Nations Unies

CRPD/C/EU/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

2 octobre 2015

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initialde l’Union européenne *

I.Introduction

Le Comité a examiné le rapport initial de l’Union européenne (UE) (CRPD/C/EU/1) à ses 220e et 221e séances (voir CRPD/C/SR.220 et 221), tenues respectivement les 27 et 28 août 2015, et a adopté les observations finales ci-après à sa 229e séance, le 3 septembre 2015.

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de l’UE, qui a été rédigé conformément aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports, et il remercie l’UE de ses réponses écrites (CRPD/C/EU/Q/1/Add.1) à la liste de points qu’il a élaborée.

Le Comité est satisfait du dialogue fructueux qu’il a eu avec la délégation de l’UE au cours de l’examen du rapport, ainsi que des réponses communiquées par les autorités.

II.Aspects positifs

Le Comité note avec satisfaction que l’UE est la première organisation régionale à avoir ratifié un instrument relatif aux droits de l’homme conclu sous les auspices de l’Organisation des Nations Unies, créant ainsi un précédent positif en matière de droit international public. Le Comité prend note des dispositions des articles 21 et 26 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui interdisent expressément la discrimination fondée sur le handicap et garantissent la participation des personnes handicapées à la vie sociale dans des conditions d’égalité. Il constate une évolution positive concernant la prise en compte des droits des personnes handicapées dans le financement des politiques extérieures de l’UE, l’inscription de la question du handicap dans les domaines prioritaires de la communication de l’UE sur les objectifs de développement durable pour l’après-2015, l’adoption par le Conseil de l’UE de conclusions sur la prise en compte des personnes handicapées dans la gestion des catastrophes et l’attachement de l’UE au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030.

Le Comité note que, pour la période de programmation 2014-2020, la réglementation des Fonds structurels et d’investissement européens comporte des dispositions qui tiennent compte de l’entrée en vigueur de la Convention et renforcent la promotion de l’égalité, de la non-discrimination, de l’inclusion et de l’accessibilité pour les personnes handicapées grâce aux mesures financées par les Fonds.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1er à 4)

Le Comité constate avec préoccupation que l’UE n’a pas ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

Le Comité engage l’UE à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention.

Le Comité note avec préoccupation que l’UE n’a pas soumis sa législation à un examen intersectoriel global en vue de l’aligner sur la Convention, et que, dans l’ensemble des institutions de l’UE, aucune stratégie n’est en place pour la mise en œuvre de la Convention.

Le Comité recommande à l’UE de soumettre sa législation à un examen intersectoriel global en vue de la rendre pleinement conforme aux dispositions de la Convention, et de veiller à ce que les organisations qui représentent les personnes handicapées et les institutions indépendantes des droits de l’homme participent activement à ce processus. Il lui recommande également d’adopter une stratégie pour la mise en œuvre de la Convention, et de prévoir à cet effet une allocation budgétaire, un calendrier d’exécution et un mécanisme de suivi.

Le Comité note avec préoccupation que l’évaluation à mi-parcours de la Stratégie européenne 2010-2020 en faveur des personnes handicapées, qui était attendue en 2015, n’a pas encore été effectuée, et qu’il n’existe aucun critère, ni aucune directive sur la manière dont les recommandations formulées dans les présentes observations finales seront intégrées dans la mise en œuvre de la Stratégie au cours de la deuxième moitié de son calendrier d’exécution (2016-2020).

Le Comité recommande à l’UE de procéder à l’évaluation à mi-parcours de la Stratégie européenne 2010-2020 en faveur des personnes handicapées et d’établir clairement, en concertation étroite avec les personnes handicapées et les organisations qui les représentent, des directives, comprenant des critères et des indicateurs clairs, en ce qui concerne la mise en œuvre des recommandations figurant dans les présentes observations finales.

Le Comité constate avec préoccupation que les Lignes directrices concernant l’analyse d’impact ne mentionnent qu’un seul élément relatif au respect de la Convention.

Le Comité recommande la révision et la modification des Lignes directrices concernant l’analyse d’impact de façon à y faire figurer une liste plus complète des points à examiner pour mieux évaluer le respect de la Convention.

