Observations finales concernant les troisième à cinquième rapports périodiques de l’Uruguay, présentés en un seul document *

I.Introduction

Le Comité a examiné les troisième à cinquième rapports périodiques de l’Uruguay (CRC/C/URY/3-5) à ses 1952e et 1954e séances (CRC/C/SR.1952 et CRC/C/SR.1954), les 19 et 20 janvier, et a adopté les observations finales ci-après à sa 1983e séance, le 30 janvier 2015.

Le Comité accueille avec satisfaction les troisième à cinquième rapports périodiques de l’Uruguay présentés en un seul document (CRC/C/URY/3-5), ainsi que les réponses écrites à la liste de points (CRC/C/URY/Q/3-5/Add.1), qui lui ont permis de mieux appréhender la situation des droits de l’enfant dans l’État partie. Il se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de l’État partie.

II.Mesures de suivi et progrès réalisés par l’État partie

Le Comité prend note avec satisfaction de la ratification des instruments ci-après :

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, en mars 2009;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées, en février 2009.

Le Comité salue l’adoption des mesures législatives suivantes :

a)La loi sur les allocations de maternité et de paternité, le 15 novembre 2013;

b)La loi relative à l’adoption, le 18 septembre 2009;

c)La loi générale sur l’éducation, le 10 décembre 2008;

d)La loi sur les droits en matière de sexualité et de procréation, le 1er décembre 2008;

e)La loi sur l’intégrité de la personne de l’enfant et de l’adolescent, qui interdit les châtiments corporels dégradants, le 20 novembre 2007.

Le Comité salue également l’adoption des mesures institutionnelles et des politiques suivantes :

a)La création de l’Institution nationale des droits de l’homme et du Médiateur en juin 2012;

b)La création du Système de responsabilité pénale des adolescents en juillet 2011;

c)La stratégie nationale en faveur des enfants et des adolescents (2010-2030) et le plan d’action dont elle est assortie (2010-2015).

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Mesures d’application générales (art. 4, 42 et 44 (par. 6), de la Convention)

Recommandations antérieures du Comité

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour donner suite à ses recommandations de 2007 ( CRC/C/URY / C O/2 ), qui n’ont pas encore été mises à exécution ou ne l’ont pas été dans toute la mesure voulue, en particulier celles concernant la collecte de données (par. 19), la formation et la diffusion (par. 21), l’âge minimum du mariage (par. 26) et l’administration de la justice pour mineurs (par. 68).

Statut juridique de la Convention

Le Comité note que la Cour suprême de justice a statué que les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme avaient rang constitutionnel dans l’ordre juridique interne mais constate avec préoccupation que la Convention est peu appliquée faute d’être suffisamment connue des juges.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour veiller à la pleine applicabilité de la Convention dans le système juridique national et de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les cas précis dans lesquels la Convention a été directement appliquée par les tribunaux nationaux. Le Comité engage instamment l’État partie à mener des activités de sensibilisation au contenu de la Convention, ciblant en particulier les juges, les avocats et les membres des forces de l’ordre, ainsi que les membres de l’Assemblée générale de l’Uruguay et les autres acteurs chargés de la mise en œuvre de la Convention.

Politique et stratégie globales

Le Comité salue la mise au point de la Stratégie nationale pour l’enfance et l’adolescence 2010-2030 ainsi que du plan d’action aux fins de sa mise en œuvre (2010-2015) mais constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas fourni d’informations sur l’évaluation de la mise en œuvre de la stratégie nationale et du plan d’action précédents. Il relève également avec préoccupation que le nouveau plan d’action (2015-2020) n’a pas encore été élaboré, ce qui peut compromettre la mise en œuvre de la Stratégie nationale.

Le Comité recommande à l’État partie de tenir compte des résultats de l’évaluation de son plan d’action 2010 - 2015 pour élaborer le nouveau plan (2015 - 2020). Il lui recommande également de veiller à allouer les ressources humaines, techniques et financières nécessaires à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation de la stratégie nationale en faveur des enfants et des adolescents et de son plan d’action.

Coordination

Le Comité note que le Conseil consultatif honoraire a un rôle actif à jouer dans l’élaboration et la mise en œuvre des politiques publiques par les différents pouvoirs publics et acteurs au niveau national mais juge toujours préoccupant que, en pratique, le Conseil ne coordonne pas efficacement les travaux des divers organismes et acteurs compétents, parmi lesquels les organisations de la société civile œuvrant en faveur des droits de l’enfant. Le Comité est également préoccupé par l’insuffisance des ressources humaines, techniques et financières allouées au Conseil.

Le Comité renouvelle sa recommandation antérieure ( CRC/C/U R Y/CO/2 , par. 12) et engage instamment l’État partie à investir le Conseil consultatif honoraire d’une autorité suffisante pour coordonner l’ensemble des activités liées à la mise en œuvre de la Convention aux niveaux intersectoriel, national, régional et local, y compris celles des organisations de la société civile œuvrant dans le domaine des droits de l’enfant. L’État partie devrait veiller à ce que le Conseil soit doté des ressources humaines, techniques et financières nécessaires à son bon fonctionnement.

Allocation de ressources

Le Comité prend note des renseignements fournis par la délégation indiquant que les enveloppes budgétaires allouées aux programmes et aux services destinés aux enfants et aux familles ont augmenté et que 19 % du montant total des dépenses publiques sont alloués à l’enfance, mais juge toujours préoccupant :

a)Que le budget soit élaboré au niveau sectoriel, ce qui ne permet pas de déterminer facilement si les ressources allouées à la mise en œuvre de la Convention sont suffisantes;

b)Que les mesures budgétaires prises en faveur des droits de l’enfant n’aient pas fait l’objet d’une étude d’impact;

c)Que les ressources soient réparties de manière inégale entre les différents secteurs et les différentes régions, ce qui contribue à la persistance des inégalités entre les enfants et les adolescents.

