Nations Unies

CCPR/C/TUR/2

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

28 avril 2023

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des droits de l’homme

Deuxième rapport périodique soumis par la Türkiye en application de l’article 40 du Pacte, selon la procédure facultative d’établissement des rapports, attendu en 2022 *

[Date de réception : 3 août 2022]

Introduction

1.La Türkiye poursuit des réformes de grande envergure depuis le début des années 2000 en vue de protéger et de promouvoir les droits de l’homme. Ainsi, elle est devenue partie aux conventions internationales pertinentes, a apporté les modifications nécessaires à son droit interne et veille à ce que les réformes soient pleinement appliquées en pratique.

2.La Türkiye a pu, grâce à de nombreuses dispositions constitutionnelles et légales, améliorer son cadre juridique de manière à le rendre compatible avec les conventions des Nations Unies et du Conseil de l’Europe auxquelles elle est partie, la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme et l’acquis de l’Union européenne.

3.Aux termes de l’article 90 de la Constitution, les traités internationaux dûment entrés en vigueur ont force de loi. Aucun recours en inconstitutionnalité ne peut être introduit les concernant. En cas de conflit entre les instruments internationaux relatifs aux droits et libertés fondamentaux dûment entrés en vigueur dans le pays et les lois nationales relatives à ces mêmes droits et libertés, ce sont les premiers qui l’emportent.

4.Il est possible de présenter un recours individuel devant la Cour constitutionnelle depuis le 23 septembre 2012, par suite du référendum constitutionnel de 2010

5.Les travaux de l’Institution des droits de l’homme et de l’égalité de la Türkiye et du Bureau du Médiateur ont également contribué au renforcement de la démocratie, du respect des droits de l’homme et de l’état de droit.

6.Le 21 juillet 2016, à la suite de la tentative de coup d’État effectuée le 15 juillet 2016 par l’organisation terroriste fethullahiste FETÖ  dans le cadre du complot criminel monté par cette dernière contre le Gouvernement démocratique légitime et l’ordre constitutionnel, en violation grave des libertés et droits fondamentaux, en particulier le droit à la vie, l’état d’urgence a été déclaré. Il devait permettre d’éliminer totalement les menaces contre l’existence de l’État et les valeurs d’une société démocratique. Il a été levé le 19 juillet 2018.

7.La Türkiye poursuit ses réformes en vue de renforcer la démocratie et l’état de droit et de garantir le plein respect des libertés et des droits fondamentaux. Elle continue donc de coopérer de manière constructive avec les mécanismes de l’Organisation des Nations Unies, du Conseil de l’Europe et de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe.

Réponses à la liste de points à traiter établie avant la soumission du présent rapport (CCPR/C/TUR/QPR/2)

A.Renseignements d’ordre général sur la situation des droits de l’homme dans le pays, y compris sur les nouvelles mesures et les faits nouveaux concernant la mise en œuvre du Pacte

Mesures prises pour la mise en œuvre du Plan d’action pour les droits de l’homme

8.Le Plan d’action pour les droits de l’homme, qui reflète la volonté de promouvoir la liberté des personnes, une société forte et une Türkiye plus démocratique, a été annoncé le 2 mars 2021. Préparé dans un esprit de participation, compte tenu des avis des parties prenantes locales, notamment les organisations non gouvernementales et les organisations professionnelles, les milieux universitaires et les membres des médias, et de ceux du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne, le Plan d’action définit 11 grands principes et comprend 9 objectifs, 50 cibles et 393 actions.

9.Le Plan d’action pour les droits de l’homme adopte une approche fondamentale selon laquelle l’État a pour devoir primordial de protéger et de promouvoir les droits de l’homme. Il vise à remédier à un certain nombre de problèmes concrets et à améliorer le cadre juridique.

10.La circulaire présidentielle no 2021/9, qui établit le calendrier de la mise en œuvre du Plan d’action, a été publiée au Journal officiel le 30 avril 2021. Ce calendrier prévoit, pour chaque action énoncée dans le Plan, des périodes de courte durée (un à trois mois), de durée moyenne (six mois à un an) et de longue durée (deux ans) ainsi que des périodes continues pour certaines.

11.Une Commission de suivi et d’évaluation du Plan d’action pour les droits de l’homme a été constituée dans le but d’assurer une mise en œuvre et un suivi efficaces. Un système de suivi, qui doit permettre de superviser la mise en œuvre et d’assurer l’établissement de rapports et la saisie périodique de données par les institutions chargées d’exécuter les actions, a été mis en place.

12.Il a été décidé de donner librement accès au site Web (https://insanhaklariey lemplani.adalet.gov.tr) de manière à assurer la transparence de la mise en œuvre. Les textes en langue turque et en langue anglaise du Plan d’action pour les droits de l’homme, ainsi que ses traductions en français et en arabe, la directive de mise en œuvre et son calendrier ont été publiés à l’intention de toutes les parties prenantes.

13.Les actions inscrites dans le Plan sont poursuivies conformément au calendrier de mise en œuvre. Des modifications législatives, qualifiées de 4e et 5e paquets de lois, ont été adoptées, et un certain nombre d’autres actions ont été entreprises par suite de l’adoption de lois subsidiaires et de mesures administratives. Au nombre des mesures prises figurent les suivantes :

•Les décisions d’arrestation et de contrôle judiciaire prises par les juges peuvent faire l’objet d’un recours devant une juridiction supérieure ;

•Il est désormais nécessaire que toute arrestation motivée par l’existence d’éléments donnant fortement à penser qu’une infraction a été commise soit basée sur des éléments concrets si l’infraction figure dans la liste des infractions pénales ;

•Les personnes arrêtées en dehors des heures de travail sur présentation d’un mandat en vue d’un interrogatoire peuvent être libérées à condition qu’elles se présentent devant l’autorité judiciaire compétente à la date fixée ;

•Il est nécessaire de prouver que l’application de mesures de contrôle judiciaire ne peut pas suffire pour pouvoir procéder à une arrestation, maintenir une personne en détention ou rejeter une demande de mise en liberté ;

•La durée d’application des mesures de contrôle judiciaire est limitée dans le temps, et il est maintenant possible d’utiliser des moyens technologiques ;

•Les juges et les procureurs continuent de recevoir une formation sur les mesures d’arrestation et de contrôle judiciaire. Des formations aux droits de l’homme, qui couvrent la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et de la Cour européenne des droits de l’homme, sont également assurées dans le cadre des programmes de formation initiale et en cours d’emploi ;

•Les procédures qui se prolongent et la prise de décisions non motivées en appel sont signalées au Conseil des juges et des procureurs de manière à être prises en compte dans les évaluations concernant les promotions et les mesures disciplinaires ;

•Les formations initiales et en cours d’emploi visent à garantir que les décisions rendues par les juges et les procureurs sont suffisantes, convaincantes et compréhensibles, et qu’elles respectent les normes établies par les arrêts de la Cour constitutionnelle et de la Cour européenne des droits de l’homme ;

•Des formulaires types de demande d’aide juridictionnelle ont été établis et téléchargés sur le Portail des avocats ainsi que sur le site de l’administration en ligne afin de faciliter les démarches des personnes ayant des difficultés financières ;

•Le nombre des bureaux d’enquête spécialisés dans la lutte contre la violence domestique a été accru. Les juges et les procureurs chargés des dossiers en ce domaine suivent une formation spéciale ;

•Des modifications ont été apportées à la législation afin de garantir que les aspects de la vie privée qui sont sans rapport avec l’infraction ou l’acte allégué ne sont pris en compte dans les procédures judiciaires ;

•Ce sont les directions de l’appui judiciaire et des services aux victimes, et non les directions d’application de la loi, qui sont chargées de remettre un enfant à son parent, dans l’intérêt supérieur de ce dernier ;

•Les détenus pratiquant des religions différentes ont de plus amples possibilités de célébrer leurs fêtes religieuses, notamment dans le cadre de visites libres et d’appels vidéo ;

•Les questions fondamentales relatives aux droits de l’homme sont traitées dans le cadre des formations initiales et en cours d’emploi de tous les fonctionnaires ;

•Le seuil électoral national a été abaissé de 10 % à 7 % de manière à renforcer la représentation démocratique ;

•Des dispositions juridiques visant à assurer la pleine participation des personnes handicapées au processus électoral ont été prises ;

•Le harcèlement obsessionnel constitue désormais une infraction pénale distincte, ce qui renforce la protection des victimes ;

•Les femmes victimes d’actes de violence bénéficient, si elles le demandent, d’une aide juridictionnelle gratuite et de l’assistance d’un avocat désigné par le barreau.

Autres actions menées dans le domaine des droits de l’homme

14.La stratégie de réforme judiciaire, qui a été établie en vue d’assurer une justice accessible et digne de confiance et qui comporte 9 objectifs, 63 buts et 256 actions, a été annoncée le 30 mai 2019.

15.Un certain nombre de mesures importantes ont été prises :

•La période de détention provisoire pendant la phase d’instruction ne peut pas dépasser un an pour les dossiers relevant de la compétence des cours d’assises et six mois pour les autres dossiers. Elle est limitée à un an et six mois, mais peut-être prolongée de six mois si cela est justifié, pour les infractions portant atteinte à la sécurité de l’État, à l’ordre constitutionnel, à la défense nationale et au secret d’État, pour les infractions couvertes par la loi antiterroriste et pour les infractions commises en groupe ;

•Une nouvelle phrase indiquant que l ’ expression de toute opinion critique, restant dans les limites du reportage d ’ actualité, ne constitue pas une infraction a été incluse dans le texte de la loi antiterroriste ;

•Il est possible de faire appel devant la Cour de cassation pour certaines infractions commises par des moyens non violents ;

•La période maximale prévue pour la détention provisoire des mineurs poussés au crime a été raccourcie ;

•Les décisions de blocage de l’accès à des informations publiées sur le Web concerneront, non plus l’intégralité du site Web, mais uniquement la publication, la partie ou la section de l’élément associé à une violation ;

•La compatibilité des jugements et des décisions des juges et des procureurs avec la jurisprudence de la Cour constitutionnelle et de la Cour européenne des droits de l’homme est un critère qui doit être pris en compte dans le cadre des processus de promotion et de supervision ;

•La durée maximale des peines d’emprisonnement qui peuvent être commuées en internement à domicile est allongée pour les personnes âgées, les femmes et les enfants.

16.D’autres mesures concernant les cadres juridique et institutionnel des droits de l’homme prises durant la période de référence sont examinées dans les paragraphes pertinents.

Réserve à l’article 27

17.Cette réserve a pour objet d’éviter tout conflit entre l’interprétation de l’article 27 du Pacte et la Constitution. Selon l’article 10 de cette dernière, tous les citoyens sont égaux devant la loi, sans distinction de langue, de race, de couleur, de sexe, d ’ opinion politique, de conviction philosophique, de religion et de secte, ou de tout autre facteur analogue [...]. L ’ État a l ’ obligation de veiller à ce que cette égalité existe dans les faits. Conformément à la Constitution, les minorités sont définies et reconnues sur la base des accords bilatéraux et multilatéraux auxquels la Türkiye est partie. Les droits des minorités sont régis par le Traité de paix signé à Lausanne le 24 juillet 1923. Selon la Constitution et le Traité de paix de Lausanne, les ressortissants turcs appartenant à des groupes minoritaires jouissent des mêmes droits que les autres ressortissants et bénéficient également de leur appartenance à une communauté minoritaire. Il n’est donc pas envisagé de retirer la réserve susmentionnée

Mise en œuvre des recommandations du Conseil des droits de l’homme

18.Les constatations adoptées par le Comité des droits de l’homme au cours de la période considérée (CCPR/C/104/D/1853-1854/2008, CCPR/C/123/D/2274/2013 et CCPR/C/125/ D/2980/2017) ont été transmises aux autorités nationales compétentes, et des informations ont été communiquées au Comité des droits de l’homme dans le cadre de la procédure de suivi.

B.Renseignements concernant spécifiquement la mise en œuvre des articles 1 à 27 du Pacte, notamment au regard des précédentes recommandations du Comité

Cadre constitutionnel et juridique de la mise en œuvre du Pacte − Article 2

Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité

19.L’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité a été constituée conformément aux Principes de Paris par la loi no 6701 du 20 avril 2016. L’Institution turque des droits de l’homme établie en 2012 a alors été dissoute.

20.L’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité, dont la mission première consiste à protéger et à promouvoir ces droits, a trois fonctions principales dont elle s’acquitte en sa qualité d’institution des droits de l’homme, de mécanisme national de prévention de la torture et des maltraitances, et d’institution chargée de lutter contre la discrimination et de favoriser l’égalité.

21.L’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité examine d’office les violations des droits de l’homme, prend des décisions et en suit les résultats auprès des institutions compétentes. Elle traite également les dossiers de discrimination présumée qui lui sont soumis et aide les victimes à poursuivre les recours administratifs et judiciaires dont celles-ci peuvent bénéficier. En sa qualité de mécanisme national de prévention établi conformément au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, elle examine les requêtes des personnes privées de liberté ou placées dans des centres de prise en charge, effectue des visites régulières dans leurs lieux de détention, avec ou sans préavis, et établit des rapports sur ces visites.

22.L’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité assure le suivi des conventions relatives aux droits de l’homme auxquelles la Türkiye est partie, suit les travaux législatifs portant sur des questions relevant de sa compétence et soumet ses avis et recommandations aux organes pertinents, collabore avec les institutions et organisations nationales et internationales opérant dans ce domaine, et s’emploie à améliorer mieux éduquer et à sensibiliser le public aux droits de l’homme.

23.L’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité est une personne morale publique qui a son propre budget et jouit de l’autonomie administrative et financière. Elle remplit ses fonctions et exerce ses pouvoirs en toute indépendance et aucun bureau, autorité, organisation ou personne ne peut lui donner d’ordres, d’instructions, de conseils ou de suggestions concernant les questions relevant de sa compétence.

24.Des informations sur les requêtes reçues et les décisions prises par l’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité sont présentées ci-dessous :

•Examens effectués d’office :

Année/Fonction

Lutte contre la discrimination et garantie de l’égalité

Promotion et protection des droits de l’homme

Mécanisme national de prévention

Total

2018

1

1

2

2019

2

7

2

11

2020

3

3

6

2021

3

3

•Examens effectués à la suite d’une requête :

Année

Lutte contre la discrimination et garantie de l’égalité

Promotion et protection des droits de l’homme

Mécanisme national de prévention

Autres demandes et requêtes

Total

2017

102

129

153

38

422

2018

371

78

598

60

1 107

2019

70

124

965

30

1 189

2020

276

679

408

1 363

2021

180

287

529

189

1 185

Total

999

618

2 924

725

5 266

•Décisions :

Année

Lutte contre la discrimination et garantie de l’égalité

Promotion et protection des droits de l’homme

Mécanisme national de prévention

Autres demandes et requêtes

Total

2018

30

1

30

61

2019

18

7

193

218

2020

43

3

176

203

425

2021

69

152

212

433

Total

160

163

611

203

1 137

25.L’Institution des droits de l’homme et de l’égalité est membre du Réseau européen des institutions nationales des droits de l’homme. Le Plan d’action pour les droits de l’homme prévoit que des mesures seront prises pour assurer la conformité l’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité aux principes des Nations Unies concernant le statut des institutions nationales et son accréditation par l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme. Les documents nécessaires au processus d’accréditation ont été soumis par l’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité le 1er juin 2022 à l’Alliance mondiale des institutions nationales des droits de l’homme. L’évaluation requise pour l’accréditation sera achevée en octobre 2022.

Bureau du Médiateur

26.Le Bureau du Médiateur a été créé par la loi no 6328 du 29 juin 2012 conformément à l’article 74 de la Constitution et aux Principes de Paris. Ce bureau, qui est consacré par la Constitution, est un mécanisme indépendant et efficace de traitement des plaintes concernant la prestation de services publics.

27.Le Bureau du Médiateur se compose d’un Médiateur en chef et de cinq médiateurs, qui sont élus pour une période de quatre ans au vote secret par la Grande Assemblée nationale de Türkiye. Il est rattaché à cette dernière, est une entité juridique publique et a son propre budget. En vertu de la loi, aucun bureau, autorité, organisation ou personne ne peut donner d’ordres ou des instructions, envoyer des circulaires, ou encore donner des conseils ou faire part de suggestions au Médiateur en chef et aux autres médiateurs concernant les questions relevant de leur mandat ; le Médiateur en chef et les médiateurs doivent respecter le principe de l’impartialité dans l’exercice de leurs fonctions.

28.L’indépendance du Bureau du Médiateur est en outre garantie par les conditions que doivent remplir le Médiateur en chef et les autres médiateurs en vertu de la loi, à savoir n’appartenir à aucun un parti politique, être élus à la majorité des deux tiers en séance plénière et par la commission mixte de la Grande Assemblée nationale et ne pas exercer d’autres activités, ainsi que par le fait qu’ils ne peuvent faire l’objet d’une enquête ayant trait à leurs fonctions que sur autorisation du Président de la Grande Assemblée nationale.

29.Le Bureau du Médiateur a pour mission d’examiner les différents types d’actions et de comportements de l’administration, de mener des enquêtes pour s’assurer de leur conformité avec la loi et de leur équité, et de formuler des recommandations. Quiconque peut déposer gratuitement une plainte auprès de l’institution, en personne ou par l’intermédiaire de son représentant légal, y compris dans des langues autres que le turc. Les requêtes peuvent être soumises en personne, par courrier, au moyen du formulaire électronique disponible sur le site Web officiel (www.ombudsman.gov.tr/), ou auprès des bureaux des gouverneurs de province ou de district. Les enfants peuvent également soumettre une requête à partir du site www.kdkcocuk.gov.tr.

30.Le Bureau du Médiateur procède à tous les examens nécessaires pour remédier aux infractions et régler les différends. Les autorités administratives sont tenues de fournir toutes les informations et tous les documents nécessaires. Le Bureau du Médiateur est habilité à nommer un expert et à entendre des témoins.

31.Le Bureau du Médiateur établit un rapport annuel dans lequel il indique les requêtes acceptées, les omissions constatées, les violations examinées, les recommandations formulées et les décisions prises, les administrations qui respectent ou ignorent ces décisions, ainsi que les recommandations et les avis correspondants. Il soumet ce rapport dans le respect des principes de transparence et de responsabilité à la Grande Assemblée nationale, qui l’examine dans le cadre de son Assemblée générale. Le rapport est ensuite publié au Journal officiel.