Le Comité est préoccupé par l’absence de cadre intersectoriel général de concertation entre les différents organismes de l’UE et les personnes handicapées, y compris les femmes, les filles et les garçons handicapés, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires pour engager un dialogue structuré, en prévoyant un poste budgétaire distinct et des fonds suffisants pour coordonner les activités des institutions, organismes et organes de l’UE, mener de véritables consultations avec les personnes handicapées, y compris les femmes, les filles et les garçons handicapés, et promouvoir leur participation par l’intermédiaire des organisations qui les représentent.

Le Comité relève avec préoccupation que la déclaration de compétence exigée par l’article 44 de la Convention n’a pas été mise à jour et ne renvoie pas à une liste complète des lois applicables aux personnes handicapées ou les concernant.

Le Comité recommande à l’UE de mettre régulièrement à jour sa déclaration de compétence et sa liste d’instruments, de façon à y faire figurer les instruments adoptés récemment et ceux qui ne mentionnent peut-être pas spécifiquement les personnes handicapées mais qui les intéressent.

B.Droits spécifiques (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

Le Comité relève avec inquiétude que les directives 2000/43, 2004/113 et 2006/54 du Conseil n’interdisent pas expressément la discrimination fondée sur le handicap et ne prévoient pas les aménagements raisonnables dont les personnes handicapées ont besoin en matière de protection sociale, de soins de santé, d’adaptation ou de réadaptation, d’éducation et de prestation de biens et de services (logement, transports et assurance, par exemple).

Le Comité recommande à l’UE d’adopter sa proposition de directive horizontale sur l’égalité de traitement, qui élargit la protection contre la discrimination aux personnes handicapées, notamment en prévoyant des aménagements raisonnables dans tous les domaines de compétence. Le Comité lui recommande également de veiller à l’interdiction de la discrimination sous tous ses aspects fondée sur le handicap, y compris la discrimination multiple et croisée.

Femmes handicapées (art. 6)

Le Comité constate avec préoccupation que l’UE n’a pas intégré la problématique du handicap dans tous ses programmes, politiques et stratégies de promotion de l’égalité de genre, ni pris en compte la question de l’égalité des genres dans ses stratégies relatives au handicap.

Le Comité recommande à l’UE d’intégrer les questions relatives aux droits des femmes et des filles handicapées dans ses futures stratégies, politiques et programmes de promotion de l’égalité de genre, et une perspective de genre dans ses stratégies relatives au handicap. Il lui recommande également de mettre au point des mesures d’action positive en vue de promouvoir les droits des femmes et des filles handicapées, de mettre en place un mécanisme pour suivre les progrès accomplis et de financer la collecte de données et les recherches concernant cette catégorie de personnes. Le Comité lui recommande en outre d’adhérer à la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique pour progresser dans la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles handicapées.

Enfants handicapés (art. 7)

Le Comité relève avec préoccupation, dans l’ensemble de l’UE, le nombre de garçons et de filles handicapés placés en institution qui n’ont pas accès à un enseignement ordinaire, inclusif et de qualité. Il s’inquiète des effets négatifs des mesures d’austérité sur la disponibilité, à l’échelle des collectivités locales, de services d’appui aux familles ayant à leur charge des enfants handicapés, et constate avec préoccupation que les enfants ne sont pas pris en compte dans les stratégies relatives au handicap et que le Programme de l’Union européenne en matière de droits de l’enfant est arrivé à échéance.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires, notamment par le biais des Fonds structurels et d’investissement européens et d’autres fonds similaires de l’UE, pour mettre en place des services d’appui aux garçons et aux filles handicapés et à leur famille au sein des communautés locales, encourager la désinstitutionalisation, prévenir le placement en institution et promouvoir l’inclusion sociale et l’accès à une éducation ordinaire, inclusive et de qualité pour les garçons et les filles handicapés. Le Comité recommande en outre l’intégration dans le nouveau Programme en matière de droits de l’enfant d’une stratégie globale fondée sur les droits de l’homme en faveur des garçons et des filles handicapés, ainsi que de garanties destinées à protéger leurs droits. Il recommande aussi l’intégration et la prise en compte des droits des garçons et des filles handicapés dans toutes les stratégies relatives au handicap.

