Nations Unies

CED/C/ARG/AI/1

Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

Distr. générale

17 janvier 2020

Français

Original : espagnol

Anglais, espagnol et français seulement

Comité des disparitions forcées

Dix-huitième session

30 mars-9 avril 2020

Point 7 de l’ordre du jour provisoire

Examen des renseignements complémentaires soumis par les États parties

Renseignements complémentaires soumis par l’Argentine en application du paragraphe 4 de l’article 29 de la Convention *

[Date de réception : 18 novembre 2019]

I.Méthodologie

1.Le présent rapport a été établi par la Direction nationale des affaires juridiques internationales relatives aux droits de l’homme, du Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel du Ministère de la justice et des droits de l’homme, et par la Direction des droits de l’homme et des questions de genre du Ministère des relations extérieures et du culte.

II.Rapport soumis en application de l’article 29 de la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées

A.Renseignements d’ordre général

1.Renseignements sur la suite donnée aux paragraphes 9 et 11 des observations finales (CED/C/ARG/CO/1)

2.Le Sénat examine actuellement un projet de loi visant à élever la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, adoptée par la loi no26.298, au rang constitutionnel.

3.De fait, le Sénat a été saisi du dossier législatif 0191-S-2018, qui a pour objet d’élever au rang constitutionnel la Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées (copie du dossier 0906-S-16).

B.Définition et incrimination de la disparition forcée

1.Renseignements sur la suite donnée au paragraphe 13 des observations finales

4.En mars 2017, une commission pour la réforme du Code pénal a été créée, par le décret no 103/17, au Ministère de la justice et des droits de l’homme.

5.La Commission a été chargée d’élaborer un avant-projet de code pénal, en tenant compte des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ratifiés par la République argentine et des progrès réalisés dans l’intégration régionale du pays, de manière à concentrer toute la législation pénale dans un seul corpus normatif.

6.Il est proposé dans l’avant-projet que le Code pénal soit enrichi d’un nouveau livre, consacré aux crimes contre l’humanité et contre la communauté internationale, au nombre desquels figurent les disparitions forcées de personnes.

7.Le Livre III porte sur les crimes visés par le Statut de Rome (crime de génocide, crimes contre l’humanité, disparitions forcées de personnes, crimes de guerre et crime d’agression) et établit les dispositions générales qui leur sont applicables.

8.En ce qui concerne les disparitions forcées de personnes, il a été décidé d’intégrer la qualification figurant à l’article 142 ter du Code pénal dans le Livre III de l’avant-projet de texte, car les disparitions forcées s’inscrivent, par leurs caractéristiques, dans la catégorie des crimes contre l’ordre international.

9.Le type de crimes susmentionné est régi par des dispositions générales particulières, dont l’imprescriptibilité de l’action pénale et de la peine, la compétence universelle et l’impossibilité d’invoquer l’obéissance aux ordres de supérieurs comme moyen de défense.

10.Le fait que ces crimes figurent dans un nouveau livre, qu’ils constituent une catégorie particulière d’infractions pénales et qu’ils soient passibles de la peine maximale prévue par le système juridique, à savoir l’emprisonnement à perpétuité, montre bien l’importance qui leur est accordée.

11.En mars 2019, le Président a transmis l’avant-projet de texte élaboré par la Commission pour la réforme du Code pénal au Congrès pour examen.

C.Responsabilité pénale et coopération judiciaire en matière de disparition forcée

1.Renseignements sur la suite donnée aux paragraphes 15, 17, 19, 21 et 23 des observations finales

12.Le Ministère public de la nation est un organe autonome et indépendant du système national d’administration de la justice, qui est chargé de garantir l’accès de tous à la justice et de veiller à l’application effective de la Constitution et des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels l’Argentine est partie.

13.Compte tenu de la structure fédérale du pays, il convient de préciser que le Ministère public de la nation intervient sur tout le territoire dans les affaires de compétence fédérale telles que les crimes contre l’humanité, la traite des personnes, les disparitions forcées ou les infractions commises par les forces de sécurité fédérales, et uniquement dans la ville autonome de Buenos Aires, capitale fédérale du pays, pour les infractions qui ne relèvent pas de la compétence fédérale.

14.Le Ministère public de la nation a promu des politiques institutionnelles qui visent à prévenir et à réprimer les pratiques constitutives de violence institutionnelle et à lutter contre la persistance de régimes d’impunité systématique pour certaines violations des droits de l’homme.

