NATIONS UNIES

CAT

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr.GÉNÉRALE

CAT/C/ESP/Q/524 juillet 2009

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ CONTRE LA TORTUREQuarante‑troisième sessionGenève, 2‑20 novembre 2009

Liste des points à traiter à l ’ occasion de l ’ examen du cinquième rapport périodique de l ’ ESPAGNE (CAT/C/ESP/5)

Article 2

1.Donner des précisions sur les mesures qui peuvent avoir été prises afin d’améliorer le système des garanties de prévention des mauvais traitements en détention et en particulier indiquer si:

a)Des mesures ont été prises pour garantir un accès rapide à un avocat dès le début de la privation de liberté et pour éviter tout retard excessif en ce qui concerne l’exercice de ce droit;

b)Les détenus, y compris ceux qui sont placés au secret, ont le droit d’être examinés par un médecin de leur choix, et sans la présence d’agents de police;

c)Des systèmes d’enregistrement vidéo et audio systématique ont été mis en place dans tous les commissariats de police où des personnes sont détenues;

d)Un système de vidéo surveillance est également en place pour suivre la situation des personnes placées au secret et la façon dont elles sont traitées;

e)Les déclarations faites par les détenus placés au secret peuvent être utilisées dans le cadre des procédures judiciaires.

2.Même s’il a été réformé par la loi n° 13/2003, l’existence même du régime de la détention au secret et sa durée continuent d’être une source d’inquiétude car il pourrait favoriser les actes de torture et les mauvais traitements. Donner des précisions et indiquer si des mesures ont été prises pour suivre la situation des personnes placées en détention au secret et la façon dont elles sont traitées.

3.D’après les informations reçues par le Comité, les dispositions des articles 572 à 579 du Code pénal (crimes terroristes) sont trop vagues et ne garantissent pas intégralement le respect du principe de légalité bien établi. À ce propos, indiquer également s’il a été donné suite d’une manière ou d’une autre à la recommandation formulée récemment par le Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste «d’entreprendre un examen, par des experts indépendants, du caractère idoine des définitions actuelles» pour ce qui est des articles du Code pénal.

4.Donner des renseignements sur toutes mesures qui ont été éventuellement prises pour empêcher que les femmes ne subissent des mauvais traitements en détention. L’État partie organise‑t‑il une surveillance de la violence sexuelle dans les lieux de détention et, dans l’affirmative, avec quels résultats? Fournir des statistiques sur les plaintes pour violence sexuelle qui ont été reçues et qui ont fait l’objet d’une enquête entre 2003 et 2008, ainsi que sur les poursuites engagées et les condamnations prononcées à la suite de ces plaintes.

5.Selon plusieurs études scientifiques, opinions judiciaires et organisations de défense des droits, une détention prolongée à l’isolement a des effets psychologiques profondément perturbateurs, et des survivants de la torture considèrent souvent que l’isolement cellulaire impose un degré de souffrance psychologique aussi grave que les diverses formes de torture physique qu’ils endurent. Indiquer:

a)Si l’État partie place des individus à l’isolement;

b)Les principes appliqués par l’État partie pour déterminer qui doit être placé à l’isolement et pour quelle durée;

c)Le nombre de personnes actuellement placées à l’isolement, et si ce nombre a augmenté, diminué ou est resté stable au cours des cinq dernières années;

d)La durée moyenne de l’isolement cellulaire, et le nombre de personnes qui ont été placées sous ce régime pendant plus d’un an;

e)Les garanties qui ont été mises en place pour veiller à la santé mentale des personnes placées à l’isolement;

f)Les règles appliquées par l’État partie en ce qui concerne l’exercice physique, les visites, les examens médicaux, y compris psychologiques, les aménagements matériels, et les possibilités de détente pour les personnes placées à l’isolement.

Article 3

6.En ce qui concerne le principe du non-refoulement, préciser si:

a)L’État partie procède à un examen individuel de chaque cas pour prévenir le renvoi, l’extradition ou l’expulsion d’individus vers un pays où ils risqueraient d’être soumis à la torture; à ce sujet, indiquer quelle est la situation des personnes suivantes:

i)Basel Ghalyoun, citoyen syrien renvoyé de force en République arabe syrienne le 22 juillet 2008;

ii)M. S., citoyen algérien transféré de force du Centre de rétention des migrants de Madrid le 21 novembre 2008 et dont on ne sait ce qu’il est advenu;

b)Le principe du non-refoulement a été expressément inscrit dans le règlement d’application de la loi organique relative aux étrangers;

c)Tous les accords bilatéraux d’extradition conclus par l’Espagne comprennent une obligation expresse d’interdire l’extradition d’individus s’ils risquent d’être soumis à la torture ou à un traitement cruel, inhumain ou dégradant;

d)Après l’obtention d’assurances diplomatiques, un individu peut être extradé, renvoyé ou expulsé vers un pays où il risque d’être soumis à la torture. À ce sujet, commenter les informations reçues par le Comité selon lesquelles Murat Ajmedovich Gasaev, détenu tchétchène, a été finalement extradé après que l’Audiencia nacionala décidé en février 2007 d’autoriser son extradition vers la Fédération de Russie en se fondant sur des assurances diplomatiques. Quelles ont été les assurances données et quel a été le suivi dans ce cas?