Le Comité est préoccupé par l’absence de sensibilisation aux droits des garçons et des filles handicapés et par le fait que ces derniers ne participent pas systématiquement aux décisions ayant une incidence sur leur vie et n’ont pas la possibilité d’exprimer leur opinion sur des questions qui les concernent directement.

Le Comité recommande à l’UE de veiller à ce que les garçons et les filles handicapés et les organisations qui les représentent soient consultés sur toutes les questions qui les concernent, et de faire en sorte qu’une assistance appropriée, adaptée au handicap et à l’âge des intéressés, leur soit apportée.

Sensibilisation (art. 8)

Le Comité constate avec inquiétude que les stratégies de sensibilisation aux droits des personnes handicapées sont menées par intermittence, n’englobent pas toutes les institutions et l’ensemble de leur personnel et excluent certains groupes de personnes handicapées. Il relève également avec préoccupation que les outils de formation et de renforcement des capacités, ainsi que les campagnes et déclarations publiques et autres documents publiés par les institutions de l’UE ne sont pas disponibles dans des formats accessibles.

Le Comité recommande à l’UE de mettre au point une campagne globale de sensibilisation à la Convention relative aux droits des personnes handicapées et de lutter contre les préjugés à l’égard de ces personnes, notamment des femmes et des filles, et en particulier des personnes présentant un handicap psychosocial ou intellectuel et des personnes âgées. Il lui recommande également de veiller à ce que tout support utilisé, notamment, à des fins de renforcement des capacités, de formation, de sensibilisation et pour les déclarations publiques soit disponible dans des formats accessibles.

Accessibilité (art. 9)

Le Comité note avec préoccupation que l’Acte législatif européen sur l’accessibilité n’a pas encore été adopté par l’UE et que les politiques, lois, règlements et programmes européens existants n’ont pas été suffisamment évalués du point de vue de l’accessibilité pour les personnes handicapées.

Le Comité recommande à l’UE de prendre, conformément à l’observation générale n o  2 (2014) du Comité, sur l’accessibilité, des mesures efficaces en vue d’adopter rapidement une loi européenne modifiée sur l’accessibilité qui soit alignée sur la Convention, et de mettre en place des mécanismes d’application et de plaintes efficaces et accessibles. Le Comité lui recommande aussi de garantir la participation des personnes handicapées au processus d’adoption, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

Le Comité relève avec inquiétude que le numéro 112 (numéro d’appel d’urgence en Europe) n’est pas accessible partout dans l’UE à toutes les personnes atteintes d’un handicap quel qu’il soit, et que les politiques de protection civile des États membres de l’UE ne sont pas conformes aux nouvelles conclusions du Conseil concernant la prise en compte du handicap dans la gestion des catastrophes.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que le numéro 112 soit pleinement accessible partout dans l’UE, à toutes les personnes, quel que soit leur handicap, et que tous les volets des politiques et programmes de réduction des risques de catastrophe tiennent compte des personnes handicapées et leur soient accessibles.

Le Comité est préoccupé par le fait que les personnes handicapées ne sont pas prises en compte dans toutes les politiques et directives de l’UE relatives à l’aide humanitaire. Il note également avec préoccupation l’absence de mécanismes pour l’échange des connaissances et des bonnes pratiques conformes à la Convention entre les différentes institutions et les États membres de l’UE.

Le Comité recommande à l’UE  : a) d’adopter un plan de mise en œuvre, qui soit conforme aux conclusions du Conseil concernant la prise en compte du handicap dans la gestion des catastrophes (février 2015) et au Cadre de Sendai pour la réduction des risques de catastrophe 2015-2030  ; b) de mettre en place un mécanisme pour le renforcement des capacités et l’échange des bonnes pratiques sur l’aide humanitaire accessible aux personnes handicapées et tenant compte de leurs besoins, entre les différentes institutions et les États membres de l’UE  ; c) de mettre en place un cadre de suivi et de responsabilisation concernant la mise en œuvre des politiques et programmes de l’UE, y compris en ce qui concerne la collecte de données ventilées par sexe, handicap et âge.

