régulière ou irrégulière, lorsqu’elles ont pour objectif de fournir une aide humanitaire aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille, de protéger leurs droits et de leur fournir des prestations sociales, conformément aux dispositions de la Convention  ; et d’entretenir entre l’État partie et la société civile une communication harmonieuse, de nature à renforcer les activités de défense des droits de l’homme  ;

b) D ’associer systématiquement les organi sations de la société civile, y  compris les organisations de Honduriens de l’étranger, à la mise en œuvre de la Convention et des politiques migratoires , des politiques du travail et des autres politiques relatives à la Convention. Le Comité rappelle à l’État partie que les défenseurs des droits de l’homme méritent une protection spéciale parce que leur travail est fondamental s’agissant de promouvoir les droits de l’homme de toutes les personnes, y compris ceux des travailleurs migrants et des membres de leur famille. Par conséquent, il lui recommande vivement de veiller à ce que la loi sur la protection des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des interlocuteurs sociaux et des agents judiciaires et le règlement correspondant produisent l’effet attendu en prenant immédiatement des mesures pour permettre aux journalistes, aux défenseurs des droits de l’homme et à toutes les organisations de la société civile d’exercer leurs droits à la liberté d’expression et d’opinion ou de mener toute autre activité de promotion et de défense des droits de l’homme sans subir de menaces ni être harcelés. Le Comité engage l’État partie à veiller à ce que les plaintes concernant d es actes d’intimidation et de harcèlement de défenseurs des droits de l’homme et de représentants de la société civile donnent lieu à une enquête indépendante et à ce que les responsables de tels abus répondent de leurs actes, ainsi qu’à protéger efficacement la vie et l’intégrité physique des victimes.

2.Principes généraux (art. 7 et 83)

Non-discrimination

Le Comité prend note des mesures qui ont été prises pour prévenir la discrimination. Néanmoins, il constate avec préoccupation que la législation nationale relative aux migrations ne comporte pas de dispositions claires et précises interdisant la discrimination fondée sur le sexe et n’accorde pas de protection spéciale aux travailleuses migrantes. Il est aussi préoccupé par l’existence de clauses discriminatoires dans la loi relative aux migrations et aux étrangers, et relève que le règlement d’application de cette loi ne permettra pas l’entrée sur le territoire de l’État partie de personnes qui pratiquent la sorcellerie ou la mendicité, et qu’il comporte des restrictions à l’entrée en cas de handicap.

Le Comité recommande à l’État partie d’accroître l’action qu’il mène pour que tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille se trouvant sur son territoire ou soumis à sa juridiction puissent exercer sans discrimination aucune les droits que leur reconnaît la Convention, conformément à l’article 7  ; il lui recommande aussi de sensibiliser les autorités locales, les fonctionnaires qui travaillent dans le domaine des migrations et l’ensemble de la population aux droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille et de leur rappeler qu’il est important d’éliminer toute forme de discrimination à l’égard des travailleurs migrants et des membres de leur famille. En particulier, le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les lois relatives aux migrations et au travail, ainsi que les autres lois connexes, intègrent la problématique hommes-femmes. Il l’engage à supprimer toute disposition discriminatoire de la législation relative aux migrations et à y incorporer des dispositions interdisant expressément la discrimination fondée sur le sexe et le genre à l’égard des migrantes et des LGBTI, ainsi que la discrimination fondée sur des facteurs tels que l’origine ethnique, le handicap, la nationalité, le statut de migrant et la situation socioéconomique , entre autres .

Droit à un recours effectif

Le Comité prend note des possibilités d’accès à la justice qu’offrent la Commission nationale des droits de l’homme et les établissements universitaires proposant des services juridiques pro bono. Toutefois, il note avec préoccupation que les travailleurs migrants, quel que soit leur statut migratoire, ont un accès limité à la justice, ce qui est dû à l’absence de mécanismes adaptés et efficaces, en particulier s’agissant de la détention et de l’expulsion de migrants, et à l’ignorance des voies de recours administratives et judiciaires qui permettent de porter plainte et de demander réparation, aussi bien dans le cas des travailleurs migrants qui sont dans l’État partie que des travailleurs migrants honduriens qui se trouvent à l’étranger ou reviennent dans leur pays et aux droits desquels il a été porté atteinte dans le pays de transit ou de destination. Le Comité est aussi préoccupé par le fait que les familles de migrants qui ont disparu ou dont on ne sait ce qu’il est advenu ne peuvent pas déclencher immédiatement, depuis le Honduras, une procédure de recherche au Mexique et aux États-Unis, ni obtenir que soit ouverte une enquête approfondie sur les infractions commises à l’encontre de leurs proches dans les pays de transit, faire sanctionner les responsables ou obtenir des réparations à la mesure des droits violés.