7.Indiquer si des expulsions ou rapatriements collectifs de ressortissants étrangers sont effectués. Dans l’affirmative, préciser les modalités et les critères appliqués, notamment dans le cas de personnes sauvées en mer. Une assistance juridique est‑elle fournie à tous les étrangers, notamment aux clandestins, pour les informer de leurs droits, notamment du droit de demander l’asile et d’avoir accès à toutes les voies de recours possibles pour contester les décisions d’expulsion?

8.Pour ce qui est des mineurs non accompagnés, indiquer:

a)Quelle protection ou assistance est offerte aux mineurs non accompagnés interceptés alors qu’ils tentent d’entrer sur le territoire de l’État partie par un poste frontière;

b)S’il est procédé dans chaque cas à un examen i) des conditions après le retour et ii) de l’intérêt supérieur de l’enfant;

c)Quelle suite a été donnée au rapport du Défenseur du peuple qui confirme les allégations de mauvais traitements ainsi que l’insuffisance des infrastructures et des centres d’accueil pour les mineurs non accompagnés dans les îles Canaries.

9.Selon des informations communiquées au Comité, une commission d’enquête a été récemment créée par le Ministère des affaires étrangères et chargée de déterminer si l’État partie a été impliqué dans des transferts illégaux effectués par des vols opérés par la Central Intelligence Agency des États‑Unis (CIA) en direction ou en provenance de Guantanamo Bay entre 2002 et 2007. Informer le Comité de tout fait nouveau à ce sujet.

Article 4

10.Préciser si une prescription s’applique aux faits de torture.

11.Expliquer la raison de la différence des peines prévues pour les actes de torture par l’article 174 du Code pénal. Dans quelles circonstances l’infraction est-elle jugée grave ou non?

12.Indiquer si la législation pénale réprime également la tentative de torture et la complicité ou la participation à un acte de torture.

Articles 5 et 7

13.Au sujet du paragraphe 67 du rapport de l’État partie, présenter toute affaire dans laquelle les tribunaux espagnols ont exercé leur compétence universelle à l’égard du crime de torture.

14.À l’instar du Comité des droits de l’homme, le Comité contre la torture est préoccupé par le maintien en vigueur de la loi d’amnistie de 1977. Il note que, compte tenu de la règle depuis longtemps reconnue de jus cogens interdisant la torture, la poursuite des auteurs d’actes de torture ne devrait pas être limitée par la prescription ou le principe nullen crimen sine lege. L’État partie considère‑t‑il que la loi d’amnistie de 1977 est contraire aux obligations que lui impose l’article 5 d’établir sa compétence au fins de connaître du crime de torture, et de juger ou d’extrader les individus accusés de torture? Quelle est la politique de l’État partie en ce qui concerne la poursuite des auteurs d’actes de torture auxquels la loi d’amnistie de 1977 s’appliquerait?

Article 10

15.Donner des informations sur les activités de formation en matière de prévention de la torture et des mauvais traitements, à l’intention des agents des forces de l’ordre, notamment de ceux qui s’occupent des détenus placés au secret.

16.Indiquer s’il existe également des programmes de formation à l’intention du personnel médical qui est chargé de déceler et d’attester les cas de torture et d’aider à la réadaptation des victimes. Y a‑t‑il eu une formation spécifiquement consacrée au Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul)?

Article 11

17.Donner des renseignements à jour sur le nombre de détenus et le taux d’occupation dans tous les lieux de détention, y compris dans les structures où des migrants clandestins sont détenus. Indiquer aussi s’il a été donné suite d’une manière ou d’une autre aux recommandations relatives à la situation du système pénitentiaire formulées par le Commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe en 2005.

18.Indiquer les mesures qui ont été prises pour réduire le surpeuplement et améliorer les conditions de vie dans les centres de rétention pour enfants migrants aux îles Canaries. Apporter des précisions sur les conclusions formulées par le Défenseur du peuple dans son rapport de 2007 concernant les conditions de vie déplorables dans les centres de rétention des migrants (centros de internamiento de extranjeros). Ses recommandations ont‑elles été mises en œuvre?