15.Des structures spécialisées, des protocoles et des lignes directrices relatifs aux droits de l’homme ont ainsi été mis en place. Souvent, les mesures en question ne concernent pas exclusivement les disparitions forcées, mais offrent des moyens concrets de faire face à ce type d’infraction et de garantir l’accès à la justice aux personnes qui en sont victimes et à leurs proches.

Mesures adoptées pour enquêter sur les crimes contre lhumanité et poursuivre leurs auteurs

16.Pour ce qui est des violations graves des droits de l’homme commises pendant la dernière dictature civile et militaire (1976-1983), les autorités demeurent résolues à enquêter sur les crimes contre l’humanité perpétrés, qui recouvrent des milliers de cas de disparition forcée, et à poursuivre pénalement leurs auteurs.

17.À partir de 2007, le Service de coordination et de suivi des affaires relatives aux violations des droits de l’homme commises pendant la période du terrorisme d’État a veillé à la conduite d’enquêtes préliminaires sur les cas de violations massives et systématiques des droits de l’homme au cours de la dernière dictature civile et militaire. Depuis 2013, ce mandat est assumé par le Département des crimes contre l’humanité du Bureau du Procureur général de la nation, qui a pour autres fonctions d’élaborer des stratégies permettant de repérer les acteurs civils du terrorisme d’État et d’enquêter de manière plus approfondie sur leurs responsabilités, de nouer le dialogue avec les acteurs institutionnels et sociaux qui participent au processus de vérité et de justice, et d’effectuer le suivi et l’analyse statistique des procédures judiciaires engagées contre les auteurs présumés des crimes commis pendant la dictature.

18.Le Service spécialisé dans les affaires de soustraction d’enfants pendant la période du terrorisme d’État doit également être mentionné. Il a pour mandat d’élaborer et d’engager des mesures qui permettent au Département des crimes contre l’humanité du Bureau du Procureur général de la nation de traiter ces affaires plus efficacement et, en particulier, de réduire les délais d’instruction, qui ont tendance à se prolonger de manière injustifiée sans pour autant déboucher sur des résultats probants. Il est notamment chargé de veiller au plein respect du Protocole relatif au traitement des affaires de soustraction d’enfants pendant la période du terrorisme d’État, qui définit les règles à suivre pour l’instruction pénale de pareils cas.

19.À ce jour, 130 personnes qui avaient été soustraites à leur famille pendant leur enfance ont pu retrouver leur identité grâce aux politiques mises en œuvre par l’État avec la participation active d’organisations de la société civile spécialisées dans la défense des droits de l’homme.

20.En ce qui concerne les statistiques relatives au processus de justice, le Département des crimes contre l’humanité du Bureau du Procureur général de la nation s’emploie à développer une base de données actualisées sur l’état des procédures engagées pour crime contre l’humanité en Argentine.

21.Des données statistiques, mises à jour le 3 juin 2019, sont fournies ci‑après.

22.Selon les données du Département des crimes contre l’humanité du Bureau du Procureur général de la nation, 226 affaires ont été jugées. Elles ont abouti à la condamnation de 915 personnes. Vingt-deux affaires sont en instance, 263 affaires sont en cours d’instruction et plus de 80 sont prêtes à être jugées.

23.On compte 1 459 personnes détenues, dont 649 sont assignées à résidence, 248 sont placées en régime pénitentiaire et 77 sont gardées dans les locaux des forces de sécurité. Parallèlement, 974 personnes mises en cause sont en liberté.

24.Le Département des crimes contre l’humanité du Bureau du Procureur général de la nation s’emploie à désagréger les données figurant dans son registre de décisions de condamnation ou d’acquittement par affaire et par victime.

25.La nouvelle approche systématique, encore en cours d’élaboration, permettra de mettre en évidence les données sur les affaires ayant abouti à des condamnations pour disparition forcée ou privation illégitime de liberté.

Mesures adoptées pour enquêter sur les faits de violence institutionnelle et poursuivre leurs auteurs

26.Le Ministère public de la nation a pris diverses mesures en vue d’enquêter sur les faits de violence institutionnelle et de poursuivre leurs auteurs, notamment par la voie de la décision PGN no3/11, portant adoption d’un protocole relatif aux enquêtes sur les actes de violence, brimades, contraintes illégales et tortures, de la décision PGN no10/11, par laquelle il enjoint aux magistrats compétents en matière pénale de faire en sorte, directement ou indirectement, qu’une force de sécurité soit écartée de l’enquête lorsque la responsabilité de l’un de ses membres dans la commission de l’infraction ayant donné lieu à l’ouverture d’une enquête ne peut être exclue, et de la décision PGN no4/12, portant adoption des règles minimales applicables dans les enquêtes sur les préjudices corporels et homicides commis par des membres des forces de sécurité dans l’exercice de leurs fonctions.

