CCPR

Pacte international relatif aux droits civilset politiquesDistr.

RESTREINTE*

CCPR/C/70/D/821/1998

9 novembre 2000

FRANÇAIS

Original : ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS DE L'HOMMESoixante‑dixième session16 octobre ‑ 3 novembre 2000

CONSTATATIONS

Communication No 821/1998

Présentée par : M. Rodger Chongwe

Au nom de : L'auteur

État partie :Zambie

Date de la communication : 7 novembre 1997 (date de la lettre initiale)

Décisions antérieures :Décision du Rapporteur spécial prise en application de l'article 91, communiquée à l'État partie le 3 juillet 1998 (non publiée sous forme de document)

Date de la présente décision : 25 octobre 2000

Le 25 octobre 2000, le Comité des droits de l'homme a adopté ses constatations au titre du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif concernant la communication No 821/1998. Le texte des constatations est annexé au présent document.

[ANNEXE]

ANNEXE

CONSTATATIONS DU COMITÉ DES DROITS DE L'HOMME AU TITREDU PARAGRAPHE 4 DE L'ARTICLE 5 DU PROTOCOLE FACULTATIFSE RAPPORTANT AU PACTE INTERNATIONAL RELATIFAUX DROITS CIVILS ET POLITIQUES

‑ Soixante‑dixième session ‑

concernant la

Communication No 821/1998**

Présentée par :M. Rodger Chongwe

Au nom de : L'auteur

État partie :Zambie

Date de la communication : 7 novembre 1997 (date de la lettre initiale)

Décisions antérieures :Décision du Rapporteur spécial prise en application de l'article 91, communiquée à l'État partie le 3 juillet 1998 (non publiée sous forme de document)

Le Comité des droits de l'homme, institué en vertu de l'article 28 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Réuni le 25 octobre 2000

Ayant achevé l'examen de la communication No 821/1998 présentée par M. Rodger Chongwe en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques,

Ayant tenu compte de toutes les informations écrites qui lui ont été communiquées par l'auteur de la communication et l'État partie,

Adopte ce qui suit :

Constatations au titre du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif

1.1L'auteur de la communication est Rodger Chongwe, citoyen zambien né le 2 octobre 1938. Il se dit victime d'une violation par la Zambie de droits que lui confèrent les articles 6 et 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques; sa plainte soulève la question de la sécurité de la personne, qui pourrait être examinée à la lumière de l'article 9.

Rappel des faits présentés par l'auteur

2.1L'auteur, avocat zambien et président d'une alliance composée de 13 partis d'opposition, affirme que, dans l'après‑midi du 23 août 1997, lui‑même et M. Kenneth Kaunda ‑ qui a été Président de la Zambie pendant 27 ans ‑ ont été pris pour cible et blessés par la police. L'auteur affirme que l'incident a eu lieu à Kabwe, ville située à environ 170 kilomètres au nord de Lusaka, alors qu'il allait participer avec M. Kaunda à un rassemblement politique important en vue de lancer une campagne de désobéissance civile. Il joint en annexe à sa communication des rapports de l'organisation Human Rights Watch et du Réseau interafricain pour les droits de l'homme et le développement.

2.2L'auteur déclare que la police a tiré sur le véhicule à bord duquel il se trouvait, blessant légèrement l'ancien Président Kaunda et le blessant lui‑même grièvement. La police a ensuite promis d'ouvrir sa propre enquête. La Commission zambienne des droits de l'homme aurait elle aussi entrepris une enquête sur la fusillade, mais les résultats éventuels des enquêtes n'ont pas été communiqués.

2.3L'auteur cite en outre un document publié par l'organisation Human Rights Watch en mai 1998 [vol. 10, No 2 (A)], intitulé "Zambia, no model for democracy" ("La Zambie n'est pas une démocratie modèle"), dont 10 pages sont consacrées à la "fusillade de Kabwe" et qui confirme les faits en s'appuyant sur des déclarations de témoins et des rapports médicaux.