Le Comité relève avec une vive préoccupation la situation précaire des personnes handicapées dans la crise des migrants que connaît actuellement l’UE. Il s’inquiète également de ce que des réfugiés, des migrants et des demandeurs d’asile handicapés continuent d’être détenus au sein de l’UE, dans des conditions où ils ne bénéficient pas d’un soutien approprié, ni des aménagements raisonnables nécessaires. Le fait que la prise de décisions relatives à la migration n’est pas accessible à toutes les personnes handicapées et que les informations et communications à ce sujet ne sont pas disponibles dans des formats accessibles est également préoccupant.

Le Comité recommande à l’UE de tenir compte du handicap dans ses politiques relatives à la migration et aux réfugiés. Il lui recommande également d’adresser à ses organismes et à ses États membres des directives indiquant que la détention de migrants et de demandeurs d’asile handicapés dans des conditions contraignantes est contraire à la Convention.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

Le Comité note avec une profonde préoccupation que, dans l’ensemble de l’UE, la capacité juridique d’un grand nombre de personnes handicapées est restreinte.

Le Comité recommande à l’UE de prendre des mesures appropriées pour garantir que toutes les personnes handicapées privées de leur capacité juridique p euvent exercer tous les droits consacrés par les traités et les lois de l’UE, notamment en matière d’accès à la justice, aux biens et aux services, y compris les services bancaires, l’emploi et les soins de santé, ainsi que leur droit de voter et leurs droits en tant que consommateurs, conformément à la Convention, comme prescrit dans l’observation générale n o  1 (2014) du Comité sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité. Le Comité recommande en outre à l’UE de redoubler d’efforts afin de promouvoir la recherche, la collecte de données et l’échange de bonnes pratiques concernant la prise de décisions assistée, en concertation avec les organisations qui représentent les personnes handicapées.

Accès à la justice (art. 13)

Le Comité est préoccupé par la discrimination à laquelle se heurtent les personnes handicapées en matière d’accès à la justice, du fait de l’absence d’aménagements procéduraux au sein des États membres de l’UE.

Le Comité recommande à l’UE de prendre des mesures appropriées pour lutter contre la discrimination que subissent les personnes handicapées dans l’accès à la justice, en garantissant pleinement, dans ses États membres, les aménagements procéduraux et les fonds nécessaires pour dispenser au personnel de l’appareil judiciaire une formation concernant la Convention.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

Le Comité est préoccupé par la détention de personnes handicapées contre leur gré dans des hôpitaux psychiatriques ou d’autres institutions pour cause de déficience, réelle ou perçue.

Le Comité recommande à l’UE de prendre toutes les mesures possibles pour garantir la liberté et la sécurité de toutes les personnes handicapées, quel que soit leur handicap, conformément à la Convention et aux directives du Comité sur l’article 14 de la Convention (2015).

Droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels,inhumains ou dégradants (art. 15) 

Le Comité constate avec préoccupation que les recherches financées par l’UE ne sont pas assorties de directives déontologiques garantissant aux personnes handicapées concernées par ces recherches le droit de donner leur consentement en connaissance de cause.

Le Comité recommande à l’UE de revoir ses directives déontologiques applicables à la recherche, d’établir, notamment, des exemples de bonnes pratiques en mettant au point des formul e s de consentement accessibles et faciles à lire, et d’empêcher la prise de décision substitutive dans ce domaine.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

Le Comité constate avec préoccupation que des personnes handicapées, en particulier des femmes, des filles, des garçons et des personnes âgées, sont exposées à la violence, aux sévices et à l’exploitation, notamment dans les institutions.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires pour intégrer la problématique du handicap dans toutes les lois, politiques et stratégies de lutte contre la violence, les sévices et l’exploitation, et d’assurer une protection efficace contre ces violations à toutes les personnes handicapées, quel que soit leur handicap, aussi bien à l’intérieur qu’à l’extérieur de leur foyer.

Protection de l’intégrité de la personne (art. 17)

Le Comité note avec préoccupation que les personnes handicapées sont exposées à des traitements forcés, notamment la stérilisation et l’avortement forcés, au sein des États membres de l’UE.

Le Comité recommande à l’UE de prendre toutes les mesures possibles afin de garantir le respect du droit de chaque individu de ne pas être soumis à un traitement sans son consentement libre, préalable et éclairé et de veiller à ce que ses États membres soient dotés de mécanismes favorisant la prise de décisions assistée.