27.En 2013, le Département des affaires de violence institutionnelle a été créé dans le but de rendre les violences institutionnelles plus visibles et de doter le Bureau du Procureur général de la nation, dont il dépend, de dispositifs plus efficaces pour enquêter sur ces infractions graves, qui recouvrent les disparitions forcées de personnes, et juger leurs auteurs.

28.À ce jour, le Département des affaires de violence institutionnelle a participé à l’examen de huit affaires de disparition forcée, au stade de l’enquête et des poursuites pénales. Dans ce contexte, il a fourni des services de conseil aux membres du parquet aux fins de l’analyse préliminaire des faits et de leur qualification selon la classification des infractions pénales applicable. Il a aussi proposé des moyens de preuve, établi des actes juridiques aux différentes étapes de la procédure (demandes d’instruction ou d’engagement de poursuites) et fourni une assistance technique au cours des audiences.

Compétence du Ministère public de la nation pour louverture denquêtes d’office en cas de disparition forcée

29.Le Département des crimes contre l’humanité et le Département des affaires de violence institutionnelle mènent des enquêtes préliminaires et thématiques d’office (loi nº 27148, art. 24) et apportent leur contribution aux différentes étapes des procédures en cours ; leurs membres interviennent souvent en qualité d’assistants dans l’instruction d’affaires de disparition de personnes.

Mesures visant à garantir que des membres des forces de sécurité ne soient pas chargés d’enquêter sur des faits dans lesquels ils sont impliqués

30.Le 5 mai 2011, le Congrès a adopté la loi no 26679 qui, entre autres modifications, ajoute un article 194 bis au Code de procédure pénale. Cet article prévoit d’écarter les forces de sécurité qui interviennent dans une enquête lorsqu’il ressort des circonstances de l’affaire que certains de leurs membres peuvent être impliqués, comme auteurs ou complices, dans la commission des faits faisant l’objet de l’enquête, même s’il ne s’agit que d’un simple soupçon. Il a été transposé dans la version actuelle du Code de procédure pénale (reprise du texte de la loi no 27482).

31.À cet égard, le rôle des membres du parquet fédéral et des parquets nationaux est régi par la décision PGN no 10/11, par laquelle le Ministère public de la nation enjoint aux magistrats compétents en matière pénale de faire en sorte, directement ou indirectement, qu’une force de sécurité soit écartée de l’enquête lorsque la responsabilité de l’un de ses membres dans la commission de l’infraction ayant donné lieu à l’ouverture d’une enquête (y compris s’il s’agit d’une disparition forcée) ne peut être exclue.

Mesures adoptées par le Ministère public de la nation en vue d’une coopération internationale dans les enquêtes sur les cas de disparition forcée

32.Un ensemble de mesures a été pris dans le but de promouvoir et de faciliter la coopération internationale et l’entraide judiciaire dans les affaires complexes, notamment de disparition forcée de personnes.

33.Dans le cadre de la Réunion spécialisée des ministères publics du Marché commun du Sud (MERCOSUR) et des États associés, il a été question de créer une sous‑commission de travail sur les crimes contre l’humanité dans le but de disposer d’une instance régionale qui permette l’échange de données d’expérience et de bonnes pratiques sur la répression pénale des violations graves des droits de l’homme et qui facilite l’entraide judiciaire internationale.

34.Des instruments ont été adoptés pour accélérer la coopération entre les ministères publics du MERCOSUR dans les enquêtes pénales sur les crimes contre l’humanité. Un guide concernant l’interprétation et l’application des traités d’entraide judiciaire dans les affaires pénales relatives à des violations graves des droits de l’homme, destiné aux ministères publics du MERCOSUR, a été adopté et plusieurs accords bilatéraux relatifs à la constitution d’équipes communes d’enquête ont été conclus par les ministères publics brésilien, équatorien et uruguayen, en vue d’une action coordonnée qui permettra une répression plus efficace et plus efficiente des infractions complexes.

35.Dans le cadre de la Réunion spécialisée des ministères publics du MERCOSUR et des États associés, il existe une sous-commission de travail sur les personnes privées de liberté et la surveillance de l’action policière, coordonnée par les ministères publics argentin et brésilien. Cette instance régionale a appuyé la négociation et l’adoption d’instruments juridiques visant à guider les magistrats du parquet dans le traitement des affaires de violence institutionnelle.