32.Le Bureau du Médiateur est également habilité à préparer des rapports spéciaux et à faire des déclarations sur les points qu’il juge nécessaires, sans attendre la soumission d’une requête ou l’établissement du rapport annuel. Il est donc en mesure de procéder à des interventions sectorielles et de contribuer au règlement des problèmes. Tous les rapports du Bureau du Médiateur sont disponibles sur son site Web.

33.Le recours aux services du Bureau du Médiateur est un droit garanti par l’article 74 de la Constitution. Lorsqu’une requête est jugée irrecevable à l’issue d’une évaluation préliminaire, il peut être décidé de ne pas procéder à son examen ou de la transférer à l’administration pertinente. Dans ce dernier cas, le Bureau du Médiateur transmet à ladite administration, outre la requête, des explications concernant le cadre juridique applicable si nécessaire, lui rappelle les mesures qu’elle doit prendre, lui demande de considérer la requête soumise et l’invite à parvenir à un règlement amiable. La plupart des décisions de transfert du dossier aboutissent à un tel règlement et permettent à l’administration de remédier aux griefs du demandeur.

34.Les demandes qui sont retenues à l’issue de la phase d’évaluation préliminaire font l’objet d’un examen sur le fond à la suite duquel le Bureau du Médiateur peut décider de formuler une recommandation, d’émettre un refus, de conclure un règlement amiable ou de s’abstenir de prendre une décision, selon la nature de la requête et/ou de la violation. Le Bureau du Médiateur doit achever le traitement de la requête dans un délai de six mois.

35.Des informations sur les requêtes soumises au Bureau du Médiateur et les décisions prises sont présentées ci-après :

Type de décision :

2017

2018

2019

2020

2021

2022 (jusqu’au 1 er  avril)

Transfert

4 629

4 812

8 112

8 555

7 148

1 644

Irrecevabilité

4 381

6 517

6 981

9 254

5 514

1 491

Requête non valide

56

187

159

164

426

17

Fusion de requêtes

94

75

98

87

95

-

Dissociation de requêtes

14

24

27

20

36

7

Règlement amiable

1 575

1 916

1 607

1 808

1 928

530

Absence de motifs sur lequel baser une décision

469

433

435

284

280

182

Recommandation

245

677

860

68 128

1 20 1

199

Refus

353

662

895

941

1 320

229

Recommandation partielle/refus partiel

177

269

410

704

403

193

Toutes décisions

11 993

15 572

19 584

89 945

18 351

4 492

Toutes requêtes

17 131

17 585

20 968

90 20 9

18 843

4 542

36.Les autorités qui ne se conforment pas aux recommandations du Bureau du Médiateur sont tenues par la loi d’expliquer les raisons de ce manquement. Ce dernier est aussi porté à la connaissance du public par la presse, et les responsables sont invités à se présenter devant la commission mixte de la Grande Assemblée nationale lors des débats consacrés au rapport annuel. Le Bureau du Médiateur continue de surcroît de communiquer avec les autorités dans le cadre des ateliers, des conférences et d’autres activités qu’il organise et auxquelles il les invite à participer.

37.Le pourcentage des recommandations formulées à la suite de violations des principes de bonne gouvernance qui sont appliquées est de 83 %. Les directives pour l’application des principes de bonne gouvernance qui ont été établies ont pour objet de promouvoir l’adoption par l’administration de mécanismes favorable aux citoyens, d’assurer la protection des libertés et des droits fondamentaux et le plein respect de l’état de droit dans le cadre de la prestation des services ainsi que l’application de principes de bonne gouvernance par les membres de l’administration publique.

38.Le Bureau du Médiateur fait partie des réseaux de l’Institut international de l’Ombudsman et du Réseau européen des médiateurs.

Autres institutions et mécanismes

39.Le projet pour l’amélioration de l’efficacité des organes civils de surveillance, qui a pour objet de renforcer le contrôle exercé par la société civile dans les prisons, est mis en œuvre avec l’assistance technique du Conseil de l’Europe.

40.Le projet a quatre composantes qui visent à :

•Renforcer l’indépendance des organes civils de surveillance grâce à l’apport de modifications aux cadres juridique et réglementaire applicables sur la base des normes internationales ;

•Renforcer l’efficacité des organes civils de surveillance grâce à la poursuite du développement de normes de contrôle, ainsi que de méthodes et d’outils de travail ;

•Assurer de manière durable des formations aux membres des organes civils de surveillance ;

•Améliorer les processus de coordination internes et de communication des organes civils de surveillance avec d’autres mécanismes de contrôle externes.

41.L’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité et le Bureau du Médiateur assurent une participation active au projet, en tant que bénéficiaires externes.

Non-discrimination – Articles 2, 3, 6, 25 et 26

Mesures juridiques prises, travaux réalisés et activités poursuivies dans le but de lutter contre la discrimination

42.La Constitution garantit l’égalité devant la loi, sans distinction (art. 10), et différentes dispositions couvrant des points particuliers interdisent la discrimination, notamment dans les statuts, les programmes et les activités des partis politiques (art. 68) et dans l’admission dans la fonction publique (art. 70).

43.En ce qui concerne la législation :

•Selon l’article 7 de la loi sur la fonction publique, les fonctionnaires ne peuvent pas devenir membres d’une organisation politique ni agir en faveur ou à l’encontre d’une personne, d’un groupe ou d’un parti politique ; ils ne peuvent pas faire preuve de discrimination fondée sur la langue, la race, le sexe, les opinions politiques, les convictions philosophiques, la religion ou la secte, et ils ne doivent faire aucune déclaration à caractère politique ou idéologique ni participer à des actions de cette nature. Toute infraction à cette règle peut être sanctionnée par la radiation du tableau d’avancement ;

•Selon l’article 12 (par. 1) de la loi sur les partis politiques, les statuts des partis ne peuvent contenir aucune disposition établissant des distinctions fondées sur la langue, la race, le sexe, la religion, la secte, la famille, le groupe, la classe ou la profession entre les candidats souhaitant adhérer à ces derniers. La loi dispose que les partis politiques ne peuvent pas avoir pour objectif de créer une distinction motivée par la langue, la race, la couleur, la religion et la secte ou d’établir un ordre public de quelque manière que ce soit sur la base de ces concepts ou opinions (art. 78), du régionalisme ou du racisme (art. 82) ou de poursuivre des objectifs contraires au principe de l’égalité devant la loi (art. 83) ;

•Le droit civil, le droit du travail, la loi principale sur l’éducation nationale, la loi sur la radio et la télévision, la loi sur les services sociaux et la loi relative à l’institution des droits de l’homme et de l’égalité, ainsi que d’autres instruments, comportent des dispositions axées sur la lutte contre la discrimination.

44.Le Code pénal interdit toute discrimination dans l’application de la loi (art. 3, par. 2). Il érige en infraction toute action faisant obstacle à l’exercice de la liberté de croyance, de pensée et de conviction (art. 115) ainsi que la haine et la discrimination (art. 122). Selon l’article 135, l’enregistrement illégal de données à caractère personnel concernant les opinions politiques, philosophiques ou religieuses, l’origine raciale, les tendances morales, la vie sexuelle, l’état de santé ou les affiliations syndicales d’une personne constitue une circonstance aggravante. L’article 216 érige en infraction le fait de provoquer la haine, l’hostilité ou des traitements dégradants d’un groupe de population envers un autre groupe pour des motifs discriminatoires.

Législation relative aux établissements pénitentiaires

45.L’article 2 de la loi no 5275 sur l’exécution des peines et des mesures de sécurité dispose que les règles établies à cette fin doivent être appliquées aux détenus sans distinction de race, de langue, de religion, de secte, de nationalité, de couleur, de sexe, de naissance, de croyance philosophique, d’origine nationale ou sociale, d’opinion, de pensée politique ou autre, de pouvoir économique ou de position au sein de la société, et sans favoriser quiconque.

46.Les plaintes des détenus concernant la manière dont ils sont traités par le personnel sont rapidement transmises aux autorités compétentes, et des enquêtes judiciaires et administratives sont lancées si nécessaire.

Activités prévues dans le Plan d’action pour les droits de l’homme

47.Le Plan d’action pour les droits de l’homme met en relief le principe de l’égalité devant la loi. Il inclut les activités énumérées ci-après dans la section traitant de l’amélioration de l’efficacité de la lutte contre les discours de haine et la discrimination :

•Mener une lutte efficace contre les discours de haine et les actes de discrimination motivés par la langue, la religion, la race, la couleur, le sexe, les opinions politiques, les convictions philosophiques, la secte ou d’autres raisons similaires ;

•Accroître l’efficacité des politiques de prévention de la discrimination dans la vie professionnelle ;

•Assurer le suivi de l’évolution de la situation nationale et internationale en établissant de rapports périodiques sur les cas de discrimination ou de discours et crimes de haine comme l’islamophobie, la xénophobie, la phobie des migrants et le racisme ;

•Préparer des lignes directrices pour les enquêtes de manière à lutter efficacement contre la discrimination et les crimes de haine ;

•Inclure une nouvelle disposition dans le Code pénal concernant la discrimination et les crimes de haine ;

•Proposer une aide psychosociale et juridique aux victimes considérées comme étant les plus touchées par la discrimination et les crimes de haine ;

•Créer une base de données et assurer la collecte de statistiques concernant les infractions pénales et les délits faisant intervenir des actes de haine et de discrimination, et former le personnel chargé de l’application de la loi et des poursuites pénales ;

•Améliorer la sensibilisation aux discours de haine et à la discrimination dans le cadre de formations et grâce à l’élaboration de manuels destinés aux professionnels des médias.

Activités de l’Institution des droits de l’homme et de l’égalité

48.La lutte contre la discrimination est l’une des trois grandes missions de l’Institution des droits de l’homme et de l’égalité. La loi no 6701 est une loi anti-discrimination complète.

49.Les types de discrimination couverts par cette loi sont l’établissement de distinctions, l’émission d’ordres ayant un caractère discriminatoire et l’exécution de ces ordres, les discriminations multiples, directes et indirectes, l’intimidation sur le lieu de travail, tout manquement à l’obligation de procéder à des aménagements raisonnables en faveur des personnes handicapées, les actes de harcèlement et de discrimination fondés sur des perceptions. Toute manifestation hostile à l’encontre de personnes ayant lancé des procédures administratives ou judiciaires pour exiger un traitement égal ou une protection contre la discrimination de la part des personnes impliquées dans ces procédures ou de leurs représentants constitue également un comportement discriminatoire.

50.Selon l’article 5 (par. 1) de la loi, les personnes physiques, les institutions publiques, les organisations ou les personnes morales fournissant des services ne peuvent pas faire preuve de discrimination à l’encontre des personnes souhaitant obtenir ces services ou obtenir des informations à leur sujet. En vertu de la loi, toutes les institutions publiques et toutes les personnes morales sont tenues de prendre toutes les mesures nécessaires pour éliminer les comportements discriminatoires et leurs conséquences, empêcher qu’ils ne se reproduisent et assurer le suivi administratif et judiciaire de toute violation de l’interdiction de discrimination.

51.L’Institution des droits de l’homme et de l’égalité doit, pour lutter contre la discrimination  : i) examiner les violations de l’interdiction de la discrimination, d’office ou sur présentation d’une requête, mener des investigations et des enquêtes, prendre des décisions et suivre leurs résultats ; ii) communiquer aux personnes alléguant qu’elles ont été victimes de discrimination des informations sur les recours administratifs et juridiques dont elles peuvent bénéficier, et leur apporter un appui durant le traitement de leur requête ; iii) donner des informations au public, notamment par l’intermédiaire des médias, sur la lutte contre la discrimination ; iv) contribuer à la détermination des principes devant être inclus dans le programme d’enseignement national et les cours de formation professionnelle destinés aux fonctionnaires ; et v) établir des rapports annuels sur la lutte contre la discrimination.

52.Toute personne déclarant être victime de discrimination peut soumettre gratuitement une requête à l’Institution des droits de l’homme et de l’égalité dans les bureaux des gouverneurs de province et de district. Les requérants adultes peuvent demander que leur identité soit masquée ; celle des demandeurs mineurs n’est jamais divulguée. Contrairement au requérant qui doit seulement présenter de solides éléments à l’appui de ses allégations, la personne ou l’institution accusée de la violation doit prouver que l’allégation est fausse.

53.Lorsqu’elle constate une violation de l’obligation de non-discrimination, l’Institution des droits de l’homme et de l’égalité peut imposer une amende aux personnes ou institutions responsables.

54.L’Institution des droits de l’homme et de l’égalité a poursuivi d’autres travaux et activités dans le but de lutter contre la discrimination, parmi lesquels :

•La Conférence internationale organisée sur le thème de la lutte contre la discrimination dans l’entreprise (17 avril 2019) ;

•Le Rapport sur la lutte contre la discrimination, 2018, qui suit une approche intégrée pour examiner les domaines du service public auxquels s’applique l’interdiction de discrimination, ainsi que les politiques et les activités connexes ;

•Le Rapport sur le droit à l’éducation des enfants autistes et l’interdiction de la discrimination (publié le 2 avril 2020 à l’occasion de la Journée mondiale de sensibilisation à l’autisme) ;

•Le colloque national organisé sur le thème des discours et des crimes de haine" (27 octobre 2021) ;

•La première réunion de la Commission de consultation (18 novembre 2021) qui a été établie par l’Institution des droits de l’homme et de l’égalité et chargée par cette dernière d’examiner les problèmes qui se posent, de suggérer des solutions et de procéder à des échanges d’informations et de vue sur les questions ayant trait à la discrimination. Des représentants de nombreuses institutions et organisations publiques, d’organisations non gouvernementales, d’organisations sociales et professionnelles, des milieux universitaires ainsi que des experts membres de la commission ont assisté à cette réunion ;

•Le Rapport spécial sur le rôle des institutions chargées de promouvoir les principes de non-discrimination et d’égalité dans le contexte de la lutte contre les discours de haine et la xénophobie : ce rapport est en cours d’élaboration.

Activités d’autres institutions

55.Le Bureau du Médiateur a également le pouvoir de déterminer si les institutions publiques respectent le principe de non-discrimination. Au total, 85 requêtes pour discrimination lui ont été présentées entre janvier 2017 et avril 2022 : 14 ont été rejetées, 47 ont été transférées aux personnes/institutions compétentes et 16 ont été traitées.

56.La Türkiye soumet des rapports périodiques au Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes conformément à la Convention. Elle a présenté à ce dernier son septième rapport périodique en novembre 2014, son huitième rapport périodique en novembre 2020 et ses réponses à la « liste de points » en novembre 2021. Les engagements pris par la Türkiye pour lutter contre la discrimination fondée sur le genre durant la période couverte par le rapport peuvent être consultés à partir des documents inclus dans la base de données des Nations Unies.

Crimes de haine

57.Le délit de haine et discrimination est couvert par l’article 122 du Code pénal. Celui‑ci dispose que toute personne qui : a) fait obstacle à la cession, au transfert ou à la location d’un bien meuble ou immeuble offert au public ; b) empêche une personne de bénéficier de services proposés au public ; c) s’oppose à l’octroi d’un emploi à une personne ; d) ne permet pas à une personne d’entreprendre une activité économique ordinaire en raison de sentiments de haine motivés par des différences de langue, de race, de nationalité, de couleur, de sexe, de handicap, d’opinions politiques, de convictions philosophiques, de religion ou de secte, est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller d’un an à trois ans.

58.L’intitulé Discrimination a été remplacé par celui de Haine et discrimination en vertu de la loi no 6529 du 2 mars 2014, de manière à mettre en relief le caractère haineux de l’infraction.

État d’urgence – Article 4

59.Le 15 juillet 2016, la FETÖ, qui avait infiltré de nombreuses institutions de l’État, a tenté d’éliminer l’ordre constitutionnel démocratique en recourant à la violence et à la coercition. Les membres de cette organisation qui s’étaient infiltrés dans les forces armées nationales ont employé un grand nombre d’armes lourdes, notamment des avions de chasse, des hélicoptères d’attaque, des chars et des véhicules armés, lors de la tentative de coup d’État : des institutions publiques ont été bombardées, parmi lesquelles le bâtiment de la Grande Assemblée nationale, le complexe présidentiel, les locaux de la direction de la Sûreté générale et le complexe des Services de renseignement. La FETÖ a aussi attaqué les locaux des médias afin d’interrompre les émissions télévisées et de bloquer l’accès à Internet, et a tenté d’assassiner le Président de la République. Cette tentative de coup d’État a constitué une attaque contre les libertés et les droits fondamentaux de la population, en particulier le droit à la vie, les valeurs démocratiques de la société et l’ordre constitutionnel. Elle a provoqué 251 décès et a blessé 2 194 personnes.

60.L’état d’urgence a été déclaré le 21 juillet 2016 et approuvé par la Grande Assemblée nationale, conformément à l’article 120 de la Constitution, afin d’éliminer toute menace pour la sécurité de l’État et les valeurs d’une société démocratique, de protéger les droits de la personne et la primauté du droit, et de prévenir toute attaque future contre ces valeurs.

61.Durant l’état d’urgence, la Türkiye a exercé son droit de déroger à ses obligations en vertu du Pacte et de la Convention européenne des droits de l’homme. Elle a pris, à cet égard, des mesures exceptionnelles, proportionnées, nécessaires et temporaires, conformément aux dispositions de l’article 4 du Pacte et aux principes énoncés dans l’observation générale no 29 du Conseil des droits de l’homme. Ces mesures n’ont pas entraîné de changements ni donné lieu à l’imposition de restrictions dans la vie quotidienne et n’ont pas affecté l’exercice des libertés et droits fondamentaux. Aucune mesure n’a été prise au sujet des droits auxquels il ne peut être dérogé, et le droit à un procès équitable a été respecté.

62.Durant cette période, 32 décrets-lois ont été adoptés au titre de l’état d’urgence. Les obligations découlant des conventions internationales relatives aux droits de l’homme ont été respectées dans toute la mesure possible, et des dispositions ont été prises pour garantir que les mesures adoptées satisfaisaient aux critères de nécessité et de proportionnalité.

63.Tous les décrets-lois et toutes les décisions de prolongation de l’état d’urgence ont été dûment approuvés par la Grande Assemblée nationale. Les décrets-lois dont l’application était assujettie à la supervision politique de la Grande Assemblée nationale ont également été soumis à la supervision judiciaire de la Cour constitutionnelle dès qu’ils ont pris force de loi avec l’approbation du Parlement. La Cour constitutionnelle a examiné et annulé un certain nombre de dispositions dans le cadre de ce processus.