2.4Les faits sont décrits comme suit dans le rapport :

"... Au moment où M. Kaunda et le chef de l'alliance, M. Rodger Chongwe, allaient quitter les lieux en voiture, la police a attaqué leur véhicule avec des gaz lacrymogènes puis des armes à balles réelles dans l'intention apparente d'empêcher leur départ. D'après des témoins oculaires, aucune sommation n'a été faite avant les coups de feu. Un petit nombre de policiers étaient munis de fusils d'assaut AK ‑47, des officiers supérieurs étaient armés de revolvers et les membres des unités mobiles étaient équipés de quelques G ‑3. La plupart des policiers n'étaient armés que de matraques et de grenades lacrymogènes..."

2.5Au cours d'un entretien avec l'organisation Human Rights Watch, le chauffeur de M. Kaunda, Nelson Chimanga, aurait déclaré :

" ... Ils (les policiers) ont attaqué la voiture avec des grenades lacrymogènes; une grenade a pénétré dans la voiture parce que j'avais ouvert une fenêtre afin d'évacuer les fumées. Quand nous sommes sortis de la zone enfumée, j'ai dû faire un écart pour éviter un véhicule de police qui essayait de nous bloquer la voie. Juste avant le rond ‑point, j'ai dû encore éviter un deuxième véhicule qui bloquait le passage puis un troisième placé en travers de la route. C'est après l'avoir dépassé que nous avons entendu l'impact de la balle. Soudain, Rodger Chongwe s'est mis à perdre son sang à mes côtés. Nous lui avons donné les premiers soins dans le véhicule mais, comme il perdait beaucoup de sang, nous avons fait demi ‑tour vers l'hôpital général de Kabwe. À cause de la présence d'importantes forces de police paramilitaires, j'ai garé le véhicule derrière l'hôpital et nous sommes partis pour Lusaka vers 3 heures."

2.6L'ancien Président Kenneth Kaunda a relaté les faits comme suit :

"Une balle tirée par la police zambienne a éraflé le sommet de mon crâne. La même balle a blessé beaucoup plus sérieusement M. Chongwe...

À ce moment, la police a ouvert le feu à balles réelles. Une balle a effleuré ma tête et touché sous l'oreille droite M. Chongwe qui était assis à l'avant. Mon collaborateur, Anthony Mumbi, a été légèrement blessé par des éclats. J'aurais probablement été tué si mon garde du corps, Duncan Mtonga, ne m'avait pas poussé de côté lorsqu'il a entendu les coups de feu. Moi ‑même, je ne les avais pas entendus."

2.7L'un des passagers du véhicule était l'expert juridique de l'United Independence Party (UNIP) (Parti unifié pour l'indépendance nationale), Mwangala Zaloumis, qui a adressé à l'organisation Human Rights Watch une déclaration écrite datée du 4 septembre 1997 :

" ... Le passage du véhicule a été bloqué trois fois en trois endroits différents par des véhicules de police. À environ 200 mètres des bureaux du parti, la voiture présidentielle (note du secrétaire : la voiture de l'ancien Président) a essuyé des coups de feu et des grenades lacrymogènes ont été tirées au même moment à l'intérieur du véhicule dont les fenêtres avaient été ouvertes à cause de l'explosion antérieure de grenades lacrymogènes autour et sous le véhicule. La plus grande confusion régnait à l'intérieur du véhicule envahi par les fumées. Ensuite, nous avons vu du sang partout. M. Chongwe avait été touché à la joue et saignait abondamment. L'un des membres du personnel de sécurité, qui était assis à côté de moi, saignait également. Il avait été touché par des éclats à différentes parties du corps..."

2.8D'après le rapport de l'organisation Human Rights Watch, le 26 août 1997, le Président Chiluba aurait démenti que la fusillade de Kabwe avait été une tentative d'assassinat commanditée par l'État. Il a affirmé que la police zambienne avait diligenté une enquête et que Nungu Sassasali, l'officier qui commandait les forces de police présentes à Kabwe, avait été relevé de ses fonctions. Toutefois, il a refusé d'ordonner l'ouverture d'une enquête indépendante. La station de radio ZNBC aurait annoncé le 28 août que le Président Chiluba avait dit que le Gouvernement ne présenterait pas d'excuses au sujet de la fusillade de Kabwe puisqu'il ne pouvait en être tenu pour responsable.

2.9D'après ledit rapport, qui reprenait une information publiée par le Zambia Daily Mail, le Ministre de l'intérieur, Chitalu Sampa, avait déclaré le 31 août :

"On nous dit que la balle a touché M. Kaunda à la tête, que la même balle a traversé la joue de M. Chongwe et est allée blesser une autre personne au cou. Vraiment, comment cela serait ‑il possible ? Nous pouvons donc affirmer catégoriquement que les coups de feu n'ont pas été tirés par la police."

