Nations Unies

CERD/C/KHM/CO/14-17

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

30 janvier 2020

Français

Original : anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport du Cambodge valant quatorzième à dix-septième rapports périodiques *

1.Le Comité a examiné le rapport du Cambodge valant quatorzième à dix-septième rapports périodiques (CERD/C/KHM/14-17), à ses 2780e et 2781e séances (CERD/C/SR.2780 et CERD/C/SR.2781), les 28 et 29 novembre 2019. À sa 2794e séance, le 9 décembre 2019, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie valant quatorzième à dix-septième rapports périodiques, mais regrette qu’il ait été soumis avec six ans de retard. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec l’importante délégation de haut niveau de l’État partie. Il tient à remercier la délégation des renseignements fournis durant l’examen du rapport et des informations complémentaires soumises ensuite par écrit.

B.Aspects positifs

3.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification de la Convention relative aux droits des personnes handicapées, le 20 décembre 2012, et l’adhésion à la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le 27 juin 2013.

4.Le Comité salue les mesures législatives et générales ci-après prises par l’État partie :

a)L’adoption du Plan d’action national visant à prévenir la violence contre les femmes (2019-2023) ;

b)L’adoption du Plan stratégique pour l’éducation (2014-2018) et du Plan stratégique pour l’éducation (2019-2023);

c)L’adoption du Plan d’action national pour l’enseignement multilingue (2015‑2018) et du Plan d’action national pour l’enseignement multilingue (2019-2023) ;

d)L’ajout des articles 128 et 130 de la Constitution dont les dispositions prévoient que le pouvoir judiciaire est un pouvoir indépendant qui ne peut pas être exercé par les pouvoirs législatif et exécutif ;

e)La délivrance, jusqu’à mai 2018, de titres fonciers communaux à 24 communautés autochtones ;

f)La réinstallation progressive des personnes d’origine vietnamienne sur des terres appropriées dans la province de Kampong Chhnang, conformément à un plan visant à réinstaller sur des terres toutes les communautés vivant dans des villages flottants.

C.Préoccupations et recommandations

Données statistiques

5.Le Comité prend note des données que l’État partie a fournies sur certains groupes ethniques dans son rapport et au cours du dialogue. Il regrette toutefois que ces données ne contiennent pas d’indicateurs tels que les années de référence et ne soient pas suffisamment complètes pour constituer une base empirique permettant d’évaluer dans quelle mesure les groupes ethniques et les peuples autochtones jouissent, dans des conditions d’égalité, des droits consacrés par la Convention (art. 1er et 5).

6. Rappelant les directives pour l’établissement de rapports au titre de la Convention (CERD/C/2007/1), le Comité recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des données ventilées sur la composition ethnique de la population, y compris les peuples autochtones, les réfugiés et les demandeurs d’asile, ainsi que des statistiques sur l’exercice des droits économiques, sociaux et culturels, ventilées par groupe ethnique, afin qu’il dispose d’une base empirique permettant d’évaluer la jouissance, dans des conditions d’égalité, des droits consacrés par la Convention.

Institution nationale des droits de l’homme

7.Tout en prenant note des informations fournies par l’État partie concernant le projet de loi sur la création d’une institution nationale des droits de l’homme qui pourra être consulté en 2020, le Comité demeure préoccupé par le fait que, malgré les engagements pris par l’État partie et les efforts déployés par la société civile pour élaborer un tel projet de loi, aucune institution nationale indépendante n’a encore été créée (art. 2).

8. Le Comité recommande à l’État partie d’accélérer la création d’une institution nationale des droits de l’homme indépendante qui soit conforme aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris), en consultant pleinement les organisations de la société civile et les acteurs concernés.

Définition de la discrimination raciale

9.Le Comité est préoccupé par le fait que l’article 31 de la Constitution et les articles 265 à 270 du Code pénal n’interdisent pas tous les motifs de discrimination raciale, tels que la couleur et l’ascendance, énoncés à l’article premier de la Convention (art. 1er).

10. Rappelant sa recommandation générale n o  14 (1993) concernant le paragraphe 1 de l’article premier de la Convention, le Comité recommande à l’État partie de mettre les articles susmentionnés de la Constitution et du Code pénal en conformité avec l’article premier de la Convention.