Le Comité recommande à l’État partie de tenir compte, lors de l’élaboration de ses futurs budgets, des recommandations formulées à l’occasion de sa Journée de débat général de 2007 sur le thème «  Ressources pour les droits de l’enfant – responsabilité des États  » et plus particulièrement :

a) D’allouer à la mise en œuvre des droits de l’enfant des ressources budgétaires suffisantes, dans toute la limite des ressources dont il dispose, conformément à l’article 4 de la Convention et, en particulier, d’augmenter la part du budget consacrée aux secteurs sociaux;

b) De renforcer ses capacités afin d’adopter une approche axée sur les droits de l’enfant pour l’élaboration du budget de l’État et de mettre en place un mécanisme de contrôle, de suivi et d’évaluation de l’affectation et de l’emploi des ressources destinées à l’enfance dans tous les secteurs concernés, couvrant l’ensemble du budget, assurant ainsi la visibilité des investissements consacrés à l’enfance. Ce mécanisme de suivi devrait également être utilisé pour réaliser des études d’impact visant à déterminer la manière dont les investissements dans tel ou tel secteur peuvent servir l’intérêt supérieur de l’enfant, en veillant à évaluer dans quelle mesure ces investissements ont des effets différents sur les garçons et les filles;

c) De procéder à une évaluation exhaustive des besoins budgétaires et d’attribuer des lignes de crédit claires aux secteurs en lien avec les droits de l’enfant contribuant à une réduction progressive des disparités mises en évidence par les indicateurs tels que le sexe, le handicap ou la situation géographique des enfants concernés;

d) De définir des lignes budgétaires stratégiques générales ainsi que des dotations par secteurs pour les enfants défavorisés ou vulnérables (par exemple les filles, les enfants vivant dans des zones rurales et reculées, les enfants d’ascendance africaine et les enfants handicapés) qui peuvent avoir besoin de mesures sociales particulières, et de veiller à ce que ces lignes budgétaires soient protégées même en cas de crise économique, de catastrophe naturelle ou d’autres situations d’urgence.

Collecte de données

Le Comité note que l’État partie a établi un système d’information pour l’enfance, qui relève de l’Institut uruguayen pour l’enfance et l’adolescence, ainsi qu’un système global d’information dans le domaine social, mais est préoccupé par les nombreuses incohérences et lacunes en matière de collecte de données, en particulier dans les domaines de la santé, de la justice pour mineurs, des violences et sévices et du handicap et en ce qui concerne les enfants privés de soins parentaux et les enfants d’ascendance africaine.

Compte tenu de son Observation générale n o  5 (2003) concernant les mesures d’application générales de la Convention relative aux droits de l’enfant, le Comité prie instamment l’État partie de mettre en place sans tarder un système global de collecte de données. Les données devraient porter sur tous les domaines visés par la Convention et être ventilées par âge, sexe, handicap, situation géographique, origine ethnique et milieu socioéconomique pour permettre d’analyser plus rapidement la situation de tous les enfants, en particulier des enfants vulnérables. En outre, le Comité recommande aux ministères compétents de mettre en commun les données et indicateurs dont ils disposent; il recommande également d’utiliser ces données et indicateurs aux fins de l’élaboration, du suivi et de l’évaluation des politiques, des programmes et des projets visant à assurer l’application effective de la Convention. À cet égard, il recommande également à l’État partie de renforcer ses activités de coopération technique, notamment avec le Fonds des Nations Unies pour l’enfance (UNICEF), les mécanismes régionaux et l’Institut interaméricain de l’enfance.

Mécanisme de suivi indépendant

Le Comité salue la création de l’Institution nationale des droits de l’homme/Bureau du Médiateur mais s’inquiète de l’insuffisance des ressources humaines et financières qui lui sont allouées, en particulier du manque de personnel spécialisé dans les droits de l’enfant, ce qui limite l’efficacité de son mécanisme de plainte. Le Comité note également avec préoccupation que cette instance est méconnue des enfants et des adolescents.

Compte tenu de son Observation générale n o 2  (2002) concernant le rôle des institutions nationales indépendantes de défense des droits de l’homme dans la protection et la promotion des droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie de faire en sorte de doter l’Institution nationale des droits de l’homme/Bureau du Médiateur des ressources humaines, techniques et financières – y compris des personnels spécialisés dans les droits de l’enfant – dont elle a besoin pour s’acquitter efficacement de son mandat, et plus particulièrement pour rendre son mécanisme de plainte opérationnel. Le Comité recommande également à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour faire connaître aux enfants l’existence de cette institution et les sensibiliser au Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications, dès lors qu’il aura été officiellement ratifié.

Formation

Le Comité constate avec préoccupation que tous les groupes de professionnels travaillant avec et pour les enfants ne sont pas systématiquement formés à la Convention. Il trouve notamment très préoccupant que les juges ne soient pas formés aux dispositions de la Convention, ce qui fait qu’à plusieurs reprises l’interprétation qu’ils ont faite de la législation nationale s’est révélée contraire aux dispositions de la Convention et de ses Protocoles facultatifs.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour dispenser une formation adaptée et systématique à tous les groupes de professionnels travaillant avec et pour les enfants, en particulier les enseignants, les membres des forces de l’ordre, les parlementaires, les personnels de santé, les travailleurs sociaux, les personnels des établissements qui accueillent des enfants et ceux qui travaillent dans les médias. Le Comité prie l’État partie de mettre systématiquement en place à l’intention des juges, des avocats, des procureurs et de tous les professionnels travaillant dans l’administration de la justice des programmes de formation complets portant sur le contenu de la Convention et de ses Protocoles facultatifs.

B.Définition de l’enfant (art. 1er)

Le Comité note en s’en félicitant que la délégation s’est engagée au cours du dialogue à faire en sorte que l’âge minimum du mariage soit relevé à 18 ans tant pour les garçons que pour les filles, mais juge préoccupant que, en l’état actuel des choses, il soit toujours de 16 ans.

