Paragraphes

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Introduction

1‑8

3

Le mécanisme national de prévention

9‑19

4

Principaux obstacles rencontrés par le mécanisme national de prévention

20‑45

5

Recommandations finales

46‑49

10

Annexes

I.Liste des hauts fonctionnaires et des autres personnes rencontrés par le SPT

11

II.Liste des lieux de détention visités conjointement par le mécanisme national de prévention et le SPT

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I.Introduction

Conformément à son mandat tel qu’il est défini dans le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après dénommé « le Protocole facultatif »), le Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après dénommé « le SPT ») a effectué une visite en République d’Arménie (ci-après dénommée « l’Arménie ») du 3 au 6 septembre 2013.

Le SPT était représenté par les membres suivants : Mme Mari Amos (chef de la délégation), M. Victor Madrigal-Borloz et M. Miguel Sarre Iguíniz.

Le SPT était assisté de deux spécialistes des droits de l’homme du Haut‑Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), ainsi que de quatre interprètes locaux.

La visite avait pour objectif d’offrir des avis et une assistance technique au mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants de l’Arménie (ci-après dénommé « le mécanisme national de prévention »), conformément à l’article 11 b) ii) et iii) du Protocole facultatif. Elle visait également à contribuer au renforcement des capacités et du mandat du mécanisme national de prévention, et à l’évaluation des besoins et des moyens nécessaires afin de renforcer la protection des personnes privées de liberté contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en Arménie. Le présent rapport contient des recommandations et des observations adressées à l’État partie à cette fin, formulées en application de l’article 11 b) iv) du Protocole facultatif.

Au cours de la visite, les membres du SPT ont rencontré des représentants du Bureau du Procureur général, du Ministère de la santé, du Comité permanent des affaires juridiques et d’État de l’Assemblée nationale, du Ministère de l’éducation et des sciences, du Ministère de la justice, du Ministère des affaires étrangères, de la Police, des Services d’enquête spéciaux, du Ministère de la défense, de la Police militaire et du Service d’État pour les migrations du Ministère de la gestion du territoire. Il s’est aussi entretenu avec des représentants de trois groupes de surveillance publics ainsi qu’avec une autre organisation de la société civile (annexe I).

Puisque l’une des principales raisons de la visite était d’offrir au mécanisme national de prévention des avis et une assistance technique, plusieurs rencontres ont eu lieu avec les membres et le personnel du mécanisme national de prévention, c’est-à-dire avec les membres du Département de prévention de la torture et des violences du Bureau du défenseur des droits de l’homme et avec ceux du Conseil d’experts de la prévention de la torture et de la violence (ci-après dénommé « le Conseil d’experts »). Le but de ces visites était de débattre de ses méthodes de travail et d’étudier les moyens de renforcer et d’accroître son efficacité, comme expliqué ci-après. Pour se rendre compte de la manière dont le mécanisme national de prévention applique ses méthodes de travail, le SPT a aussi accompagné le mécanisme national de prévention dans des visites de trois lieux de détention (annexe II). Les lieux de privation de liberté ont été choisis par les représentants du mécanisme national de prévention. Lors des visites conjointes, les membres du SPT ont joué le rôle d’observateurs tandis que les membres du mécanisme national de prévention conduisaient la visite.

Le SPT tient à exprimer sa gratitude aux autorités gouvernementales pour avoir facilité le bon déroulement de la visite, dans le respect des obligations définies dans le Protocole facultatif, et pour l’appui apporté à l’organisation des réunions nécessaires à son travail.

Toutefois, le SPT trouve regrettable et préoccupant qu’on ne lui ait pas remis toutes les lettres de pouvoir lui donnant libre accès à tous les lieux de détention en Arménie avant le commencement des visites conjointes, ce qui aurait pu l’empêcher d’y accéder, en violation de l’article 12 du Protocole facultatif. Le SPT souligne combien il lui importe de recevoir une lettre de portée générale lui donnant les pouvoirs nécessaires pour accéder à tous les lieux de détention, qui soit délivrée par les autorités du plus haut niveau, si nécessaire, pour garantir son efficacité vis-à-vis de toute autorité qui contrôle ces lieux.