Droit de circuler librement (art. 18)

Le Comité est préoccupé par les obstacles auxquels se heurtent les personnes handicapées et les personnes dont un proche est handicapé, lorsqu’elles se rendent dans un autre pays de l’UE pour y vivre ou y travailler, quelle que soit la durée de leur séjour.

Le Comité recommande à l’UE de prendre des mesures immédiates, dans le cadre d’une action coordonnée dans l’ensemble de ses États membres, pour veiller à ce que toutes les personnes handicapées et leur famille puissent exercer leur droit de circuler librement dans des conditions d’égalité avec les autres personnes, tout en bénéficiant notamment de la transférabilité des prestations de sécurité sociale.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

Le Comité s’inquiète du fait que dans toute l’UE, des personnes handicapées, en particulier celles qui présentent un handicap intellectuel ou psychosocial, continuent de vivre dans des institutions plutôt qu’au sein de leur communauté locale. Il fait observer que, malgré les changements opérés sur le plan réglementaire, les Fonds structurels et d’investissement européens sont encore utilisés dans différents pays de l’UE pour continuer d’assurer le fonctionnement des établissements d’accueil, plutôt que pour mettre en place des services d’appui aux personnes handicapées au sein des communautés locales.

Le Comité recommande à l’UE de mettre au point une approche destinée à guider et encourager la désinstitutionnalisation et à renforcer le contrôle de l’utilisation des Fonds structurels et d’investissement européens de façon qu’ils ne puissent servir qu’à créer des services d’appui aux personnes handicapées dans leur communauté locale et non à rénover ou élargir les établissements d’accueil. Il lui recommande également de suspendre ou de retirer les paiements ou encore d’exiger le remboursement des sommes versées, si l’obligation de garantir les droits fondamentaux n’est pas respectée.

Mobilité personnelle (art. 20)

Le Comité est préoccupé par le fait que les pratiques des organismes nationaux chargés de faire respecter les droits des passagers handicapés varient d’un État membre à l’autre, ce qui peut entraîner des inégalités de traitement et des restrictions à l’exercice des droits des passagers handicapés.

Le Comité recommande à l’UE de renforcer le suivi de la mise en œuvre de la législation relative aux droits des passagers et d’harmoniser les activités des organismes nationaux de façon à garantir effectivement et dans des conditions d’égalité l’exercice des droits de tous les passagers handicapés dans l’ensemble de l’UE, notamment par la mise en œuvre de la Carte européenne de mobilité. Il lui recommande en outre d’aligner sa législation existante en matière de droits des passagers sur les règlements relatifs aux droits des passagers voyageant par mer.

Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21)

Le Comité note avec préoccupation que, dans l’ensemble des États membres de l’UE, les personnes handicapées n’ont pas toujours accès à l’information et à la communication dans des formats accessibles et au moyen de technologies adaptées aux différentes formes de handicap, notamment la langue des signes, le braille, la communication améliorée et alternative et d’autres moyens, modes et formes accessibles de communication de leur choix, y compris sous une forme facile à lire.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires pour faire respecter sa législation relative à l’accès à l’information et à la communication, le but étant de favoriser l’usage de langues, formes et technologies accessibles et adaptées aux différentes formes de handicap, notamment la langue des signes, le braille, la communication améliorée et alternative et d’autres moyens, modes et formes de communication de leur choix, y compris sous une forme facile à lire pour toutes les personnes, quel que soit leur handicap, et de promouvoir la reconnaissance officielle de la langue des signes et du braille.

Respect du domicile et de la famille (art. 23)

Le Comité relève avec préoccupation que les mesures d’austérité ont entraîné des coupes budgétaires, notamment, dans les services sociaux, les aides aux familles et les services communautaires, ce qui restreint le droit des personnes handicapées à une vie familiale, ainsi que le droit des enfants handicapés de vivre dans un cadre familial.

Le Comité recommande à l’UE de prendre des mesures appropriées pour faire en sorte que ses politiques et recommandations économiques et sociales favorisent l’appui aux familles ayant à leur charge des personnes handicapées et garantissent aux enfants handicapés le droit de vivre au sein de leur communauté.

Le Comité s’inquiète du retrait de la directive sur le congé maternité, attendue depuis longtemps, et de la prise en compte insuffisante de l’égalité de droits pour les femmes, les mères, les pères, les enfants et les adultes handicapés dans la politique de l’UE relative à l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée.