En outre, le 13 novembre, le Président Chiluba aurait déclaré :

"Ces deux personnes n'ont pas été blessées par balle. Un AK ‑47 n'aurait pas causé une simple blessure. Ils doivent prouver qu'on leur a tiré dessus."

Le Président a ensuite reconnu que la police avait tiré en l'air afin de tenter de disperser le rassemblement de l'opposition.

2.10L'auteur affirme avoir été admis à l'hôpital de Kabwe immédiatement après la fusillade. Le rapport de Human Rights Watch cite un rapport médical adressé par l'hôpital de Kabwe au Secrétaire permanent du Ministère de la santé, à Lusaka :

"L'examen du patient a révélé une blessure causée par la perforation de la joue droite, communiquant avec une plaie ouverte à la partie supérieure du cou."

En outre, il est dit ce qui suit dans un rapport médical daté du 3 octobre 1997, établi par l'hôpital St John of God, en Australie, pays où l'auteur a trouvé refuge :

"Un corps métallique étranger de petite taille peut être observé dans les tissus mous situés à la base du crâne, juste sous la peau, constatation compatible avec la thèse d'une blessure par balle ... La présence d'un petit fragment de métal a été décelée dans les tissus mous situés à l'arrière de la région cervicale supérieure, juste sous la peau..."

2.11L'organisation Human Rights Watch a dit avoir soumis les rapports médicaux, des photographies et le film vidéo de la Commission zambienne des droits de l'homme au docteur Richard Shepard du département médico‑légal de l'école de médecine de St George's Hospital, à Londres, pour expertise. Le docteur Shepard a formulé la conclusion suivante :

"Au vu des éléments que j'ai examinés, il est possible d'affirmer avec certitude qu'une balle a touché et pénétré le véhicule en diffusant des fragments à l'intérieur, un peu comme un essaim d'abeilles en furie. Toutes les blessures subies par M. Kaunda, M. Chongwe et le collaborateur de M. Kaunda ont pu être causées par cet événement. Rodger Chongwe a de la chance d'être encore en vie. Si les éclats l'avaient touché deux pouces (5 centimètres) plus à gauche, il serait mort. La perforation de la balle indique une trajectoire de haut en bas, légèrement inclinée, ce qui suggère que le tireur occupait une position un peu surélevée, d'une hauteur équivalant à celle d'une benne de camion. L'angle de tir ne laisse pas penser que le coup soit parti d'un arbre ou d'un toit."

2.12Human Rights Watch a également demandé son avis à un spécialiste des armes à feu et de balistique, M. Graham Renshew, qui a examiné les photographies de la perforation de balle relevée dans le véhicule de M. Kaunda, les photographies d'une cartouche trouvée près de la scène de la fusillade le lendemain de la manifestation, ainsi qu'une photographie d'une balle qui, d'après le Parti unifié pour l'indépendance nationale, a été extraite du véhicule après l'incident. Selon Human Rights Watch, ce spécialiste a fait la réponse suivante :

"Une balle a clairement transpercé le véhicule par l'arrière ... Cette balle correspond à la cartouche ... La disposition des rides repliées vers l'arrière laisse penser qu'elle a traversé trois couches de métal, ce qui est compatible avec la pénétration du véhicule. Elle pourrait avoir été tirée par un AK ‑47 de fabrication non russe, mais il est plus vraisemblable qu'il s'agisse d'un G ‑3 ou d'un FAR belge...

La perforation de balle relevée dans le véhicule de M. Kaunda est compatible avec la balle et la cartouche. Grâce à cette information, il serait possible de faire correspondre la balle et l'arme avec laquelle elle a été tirée. Si l'on ne peut pas affirmer qu'il s'agissait d'une tentative d'assassinat, on peut dire avec certitude que tous les passagers de la voiture ont de la chance d'être encore en vie. Si la balle avait touché une vitre, elle aurait pu tuer quelqu'un sur le coup. Elle a été ralentie et déviée en transperçant le métal."