II.Le mécanisme national de prévention

L’Arménie a adhéré à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants le 13 septembre 1993 et à son Protocole facultatif le 14 septembre 2006. Le 8 avril 2008, le Parlement a désigné le Bureau du Défenseur des droits de l’homme en tant que mécanisme national de prévention, via une modification de la loi de 2003 relative au Défenseur des droits de l’homme. L’article 6.1 de cette loi, adopté en 2008, prévoit que le Défenseur des droits de l’homme fait office de « mécanisme national indépendant » au titre du Protocole facultatif. Les modifications apportées ne donnent pas d’autres précisions quant au fonctionnement de cette institution en tant que mécanisme national de prévention.

Les fonctions et pouvoirs dévolus au mécanisme national de prévention découlent donc du Protocole facultatif, en particulier de ses articles 19 et 20, et sont détaillés plus avant dans le règlement intérieur de cet organisme.

Entre 2009 et 2011, les fonctions confiées au mécanisme national de prévention ont été assumées par une équipe constituée de trois membres du Bureau du Défenseur des droits de l’homme et de quatre représentants d’ONG, sélectionnés par le Défenseur des droits de l’homme. La condition pour effectuer une visite dans un lieu de détention était que les délégations comprennent au moins un membre du personnel du Bureau du Défenseur des droits de l’homme et que le Défenseur des droits de l’homme soit informé à l’avance de chaque visite. Le financement a été fourni dans le cadre du projet sur trois ans mis en place par l’Instrument européen pour la démocratie et les droits de l’homme.

En 2011, le Défenseur des droits de l’homme a créé le Département de la prévention de la torture et des violences au sein de son Bureau, avec pour mission de s’acquitter du mandat du mécanisme national de prévention qui lui avait été confié. Le Département se compose de quatre professionnels (le chef du Département, un psychologue, un avocat et un médecin), qui prennent part aux visites avec le personnel du mécanisme national de prévention. En août 2013, le poste de psychologue était à pourvoir. Le mécanisme national de prévention a indiqué que les postes vacants seraient pourvus en fonction des dotations budgétaires pour 2014.

La participation d’ONG aux activités du mécanisme national de prévention a été officialisée en 2010, avec la mise en place du Conseil d’experts de la prévention de la torture et de la violence (le Conseil d’experts), sur la base d’une ordonnance du Défenseur des droits de l’homme (ordonnance N 002-L). Sur la base de l’article 26 de la loi relative au Bureau du Défenseur des droits de l’homme, le Défenseur des droits de l’homme peut constituer des Conseils d’experts composés de personnes dotées d’une expérience correspondante dans le domaine des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui interviendront sur une base volontaire et sans rémunération aucune. Les membres du Conseil d’experts appuient le Bureau du Défenseur des droits de l’homme dans son travail en tant que mécanisme national de prévention en participant aux visites et en constituant un dossier de documents sur ces visites, qui sont ensuite incorporés au rapport du mécanisme national de prévention. Le Conseil d’experts fonctionne conformément au « Règlement » confirmé par le Défenseur. Il ne peut pas publier ses propres rapports, vu qu’il a été institué par le Bureau du Défenseur des droits de l’homme et qu’il est un organe subsidiaire de cette structure.

Ainsi, le mécanisme national de prévention repose de facto sur le modèle « Ombudsman Plus » (et non de jure, puisque la participation de la société civile aux travaux du mécanisme national de prévention découle d’une ordonnance du Défenseur public). Un Mémorandum d’accord, signé en juin 2011 entre le Défenseur des droits de l’homme et sept organisations de la société civile, a permis de préciser les modalités de sa participation.

À la fin du mois de mars 2013, le Conseil d’experts se composait de 11 membres (7 représentants d’ONG, 3 experts indépendants ayant des connaissances en psychologie, sociologie et droit, et 1 expert international du Groupe consultatif de l’Union européenne). Ses membres sont nommés par le Défenseur des droits de l’homme. Toutefois, le nombre de membres est plafonné à 20, et certains postes sont vacants.

En février 2012, l’ordonnance évoquée plus haut a été modifiée pour que le Conseil d’experts puisse s’acquitter de ses fonctions en totale indépendance et en l’absence de soutien administratif du Bureau du Défenseur des droits de l’homme. Selon la procédure adoptée en février 2012, les rapports du Conseil d’experts doivent être transmis au Département de la prévention de la torture et des violences du Bureau du Défenseur des droits de l’homme pour examen et ajouts éventuels. Les rapports examinés sont ensuite renvoyés au Conseil pour adoption. Cette procédure prévoit néanmoins clairement que tout renseignement reçu par le Conseil d’experts est à la seule disposition du Défenseur des droits de l’homme.