Le Comité recommande à l’UE de veiller à ce que les personnes handicapées et les familles ayant à leur charge des personnes handicapées soient prises en compte dans la feuille de route annoncée récemment et intitulée «  Un nouveau départ pour relever les défis de l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée rencontrés par les familles à moyens revenus  ».

Éducation (art. 24)

Le Comité constate avec préoccupation que, dans différents pays de l’UE, un grand nombre de garçons, de filles et d’adultes handicapés n’ont pas accès à un enseignement de qualité inclusif et conforme à la Convention.

Le Comité recommande à l’UE d’évaluer la situation actuelle et de prendre des mesures en vue de faciliter l’accès de tous les étudiants handicapés à une éducation de qualité, inclusive, ainsi que l’exercice de ce droit, conformément à la Convention, et d’assortir l’objectif éducatif de la stratégie Europe 2020 d’indicateurs de succès concernant expressément le handicap.

Santé (art. 25)

Le Comité note avec préoccupation que la discrimination fondée sur le handicap n’est pas expressément interdite dans le domaine des soins de santé. Il relève les obstacles auxquels se heurtent les personnes handicapées en matière d’accès aux soins de santé dans différents États membres.

Le Comité recommande à l’UE d’interdire expressément la discrimination fondée sur le handicap dans le domaine des soins de santé et de prendre des mesures en vue de garantir l’accès à des soins de santé de qualité à toutes les personnes handicapées, quel que soit leur handicap. Il lui recommande également d’évaluer les effets de la Directive 2011/24/UE du Parlement européen et du Conseil relative à l’application des droits des patients en matière de soins de santé transfrontaliers sur les problèmes d’accès auxquels les personnes handicapées sont confrontées, notamment en matière d’accessibilité de l’information, d’aménagements raisonnables et de formation des professionnels.

Travail et emploi (art. 27)

Le Comité est préoccupé par les taux de chômage élevés chez les personnes handicapées, en particulier les femmes handicapées et les personnes présentant un handicap intellectuel ou psychosocial, par rapport à d’autres groupes de population dans l’UE.

Le Comité recommande à l’UE de prendre des mesures efficaces afin d’évaluer le taux d’emploi de personnes handicapées et de l’accroître sur le marché du travail ordinaire, notamment en organisant à l’intention des États membres des programmes de formation aux aménagements raisonnables et à l’accessibilité au travail.

Niveau de vie adéquat et protection sociale (art. 28)

Le Comité note avec une vive préoccupation les effets négatifs disproportionnés et régressifs des mesures d’austérité appliquées dans l’UE sur le niveau de vie des personnes handicapées.

Le Comité recommande à l’UE de prendre d’urgence, en coopération avec ses États membres et les organisations qui représentent les personnes handicapées, des dispositions pour éviter que les mesures d’austérité n’aient d’autres effets négatifs et régressifs sur le niveau de vie des personnes handicapées, notamment en établissant un socle de protection sociale qui tienne compte des éléments essentiels du droit à un niveau de vie adéquat et à la protection sociale.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

Le Comité constate avec une vive inquiétude que, dans l’ensemble de l’UE, les personnes handicapées, notamment celles qui sont privées de leur capacité juridique ou qui vivent en institution, ne sont pas en mesure d’exercer leur droit de vote, ni de participer pleinement aux élections.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires, en coopération avec ses États membres et les organisations qui représentent les personnes handicapées, pour permettre à toutes les personnes handicapées, quel que soit leur handicap, y compris celles qui sont placées sous tutelle, d’exercer leur droit de voter et de se présenter aux élections, notamment en mettant à leur disposition des moyens de communication et des installations accessibles.

Participation à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports (art. 30)

Le Comité note avec préoccupation que l’UE n’a pas ratifié le Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées, qui permet à ces différentes catégories de personnes d’accéder aux œuvres publiées.

Le Comité encourage l’UE à prendre toutes les mesures appropriées pour ratifier et appliquer dès que possible le Traité de Marrakech.

C.Obligations particulières (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

Le Comité est préoccupé par l’absence de données cohérentes et comparables sur les personnes handicapées dans l’UE, et par l’absence d’indicateurs des droits de l’homme.