L e Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour faciliter l’accès de tous les travailleurs migrants et d es membres de leur famille à la justice, et notamment  :

a) De concevoir et mettre en œuvre à l’intention des travailleurs migrants se trouvant dans l’État partie et des Honduriens se trouvant dans des pays de transit ou de destination, de voies de recours utiles qui comportent des mécanismes permettant aux familles des travailleurs migrants de porter plainte sur le territoire de l’État partie au sujet des violations subies par ces travailleurs dans d’autres États  ;

b) De mener des campagnes d’information sur les recours administratifs et judiciaires existants susceptibles être utilisés pour porter plainte et obtenir réparation.

3.Droits de l’homme de tous les travailleurs migrants et des membres deleur famille (art. 8 à 35)

Droit à la vie, droit à l’intégrité physique et droit à la propriété

Le Comité prend note des informations reçues, selon lesquelles tout au long de l’itinéraire qu’ils empruntent pour émigrer vers le nord, et principalement au Mexique, les travailleurs migrants honduriens et/ou les membres de leur famille sont victimes de différents types d’infractions commises par des tiers, voire par des agents des services migratoires ou d’autres fonctionnaires, ou avec leur accord, notamment des enlèvements, des extorsions, des vols, des recrutements forcés, des sévices sexuels et autres mauvais traitements. Il constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas fourni de données statistiques sur ces incidents ni mis en place de mécanismes concrets et permanents qui permettraient de répondre aux besoins des victimes, de communiquer les renseignements nécessaires aux membres de leur famille et de les informer, et de faciliter leur accès à la justice et à d’autres voies de recours.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mécanismes permettant d’offrir une protection aux travailleurs migrants honduriens et aux membres de leur famille qui sont victimes d’infractions ou d’abus de la part des autorités pendant leur migration vers le nord , et plus spécialement au Mexique. Il recommande en particulier à l’État partie de renforcer les programmes et les mesures spécifiques qui garantissent l’accès des travailleurs migrants à la justice et à d’autres formes de réparation des violations de leurs droits, y compris en facilitant leur accès aux prestations prévues par la loi générale relative aux victimes adoptée par le Mexique.

Le Comité prend note avec une vive préoccupation de l’information selon laquelle quelque 480 migrants honduriens auraient disparu ces dernières années pendant leur migration vers les États-Unis, la majorité d’entre eux au Mexique, à la suite d’actes commis par des groupes criminels organisés, avec la participation, la complicité ou l’accord des pouvoirs publics de ce pays. Il note que le Mexique a créé et met actuellement en place l’Unité d’enquête sur les infractions liées aux migrants et le Mécanisme d’appui à l’extérieur dans la recherche et l’enquête.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues pour promouvoir la mise en œuvre intégrale , par les autorités mexicaines compétent e s du Mécanisme d’appui à l’extérieur dans la recherche et l’enquête relevant de l’Unité d’enquête sur les infractions liées aux migrants, et en particulier  :

a) De mettre en œuvre des programmes visant à fournir les ressources, l’aide juridictionnelle et les informations nécessaires et de mener les activités de formation voulues pour permettre aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille d’utiliser effectivement le dit Mécanisme, et de veiller à ce que ces initiatives soient menées par les services compétents aussi bien sur le territoire mexicain (par le biais des consulats du Honduras) que sur celui de l’État partie  ;

b) De promouvoir et mettre en œuvre toutes les mesures possibles afin de retrouver en vie les migrants non localisés ou disparus  ;

c) De renforcer sensiblement l’appui fourni aux comités de familles de migrants exista nt dans différentes régions du pays , en tenant compte de l’importance de leur collaboration avec les services de l’État chargés de protéger les droits de l’homme des migrants et de leur famille sur les itinéraires migratoires  ;

d) De garantir la création d’un mécanisme servant à contacter et informer rapidement et efficacement les familles de migrants disparus, décédés et/ou assassinés, et à rapatrier et restituer les dépouilles  ;

e) D ’ enquêter avec sérieux et diligence sur les actes commis et de prononcer contre leurs auteurs des sanctions proportionnées à la gravité des faits  ;

f) De promouvoir la création d’une base de données régionale qui permette de rechercher les migrants disparus ou non localisés  ;

g) D’adopter des mesures ciblées afin de protéger intégralement les droits des enfants des travailleurs migrants disparus ou assassinés pendant la migration  ;

h) De garantir l’exercice par les familles de migrants victimes de disparition du droit de recourir à la justice dans le pays d’origine et/ou dans le pays de destination , et du droit de savoir la vérité sur ce qu’il est advenu de leur s proche s , ainsi que du droit de recevoir une réparation appropriée.