Il a été décidé de modifier l’ordonnance en 2012 en raison du manque de financement pour absorber les dépenses des membres du Conseil d’experts. Ce Conseil a continué d’effectuer des visites en mars et en avril 2012 à titre d’appui au mécanisme national de prévention, mais a cessé toute activité en mai/juin 2012, car il ne disposait toujours pas des fonds nécessaires à ses activités.

Le SPT prend acte des efforts que fait l’État partie pour respecter ses obligations au titre du Protocole facultatif et exprime sa gratitude pour l’appui qu’il lui a fourni avant et pendant la visite, grâce à quoi il a pu s’entretenir avec les différentes parties concernées et contrôler la manière dont le mécanisme national de prévention s’acquitte de son mandat. Le SPT constate que le mécanisme national de prévention est confronté à plusieurs obstacles qui l’empêchent de s’acquitter intégralement et efficacement de ses fonctions. La partie du rapport qui suit est consacrée à ces obstacles et aux recommandations adressées à l’État partie.

Conformément à son mandat, tel qu’il est défini à l’article 11 b) ii) et iii), le SPT adressera séparément au mécanisme national de prévention de l’Arménie un rapport confidentiel.

III.Principaux obstacles rencontrés par le mécanismenational de prévention

Obstacles d’ordre institutionnel. Le SPT note que l’Arménie se distingue par une prolifération et une fragmentation des organes visant à prévenir la torture et les mauvais traitements, au nombre desquels figurent le Défenseur des droits de l’homme qui assure la fonction de mécanisme national de prévention en application de la loi révisée sur le Défenseur des droits de l’homme, le Conseil d’experts, ainsi que les organes publics de surveillance des institutions pénitentiaires, de la police et des internats spéciaux.

L’Observatoire des prisons a été constitué en vertu de l’ordonnance du Ministère de la justice no KH-66-N et ses membres sont nommés par ledit Ministère pour une durée de cinq ans. Ils ont accès aux locaux de détention avant jugement et aux lieux de détention placés sous l’autorité du Ministère de la justice. Les membres de l’Observatoire de la police, créé en 2005, ont accès aux locaux de garde à vue de la police et sont chargés de contrôler les conditions de détention. Ses méthodes de travail sont les mêmes que celles de l’Observatoire des prisons et ses membres sont nommés par le chef de la Police pour une durée de trois ans. Le troisième observatoire, chargé de la surveillance des internats spéciaux, a été créé en 2006 sur ordonnance du Ministère de l’éducation.

On constate à la lecture de ce qui précède que, bien que le mandat de ces observatoires publics soit assez classique par nature, il recoupe largement celui du mécanisme national de prévention, tant sur le fond qu’en ce qui concerne les types de lieux de détention visités. De plus, presque tous les membres du Conseil d’experts du mécanisme national de prévention sont aussi membres d’un des trois observatoires publics, ce qui risque non seulement de créer une confusion chez les responsables et le personnel des lieux de détention quant au mandat et à l’identité du mécanisme national de prévention, mais aussi de nuire à l’efficacité du travail de ce mécanisme et d’aboutir à des résultats incohérents du fait des contrôles menés en parallèle par deux instances différentes.

En outre, le SPT a constaté que l’efficacité des interactions et de la coopération entre ces instances dépend en grande partie de la volonté des divers organes, d’où le fait que les efforts pour prévenir la torture sont bien souvent sporadiques et limités à un cas précis, ne s’inscrivent pas dans une stratégie globale, ne font pas l’objet d’un suivi systématique ni d’une coopération mutuelle. Le SPT note également que plusieurs autorités ont fait savoir leur préférence pour des structures durables et efficaces plutôt que des structures fragmentées.

Le SPT estime donc qu ’ il est fondamental que l ’ État partie définisse tout d ’ abord une vision unifiée de son travail de prévention de la torture, en tenant compte des pratiques optimales, des difficultés et des données d ’ expérience des divers mécanismes établis précédemment au niveau national pour assurer la surveillance des lieux de détention, et en tenant compte des rôles respectifs et distincts de l ’ État, de la société civile et de la coopération internationale. Le but serait de déterminer comment éviter le chevauchement des mandats et les doubles emplois, et de définir, avec les intéressés au niveau national, quel serait le modèle institutionnel le plus à même de garantir l ’ efficacité d ’ une structure de prévention de la torture en République d ’ Arménie.

