Nations Unies

CED/C/CRI/CO/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

12 avril 2023

Français

Original : espagnol

Comité des disparitions forcées

Observations finales concernant le rapport soumis par le Costa Rica en application de l’article 29 (par. 1) de la Convention *

1.Le Comité a examiné le rapport soumis par le Costa Rica en application de l’article 29 (par. 1) de la Convention dans le cadre de sa vingt-quatrième session, à ses 427e et 429e séances, tenues sous forme hybride les 22 et 23 mars 2023. Il a adopté les présentes observations finales à sa 440e séance, le 31 mars 2023.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport soumis par le Costa Rica en application de l’article 29 (par. 1) de la Convention, qui a été élaboré conformément aux directives du Comité.

3.Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie sur les mesures prises pour appliquer les dispositions de la Convention, qui a permis de répondre à ses préoccupations, et salue la franchise avec laquelle la délégation a répondu aux questions qu’il a posées. Il remercie l’État partie pour les renseignements complémentaires qu’il a fournis et les précisions qu’il a apportées oralement et par écrit.

B.Aspects positifs

4.Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie a ratifié la quasi-totalité des instruments fondamentaux des Nations Unies relatifs aux droits de l’homme et neuf des protocoles facultatifs s’y rapportant, ainsi que la Convention interaméricaine sur la disparition forcée des personnes et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale.

5.Le Comité félicite l’État partie des mesures qu’il a prises dans des domaines intéressant la Convention et de celles qu’il a adoptées en vue de modifier sa législation, ses politiques et ses procédures aux fins du renforcement de la protection des droits de l’homme et de l’application de la Convention, notamment :

a)L’établissement d’une institution nationale pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Service du Défenseur du peuple de la République du Costa Rica), qui s’est vu octroyer le statut « A » et est conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris) ;

b)La création, par la loi no 9204 de 2014, du Mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, conformément au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

6.Le Comité constate avec satisfaction que l’État partie a adressé à tous les titulaires de mandat au titre des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme une invitation permanente à se rendre dans le pays.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1.Renseignements d’ordre général

7.Le Comité considère qu’en dépit des mesures prises par l’État partie, le cadre normatif en vigueur, ainsi que sa mise en application, ne sont toujours pas conformes à la Convention. Il encourage l’État partie à tenir compte des recommandations qu’il a formulées dans un esprit constructif de coopération en vue de renforcer le cadre normatif existant et de garantir que celui-ci, ainsi que tous les actes émanant des autorités étatiques chargées des recherches, des enquêtes, des poursuites et des recours dans les cas de disparition, y compris de disparition forcée, sont pleinement conformes aux obligations qui incombent à l’État partie en vertu de la Convention. Les processus législatifs en cours sont également concernés.

Communications émanant de particuliers ou d’États

8.Le Comité constate que l’État partie n’a pas encore reconnu la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de particuliers ou d’États, en application des articles 31 et 32 de la Convention.

9. Le Comité encourage l’État partie à reconnaître sa compétence pour recevoir et examiner des communications émanant de particuliers ou d’États conformément aux articles 31 et 32 de la Convention, respectivement, en vue de donner pleinement effet à cet instrument et de renforcer le régime de protection contre les disparitions forcées.

2.Définition et incrimination de la disparition forcée (art. 1er à 7)

Interdiction absolue de la disparition forcée

10.Le Comité constate avec préoccupation que la législation nationale ne précise pas qu’aucune circonstance exceptionnelle ne peut être invoquée pour limiter l’interdiction de la disparition forcée ou y déroger (art. 1er).

11. Le Comité recommande à l’État partie de prendre les mesures nécessaires pour inscrire dans la législation nationale l’interdiction absolue de la disparition forcée, conformément à l’article 1 er (par. 2) de la Convention.

Registre des plaintes pour disparition

12.Le Comité regrette que, dans son rapport ou dans le cadre des informations fournies avant et pendant le dialogue, l’État partie n’ait pas communiqué de statistiques précises sur le nombre de victimes des actes visés à l’article 2 de la Convention, dont les disparitions de migrants ou d’autres personnes à des fins de traite, ni sur les plaintes pour disparition (art. 2 et 3).