Législation interdisant la discrimination raciale

11.Tout en se félicitant que le Gouvernement envisage d’élaborer une loi visant expressément la discrimination raciale dans son programme juridique, le Comité regrette l’absence actuelle de dispositions législatives interdisant la discrimination dans l’État partie (art. 1er, 2 et 4).

12. Le Comité recommande à l’État partie d’adopter dans les meilleurs délais une loi complète définissant et interdisant la discrimination raciale directe et indirecte fondée sur l’un quelconque des motifs interdits, conformément à l’article premier de la Convention, et d’élaborer un plan d’action national contre la discrimination raciale.

Discours de haine et infractions motivées par la haine

13.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas fourni d’informations complètes sur les discours de haine et il est préoccupé par les informations selon lesquelles les discours de haine envers des groupes minoritaires tels que les personnes d’origine vietnamienne persistent. Il regrette également l’absence d’informations complètes sur l’adoption de dispositions juridiques interdisant les infractions motivées par la haine et les discours de haine, ainsi que sur leur application et leurs effets (art. 4).

14.Rappelant ses recommandations générales n o  7 (1985) concernant l’application de l’article 4 de la Convention, n o  8 (1990) concernant l’interprétation et l’application des paragraphes 1 et 4 de l’article premier de la Convention, n o  15 (1993) concernant l’article 4 de la Convention et n o  35 (2013) sur la lutte contre les discours de haine raciale, le Comité demande à nouveau instamment à l’État partie d’empêcher les discours de haine et de veiller à ce que les dispositions interdisant les infractions motivées par la haine et les discours de haine soient conformes à l’article 4 de la Convention. Il recommande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés concernant l’adoption de dispositions législatives sur les discours de haine et les infractions motivées par la haine qui soient conformes à l’article 4, ainsi que leur application et leurs effets.

Application de la Convention au niveau national

15.Le Comité regrette l’absence d’informations précises concernant l’application de la Convention et regrette en outre l’absence d’exemples de décisions judiciaires fondées sur les droits garantis par la Convention (art. 6).

16. Le Comité recommande à l’État partie de donner des exemples de cas portant sur la mise en œuvre des droits consacrés par la Convention − tels que des décisions judiciaires fondées sur ces droits − dans son prochain rapport périodique.

Plaintes pour discrimination raciale

17.Le Comité regrette l’absence d’informations et de données complètes sur les plaintes pour discrimination raciale déposées dans l’État partie et sur leur issue (art. 6 et 7).

18.Le Comité rappelle à l’État partie qu’un faible nombre de plaintes ne signifie pas nécessairement qu’il n’existe pas de discrimination raciale dans le pays, mais plutôt qu’il existe peut-être des obstacles à l’invocation devant les tribunaux nationaux des droits consacrés par la Convention, obstacles tels que le manque de sensibilisation du public à ces droits ou aux voies de recours judiciaires disponibles. Rappelant sa recommandation générale n o  31 (2005) concernant la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations sur les cas de discrimination raciale et sur leur issue, ainsi que sur les cas où la Convention a été invoquée devant les tribunaux nationaux, notamment des statistiques indiquant le nombre et la nature des plaintes pour discrimination raciale et le nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées, ventilées par âge, sexe, origine ethnique ou nationale des victimes, et des informations sur les indemnités accordées aux victimes. Le Comité recommande à l’État partie de mener des campagnes d’information sur les droits consacrés par la Convention et sur la manière de porter plainte pour discrimination raciale.

Indépendance du pouvoir judiciaire

19.Le Comité prend note des efforts que l’État partie a déployés pour garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire et des données fournies sur les poursuites engagées contre les juges et les avocats pour corruption. Il est cependant préoccupé par le fait que la corruption persiste au sein de l’appareil judiciaire, ce qui a des effets sur la possibilité pour les minorités et les groupes vulnérables d’accéder à la justice. Le Comité est également profondément préoccupé par les informations selon lesquelles le pouvoir exécutif peut avoir recours à l’appareil judiciaire pour réduire au silence les défenseurs des droits de l’homme, y compris les défenseurs des droits des minorités (art. 5 et 6).

20. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour prévenir la corruption, notamment au sein de l’appareil judiciaire, et de veiller à ce que les actes de corruption commis par des particuliers à tous les niveaux fassent l’objet d’enquêtes et de poursuites. Il recommande à l’État partie de prendre des mesures pour garantir pleinement l’indépendance et l’impartialité du pouvoir judiciaire dans la loi et dans la pratique, et pour empêcher que celui-ci soit utilisé de manière abusive dans le but de réprimer les défenseurs des droits de l’homme, notamment les défenseurs des droits des minorités.

Accès à la justice

21.Le Comité se félicite de l’accroissement du budget national de l’aide juridictionnelle et de l’augmentation du nombre de personnes défavorisées bénéficiant de ce type d’aide mais il est préoccupé par les obstacles qui entravent l’accès des minorités à la justice, à savoir l’éloignement, la méconnaissance des lois et des procédures judiciaires et le manque de confiance dans le système judiciaire (art. 5 et 6).

22. Rappelant sa recommandation générale n o 31 concernant la discrimination raciale dans l’administration et le fonctionnement du système de justice pénale, le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour éliminer les obstacles qui entravent l’accès des minorités à la justice, notamment en continuant de leur fournir une aide juridictionnelle et en menant des campagnes de sensibilisation du public aux droits consacrés par la Convention et à la manière de déposer plainte pour discrimination raciale, en particulier auprès des groupes vulnérables, surtout de ceux vivant dans des zones reculées. Le Comité recommande à l’État partie d’aider les personnes qui souhaitent avoir accès à la justice à déposer plainte.

Situation des personnes d’origine vietnamienne

23.Le Comité est préoccupé par la situation des personnes d’origine vietnamienne, en particulier par :

a)Les informations selon lesquelles des personnes d’origine vietnamienne seraient victimes d’actes de violence, y compris, dans quelques cas, de lynchage ;

b)Les informations selon lesquelles des discours de haine contre les personnes d’origine vietnamienne, notamment en ligne, et des discours de haine pendant les élections ont été tenus, y compris par des dirigeants politiques ;

c)Les déplacements de personnes d’origine vietnamienne des villages flottants où elles vivent et la discrimination dont elles feraient l’objet dans l’accès à un logement convenable, à l’eau et à l’électricité ;

d)L’enregistrement récent de personnes d’origine vietnamienne en tant que résidents permanents au Cambodge à qui la carte de résident permanent n’accorde pas des droits clairs, ces personnes étant en butte à la discrimination, au déni des droits et services fondamentaux et au manque d’accès à l’éducation, à l’emploi et à la protection juridique dans le système de justice pénale ;

e)Les informations selon lesquelles, s’il est possible pour les enfants nés de parents vietnamiens résidant légalement dans l’État partie d’obtenir un acte de naissance, dans la pratique ces actes ne sont pas délivrés, ce qui rend difficile l’accès à l’éducation, aux soins de santé et aux services ;

f)Les difficultés rencontrées par les enfants d’origine vietnamienne pour accéder à l’éducation (art. 5).

24. Le Comité recommande à l’État partie :

a) D’envisager d’élaborer un plan d’action national contre la discrimination raciale ;

b) De prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les personnes d’origine vietnamienne contre la violence et pour que les plaintes liées à toute infraction motivée par la haine, en particulier si elle est accompagnée de violences, soient dûment enregistrées et fassent l’objet d’enquêtes et que les auteurs soient poursuivis et condamnés ;

c) De prévenir les discours de haine contre les personnes d’origine vietnamienne, y compris en menant des campagnes d’éducation sur la tolérance et l’élimination des stéréotypes et en veillant à ce que les plaintes pour discours de haine soient enregistrées et fassent l’objet d’enquêtes, et que les auteurs soient poursuivis et condamnés, à tous les niveaux ;

d) De prendre des mesures pour que toute réinstallation de personnes d’origine vietnamienne se déroule conformément aux Principes de base et directives concernant les expulsions et les déplacements liés au développement, et garantir l’accès, dans des conditions d’égalité, à un logement convenable, à l’eau et à l’électricité ;

e) De définir les droits conférés par la carte de résident permanent de manière à garantir l’accès à l’éducation, à l’emploi, aux soins de santé, aux services de base et à la protection juridique dans le système de justice pénale ;

f) De garantir l’enregistrement des naissances pour tous les enfants d’origine vietnamienne nés dans l’État partie et de veiller à ce que les actes de naissance soient effectivement délivrés afin de lever les obstacles qui entravent l’accès à l’éducation, aux soins de santé et aux services ;

g) De lever les obstacles qui entravent l’accès à l’éducation.