Exploitation par le travail et autres formes de mauvais traitements

Le Comité est préoccupé par les progrès limités que l’État partie a réalisés en matière de réduction du travail des enfants. Il constate en outre avec préoccupation que de nombreux travailleurs migrants honduriens, dont des enfants non accompagnés, occupent dans les pays de transit ou de destination des emplois informels, principalement dans les secteurs du café et de la pêche. Ils travaillent de longues heures dans de mauvaises conditions et sans protection juridique, et nombre d’entre eux sont en situation irrégulière.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures en vue de protéger les travailleurs migrants dans les pays de destination, en particulier en ce qui concerne le respect de leurs droits en matière de travail ainsi que la protection contre toutes les formes d’exploitation. Il lui recommande également d’adopter des mesures bilatérales et de protection consulaire afin que les enfants migrants non accompagnés ne soient pas soumis à des formes de travail dans les pays de destination, et notamment à l’exploitation, conformém ent à la cible  16.2 des O bjectifs de développement durable.

Le Comité prend note avec préoccupation des informations fournies par l’État partie selon lesquelles, chaque année, des milliers d’adultes et d’enfants migrants honduriens sontplacés dansdes centres de détention de migrants au Mexique ou aux États-Unis et ne bénéficient généralement pas des garanties fondamentales d’une procédure régulière. Le Comité est préoccupé par le peu de mesures et d’initiatives prises par l’État partie pour protéger le droit des travailleurs migrants et des membres de leur famille de ne pas être détenus arbitrairement. Il est également préoccupé par le manque de renseignements sur la détention dans l’État partiede travailleurs migrants étrangers et de membres de leur famille dans des centres de détention ou des lieux comme les aéroports.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mesures visant à protéger le droit à la liberté des travailleurs migrants honduriens et des membres de leur famille au Mexique et aux États-Unis, et en particulier  :

a) De prendre des mesures et d’instaurer des dialogues bilatéraux afin que les États par lesquels transitent les travailleurs migrants honduriens ou dans lesquels ceux-ci résident ne recourent à la détention que dans des circonstances exceptionnelles et en dernier ressort  ;

b) De renforcer, d’étendre et d’améliorer les mesures de protection consulaire des travailleurs migrants et des membres de leur famille privés de liberté, en accordant une attention particulière aux personnes détenues pour des motifs liés à la migration et de faire en sorte que les intéressés bénéficient d’une aide juridictionnelle gratuite et d’un accès à la justice et aux autres garanties d’une procédure régulière . Le Comité recommande également à l’État partie d’élaborer et de diffuser régulièrement des informations , tant d’ordre qualitatif que quantitatif, sur toute forme de privation de liberté dont les travailleurs migrants et les membres de leur famille font l’objet dans le pays. Il recommande en outre que tout placement en détention pour des motifs liés à la migration respecte pleinement la législation en vigueur, et en particulier la Convention, qu’il ait un caractère exceptionnel et soit conforme à son observation générale n o  2  (2013) sur les droits des travailleurs migrants en situation irrégulière et des membres de leur famille.

Expulsion

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour protéger ses ressortissants à l’étranger, mais il est préoccupé par le nombre important de travailleurs migrants honduriens et de membres de leur famille, y compris d’enfants non accompagnés, qui sont expulsés ou rapatriés des États-Unis ou du Mexique, sans que les garanties procédurales et autres droits prévus dans la Convention ne soient dûment respectés et qu’une attention particulière ne leur soit accordée par les autorités consulaires.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures voulues, en ce qui concerne tant les accords ou dialogues bilatéraux que la protection consulaire, pour veiller à ce que les travailleurs migrants honduriens et les membres de leur famille, quel que soit leur statut migratoire, ne soient pas expulsés ou rapatriés de manière arbitraire. Il lui recommande en particulier de déployer tous les efforts possibles afin de faire en sorte que, pour tous les travailleurs migrants honduriens et les membres de leur famille, les États de transit et de destination respectent pleinement les garanties procédurales , dont l’aide juridictionnelle gratuite et le droit à un recours utile, ainsi que les garanties substantielles, dont le droit à la vie de famille et les principes de non-expulsion et de non-refoulement.