Le Comité prie instamment l’État partie de modifier sans délai sa législation à cet égard.

C.Principes généraux (art. 2, 3, 6 et 12)

Non-discrimination

Le Comité note que l’État partie s’est doté d’un plan national de lutte contre le racisme et la discrimination, mais constate avec préoccupation que certains groupes d’enfants, notamment les enfants handicapés, les filles, les enfants vivant dans les zones rurales et reculées, les enfants de familles économiquement désavantagées et les adolescents continuent d’être victimes de comportements discriminatoires et d’exclusion sociale. Le Comité relève également avec préoccupation que les adolescents sont souvent présentés comme des délinquants dans les médias, et sont donc victimes de discrimination en droit et dans la pratique.

Eu égard à l’article 2 de la Convention, le Comité rappelle sa recommandation précédente ( CRC/C/URY/ C O/2 , par. 28) et prie l’État partie :

a) D’adopter un cadre juridique qui permettrait d’éliminer la discrimination, en veillant à ce qu’il prévoie une interdiction générale de la discrimination pour tous les motifs énumérés par la Convention;

b) D’intensifier les efforts mis en œuvre pour prévenir et éliminer dans les faits toute forme de discrimination à l’égard des enfants handicapés, des filles, des enfants vivant dans des régions rurales et reculées, des enfants des rues, des enfants de familles économiquement désavantagées et des adolescents, y compris en mettant en œuvre des campagnes d’éducation du public;

c) De prendre des mesures pour corriger l’image erronée que la société a des enfants, en particulier des adolescents, qui est notamment véhiculée par les médias.

Intérêt supérieur de l’enfant

Le Comité note que l’article 6 du Code de l’enfance et de l’adolescence consacre le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant, mais relève avec préoccupation que le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale n’est pas toujours respecté, en particulier lors de la prise de décisions de justice ou de décisions administratives et au moment où les enfants sont séparés de leurs parents. Le Comité note également avec préoccupation qu’il est impossible de former un recours ou de réviser une décision lorsque ce droit n’est pas respecté.

Compte tenu de son Observation générale n o 14  (2013) concernant le droit de l’enfant à ce que son intérêt supérieur soit une considération primordiale, le Comité recommande à l’État partie :

a) De redoubler d’efforts pour que ce principe soit dûment intégré et systématiquement pris en considération dans toutes les procédures législatives, administratives et judiciaires et dans toutes les décisions correspondantes, ainsi que dans l’ensemble des politiques, programmes et projets qui concernent les enfants ou ont une incidence sur eux;

b) De définir des procédures et des critères destinés à guider toutes les personnes chargées de déterminer l’intérêt supérieur de l’enfant dans chaque domaine et de lui attribuer le poids voulu en tant que considération primordiale;

c) De mettre en place au sein de son système juridique un mécanisme efficace permettant de faire appel des décisions prises sans que l’intérêt supérieur de l’enfant ait été dûment évalué.

Respect de l’opinion de l’enfant

Le Comité salue la création du Conseil consultatif sur l’enfance en tant qu’organe consultatif de l’Institut uruguayen pour l’enfance et l’adolescence, mais relève avec préoccupation que cet organe n’a pas établi de liens avec les divers organismes œuvrant à la mise en œuvre des droits de l’enfant. Le Comité relève en outre avec préoccupation que les conseils participatifs du secteur de l’éducation ne sont pas pleinement opérationnels, en particulier dans l’enseignement secondaire. Le Comité regrette en outre le manque d’informations sur la manière dont le droit de l’enfant d’être entendu est appliqué dans le cadre des procédures administratives et judicaires correspondantes.

Compte tenu de son Observation générale n o 12  (2009) sur le droit de l’enfant d’être entendu, le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures pour renforcer ce droit conformément à l’article 12 de la Convention. Pour ce faire, il lui recommande :

a) D’impliquer davantage le Conseil consultatif sur l’enfance aux mécanismes publics de prise de décisions concernant les enfants;

b) De veiller à ce que les conseils participatifs soient pleinement opérationnels à tous les niveaux d’enseignement, en particulier dans le secondaire, et à renforcer encore ceux qui ont été mis en place au niveau primaire;

c) De prendre des mesures pour garantir la mise en œuvre effective de la législation reconnaissant le droit de l’enfant d’être entendu dans les procédures juridiques pertinentes, y compris en mettant en place les mécanismes et/ou les procédures voulus pour assurer le respect de ce principe par les travailleurs sociaux et les tribunaux.

D.Violence à l’égard des enfants (art. 19, 24 (par. 3), 28 (par. 2), 34, 37 a) et 39)

Torture et autres peines ou traitements cruels ou dégradants

Le Comité est vivement préoccupé par :

a)Les mauvais traitements et les actes de torture qui seraient infligés dans les commissariats aux adolescents soupçonnés d’avoir commis une infraction et aux enfants des rues;

b)Les informations faisant état d’un usage excessif de la force et de punitions collectives dans les centres de détention, les enfants et les adolescents étant enfermés dans leur cellule pour une durée pouvant aller jusqu’à vingt-deux heures par jour, et par l’administration aux jeunes détenus d’anxiolytiques comme moyen de contention, comme l’ont souligné le Comité contre la torture (CAT/C/URY/CO/3) et le Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (A/HRC/13/39/Add.2);

c)Les informations faisant état de la surpopulation carcérale et de très mauvaises conditions de détention dans les centres de détention pour mineurs;

d)L’absence de mécanisme d’inspection systématique chargé d’évaluer les conditions effectives de détention et d’enquêter sur les violations de la réglementation en vigueur.