Fondements juridiques. Une des lacunes criantes du mécanisme national de prévention dans son fonctionnement actuel est l’absence de textes législatifs distincts qui en définiraient les fonctions, le mandat et les relations avec les organes subsidiaires, comme l’actuel Conseil d’experts, ainsi que d’autres aspects qui méritent d’être réglementés, comme cela est prévu dans la quatrième partie du Protocole facultatif.

Si la structure institutionnelle du mécanisme national de prévention est laissée à l ’ appréciation de l ’ État partie, il n ’ en reste pas moins que la loi instituant ce mécanisme doit impérativement être pleinement conforme au Protocole facultatif et aux Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention . De plus, l ’ indépendance fonctionnelle et opérationnelle du mécanisme doit être respectée, de même que les Principes de Paris. Le SPT estime qu ’ il est essentiel d ’ adopter une loi distincte relative au mécanisme national de prévention, après avoir bien défini la stratégie visée pour la prévention de la torture et déterminé le modèle approprié de mécanisme national de prévention pour la République d ’ Arménie, comme indiqué au paragraphe 24.

Le SPT souligne combien il importe que le mécanisme national de prévention soit, pour le moins, habilité à examiner régulièrement la situation des personnes privées de liberté se trouvant dans des lieux de détention, comme défini à l ’ article 4 du Protocole facultatif, à formuler des recommandations à l ’ intention des autorités compétentes et à présenter des propositions et observations au sujet de la législation en vigueur ou en projet. En outre, il importe que le financement du mécanisme national de prévention provienne d ’ un poste budgétaire distinct dans le budget de l ’ État, et que ce mécanisme jouisse d ’ une totale autonomie financière et opérationnelle.

Ressources financières. Le SPT constate que le Bureau du Défenseur des droits de l’homme et, en conséquence, le mécanisme national de prévention sont caractérisés par un manque de ressources financières. Le budget annuel pour 2013 ne prévoyait pas l’augmentation de 11 millions de drams arméniens demandés par le Défenseur des droits de l’homme pour lui permettre de s’acquitter correctement du mandat du mécanisme national de prévention. Le Défenseur des droits de l’homme a fait savoir à la presse nationale que seuls 50 % des besoins minimaux de son personnel sont financés par les fonds publics, le reste provenant de subventions étrangères, estimant que ce mode de fonctionnement nuisait fortement à son indépendance. Il a donc décidé de ne plus solliciter d’aide étrangère en 2014 et il a demandé aux organisations internationales de financer directement les ONG.

Le projet « prévention de la torture et des mauvais traitements dans les institutions fermées et semi-fermées », financé par l’ambassade britannique en Arménie, est un exemple de ce type de projet. Mis en œuvre par l’ONG « TRTU » (une des ONG membre du Conseil d’experts), avec l’appui du personnel du Département de prévention de la torture et des violences du Bureau du Défenseur des droits de l’homme et des représentants du Conseil d’experts, ce projet a pris fin le 30 mars 2013, avec à son actif 130 visites au total.

Une des conséquences de ce manque de fonds est que le Bureau du Défenseur des droits de l’homme n’a pas pu faire face aux coûts afférents aux activités des membres du Conseil d’experts. C’est ainsi qu’en février 2012 l’ordonnance établissant le Conseil d’experts a été modifiée et qu’elle prévoit désormais que le Conseil est censé exécuter ses fonctions en totale indépendance et sans appui administratif du Bureau du Défenseur des droits de l’homme. Le Conseil d’experts a continué d’effectuer des visites en mars et avril 2012 à titre d’appui au mécanisme national de prévention, mais a cessé toute activité à partir de mai/juin 2012, toujours faute de financement. À ce stade, il semblerait que tous les frais afférents aux activités de contrôle du Conseil d’experts aient été à la charge des membres eux-mêmes. Ainsi, le Conseil d’experts est actuellement entièrement tributaire des projets financés et ne peut donc pas être considéré comme jouant un rôle efficace dans le modèle « Ombudsman Plus ».

Le mécanisme national de prévention étant actuellement dans une situation financière difficile, cela a nui à sa capacité de publier des rapports périodiques et des rapports ad hoc.