64.Conformément aux recommandations du Conseil de l’Europe, une Commission d’enquête sur l’état d’urgence a été créée en vertu du décret-loi no 685 ; cette commission est devenue opérationnelle le 22 mai 2017, et a entrepris d’examiner les requêtes concernant les actes administratifs exécutés directement en vertu des décrets-lois dans le cadre de l’état d’urgence et de statuer sur celles-ci. La Commission d’enquête est considérée par la Cour européenne des droits de l’homme comme un recours interne qui doit être épuisé, et ses décisions sont soumises à un contrôle judiciaire. Des informations sur les examens effectués et les décisions prises par la commission au 31 décembre 2021 sont présentées dans le tableau ci-dessous :

Objet

Mesures

Requêtes

Décisions

Dossiers en cours

Acceptation

Rejet

Total

Démission des fonctions de membre du service public

125 678

123 078

15 841

101 987

117 828

5 250

Annulation des grades du personnel à la retraite

3 123

2 503

148

2 319

2 467

36

Annulation de bourses

270

185

10

146

156

29

Fermeture d’institutions

2 761

1 017

61

191

252

765

Total

131 832

126 783

16 060

104 643

120 703

6 080

65.L’état d’urgence a été levé le 18 juillet 2018. Les dérogations aux dispositions du Pacte et de la Cour européenne des droits de l’homme ont été dûment retirées à la même date.

66.La loi no 7145, qui vise à permettre de lutter efficacement contre les organisations terroristes en situation normale et à prévenir de futures attaques contre l’ordre social démocratique légitime, est entrée en vigueur le 31 juillet 2018 ; elle a pour objet d’assurer le respect des libertés et droits fondamentaux garantis par la Constitution, et régit les dispositions concernant les enquêtes et les poursuites ainsi que les mesures disciplinaires et administratives. La loi confère aux autorités judiciaires certains pouvoirs d’enquête et de poursuite dans le cadre de la lutte contre le terrorisme pendant une période d’une durée déterminée. Elle ne donne pas lieu à l’application permanente des mesures temporaires prises durant l’état d’urgence.

COVID-19

67.La Türkiye n’a pas dérogé aux obligations prévues dans le Pacte, comme le permet l’article 4 de ce dernier, dans le cadre de la lutte contre la pandémie de COVID-19. Toutes les mesures ont été prises dans le respect de l’état de droit, sans perturber les services publics et de manière à répondre aux besoins de la population, conformément à la Constitution, à la loi no 1593 sur la santé publique et à la loi no 5442 sur les administrations provinciales ainsi qu’à d’autres textes législatifs pertinents.

68.Les mesures prises avaient un caractère temporaire, une couverture géographique et des objectifs déterminés et satisfaisaient aux critères de nécessité et de proportionnalité. Elles ont fait l’objet d’examens réguliers et ont été modifiées en fonction de l’évolution de la pandémie. Elles ont aussi été établies compte tenu des recommandations de l’Organisation mondiale de la Santé et du Conseil scientifique consultatif spécialement formé pour lutter contre la pandémie de COVID-19.

69.Les mesures de lutte contre la COVID-19 font l’objet d’un contrôle juridictionnel au même titre que toutes les actions poursuivies par l’administration conformément à l’article 125 de la Constitution.

70.Tous les événements et toutes les évolutions d’ordre sanitaire font l’objet d’un suivi attentif du Ministère de la santé. Dans ce contexte, le plan de préparation à une pandémie établi en 2006 a été actualisé en fonction des nouvelles tendances ; le plan national de préparation en cas de grippe pandémique a été publié en avril 2019, et certaines activités prévues dans les plans provinciaux de préparation et d’intervention en cas de grippe pandémique ont été menées au niveau local.

71.Dès le début de la pandémie, des mesures de précaution ont été prises pour tous les vols en provenance de zones à risque, des contrôles ont été appliqués aux points d’entrée, des limites ont été imposées aux déplacements, un couvre-feu a été décrété et les activités réunissant un grand nombre de personnes ont été limitées ; un système d’éducation en ligne a été mis en place.

72.D’amples opérations de traçage des contacts ont été entreprises à un stade précoce de la pandémie. Des mesures de contrôle de la vie sociale ont été prises, et les personnes ayant contracté le virus ainsi que celles ayant été en contact avec elles ont été confinées de manière à prévenir la propagation de la maladie.

73.La vie sociale est redevenue plus normale après juin 2020, mais les mesures de port du masque, d’éloignement social et d’hygiène ont été maintenues.

Mesures concernant les établissements pénitentiaires

74.Les mesures concernant les établissements pénitentiaires ont été prises sur la base de la loi no 5275 sur l’exécution des peines et les mesures de sécurité, la réglementation de la gestion des établissements pénitentiaires et l’application des mesures pénales et sécuritaires, la loi sur la santé publique et la réglementation des principes de surveillance et de lutte contre les maladies infectieuses ainsi que les recommandations du Conseil scientifique consultatif.

75.Il a été nécessaire de prendre des mesures supplémentaires parce que le risque d’infection était plus élevé en milieu carcéral. Le Conseil scientifique consultatif a formulé les recommandations suivantes :

•Tout détenu ou condamné admis dans un établissement pénitentiaire ou venant d’un autre établissement doit subir un premier test par amplification en chaîne par polymérase (PCR) et être hébergé dans un bloc différent jusqu’à l’obtention des résultats. Tout détenu ou condamné se trouvant déjà dans l’établissement pénitentiaire et présentant des symptômes doit également être soumis à un test par PCR. Si le résultat du test est positif, il doit être mis en quarantaine pendant dix jours dans une cellule séparée d’un hôpital ou de l’établissement pénitentiaire. Si le résultat du test effectué après dix jours d’isolement est négatif, il est transféré dans une cellule ordinaire ;

•L’état de santé de toute personne placée en quarantaine est suivi dans le cadre de fréquentes visites de contrôle suivi ;

•Conformément au programme national de vaccination contre la COVID-19, les procédures de vaccination sont appliquées à tous les détenus et condamnés, ainsi qu’au personnel de l’institution, sous réserve de leur consentement. Au 3 juin 2022, 94,2 % des condamnés et des détenus avaient reçu la première dose du vaccin, 88,3 % avaient reçu la deuxième dose et 56 % la troisième dose ;

•En vertu de la loi no 7242, les condamnés qui se trouvent dans des établissements pénitentiaires ouverts ou dont le transfert dans de tels établissements a été autorisé, ainsi que ceux qui bénéficient d’un sursis probatoire, ont eu, du 14 avril 2020 jusqu’au 31 mai 2020 la possibilité de sortir de ces établissements en raison de la COVID‑19. Les périodes de sortie ont été par la suite été systématiquement prolongées, la dernière prolongation ayant été autorisé pour une période de deux mois le 31 mai 2022. Au 2 juin 2022, 99 650 condamnés avaient quitté les établissements pénitentiaires en raison de la COVID-19.

Mesures de lutte contre le terrorisme − Articles 2, 4, 6, 7, 9, 14 et 17

76.La Türkiye, qui lutte contre de multiples organisations terroristes depuis trente ans, est dotée d’une législation complète qui lui confère les moyens nécessaires et suffisants pour lutter efficacement contre le terrorisme et son financement.

77.La loi antiterroriste no 3713 est la plus importante des lois appliquées en ce domaine en Türkiye. Elle définit les notions de terrorisme, de terroriste et d’acte terroriste et réglemente les procédures relatives aux enquêtes et aux poursuites pénales, les procédures judiciaires et l’exécution des peines motivées par de tels actes de manière claire, compréhensible et prévisible, conformément à la Constitution et au Pacte.

78.Par suite des modifications apportées à la loi antiterroriste en 2013 et en 2019, cette dernière dispose que seules les déclarations et expressions qui légitiment, louent ou encouragent le recours à la force, à la violence ou à l’intimidation par les organisations terroristes sont passibles de sanctions. L’expression d’opinions critiques dans le contexte d’un reportage ne constitue pas une infraction ; et les personnes qui commettent certaines infractions pour le compte d’une organisation terroriste bien qu’elles n’en soient pas membres ne peuvent pas se voir infliger de peine supplémentaire en vertu des dispositions générales de l’article 220 (par. 6) du Code pénal. Ces dispositions permettent d’élargir le champ de l’exercice légitime des droits et des libertés et de respecter les normes de la Cour européenne des droits de l’homme concernant la liberté d’expression.

79.La loi no 6415 sur la prévention du financement du terrorisme uniformise les dispositions réglementaires applicables à cette infraction particulière en définissant ce en quoi elle consiste, et elle établit les principes et les procédures de prévention de ce type d’infraction et du gel des actifs. Le délit de financement du terrorisme est défini à l’article 4 de la loi, mais il couvre aussi, outre les actes considérés comme des infractions terroristes dans la loi antiterroriste, les activités énoncées dans la Convention internationale des Nations Unies sur la répression du financement du terrorisme et ses annexes.

80.La Türkiye est membre du Groupe d’action financière depuis 1991. Après que son Rapport d’évaluation mutuelle ait été adopté par ce dernier en 2019, elle a pris d’importantes mesures législatives et administratives pour donner suite aux recommandations formulées. Le 27 décembre 2020, la Grande Assemblée générale a adopté la loi no 7262 sur la répression du financement de la prolifération des armes de destruction massive afin de remédier aux carences techniques mentionnées dans le rapport. Cette loi a été promulguée, et plusieurs modifications ont été apportées à la législation se rapportant à la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

81.Les dispositions de la loi no 7262 relatives aux associations sont appliquées compte tenu de la législation et des pratiques nationales et internationales en matière de liberté d’association, et en consultation avec les organisations non gouvernementales. Les mesures prises ont pour objet de garantir la transparence grâce à l’amélioration des audits, de prévenir l’exploitation des citoyens charitables et d’accroître l’efficacité et la fiabilité des organisations non gouvernementales. Depuis l’entrée en vigueur de la loi, aucun directeur d’association n’a été suspendu temporairement de ses fonctions et aucune association n’a dû cesser ses activités ou celle de l’un de ses services.

82.Des informations détaillées sur les mesures de lutte contre le terrorisme ont déjà été communiquées dans les réponses du Gouvernement aux communications des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme (AL TUR 13/2020 et OL TUR 3/2021).

Violence à l’égard des femmes − Articles 2, 3, 6, 7 et 26

Mesures relatives aux « crimes d’honneur »

83.L’article 82 du Code pénal dispose qu’un homicide volontaire est considéré comme aggravé lorsqu’il est commis contre un ascendant direct, un descendant, un conjoint, un frère ou une sœur, ou qu’il est justifié par les traditions et les coutumes. Cet article a été modifié le 12 mai 2022 par l’inclusion des homicides commis « contre une femme » dans les facteurs considérés.

84.La circulaire sur les m esures à prendre pour prévenir les crimes d ’ honneur et les actes de violence contre les enfants et les femmes publiée le 4 juillet 2006 énonce les mesures qui doivent être prises et les institutions qui sont chargées de combattre la violence contre les femmes et les enfants ainsi que les crimes d’honneur et autres qui sont justifiés par les traditions et les coutumes. Les institutions s’acquittent de leurs responsabilités en menant une action concertée, et établissent des rapports trimestriels qui permettent d’assurer le suivi de leurs actions. Le Ministère de l’intérieur a également publié une circulaire portant sur la coordination des mesures de prévention des crimes d’honneur et autres justifiés par les traditions et les coutumes.

Mesures d’assistance aux victimes et accès à la justice

85.La loi no 6284 sur la protection de la famille et la prévention de la violence à l’égard des femmes est entrée en vigueur le 20 mars 2012. Elle a pour objet de protéger les femmes, les enfants, les membres de la famille ainsi que les victimes de harcèlement qui ont subi ou risquent de subir des actes de violence, et d’établir les procédures et les principes applicables. Elle vise toutes les personnes sans distinction de langue, de religion, de couleur, de sexe, d’état matrimonial, de nationalité ou de handicap.

86.La loi prévoit deux types de mesures de précaution : les mesures conservatoires et les mesures préventives. Une mesure de précaution peut être adoptée sans qu’il ait été prouvé qu’un acte de violence a été commis ou qu’un rapport ait été établi à cet effet. Les mesures habituellement prises par les gouverneurs locaux, comme l’offre d’un hébergement à la victime et à ses enfants ou la fourniture d’une protection temporaire à cette dernière lorsque sa vie est en danger, peuvent être appliquées d’office par les responsables des forces de l’ordre lorsqu’un report de la mesure est jugé risqué. De même, les mesures habituellement prises par un juge à l’encontre d’auteurs d’actes de violence, à savoir l’interdiction de menacer la victime d’actes de violence, de l’insulter ou de l’humilier, l’obligation de quitter immédiatement la résidence commune ou ses alentours et l’attribution de cette résidence à la personne protégée, l’interdiction de s’approcher de la personne protégée et de sa résidence, de l’école et du lieu de travail de cette dernière, de ses amis ou de ses parents et de ses enfants, même s’ils n’ont pas eux-mêmes été victimes de l’acte de violence, sans préjudice des décisions concernant les relations personnelles de l’auteur avec les enfants, peuvent être appliquées d’office par les responsables des forces de l’ordre lorsqu’un report de la mesure est jugé risqué.

87.Des mesures sont prévues pour tous les types de violence entrant dans le champ d’application de la loi. Les femmes qui sont ou pourraient être victimes de violences physique, sexuelle, psychologique ou économique sont traitées sans aucune discrimination et leurs déclarations constituent une base suffisante pour bénéficier de services dans les centres de prévention et de suivi de la violence établis en vertu de la loi ou dans les foyers pour femmes.

88.Le Plan de coordination de la lutte contre la violence à l’égard des femmes pour la période 2020-2021 est entré en vigueur le 25 octobre 2019.

89.Le règlement relatif à l’emploi de méthodes techniques de suivi, qui décrit les procédures et les principes régissant les contrôles effectués par des moyens et des méthodes techniques et qui a pour objet d’assurer la mise en œuvre efficace des mesures de précaution prises par les autorités, est entré en vigueur le 4 septembre 2021.

90.La loi no 7188 du 17 octobre 2019 a introduit de nouvelles modifications visant à renforcer les droits des victimes et à éviter que ces dernières ne subissent un préjudice durant les procès, en particulier lorsque ceux-ci concernent des maltraitances de femmes et d’enfants. Des normes ont été établies pour les centres de supervision des enfants et les salles d’examen médico-légal situés dans les palais de justice ; il est aussi proposé de confier l’enregistrement des déclarations des victimes à des spécialistes de ces centres et d’assurer la prise en charge par l’État des frais de déplacement des victimes qui n’habitent pas à proximité du lieu dans laquelle les procédures se déroulent.

91.Le décret présidentiel sur le soutien apporté aux victimes d’infractions, daté du 10 juin 2020, établit les principes régissant la fourniture de services et d’une assistance aux victimes, ainsi que les devoirs, les pouvoirs et les responsabilités relatifs à la prestation de ces services, et il porte création de la Direction de l’appui judiciaire et des services aux victimes au sein du Ministère de la justice.

92.La Direction de l’appui judiciaire et des services aux victimes a principalement pour mission d’informer les victimes au sujet de leurs droits et de leurs obligations et de la procédure judiciaire les concernant, de leur apporter un soutien grâce à des activités psychosociales, d’améliorer les services destinés aux groupes vulnérables et l’exercice de leurs droits, de prendre des dispositions en vue de prévenir toute répétition des actes sources de griefs, de veiller à assurer le fonctionnement efficace et efficient des services d’aide juridictionnelle et de s’employer à renforcer l’accès des victimes aux recours judiciaires et à la justice. Cette direction gère également les salles d’entretien situées dans les palais de justice de manière à favoriser la procédure judiciaire et à apporter un certain confort aux victimes de groupes vulnérables, lorsqu’il apparaît nécessaire de prendre leur déposition dans un cadre privé et propice.

93.En vertu de la loi no 7242 du 14 mai 2020, le fait de provoquer intentionnellement une blessure est aggravé lorsque cette infraction est commise pour un motif « monstrueux ». Il est proposé de soumettre à un contrôle judiciaire les femmes enceintes ou qui ont accouché depuis moins de six mois qui sont soupçonnées d’un tel acte, au lieu de les arrêter même si les conditions nécessaires à leur arrestation sont réunies.

94.En vertu de la loi no 7331 du 14 juillet 2021, le fait de commettre intentionnellement le meurtre d’un conjoint divorcé, de lui causer des dommages corporels et des souffrances ou de le priver de liberté est considéré comme une infraction aggravée.

95.Par suite de la modification apportée à la loi le 12 mai 2022, la peine prévue pour les homicides volontaires, les dommages corporels infligés de manière intentionnelle, les menaces, la torture et les supplices infligés à des femmes a été alourdie, et le fait de causer des dommages corporels à une femme est devenu un motif d’arrestation. Le harcèlement obsessionnel est considéré comme une infraction distincte ; les femmes victimes d’actes de violence qui n’ont pas de représentant en justice peuvent bénéficier gratuitement des services d’un avocat du barreau si elles le souhaitent. Les possibilités de réduction discrétionnaire de la peine sont limitées, et il ne doit pas tenu compte du comportement adopté durant les audiences par l’auteur de l’acte de violence uniquement dans le but d’obtenir une réduction de sa peine pour bonne conduite (par exemple en soignant sa tenue vestimentaire ou en portant un costume).

96.Les victimes peuvent également bénéficier d’une aide juridictionnelle dans le cadre des procédures pénales de manière à être défrayées de tout frais, y compris des honoraires d’avocat. Les frais des services de traduction nécessaires aux victimes qui ne parlent pas le turc ou qui sont handicapées sont pris en charge par l’État.

97.La page Web située à l’adresse https://magdurbilgi.adalet.gov.tr/, disponible en turc, en anglais et en arabe, a été créée dans le but de renforcer l’accès des victimes d’infractions à des informations et de leur indiquer comment soumettre une requête.

98.Les avocats fournissant des services d’aide juridictionnelle aux groupes défavorisés ont reçu une formation visant à renforcer leurs capacités, et des critères de performance ont été établis pour les avocats commis d’office dans le cadre duP rojet pour l ’ apport d ’ un soutien à l ’ amélioration des pratiques d ’ aide juridictionnelle en vue de promouvoir l ’ accès de tous à la justice en Türkiye. Le système Gelincik d’aide juridictionnelle et de sensibilisation à la situation des victimes de violence, que le barreau d’Ankara juge prometteur, est désormais employé par d’autres barreaux dans le cadre d’opérations pilotes visant à accroître l’expérience professionnelle des avocats de la défense chargés de dossiers de violence à l’égard des femmes. Des centres d’aide aux victimes de la violence, qui emploient des avocats formés à ces questions, ont été ouverts le 24 février 2022 dans le cadre d’opérations pilotes menées par différents barreaux.