19.Commenter le rapport publié en 2009 par le Défenseur du peuple concernant les centres de protection des enfants ayant des problèmes de comportement et se trouvant dans des situations difficiles. Quelles mesures ont été prises pour répondre aux préoccupations et recommandations exprimées, en particulier en ce qui concerne l’administration obligatoire de médicaments, contre la volonté des enfants, et le recours à la pratique de l’isolement cellulaire? Indiquer aussi quelles sont les catégories d’enfants placés dans ces centres, le nombre d’enfants concernés et la durée du placement.

20.Communiquer tout élément nouveau éventuel concernant la pratique de la dispersion des détenus inculpés ou condamnés du chef de crimes terroristes.

21.Donner de plus amples renseignements au sujet de la «doctrine Parot», établie par le Tribunal suprême dans son arrêt 197/2006 sur la question de la libération conditionnelle en cas d’infractions terroristes.

22.Décrire les mesures prises pour protéger et garantir les droits des personnes vulnérables privées de liberté, en particulier les femmes, les malades mentaux, les personnes séropositives et les enfants. Existe‑t‑il des installations séparées pour les personnes souffrant de troubles mentaux ou séropositives? Les enfants sont‑ils détenus parmi les adultes? Le personnel des lieux de détention est‑il formé pour répondre aux besoins des malades mentaux et des personnes séropositives? Dans l’affirmative, indiquer combien de personnes ainsi formées sont à la disposition de chaque détenu ayant des besoins spéciaux et la fréquence de leurs interventions.

Articles 12 et 13

23.D’après les renseignements à la disposition du Comité, la police emploie parfois une force excessive à l’égard des suspects qui sont arrêtés ou détenus. Fournir des données statistiques ventilées pour les années 2003-2008 sur les cas de torture et de mauvais traitements: a) pendant ou après l’arrestation; b) en garde à vue; c) en détention. De préférence, les données devraient être ventilées selon le lieu de détention, le sexe, l’âge et l’appartenance ethnique des victimes. Donner également des informations détaillées sur le résultat des enquêtes qui ont pu être menées sur ces allégations, y compris sur les poursuites engagées et les condamnations prononcées.

24.Fournir des données statistiques sur les décès en détention signalés entre 2003 et 2008, en les ventilant par lieu de détention, sexe, âge, appartenance ethnique et cause du décès. Donner des informations détaillées sur le résultat des enquêtes menées sur ces décès, en particulier sur les cas où il s’agirait d’un suicide, ainsi que sur les mesures appliquées pour empêcher que des violations de ce type ne se reproduisent. La réforme du programme de prévention des suicides a-t-elle contribué à réduire le nombre de décès en détention?

25.Commenter les conclusions des divers rapports selon lesquelles les allégations d’actes de torture et de mauvais traitements par des agents des forces de l’ordre, y compris dans le cadre de l’expulsion forcée, de l’éloignement ou du renvoi de migrants clandestins, ne font pas systématiquement l’objet d’enquêtes de la part des services de répression et des autorités judiciaires. À ce propos, donner des renseignements sur:

a)Les conclusions du Rapporteur spécial sur la promotion et la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales dans la lutte antiterroriste selon lesquelles les allégations d’irrégularités et de mauvais traitements physiques et psychologiques lors de l’enquête sur les personnes accusées des attentats du 11 mars, ont été ignorées;

b)Les mesures prises pour donner suite aux plaintes de Mohammed Fahsi et trois autres individus qui ont affirmé avoir été l’objet de tortures et de mauvais traitements pendant leur détention au secret, après avoir été arrêtés au petit matin du 10 janvier 2006 dans des circonstances très similaires.

26.Décrire les mesures prises pour lutter contre le racisme et la discrimination, en particulier la violence raciste qui vise les minorités ethniques, et préciser si des enquêtes impartiales sont immédiatement ouvertes sur les allégations faisant état d’actes tels que ceux visés aux articles 1er et 16 de la Convention.

27.Quelles ont été les mesures prises pour garantir que les plaignants soient protégés contre tout mauvais traitement ou acte d’intimidation en raison de leurs plaintes?

Article 14

28.Donner des renseignements chiffrés − y compris le montant − sur les indemnisations accordées aux victimes d’actes de torture ou de traitements cruels, inhumains ou dégradants commis dans l’État partie durant la période 2003‑2008. Ventiler les données par sexe, âge et appartenance ethnique.