Situation des Khmers Krom

25.Le Comité prend note des informations fournies par l’État partie sur les documents d’identité des Khmers Krom mais demeure préoccupé par le fait que des Khmers Krom continuent de se voir refuser la délivrance des documents légaux, ce qui les expose au risque d’apatridie et entraîne de la discrimination et des obstacles qui entravent leur accès à la terre, à l’emploi, à l’éducation, aux soins de santé et aux services de base. Il est également préoccupé par le fait que les Khmers Krom ne peuvent toujours pas inscrire leur véritable nom et leur véritable lieu de naissance sur leurs documents d’identité (art. 2 et 5).

26.Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que le Plan stratégique national d’identification (2019-2026) s’attaque aux problèmes particuliers que rencontrent les minorités, dont les Khmers Krom, pour obtenir des documents d’identité. Il lui recommande également de prendre des mesures pour veiller à ce que les Khmers Krom se voient délivrer des documents d’identité établissant leur citoyenneté, et qu’ils puissent inscrire leur véritable nom et leur véritable lieu de naissance sur ces documents. Le Comité recommande en outre à l’État partie de garantir aux Khmers Krom l’accès, dans des conditions d’égalité, à la terre, à l’emploi, à l’éducation et aux services de base.

Situation des peuples autochtones

27.Le Comité se félicite de la reconnaissance par l’État partie des peuples autochtones et des efforts qu’il déploie pour leur venir en aide, parmi lesquels des améliorations des droits des enfants autochtones dans différents domaines, dont l’éducation, mais il demeure préoccupé par les difficultés que rencontrent ces peuples, en particulier par :

a)Le manque d’informations détaillées, y compris de données, sur l’exercice des droits socioéconomiques par les 24 groupes autochtones ;

b)Les informations selon lesquelles des peuples autochtones n’ont toujours pas accès à l’éducation, aux soins de santé et à un niveau de vie suffisant ;

c)L’application insuffisante du principe du consentement libre, préalable et éclairé à des communautés autochtones touchées par la poursuite de projets d’extraction de ressources naturelles, de projets industriels et de projets de développement ;

d)Les informations faisant état d’actes d’intimidation et d’attaques perpétrés contre des peuples autochtones qui cherchent à exercer leurs droits fonciers collectifs ;

e)Les procédures en cours d’attribution des titres fonciers, qui, trop longues et trop bureaucratiques, empêchent des groupes autochtones d’enregistrer avec succès leurs propriétés foncières collectives ;

f)Les longs conflits fonciers qui, pendant leur règlement, laisseraient les autochtones concernés sans abri et qui exposeraient les terres autochtones au risque d’accaparement à des fins commerciales (art. 2 et 5).

28. Eu égard à sa recommandation générale n o  23 (1997) concernant les droits des populations autochtones, le Comité accueille favorablement l’élaboration par le Gouvernement d’un plan stratégique pour le développement des peuples autochtones (2020-2024), et recommande à l’État partie :

a) De fournir des informations et des données statistiques détaillées sur les 24 groupes autochtones recensés dans l’État partie ;

b) De prendre des mesures pour garantir l’accès de tous les peuples autochtones à l’éducation, aux soins de santé et à un niveau de vie suffisant ;

c) De prendre des mesures visant à garantir le consentement préalable, libre et éclairé des communautés autochtones sur les questions qui les concernent, conformément aux normes internationales ;

d) De protéger les peuples autochtones contre les attaques et les actes d’intimidation perpétrés par des agents de l’État et des entreprises privées, lorsqu’ils cherchent à exercer leurs droits fonciers collectifs ;

e) De simplifier les procédures d’attribution des titres fonciers afin que les peuples autochtones puissent obtenir la reconnaissance de leurs droits fonciers et les faire valoir ;

f) D’accélérer le règlement des différends fonciers et de prendre des mesures visant à prévenir le déplacement et le sans-abrisme au sein des peuples autochtones.