Assistance consulaire

Le Comité prend note des progrès accomplis dans l’amélioration et le développement des services consulaires de l’État partie, ainsi que de la création de l’observatoire consulaire et migratoire au sein du Ministère des affaires étrangères et de la coopération internationale. Il relève toutefois avec préoccupation que, malgré la loi sur la protection des migrants honduriens, différentes sources indiquent qu’un pourcentage élevé de travailleurs migrants et de membres de leur famille, notamment d’enfants et d’adolescents, n’ont pas bénéficié d’une assistance consulaire et, s’ils en ont bénéficié, celle-ci était insuffisante et ne visait pas à protéger leurs droits, en particulier dans le cadre des procédures de détention et d’expulsion du Mexique et des États-Unis. Le Comité est également préoccupé par :

a)Le manque de représentants consulaires nommés sur la base de leur engagement et de leurs réalisations dans le domaine des migrations et des droits de l’homme ;

b)L’absence de mécanismes permanents de formation aux droits de l’homme destinés aux fonctionnaires consulaires ;

c)L’absence d’agents consulaires spécialisés dans les droits des migrants, et notamment les droits de l’enfant, les questions de genre, la violence sexuelle et les autres formes de violence à l’égard des femmes ;

d)Le nombre insuffisant de consulats du Honduras au Mexique et aux États‑Unis, et ce,malgrél’ouverture ces dernières années de nouveaux consulats ;

e)Le fait que les consulats ne disposent pas de ressources économiques suffisantes pour s’acquitter effectivement de leur obligation de protéger les travailleurs migrants et les membres de leur famille ;

f)L’absence de protocoles normalisés pour la collecte de données qualitatives et quantitatives par les consulats, en particulier concernant les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille au Mexique et aux États-Unis.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures qui s’imposent pour veiller à ce que ses services consulaires répondent de manière efficace aux besoins de protection des droits et d’assistance des travailleurs migrants honduriens et des membres de leur famille et, en particulier  :

a) D’élaborer une politique de protection consulaire en vue de protéger les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille à l’étranger  ;

b) D e consacrer des ressources humaines et financières suffisantes à la mise en œuvre effective des mesures de protection  ;

c) D’engager, sur la base du mérite, du personnel consulaire spécialisé dans la protection des droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille, les droits de l’enfant, les questions de genre et la violence à l’égard des femmes  ;

d) De renforcer les programmes de formation continue sur la Convention et d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme destinés aux agents consulaires et mis en œuvre par le Sous-Secrétariat aux affaires consulaires et migratoires  ;

e) De mettre au point un mécanisme normalisé de collecte de données quantitatives et qualitatives par les consulats du Honduras visant spécifiquement à rendre compte du niveau de protection ou de violation des droits des travailleurs migrants, des membres de leur famille et des enfants non accompagnés honduriens détenus dans les pays de destination ou expulsés de ces pays, ainsi que des raisons ayant poussé les personnes qui sollicitent l’assistance d es consulats à migrer.

Rémunération, conditions de travail et liberté de circulation

Le Comité prend note des contrôles effectués par l’inspection du travail du Ministère du travail et de la sécurité sociale pour faire respecter les droits du travail des travailleurs nationaux et étrangers. Le Comité note toutefois avec préoccupation qu’il n’existe aucun mécanisme chargé de surveiller les conditions de travail des travailleurs migrants, y compris les travailleurs temporaires dans l’État partie, en particulier ceux d’origine nicaraguayenne ou issus de peuples autochtones guatémaltèques, et il est préoccupé par le manque d’informations sur leurs conditions de travail et les mesures prises pour protéger leurs droits. Il est également préoccupé par le manque de renseignements sur les mesures prises pour protéger les droits des travailleurs migrants honduriens au Mexique et aux États-Unis, et en particulier ceux employés comme domestiques ou travaillant dans le secteur agricole.