29.Indiquer si l’exercice du droit à réparation est subordonné à l’existence d’un jugement d’un tribunal pénal ordonnant l’indemnisation. Une indemnité peut-elle être accordée à la victime d’actes de torture ou d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants lorsque l’auteur a fait l’objet d’une sanction disciplinaire mais non pénale? Peut‑elle être obtenue dans le cadre d’une instance purement civile?

30.Donner de plus amples renseignements sur les services qui assurent le traitement des traumatismes et d’autres formes de réadaptation qui sont proposés aux victimes de la torture.

Article 16

31.Donner des informations, ventilées par sexe, âge, appartenance ethnique ou origine de la victime, sur le nombre d’enquêtes ouvertes dans des affaires de traite et d’exploitation sexuelle à des fins commerciales, ainsi que le nombre de condamnations prononcées et de sanctions appliquées entre 2003 et 2008.

32.Informer le Comité de la méthode employée pour gérer la grève de la faim de José Ignacio de Juana Chaos, un détenu alimenté de force à diverses périodes.

33.Décrire au Comité les nouvelles mesures adoptées pour combattre le grave problème de la violence dans la famille dans l’État partie. Expliquer la raison d’être de l’instruction no14/2005 du Ministère de l’intérieur, qui oblige les forces de l’ordre à enquêter sur le statut migratoire des femmes migrantes qui signalent des actes de violence et de mauvais traitements. Indiquer si cette obligation a un effet paralysant sur la capacité des femmes migrantes de déclencher des enquêtes. A‑t‑on procédé à des études pour savoir si cette obligation a réduit le nombre de victimes de violence domestique qui ont sollicité la protection des forces de l’ordre? Quels ont été les résultats de ces études? Indiquer si cette obligation, et la diminution éventuelle des signalements de violence domestique qu’elle entraîne, restreint la capacité de l’État partie de traiter les problèmes de violence domestique.

34.Les forces de l’ordre utilisent-elles des pistolets à impulsion électrique (Taser)? Dans l’affirmative, donner des précisions sur les normes qui régissent leur utilisation. Signaler tout cas dans lequel l’utilisation de telles armes a entraîné un décès ou des blessures.

35.Indiquer quelles sont les mesures mises en œuvre dans l’État partie pour protéger les groupes vulnérables, en particulier les Roms, ainsi que les immigrants d’Afrique du Nord et d’Amérique latine. Quelle est l’incidence des violences commises contre ces groupes, par rapport à d’autres groupes? Quelles mesures l’État partie a‑t‑il prises pour lutter contre la violence et les traitements cruels motivés par la haine ethnique, le racisme et la xénophobie? Quels sont les plus grands défis auxquels l’État partie est confronté dans ce domaine et que fait‑il pour y répondre?

Autres questions

36.Donner des renseignements sur les mesures législatives, administratives et autres prises par l’État partie pour faire face à la menace d’actes terroristes et indiquer si elles ont porté atteinte aux garanties fondamentales en droit et en pratique et, si tel est le cas, préciser de quelle façon. À cet égard, le Comité tient à rappeler les résolutions 1456 (2003), 1535 (2004), 1566 (2004) et 1624 (2005) dans lesquelles le Conseil de sécurité réaffirme que «lorsqu’ils prennent des mesures quelconques pour combattre le terrorisme, les États doivent veiller au respect de toutes les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, les mesures adoptées devant être conformes au droit international, en particulier aux instruments relatifs aux droits de l’homme et aux réfugiés ainsi qu’au droit humanitaire». Décrire la formation dispensée aux agents de la force publique dans ce domaine et indiquer le nombre et la nature des condamnations prononcées en vertu de la législation antiterroriste, les recours accessibles aux personnes soumises à des mesures de ce type, si des plaintes ont été déposées pour non-respect des règles internationales et, le cas échéant, l’issue de ces plaintes. Confirmer qu’il n’existe pas de centres secrets de détention dans l’État partie.

37.Indiquer s’il existe dans la législation de l’État partie des dispositions visant à prévenir et à interdire la production, le commerce, l’exportation et l’utilisation de matériel spécialement conçu pour infliger des tortures ou des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Dans l’affirmative, donner des précisions sur le contenu et l’application de ces dispositions. Dans la négative, indiquer s’il est envisagé d’introduire de telles dispositions.

38.Suite à la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention en 2006, signaler tout fait nouveau concernant la création requise par le Protocole d’un mécanisme national chargé d’effectuer des visites périodiques dans les lieux de détention afin de prévenir la torture ou d’autres traitements cruels, inhumains ou dégradants.

39.Préciser si les châtiments corporels sur les enfants ont été officiellement abolis dans tous les contextes.

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