Situation des femmes issues de minorités

29.Le Comité est préoccupé par le fait que les femmes issues de minorités se heurtent à des formes multiples et croisées de discrimination fondée sur l’origine ethnique et le genre, y compris à des obstacles qui entravent leur accès à l’emploi, à l’éducation, aux soins de santé et à la justice. Il est également préoccupé par les informations selon lesquelles les femmes autochtones seraient particulièrement vulnérables face à la violence (art. 2 et 5).

30.Rappelant sa recommandation générale n o  25 (2000) concernant la dimension sexiste de la discrimination raciale, le Comité recommande à l’État partie de lever tous les obstacles qui entravent l’accès des femmes issues de minorités à l’emploi, à l’éducation, aux soins de santé et à la justice. À cette fin, il recommande à l’État partie de tenir compte de la situation des femmes issues de minorités dans toutes ses politiques et stratégies. Il lui recommande également de veiller à ce que la violence à l’égard des femmes issues de minorités ethniques et des femmes autochtones soit prise en compte dans ses plans d’action nationaux et dans les efforts qu’il déploie pour mettre fin à la violence contre les femmes.

Traite des êtres humains

31.Le Comité prend note des efforts que l’État partie a déployés pour prévenir la traite des êtres humains, tels que le Plan d’action national pour la lutte contre la traite des êtres humains (2019-2023), pour surveiller les lieux de prostitution et pour diffuser des informations sur les questions liées à la traite auprès des commerçants et des chefs d’entreprise. Il demeure néanmoins profondément préoccupé par le fait que l’État partie reste un pays d’origine, de destination et de transit pour cette traite, en particulier de femmes et de filles, à des fins d’exploitation sexuelle et d’exploitation par le travail. Il est particulièrement préoccupé par la traite des enfants (art. 2 et 5).

32. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre ses efforts pour prévenir la traite des êtres humains et, en particulier :

a) D’enquêter sur tous les faits de traite des êtres humains portés à sa connaissance, de poursuivre les responsables et de les condamner à des peines appropriées, et de veiller à ce que les victimes obtiennent réparation ;

b) De renforcer ses mesures de protection et d’assistance aux victimes et de faciliter le dépôt de plaintes, en veillant en particulier à ce que les victimes aient effectivement accès à une aide juridique et psychologique et à des services sociaux, y compris à un logement, en collaboration avec les organisations de la société civile ;

c) De réaliser des activités de formation et de sensibilisation sur l’identification des victimes de la traite des êtres humains à l’intention des agents de la force publique, y compris des agents des services de l’immigration ;

d) De prendre des mesures pour prévenir la traite des enfants en collaboration avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance.

Apatridie

33.Le Comité est préoccupé par l’absence de mesures de protection suffisantes pour que les enfants nés dans l’État partie, qui seraient autrement apatrides, puissent acquérir la nationalité et obtenir des documents d’identité cambodgiens (art. 5).

34. Rappelant sa recommandation générale n o  30 (2004) concernant la discrimination contre les non-ressortissants, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures telles que les enfants qui sont nés sur son territoire et qui, sans ces mesures, seraient apatrides, puissent acquérir la nationalité du pays et obtenir des documents d’identité. Il lui recommande de ratifier la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie.

Réfugiés et demandeurs d’asile

35.Le Comité est profondément préoccupé par les informations selon lesquelles le principe de non-refoulement n’est pas pleinement respecté, en droit comme dans la pratique. Il est également préoccupé par l’absence de garanties procédurales pour les demandeurs d’asile et les candidats au statut de réfugié, en particulier ceux dont la demande est rejetée (art. 5).

36.Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour garantir le plein respect du principe de non-refoulement. Rappelant sa recommandation générale n o 22 (1996) concernant l’article 5 de la Convention et les réfugiés et personnes déplacées, le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que toutes les décisions concernant une demande d’asile puissent faire l’objet d’un recours devant les tribunaux et que les demandeurs d’asile et les réfugiés puissent jouir de leurs droits fondamentaux.