Le Comité recommande à l’État partie de garantir, en droit et en pratique, les droits du travail de tous les travailleurs migrants résidant sur son territoire, en particulier des travailleurs temporaires originaires de pays voisins, conformément aux articles 25 à 27 de la Convention, et de prendre des mesures qui tiennent compte de l’origine ethnique de ces migrants. Il lui recommande également de fournir régulièrement des informations quantitatives et qualitatives sur les travailleurs migrants résidant sur son territoire. Enfin, le Comité recommande à l’État partie d’adopter les mesures voulues pour protéger les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille dans les pays de destination, notamment des mesures visant à faciliter la délivrance des documents nécessaires pour régulariser leur situation, et d’accorder une attention particulière aux droits des travailleuses migrantes employées comme domestiques, conformément à son observation générale n o  1  (2011) sur les travailleurs domestiques migrants, ainsi que des travailleurs migrants employés dans le secteur agricole.

4.Autres droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille qui sont pourvus de documents ou en situation régulière (art. 36 à 56)

Droit de transférer ses gains et ses économies

Le Comité prend note du programme novateur d’envois de fondsà des fins productives et solidairesmis en œuvre pour promouvoir le développement local par le biais de projets d’infrastructure sociale et de services collectifs, éducatifs et/ou productifs proposés par les migrants. Il constate en outre que les envois de fonds effectués par les travailleurs migrants jouent un rôle essentiel dans l’économie de l’État partie : selon les informations fournies par ce dernier, ils représentaient en 2015 plus de 18 % du produit intérieur brut. Le Comité relève toutefois avec préoccupation que le règlement fixant les modalités d’utilisation du Fonds de solidarité pour les migrants honduriensn’a pas encore été établi.

Le Comité invite l’État partie à continuer d’offrir aux familles bénéficiaires des moyens d’utiliser les envois de fonds à des fins productives et à mettre en œuvre le programme dans tout le pays. Il recommande en outre que le Fonds de solidarité pour les migrants fasse l’objet au plus vite d’une réglementation et soit pleinement utilisé .

Le Comité note avec préoccupation que la Constitution (art. 137) et le Code du travail (art. 11) font obligation à chaque entreprise d’employer 90 % de travailleurs honduriens et de verser à ceux-ci 85 % de la masse salariale de l’entreprise.

Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa législation pour que l’égalité de traitement en matière d’accès à l’emploi et de droits du travail soit garantie , conformément aux dispositions de la Convention, notamment son article  55.

5.Promotion de conditions saines, équitables, dignes et légales en ce qui concerne lesmigrations internationales des travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 64 à 71)

Coopération internationale avec les pays de transit et de destination

Le Comité note que des initiatives régionales ont été prises et que des accords bilatéraux ont été conclus avec des pays voisins ou dans le cadre de la Conférence régionale sur les migrations. Il prend note en outre des initiatives prises en matière de migration de main-d’œuvre dans le cadre du Système d’intégration de l’Amérique centrale. Il constate toutefois avec préoccupation que ces accords comportent des lacunes en ce qui concerne les droits et garanties prévus par la Convention et d’autres instruments.

Le Comité recommande à l’État partie de promouvoir aux niveaux bilatéral et régional des accords et des initiatives visant à faire en sorte que les travailleurs migrants et les membres de leur famille, quel que soit leur statut migratoire, jouissent des droits et garanties prévus par la Convention. Il lui recommande également de poursuivre, dans un esprit de dialogue et de collaboration avec les autres États d’Amérique centrale, les actions menées pour adopter un cadre commun sur la migration de main-d’œuvre dans le contexte du Système d’intégration de l’Amérique centrale, conformément aux droits énoncés dans la Convention.

Retour et réinsertion

Le Comité prend note des efforts déployés pour soutenir les travailleurs migrants honduriens qui sont retournés dans l’État partie. Il est toutefois préoccupé par le nombre important de travailleurs migrants et/ou de membres de leur famille qui, après leur retour, essaient à nouveau de migrer. Il est également préoccupé par le nombre de migrants qui sont retournés dans le pays avec un handicap après avoir entrepris leur périple migratoire. Àcet égard, le Comité prend note des programmes mis en œuvre pour faciliter la réinsertion sociale et professionnelle de ces migrants, mais il est préoccupé par le manque d’informations concernant leur incidence.

Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour modifier les programmes d’appui aux travailleurs migrants honduriens rentrés au pays, conformément aux principes consacrés par la Convention, en vue de les aider à se réinsérer durablement dans le tissu économique, social et culturel du Honduras. À cette fin, il lui recommande également de mettre en place des mécanismes spéciaux de suivi, en accordant une attention particulière aux migrants qui sont exposés à la violence. Le Comité recommande en outre à l’État partie de renforcer les mesures prises en vue d’assurer la réinsertion effective des travailleurs migrants qui rentrent handicapés, notamment grâce à l’accès à un emploi décent et stable, et de produire des informations sur l’incidence des programmes existants.