36.En application du principe de droit international qui impose aux États d’enquêter sur les crimes internationaux, indépendamment du lieu où ils ont été commis, un groupe de travail sur la compétence universelle a été créé en 2016. Il est chargé d’élaborer des directives générales à l’intention des magistrats du parquet qui sont chargés d’affaires de compétence universelle.

Mesures mises en œuvre par le Ministère public de la nation en matière d’accompagnement et de protection des victimes de disparition forcée

37.Des programmes spécialisés d’accompagnement et d’orientation des victimes, en particulier de violence institutionnelle et de violence policière, ont été mis en place.

38.Le programme spécial de prise en charge des victimes de violence policière s’applique aux victimes de disparition forcée et à leurs proches. Il tend à la constitution d’un réseau d’assistance, associant toutes les composantes du Ministère public de la nation, qui permette aux victimes et aux témoins de violence policière de jouir effectivement de leurs droits d’être orientés, informés, entendus et protégés pendant toute la procédure pénale. Il intervient uniquement au stade judiciaire.

39.Aux fins de l’exécution de son mandat, l’équipe chargée de l’application du programme dispose d’un protocole concernant la prise en charge des victimes, qui définit les principes d’intervention applicables, les caractéristiques générales et particulières de l’approche et de l’accompagnement des victimes, en fonction du type d’infraction et de la discipline en jeu, et les règles à suivre pendant toute l’intervention pour garantir une prise en charge de qualité, axée sur la promotion et la protection des droits de l’homme.

40.Au niveau exécutif, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice a été créée au sein du Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel du Ministère de la justice et des droits de l’homme.

41.Comme il ressort du document CED/C/ARG/CO/1/Add.1, le Programme Vérité et Justice, qui relève de la Direction du cabinet des ministres, a été mis en place en 2007 dans le but de coordonner les mesures nécessaires au lancement du processus de vérité et de justice après les crimes contre l’humanité commis pendant la période du terrorisme d’État, de renforcer les capacités institutionnelles à cet effet et de garantir la protection des victimes, des témoins, des avocats et des fonctionnaires de justice qui interviennent dans des procès ou des enquêtes concernant lesdits crimes.

42.Le Programme Vérité et Justice est passé sous la compétence du Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel en 2016, en application du décret no 12/2016, et a ensuite été élevé au rang de direction nationale par la décision administrative no 312/2018, qui a étendu ses fonctions initiales.

43.De ce fait, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice a intégré les attributions du Programme relatif au Registre unifié des victimes du terrorisme d’État et du Corps des avocats intervenant dans les processus de vérité et de justice.

44.Comme suite à l’intégration des nouveaux groupes de travail et à la restructuration de ses services, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice a organisé ses activités autour de quatre grands axes : 1) la coopération avec les acteurs concernés pour assurer le bon déroulement des procès ; 2) les enquêtes sur les cadres du régime répressif et sur les victimes ; 3) la constitution de partie civile ; 4) l’aide aux victimes et aux témoins.

45.La Direction nationale du Programme Vérité et Justice élabore différents outils d’analyse et d’intervention, centrés sur la manière dont les acteurs judiciaires contribuent à l’établissement des infractions commises et des responsabilités engagées dans le cadre du terrorisme d’État, ce qui donne généralement lieu à l’établissement de rapports.

46.Au moyen de ces outils, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice s’attache, en collaboration avec les autorités judiciaires, le Ministère public de la nation et les organismes de soutien ou de protection des témoins, à repérer et à prévenir les situations de risque pour les acteurs judiciaires, ainsi qu’à formuler des recommandations sur les mesures d’accompagnement et de sécurité à adopter.

47.Outre l’établissement de rapports, diverses mesures sont mises en œuvre pour une organisation systématique des informations servant au repérage des situations de risque.

48.La collecte d’informations relatives aux situations de risque a permis d’élaborer une base de données sur les menaces et les intimidations subies par les personnes concernées par des plaintes ou des procédures en cours ou par le processus institutionnel de vérité et de justice.

49.Si cela relève de sa compétence et que la gravité de la situation l’exige, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice intervient d’office, par la coordination des différents organismes publics, pour que les mesures propres à garantir la sécurité des victimes soient adoptées.