Le SPT invite instamment l ’ État partie à fournir au mécanisme national de prévention, dans sa forme actuelle et ses formes futures, les ressources financières dont il a besoin pour exécuter de manière systématique et adéquate toutes les tâches qui relèvent de son mandat, conformément aux paragraphes 8, 11 et 12 des Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention, ainsi qu ’ au paragraphe 40.8 de la stratégie nationale des droits de l ’ homme pour 2012 du Conseil de sécurité arménien. L ’ État partie devrait garantir le financement du mécanisme national de prévention en prévoyant des crédits budgétaires distincts consacrés spécialement au financement du mécanisme dans le budget annuel national. Ces ressources devraient permettre au mécanisme national de prévention de réaliser les visites prévues dans toutes les régions du pays et d ’ effectuer des visites de suivi, étant donné que le fait de disposer d ’ un budget adéquat contribuerait à garantir et à renforcer son indépendance fonctionnelle et subjective. Cela devrait aussi lui permettre d ’ établir des plans annuels de visites et de s ’ assurer le soutien systématique des organes avec lesquels il coopère. Il devrait en outre disposer de suffisamment de ressources pour satisfaire ses besoins logistiques et d ’ infrastructure, notamment la publication de ses rapports et la gestion des divers outils de diffusion découlant de l ’ exécution de son mandat.

Ressources humaines. Le SPT constate que la capacité du Bureau du Défenseur des droits de l’homme d’effectuer des visites est très limitée. Le Département de prévention de la torture et des violences du Bureau du Défenseur des droits de l’homme compte trois professionnels (le chef du Département, un avocat et un médecin). En août 2013, le poste de psychologue restait à pourvoir.

Le SPT insiste sur le fait que l ’ État devrait veiller à ce que le mécanisme national de prévention puisse effectuer des visites comme il l ’ entend, tant en ce qui concerne leur fréquence que la manière dont elles sont conduites, en mettant à sa disposition les ressources nécessaires pour lui permettre de fonctionner efficacement. Outre la fourniture des ressources financières nécessaires, cette obligation s ’ étend aussi au fait de doter le mécanisme national de prévention d ’ effectifs suffisants et de garantir leur indépendance.

Le SPT note également qu’aucune règle officielle n’encadre l’obtention de la qualité de membre du Conseil d’experts du mécanisme national de prévention, la loi révisée de 2003 relative au Défenseur public et l’ordonnance de 2010 relative au Conseil d’experts de la prévention de la torture ne donnant aucune précision à ce sujet. Aucune expérience préalable de la prévention de la torture n’est exigée et aucun texte ne traite de l’incompatibilité de certains mandats ou de l’interdiction du cumul des mandats dans plusieurs mécanismes de surveillance.

Le SPT recommande à l ’ État partie de faire en sorte que le mécanisme national de prévention, sous sa forme actuelle ou future, soit doté de suffisamment de personnel pour que ses capacités soient en rapport avec le nombre de lieux de détention couverts par son mandat, et soient suffisantes pour s ’ acquitter de ses autres fonctions essentielles visées par le Protocole facultatif. Le SPT recommande aussi à l ’ État partie de s ’ assurer que ces experts aient les capacités et les connaissances professionnelles requises, notamment sur le plan médical, psychologique et autres.

Le SPT rappelle à l ’ État partie qu ’ en vertu de l ’ article 18, paragraphe 3, du Protocole facultatif, il est légalement tenu de dégager des ressources financières et humaines suffisantes et souhaite être informé, à titre prioritaire, des mesures prises pour allouer au mécanisme national de prévention les ressources financières et humaines suffisantes lui garantissant une complète autonomie financière et opérationnelle.

Coopération. Les réunions du SPT avec les instances gouvernementales compétentes ont révélé que celles-ci ne coopéraient et ne communiquaient guère avec le Défenseur des droits de l’homme dans ses fonctions de mécanisme national de prévention. Certaines instances ont fait état d’une coopération avec lui, mais plutôt, semble-t-il, au sujet de plaintes précises, et non pas dans le cadre de ses fonctions de mécanisme national de prévention. Cela montre que ce mécanisme manque clairement de visibilité, voire que son rôle exact et la nature de son travail ne sont pas bien compris. Ce défaut de visibilité peut nuire à l’efficacité du mécanisme national de prévention.

De plus, le SPT a été informé de ce que les autorités de l’État n’examinent pas activement les rapports du mécanisme national de prévention et juge préoccupant que celui‑ci estime que seules 10 % de ses recommandations générales ont été suivies par les autorités.