Se référant à l’Observation générale n o 8  (2006) sur le droit de l’enfant à une protection contre les châtiments corporels et les autres formes cruelles ou dégradantes de châtiments, le Comité engage instamment l’État partie :

a) À prendre toutes les mesures nécessaires pour prévenir et interdire toutes les formes de torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants en détention, et pour protéger les enfants contre de tels actes, y compris lorsqu’ils sont le fait de policiers;

b) À instituer un mécanisme indépendant habilité à recevoir les plaintes, accessible à tous les enfants privés de liberté;

c) À veiller à ce que toutes les allégations de torture ou de mauvais traitements à enfant fassent l’objet d’enquêtes rapides, indépendantes et efficaces, et à ce que les auteurs soient poursuivis;

d) À veiller à ce que les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires respectent les normes sanitaires minimales établies au niveau international;

e) À mener des enquêtes indépendantes sur les irrégularités qui affecteraient l’administration de médicaments à des détenus mineurs, et à offrir aux victimes des soins, des réparations et des moyens de rétablissement et de réadaptation.

Violence, maltraitance et négligence

Le Comité note que les châtiments corporels sont interdits dans tous les contextes mais constate avec préoccupation que la législation ne prévoit pas de sanction spécifique pour les auteurs de tels actes. Le Comité note également avec préoccupation que le problème de la violence à l’égard des enfants est toujours aussi grave dans l’État partie et que les mesures prises pour repérer et protéger les enfants victimes de violence, y compris de violence intrafamiliale, restent insuffisantes.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De veiller à ce que les lois interdisant les châtiments corporels soient effectivement appliquées, notamment en imposant des sanctions appropriées aux auteurs de mauvais traitements à enfant;

b) De mettre au point une stratégie globale de prévention de la maltraitance des enfants et de lutte contre ce phénomène, notamment en mettant en œuvre des programmes de sensibilisation et d’éducation associant des enfants, des anciennes victimes, des bénévoles et des membres de la communauté;

c) D’établir une base de données nationale regroupant tous les cas de violence intrafamiliale visant des enfants et d’entreprendre une évaluation complète de l’ampleur, des causes et de la nature de cette violence;

d) De veiller à ce que le Système intégré de protection des enfants et des adolescents contre la violence soit effectivement diffusé et mis en œuvre par tous les acteurs dans l’ensemble du pays;

e) De coopérer avec la Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence à l’encontre des enfants et les autres organismes compétents de l’ONU.

Exploitation sexuelle et violences sexuelles

Le Comité est préoccupé par la prévalence de l’exploitation sexuelle des enfants et des violences sexuelles à enfant, y compris au sein de la famille, et par l’absence de mesures efficaces destinées à prévenir et combattre ce phénomène. Le Comité regrette que les actes de ce type ne donnent pas lieu à l’ouverture d’enquêtes efficaces et que les auteurs ne soient pas poursuivis. En outre, la couverture des services de soutien psychosocial, de réadaptation et de réinsertion est inégale à l’échelle du pays. Le Comité est également préoccupé par la stigmatisation dont souffrent les victimes de ces infractions.

Le Comité recommande à l’État partie :

a) De mettre en place des mécanismes accessibles, confidentiels, adaptés aux enfants et efficaces pour signaler les cas de violences sexuelles à enfant et d’exploitation sexuelle des enfants, voire de développer les mécanismes existants rendant obligatoire le signalement de tels cas;

b) De prendre les mesures voulues pour enquêter efficacement sur tous les cas d’exploitation sexuelle des enfants et de sévices à enfant et de faire en sorte que les auteurs de telles infractions rendent des comptes;

c) De mettre en place à l’échelle du pays des politiques et des programmes de prévention, ainsi que des programmes de réadaptation et de réinsertion des enfants victimes d’exploitation sexuelle et de sévices sexuels;

d) De mener des activités de sensibilisation à l’intention des groupes de professionnels travaillant pour et/ou avec des enfants, notamment les enseignants, les membres des forces de l’ordre, le personnel de santé, les travailleurs sociaux, le personnel des établissements accueillant des enfants ainsi que de la population dans son ensemble, afin de combattre la stigmatisation des victimes d’exploitation sexuelle et de violences sexuelles.

E.Milieu familial et protection de remplacement [art. 5, 9 à 11, 18 (par. 1 et 2), 20, 21, 25 et 27 (par. 4)]

Milieu familial

Le Comité juge encourageant que l’État partie ait l’obligation légale d’apporter un soutien aux familles vulnérables, mais relève avec préoccupation que les services de soutien aux parents risquant d’être déchus de l’autorité parentale restent inadaptés. Le Comité est également préoccupé par l’absence de stratégie globale portant sur la violence intrafamiliale, la santé mentale, la toxicomanie et la pauvreté qui pourrait éviter que les enfants soient séparés de leur famille.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer ses services de soutien – d’ordre financier ou psychologique – aux familles défavorisées et marginalisées afin d’aider les parents à s’acquitter de leurs responsabilités aux fins de l’éducation et du développement de leurs enfants. Le Comité recommande également à l’État partie d’élaborer une stratégie globale d’aide aux familles et de renforcer son système de prise en charge en adoptant une démarche axée sur les droits de l’enfant.

Enfants privés de milieu familial

Le Comité salue les efforts consentis par l’État partie pour offrir aux enfants privés de milieu familial des solutions de remplacement au sein de cellules familiales ou de la communauté, mais note avec préoccupation qu’un grand nombre d’enfants sont encore placés en institution à temps complet et que les enfants d’une même fratrie ne sont pas placés dans les mêmes établissements. Bien que des mesures soient prises en faveur de la désinstitutionalisation de ces enfants et/ou de leur réinsertion dans leur famille biologique, le Comité demeure préoccupé par les effets limités de ces mesures. Il note aussi avec préoccupation l’absence de mécanisme adapté pour contrôler les placements en famille d’accueil et en institution.