50.À la demande du parquet, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice localise les témoins et se met en contact avec eux, aussi bien à l’étape de l’instruction qu’à celle de l’audience, afin d’éviter que la notification soit effectuée par les forces de l’ordre et de promouvoir une approche qui reconnaisse fondamentalement la qualité de sujet de droit aux victimes et témoins du terrorisme d’État.

51.De même, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice organise des entretiens avec les témoins dont la situation d’exposition justifie une évaluation ponctuelle et coordonne les interventions des équipes d’assistance et d’accompagnement.

52.En outre, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice se charge de notifier aux personnes qui auraient été soustraites à leur famille qu’elles sont convoquées par les instances judiciaires pour le prélèvement d’échantillons d’ADN.

53.Pour mener les activités susmentionnées, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice travaille en partenariat avec les tribunaux, les juridictions de procédure orale et les parquets fédéraux de tout le pays, le Ministère public de la nation, le centre « Dr. Fernando Ulloa » du Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel et les équipes provinciales d’aide aux victimes.

54.Depuis 2018, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice contribue aux notifications prévues par la loi no 27372 sur les droits et garanties reconnus aux victimes d’infractions (voir par. 127), dans les affaires de crime contre l’humanité.

55.Au niveau de l’instruction, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice procède au recensement, à l’étude et à l’interprétation de différents fonds d’archives, notamment des fonds numérisés des Archives nationales de la mémoire, des Archives générales de la nation et d’autres archives d’organismes publics et d’organisations de défense des droits de l’homme. À partir des informations obtenues, elle s’emploie à établir quelles structures étaient en place avant et pendant les années du terrorisme d’État, et à définir leurs parts de responsabilité. Elle recoupe les informations collectées dans les différents fonds d’archives afin de reconstituer chaque fait dans son intégralité.

56.En se chargeant du Programme relatif au Registre unifié des victimes du terrorisme d’État, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice a ajouté à sa fonction d’instruction la mission d’établir une matrice de données nationales et actualisables sur les victimes de violations des droits de l’homme (disparues, décédées ou libérées) et sur les lieux de détention clandestine utilisés par l’État pour ses activités répressives illégales (loi no 26691 sur les sites de mémoire du terrorisme d’État) et celle de déterminer ce qu’il est advenu des personnes détenues et disparues par l’analyse d’empreintes digitales ou génétiques.

57.La Direction nationale du Programme Vérité et Justice mène des enquêtes, de sa propre initiative ou sur demande de toute juridiction du pays, dans les affaires de crime contre l’humanité ; elle agit aussi sur demande d’organisations provinciales de défense des droits de l’homme, de commissions et de sites de mémoire, de familles et de différentes organisations de la société civile.

58.Par l’intermédiaire du Corps des avocats intervenant dans les processus de vérité et de justice, la Direction nationale du Programme Vérité et Justice est en outre habilitée à exercer le rôle de représentant en justice, de plaignant, de partie lésée, d’observateur, d’amicus curiae et à participer de toute autre manière à la procédure, selon les règles de forme applicables devant la juridiction compétente dans les affaires soulevant la nécessité de protéger les droits de l’homme.

59.La Direction nationale du Programme Vérité et Justice représente le Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel en qualité de partie plaignante dans les procédures engagées devant les différentes juridictions du pays, aux stades de l’instruction, de l’audience et du recours.

60.Au niveau régional, par l’intermédiaire de la Commission permanente de la mémoire, de la vérité et de la justice, qui relève de la Réunion des hautes autorités en matière de droits de l’homme du MERCOSUR et des États associés, le Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel a souscrit à un mémorandum d’accord relatif à l’échange de documents pour l’élucidation d’affaires de violations graves des droits de l’homme (MERCOSUR/CMC/DEC no 19/17).

61.En 2019, pendant la présidence argentine du MERCOSUR, la Réunion des hautes autorités en matière de droits de l’homme du MERCOSUR et des États associés s’est déclarée favorable à la proposition d’inscription du musée et site de mémoire ESMA au patrimoine mondial de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO).

62.Il convient également de signaler que toutes les activités de la Direction nationale du Programme Vérité et Justice s’inscrivent dans la réalisation des objectifs stratégiques du premier plan d’action en faveur des droits de l’homme (2017-2020), adopté par la voie du décret no 1024/2017 du 11 décembre 2017 et mis en œuvre par le Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel.

63.Le plan d’action en faveur des droits de l’homme engage les trois branches du pouvoir, qui unissent leurs efforts pour sa mise en œuvre, dans l’optique d’un approfondissement de la démocratie. Il comprend un volet sur la mémoire, la vérité et les mesures de réparation (volet no 3).