Le SPT souhaite insister sur les obligations découlant du Protocole facultatif et recommande de donner au mécanisme national de prévention un rôle important, qui lui confère une visibilité institutionnelle et publique. Il recommande à l ’ État partie de veiller à instaurer un dialogue significatif avec le mécanisme national de prévention pour débattre des mesures d ’ application possibles de ces recommandations, comme le préconise l ’ article 22 du Protocole facultatif. Compte tenu de ce qui précède, il conviendrait de désigner un coordonnateur dans chacun des ministères compétents pour suivre l ’ application des recommandations formulées par le mécanisme national de prévention et coopérer avec lui comme il conviendra. Le SPT recommande également à l ’ État partie de prendre des mesures pour mieux faire connaître le mandat et les travaux du mécanisme national de prévention et de faire en sorte que celui-ci soit reconnu comme une composante clef du système de prévention de la torture et des mauvais traitements du pays.

Le SPT recommande à l ’ État partie de publier et de diffuser largement les rapports annuels du mécanisme national de prévention, notamment en les transmettant au SPT, conformément à l ’ article 23 du Protocole facultatif. Le SPT invite instamment l ’ État partie à mettre en place un cadre institutionnel pour débattre de ses rapports et en suivre l ’ application. Le SPT souhaite rappeler à l ’ État partie la teneur du paragraphe 29 des Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention, qui invite les États à publier et à diffuser largement les rapports annuels du mécanisme national de prévention et à veiller à ce qu ’ ils soient soumis au Parlement pour examen.

Le SPT recommande en outre à l ’ État partie de publier un rapport annuel décrivant en quoi les interactions entre le Gouvernement et le mécanisme national de prévention ont permis d ’ examiner la situation et de mettre un terme à la torture et aux mauvais traitements dans les lieux de détention de la République d ’ Arménie. Ce rapport devrait bénéficier d ’ une large publicité, et pourrait être inclus dans une analyse plus complète de la situation des droits de l ’ homme dans l ’ État partie, mais il devrait être distinct des autres déclarations ayant trait au Bureau du Défenseur des droits de l ’ homme ou à toute autre instance.

Accès. Le SPT rappelle également que lors de ses réunions avec les autorités, certains représentants du Gouvernement ont remis en question la portée du mandat du mécanisme national de prévention s’agissant de certains lieux de privation de liberté placés sous leur autorité.

Le SPT souligne que toutes les autorités gouvernementales devraient autoriser le mécanisme national de prévention à s ’ acquitter de son mandat en pleine conformité avec les dispositions du Protocole facultatif. Cela implique que l ’ État doit autoriser le mécanisme national de prévention à se rendre dans tout lieu placé sous sa juridiction ou sous son contrôle, qu ’ il soit privé ou public, où se trouvent ou pourraient se trouver des personnes privées de liberté sur l ’ ordre d ’ une autorité publique ou à son instigation, ou avec son consentement exprès ou tacite, comme le prévoit l ’ article 4 du Protocole facultatif. Pour s ’ acquitter de cette obligation, le SPT recommande de faire figurer expressément ce principe dans les documents constituant la base législative du mécanisme national de prévention et de veiller à ce que l ’ État se concerte avec les différentes parties concernées afin de déterminer et de clarifier ce qu ’ on entend par « lieux de détention », en pleine conformité avec le Protocole facultatif.

Le Sous-Comité est prêt à aider la République d’Arménie à s’acquitter de ses obligations en vertu du Protocole facultatif, en particulier de celles visées à l’article 11 b i), pour lui offrir une assistance et des avis sur le mécanisme national de prévention.

IV.Recommandations finales

Le SPT rappelle que la prévention de la torture constitue une obligation permanente et de large portée incombant à l’État partie. Le SPT prie l’État partie de le tenir informé de toute éventuelle révision législative ou modification de politique, ou de tout autre fait nouveau pertinent concernant le mécanisme national de prévention, pour lui permettre de continuer à aider l’État partie à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu du Protocole facultatif.

Le SPT souligne que sa visite offre à l’Arménie une occasion idéale pour montrer que celle-ci tient et est prête à s’acquitter de ses obligations internationales dans le cadre du Protocole facultatif.