Organisations de la société civile

37.Le Comité regrette la difficulté et la complexité dont il est fait état s’agissant des procédures d’enregistrement des organisations de la société civile, plus précisément celles qui défendent les droits des minorités ethniques et des peuples autochtones, qui sont dépourvues des garanties procédurales nécessaires pour contester le refus d’enregistrement. Le Comité est préoccupé par l’obligation qui est faite aux organisations de la société civile de notifier certaines activités de façon préalable (art. 5).

38. Le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte que les organisations de la société civile puissent mener leurs activités sans encombre et de supprimer les procédures d’enregistrement complexes et les autres restrictions qui entravent leur fonctionnement afin de faciliter le travail des défenseurs des droits de l’homme.

Formation aux droits de l’homme

39.Le Comité prend note du projet éducatif visant à encourager la tolérance et à éliminer les stéréotypes, les préjugés et la haine dans un contexte d’après conflit, évoqué par l’État partie. Il demeure toutefois préoccupé par la persistance et l’importance des préjugés et de la discrimination dans l’État partie (art. 7).

40. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour organiser des cours de formation sur les droits de l’homme, y compris dans les écoles, pour sensibiliser le public à l’importance de la tolérance, de la coexistence, de la diversité ethnique et culturelle et de la lutte contre la discrimination raciale, et pour organiser des cours de formation sur les droits de l’homme, en particulier sur les droits visés par la présente Convention, à l’intention des agents de la force publique, des magistrats, du personnel pénitentiaire, des avocats et des enseignants.

D.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

41. Compte tenu du caractère indivisible de tous les droits de l’homme, le Comité encourage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions intéressent directement les communautés qui peuvent faire l’objet de discrimination raciale, comme la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Amendement à l’article 8 de la Convention

42. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111.

Déclaration visée à l’article 14 de la Convention

43. Le Comité encourage l’État partie à faire la déclaration facultative visée à l’article 14 de la Convention, par laquelle les États parties reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de particuliers.

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

44. À la lumière de sa recommandation générale n o 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, quand il applique la Convention. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

45. À la lumière de la résolution 68/237 de l’Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour 2015-2024 et de la résolution 69/16 sur le programme d’activités de la Décennie, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et de mettre en œuvre un programme adapté de mesures et de politiques en collaboration avec les personnes d’ascendance africaine et les organisations qui les représentent. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des renseignements précis sur les mesures concrètes qu’il aura adoptées dans ce cadre, compte tenu de sa recommandation générale n o 34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine.

Consultations avec la société civile

46. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’élargir le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

Diffusion d’information

47. Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également les observations finales du Comité qui s’y rapportent auprès de tous les organes de l’État chargés de la mise en œuvre de la Convention, y compris les municipalités, ainsi que de les publier sur le site Web du Ministère des affaires étrangères, dans les langues officielles et les autres langues couramment utilisées, selon qu’il conviendra.

Document de base commun

48. Le Comité encourage l’État partie à mettre à jour son document de base commun, qui date de 1998, conformément aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant le document de base commun, adoptées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme tenue en juin 2006 (HRI/GEN/2/Rev.6, chap. I). À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 42 400 mots fixée pour ce document.

Suite donnée aux présentes observations finales

49. Conformément au paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 8 (institution nationale des droits de l’homme) et 40 (formation aux droits de l’homme).

Paragraphes d’importance particulière

50. Le Comité souhaite appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant dans les paragraphes 14 (discours de haine et infractions motivées par la haine), 24 (situation des personnes d’origine vietnamienne), 26 (situation des Khmers Krom) et 28 (situation des peuples autochtones) et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

Élaboration du prochain rapport périodique

51. Le Comité recommande à l’État partie de soumettre son rapport valant dix ‑ huitième à vingtième rapports périodiques, d’ici au 28 décembre 2022, en tenant compte des directives pour l’établissement du document adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session (CERD/C/2007/1) et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité demande instamment à l’État partie de respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques et la limite de 42 400 mots fixée pour le document de base commun.