2.13Deuxièmement, dans son rapport sur la fusillade de Kabwe, que l'auteur a communiqué, le Réseau africain pour les droits de l'homme et le développement a conclu que la fusillade avait bien eu lieu et qu'un tribunal international devrait enquêter sur la tentative d'assassinat perpétrée contre l'ancien Président Kenneth Kaunda. Ce rapport, qui repose sur les témoignages de personnes directement impliquées dans la fusillade, montre que le véhicule à bord duquel l'auteur se trouvait avait quitté le centre de Kabwe. Des témoignages indiquent qu'avant le départ de la voiture le commandant de la police locale avait donné à ses hommes l'ordre de tirer sur la voiture sans donner de détails concernant le but de l'opération; l'information a été diffusée sur le réseau radio de la police. À la sortie de Kabwe, à un rond‑point, un véhicule de police dont le numéro d'immatriculation et le chauffeur ont été identifiés, a cherché à barrer la route au véhicule. Le chauffeur a réussi à éviter l'obstacle et des témoignages indiquent que deux policiers debout à l'arrière du véhicule de police ont ouvert le feu.

2.14L'auteur affirme que le 28 novembre 1997, alors qu'il se trouvait à bord d'un avion de British Airways à Harare, des membres du personnel de l'aéroport et de la compagnie aérienne lui ont dit qu'un avion spécial envoyé par le Gouvernement zambien l'attendait sur le tarmac. Il a décidé de ne pas rentrer en Zambie et réside depuis cet incident en Australie. Il ne retournera pas en Zambie car il craint pour sa vie.

2.15Il ressort des renseignements fournis par l'auteur qu'il ne semble pas avoir pris des mesures pour épuiser les recours internes, si ce n'est qu'il a déposé une demande d'indemnisation auprès du Procureur général de la République de Zambie, Ministre de la justice. Cette demande a été déposée environ un mois et demi après la fusillade de Kabwe, le 15 octobre 1997. L'auteur déclare qu'il n'a accès à aucun recours interne utile.

Teneur de la plainte

3.L'auteur affirme que l'incident du 23 août 1997 était une tentative d'assassinat perpétrée par le Gouvernement zambien et qu'il constitue une violation de l'article 6 du Pacte. Selon lui, les juges zambiens sont soumis à des pressions dans l'exercice de leurs fonctions, et ceci entraîne une violation de l'article 14. Il soulève en outre la question de la sécurité de la personne. Le versement d'un montant de 2,5 millions de dollars des États‑Unis au titre de dommages‑intérêts constituerait à ses yeux une indemnisation raisonnable.

Examen de la recevabilité

4.1La communication et ses annexes ont été transmises à l'État partie le 3 juillet 1998. Ce dernier n'a pas répondu à la demande que lui avait faite le Comité, conformément à l'article 91 du règlement intérieur, de lui soumettre des informations et des observations portant à la fois sur la recevabilité et sur le fond de la communication, en dépit de nombreux rappels dont le dernier date du 5 août 1999. Le Comité rappelle qu'il ressort implicitement du Protocole facultatif que l'État partie doit lui communiquer toutes les informations dont il dispose et regrette que, dans le cas présent, l'État partie n'ait pas coopéré. En l'absence de réponse de l'État partie, il convient d'accorder tout le poids voulu aux allégations de l'auteur, pour autant qu'elles soient étayées.

4.2Avant d'examiner une plainte soumise dans une communication, le Comité des droits de l'homme doit, conformément à l'article 87 de son règlement intérieur, déterminer si cette communication est recevable en vertu du Protocole facultatif se rapportant au Pacte.

4.3En ce qui concerne l'épuisement des recours internes, le Comité note que l'auteur a fait valoir qu'il n'avait pas accès aux tribunaux nationaux et qu'aucun recours interne utile ne lui était ouvert. L'État partie n'a pas contesté ces affirmations devant le Comité et il convient donc d'accorder le crédit voulu à l'allégation de l'auteur. Le Comité estime en conséquence qu'il n'est pas empêché par le paragraphe 2 b) de l'article 5 du Protocole facultatif d'examiner la communication.

4.4En ce qui concerne l'affirmation de l'auteur selon laquelle l'article 14 du Pacte a été violé, le Comité note que les renseignements donnés par l'auteur ne sont pas suffisants pour étayer, aux fins de la recevabilité, l'allégation selon laquelle l'auteur est victime d'une violation de l'article 14. Cette partie de la communication est donc irrecevable en vertu de l'article 2 du Protocole facultatif.