13.Le Comité demande à l’État partie d’établir un registre consolidé de tous les cas de disparition survenus sur le territoire national, en faisant clairement la distinction entre les disparitions forcées et les disparitions qui se sont produites sans l’autorisation, l’appui ou l’acquiescement de l’État. Ce registre devrait recenser toutes les plaintes pour disparition, qu’elles concernent des personnes disparues qui ont été retrouvées, vivantes ou mortes, ou des personnes qui sont toujours portées disparues. Il devrait comporter à tout le moins les renseignements suivants :

a) Le nombre total de personnes disparues, l’identité, le sexe, l’identité de genre, l’orientation sexuelle, l’âge, la nationalité et l’appartenance ethnique de chaque personne disparue, ainsi que le lieu, la date, le contexte et les circonstances de sa disparition, y compris tous les éléments utiles pour déterminer s’il s’agit d’une disparition forcée ;

b) L’état d’avancement des procédures de recherche et d’enquête, ainsi que des procédures d’exhumation, d’identification et de restitution.

Protection des personnes migrantes contre la disparition forcée

14.Le Comité prend note des informations que l’État partie a communiquées pendant le dialogue au sujet de l’afflux croissant d’étrangers par les voies de migration, une situation qui est une source de préoccupation majeure. Les problèmes que les étrangers peuvent rencontrer lorsqu’ils parcourent le pays sont également un motif d’inquiétude. Le Comité regrette le manque d’informations sur les mesures prises par l’État partie pour prévenir la disparition de migrants et pour garantir les droits consacrés par la Convention en matière de recherche des personnes disparues et d’enquête sur les disparitions.

15. Le Comité recommande que l’État partie, en coopération avec les pays concernés et avec la participation des victimes et des organisations de la société civile :

a) Redouble d’efforts pour prévenir les disparitions de migrants, enquête sur celles qui surviennent et engage des poursuites pénales contre les responsables ;

b) Appuie la recherche des personnes migrantes disparues et, si leurs dépouilles sont retrouvées, veille à ce qu’elles soient identifiées et restituées dans la dignité ;

c) Établisse une base de données sur les migrants disparus qui soit tenue à jour et qui comporte des données ante mortem et post mortem, afin de faciliter la recherche et l’identification des personnes concernées ;

d) Garantisse que les proches des personnes disparues puissent, quel que soit leur lieu de résidence, être informées et participer à l’enquête et à la recherche des personnes disparues ;

e) Coopère davantage avec d’autres États de la région en vue de dynamiser la recherche des migrants disparus et la conduite d’enquêtes sur leur sort.

Infraction de disparition forcée

16.Le Comité se félicite que l’État partie considère la Convention comme un instrument juridiquement contraignant au niveau national. Cependant, il est préoccupé par le fait que la disparition forcée n’est pas reconnue comme une infraction autonome. En outre, il s’inquiète de la confusion qui pourrait résulter de l’application à la disparition forcée de définitions qui visent d’autres infractions reconnues en droit interne, mais qui ne correspondent pas à celle figurant à l’article 2 (art. 4) de la Convention.

17. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que :

a) La disparition forcée soit reconnue à la fois comme une infraction autonome (art. 2) et comme un crime contre l’humanité (art. 5) ;

b) L’infraction de disparition forcée soit passible de peines appropriées qui tiennent compte son extrême gravité ;

c) Toutes les circonstances atténuantes et aggravantes visées à l’article 7 (par. 2) de la Convention soient prévues par la législation.

Responsabilité pénale des supérieurs hiérarchiques et devoir d’obéissance

18.Le Comité prend note du fait que les membres des forces de l’ordre costariciennes sont tenus de respecter le principe de légalité et que, conformément à l’article 281 a) du Code de procédure pénale, tout fonctionnaire ou agent public est tenu de signaler au Service d’enquête judiciaire ou au ministère public tout acte illégal commis par un autre fonctionnaire ou tout ordre illégal donné par ce dernier dans l’exercice de ses fonctions. Il prend également note de ce que toutes les forces de police ont à leur disposition un service d’enquête interne qui, en cas de plainte, est tenu de protéger la confidentialité de la source. Il est préoccupé par le fait que le devoir d’obéissance, tel que visé à l’article 36 du Code pénal, puisse décharger les agents de toute responsabilité, ce qui est contraire à l’article 6 (par. 2) de la Convention.