Causes des migrations et prévention des migrations irrégulières

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour s’attaquer aux causes des migrations, mais il est particulièrement préoccupé par les taux élevés de pauvreté, de chômage, d’emploi informel et d’inégalité, ainsi que par le nombre important d’homicides, les différentes formes de violence (sociale, sexiste, familiale, institutionnelle), les différends fonciers et la discrimination dont sont victimes les personnes d’ascendance africaine, les peuples autochtones et les lesbiennes, gays, bisexuels, transgenres et intersexués. Le regroupement familial, ainsi que les besoins de main-d’œuvre dans les pays de destination, en particulier dans le secteur informel, constituent aussi des causesdes migrations. Le Comité est également préoccupé par l’absence de politique globale visant à combattre ces causes, et par le peu d’attention qui leur a été accordée dans le programme régional sur les migrations.

Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer une politique globale, interinstitutionnelle et axée sur les droits pour s’attaquer aux causes structurelles des migrations, qui prévoirait notamment  :

a) Des objectifs et des indicateurs de progrès, à court et à long terme, axés sur les droits et ventilés par âge, sexe, appartenance ethnique et autres paramètres sociaux  ;

b) Des mécanismes favorisant la transparence et la responsabilisation  ;

c) La participation de la société civile et des organismes internationaux spécialisés  ;

d) Des initiatives de coopération et de coordination aux niveaux local, national et régional.

Situation des enfants et des adolescents dans le contexte des migrations internationales

Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour protéger les enfants et les adolescents dans le contexte des migrations. Il est toutefois préoccupé par :

a)La situation des droits des enfants dans l’État partie, situation qui les incite à migrer vers d’autres pays, où ils risquent d’être victimes de nombreuses infractions et de violations de leurs droits, principalement dans le cadre de la détention et de l’expulsion, ainsi que par la situation de ces enfants lorsqu’ils retournent dans l’État partie ;

b)Le manque d’informations sur les mesures prises afin que les enfants non accompagnés en transit soient convenablement protégés ;

c)L’augmentation du nombre de travailleurs migrants accompagnés de leurs enfants ainsi que d’enfants non accompagnés qui sont privés de leur liberté dans les pays de transit ou de destination et ensuite rapatriés ;

d)Le manque de mesures appropriées et globales prises par l’État partie pour protéger les droits des enfants dans le cadre de ces procédures, notamment en ce qui concerne l’aide juridictionnelle et le droit à la liberté, et pour veiller à ce qu’il soit tenu compte de l’intérêt supérieur de l’enfant dans ce contexte ;

e)Le manque de mesures efficaces permettant de garantir leur réinstallation et leur réinsertion durable ;

f)La situation, au Honduras, des enfants et des adolescents dont les parents ont émigré, en particulier en ce qui concerne leur environnement familial et scolaire ainsi que les obstacles qu’ils rencontrent pour rejoindre leurs parents par les voies régulières.

Le Comité encourage l’État partie à prendre toutes les mesures appropriées pour garantir tous les droits des différentes catégories d’enfants et d’adolescents dans le contexte des migrations, et lui recommande en particulier  :

a) De renforcer et d’approfondir sa coopération avec les pays de transit et de destination en vue d’établir des politiques et des protocoles visant à garantir le respect effectif des droits de l’enfant dans le contexte des migrations, et en particulier  :

i) De ne plus priver les enfants de liberté en raison de leur statut migratoire ou de celui de leurs parents  ;

ii) D’élaborer, en droit et en pratique , et de mettre en œuvre des mesures de substitution à la détention des familles et des enfants non accompagnés ou séparés de leurs parents, en coordination avec les organismes nationaux et/ou locaux chargés de la protection intégrale des enfants  ;

iii) Dans le cas des enfants non accompagnés, d’établir et de mettre en œuvre une procédure de détermination de l’intérêt supérieur de l’enfant en vue d’adopter des solutions à court et à long terme, telles que l’intégration dans le pays d’accueil, le rapatriement dans le pays d’origine ou la réinstallation dans un pays tiers  ;

iv) De veiller à ce qu’aucun enfant ou adolescent ne soit rapatrié sans qu’une vérification étayée et individualisée n’ait été préalablement réalisée pour confirmer que cette mesure est prise dans l’intérêt supérieur de l’enfant  ;