99.Des lignes directrices pour les contacts avec les victimes destinées aux responsables des forces de l’ordre, aux travailleurs de santé et au personnel judiciaire sont en préparation. Elles regrouperont en un seul document les normes et les principes de base devant être appliqués dans le cadre de ces contacts, guideront les prestataires de services qui s’occupent des victimes dans le cadre de leurs activités et les aideront à suivre une approche respectueuse et sensible eu égard à leurs droits.

Stratégie nationale de lutte contre la violence à l’égard des femmes

100.Les principaux objectifs du onzième Plan national de développement pour la période 2019‑2023 consistent à prévenir toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, à veiller à ce que ces dernières bénéficient des mêmes droits et opportunités dans tous les domaines de la vie sociale et à assurer leur autonomisation. Le plan vise à accélérer la sensibilisation de la société au mariage forcé d’enfants et à tous les types de maltraitance, et à accroître l’efficacité et les capacités des services de protection et de prévention.

101.Des plans d’action nationaux de lutte contre la violence à l’égard des femmes ont été mis en œuvre durant trois périodes distinctes, à savoir 2007-2010, 2012-2015 et 2016-2020.

102.Le quatrième plan d’action, qui couvre la période 2021-2025, est actuellement mis en œuvre. Ce plan, conçu sur la base du principe de tolérance zéro de la violence, comporte cinq objectifs principaux, 28 stratégies et 227 actions ; les objectifs principaux se rapportent aux domaines de l’accès à la justice et de la législation, des politiques publiques et de la coordination, des services de protection et de prévention, de la sensibilisation de la société et des données et statistiques. Il est accessible au public et est présenté en détail sur le site Web du Ministère de la famille et des services sociaux.

103.Le Plan d’action pour les droits de l’homme comprend également des mesures concrètes pour lutter contre la violence à l’égard des femmes.

Mesures et services administratifs, études et projets

104.Grâce à l’application KADES (système d’aide d’urgence aux femmes), celles qui sont exposées à la violence ou susceptibles de l’être peuvent en un seul clic obtenir accès au centre d’appel d’urgence en déverrouillant les informations de localisation de leur téléphone mobile ; les effectifs et patrouilles de police les plus proches sont alors dépêchés sur les lieux. Au 1er juillet 2022, 3 685 251 personnes avaient téléchargé l’application, et 405 014 femmes avaient eu recours au mécanisme d’urgence.

105.La circulaire du Ministère de la justice du 17 décembre 2019 sur la mise en œuvre de la loi sur la protection de la famille et la prévention de la violence à l’égard des femmes a permis de constituer au sein du Bureau du Procureur général des services d’enquête chargés des crimes de violence domestique employant des procureurs spécialisés dans ce domaine.

106.La circulaire du Ministère de l’intérieur en date du 1er janvier 2020 a donné lieu à l’établissement d’un Bureau de lutte contre la violence domestique et la violence à l’égard des femmes dans chacune des directions provinciales de la sûreté et d’un Service de lutte contre la violence domestique et la violence à l’égard des enfants au sein des commandements provinciaux de la gendarmerie, dont les activités doivent compléter celles des services d’enquête.

107.Le Conseil supérieur des juges et des procureurs a mis en place des tribunaux spécialisés de manière à assurer une évaluation uniforme et un suivi efficace des mesures de précaution prévues à des fins de protection et de prévention par la loi no 6284 ; ceux-ci sont à présent opérationnels.

108.Les centres de prévention et de suivi de la violence créés par la loi no 6284 emploient un personnel spécialisé, de préférence féminin, pour assurer des services de soutien et de suivi. Ils visent à prévenir la violence et à mettre en œuvre de manière efficace des mesures de protection et de prévention 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7. Ces centres, qui ont été mis en place dans toutes les provinces, fournissent un soutien psychosocial, juridique, éducatif, professionnel, médical et économique ainsi que des services d’orientation et de conseil, et suivent les mesures prises en faveur des victimes de la violence. Toute personne exposée à la violence ou risquant de l’être peut s’adresser à eux. À la fin du mois de mai 2022, 124 773 personnes, dont 107 317 femmes, 7 393 enfants et 10 063 hommes, avaient bénéficié de leurs services. Ces derniers sont assurés au niveau du district par l’intermédiaire de points de contact dans les centres de services sociaux locaux. Il existe, au total, 149 foyers pour femmes pouvant accueillir 3 624 personnes. Des efforts ont été entrepris dans le but d’améliorer leur capacité d’hébergement.

109.Le service Allo 183 soutien social est un service d’appel téléphonique permettant aux femmes et aux enfants qui ont été exposés à des actes de violence ou risquent de l’être et qui ont besoin d’un appui et d’une assistance d’obtenir des conseils psychologiques, juridiques et économiques. Il fournit aux personnes qui appellent des informations sur leurs droits et sur les entités auxquelles elles peuvent s’adresser. Les appels des victimes peuvent également motiver l’adoption de mesures de précaution de manière à prévenir les cas de négligence et de mauvais traitements, les actes de violence ou les crimes d’honneur et autres qui sont justifiés par les traditions et les coutumes, et donner lieu à des interventions. Les appels à ce numéro, qui est en service 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7, sont gratuits.

110.L’ouverture de centres de surveillance électronique a marqué, le 25 janvier 2021, la fin des travaux relatifs aux infrastructures techniques, qui avaient pour objet d’étendre à l’ensemble du territoire national la couverture de l’application pilote du bracelet électronique qui permet de suivre les déplacements des victimes et des auteurs d’actes de violence. Un module d’analyse et de gestion des risques a été élaboré et mis en œuvre dans toutes les provinces.

111.Le programme de séminaires de sensibilisation à la lutte contre la violence domestique, qui couvre des thèmes tels que la notion de violence, la gestion de la colère et l’aptitude à la communication, doit être suivi par les auteurs de violences.

112.Des analyses d’impact ont été réalisées en vue de l’application de la loi no 6284. Des études sur la violence à l’égard des femmes en Türkiye ont été entreprises dans une optique de prévention, d’intervention et d’élaboration de politiques et dans le contexte de la pandémie de COVID-19.

113.Environ 1,4 million de militaires, 75 000 agents publics, 110 000 autorités religieuses, 200 000 travailleurs de santé et 400 000 membres des forces de l’ordre ont participé à des formations et à des séminaires depuis 2007.

114.Le projet des refuges ouverts aux femmes dans le cadre de la lutte contre la violence domestique financé par l’Union européenne, qui a été mis en œuvre durant la période 2014‑2016, avait pour objet de mettre en place et de développer des services d’appui. Il visait, ce faisant, à assurer aux femmes une protection dans 26 provinces.

115.Le Programme d’aide humanitaire pour les interventions et la lutte contre la violence fondée sur le genre a été mis en œuvre à l’intention des Syriens en Türkiye, en coopération avec le Fonds des Nations Unies pour la population. Il visait à sensibiliser ce groupe de population à la violence à l’égard des femmes, à prévenir la violence à l’égard des femmes et des enfants syriens et à renforcer les capacités des prestataires de services. Des formations ont été dispensées à ces derniers, et des réunions visant à renforcer la solidarité entre les Syriennes ont été organisées. Des brochures d’information sur la violence à l’égard des femmes, l’âge du consentement, le mariage civil et les droits des femmes ont été préparées à l’intention des Syriens.

Mesures de lutte contre la COVID-19

116.Depuis le 10 mars 2020, date à laquelle le premier cas de COVID-19 a été détecté en Türkiye, des mesures concertées sont prises par le Ministère de la famille et des services sociaux, les centres de prévention et de suivi de la violence, les centres de services sociaux et les refuges pour femmes. De nouveaux lieux d’hébergement ont été ouverts dans des établissements sociaux, des dortoirs ou des lieux similaires appartenant à des organisations et des institutions publiques afin de répondre à la demande durant la pandémie : 71 sites ont été utilisés dans 49 provinces.

117.Par suite de l’augmentation du nombre d’appels sur la ligne Allo 183 motivés par les problèmes sociaux engendrés par la pandémie, il a été décidé en mars 2020 de donner la priorité aux services assurés par ce circuit afin que les victimes de violences puissent joindre le personnel d’appui pertinent sans délai.

Lutte contre la corruption − Articles 2 et 25

Allégations de blanchiment d’argent, de pratiques de pots-de-vin et de collusion dans l’attribution des marchés publics

118.Les règles régissant les appels d’offres pour des marchés publics sont clairement et précisément établies dans les lois pertinentes indiquées ci-après. Chaque étape de la procédure d’appel d’offres est ouverte au public, fait l’objet d’audits internes et externes et se déroule de manière transparente et conformément au principe de la concurrence. Les délits de corruption tels que le blanchiment d’argent, les pratiques pots-de-vin et la collusion sont couverts par la loi et donnent lieu à une surveillance judiciaire.

Entités dont les actifs ont été saisis après la tentative de coup d’État et nomination de fidéicommissaires

119.Les décrets-lois nos 667, 689 et 695 publiés pendant l’état d’urgence ont été ultérieurement adoptés par la Grande Assemblée nationale en tant que lois nos 6749, 7088 et 7092. Ces textes ont donné lieu à la fermeture de fondations durant cette période. Les fidéicommissaires ont été nommés et la gestion des entités fermées a été déterminée par des décisions de justice.

120.La fonction de fidéicommissaire des sociétés et des actifs affiliés ou associés à des organisations terroristes a été transférée au Fonds d’assurance des dépôts d’épargne, conformément au décret-loi no 674 (adopté en tant que loi no 6758) et au décret-loi no 677 (adopté en tant que loi no 7083). Ce fonds est actuellement le fidéicommissaire de 715 entreprises et des actifs de 101 personnes physiques.

121.Les sociétés pour lesquelles le Fond d’assurance des dépôts d’épargne a été nommé fidéicommissaire sont des personnes morales dirigées par des administrateurs nommés conformément aux dispositions pertinentes de la loi no 6758, qui exercent leurs fonctions dans le respect des pratiques commerciales et du principe de prudence. La nomination du Fonds d’assurance en tant que fidéicommissaire permet d’éviter d’exposer ces sociétés à un risque de corruption, car le Fonds remédie aux problèmes susceptibles de se poser en enregistrant avec exactitude les transactions commerciales et en assurant la poursuite des activités de manière transparente, conformément aux dispositions du Code du commerce, à la législation fiscale turque, à la loi sur le marché des capitaux et à d’autres normes pertinentes.

122.Les décisions prises au titre des sociétés et les mesures adoptées par la direction sont régulièrement remises en question par les actionnaires qui peuvent saisir les tribunaux en vertu de la loi no 6758. Certaines sociétés font également l’objet d’audits indépendants conformément au Code du commerce, sont placés sous le contrôle d’organes de réglementation et de supervision et sont cotées en bourse.

123.La Commission d’enquête sur les mesures prises durant l’état d’urgence évalue les demandes d’opposition aux mesures prises au titre des entités fermées en application de décrets‑lois et décide de leur validité. Les informations concernant les examens et les décisions de la Commission d’enquête qui étaient disponibles au 31 décembre 2021, y compris les requêtes déposées pour s’opposer aux procédures de fermeture, sont présentées au paragraphe 64 du présent rapport.

124.Lorsqu’une requête concernant une entité fermée est acceptée, la disposition du décret-loi concernant ladite entité cesse d’être applicable, de même que ses conséquences, à compter de la date de publication de la décision.

125.La gestion d’associations par des fidéicommissaires est régie par les principes énoncés aux articles 27, 30 et 32 de la loi no 5253 sur les associations. Les associations d’intérêt général font, de ce fait, l’objet d’un audit au moins tous les deux ans. Lorsqu’une infraction est détectée, les membres de l’association peuvent être temporairement suspendus, auquel cas un fidéicommissaire est nommé, sur requête, par décision de justice.

126.La Cour européenne des droits de l’homme, dans l’arrêt qu’elle a rendu dans l’affaire İpek c. Türkiye (no 4158/19, 21 octobre 2021) concernant la nomination dans le cadre d’une enquête pénale concernant la FETÖ d’un fidéicommissaire pour un certain nombre de sociétés dont le requérant est un actionnaire important, a jugé la requête irrecevable pour non‑épuisement des voies de recours internes et griefs manifestement infondés.

Cadre institutionnel et juridique mis en place pour lutter contre la corruption

127.La prévention de la corruption et la transparence des institutions publiques font l’objet des articles 71, 74, 108 et 160 de la Constitution. Les lois nos 2886 et 4734 sur les marchés publics et la loi no 4208 sur la lutte contre le blanchiment d’argent comportent aussi des dispositions en ces domaines. Les actes de corruption directement passibles de sanctions pénales sont sanctionnés, comme dans le Code pénal, en tant que pratiques de pots-de-vin, extorsion, détournement de fonds, blanchiment d’argent, blanchiment de produits d’un crime, abus de pouvoir et délit d’initié, par la loi sur le marché des capitaux. La loi sur la déclaration des biens, la loi no 3628 sur la lutte contre la corruption et la loi no 5326 sur les délits comprennent aussi des dispositions en la matière.

128.Les modifications nécessaires ont été apportées à la législation nationale afin d’assurer sa conformité avec la Convention des Nations Unies contre la corruption et la Convention sur la lutte contre la corruption d’agents publics étrangers dans les transactions commerciales internationales.

129.La loi no 5018 sur la gestion et le contrôle des finances publiques établit un système de gestion et de contrôle financiers qui assure un emploi plus efficace et efficient des ressources publiques grâce au respect des principes de transparence et de responsabilité. Elle garantit que toute personne autorisée à acquérir et à utiliser des ressources publiques peut être tenue pour financièrement responsable.

130.La Cour des comptes, qui est une institution inscrite dans la Constitution, a pour mission de vérifier au nom de la Grande Assemblée nationale, les recettes, les dépenses et les actifs des administrations publiques financées par le budget du Gouvernement central et des institutions de sécurité sociale, et de prendre les décisions finales concernant les comptes et les actes des fonctionnaires responsables.

131.Les procédures de passation de marchés des institutions publiques font partie des principaux éléments examinés dans le cadre des audits de la Cour des comptes. La mesure dans laquelle ces institutions respectent les principes et les procédures régissant l’emploi des ressources publiques est examinée à la fois dans le cadre d’audits financiers et d’audits de conformité.

132.Les marchés publics sont principalement régis par la loi no 4734 sur les marchés publics. Cette dernière repose sur les grands principes de transparence, concurrence, égalité de traitement, fiabilité, confidentialité, contrôle des autorités publiques, satisfaction adéquate et rapide des besoins et utilisation efficace des ressources.

133.Il existe plusieurs moyens de garantir la transparence des marchés publics. Selon la loi sur la passation des marchés publics, les principales méthodes employées sont des procédures ouvertes ou restreintes qui exigent l’annonce de la possibilité de soumissionner avant le lancement de l’appel d’offres. Tous les avis d’appel d’offres couverts par la loi sont publiés sur le site Web EKAP (https://ekap.kik.gov.tr) et sont accessibles au public. Les avis d’attribution de marché sont également publiés sur le site EKAP et donnent des informations sur, notamment, le nombre de soumissionnaires, le nom des soumissionnaires auxquels le marché a été attribué, la valeur estimée et la valeur effective du marché et la date du contrat. Les dossiers d’appel d’offres doivent de surcroît être disponibles sur le site EKAP. Il est possible d’effectuer des recherches sur ce dernier et d’obtenir des informations sur les procédures de passation des marchés antérieurs et en cours. Il est également possible de consulter sur le site les comptes rendus des règlements des litiges et la liste des fournisseurs radiés sans avoir besoin de s’inscrire ou d’utiliser un mot de passe.

134.Un système d’examen et de recours ainsi que des mécanismes d’audit et de contrôle judiciaire ont été mis en place de manière à garantir la transparence et la fiabilité des procédures d’attribution des marchés. L’Autorité des marchés publics, créée par la loi sur la passation des marchés publics, est un organisme de réglementation et de supervision. Elle a le devoir et le pouvoir d’assurer l’application correcte des principes, des procédures et des actions énoncés dans la loi. Elle s’acquitte de ses fonctions en toute indépendance. Aucun organe, bureau, entité ou personne ne peut lui donner d’ordres ou d’instructions ayant pour objet d’influencer ses décisions.

135.La loi sur la passation des marchés publics établit les motifs pour lesquels un soumissionnaire peut ne pas être autorisé à participer à une procédure d’appel d’offres et énumère les actions et comportements interdits dans le cadre de cette dernière, tels que fraude, promesses, menaces, interventions abusives, obtention d’avantages, accords, extorsion, pots-de-vin et autres moyens/tentatives de truquer les transactions relatives aux appels d’offres.

136.Toute personne ayant commis une action interdite n’est plus autorisée à participer à un appel d’offres lancé par une entité ou une institution publique pendant une période d’au moins un an et pouvant aller jusqu’à deux ans. La loi donne également lieu à la tenue d’une liste des soumissionnaires radiés que les commissions d’appel d’offres doivent consulter afin de déterminer si l’attributaire du marché y figure ou non. Si l’un des actes interdits constitue une infraction relevant du Code pénal, les procureurs en sont informés et les personnes contre lesquelles une procédure pénale est engagée ne sont pas autorisées à soumissionner pour obtenir des marchés publics jusqu’à la fin de la procédure judiciaire. Les fonctionnaires chargés de la passation des marchés doivent s’acquitter de leurs fonctions de manière impartiale et conformément à la loi car, sinon, ils sont passibles des sanctions énoncées dans la loi

137.Les articles 235 et 236 du Code pénal décrivent les actes de fraude susceptibles d’être commis dans le cadre d’une procédure d’appel d’offres, et interdisent ces derniers. Les auteurs de telles infractions sont passibles d’une peine de prison de trois à sept ans.

138.La Türkiye est devenue membre du Groupe d’États contre la corruption le 1er janvier 2004 ; elle participe activement aux activités de ce dernier et met pleinement en œuvre toutes les décisions et recommandations de l’Organisation de coopération et de développement économiques et du Groupe d’action financière.

Statistiques

139.La Cour des comptes a transmis pour examen aux parquets pertinents 11 dossiers concernant des actes constituant une infraction à la fin de 2021.

