CERD

Convention internationale

sur l’élimination

de toutes les formes

de discrimination raciale

Distr.

GÉNÉRALE

CERD/C/63/CO/4

10 décembre 2003

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATION DELA DISCRIMINATION RACIALESoixante‑troisième session4‑22 août 2003

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

RÉPUBLIQUE TCHÈQUE

1.Le Comité a examiné le cinquième rapport périodique de la République tchèque (CERD/C/419/Add.1), qui était attendu le 1er janvier 2002, à ses 1590e, 1591e et 1592e séances (CERD/C/SR.1590‑1592), tenues les 7 et 8 août 2003. À sa 1603e séance (CERD/C/SR.1603), tenue le 18 août 2003, le Comité a adopté les conclusions suivantes.

A. Introduction

2.Le Comité prend note avec satisfaction de l’esprit d’autocritique manifesté par l’État partie dans son rapport, soumis dans les délais, ainsi que des abondantes informations supplémentaires fournies oralement par la délégation et des réponses constructives apportées aux questions posées.

B. Aspects positifs

3.Le Comité note en s’en félicitant que l’État partie a fait la déclaration prévue à l’article 14 de la Convention et a approuvé le 6 août 2002, l’amendement au paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention.

4.Le Comité prend acte de l’amendement à l’article 10 de la Constitution aux termes duquel les traités internationaux ratifiés et publiés par la République tchèque sont directement applicables et priment sur les normes de droit interne.

5.Le Comité est encouragé par les efforts d’ordre législatif que déploie l’État partie dans le domaine législatif en vue de donner effet aux dispositions de la Convention, en particulier dans le domaine de la protection des minorités nationales, par l’amendement apporté au Code pénal en 2002 et par les amendements au Code de procédure civile transférant la charge de la preuve de la victime à l’auteur présumé de l’acte incriminé.

6.En outre, le Comité se félicite de l’existence d’un certain nombre d’organes consultatifs gouvernementaux qui s’occupent des droits de l’homme, en particulier des droits des minorités nationales, en collaboration avec la société civile en particulier: le Conseil du Gouvernement de la République tchèque pour les affaires de la communauté rom, le Conseil des droits de l’homme du Gouvernement de la République tchèque et le Conseil gouvernemental des minorités nationales.

7.Le Comité prend note avec une grande satisfaction des mesures, stratégies et programmes concrets que l’État partie a adoptés en vue d’améliorer la situation des Roms et d’autres groupes marginalisés, dont les réfugiés.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

8.Tout en prenant note des efforts entrepris par le Gouvernement en vue d’élaborer une loi d’ensemble contre la discrimination, le Comité exprime sa préoccupation face aux difficultés auxquelles se heurte ce processus.

Le Comité encourage l’État partie à mener rapidement à leur terme les efforts qu’il déploie en vue de l’adoption d’une loi d’ensemble contre la discrimination puis à veiller à sa bonne application. Il engage l’État partie à incorporer dans le texte de ce nouvel instrument législatif la définition de la discrimination telle qu’elle figure au paragraphe 1 de l’article premier de la Convention.

9.Tout en prenant note des efforts que déploie l’État partie pour combattre la violence et la discrimination à motivation raciale, le Comité reste préoccupé par la poursuite des actes de violence à motivation raciale et d’incitation à la haine ainsi que par la persistance de l’intolérance et d’une discrimination de fait, en particulier à l’égard de la minorité rom.

Le Comité recommande au Gouvernement de poursuivre et d’intensifier ses efforts tendant à appliquer plus efficacement la législation en vigueur.

10.Le Comité note en outre que l’État partie n’a déclaré punissable que la participation active à des organisations incitant à la discrimination raciale et la promouvant.

Le Comité engage l’État partie à envisager de réviser cette disposition et de déclarer punissable toute participation à des organisations qui incitent à la discrimination raciale et l’encouragent, conformément à l’article 4 b) de la Convention.

11.Le Comité est préoccupé par les allégations faisant état de mauvais traitements à motivation raciale, d’une protection inefficace et d’une discrimination à l’égard des Roms de la part d’agents chargés de l’application des lois, en particulier de policiers. En outre, il a été avancé que les allégations portant sur des abus de la part d’agents chargés de l’application des lois ne faisaient pas toujours l’objet d’investigations rapides et impartiales. Tout en prenant note des nombreuses initiatives prises dans le domaine de la formation et de l’éducation des policiers, le Comité souligne que des investigations rapides et impartiales revêtent une importance déterminante dans la lutte contre les attitudes et pratiques discriminatoires.

Le Comité recommande que l’État partie intensifie ses efforts visant à faire cesser pareilles pratiques discriminatoires. Il recommande en outre que la procédure d’instruction des plaintes contre les agissements de policiers soit menée et supervisée par un organe qui ne dépende pas de la police ni du Ministère de l’intérieur. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements statistiques sur le nombre et la nature des plaintes pour discrimination raciale reçues, les poursuites engagées et les peines prononcées.

12.Le Comité prend note des efforts en cours tendant à faciliter l’accès au marché du travail pour les individus qui éprouvent des difficultés à trouver un emploi, notamment les Roms, les demandeurs d’asile et les membres d’autres groupes marginalisés. Le taux de chômage des Roms demeure toutefois anormalement élevé et continue à susciter la préoccupation du Comité. Cette préoccupation est aggravée par les informations signalant la pratique de l’usure et ses conséquences économiques et sociales défavorables pour les Roms.