Appelant l’attention de l’État partie sur les Lignes directrices relatives à la protection de remplaceme nt pour les enfants (résolution  64/142 de l’Assemblée générale, annexe), le Comité recommande à l’État partie:

a) De continuer à promouvoir un système de placement en famille d’accueil pour les enfants qui ne peuvent pas rester au sein de leur famille, de façon à ce que moins d’enfants soient placés en institution;

b) De prévoir des garanties suffisantes et de définir des critères précis fondés sur l’intérêt supérieur de l’enfant pour décider du placement de l’enfant dans une structure offrant une protection de remplacement;

c) De veiller à ce que les décisions de placement en famille d’accueil et en institution fassent l’objet d’un examen périodique et de surveiller la qualité de la prise en charge offerte dans ce cadre, notamment en instaurant des mécanismes accessibles permettant de signaler et de suivre les cas de maltraitance et de prendre des mesures pour y remédier;

d) De faire en sorte que les centres offrant une protection de remplacement et les services de protection de l’enfance compétents soient dotés des ressources humaines, techniques et financières suffisantes pour favoriser la réadaptation et la réinsertion sociale des enfants;

e) De redoubler d’efforts pour favoriser la désinstitutionalisation des enfants vivant en institution et de veiller à ce que, chaque fois que cela est possible et dans leur intérêt supérieur, ceux-ci soient réinsérés dans leur famille.

Adoption

Le Comité salue les modifications d’ordre législatif apportées aux procédures d’adoption mais est toujours préoccupé par la longueur de ces procédures, faute notamment de personnel spécialisé capable d’examiner les dossiers d’adoption.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour garantir que les procédures d’adoption soient aussi courtes que possible et, à cette fin, de veiller à ce que tous les organismes jouant un rôle à cet égard soient dotés des ressources humaines, techniques et financières dont ils ont besoin.

Enfants vivant en prison avec leur mère

Le Comité note avec préoccupation que les infrastructures pénitentiaires ne sont pas adaptées aux enfants vivant en prison avec leur mère et que l’article 8 de la loi 17.897 sur la probation, qui permet d’assigner à résidence les femmes enceintes encourant un peine de prison lorsque celles-ci sont dans leur troisième trimestre de grossesse, ainsi que les femmes allaitantes au cours des trois premiers mois de vie de l’enfant, n’est pas appliqué.

Le Comité recommande vivement à l’État partie :

a) De prendre d’urgence des mesures efficaces propres à assurer aux enfants vivant en prison avec leur mère des conditions de vie adéquates, et notamment l’accès aux services de santé et d’éducation;

b) D’assurer la mise en œuvre effective de l’article 8 de la loi 17.897 sur la probation;

c) De faire en sorte que le principe de l’intérêt supérieur de l’enfant soit respecté par les professionnels de l’enfance avant le placement d’un enfant auprès de sa mère détenue et tout au long de son séjour en prison;

d) De solliciter l’assistance technique de l’UNICEF et d’autres partenaires compétents à cet égard.

F.Handicap, santé de base et bien-être (art. 6, 18 (par. 3), 23, 24, 26, 27 (par. 1 à 3) et 33)

Enfants handicapés

Le Comité note que le plan d’action 2010-2015 relatif à la Stratégie nationale en faveur des enfants et des adolescents comprend un volet sur la prise en charge, l’éducation et l’insertion sociale des enfants handicapés mais constate avec préoccupation que l’État partie n’a pas adopté de politique globale en faveur de l’éducation inclusive et de la participation des enfants handicapés à la vie sociale. Il regrette que la discrimination à l’égard des enfants handicapés soit toujours courante dans l’État partie.

Compte tenu de l’article 23 de la Convention et de son Observation générale n o 9  (2006) sur les droits des enfants handicapés, le Comité demande instamment à l’État partie d’adopter une approche du handicap fondée sur les droits de l’homme, et lui recommande en particulier :

a) D’adopter des mesures globales pour développer l’éducation inclusive et faire en sorte que celle-ci soit privilégiée par rapport au placement des intéressés dans des institutions ou des classes spécialisées;

b) De former et de nommer dans les écoles ordinaires des enseignants et des professionnels spécialisés pour offrir aux enfants ayant des difficultés d’apprentissage un soutien personnalisé et la prise en charge dont ils ont besoin;

c) D’adopter une politique axée sur les droits de l’homme qui viserait à éliminer les facteurs qui font obstacle à la participation pleine et effective des enfants handicapés à la vie sociale sur un pied d’égalité avec les autres enfants;

d) De mener des campagnes de sensibilisation ciblant les fonctionnaires, le public et les familles pour combattre la stigmatisation et les préjugés dont sont victimes les enfants handicapés et de promouvoir une image positive de ces enfants.

Santé et services de santé

Le Comité prend note avec satisfaction de l’action menée par l’État partie pour élargir la couverture du Système national de santé et salue l’adoption du Programme national de santé en milieu rural. Il est toutefois préoccupé par le grand nombre d’enfants souffrant de troubles nutritionnels, comme la malnutrition chronique, l’anémie et l’obésité.

À la lumière de son Observation générale n o 15  (2013) sur le droit de l’enfant de jouir du meilleur état de santé possible, le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour garantir à tous les enfants, en particulier à ceux vivant dans les régions les plus défavorisées et reculées du pays, l’accès à des services de santé de qualité, et encourage l’État partie à mettre au point des politiques et des programmes visant à combattre la malnutrition chronique et l’anémie.

Santé mentale

Le Comité note l’absence d’informations sur la situation actuelle au regard de l’administration de méthylphénidate aux enfants souffrant de troubles de déficit de l’attention, avec hyperactivité ou non.

Le Comité recommande à l’État partie de mener une enquête afin de faire le point de la situation des enfants souffrant de troubles de déficit de l’attention, avec hyperactivité ou non, et de la prescription de psychostimulants, comme le méthylphénidate.