v) De veiller à ce que tous les enfants non accompagnés bénéficient des garanties d’une procédure régulière, comme le droit à un tuteur, à une aide juridictionnelle, et à un recours utile , ainsi que le droit d’être entendus  ;

vi) De procéder à une évaluation de l’intérêt supérieur de l’enfant dans le cadre des procédures migratoires de leurs parents et, en fonction de leur âge et de leur degré de maturité, de garantir leur participation à ces procédures  ;

b) De renforcer les mécanismes de coordination interinstitutionnelle en vue de garantir la réinsertion effective des enfants et des adolescents de retour dans le pays, en particulier en adoptant une approche fondée sur les droits, des mesures de protection immédiates et des solutions durables, notamment un accès effectif à l’éducation, à la santé, à la vie de famille, à la protection contre toutes les formes de violence et à la justice  ;

c) D’élaborer une politique globale, systématique et axée sur les droits relative à la collecte de données qualitatives et quantitatives sur toutes les catégories d’enfants et d’adolescents touchés par les migrations , destinée à constituer la base d’ une politique d’ensemble visant à protéger les droits de ces personnes  ;

d) De veiller, grâce à l’octroi d’une aide juridictionnelle et d’une protection judiciaire et administrative dans les deux pays, à ce que les mères et les pères honduriens expulsés des États-Unis puissent faire valoir devant les tribunaux de ce pays leur droit à l’unité familiale et à la garde de leurs enfants de nationalité américaine  ;

e) De favoriser l’établissement de protocoles et l’adoption de mesures de protection consulaire, y compris l’aide juridictionnelle , visant à ce que les travailleurs migrants honduriens aux États-Unis ne soient pas séparés de leurs enfants nés dans ce pays parce qu’ils sont en situation irrégulière.

Le Comité prend note de l’adoption en 2012 de la loi relative à la lutte contre la traite des êtres humains, ainsi que de l’élaboration d’un plan national de lutte contre la traite des êtres humains pour la période 2013-2015 et du plan stratégique de lutte contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et la traite des personnes au Honduras (2016-2022). Il prend note néanmoins du faible nombre de condamnations prononcées pour traite des personnes. Il est en outre préoccupé par le manque de renseignements sur l’ampleur du phénomène de la traite dans l’État partie et sur la protection effective des droits des victimes de cette infraction.

Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre les efforts accomplis pour combattre la traite des personnes, en particulier au moyen des mesures suivantes  :

a) La mise en œuvre pleine et effective de la loi relative à la lutte contre la traite des êtres humains et du plan stratégique de lutte contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales et la traite des personnes au Honduras (2016-2022)  ;

b) La formation permanente des fonctionnaires, en particulier des agents de la Police nationale civile et de l’Institut national des migrations, des juges et des membres des juridictions pénales, des agents de l’administration fiscale, des inspecteurs du travail, des professeurs, des professionnels de la santé au niveau national et des représentants et fonctionnaires des ambassades et consulats honduriens  ;

c) La collecte systématique de données ventilées en vue de mieux combattre la traite des personnes  ;

d) L’adoption de mesures pour que les responsables de la traite soient jugés et sanctionnés comme il convient, y compris lorsqu’il s’agit d’agents de la fonction publique  ;

e) L’intensification des campagnes de prévention de la traite  ;

f) La mise au point de mécanismes efficaces d’identification et de protection des victimes de la traite  ;

g) L’élaboration d’une stratégie visant à garantir le respect des droits des victimes et à éviter toute nouvelle victimisation, et la conception de projets de vie qui tiennent compte des séquelles physiques, psychologiques et sociales dont souffrent les victimes de la traite  ;

h) Le renforcement de la coopération internationale, régionale et bilatérale par le biais d’accords conclus avec les pays d’origine, de transit et de destination afin de prévenir la traite des personnes.