19. Le Comité recommande à l’État partie de garantir que sa législation pénale :

a) Prévoie la responsabilité du supérieur hiérarchique et la définisse conformément à l’article 6 (par. 1 b)) de la Convention ;

b) Interdise expressément d’invoquer un ordre ou une instruction émanant d’un supérieur pour justifier une infraction de disparition forcée.

3.Procédure judiciaire et coopération en matière pénale (art. 8 à 15)

Compétence extraterritoriale aux fins de connaître d’un crime de disparition forcée

20.Le Comité est préoccupé par le fait que la législation pénale ne garantit pas que l’État exerce sa compétence aux fins de connaître d’un crime de disparition forcée lorsque les faits ont été commis à l’étranger, comme le prévoit pourtant l’article 9 (par. 1 b) et c) et par. 2) de la Convention, ni qu’il exerce l’action pénale conformément à l’article 11 (par. 1) de la Convention.

21.Le Comité recommande à l’État partie d’adopter les mesures nécessaires pour garantir l’exercice de la compétence des tribunaux nationaux aux fins de connaître des crimes de disparition forcée, conformément aux obligations qui découlent de l’article 9 de la Convention, et notamment au principe aut dedere aut judicare énoncé dans celui ‑ ci, ainsi que de l’article 11 de la Convention.

Enquête indépendante et impartiale

22.S’il a noté que l’État partie a affirmé n’avoir reçu aucune plainte pour disparition forcée, le Comité regrette de ne pas avoir obtenu d’informations sur la manière dont l’État partie garantit que tout cas de disparition forcée fait rapidement l’objet d’une enquête d’office, menée de manière approfondie, impartiale et indépendante et selon une approche différenciée, même en l’absence de plainte officielle, et garantit également à la famille et aux proches de la personne disparue le droit de participer activement à la procédure en tant que titulaires des droits visés à l’article 71 (par. 3) du Code de procédure pénale (art. 12 et 24).

23. Le Comité prie instamment l’État partie de veiller à ce que tous les signalements de disparition forcée donnent lieu rapidement à une enquête approfondie et impartiale, même en l’absence de plainte officielle, et que les auteurs présumés des faits soient poursuivis et, s’ils sont reconnus coupables, condamnés à une peine proportionnée à la gravité de leurs actes. Il l’engage également à faire en sorte que toutes les personnes ayant un intérêt légitime, par exemple les proches, la famille et les représentants légaux des personnes disparues, puissent participer aux enquêtes et à toutes les étapes des procédures, dans le respect de la légalité, et qu’elles soient régulièrement informées de l’avancement et des résultats de ces enquêtes et procédures.

Suspension des fonctionnaires soupçonnés

24.Le Comité se félicite que la législation nationale prévoie, à titre de mesure de précaution, la suspension de tout agent de l’État soupçonné d’être impliqué dans la commission d’une infraction. Toutefois, il s’inquiète du caractère facultatif de cette suspension. Il est également préoccupé par le fait que la durée de la mesure de précaution dépend exclusivement de l’évaluation de la nécessité, de l’adéquation et de la proportionnalité à laquelle doit procéder le juge dans chaque cas précis, sans qu’il y ait de critères clairs à cet effet, et qu’elle dépend donc invariablement de l’appréciation du juge (art. 12).

25. Le Comité recommande à l’État partie de garantir qu’aucun agent de l’État soupçonné d’avoir commis une disparition forcée ou d’avoir participé à sa commission ne soit en mesure d’influer, directement ou indirectement, sur le cours de l’enquête, notamment en le suspendant de ses fonctions dès le début de l’enquête et pendant toute la durée de celle-ci, et que les membres des forces de l’ordre ou des forces de sécurité qui sont soupçonnés d’être impliqués dans la commission de cette infraction ne puissent intervenir dans le cadre de l’enquête.