4.5Le Comité estime que les autres plaintes de l'auteur devraient être examinées quant au fond. En conséquence, il décide que la communication est recevable et procède sans plus tarder à l'examen quant au fond des allégations de violation du paragraphe 1 de l'article 6 et du paragraphe 1 de l'article 9.

Examen quant au fond

5.1Le Comité des droits de l'homme a examiné la présente affaire sur la base des documents dont il avait été saisi par les parties, ainsi que le prévoit le paragraphe 1 de l'article 5 du Protocole facultatif.

5.2Le Comité note que le paragraphe 1 de l'article 6 entraîne pour l'État partie l'obligation de protéger le droit à la vie de tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction. En l'espèce l'auteur a fait valoir, ce que l'État partie n'a pas contesté devant le Comité, que l'État partie avait autorisé sans motif légal le recours à la force par des moyens mortels qui auraient pu entraîner la mort de l'auteur. Dans les circonstances de l'affaire, le Comité conclut que l'État partie n'a pas agi dans le respect de l'obligation qui lui incombe de protéger le droit à la vie consacré au paragraphe 1 de l'article 6 du Pacte.

5.3Le Comité rappelle sa jurisprudence selon laquelle le droit à la sécurité de la personne garanti au paragraphe 1 de l'article 9 du Pacte s'applique, même lorsqu'il n'y a pas privation formelle de liberté. L'interprétation de l'article 9 n'autorise pas les États parties à ne pas tenir compte des menaces à la sécurité individuelle de personnes non détenues relevant de leur juridiction. En l'espèce, il semble que des personnes agissant ès qualités au sein des forces de police zambiennes ont tiré sur l'auteur, le blessant et manquant de peu de le tuer. L'État partie a refusé de faire effectuer des enquêtes indépendantes, et les investigations lancées par la police zambienne ne sont toujours pas achevées ni rendues publiques, plus de trois ans après les faits. Aucune procédure pénale n'a été ouverte, et la demande d'indemnisation présentée par l'auteur semble avoir été rejetée. Dans ces circonstances, le Comité conclut que le droit de l'auteur à la sécurité personnelle garanti au paragraphe 1 de l'article 9 du Pacte a été violé.

6.Le Comité des droits de l'homme, agissant en vertu du paragraphe 4 de l'article 5 du Protocole facultatif se rapportant au Pacte international relatif aux droits civils et politiques, est d'avis que les faits qui lui sont présentés font apparaître une violation du paragraphe 1 de l'article 6 et du paragraphe 1 de l'article 9 du Pacte.

7.En vertu de l'alinéa a) du paragraphe 3 de l'article 2 du Pacte, l'État partie est tenu d'assurer à M. Chongwe un recours juridictionnel utile et de prendre les mesures qui s'imposent pour le protéger des menaces, quelles qu'elles soient, qui pèsent sur la sécurité de sa personne et sa vie. Le Comité prie instamment l'État partie d'ordonner des enquêtes indépendantes sur la fusillade, et d'accélérer les procédures pénales intentées contre les responsables présumés. S'il s'avérait, à l'issue des procédures pénales, que des dépositaires de l'autorité publique agissant ès qualités étaient responsables de la fusillade et des blessures infligées à l'auteur, ce recours devrait comprendre l'octroi de dommages-intérêts à M. Chongwe. L'État partie est tenu de faire en sorte que des violations du même ordre ne se reproduisent pas à l'avenir.

8.Compte tenu du fait que, en devenant partie au Protocole facultatif, l'État partie a reconnu que le Comité avait compétence pour déterminer s'il y avait eu ou non violation du Pacte et que, conformément à l'article 2 de celui-ci, l'État partie s'est engagé à garantir à tous les individus se trouvant sur son territoire et relevant de sa juridiction les droits reconnus dans le Pacte et à assurer un recours utile et exécutoire lorsqu'une violation a été établie, le Comité souhaite recevoir de l'État partie, dans un délai de 90 jours, des informations sur les mesures prises pour donner effet à ses constatations, que l'État partie est également prié de publier.

[Adopté en anglais (version originale), en espagnol et en français. Paraîtra ultérieurement aussi en arabe, en chinois et en russe dans le rapport annuel présenté par le Comité à l'Assemblée générale.]

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