Le Comité engage l’État partie à poursuivre et intensifier ses programmes de réduction de la pauvreté et de création d’emplois en faveur des Roms, ainsi qu’à envisager de mettre en place un système fonctionnel d’attribution de prêts aux couches socialement défavorisées de la population, dont les Roms, pour en finir avec les prêts usuraires. À ce propos, le Comité encourage l’État partie à prendre dûment en considération la situation des femmes roms, conformément à sa recommandation générale XXVII.

13.Le Comité se félicite des informations relatives aux projets de construction de logements à l’intention des Roms que l’État partie a mis en œuvre et prend acte des efforts considérables consacrés à la recherche de solutions optimales pour enrayer la dégradation de leurs conditions de logement. Le Comité note que, à court terme, la construction de logements destinés à être occupés principalement par des Roms peut donner des résultats positifs, mais constate avec préoccupation qu’à long terme de telles solutions risquent de perpétuer la ségrégation. Le Comité est en outre préoccupé par les expulsions domiciliaires ou les menaces d’expulsion auxquelles seraient confrontées de nombreuses familles roms.

Le Comité encourage l’État partie à poursuivre ses activités dans le domaine des recherches relatives aux problèmes du logement et à définir des solutions propres à promouvoir l’intégration sociale des Roms. En ce qui concerne les expulsions, le Comité recommande à l’État partie de mettre au point des mesures destinées à empêcher les expulsions ou à en atténuer les effets négatifs, en particulier pour les groupes les plus vulnérables.

14.Tout en ayant conscience de la complexité du problème de l’éducation spéciale et en prenant note des mesures d’accompagnement prises par le Gouvernement en vue de promouvoir la fourniture d’un soutien adapté aux enfants roms, le Comité reste préoccupé, tout comme le Comité des droits de l’enfant (CRC/C/15/Add.201, par. 54), face au placement d’une proportion anormalement élevée d’enfants roms dans des «écoles spéciales».

Rappelant sa recommandation générale XXVII, le Comité engage le Gouvernement à poursuivre et intensifier ses efforts tendant à améliorer la situation des enfants roms dans le domaine de l’éducation, notamment en les scolarisant dans les écoles ordinaires, en recrutant du personnel scolaire parmi les membres des communautés roms et en sensibilisant les enseignants et les autres professionnels du secteur éducatif au tissu social et à la conception du monde des enfants roms et de ceux éprouvant des difficultés manifestes d’apprentissage.

15.Le Comité est encouragé par les travaux en cours devant aboutir à une nouvelle loi sur l’aide juridictionnelle appelée à faciliter l’accès des victimes de la discrimination à la justice. C’est toutefois avec préoccupation qu’il continue à recevoir des indications selon lesquelles dans les affaires pénales les juges hésitent à conclure à la motivation raciale des délits sur lesquels ils ont à se prononcer. Le Comité regrette de plus l’absence de renseignements sur des affaires précises de victimes de discrimination ayant obtenu une réparation adéquate.

Le Comité encourage l’État partie à mettre en place rapidement un système d’aide juridictionnelle en faveur des victimes présumées de racisme. Il demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur le nombre de personnes ayant bénéficié de l’aide juridictionnelle ainsi que des informations sur les affaires dans lesquelles des victimes ont obtenu une réparation adéquate.

16.Le Comité se félicite des campagnes contre le racisme menées annuellement en direction d’une large frange de la population et prend note des nombreuses autres initiatives de l’État partie tendant à combattre les attitudes et pratiques discriminatoires. Malheureusement, les attitudes négatives à l’égard des minorités et des réfugiés persistent chez les agents publics, les médias et le grand public, ce qui est un sujet de préoccupation pour le Comité. En outre, le Comité constate avec préoccupation que les membres de l’appareil judiciaire, contrairement aux policiers, ne semblent pas être la cible d’activités de sensibilisation et d’éducation.

Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et intensifier ses campagnes contre le racisme ainsi que ses autres efforts tendant à combattre les stéréotypes raciaux et ethniques. Il recommande que l’État partie – tout en poursuivant ses campagnes éducatives en direction du public – continue à mettre en œuvre des programmes de formation ciblés et les diversifie en direction des membres de certains groupes professionnels, tels que policiers, juges et autres agents publics que leur travail met en contact avec les Roms et les autres groupes vulnérables.

17.Le Comité encourage l’État partie à consulter les organisations de la société civile participant à la lutte contre la discrimination raciale dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique.

18.Le Comité recommande à l’État partie de diffuser à grande échelle les renseignements sur les recours internes disponibles contre les actes de discrimination raciale, sur les modalités légales de l’obtention d’une indemnisation dans les affaires de discrimination et sur la procédure de plainte individuelle en vertu de l’article 14 de la Convention.

19.Le Comité accueille avec satisfaction les renseignements relatifs à l’élaboration d’un projet de plan d’action national contre le racisme en République tchèque. Il attend avec intérêt sa présentation à l’occasion du Séminaire régional d’experts pour l’Europe orientale sur la mise en œuvre du programme d’action adopté à la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, que la République tchèque doit accueillir en septembre 2003. Le Comité invite l’État partie à inclure dans son prochain rapport périodique des informations sur le plan d’action national et toutes autres mesures prises pour donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban au niveau national.

20.Le Comité recommande à l’État partie de mettre à la disposition du grand public ses rapports périodiques dès leur soumission et de faire connaître de la même manière les conclusions y relatives du Comité.

21.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses sixième et septième rapports périodiques en un seul document, attendu le 1er janvier 2006, et d’y traiter tous les points abordés dans les présentes conclusions.

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