Le SPT considère que sa récente visite de conseil et le présent rapport marquent le début d’un dialogue constructif avec l’Arménie. Il est tout disposé à aider l’Arménie, dans la mesure de ses possibilités, à s’acquitter de ses obligations conformément au Protocole facultatif, en particulier en lui offrant une assistance technique et des avis, en vue de la réalisation de leur objectif commun de prévention de la torture et des mauvais traitements dans les lieux de privation de liberté.

Le SPT recommande à l’État partie de rendre public le présent rapport, considérant que cela est en soi une mesure de prévention. Il lui recommande en outre de faire distribuer ce rapport à tous les départements et établissements publics concernés.

Annexe I

Liste des hauts fonctionnaires et des autres personnes rencontrés par le SPT

A.Autorités nationales

Bureau du Procureur général

M. Harutyun Harutyunyan − Procureur principal

M. Gagik Khachikyan − Chef du Département des crimes contre l’humanité

M. Vardan Avetisyan − Chef du Département de la lutte contre la criminalité

Ministère de la santé

M. Tsaghik Vardanyan − Chef du Département des projets et de la gestion de la qualité des soins de santé

Ministère de l’éducation et de la science

Mme Narine Hovhannisyan − Chef du Département de l’enseignement général

Ministère de la justice

Mme Narine Solomonyan − Chef du Département des relations juridiques internationales

M. Hayk Sargsyan − Assistant du Ministre de la justice

Ministère des affaires étrangères

Mme Karine Sujyan − Chef de la Division des droits de l’homme et des questions humanitaires

Police

M. Minas Arabyan − Chef du Département des services de garde au quartier général de la police

Service des enquêtes spéciales

M. Armen Nadiryan − Chef adjoint du Service des enquêtes spéciales

Ministère de la défense

M. Alik Avetisyan − Chef adjoint de l’Unité des questions juridiques internationales

Police militaire d’Arménie

M. Hovik Petrosyan − Chef adjoint de la Police militaire d’Arménie

Service public des migrations du Ministère de l’aménagement du territoire

M. Petros Aghababyan − Chef de la Division juridique

B.Organes législatifs

Mme Lilit Yeremyan − Experte de la Commission permanente des affaires publiques et juridiques de l’Assemblée nationale

C.Mécanisme national de prévention

Bureau des défenseurs des droits de l’homme

M. Karen Andreasyan − Défenseur des droits de l’homme

Mme Ani Nersisyan − Chef de la Division de la prévention de la torture et des violences

M. Vladimir Baghdasaryan − Division de la prévention de la torture et des violences

M. Sevak Mkrtchyan − Division de la prévention de la torture et des violences

M. Ruben Martirosyan − Chef du Département des droits en matière de procédure pénale

Mme Anna Voskanyan − Conseillère du Médiateur pour les relations extérieures

Mme Erahuni Tumanyants − Experte des droits des prisonniers et des soldats

Conseil d’experts de la prévention de la torture et de la violence

M. Artak Kirakosyan (Institut de la société civile)

Gayane Shahnazaryan (Institut de la société civile)

M. Michael Aramyan (Fondation contre la violation du droit)

M. Varuzhan Sedrakyan (Association des enfants d’Arménie)

Mme Mariam Martirosyan (Projet Harmony International)

Mme Alina Derdzyan (Collaboratrice du Centre pour la démocratie)

M. Temik Khalapyan (TRTU)

Mme Sirarpi Mughdusyan (Justice sociale)

Mme Laura Gasparyan (Association arménienne des médecins Grigor Magistros)

M. Artur Atanesyan (Chef du Département de sociologie appliquée de l’Université d’État d’Erevan)

D.Groupes de surveillance publics

Groupe de surveillance des prisons

M. Robert Revazyan (Comité Helsinki arménien)

M. Ruben Sargsyan

Groupe de surveillance de la police

Mme Hasmik Sahakyan

M. Suren Iskandaryan

Groupe public de surveillance des internats spéciaux

M. Artak Kirakosyan (Institut de la société civile)

M. Varuzhan Sedrakyan (Association des enfants d’Arménie)

Mme Mariam Martirosyan (Project Harmony International)

Mme Sirsard Mamikosyan

E.Divers

Fondation pour une société ouverte

Annexe II

Liste des lieux de détention visités conjointement par le mécanisme national de prévention et le SPT

Hôpital psychiatrique de Nubarashen;

Établissement pénitentiaire de Nubarashen;

Centre de détention d’Erevan.