Entraide judiciaire internationale

26.Le Comité note que l’État partie a affirmé que l’entraide judiciaire internationale fonctionnait « normalement » et que toutes les demandes d’entraide judiciaire reçues étaient satisfaites. Il regrette toutefois de ne pas avoir reçu d’informations sur les mesures prises ou envisagées pour répondre à d’éventuelles demandes d’entraide dans les cas de disparition forcée (art. 14 et 15).

27. Le Comité recommande à l’État partie de renforcer les mécanismes d’entraide judiciaire existants afin de pouvoir intervenir efficacement à chaque fois que d’autres États parties le sollicitent au titre des articles 14 et 15 de la Convention.

4.Mesures de prévention des disparitions forcées (art. 16 à 23)

Non-refoulement

28.Le Comité prend acte des informations fournies pendant le dialogue sur les procédures et critères qui sont appliqués pour garantir le respect du principe de non-refoulement d’une personne lorsqu’il y a des motifs sérieux de croire qu’elle pourrait subir une disparition forcée. Cependant, il regrette le manque de clarté de ces critères et s’inquiète du fait que la législation nationale ne considère pas le risque de disparition forcée comme une raison valable d’empêcher l’expulsion, le refoulement ou l’extradition d’une personne vers un autre pays, ou sa remise (art. 13 et 16).

29. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’inscrire expressément dans sa législation nationale l’interdiction d’expulser, de refouler, de remettre ou d’extrader une personne s’il y a des motifs sérieux de croire qu’elle risque d’être victime d’une disparition forcée ;

b) De veiller à ce que des procédures et des critères clairs et précis soient en place pour apprécier et vérifier si une personne risque de subir une disparition forcée dans le pays de destination avant de procéder à son expulsion, à son refoulement, à sa remise ou à son extradition et, le cas échéant, de faire en sorte que cette personne ne soit pas expulsée, refoulée, remise ou extradée.

Registres des personnes privées de liberté

30.Le Comité se félicite que l’administration pénitentiaire tienne, sous forme physique et électronique, des registres des personnes privées de liberté dans les établissements pénitentiaires. Cependant, il est préoccupé par le fait que la police municipale et la police nationale ne tiennent pas de tels registres et que les données des registres existants ne soient pas mises en commun (art. 17 et 18).

31. Le Comité recommande à l’État partie de faire consigner, immédiatement et sans exception, toutes les privations de liberté dans des registres ou dossiers officiels comportant au moins les informations requises par l’article 17 (par. 3) de la Convention. Le Comité recommande en outre :

a) Que les registres et dossiers concernant les personnes privées de liberté soient diligemment complétés et mis à jour et régulièrement contrôlés et que, en cas d’irrégularité, les fonctionnaires responsables soient dûment sanctionnés ;

b) Que toute personne ayant un intérêt légitime à le faire puisse facilement et rapidement accéder, au minimum, aux informations visées à l’article 18 (par. 1) de la Convention.

Garanties juridiques fondamentales applicables aux personnes privées de liberté

32.Le Comité se félicite que la législation nationale accorde aux personnes privées de liberté le droit de communiquer immédiatement avec un conseil, les membres de leur famille ou toute autre personne de leur choix. Il accueille avec satisfaction les informations concernant l’application de ces garanties en ce qui concerne la communication des ressortissants étrangers avec les autorités consulaires de leur pays. Il regrette de ne pas avoir reçu suffisamment d’informations sur l’application effective de ces garanties, ni sur les procédures engagées et les sanctions imposées en cas de non-respect (art. 17).