140.Depuis septembre 2016, date à laquelle le Fonds d’assurance des dépôts d’épargne a été nommé fidéicommissaire de sociétés, 15 plaintes ont été déposées auprès des parquets, et cinq d’entre elles ont fait l’objet d’une décision de non-poursuite. La Commission de contrôle des comptes de la présidence a décidé, dans un cas, de ne pas autoriser la poursuite d’une enquête sur la base de l’article 127 de la loi no 5411. L’enquête et les processus de collecte d’informations et de documents se poursuivent dans le cas de six dossiers, et un procès pénal est en cours dans celui d’un autre dossier. Par ailleurs, sur les 158 requêtes d’annulation de vente judiciaire par le Fonds d’assurance des dépôts d’épargne en sa capacité fidéicommissaire dont ont été saisis les tribunaux administratifs, 113 ont été acceptées, 4 ont été rejetées et aucune décision n’a encore été prise au titre des 41 autres.

Disparitions forcées et enlèvements − Articles 6, 9 et 12

141.Toutes les mesures prises par les forces de l’ordre sont exécutées conformément aux procédures et principes énoncés dans les lois pertinentes, et leur mise en œuvre est supervisée par les autorités judiciaires nationales et internationales.

142.Le Groupe de travail des Nations Unies sur les disparitions forcées ou involontaires est informé des enquêtes et des poursuites dont font l’objet les personnes dont il a communiqué le nom à la Türkiye. Des réponses sont également apportées aux communications reçues d’autres mécanismes spéciaux des Nations Unies ayant trait à ces domaines.

143.Certaines allégations d’enlèvement s’inscrivent dans le cadre d’une stratégie malveillante poursuivie de manière générale par la FETÖ. Le meneur de cette organisation terroriste a donné des consignes claires selon lesquelles les personnes soupçonnées d’appartenir à la FETÖ devaient se cacher dans des refuges particuliers et se comporter comme si elles avaient été victimes d’un enlèvement. Elles peuvent ainsi poursuivre les activités illégales de la FETÖ et en évitant le risque d’être arrêtées.

144.Les requêtes Irmak et al./Türkiye (no 18036/19), Zeybek et al./Türkiye (no 21330/19) et Kaya et al./Türkiye (no 14443/19), par exemple, ont été soumises à la Cour européenne des droits de l’homme, mais ultérieurement retirées par les requérants. La Cour a par conséquent décidé de classer ces affaires. La Cour européenne des droits de l’homme a, de même, rejeté la requête Okumuş et al./Türkiye (no 58984/17), dans laquelle le requérant affirmait avoir été enlevé par des agents de l’État, car le dossier n’a fait l’objet d’aucun suivi. Enfin, la Cour a jugé irrecevable la requête soumise dans l’affaire Tunç et al./Türkiye (no 45801/19) qui présentait une plainte similaire, faisant valoir que cette dernière était manifestement infondée.

145.De telles tactiques sont des tentatives délibérées de tromper le public international et constituent clairement un abus des mécanismes de plainte internationaux.

Interdiction de la torture et des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants − Articles 2, 7, 9, 10, 12 et 14

146.La Türkiye applique depuis 2003 une politique de « tolérance zéro à l’égard de la torture » et a adopté une série complète de lois et d’autres mesures sur la prévention, les enquêtes, les poursuites et les sanctions concernant tous les actes de torture et de mauvais traitements. La Türkiye soumet périodiquement des rapports au Comité contre la torture. Le quatrième rapport de pays, daté de 2014, et le cinquième, daté de 2020, contiennent des informations complètes et détaillées et peuvent être consultés dans la base de données des Nations Unies.

147.L’article 17 (par. 3) de la Constitution dispose que nul ne peut être torturé ou soumis à une peine ou à un traitement incompatible avec la dignité humaine. Le Code pénal définit la torture comme un crime contre l’humanité lorsqu’elle vise un groupe de population pour des motifs politiques, philosophiques, raciaux ou religieux. Il dispose, à l’article 94, que les actes incompatibles avec la dignité humaine qui, du fait d’un agent public, causent à une personne des douleurs ou des souffrances physiques ou mentales, altèrent sa manière de penser, brisent sa volonté, ou provoquent une humiliation constituent un crime de torture.

148.La prescription concernant le crime de torture a été totalement abolie en 2013 et, depuis l’entrée en vigueur du décret-loi no 682 du 23 janvier 2017, la commission d’un acte de torture est l’un des motifs pour lesquels une personne peut être démise de ses fonctions au sein du service public.

Mécanismes nationaux de prévention et contrôle international dans le cadre de la lutte contre la torture

149.Les établissements pénitentiaires sont assujettis à des contrôles nationaux et internationaux. Au niveau national, ces établissements font l’objet d’un suivi et d’une supervision des procureurs généraux, des procureurs chargés des prisons, des inspecteurs du Ministère de la justice, des contrôleurs, des organes civils de surveillance, des conseils des droits de l’homme établi au niveau des provinces et des districts, qui se composent de représentants d’organisations non gouvernementales, de la Commission d’enquête sur les droits de l’homme de la Grande Assemblée nationale, de l’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité et du Bureau du Médiateur.

150.Conformément au Code de procédure pénale et à la réglementation régissant les procédures d’arrestation, de détention et de déposition, les procureurs généraux ou les procureurs qu’ils désignent à cet effet inspectent les lieux de détention, les salles dans lesquelles les dépositions sont prises, le cas échéant, examinent la situation des détenus, le motif et la durée de leur détention, ainsi que tous les registres et procédures se rapportant à leur arrestation et à leur détention.

151.Les commissariats de police et les lieux de détention sont inspectés par les inspections générales des provinces et des districts et, de manière périodique, par des inspecteurs civils.

152.Le 20 février 2015, le Ministère de la justice a publié la circulaire no 158 indiquant que, pour des raisons d’efficacité, les enquêtes sur les allégations de violations des droits de l’homme, en particulier de torture et de mauvais traitements, devaient être menées en personne par le Procureur général ou par un procureur désigné comme tel à cette fin.

153.La Commission de contrôle de l’application de la loi a été constituée en vertu de la loi no 6713 de mai 2016. Elle doit, dans l’exercice de ses fonctions de contrôle, renforcer l’efficacité et la transparence des unités des forces de l’ordre en créant une base de données dans laquelle sont enregistrées toutes les poursuites pénales et les procédures disciplinaires à l’encontre des membres de ces dernières. Le règlement d’application de la loi a été publié au Journal officiel le 7 août 2019.

154.L’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité, en sa qualité de mécanisme national de prévention établi conformément au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, examine les requêtes présentées par des personnes privées de liberté ou placées dans des centres de prise en charge, effectue des visites régulières avec ou sans préavis dans leurs lieux de détention, et établit des rapports sur ces visites. Elle se rend également dans les établissements pénitentiaires, les centres de rapatriement, les centres psychiatriques, les maisons de repos, les centres de soins et de réadaptation pour personnes âgées, les foyers pour enfants et les sites de foyers pour enfants, les centres d’aide à l’enfance, les centres de soins et de réadaptation pour personnes handicapées et les centres d’hébergement temporaire.

155.À l’échelle internationale, tous les lieux où des personnes privées de liberté sont détenues peuvent être visités et inspectés par des organes comme le Comité européen pour la prévention de la torture, le Sous-Comité des Nations Unies pour la prévention de la torture, le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire et le Rapporteur spécial ou la Rapporteuse spéciale des Nations Unies sur la prévention de la torture.

Statistiques

156.Au total, 104 dossiers ont fait l’objet d’enquêtes administratives (20 en 2017, 21 en 2018, 14 en 2019, 12 en 2020 et 37 en 2021) ; ils faisaient tout état d’allégations d’actes de « torture » commis par des membres du personnel de la Direction générale de la sûreté ; au total, 61 dossiers ont donné lieu à des enquêtes judiciaires (16 en 2017, 10 en 2018, 8 en 2019, 13 en 2020 et 13 en 2021).

157.L’Institution des droits de l’homme de Türkiye existant à l’époque a effectué cinq visites en 2014 et sept visites en 2015 en sa qualité de mécanisme national de prévention. Elle a établi à ce titre, outre les rapports consacrés à ces visites, quatre rapports thématiques en 2014 et deux rapports thématiques et d’examen en 2015. Elle a examiné 134 requêtes en 2014 et 211 requêtes en 2015. Elle a également étudié 21 requêtes ayant trait à l’interdiction de mauvais traitements en 2015, sans compter celles provenant d’établissements pénitentiaires.

158.Les informations sur les examens et les décisions prises, d’office ou sur requête, par l’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité qui a été constituée en 2016, en sa qualité de mécanisme national de prévention, sont présentées au paragraphe 24 du présent rapport. Des informations sur les visites des lieux de détention par l’Institution et les rapports qu’elle a établis à ce titre sont données dans le tableau ci-dessous.

2017

2018

2019

2020

2021

Visites

5

28

34

13

56

Rapports

0

13

24

15

14

159.L’Institution nationale des droits de l’homme et de l’égalité a également consacré des études à la mise en place de méthodes de suivi différentes et a installé, avec la collaboration du Ministère de la justice, un système d’information audiovisuel.

Droit à la liberté et à la sécurité de la personne − Articles 6 et 9

Mesures de substitution à la détention

160.Conformément à l’article 109 du Code de procédure pénale, un suspect appréhendé pour l’un des motifs énoncés à l’article 100 peut être placé sous contrôle judiciaire au lieu d’être arrêté. Les dispositions relatives au contrôle judiciaire peuvent également être appliquées si la loi interdit l’arrestation.

161.Différentes mesures de contrôle judiciaire peuvent être retenues, telles que l’interdiction de quitter le pays ou le lieu de résidence, de recevoir un traitement médical ou de suivre une formation, selon la nature de l’infraction attribuée au suspect et des circonstances de cette dernière. Par suite de la modification apportée par la loi no 7331 du 8 juillet 2021, toute décision concernant le maintien d’un contrôle judiciaire doit être prise par un juge à la suite d’une requête présentée par le procureur durant l’enquête, et d’office par le tribunal pendant les poursuites, à des intervalles ne dépassant pas quatre mois.

162.Le contrôle, la surveillance et le suivi des suspects, des accusés et des condamnés peuvent également être assurés au moyen de dispositifs électroniques.

Durée maximale légale de la garde à vue

163.Selon les articles 91 et suivants du Code de procédure pénale, la période de garde à vue ne peut pas, en règle générale, dépasser vingt-quatre heures. Si l’infraction a été commise en groupe et qu’il est difficile de réunir des preuves, ou si les suspects sont nombreux, le procureur peut ordonner par écrit une prolongation maximale de trois jours de la garde à vue, par tranches d’une journée.

164.La période de garde à vue a été portée à trente jours maximum pour certaines infractions liées au terrorisme par le décret-loi no 667 adopté durant l’état d’urgence, et ce, uniquement durant ce dernier. Elle a été ramenée à sept jours par le décret-loi no 684 entré en vigueur le 23 janvier2017, qui dispose que le procureur peut prolonger ce délai de sept jours au maximum, mais uniquement si les suspects sont nombreux et s’il est difficile de réunir des preuves.

165.Toutes les personnes soupçonnées de terrorisme n’ont pas été maintenues en détention pendant la période maximale de trente jours. De fait, la détention des suspects n’a généralement duré que quatre ou cinq jours dans le cadre d’environ 80 % des enquêtes ayant trait au terrorisme.

166.La loi no 7145 du 25 juillet 2018 dispose que, pendant une période de trois ans à compter de sa date d’entrée en vigueur, la période de détention maximale pour les infractions liées au terrorisme et les infractions commises contre l’ordre constitutionnel est ramenée à quarante‑huit heures, mais peut être prolongée de quarante-huit heures supplémentaires à deux reprises lorsque les dossiers traités sont complexes ou lorsqu’il est difficile de réunir des preuves ; la prolongation qui est demandée par le procureur doit avoir été approuvée par un juge lors d’une audience à laquelle était présente la personne appréhendée.

167.La période de trois ans mentionnée précédemment a été prolongée d’un an par la loi no 7333 du 18 juillet 2021.

Droit de faire objection

168.Il est possible de faire objection aux décisions de détention conformément à l’article 104 du Code de procédure pénale durant un état d’urgence. Le suspect ou l’accusé peut demander à être mis en liberté à chaque étape de l’enquête et des poursuites. La décision de maintenir le suspect en détention est prise par la Cour, mais peut faire l’objet d’un recours. Il est possible de faire objection non seulement devant les tribunaux de première instance, mais aussi devant la Cour régionale de justice et la Cour de cassation. Les personnes en garde à vue peuvent obtenir l’assistance d’un avocat.

169.Le tribunal qui évalue la requête du suspect ou de l’accusé transmet le dossier à une juridiction supérieure. La décision est ainsi également soumise à l’examen considérée par une autorité supérieure. Conformément à l’article 108 du Code de procédure pénale, le juge doit décider tous les trente jours si la demande de maintien en détention présentée par le procureur pendant la phase d’enquête doit être accordée. Il procède à cet examen d’office, même si le suspect ne le demande pas.

Capacité des établissements pénitentiaires

170.Par suite de l’inclusion, le 11 avril 2012, de l’article 105/A dans la loi sur l’exécution des peines et des mesures de sûreté, les personnes détenues dans des établissements pénitentiaires qui sont susceptibles d’obtenir un sursis probatoire peuvent bénéficier d’une libération conditionnelle anticipée ; cette disposition a commencé par être appliquée aux condamnés ayant fait preuve de bonne conduite et ayant ont au maximum un an à purger avant de pouvoir être libéré sous le régime de la probation.

171.Par suite de la modification apportée le 18 juin 2014 à l’article 106 (al. i) de la loi, les condamnés qui ne paient pas l’amende qui leur a été imposée doivent accomplir des travaux d’utilité publique au lieu d’être incarcérés.

172.Par suite de la modification apportée le 15 avril 2020 à l’article 110 de la loi, la durée maximale des peines d’emprisonnement qui peuvent être commuées en détention à domicile a été allongée pour les enfants, les personnes qui ne sont pas en mesure de vivre en prison sans aide en raison d’une maladie ou d’un handicap grave, et les femmes qui ont accouché il y a moins de six mois et qui ont été condamnées à une peine de prison ne dépassant pas trois ans ou qui ont été incarcérées au lieu de payer une amende.

173.Conformément à la loi sur les services de probation, le contrôle, la surveillance et le suivi des condamnés dans la population générale peuvent également être assurés au moyen d’appareils électroniques.

174.Des informations détaillées sur les mesures prises dans les prisons pour lutter contre la COVID-19 sont données aux paragraphes 67 à 73 du présent rapport.

175.Afin de remédier au surpeuplement carcéral, 204 nouveaux établissements pénitentiaires pouvant héberger 153 305 prisonniers ont été construits ; 61 autres établissements pouvant accueillir 47 884 personnes sont en construction.

Élimination de l’esclavage, de la servitude et de la traite des personnes − Articles 2, 7, 8 et 26

Plan d’action national de lutte contre la traite

176.Des plans d’action nationaux de lutte contre la traite ont été adoptés en 2003 et en 2009. Le troisième Plan d’action national, qui est en cours d’élaboration, devrait être prêt d’ici à la fin de 2022. Il prend en compte les résultats d’études de terrain menées dans le cadre de projets en cours ou prévus.

177.Le projet de recherche sur la lutte contre la traite des personnes (septembre 2020-mars 2022) permet d’analyser les facteurs de risque de traite d’enfants et d’exploitation par le travail, ainsi que les différents modes d’exploitation des victimes et leur profil. Des rapports sur les bonnes pratiques sont également établis en vue de l’application des mécanismes nationaux d’orientation de huit pays (Pays-Bas, Angleterre, Italie, France, Allemagne, Roumanie, Grèce et Suède).

178.Les travaux de recherche effectués dans le cadre du programme de détection de la présence de migrants en coopération avec la Présidence de la gestion des migrations et l’Organisation internationale pour les migrations ont débuté en avril 2021 ; la phase d’établissement de rapports a pris fin en octobre 2021. Ces travaux, qui ont été poursuivis à Istanbul, ont porté notamment sur les questions de l’exploitation par le travail, de l’exploitation sexuelle et du mariage forcé.

179.Le projet de renforcement de la protection des droits humains des migrants et des victimes de la traite en Türkiye est une étude réalisée en coopération avec le Conseil de l’Europe qui a également été utilisée dans le cadre de l’élaboration du Plan d’action. Les rapports sur la traite à des fins d’exploitation sexuelle et sur la traite des enfants et des personnes à des fins d’exploitation par le travail sont achevés. Ils examinent les domaines de responsabilité des institutions et des organisations pertinentes et le développement de services d’appui à la lutte contre la traite.

Dispositions juridiques applicables aux actes illégaux commis par les victimes de la traite des personnes

180.L’article 25 du Code pénal établit les principes de légitime défense et de nécessité, l’article 28 couvre le recours à la force et à la violence ainsi qu’à des menaces et l’article 30 traite de la notion d’erreur. Ces dispositions ont pour objet d’éviter que des victimes de la traite des personnes ne soient punies pour des actes illégaux qu’elles sont contraintes de commettre par des trafiquants.

Soutien psychosocial et mesures de protection juridique visant les victimes de la traite des personnes

181.Conformément à la réglementation applicable à la lutte contre la traite et la protection des victimes, les personnes qui sont manifestement, ou selon toute vraisemblance, des victimes de la traite sont considérées comme des victimes en application d’une mesure administrative qui doit être prise sans attendre les conclusions de l’enquête et les résultats des poursuites, qu’une plainte ait ou non ont été déposée.

182.Les victimes qui le souhaitent peuvent bénéficier des services proposés dans le cadre du programme d’appui et du programme pour un retour en toute sécurité. L’article 28 de la réglementation garantit l’offre de services d’appui aux victimes. Les services suivants sont assurés dans le cadre du programme :

•Hébergement dans des refuges ou des lieux sûrs ;

•Accès à des services de santé ;

•Soutien psychosocial ;

•Accès à des services sociaux et à des prestations sociales ;

•Accès à une aide juridictionnelle et à des conseils sur les droits légaux des victimes ;

•Offre de conseils concernant l’accès aux services d’éducation et de formation ;

•Soutien à l’accès à la formation professionnelle et au marché du travail ;

•Conseils sur les possibilités d’appui financier conformément aux dispositions de la loi sur l’encouragement de l’assistance et de la solidarité sociales ;

•Accès aux services de conseil des organisations non gouvernementales et des organisations internationales compétentes ;

•Interprétation ;

•Possibilité de communiquer des informations à l’ambassade ou au consulat du pays de citoyenneté, sous réserve du consentement de la victime, et de rencontrer leurs représentants ;

•Identification et aide à la délivrance de documents de voyage.