Le Comité recommande à l’UE de créer un système d’indicateurs fondé sur les droits de l’homme, en coopération avec les personnes handicapées et les organisations qui les représentent, ainsi qu’un système global de collecte de données comparables, dans lequel les données seront ventilées par sexe, âge, population rurale ou urbaine et type de handicap.

Coopération internationale (art. 32)

Le Comité relève avec préoccupation l’absence de méthode systématique et institutionnalisée pour tenir compte des droits des personnes handicapées dans tous les programmes et toutes les politiques de coopération internationale de l’UE. Il constate également l’absence de coordination et de cohérence entre les institutions de l’UE, ainsi que l’absence de coordonnateurs chargés de la question du handicap. Il est en outre préoccupé par le fait que les fonds de l’UE en faveur du développement international sont utilisés pour créer ou rénover des établissements d’internement des personnes handicapées, des établissements scolaires spéciaux séparés et des ateliers protégés, au mépris des principes et dispositions de la Convention.

Le Comité recommande à l’UE d’adopter un cadre politique harmonisé sur le développement tenant compte de la question du handicap, de mettre en place une méthode systématique pour intégrer les droits des personnes handicapées dans tous les programmes et toutes les politiques de coopération internationale de l’UE, de nommer des coordonnateurs chargés de la question du handicap au sein des institutions concernées et de jouer un rôle de premier plan dans la mise en œuvre des objectifs de développement durable tenant compte de la question du handicap. Le Comité recommande en outre à l’UE de définir et mettre en place des mécanismes chargés de la ventilation des données relatives au handicap afin de suivre le respect des droits des personnes handicapées dans les programmes de développement de l’UE. Il recommande également à l’UE de mettre fin à tout financement d’activités de développement international utilisé pour perpétuer la ségrégation des personnes handicapées, et de réaffecter ces fonds au financement de projets et d’initiatives visant à garantir le respect de la Convention.

Application et suivi au niveau national (art. 33)

Le Comité note avec préoccupation que le cadre de mise en œuvre et de suivi de l’UE concernant la Convention n’est pas pleinement conforme aux Principes de Paris et n’est pas doté de ressources suffisantes. De plus, la Commission européenne est nommée à la fois coordonnateur (art. 33.1) de la mise en œuvre de la Convention et mécanisme de suivi de son application (art. 33.2).

Le Comité recommande à l’UE de prendre des mesures en vue de dissocier le rôle que joue la Commission européenne dans la mise en œuvre de la Convention et le suivi de son application, en la déchargeant de ses fonctions au sein du cadre indépendant de suivi, de façon que le cadre soit pleinement conforme aux Principes de Paris, et de veiller à ce que le cadre soit doté des ressources nécessaires à son bon fonctionnement. Le Comité recommande également à l’UE d’envisager de créer un mécanisme de coordination interinstitutionnelle et de désigner des coordonnateurs dans chaque institution, organisme et organe de l’UE.

D.Conformité des institutions de l’UE (en tant qu’administrationspubliques) à la Convention

Égalité et non-discrimination (art. 5)

Le Comité note avec préoccupation que les employés ou représentants de l’UE qui sont handicapés ou ont un proche handicapé ne bénéficient pas tous des aménagements raisonnables dont ils ont besoin pour exercer leurs droits au travail et en matière de relations professionnelles dans des conditions d’égalité avec les autres.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires pour faire en sorte que tous les employés qui sont handicapés ou qui ont un proche handicapé bénéficient des aménagements raisonnables dont ils ont besoin pour exercer leurs droits au travail et en matière de relations professionnelles dans des conditions d’égalité avec les autres.

Accès à la justice (art. 13)

Le Comité s’inquiète du manque d’accès des personnes handicapées à la justice dans les tribunaux européens.

Le Comité recommande à l’UE de garantir pleinement l’accès à la justice et d’éliminer tous les obstacles, y compris physiques et procéduraux, ainsi que les obstacles à l’exercice de la capacité juridique, dans les tribunaux européens.