Santé des adolescents

Le Comité salue les mesures prises pour faire baisser le taux élevé de grossesses d’adolescentes et pour apporter un soutien aux mères adolescentes mais reste préoccupé par l’accès limité aux services de santé sexuelle et procréative et à l’éducation en matière de santé sexuelle et procréative. Le Comité est également préoccupé par les informations indiquant que les adolescentes enceintes qui décident d’interrompre leur grossesse ne bénéficient pas d’un soutien ni de conseils adéquats.

À la lumière de son Observation générale n o  4 (2003) sur la santé et le développement de l’adolescent dans le contexte de la Convention relative aux droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie :

a) De redoubler d’efforts pour que l’éducation à la santé sexuelle et procréative figure parmi les matières obligatoires inscrites au programme scolaire, cible les adolescents, garçons et filles, et vise tout particulièrement à prévenir les grossesses précoces et les infections sexuellement transmissibles;

b) De garantir l’accès dans des conditions d’égalité à des services de santé sexuelle et procréative confidentiels et adaptés aux adolescents;

c) D’élaborer et de mettre en œuvre une politique visant à protéger les droits des adolescentes enceintes, des mères adolescentes et de leurs enfants et de combattre la discrimination à leur égard;

d) De faire en sorte que les adolescentes enceintes cherchant à interrompre leur grossesse bénéficient d’un soutien et de conseils adaptés à leur âge, à leur situation particulière et à leurs besoins spécifiques.

Toxicomanie et usage de substances psychoactives

Le Comité note avec préoccupation que, tandis que la consommation de tabac, d’alcool et de drogue est très répandue chez les adolescents, les programmes et services destinés aux personnes dépendantes restent limités.

Le Comité recommande à l’État partie de s’employer à réduire la prévalence de la consommation de substances psychoactives, dont le tabac et l’alcool, de fournir aux enfants et aux adolescents des informations objectives à cet égard et de mettre en place des services de traitement de la toxicomanie et de réduction des risques qui soient accessibles et adaptés aux jeunes.

VIH/sida

Le Comité note avec satisfaction que l’État partie a amélioré l’accès au traitement antirétroviral et a adopté une stratégie nationale pour la prévention de la transmission verticale du VIH/sida. Il est toutefois préoccupé par l’absence de stratégie globale de prévention du VIH/sida qui viserait les enfants et les adolescents.

  Compte tenu de son Observation générale n o 3  (2003) sur le VIH/sida et les droits de l’enfant et des Directives internationales concernant le VIH/sida et les droits de l’homme, le Comité recommande à l’État partie :

a) De continuer à élaborer des politiques et des programmes visant à assurer la prise en charge et le soutien des enfants infectés ou affectés par le VIH/sida et à renforcer les politiques et programmes existants, y compris ceux qui sont destinés à conférer aux familles et à la collectivité davantage de moyens pour prendre en charge ces enfants;

b) D’adopter une stratégie globale, prévoyant notamment des campagnes de sensibilisation, pour limiter l’incidence et la propagation du VIH/sida chez les enfants et les adolescents;

c) De solliciter l’assistance technique du Programme commun des Nations Unies sur le VIH/sida, l’UNICEF, le Programme des Nations Unies pour le développement et l’Organisation mondiale de la Santé, et de renforcer sa coopération avec ces organismes.

Niveau de vie

Le Comité salue les efforts mis en œuvre par l’État partie pour réduire considérablement la pauvreté des enfants mais relève encore avec préoccupation que 20 % des enfants vivent toujours dans la pauvreté, en particulier les enfants d’ascendance africaine.

Le Comité recommande à l’État partie d’intensifier ses efforts pour réduire durablement le taux encore élevé de pauvreté des enfants, notamment en élaborant une stratégie de réduction de la pauvreté. L’État partie devrait mettre en place un cadre cohérent comprenant des mesures prioritaires de lutte contre l’exclusion sociale des enfants, en particulier des enfants d’ascendance africaine, des enfants handicapés, des enfants des régions rurales et reculées et des enfants de familles marginalisées et désavantagées, qui soit assorti d’objectifs précis et mesurables, d’indicateurs clairs et d’un calendrier et soit doté de suffisamment de ressources financières et matérielles.

G.Éducation, loisirs et activités culturelles (art. 28 à 31)

Éducation, y compris la formation et l’orientation professionnelles

Le Comité salue les efforts mis en œuvre par l’État partie pour accroître le montant des dépenses d’éducation et pour améliorer le système éducatif. Il est toutefois préoccupé par le taux élevé d’abandon scolaire dans l’enseignement secondaire et par le fait que les enfants vulnérables, les enfants vivant dans les régions rurales et reculées et les enfants d’ascendance africaine continuent d’être victimes de discrimination au sein du système éducatif et ont un faible taux d’obtention de diplômes. Le Comité note également avec préoccupation que les conditions économiques et la formation médiocre des enseignants continuent de nuire à la qualité de l’éducation de tous les enfants.

Compte tenu de son Observation générale n o  1 (2001) sur les buts de l’éducation, le Comité recommande à l’État partie :

a) De continuer à allouer les ressources financières nécessaires au développement et à l’amélioration du système éducatif national;

b) D’adopter des mesures concrètes pour garantir à tous les enfants, en particulier aux enfants vulnérables, aux enfants vivant dans les régions rurales et reculées et aux enfants d’ascendance africaine, l’accès à un enseignement de qualité dans des conditions d’égalité;

c) D’adopter une stratégie globale pour éliminer les facteurs contribuant au redoublement et à l’abandon scolaire et de faire en sorte que tous les enfants achèvent leur scolarité, en particulier les enfants vulnérables, les enfants vivant dans des zones rurales et reculées et les enfants d’ascendance africaine;

d) De poursuivre ses efforts en vue de développer plus avant la formation des enseignants et d’améliorer leurs conditions de travail afin de les encourager à dispenser un enseignement de qualité.