33. Le Comité recommande à l’État partie de garantir en droit et en pratique que toutes les personnes privées de liberté, sans exception et quel que soit le lieu de privation de liberté dans lequel elles se trouvent, bénéficient de toutes les garanties juridiques fondamentales prévues par l’article 17 de la Convention et par d’autres traités relatifs aux droits de l’homme auxquels le Costa Rica est partie. En particulier, l’État partie est tenu de veiller à ce que toutes les personnes qui se trouvent privées de liberté aient immédiatement accès à un conseil et puissent communiquer sans délai avec leurs proches ou toute personne de leur choix et, dans le cas des étrangers, avec les autorités consulaires de leur pays.

Mécanisme national de prévention

34.Le Comité prend note des informations fournies durant le dialogue sur le Mécanisme national de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, sur les visites régulières que les représentants du Mécanisme ont effectuées, y compris pendant la pandémie de maladie à coronavirus (COVID-19), dans tous les lieux où des personnes peuvent être privées de liberté, quelle qu’en soit la nature, ainsi que sur les mesures prises pour garantir que le Mécanisme dispose des ressources nécessaires pour s’acquitter de son mandat de manière efficace et indépendante. Il regrette de ne pas avoir obtenu d’informations sur les enquêtes menées, ni sur les procédures disponibles, dans les lieux de privation de liberté, pour soumettre au Mécanisme des plaintes pour violation de droits. Il regrette également de ne pas avoir reçu de renseignements sur l’existence d’autres entités ou organisations nationales ou internationales qui auraient accès aux lieux de privation de liberté (art. 17, 18, 20 et 22).

35. Le Comité recommande que toute personne privée de liberté ait accès à des procédures lui permettant de signaler la violation de ses droits aux autorités compétentes, notamment au Service du Défenseur du peuple et au Mécanisme national de prévention de la torture.

5.Mesures visant à protéger et à garantir les droits des victimes de disparition forcée (art. 24)

Définition de la notion de victime et droit d’obtenir réparation et d’être indemnisé rapidement, équitablement et de manière adéquate

36.Le Comité se félicite de toutes les mesures mises en place pour permettre le signalement d’une disparition, pour retrouver la personne concernée et, en cas de décès, pour en restituer les restes à la famille. Cependant, il regrette que la définition de la notion de victime qui figure dans la législation nationale ne soit pas entièrement conforme à celle énoncée dans la Convention, ce qui empêche les victimes de disparition forcée d’obtenir pleinement réparation selon les modalités prévues par la Convention (art. 24).

37. Le Comité recommande à l’État partie de faire le nécessaire pour que toutes les personnes qui ont subi un préjudice direct du fait d’une disparition forcée puissent exercer les droits consacrés par la Convention, en particulier les droits à la justice et à la vérité et le droit d’obtenir réparation. À cet égard, le Comité recommande à l’État partie :

a) D’adopter une définition de la notion de victime qui soit conforme à celle énoncée à l’article 24 (par. 1) de la Convention ;

b) De faire en sorte que sa législation prévoie un système complet d’indemnisation et de réparation qui soit pleinement conforme à l’article 24 (par. 4 et 5) de la Convention et aux autres normes internationales pertinentes, qui soit placé sous la responsabilité de l’État, qui soit applicable même si aucune procédure pénale n’a été engagée et qui tienne compte des besoins particuliers de la victime, eu égard notamment à son sexe, à son orientation sexuelle, à son identité de genre, à son âge, à son origine ethnique et à sa situation sociale ou à son handicap.

Situation juridique des personnes disparues dont le sort n’a pas été élucidé et de leurs proches

38.Le Comité regrette de ne pas avoir reçu d’informations claires sur la situation juridique des personnes disparues dont le sort n’a pas été élucidé et sur celle de leurs proches, notamment en ce qui concerne les droits de propriété et la protection sociale (art. 24).

39. Le Comité recommande à l’État partie de réviser sa législation afin qu’elle règle de manière appropriée la situation juridique des personnes disparues dont le sort n’est pas élucidé et de leurs proches, notamment pour ce qui touche à la protection sociale, aux questions financières, au droit de la famille et aux droits de propriété, sans qu ’ il soit nécessaire de présumer la mort de la personne disparue . À cet égard, il engage l’État partie à mettre en place une procédure permettant d’obtenir une déclaration d’absence en raison d’une disparition forcée.