Liberté d’expression et d’opinion et accès à l’information (art. 21)

Le Comité constate avec préoccupation que les normes d’accessibilité ne sont pas pleinement respectées sur tous les sites Web des différentes institutions de l’UE. Il s’inquiète de l’absence d’informations en langue des signes ou en braille et de l’absence de communication améliorée et alternative et d’autres moyens, modes et formes de communication accessibles aux personnes handicapées, y compris sous une forme facile à lire.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires en vue de garantir la pleine application des normes en matière d’accessibilité du Web aux sites Web de toutes les institutions de l’UE, et de veiller à ce que les personnes handicapées aient accès aux informations nécessaires pour leurs démarches officielles en langue des signes, en braille et par des moyens de communication améliorée et alternative, ainsi que par d’autres moyens, modes et formes de communication accessibles, y compris sous une forme facile à lire.

Éducation (art. 24)

Le Comité note avec préoccupation que les étudiants handicapés ne bénéficient pas tous des aménagements raisonnables dont ils ont besoin pour exercer leur droit à une éducation de qualité, inclusive, dans les écoles européennes, conformément à la Convention, et que les écoles ne respectent pas la disposition de non-exclusion. Il s’inquiète en outre de ce que les écoles européennes ne sont pas pleinement accessibles aux enfants handicapés et ne garantissent pas une éducation de qualité, inclusive.

Le Comité recommande à l’UE de prendre les mesures nécessaires pour que tous les étudiants handicapés puissent bénéficier des aménagements raisonnables dont ils ont besoin pour exercer leur droit à une éducation de qualité, inclusive, dans les écoles européennes. Il lui recommande aussi de veiller à ce que les écoles européennes mettent en œuvre une politique empêchant l’exclusion d’étudiants en raison de leur handicap et garantissent à tous les étudiants handicapés une éducation de qualité, inclusive.

Santé (art. 25)

Le Comité constate avec préoccupation que les fonctionnaires de l’UE qui sont handicapés ou qui ont un proche handicapé font l’objet de discrimination dans le cadre des régimes d’assurance maladie de l’UE.

Le Comité recommande à l’UE de revoir son régime commun d’assurance maladie de façon qu’il couvre l’ensemble des besoins des personnes handicapées en matière de santé, dans le respect des dispositions de la Convention.

Travail et emploi (art. 27)

Le Comité note avec préoccupation que les institutions de l’UE ne sont pas exemplaires en ce qui concerne le recrutement de personnes handicapées.

Le Comité recommande à l’UE d’accroître le recrutement de personnes handicapées dans toutes ses institutions.

Suivi et diffusion

Le Comité demande à l’UE de soumettre, dans un délai de douze mois et conformément au paragraphe 2 de l’article 35 de la Convention, des informations écrites sur les mesures prises pour donner suite aux recommandations figurant aux paragraphes 17, 29 et 77ci-dessus, qui concernent respectivement la déclaration de compétence, la loi européenne sur l’accessibilité et le mécanisme de suivi.

Le Comité demande à l’UE de mettre en œuvre les recommandations énoncées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre les présentes observations finales, pour examen et suite à donner, à ses institutions, organes, organismes et États membres, ainsi qu’aux responsables des services compétents de la Commission européenne, aux membres des professions concernées, tels que les professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice, ainsi qu’aux médias, en utilisant pour ce faire les stratégies de communication sociale modernes.

Le Comité encourage vivement l’UE à faire participer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de ses rapports périodiques.

Le Comité prie l’UE de diffuser largement les présentes observations finales dans des formats accessibles, notamment auprès des organisations non gouvernementales et des organisations qui représentent les personnes handicapées, ainsi qu’auprès des personnes handicapées et de leurs proches, dans les langues nationales et minoritaires, notamment la langue des signes. Il lui demande aussi de les diffuser sur la page du site Web Europa consacrée aux droits de l’homme.

Prochain rapport

Le Comité demande à l’UE de soumettre son rapport valant deuxième et troisième rapports périodiques au plus tard le 23 janvier 2021, et d’y faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre des recommandations figurant dans les présentes observations finales. Le Comité invite l’UE à envisager la possibilité de soumettre le rapport susmentionné selon la procédure simplifiée. Dans le cadre de cette procédure, le Comité établit une liste de points à traiter, au moins un an avant la date à laquelle le rapport est attendu. Les réponses écrites à cette liste constitueront le rapport.