Développement de la petite enfance

Le Comité se félicite des efforts consentis par l’État partie pour favoriser la prise en charge et l’éducation de la petite enfance mais est préoccupé par le peu de services spécialisés disponibles à l’échelle du pays, en particulier pour les enfants de moins de 3 ans. Le Comité est également préoccupé par la qualité de ces services et le contrôle qui en est fait.

Le Comité recommande à l’État partie d’améliorer encore la qualité de la prise en charge et de l’éducation de la petite enfance et d’élargir la couverture de ces services, en particulier :

a) En faisant de la prise en charge des enfants âgés de moins de 3  ans une priorité, afin qu’elle soit assurée d’une manière intégrée qui tienne compte du développement global de l’enfant et du renforcement des capacités parentales;

b) En augmentant l’offre de services d’éducation et de prise en charge pour tous les enfants, en assurant une prise en charge gratuite ou abordable de la petite enfance, par l’intermédiaire d’établissements publics ou privés ;

c) En faisant en sorte que tous les prestataires de services d’éducation et de prise en charge de la petite enfance soient dûment enregistrés en tant que tels et fassent l’objet d’un contrôle sur la base de critères précis.

Droit de jouer

Le Comité note avec préoccupation les informations indiquant que les aires de jeu, les parcs et autres espaces publics permettant aux enfants de se livrer à des activités récréatives, culturelles et sportives sont en nombre insuffisant ou en mauvais état.

Compte tenu de son Observation générale n o  17 (2013) sur le droit de l’enfant au repos et aux loisirs, de se livrer au jeu et à des activités récréatives et de participer à la vie culturelle, le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour que tous les enfants, y compris les adolescents, aient accès à des espaces publics appropriés et puissent se livrer à des activités ludiques, récréatives, culturelles et sportives.

H.Mesures de protection spéciales (art. 22, 30, 32, 33, 35, 36, 37 b) à d) et 38 à 40)

Enfants non accompagnés

En dépit des informations fournies par l’État partie, le Comité note avec préoccupation que celui-ci ne s’est pas doté d’une procédure spéciale offrant une protection aux enfants migrants non accompagnés. Le Comité est également préoccupé par les informations indiquant qu’il ne s’est pas davantage doté d’une procédure prévoyant la désignation d’un tuteur ou d’un représentant légal pour les enfants non accompagnés.

Compte tenu de son Observation générale n o 6  (2005) sur le traitement des enfants non accompagnés et des enfants séparés en dehors de leur pays d’origine, le Comité recommande à l’État partie d’adopter une législation complète garantissant protection et assistance aux enfants migrants non accompagnés. Il lui recommande en particulier d’établir une instance nationale permanente spécifiquement chargée de suivre la situation des enfants migrants non accompagnés, d’identifier leurs besoins et de régler les problèmes inhérents au système en vigueur, ainsi que de formuler des directives opérationnelles relatives aux enfants migrants non accompagnés, portant notamment sur leur accueil et leur identification, l’évaluation de leurs besoins et la stratégie de protection à appliquer.

Exploitation économique, notamment le travail des enfants

Le Comité constate avec préoccupation que les enfants sont victimes d’exploitation économique, en particulier dans la vente ambulante, la collecte de déchets et le recyclage, dans les secteurs du bâtiment et du travail domestique ainsi que dans l’agriculture et la sylviculture. Il est également préoccupé par le nombre considérable d’enfants qui exécutent des travaux dangereux dans les secteurs de l’agriculture et de la pêche, utilisant des outils dangereux, transportant de lourdes charges, manipulant des pesticides nocifs, gardant le bétail et étant astreints à des journées de travail particulièrement lourdes.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures urgentes pour surveiller les formes d’exploitation des enfants par le travail et les formes dangereuses de travail des enfants et de les combattre  :

a) En adoptant des mesures tendant à prévenir le travail des enfants qui n’ont pas encore atteint l’âge minimum dans tous les secteurs;

b) En intensifiant ses efforts pour fournir des informations fiables sur le nombre d’enfants qui exercent des activités économiques;

c) En améliorant les mécanismes de surveillance afin de veiller à ce que les lois du travail soient respectées et à ce que les enfants soient protégés contre l’exploitation économique;

d) En menant des enquêtes efficaces sur les cas d’exploitation économique d’enfants et en obligeant les auteurs à rendre des comptes;

e) En sollicitant l’assistance technique du Programme international sur l’abolition du travail des enfants de l’Organisation internationale du Travail, de l’UNICEF, des organisations non gouvernementales compétentes et des partenaires de développement en vue de l’élaboration de programmes de réadaptation et de réinsertion des enfants qui travaillent.

Enfants des rues

Le Comité note que l’État partie a élaboré les programmes Rue et Rue extrême pour venir en aide aux enfants des rues mais est profondément préoccupé par l’absence de données actualisées indiquant le nombre d’enfants se trouvant dans cette situation et le temps qu’il faut compter pour passer d’un système répressif à un système axé sur les droits de l’homme dans le cadre de ces programmes. Il note en outre avec préoccupation les signalements de sévices à enfant imputés aux membres des forces de l’ordre. Le Comité regrette en outre l’absence de services sociaux et de mesures en faveur de la réadaptation et de la réinsertion de ces enfants.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’élaborer et de mettre en œuvre, avec la participation active des enfants eux-mêmes, une politique globale destinée à traiter les causes profondes du phénomène des enfants des rues, pour le prévenir et en réduire l’ampleur;

b) De renforcer les services en formant davantage de personnel et en élaborant des programmes de réadaptation individualisés permettant de réinsérer les enfants dans la société;

c) De s’attaquer au problème de la violence infligée aux enfants des rues par les membres des forces de l’ordre et traduire les auteurs en justice;

d) En coordination avec les organisations non gouvernementales, de garantir aux enfants des rues la protection qui s’impose, à savoir un hébergement, l’accès à des services de santé adéquats ainsi que la possibilité d’aller à l’école et de bénéficier d’autres services sociaux;

e) D’appuyer les programmes de regroupement familial ou de placement dans un cadre familial de remplacement lorsque cela est dans l’intérêt supérieur de l’enfant.