183.Les articles 48 et 49 de la loi no 6458 sur les étrangers et la protection internationale disposent qu’un permis de séjour de trente jours est délivré aux étrangers qui sont manifestement ou vraisemblablement des victimes de la traite des personnes de manière à leur permettre de se relever des conséquences de leur situation et de décider s’ils souhaitent ou non coopérer avec les autorités. Le permis de séjour peut être prolongé de six mois au maximum si l’état de santé ou la situation particulière de la victime le nécessite ; sa durée totale ne peut, en aucun cas, dépasser trois ans.

184.Les programmes d’appui sont assurés dans des centres d’hébergement des victimes. Celles qui souhaitent bénéficier de ces programmes et les enfants qui les accompagnent sont placés dans un centre d’hébergement proposant ces derniers. Il existe actuellement deux centres d’hébergement pour les victimes étrangères situés à Ankara et à Kırıkkale, qui peuvent accueillir, respectivement 30 et 12 personnes.

185.Les informations fournies dans le cadre des services d’appui proposés à toute victime arrivant dans un centre d’hébergement sont données dans la langue de l’intéressée. Les besoins fondamentaux de cette dernière sont couverts par le budget de l’institution. Elle peut s’entretenir avec des travailleurs sociaux et des psychologues lorsqu’elle se sent physiquement et psychologiquement prête. Un plan d’intervention adapté à chaque victime est établi, le cas échéant dans le respect de l’intérêt supérieur de l’enfant.

186.Une fois qu’elles sont parvenues au terme des processus de relèvement et de réadaptation, les victimes sont orientées vers des secteurs d’activité appropriés de manière à pouvoir trouver des solutions à long terme compte tenu de leurs capacités et de leurs compétences. Le projet intitulé There is Hope in the Kitchen, mené en collaboration avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture et le Ministère de l’éducation nationale a donné lieu à la délivrance aux victimes de certificats qui leur ont permis de trouver un emploi. Les victimes bénéficient également de subventions financées conjointement par des fondations d’aide sociale et de solidarité, des organisations internationales et des organisations non gouvernementales.

187.Les victimes souhaitant vivre de manière indépendante reçoivent un appui qui a pour objet de leur permettre de trouver un logement convenable. Elles reçoivent également un soutien des municipalités et des organisations non gouvernementales qui les aide à se procurer des biens, à pouvoir emprunter des moyens de transport, à payer leur loyer, etc.

Statistiques

188.Le tableau ci-après présente des données sur les infractions liées à la traite des personnes relevant de la compétence de la police entre 2011 et 2021 :

A nnée

Dossiers

Trafiquants

Victimes

Détenus

2011

15

151

145

-

2012

20

182

62

-

2013

19

92

113

-

2014

29

161

134

-

2015

19

91

50

-

2016

56

161

118

4

2017

80

333

315

75

2018

63

218

218

76

2019

80

377

376

99

2020

42

126

102

32

2021

64

194

362

63

189.Le tableau suivant indique le nombre de victimes de la traite des personnes entre 2017 et 2021 :

Type

2017

2018

2019

2020

2021

Total

%

Total

303

134

215

282

402

1 336

100,0

Exploitation sexuelle

186

95

144

160

200

785

58,7

Exploitation par le travail

52

39

55

73

111

330

24,7

Mendicité forcée

65

-

4

43

22

134

10,1

Mariage forcé

-

-

11

4

54

69

5,2

Enfants soldats

-

-

-

-

14

14

1,0

Vente d’enfants

-

-

1

1

1

3

0,2

Trafic d’organes et de tissus

-

-

-

1

-

1

0,1

190.Durant la période 2017-2021, les victimes étaient constituées pour environ 33 % d’enfants et pour 59 % de personnes âgées de 18 à 35 ans. La majorité d’entre elles étaient des femmes victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle. Environ 80 % des victimes identifiées au cours des cinq dernières années étaient de sexe féminin. La Syrie, l’Ouzbékistan, le Kirghizistan, l’Afghanistan et le Maroc étaient les cinq principaux pays d’origine entre 2017 et 2021. Les victimes se trouvent surtout dans des provinces comme celles d’Istanbul et d’Antalya, où vivent de nombreux étrangers et où l’industrie du spectacle occupe une place importante.

Liberté de circulation des personnes − Article 12

Modifications apportées aux lois régissant la délivrance des passeports

191.En vertu du décret-loi no 674 (adopté en tant que loi no 6758 le 10 novembre 2016), aucun passeport ou document de voyage ne peut être délivré à une personne lorsqu’il a été établi que cette dernière a fondé ou administré un établissement d’éducation, de formation ou de santé, une fondation, une association ou une société à l’étranger appartenant à des organisations terroristes ou ayant des liens et des contacts avec ces dernières, ou qu’elle a été employée par de telles entités.

192.Le décret-loi no 667 (adopté en tant que loi no 6749 le 18 octobre 2016) impose l’obligation de communiquer aux forces de l’ordre, aux autorités judiciaires et aux services des passeports compétents les informations recueillies dans le cadre d’enquêtes et de poursuites concernant des infractions liées au terrorisme. La loi sur les passeports dispose que des restrictions administratives peuvent être imposées dès réception d’une notification.

193.La disposition de l’article 1 (par. 2) de la loi no 7086 du 6 février 2018 concernant l’annulation des passeports des membres de la fonction publique démis de leurs fonctions a été annulée le 24 juin 2021 pour inconstitutionnalité par la Cour constitutionnelle. Cette dernière a déclaré que cette disposition limitait la liberté de circulation des personnes démises de leurs fonctions de membre du service public au-delà des prescriptions de l’état d’urgence, qu’il n’existait aucun mécanisme de recours efficace, et que l’annulation d’un passeport en l’absence d’une décision d’un juge était incompatible avec la disposition de l’article 23 (par. 3) de la Constitution concernant la liberté de circulation.

194.L’article 7 qui a été inclus dans la loi no 7188 sur les passeports disposait initialement que : les personnes dont les passeports avaient été annulés en vertu de dispositions légales entrées en vigueur durant l’état d’urgence, qui ne faisaient au moment considéré l’objet d’aucune enquête ni d’aucune poursuite administratives ou judiciaires ; qu’il avait été décidé de ne pas poursuivre ou d’acquitter, ou auxquelles il n’avait pas été jugé nécessaire d’imposer de pénalités, ou encore pour lesquelles une ordonnance de non-lieu avait été rendue ; dont la peine, le cas échéant, avait été entièrement purgée ou suspendue ; à l’égard desquelles une décision de suspension du prononcé du jugement avait été rendue pour les mêmes raisons, pouvaient obtenir un passeport auprès du Ministère de l’intérieur sur la base des investigations poursuivies par les forces de l’ordre. Cette disposition a été annulée pour inconstitutionnalité par une décision de la Cour constitutionnelle.

195.Les procédures d’annulation des passeports sont menées sur la base de notifications des autorités judiciaires visant les membres d’organisations terroristes faisant l’objet d’une enquête ou de poursuites pénales. Les passeports spéciaux ou de service qui avaient été délivrés à des membres des services publics par la suite démis de leurs fonctions ne sont plus valides puisque leurs titulaires n’ont plus droit à de tels passeports.

Traitement des migrants, des réfugiés et des demandeurs d’asile − Articles 7, 9, 12, 13 et 24

196.La Türkiye mène des réformes juridiques et institutionnelles dans le but de mettre en place un système national d’asile efficace et conforme aux normes internationales. La loi no 6458, entrée en vigueur le 11 avril 2014, a mis en place les éléments de base du système national d’asile et a constitué la Direction générale de la gestion des migrations (devenue par la suite la Présidence de la gestion des migrations) en tant que principale institution responsable de l’élaboration des politiques et des procédures applicables aux étrangers se trouvant sur le territoire national. Le 22 octobre 2014, la Türkiye a aussi adopté le Règlement de la protection temporaire, qui définit les droits et les obligations des personnes bénéficiant d’une telle protection ainsi que les procédures applicables.

197.En tant que partie à la Convention de Genève de 1951 et au Protocole de 1967, la Türkiye est attachée au principe de non-refoulement, qui est aussi garanti par l’article 4 de la loi no 6458. Les procédures de retour volontaire sont appliquées conformément au droit interne, aux accords de réadmission, aux programmes de retour volontaire et au mécanisme national d’appui aux retours volontaires.

198.Les étrangers qui entrent en Türkiye conformément à la loi no 6458 peuvent demander à bénéficier d’une protection internationale. Ceux dont la demande est acceptée ou en cours d’examen ne peuvent alors pas être expulsés.

Accès à la justice, droit à un procès équitable et indépendance des avocats et de la justice − Articles 2, 7, 9, 10 et 14

Modifications juridiques concernant le Conseil des juges et des procureurs

199.Le terme « supérieur » a été éliminé de l’expression Conseil supérieur des juges et des procureurs, le nombre des membres du Conseil a été ramené de 22 à 13 et celui des départements de 3 à 2 par suite de la modification constitutionnelle adoptée par voie de référendum en 2017. Le Conseil a été réorganisé de manière à éliminer les problèmes posés par sa structure et ses pratiques. Il opère sur la base des principes d’indépendance et d’impartialité.

200.Le Président du Conseil des juges et des procureurs est le Ministre de la justice en vertu de l’article 159 (par. 3) de la Constitution. Le Ministre ne peut toutefois pas, en sa qualité de Président, participer aux réunions de la chambre ni aux réunions plénières concernant des procédures disciplinaires. Le Vice-Ministre de la justice est d’office membre du Conseil. Le Président désigne trois membres du Conseil sélectionnés parmi les juges et procureurs des juridictions judiciaires et un membre choisi parmi les juges et procureurs des juridictions administratives. La Grande Assemblée nationale élit trois membres parmi ceux de la Cour de cassation, un membre parmi ceux du Conseil d’État, et trois membres parmi les professeurs de droit des établissements d’enseignement supérieur et le corps des avocats.

201.Les modifications apportées concernent le nombre de membres ainsi que les méthodes d’élection et de travail, et elles n’ont eu aucun effet sur l’indépendance, les devoirs et les pouvoirs du Conseil des juges et des procureurs. Ce dernier ne peut faire l’objet d’aucune ingérence politique en raison de sa structure qui assure son indépendance et son impartialité.

202.Les juges et les procureurs peuvent faire l’objet d’enquêtes disciplinaires motivées, non pas par les décisions qu’ils ont prises, mais par les plaintes qui ont pu d’être déposées contre eux, si le Conseil des juges et des procureurs l’autorise. À l’issue de ces enquêtes, qui visent à déterminer si les plaintes sont fondées. Les sanctions prévues par la loi ne sont imposées aux membres du corps judiciaire concernés qu’en cas d’acte délibéré ou de faute lourde.

Nomination des juges et des procureurs et loi no 7145

203.Les processus de candidature et de nomination des juges et des procureurs et les processus d’admission à la profession sont régis par la loi, et ne peuvent faire l’objet d’aucune intervention du Président Le Ministère de la justice sélectionne les juges et les procureurs qui peuvent se porter candidats, tandis que le Conseil des juges et des procureurs a pour mission et fonctions de déterminer ceux qui seront admis. Les procédures de candidature et d’admission des candidats à la profession se déroulent conformément à la loi no 2802 sur les juges et les procureurs.

Modifications de la loi sur la profession d’avocat

204.Les avocats sont nombreux en Türkiye, puisqu’ils étaient 127 691 à exercer cette profession au 31décembre 2019. Cela pose un certain nombre de difficultés aux barreaux qui visent essentiellement à préserver et améliorer la solidarité, la coopération, la discipline et la moralité au sein de la profession. La loi autorise l’existence de plusieurs barreaux dans une même province, en particulier lorsqu’elle compte un grand nombre d’avocats. Elle permet ainsi à ces derniers de mieux exercer leur profession, d’éliminer les retards éventuels dans la conduite des travaux et d’assurer les services du barreau dans de meilleures conditions.

Juges et procureurs renvoyés

205.Après la tentative de coup d’État, le Bureau du Procureur général d’Ankara a lancé une enquête visant un grand nombre de juges et de procureurs associés et affiliés à la FETÖ, que le Conseil des avocats et des procureurs a décidé de suspendre de leurs fonctions. Ces derniers ont ensuite été radiés du barreau avec, toutefois, la possibilité de lancer un recours, conformément au décret-loi no 667.

206.La création d’une commission d’enquête pour le Conseil des juges et des procureurs a garanti aux personnes suspendues de leurs fonctions et radiées du barreau la possibilité d’exercer leur droit de pétition et de défense.

207.La suspension est une mesure qui doit être appliquée rapidement en raison de sa nature. Elle a donc été prise en urgence de manière à éviter que les juges et les procureurs fortement soupçonnés d’être affiliés à la FETÖ ou membres avérés de cette organisation, ne perturbent l’ordre constitutionnel. Lorsque des circonstances extraordinaires exigent l’adoption de mesures de protection, la non-application de toutes les garanties prévues à l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ne constitue pas une violation, ainsi qu’en a décidé la Cour européenne des droits de l’homme dans l’affaire Micallef c. Malte (no 17056/06).

208.Les procédures établies ont toutefois été suivies, même dans ces circonstances extraordinaires, par le Conseil des juges et des procureurs qui est une autorité indépendante et impartiale, conformément aux dispositions de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme. Les requérants ont eu la possibilité de se défendre par écrit lors de l’examen de leurs objections. Des commissions constituées au sein du Conseil des juges et des procureurs ont été chargées de procéder à un examen approfondi des pétitions soumises ; les conclusions de cet examen ont été présentées à l’Assemblée générale du Conseil et un dossier disciplinaire a été constitué pour chaque intéressé. Les procédures disciplinaires ont été lancées avant la publication du décret-loi no 667. Après l’entrée en vigueur de ce dernier, il a été jugé inapproprié de maintenir en fonction les juges et les procureurs concernés. Selon la législation nationale, une personne qui ne respecte pas les principes d’impartialité et d’indépendance ne peut pas exercer les fonctions de juge ou de procureur. Les procédures sont donc conformes au principe de sécurité juridique.

209.Les demandes d’adoption de mesures conservatoires déposées auprès de la Cour européenne des droits de l’homme au titre la procédure de renvoi ont, par contre, été jugées irrecevables et ont été rejetées.

210.Bien qu’il ait évalué chaque requête séparément, le Conseil des juges et des procureurs a exposé les raisons des renvois dans une décision unique couvrant tous les dossiers, faisant valoir que les actes qui ont motivé ces renvois avaient été commis de manière concertée. Ni la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme ni le droit administratif n’exigent la formulation de décisions distinctes pour des actes qui sont commis collectivement au sein d’une organisation. C’est le raisonnement suivi pour aboutir à la décision qui importe.

211.Durant les poursuites, un certain nombre des intéressés ont admis leurs liens avec la FETÖ, ont exprimé des remords et ont affirmé qu’ils n’avaient aucun contact avec l’organisation. La présence de ces juges et procureurs au sein du système judiciaire présentait un véritable risque pour l’indépendance et l’impartialité des tribunaux, car ils avaient violé le droit à un procès équitable et continueraient faire obstacle à l’exercice de ce droit. La décision de renvoi prise par le Conseil supérieur des juges et des procureurs sur la base de l’article 3 (par. 1) du décret-loi no 667 a donc été nécessaire au maintien et au renforcement de l’indépendance et de l’impartialité du corps judiciaire.

212.Il est possible de faire appel des décisions de renvoi et de déposer un recours en annulation devant le Conseil d’État en vertu de à la Constitution et des règles juridiques applicables. Des centaines de juges et de procureurs qui avaient fait appel ont été réintégrés dans le cadre de la procédure d’examen administratif du Conseil des juges et des procureurs. Les décisions définitives de révocation prises par ce dernier sont soumises au contrôle juridictionnel du Conseil d’État, qui est la plus haute juridiction administrative.

Recrutement de nouveaux juges et procureurs

213.Après la tentative de coup d’État, 6 785 juges et 4 684 procureurs de juridictions judiciaires et 1 240 juges de juridictions administratives ont été admis à la profession ; 350 d’entre eux sont titulaires d’un master et 6 d’un doctorat. La formation des candidats est assurée par l’École de la magistrature de Türkiye.

214.L’admission à la profession et les promotions ultérieures sont effectuées conformément aux procédures et principes énoncés dans la loi no 2802 sur les juges et les procureurs. L’admission et la promotion des juges et des procureurs ne sont fondées sur aucun critère politique.

Enquêtes ouvertes en 2014

215.En 2014, le Conseil supérieur des juges et des procureurs a ouvert des enquêtes et lancé des procédures disciplinaires contre des membres du corps judiciaire impliqués dans des dossiers controversés comme Ergenekon, Sledgehammer et Oda TV. Avant de prendre ces mesures, il avait reçu de membres de la population ainsi que de divers procureurs des allégations d’application abusive des procédures judiciaires par certains juges et procureurs au profit de la FETÖ, de formation d’une structure parallèle au sein du système judiciaire, d’exécution des décisions du meneur de la FETÖ, et de victimisation de nombreux innocents par suite de l’ouverture de dossiers sur la base d’informations biaisées, sans fondement juridique et sans preuve. La Commission d’inspection du Conseil supérieur des juges et des procureurs a alors identifié un grand nombre de juges et de procureurs qui étaient membres de la FETÖ.

216.Avant la tentative de coup d’État, 1 479 dossiers ont été ouverts par le Conseil supérieur sur des plaintes concernant 2 146 juges et procureurs. De plus, autorisation a été donnée d’ouvrir une enquête contre 989 juges et procureurs.

217.Suite aux enquêtes et procédures disciplinaires diligentées, 2 735 juges et procureurs ont été suspendus après la tentative de coup d’État. C’est pourquoi, contrairement à ce qui est allégué, dans un premier temps les juges et procureurs fortement suspects d’être membres de la FETÖ ou affiliés à cette organisation ont été suspendus par le Conseil supérieur des juges et des procureurs, et n’ont été révoqués qu’après que suffisamment de preuves eurent été réunies contre eux dans le cadre desdites enquêtes et procédures.