6.Mesures de protection des enfants contre la disparition forcée (art. 25)

40.Le Comité prend note des informations communiquées au sujet des garanties et des procédures régissant les adoptions internationales dans l’État partie. Il est toutefois préoccupé par le fait que le Code pénal ne vise pas les actes décrits à l’article 25 (par. 1) de la Convention. Il regrette également le manque d’informations sur les procédures existantes pour le réexamen, et si nécessaire, l’annulation de toute procédure d’adoption, de placement ou de tutelle qui trouve son origine dans une disparition forcée, et sur les mesures visant à rétablir l’identité des enfants, y compris la nationalité, le nom et les relations familiales, dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant, en précisant les limites applicables (art. 25).

41. Le Comité recommande à l’État partie :

a) De revoir sa législation pénale en vue d’y inscrire les actes visés à l’article 25 (par. 1) de la Convention en tant qu’infractions distinctes, et de prévoir pour ces infractions des peines qui tiennent compte de leur extrême gravité ;

b) D’établir des procédures spécifiques pour rendre à leur famille d’origine les mineurs visés à l’article 25 (par. 1 a)) ;

c) D’établir des procédures spécifiques permettant de réexaminer et, s’il y a lieu, d’annuler à tout moment toute adoption ou toute mesure de placement ou de tutelle qui trouve son origine dans une disparition forcée, et de rétablir la véritable identité de l’enfant concerné, en tenant compte de son intérêt supérieur.

Mise en œuvre des droits et obligations énoncés par la Convention, diffusion et suivi

42. Le Comité tient à rappeler les obligations que les États ont contractées en devenant parties à la Convention et, à cet égard, engage l’État partie à veiller à ce que toutes les mesures qu’il adopte soient pleinement conformes à la Convention et à d’autres instruments internationaux pertinents.

43.Le Comité tient également à souligner l’effet particulièrement cruel qu’ont les disparitions forcées sur les femmes et des enfants qu’elles touchent. Les femmes soumises à une disparition forcée sont particulièrement vulnérables à la violence sexuelle et aux autres formes de violence fondée sur le genre. Les femmes parentes d’une personne disparue sont particulièrement susceptibles d’être gravement défavorisées sur les plans économique et social et de subir des violences, des persécutions et des représailles du fait des efforts qu’elles déploient pour localiser leur proche. Les enfants victimes d’une disparition forcée, qu’ils y soient soumis eux-mêmes ou qu’ils subissent les conséquences de la disparition d’un membre de leur famille, sont particulièrement exposés à de nombreuses violations des droits de l’homme. C’est pourquoi le Comité insiste particulièrement sur la nécessité, pour l’État partie, de tenir systématiquement compte des questions de genre et des besoins particuliers des femmes et des enfants lorsqu’il applique les recommandations figurant dans les présentes observations finales et qu’il donne effet aux droits et obligations énoncés dans la Convention.

44. L’État partie est invité à diffuser largement la Convention, le rapport qu’il a soumis en application de l’article 29 (par. 1) de la Convention, ses réponses écrites à la liste de points établie par le Comité et les présentes observations finales, en vue de sensibiliser les autorités judiciaires, législatives et administratives, la société civile, les organisations non gouvernementales actives dans le pays et le grand public. Le Comité encourage aussi l’État partie à promouvoir la participation de la société civile à l’action menée pour donner suite aux recommandations qui figurent dans les présentes observations finales.

45.Eu égard à l’article 29 (par. 4) de la Convention et en vue de renforcer sa coopération avec l’État partie, le Comité demande à celui-ci de lui soumettre, au plus tard en 2030, des informations précises et à jour sur la suite donnée à toutes ses recommandations, ainsi que tout renseignement nouveau touchant l’exécution des obligations énoncées par la Convention depuis l’adoption des présentes observations finales. Le document devra être établi conformément aux directives concernant la forme et le contenu des rapports que les États parties doivent soumettre en application de l’article 29 de la Convention . Le Comité encourage l’État partie à associer la société civile à la compilation de ces informations.