Le Comité prend note des campagnes d’information qui ont été réalisées pour sensibiliser les Honduriens aux risques que présentent les migrations irrégulières, de la reconduction de la ligne téléphonique gratuite (ALHO VOZ) servant à recevoir les plaintes pour violations des droits de l’homme et les demandes d’aide humanitaire des travailleurs migrants honduriens, ainsi que de la création d’un réseau consulaire de protection dans le sud du Mexique. Il est toutefois préoccupé par l’augmentation du trafic de migrants qui transitent par son territoire. Le Comité est également préoccupé par les informations indiquant que, depuis le milieu de l’année 2014, des travailleurs migrants honduriens et les membres de leur famille, y compris les enfants non accompagnés, ont été interceptés par des unités spéciales de la police et de l’armée sur le territoire de l’État partie, afin qu’ils ne quittent pas le pays.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des politiques globales pour s’attaquer au problème des migrants en situation irrégulière qui quittent l’État partie ou sont en transit , notamment des mesures bilatérales ou régionales. Il l’exhorte en outre à renforcer l’assistance fournie aux travailleurs migrants en transit, en collaboration avec les consulats des pays d’origine de ces travailleurs. En ce qui concerne l’émigration irrégulière des Honduriens et des membres de leur famille, le Comité demande instamment à l’État partie de mettre en œuvre des mesures axées sur la protection et de s’abstenir de considérer les forces militaires comme un mécanisme approprié pour faire face à des mouvements qui sont dus à une multitude de causes structurelles.

6.Suivi et diffusion

Suivi

Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les mesures prises pour donner suite aux recommandations formulées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de prendre toutes les mesures voulues pour que ces recommandations soient mises en œuvre, notamment en les soumettant aux membres du Gouvernement, du Parlement et de l’appareil judiciaire, ainsi qu’aux autorités locales, pour examen et suite à donner.

Le Comité prie l’État partie d’associer les organisations de la société civile à la mise en œuvre des recommandations figurant dans les présentes observations finales.

Rapport de suivi

Le Comité invite l’État partie à lui fournir, dans les deux ans, c’est-à-dire le 1 er octobre 2018 au plus tard, des informations écrites sur la mise en œuvre des recommanda tions formulées aux paragraphes  11, 33, 41 et 55 ci-dessus.

Diffusion

Le Comité prie en outre l’État partie de diffuser les présentes observations finales, notamment auprès des organismes publics, du pouvoir judiciaire, des organisations non gouvernementales et des autres membres de la société civile, ainsi que des universités et du grand public , et de prendre les mesures nécessaires pour les faire connaître aux travailleurs migrants honduriens à l’étranger ainsi qu’aux travailleurs migrants étrangers en transit ou résidant au Honduras.

7.Assistance technique

Le Comité recommande à l’État partie de faire appel à l’assistance internationale, notamment à l’assistance technique, pour élaborer un programme complet visant à mettre en œuvre toutes les recommandations susmentionnées et la Convention dans son ensemble. Il l’engage en outre à poursuivre sa coopération avec les institutions spécialisées et les programmes du système des Nations Unies, notamment le HCDH , dans le domaine de l’assistance technique et du renforcement des capacités en matière de présentation de rapports.

8.Prochain rapport périodique

Le Comité invite l’État partie à soumettre son deuxième rapport périodique le 1 er octobre 2021 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre des présentes observations finales. L’État partie peut par ailleurs opter pour la procédure simplifiée de soumission de rapports, selon laquelle le Comité établit à l’intention de l’État partie une liste de points à traiter qui lui est communiquée avant la présentation de son rapport suivant. Les réponses de l’État partie à cette liste de points constitueront son rapport au titre de l’article 73 de la Convention.

Le Comité appelle l’attention de l’État partie sur ses directives pour l’établissement des rapports périodiques (CMW/C/2008/1) et lui rappelle que ceux-ci doivent s’y conformer et ne pas excéder 21 200 mots (résolution 68/268 de l’Assemblée générale). Dans l’éventualité où un rapport dépasserait le nombre de mots prévus, l’État partie serait invité à le réduire conformément aux directives susmentionnées. Si l’État partie n’est pas en mesure de revoir son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de celui-ci aux fins de son examen par les organes conventionnels ne saurait être garantie.

Le Comité demande à l’État partie d’assurer une large participation de tous les ministères et organismes publics à l’élaboration du prochain rapport périodique (ou des réponses à la liste de points à traiter, dans le cas de la procédure simplifiée d’établissement de rapports) et, parallèlement, de consulter largement toutes les parties intéressées, notamment la société civile, les travailleurs migrants et les organisations de défense des droits de l’homme.

Le Comité invite également l’État partie à lui soumettre un document de base commun n’excédant pas 42 400 mots, conformément aux critères énoncés dans les directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, englobant le document de base commun et les rapports pour chaque instrument, qui ont été approuvées en juin 2006 à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme (HRI/GEN.2/Rev.6).