218.Comme indiqué précédemment, le Bureau du Procureur général d’Ankara a ouvert d’office une enquête immédiatement après la tentative de coup d’État en vertu de l’article 161 (par. 6) du Code de procédure pénale. L’inspecteur du Conseil a été autorisé à mener une investigation par suite de la décision de la troisième chambre du Conseil des juges et des procureurs en date du 16 juillet 2016. La deuxième chambre du Conseil, qui a évalué le rapport préliminaire de l’inspecteur à cette même date, a temporairement suspendu de leurs fonctions les juges et les procureurs en question, en vertu de l’article 77 de la loi no 2802, de manière à éviter de porter atteinte à la dignité, à la fiabilité et à la crédibilité du corps judiciaire. Les juges et les procureurs dont l’appartenance et l’affiliation à la FETÖ avaient été établies ont été démis de leurs fonctions sur décision unanime de l’Assemblée générale du Conseil supérieur des juges et des procureurs après la promulgation du décret-loi no 667.

Questions relatives au droit à un procès équitable

219.Le Code de procédure pénale comporte des dispositions détaillées sur les droits des personnes faisant l’objet de poursuites. Conformément à ces dispositions, les suspects sont dûment informés de leurs droits ; et ceux qui sollicitent les services d’un avocat privé peuvent faire appel à l’avocat de leur choix, tandis que ceux qui ne veulent pas se prévaloir des services d’un avocat privé bénéficient d’une aide juridictionnelle et des services d’un avocat nommé par le barreau. En vertu de l’article 154 du Code de procédure pénale, tout suspect a le droit, à tout moment, de s’entretenir avec son avocat. Le suspect et son avocat ont accès aux dossiers établis dans le cadre de l’enquête ou des poursuites et peuvent demander à en obtenir un exemplaire. Ils peuvent aussi contester les décisions de garde à vue ou de détention à tout moment.

220.L’accès à la justice est un droit garanti par l’ordonnancement juridique turc. Le Plan d’action pour les droits de l’homme établit d’autres garanties qui ont pour effet de renforcer le droit à un procès équitable.

221.Le 20 mars 2019, Ebru Timtik et Aytaç Ünsal ont été reconnus coupables du délit d’appartenance à l’organisation terroriste armée DHKP/C. Ils ont tous deux fait appel de cette décision et ont commencé une grève de la faim qui s’est transformée en un jeûne jusqu’à la mort. Leur état de santé a fait l’objet d’un suivi attentif et les mesures nécessaires ont été prises, mais les intéressés ont continué de refuser tout examen et traitement médical et n’ont pas répondu à la Cour européenne des droits de l’homme qui leur a demandé de mettre fin à leur grève de la faim et de coopérer avec les autorités médicales. Il convient de noter que le jeûne jusqu’à la mort entrepris par des détenus de leur propre chef ne confère pas à ces derniers le droit d’être libérés, comme le confirme la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Mme Timtik est décédée le 27 août 2020 par suite de son jeune jusqu’à la mort malgré tous les efforts déployés en vue de la convaincre de coopérer avec les autorités médicales. Il importe également d’indiquer que la Cour européenne des droits de l’homme a rejeté la demande présentée par M. Ünsal dans le but d’obtenir une mesure temporaire de libération et n’a pas examiné la demande de Mme Timtik en raison de son décès.

Commission d’enquête sur les mesures prises durant l’état d’urgence

222.Les informations sur les décisions de la Commission d’enquête, qui a été formée en vue d’évaluer les requêtes concernant les actes administratifs exécutés directement en application des décrets-lois adoptés durant l’état d’urgence, sont présentées au paragraphe 64.

223.La Commission d’enquête, dont les décisions font l’objet d’un contrôle juridictionnel, est considérée par la Cour européenne des droits de l’homme comme un recours interne qui doit être épuisé. Dans la décision qu’elle a rendue le 12 juin 2017 dans l’affaire Köksal c. Türkiye (no 70478/16), cette dernière fait valoir que tout plaignant doit d’abord s’adresser à la Commission d’enquête de manière à épuiser les recours internes. Depuis cette décision, la majorité des affaires portées devant la Cour européenne des droits de l’homme ont été considérées comme irrecevables par cette dernière.

Respect de la vie privée − Article 17

224.La loi no 6698 sur la protection des données personnelles est entrée en vigueur le 24 mars 2016. Elle régit le traitement des données personnelles de manière à protéger le droit des particuliers à la vie privée et à assurer le respect des obligations des personnes physiques et morales qui traitent ces données. L’Autorité de protection des données personnelles qui a été créée a pour mission de veiller au respect par les personnes physiques et morales des principes établis par la loi, de statuer sur les plaintes en ce domaine, de tenir le registre des responsables des données et de prendre des mesures réglementaires en la matière.

225.Les procédures d’obtention de données dans le cadre d’enquêtes pénales sont régies par le Code de procédure pénale. En vertu de l’article 135 (par. 1), le juge ou, lorsqu’il est important d’éviter tout délai le procureur, peut décider de localiser, d’écouter ou d’enregistrer les communications par voie téléphonique ou électronique ou d’évaluer les informations sur les signaux du suspect ou de l’accusé, s’il existe de fortes raisons de soupçonner qu’une infraction a été commise et s’il n’y a aucune autre possibilité d’obtenir des éléments de preuve. Le procureur expose immédiatement au juge la mesure prise en vue d’obtenir l’approbation de ce dernier, qui doit prendre une décision dans les vingt-quatre heures qui suivent. À l’issue de ce délai, ou lorsque le juge n’approuve pas la mesure prise, celle-ci est immédiatement levée par le procureur. Les échanges entre le suspect ou l’accusé et les personnes qui peuvent s’abstenir de témoigner en tant que témoins ne peuvent pas être enregistrés. Tout enregistrement effectué avant que ce fait n’ait été établi est immédiatement détruit. La mesure prise peut être appliquée durant une période de deux mois, pouvant être prolongée d’un mois.

226.Le procureur dispose d’un délai de vingt-quatre heures pour demander au juge d’approuver la mesure qu’il a prise, et ce dernier a également vingt-quatre heures pour rendre sa décision. À l’issue de cette période, ou lorsque le juge n’approuve pas la décision, les enregistrements sont immédiatement détruits. En vertu des dispositions du paragraphe 8 de l’article,les dispositions relatives à l’écoute, à l’enregistrement et à l’évaluation des informations transmises ne s’appliquent qu’à des infractions particulières. Nul ne peut écouter et enregistrer les communications effectuées par voie téléphonique ou électronique à moins que conditions établies par les principes et les procédures énoncés dans cet article ne soient remplies.

227.L’écoute et l’enregistrement de conversations téléphoniques, en violation de la liberté de communication et du droit au respect de la vie privée, sont par contre des infractions régies par les articles 132, 133, 134, 135 et 136 du Code pénal lorsque les conditions énoncées dans la loi sont remplies.

Liberté de religion et de croyance − Articles 2, 18, 19, 25 et 26

228.Il n’existe aucune réglementation concernant l’objection de conscience au service militaire, et aucune action visant à abroger l’article 318 du Code pénal n’est menée.

229.La Constitution garantit l’égalité de tous devant la loi sans distinction motivée par la religion ou la secte, ainsi que la liberté de religion et de conscience et le respect des valeurs religieuses. Les textes pertinents établissent un cadre de protection de la liberté de religion et de conscience de vaste portée, qui permet à tous les citoyens de librement exprimer leurs convictions et de pratiquer leur religion.

230.Les droits des citoyens turcs non musulmans sont régis par les articles 37 à 45 du Traité de Lausanne de 1923. Les citoyens turcs non musulmans ont leurs propres lieux de culte, écoles, fondations et hôpitaux ainsi que leurs médias. Ils peuvent librement pratiquer leur religion et organiser des cérémonies religieuses.

231.Divers lieux de culte, dont la grande synagogue d’Edirne (troisième synagogue d’Europe en importance) et l’église bulgare Sveti Stefan (église de fer) d’Istanbul érigée il y a 120 ans, ont été restaurés et rouverts au cours des dernières années. La cérémonie de pose de la première pierre d’une église orthodoxe assyrienne à Istanbul a eu lieu en 2019.

232.Les modifications juridiques adoptées en 2003 et 2008 sur les fondations communautaires ont entraîné de nettes améliorations, notamment ce qui concerne les droits de propriété de ces entités. Elles autorisent ainsi l’inscription au registre des biens immobiliers de ces dernières ou, si cela n’est pas possible, le paiement de leur valeur actuelle aux fondations.

233.Le Plan d’action pour les droits de l’homme comprend des objectifs et des actions visant à protéger la liberté de religion et de conscience, à remédier aux problèmes des communautés non musulmanes et à assurer la poursuite des activités des fondations et des représentants de ces communautés.

234.Les mesures administratives appliquées à trois personnes de religion protestante ainsi que les questions relatives aux lieux de culte et à la propriété ont déjà été exposées dans la réponse du Gouvernement à la communication conjointe des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme (AL TUR 14/2020).

Défenseurs des droits de l’homme − Articles 6, 17, 19, 20, 21, 22 et 26

235.Nul n’est autorisé à commettre un crime dans une démocratie régie par l’état de droit. Il s’ensuit que les personnes considérées comme des militants des droits de l’homme peuvent faire l’objet d’enquêtes ou de poursuites au titre d’infractions pénales commises à titre individuel ou dans le cadre d’une organisation. La Türkiye n’enquête pas et n’engage pas de poursuites uniquement parce qu’une personne participe à des activités de défense des droits de l’homme.

236.Des informations détaillées concernant les personnes mentionnées précédemment ont déjà été fournies dans les réponses du Gouvernement aux communications pertinentes des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme. Les procédures judiciaires engagées contre ces personnes sont menées par un corps judiciaire indépendant et impartial. Durant le déroulement de leur procès, les intéressés peuvent exercer tous les droits reconnus par la loi, y compris le droit d’exercer les recours en justice garantis par l’article 14 du Pacte ainsi que par le Code pénal et la Cour européenne des droits de l’homme.

237.Les satisfactions équitables accordées par la Cour européenne des droits de l’homme sont versées dans les trois mois suivant la date de la décision finale prise par la Cour conformément à ses règles.

238.Les arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme sont également acceptés en droit interne pour justifier la tenue d’un nouveau procès dans les affaires pénales (art. 311 à 323 du Code de procédure pénale ) et dans les affaires civiles (art. 374 à 381 du Code de procédure civile). Lorsque la Cour européenne des droits de l’homme établit, dans un arrêt, que la condamnation pénale viole les dispositions de la Convention européenne des droits de l’homme ou de ses protocoles, l’article 311 du Code de procédure pénale autorise la demande en révision du jugement rendu en matière pénale dans un délai d’un an à compter de la date de l’arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme.

239.La Constitution dispose à l’article9 que le pouvoir judiciaire est exercé par des tribunaux indépendants et impartiaux au nom de la nation turque et, à l’article138, que les juges exercent leurs fonctions en toute indépendance. Ces derniers statuent conformément à la Constitution, aux lois et à leur conviction personnelle dans le respect de la loi. Aucun organe, autorité, bureau ou individu ne peut donner d’ordre ou d’instruction aux tribunaux ou aux juges concernant l’exercice du pouvoir judiciaire, leur transmettre des circulaires ou leur faire des recommandations ou des suggestions. L’application des arrêts de la Cour européenne des droits de l’homme est donc évaluée par un corps judiciaire indépendant et impartial.

Liberté d’expression, de réunion pacifique et d’association − Articles 19, 21 et 22

240.La liberté d’expression est garantie par la Constitution (art. 26) et d’autres instruments juridiques pertinents. Ce droit n’est pas absolu et peut faire l’objet de restrictions conformément aux dispositions du Pacte et de la Convention européenne des droits de l’homme et à la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme. Les tribunaux turcs rendent leurs verdicts en tenant compte des restrictions spécifiées dans les conventions internationales et dans la Constitution.

241.D’importantes modifications ont été apportées aux articles 6 et 7 de la loi antiterroriste de manière à assurer sa conformité aux normes de la Cour européenne des droits de l’homme et à renforcer la liberté d’expression, comme indiqué au paragraphe 78.

242.Les dispositions incorporées dans l’article 286 du Code de procédure pénale par la loi no 7188 du 17 octobre 2019 visent à prévenir les violations du droit en permettant de faire recours contre les décisions rendues au titre de certaines infractions considérées comme directement liées à la liberté d’expression et contre lesquelles il n’est pas possible de faire appel. Des infractions consistant, notamment, à proférer des insultes, à insulter le Président, à faire des menaces dans le but de susciter la peur et la panique au sein de la population, à inciter à commettre des infractions, à faire l’éloge de ces dernières, à provoquer la haine et l’hostilité au sein de la population, à humilier autrui, à encourager la désobéissance de la loi, à dégrader les symboles de la souveraineté de l’État et la nation turque, la République de Türkiye et les institutions et organes de l’État, de même que les forces armées, et à détourner le public du service militaire ont été inclus dans le Code.

Loi no 5651

243.La loi no 5651 sur la réglementation des informations publiées sur Internet et la lutte contre les infractions commises sur la base de ces informations, qui est entrée en vigueur le 23 mai 2007, a été promulguée dans le but de combattre un certain nombre d’infractions couvertes par le Code pénal, à savoir l’incitation au suicide, les abus sexuels sur enfants, la facilitation de la consommation de drogues ou de stimulants, l’obtention de substances nocives pour la santé, les obscénités, la prostitution, l’organisation d’un site ou d’un établissement pour les jeux d’argent et les infractions énumérées dans la loi no 5816 sur les crimes commis contre Atatürk.

244.Les articles concernant la violation des droits de la personne et le droit à la vie privée ont été modifiés en 2014. D’autres modifications ont été adoptées en 2015, qui ont permis de clairement définir les motifs d’exception énoncés aux articles 22 et 26 de la Constitution concernant la liberté de communication, à l’article 19 du Pacte et à l’article 10 de la Convention européenne des droits de l’homme. Les motifs en question couvrent également la protection de la sécurité nationale et de l’ordre public, la protection de la vie et de la propriété, la protection de la santé publique et la prévention de la criminalité lorsqu’il n’est pas possible de surseoir. Les modifications effectuées visent à permettre de prendre rapidement des mesures de protection contre les violations susceptibles de se manifester rapidement sur Internet, sur la base d’un ou de plusieurs motifs de protection de la sécurité nationale et de l’ordre public.

245.L’Agence des technologies de l’information et de la communication prend aussi des décisions administratives concernant la suppression de contenus et le blocage de l’accès à des pages Internet lorsque la présidence de la République ou les ministères intéressés le demandent officiellement. Le président de l’Agence doit soumettre dans un délai de vingt‑quatre heures sa décision à un juge qui doit statuer en la matière dans les quarante‑huit heures qui suivent, la décision administrative étant automatiquement révoquée si ces délais ne sont pas respectés. Toute personne ou entité concernée par une mesure de cette nature peut faire appel des décisions du tribunal ou de l’Agence. Comme indiqué précédemment, des décisions administratives portant sur des pages Internet n’ont été prises et soumises à l’approbation de juges que dans des circonstances exceptionnelles prévues par la loi et ont toutes fait l’objet d’un contrôle juridictionnel.

Propos en ligne

246.La loi no 5651 vise à lutter contre les contenus illégaux affichés sur Internet qui ne peuvent pas faire l’objet de restrictions systématiques. La procédure consiste à informer le prestataire de services pour qu’il supprime les contenus. Si le fournisseur de contenu ou l’entité hôte ne s’acquitte pas de ses responsabilités en la matière, une mesure administrative visant l’adresse Web de la page considérée est prise. S’il n’est pas possible d’appliquer cette mesure pour des raisons techniques, il peut être décidé en dernier recours de bloquer l’accès à l’intégralité du site Web. Cette procédure est compatible avec les dispositions de la Constitution et du Pacte.

247.Les entreprises de médias sociaux sont tenues de mettre en place des mécanismes efficaces de règlement des plaintes motivées par l’existence de faux comptes, la prise de contrôle d’un compte, la violation des droits de la personne et/ou de la vie privée et des contenus inappropriés. La réticence dont elles peuvent faire preuve lorsqu’il s’agit de répondre aux plaintes des utilisateurs concernant des contenus qui violent manifestement leurs propres politiques oblige les utilisateurs à s’adresser aux autorités publiques et judiciaires pertinentes. Il est sans cesse rappelé aux représentants de ces entreprises que les tribunaux et les institutions connexes sont tenus d’intervenir si les plaintes des utilisateurs ne sont pas réglées en bonne et due forme. Lorsque les entreprises ne remédient pas aux plaintes des utilisateurs en temps opportun, ces dernières sont portées devant les tribunaux ou les autorités compétentes et peuvent alors être considérées comme des requêtes du Gouvernement.

Procédure applicable aux organes de presse fermés après la tentative de coup d’État et la confiscation de leurs biens

248.La liberté des médias est garantie par la Constitution et les lois pertinentes. La Türkiye a une communauté de médias active et pluraliste qui opère dans le respect des normes internationales.

249.Après la tentative de coup d’État du 15 juillet 2016, 62 fournisseurs de services de médias privés ont été fermés en vertu des décrets-lois nos 668, 675, 677, 683, 693, 697 et 701 adoptés durant l’état d’urgence et des décisions de la Commission d’enquête sur les mesures prises pendant l’état d’urgence établie en application du décret-loi no 668 ; 10 de ces entités ont bénéficié d’une levée de cette décision et ont été retirées de la liste des entités devant être fermées.

250.Le Fonds d’assurance des dépôts d’épargne est chargé de céder et de liquider les biens mobiliers et les droits de diffusion des institutions et organisations des médias en sa qualité de fidéicommissaire des entités qui ont été fermées en raison de leur appartenance ou de leur affiliation à des organisations terroristes ou encore des liens qu’elles entretenaient avec ces dernières.

251.Le transfert et l’enregistrement par le Fonds d’assurance des licences, droits et permis de radiodiffusion qui doivent être vendus en application du décret-loi n  687, sont évalués et effectués par le Conseil supérieur de la Radio-télévision.

252.Le Conseil administre les procédures concernant les demandes soumises à la Commission d’enquête, et acceptées par celle-ci, en vue de la réouverture des organisations, le recouvrement de leurs actifs et l’obtention d’une indemnisation.

Réclamations concernant les chaînes supprimées par les fournisseurs privés de services par satellite

253.Les contrats de services radio et télévision par câble ou par satellite sont conclus entre les fournisseurs de services de médias et les opérateurs de plateformes de transmission. Le Conseil supérieur de la radio-télévision, qui est l’institution de réglementation et de supervision, n’est pas une autorité statutaire.