Administration de la justice pour mineurs

Le Comité note avec préoccupation que la délinquance des mineurs est perçue comme étant en augmentation dans l’État partie, ce qui n’est pas confirmé par les données officielles mais a donné lieu à diverses modifications du Code de l’enfance et de l’adolescence contraires à la Convention, notamment :

a)La création d’un nouveau registre national des infractions commises par des adolescents en conflit avec la loi, qui permet de garder la trace de certaines des infractions pour lesquelles l’intéressé a été condamné;

b)L’incrimination de la « tentative de vol » prévue par la loi no 18777 sur les délinquants mineurs de juillet 2011;

c)La décision de faire passer de soixante jours à quatre-vingt-dix jours la durée de la détention avant jugement;

d)La redéfinition de certaines infractions graves, érigées en infractions particulièrement graves, qui a des effets négatifs comme le fait de rendre obligatoire la détention avant jugement.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures voulues pour faire en sorte que sa législation soit pleinement conforme aux principes et aux dispositions de la Convention, et d’abroger à cette fin les modifications récentes du Code de l’enfance et de l’adolescence relatives à l’administration de la justice pour mineurs qui restreignent les ga ranties consacrées aux articles  37 et 40 de la Convention.

Le Comité est également préoccupé par :

a)L’absence de système de justice pour mineurs à l’échelle du pays;

b)Le recours excessif à la privation de liberté, que ce soit à titre de mesure avant jugement ou à titre de sanction, et par l’allongement de la durée de la détention avant jugement;

c)Le recours limité aux mesures autres que la détention;

d)L’absence de programmes de réadaptation et de réinsertion sociale pour les enfants.

Compte tenu de sa précédente recommandation ( CRC/C/URY/ C O/2 , par. 68), de son Observation générale n o 10  (2007) sur les droits de l’enfant dans le système de justice pour mineurs et d’autres normes pertinentes, le Comité prie instamment l’État partie :

a) D’instaurer sans tarder des procédures spéciales et des tribunaux spécialisés pour les mineurs et de doter ceux-ci de ressources humaines, techniques et financières suffisantes, de nommer des juges pour enfants et de veiller à ce que ceux-ci reçoivent l’enseignement et la formation voulus;

b) De promouvoir des mesures de substitution à la détention, comme la déjudiciarisation, la liberté surveillée, la médiation, l’accompagnement psychologique ou les travaux d’intérêt général, à chaque fois que cela est possible, et de veiller à ce que la détention ne soit qu’une mesure de dernier ressort et soit d’une durée aussi brève que possible, et à ce qu’elle fasse l’objet d’un réexamen régulier visant à y mettre un terme;

c) De veiller, dans les cas où la détention est inévitable, à ce que les conditions de détention soient conformes aux normes internationales, notamment pour ce qui est de l’accès à l’éducation et aux services de santé;

d) De prendre des mesures efficaces pour permettre aux enfants en conflit avec la loi de se réadapter et de se réinsérer dans la société.

À cette fin, le Comité recommande à l’État partie d’utiliser les outils d’assistance technique mis au point par le Groupe interinstitutions sur la justice pour mineurs et ses membres, notamment le Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme, l’UNICEF, l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime et les organisations non gouvernementales, et de solliciter l’assistance technique des membres du Groupe dans le domaine de la justice pour mineurs.

I.Ratification du Protocole facultatif établissant une procédure de présentation de communications

En vue de renforcer encore l’exercice des droits de l’enfant, le Comité recommande à l’État partie de procéder à la ratification sans plus tarder du Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant établissant une procédure de présentation de communications.

J.Coopération avec les organismes régionaux

Le Comité recommande à l’État partie de coopérer avec l’Organisation des États américains (OEA) en vue de la mise en œuvre des droits de l’enfant dans l’État partie comme dans d’autres États membres de l’OEA.

IV.Mise en œuvre et soumission de rapports

A.Suivi et diffusion

Le Comité recommande à l’État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour que les recommandations formulées dans les présentes observations finales soient pleinement mises en œuvre. Il lui recommande également que les troisième à cinquième rapports périodiques, soumis en un seul document, les réponses écrites de l’État partie à la liste de points et les présentes observations finales soient largement diffusés dans les langues du pays.

B.Prochain rapport

Le Comité invite l’État partie à soumettre en un seul document ses sixième et septième rapports périodiques le 19 juin 2021 au plus tard et à y faire figurer des renseignements sur la suite donnée aux présentes observations finales. Ces rapports devront être conformes aux directives spécifiques à l’instrument adoptées le 1 er octobre 2010 ( CRC/C/5 8 /Rev.2 et Cor r .1 ), et ne pas dépasser 21 200 mots, conformément au paragrap he  16 de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale. Si l’État partie soumet un rapport dont le nombre de pages excède la limite fixée, il sera invité à en réduire la longueur de manière à se conformer à la résolution susmentionnée. S’il n’est pas en mesure de remanier son rapport et de le soumettre à nouveau, la traduction de ce rapport aux fins d’examen par le Comité ne pourra être garantie.

Le Comité invite en outre l’État partie à soumettre un document de base actualisé ne dépassant pas 42 400 mots, conformément aux prescriptions applicables au document de base figurant dans les directives harmonisées concernant l’établissement des rapports, y compris les directives relatives à l’établissement d’un document de base commun et les directives relatives à l’établissement des rapports spécifiques aux différents instruments, qui ont été approuvées en juin 2006 à la cinquième Réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ( HRI/G E N/2/Rev.6 , chap. I), et conformément à la résolution 62/26 8 de l’Assemblée générale (par.  16).