254.Les cartes de presse sont délivrées conformément au règlement y relatif, sans aucune discrimination entre les journalistes. La procédure d’annulation d’une carte de presse est menée conformément à ce règlement, pour des raisons techniques ou incontournables telles que la cessation d’activité, la fermeture de l’institution, l’expiration de la période de validité de la carte, la modification des informations sur la base de laquelle la carte est établie, la demande de remplacement d’une carte en mauvais état, le changement de titre, le départ à la retraite ou le décès du titulaire. L’annulation d’une carte ne signifie pas que son titulaire ne peut pas en obtenir une autre. De fait, dès lors que les problèmes sont éliminés ou que l’intéressé remplit de nouveau les conditions nécessaires, sa demande fait l’objet d’une évaluation positive et une nouvelle carte de presse lui est délivrée. Les journalistes titulaires d’une carte de presse peuvent poursuivre des activités rentrant dans le cadre de leur profession et, notamment, participer à des conférences de presse ou assister à des réunions de la Grande Assemblée nationale.

Réunions et manifestations

255.La liberté de réunion pacifique est un droit démocratique garanti par la Constitution (art. 34) et la législation interne pertinente. Chacun a le droit d’organiser des réunions et des rencontres pacifiques de personnes non armées sans obtenir une autorisation au préalable. Les assemblées et manifestations pacifiques organisées conformément à la loi se sont déroulées sans aucune ingérence.

256.La loi no 2911 sur les réunions et les manifestations précise sous quelles formes, dans quelles conditions et selon quelles procédures ce droit peut être exercé, ainsi que le lieu, l’heure, les modalités et les conditions des réunions et des manifestations organisées par des personnes physiques et morales, les devoirs et les responsabilités du comité d’organisation, les motifs d’interdiction et de report par l’autorité compétente, les devoirs et les pouvoirs des forces de sécurité, ainsi que les interdictions et les dispositions pénales.

257.Tout individu ou groupe peut, sans discrimination, exercer son droit de tenir des réunions et d’organiser des manifestations pacifiques dans un environnement sûr et en toute liberté, dans le respect du droit interne et de la législation internationale applicables. Aucune restriction autre que celles prévues par la loi (sécurité nationale, ordre public, prévention de la criminalité, protection de la santé et de la moralité publiques ou des droits et libertés d’autrui) ne peut être imposée.

258.Lorsqu’un problème survient, l’on tente avant tout de le résoudre par la négociation et une communiquer efficace avec les manifestants. Les forces de sécurité n’interviennent qu’en dernier recours, dans les limites de la légalité.

259.Comme toutes les organisations policières modernes, les forces de l’ordre emploient des lanceurs de gaz lacrymogènes, des pistolets électriques et les munitions correspondantes dans le respect du principe de proportionnalité et uniquement en dernier recours, lorsque des manifestations et des activités sont illégales ou le deviennent. Les agents de police reçoivent une formation sur la manière d’utiliser les gaz lacrymogènes, les lanceurs de gaz lacrymogènes et les pistolets électriques ainsi que les matériels et munitions connexes.

260.Au cours des cinq dernières années, plus de 99 % des manifestations et activités regroupant un grand nombre de personnes organisées en Türkiye se sont déroulées de manière pacifique et n’ont donné lieu à aucune intervention. Les chiffres concernant les manifestations et le taux d’intervention figurent dans le tableau ci-après.

Année

Manifestations/activités

Manifestants /participants

Taux d’intervention

2016

40 016

43 900 170

2 %

2017

38 976

25 277 339

0,8%

2018

46 389

31 036 329

0,8%

2019

53 118

32 553 402

0,7%

2020

33 609

5 452 212

0,8%

2021

46 555

10 016 895

0,6%

261.Durant l’état d’urgence, les mesures de sécurité ont été appliquées de manière très prudente pour que les citoyens puissent exercer leur droit de tenir des réunions et d’organiser des rassemblements. Les manifestations et les rassemblements de masse organisés légalement ont été autorisés sans aucune restriction. Au 19 juillet 2018, date à laquelle l’état d’urgence a été levé, 79 812 manifestations et autres rassemblements auxquels avaient participé 500 919 personnes avaient été organisés dans le pays. Les forces de sécurité étaient intervenues dans 819 manifestations ou activités illégales et des poursuites judiciaires avaient été engagées contre 4 442 personnes. En d’autres termes, la proportion des manifestations et rassemblements de masse ayant fait l’objet d’une intervention par rapport à ceux qui se sont déroulés sans aucune intervention était de 1 %.

262.Le nombre total de manifestations et de rassemblements a diminué de 9,58 % durant l’état d’urgence, tandis que le nombre de manifestants et participants a augmenté de 45,32 %. Durant cette période, le nombre de tentatives d’organisation de manifestations ou de rassemblements illégaux a diminué de 72,60 %, le nombre d’événements qui ont donné lieu à des interventions a diminué de 70,62 % et celui des personnes appréhendées a diminué de 59,68 %. Ces chiffres montrent que les citoyens ont eu la possibilité d’exercer leurs droits de tenir des réunions et d’organiser des manifestations sans aucune restriction.

Marche des fiertés organisée par les groupes de personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres et intersexes (LGBTI)

263.Des mesures de sécurité sont appliquées avec précision avant, pendant et après les réunions et les rassemblements, quelle que soit l’identité des manifestants ou des participants. Les membres des groupes LGBTI ont le droit d’organiser des réunions et des manifestations sans aucune restriction, à condition de respecter la loi.

264.Les groupes LGBTI ont demandé l’autorisation d’organiser chaque année, la dernière semaine de juin, la Marche des fiertés sur l’avenue Istiklal, dans le quartier de Beyoglu d’Istanbul. L’avenue Istiklal, qui est l’artère la plus centrale et la plus fréquentée d’Istanbul ainsi que le site touristique le plus visité de la ville, est empruntée par des centaines de milliers de piétons, turcs ou étrangers, à toute heure de la journée et, en moyenne, par plus de deux millions de piétons par jour. De ce fait, elle ne peut pas être un lieu de réunion ni un itinéraire de manifestation, car cela perturberait considérablement et de façon inacceptable la vie quotidienne, empêcherait la poursuite d’activités courantes et aurait des répercussions négatives sur un grand nombre de commerces.

265.Les allégations selon lesquelles certains groupes, LGBTI et autres, n’ont pas pu exercer leur droit constitutionnel d’organiser des réunions et des manifestations ne sont pas fondées. Selon une analyse des événements organisés entre 2015 et 2022, 22 984 personnes ont participé à 170 manifestations ou rassemblements organisés par les membres des groupes LGBTI. Des poursuites judiciaires n’ont été engagées qu’à l’encontre de 303 de ces personnes, qui avaient participé à des manifestations ou à des rassemblements illégaux.

Mères du samedi

266.Le Gouvernement a déjà abordé le sujet de la manifestation que ce groupe a tenté d’organiser le 25 août 2018 sur la place Galatasaray dans sa réponse à la communication conjointe des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme (AL TUR 7/2021).

267.Le groupe des Mères du samedi n’a pas été interdit et, jusqu’à la pandémie de COVID‑2019, a continué d’organiser des manifestations régulières réunissant quelque 80 personnes devant le bâtiment de l’Association des droits de l’homme, sans aucune intervention ou restriction. Les communiqués de presse publiés dans ce bâtiment ont été diffusés sur les médias sociaux à partir du 21 mars 2020 (782e semaine) en raison de la pandémie, et ce rassemblement régulier a eu lieu pour la 896e fois le 30 mai 2022.

Activités organisées en vue de célébrer la Journée internationale des femmes

268.Les activités organisées le 8 mars en vue de célébrer la Journée internationale des femmes se déroulent de manière démocratique et libre, ainsi que le garantit la Constitution ; les auteurs d’actions illégales font l’objet de poursuites judiciaires.

269.Selon une analyse des actions organisées au cours des cinq dernières années, 329 767 personnes ont participé à 1 894 activités, et des procédures judiciaires ont été engagées à l’encontre de 96 personnes au titre de sept actions illégales. En 2022, 61 197 personnes ont participé à 614 activités, et des procédures judiciaires ont été engagées à l’encontre de 97 personnes impliquées dans huit actions illégales.

Institutions fermées pendant l’état d’urgence et activités de la Commission d’enquête sur les mesures prises durant l’état d’urgence

270.Les informations relatives aux examens et aux décisions de la Commission d’enquête qui a été constituée dans le but d’examiner les mesures prises en application des décrets-lois adoptés durant l’état d’urgence et les requêtes présentées en opposition à ces mesures, figurent aux paragraphes 64 et 223 du présent rapport.

271.De plus amples informations sur d’autres points sont données aux paragraphes 119 et suivants, ainsi qu’aux paragraphes 222 et 223 de ce rapport.

Dispositions de la loi no 7262 concernant la liberté d’association

272.Des informations sur la loi no 7262 ont déjà été présentées par le Gouvernement dans sa réponse à la communication conjointe des procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme (OL TUR 3/2021) et aux paragraphes 80 et 81 du présent rapport.

Droit de participer à la conduite des affaires publiques − Articles 2, 3, 19, 21, 25 et 26

273.Conformément à l’article 83 (par. 2) de la Constitution et aux articles 131 à 134 du Règlement intérieur de la Grande Assemblée nationale, l’immunité parlementaire d’un député suspecté d’avoir commis une infraction peut être levée exclusivement aux fins du traitement du dossier ou de l’enquête en cours, par une décision de la Grande Assemblée nationale à moins qu’une modification ne soit apportée à la Constitution par la voie législative. Le pouvoir de lever l’immunité parlementaire appartient exclusivement à la Grande Assemblée nationale.

274.La levée de l’immunité parlementaire de ces députés, dont le dossier est examiné par les autorités compétentes à la date spécifiée dans l’article 20 (par. 1) incorporé à titre provisoire, à la majorité qualifiée, dans la Constitution en vertu de la loi no 6718 du 20 mai 2016, ne viole pas les articles 2, 3, 19, 21, 25 et 26 du Pacte. L’article en question n’a pas un objectif particulier ou différent.

275.L’information relative à la décision judiciaire prise à titre définitif au sujet d’Ömer Faruk Gergerlioğlu, député de Kocaeli, qui a été présentée au Bureau du Président le 11 mars 2021 conformément à l’article 84 (par. 2) de la Constitution, a été communiquée à l’Assemblée plénière lors de sa soixantième session, le 17 mars 2021. Ce député a été déchu de son mandat en application du même paragraphe. Il a toutefois été rétabli dans ses fonctions le 16 juillet 2021, la Cour constitutionnelle ayant décidé qu’une violation avait été commise sur la base de sa requête.

Modifications juridiques concernant les élections

276.Par suite des modifications apportées à la Constitution en 2017, le nombre des députés a été porté à 600, l’âge auquel une personne peut poser sa candidature a été abaissé à 18 ans, et les élections à la Grande Assemblée nationale et à la présidence de la République ont désormais lieu le même jour, tous les cinq ans. Les conditions régissant la nomination des candidats à la présidence ont été assouplies de manière à renforcer le processus de participation démocratique et l’influence des partis politiques. L’obligation pour le Président de la République, qui est directement élu par la population et est fondamentalement une personnalité politique, de résilier son adhésion à un parti, a été révoquée. Le Président de la République, seul, ou la Grande Assemblée nationale, à la majorité des trois cinquièmes de ses membres, peut apporter des modifications au calendrier électoral afin d’éliminer les goulets d’étranglement existant lors du renouvellement des mandats. Il a ainsi été décidé que les élections présidentielle et parlementaires auraient lieu en même temps en cas de tenue de nouvelles élections, afin d’établir un système de contre-pouvoirs. Il a en outre été décrété que le Président de la République ne pouvait exercer que deux mandats ; toutefois, si la Grande Assemblée nationale décidait de tenir de nouvelles élections durant le deuxième mandat du Président de la République, celui-ci pourrait de nouveau se porter candidat.

277.La loi no 2839 a été modifiée de manière à permettre aux partis politiques éligibles de participer aux élections en forgeant des alliances. Une modification a de ce fait été apportée à la loi no 2820 sur les partis politiques, qui a pour effet de lever l’interdiction faite à tout parti politique de soutenir d’autres partis politiques dans le cadre des élections.

278.La loi no 7102 du 13 mars 2018 impose de nouvelles règles ayant pour objet d’assurer la bonne exécution de la procédure de vote, notamment en permettant aux électeurs alités de voter à leur domicile, et le respect des principes régissant le déroulement du scrutin dans les bureaux de vote.

279.La période de vote a été prolongée pour les électeurs résidant à l’étranger. La loi no 298 a été modifiée de manière à permettre aux partis politiques et aux candidats de mener leurs campagnes dans des dialectes et des langues autres que le turc.

280.La loi no 7393 entrée en vigueur le 6 avril 2022, portant modification de la loi électorale, a abaissé de 10 à 7 % le seuil d’éligibilité aux élections générales afin d’assurer une plus large représentation de la société et des partis politiques à l’Assemblée.

Décisions et procédure de plainte du Conseil électoral supérieur

281.Le droit électoral comporte des dispositions concernant l’examen des objections soulevées et des plaintes déposées pendant la période couverte par le calendrier électoral, le jour du vote et après celui-ci. Les articles 110 à 132 de la loi no 298 comprennent des dispositions sur les objections visant les procédures électorales.

282.En vertu de l’article 79 de la Constitution, le Conseil électoral supérieur considère que des irrégularités peuvent se produire et évalue les objections formulées. Par conséquent, conformément à l’article 130 de la loi no 298 si, après l’établissement de la liste des candidats, il s’avère que l’un quelconque de ceux-ci n’est pas un citoyen turc, qu’il n’a pas l’âge minimum légal, qu’il est analphabète ou qu’il a été condamné pour des infractions qui lui interdisent de se présenter à une élection, les faits en question rendent ce dernier inéligible, ou invalident le certificat électoral ou le résultat de l’élection. Le Conseil électoral supérieur peut examiner les plaintes et les objections concernant les faits en question et prendre une décision en la matière à tout moment, au motif d’irrégularité.

Élections organisées durant l’état d’urgence

283.Par suite du référendum sur les modifications devant être apportées à la Constitution en 2017, la loi no 6771 sur la modification de la Constitution de la République de Türkiye, adoptée en séance plénière par la Grande Assemblée nationale le 21 janvier 2017, a été publiée au Journal officiel du 11 février 2017. L’article 2 de la loi no 3376 relative au référendum sur les amendements constitutionnels dispose qu’un tel référendum doit être organisé le premier dimanche tombant soixante jours après la publication des amendements au Journal officiel. Le référendum a eu lieu le dimanche 16 avril 2017, conformément à ces dispositions.

284.S’agissant des élections présidentielles et des élections parlementaires générales de la 27e législature qui ont eu lieu en 2018, la décision no 1183 adoptée par en séance plénière par la Grande Assemblée nationale lors de sa quatre-vingt-neuvième session le 20 avril 2018, prescrivant la tenue de nouvelles élections parlementaires le dimanche 24 juillet 2018, a été publiée au Journal officiel. L’élection présidentielle et les élections parlementaires générales de la 27e législature ont eu lieu le 24 juin 2018 conformément à cette décision de la Grande Assemblée nationale.

285.L’article 127 (par. 3) de la Constitution dispose que les élections des administrations locales doivent avoir lieu tous les cinq ans. Ces élections se sont déroulées le dimanche 31 mars 2019 (après la levée de l’état d’urgence) conformément à la Constitution et à la loi no 2972.

Campagnes menées dans les médias

286.Les procédures et principes devant être respectés de manière à promouvoir des élections démocratiques pendant la période électorale, qui va du début de la campagne jusqu’au jour du scrutin, sont réglementés par les lois pertinentes. Le Conseil électoral supérieur a pris toutes les mesures nécessaires pour créer un cadre permettant aux partis politiques et aux candidats indépendants, avant le jour du scrutin, de se présenter aux électeurs dans le respect de la liberté, de la légalité et de l’indépendance, et de se démarquer des autres partis politiques et candidats indépendants en exposant leurs programmes et leurs projets. Toutes les objections concernant l’interdiction de la propagande durant la période couverte par le calendrier électoral et les violations des règles électorales durant les campagnes ont été examinées, après quoi les commissions électorales de province et de district et par le Conseil électoral supérieur ont pris des décisions finales.

Élections locales de 2019

287.À la suite des élections locales de 2019, le Conseil électoral supérieur a annulé les résultats des élections aux postes de maire tenues dans le village de Kesmetepe (district de Besni dans la province d’Adıyaman), dans le district de Yusufeli (province d’Artvin), dans le district de Honaz ( province de Denizli), dans le district de Keskin (province de Kırıkkale) et dans la municipalité métropolitaine d’Istanbul, en raison d’objections susceptibles d’avoir des répercussions sur les résultats, et a décidé d’organiser de nouvelles élections dans ces localités.

288.Les détenus peuvent se présenter à des élections en vertu du droit électoral. Leur participation à la campagne électorale est toutefois limitée en raison de leur détention. Le droit électoral ne comporte pas de dispositions distinctes pour les campagnes électorales et les messages des candidats en détention.

289.La commission électorale provinciale statue sur les objections qui peuvent être soulevées contre des candidats pour cause de non-respect des critères de candidature ou de désaccord en la matière, et le Conseil électoral supérieur statue sur les objections soulevées contre les candidats au poste de maire dans les municipalités métropolitaines conformément à l’article 15 de la loi no 2972 et de l’article 125 de la loi no 298. Après que la liste des candidats aux élections administratives générales locales ait été établie, il s’est avéré que certaines personnes élues au poste de maire avaient été démises de manière permanente de leurs fonctions de membres du service public en application d’un décret-loi par suite des objections formulées dans les délais prescrits à l’article 130 de la loi no 298 ou des demandes d’avis soumises par les commissions électorales de district ; les postes de maire ont de ce fait été attribués aux candidats arrivés en deuxième position.

290.Conformément aux décisions prises par le Conseil électoral supérieur au titre des objections ou des demandes d’avis, l’élection des personnes démises de leurs fonctions de membres du service public n’a pas été certifiée, non pas parce qu’elles n’étaient pas éligibles à se porter candidates, mais parce qu’elles ne pouvaient plus être employées dans le secteur public et, par conséquent, ne pouvaient pas occuper le poste de maire. Le Conseil électoral supérieur a donc décidé, en appliquant mutatis mutandis l’article 16 de la loi no 2972 et conformément à l’article 2 de la loi no 2972, que la personne arrivée en deuxième position serait considérée comme élue selon le système de scrutin majoritaire.