64.Au titre du volet no 3 du plan d’action, les objectifs stratégiques sont de garantir le droit à la mémoire, à titre individuel et collectif (volet no 3.1 − Mémoire), de garantir le droit à la vérité, à titre individuel et collectif (volet no 3.2 − Vérité), de promouvoir les mesures judiciaires et les politiques publiques visant à poursuivre et à punir les auteurs de violations graves des droits de l’homme (volet no 3.3 − Justice), et de garantir la réparation des conséquences découlant de violations graves des droits de l’homme (volet no 3.4 − Mesures de réparation).

65.En ce qui concerne les mesures appliquées pour prévenir d’autres formes contemporaines de disparition forcée, en mars 2018, la structure du Ministère de la sécurité a été modifiée en application de la décision administrative no 299/2018, qui définit les fonctions actuelles de la Direction de la violence institutionnelle.

66.La Direction de la violence institutionnelle est chargée de contribuer, par des services de conseil, à la bonne fin des enquêtes judiciaires sur les affaires de violence institutionnelle impliquant des membres des forces de sécurité, de procéder au suivi de ces affaires et de participer à l’élaboration de projets de dispositions sur l’usage de la force qui soient conformes aux normes internationales applicables.

67.Un système de protection administrative a également été mis en place afin qu’il soit plus facile de dénoncer les actes illicites commis par des membres des forces fédérales de police et de sécurité et de poursuivre et punir leurs auteurs.

68.De plus, en mai 2016, la décision administrative no 483 a porté création de la Direction nationale des politiques de lutte contre la violence institutionnelle, qui dépend du Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel.

69.La Direction nationale des politiques de lutte contre la violence institutionnelle est principalement chargée de proposer et d’appliquer des politiques et des mesures de suivi des affaires de violence constitutionnelle et de fournir des conseils juridiques aux victimes de cette violence.

70.La Direction nationale des politiques de lutte contre la violence institutionnelle s’emploie notamment à surveiller et à prévenir les pratiques constitutives de violations des droits de l’homme parmi les fonctionnaires appartenant aux forces de sécurité, aux forces armées, et aux services pénitentiaires et les professionnels de santé, dans les contextes de restriction de liberté ou d’autonomie.

71.La Direction nationale des politiques de lutte contre la violence institutionnelle met à disposition une ligne téléphonique gratuite pour la dénonciation de faits ou de situations constituant des atteintes aux droits de l’homme dans des contextes de restriction d’autonomie ou de liberté. De cette manière, elle peut définir, coordonner et systématiser l’action institutionnelle entre les différents organismes nationaux et provinciaux compétents.

72.Afin d’établir des mécanismes de prévention et de répression des violences et des abus de pouvoir exercés par les membres des forces de sécurité et les agents pénitentiaires, la Direction nationale des politiques de lutte contre la violence institutionnelle agit en concertation avec les autorités judiciaires nationales et provinciales, la Direction de la violence institutionnelle relevant du Ministère de la sécurité, le Département des affaires de violence institutionnelle et le Bureau du Médiateur des prisons.

73.En octobre 2016, en application du décret no 1093/16, un système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées a été mis en place au Ministère de la sécurité.

74.Le Système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées fait suite, dans la structure ministérielle, à la publication de directives en cas de disparition de personnes, en 2011, et à la création de l’Unité de recherche des personnes disparues, en 2014.

75.Le Système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées a pour principales fonctions d’établir des mécanismes de coordination avec les autres organismes publics, de manière à contribuer efficacement à la recherche de toute personne disparue ou désorientée auprès du magistrat chargé de l’instruction de l’affaire, d’échanger des informations avec les entités privées et les organismes publics compétents, de mettre en œuvre des programmes de formation théorique et pratique à l’intention des forces de police et de sécurité, des juges et des procureurs de toutes les provinces et juridictions, de conclure des accords visant à faciliter le recoupement de tous les registres ou bases de données sur les personnes disparues du pays, d’établir des protocoles spécifiques et d’élaborer les propositions de dispositions nécessaires.

76.Au moyen de différents canaux, le Système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées se voit signaler par les différentes juridictions les cas de personnes disparues ou de personnes retrouvées et non identifiées, et procède à leur enregistrement. Tous les cas portés à sa connaissance sont transmis immédiatement (en temps réel) aux polices provinciales, aux forces fédérales et aux services de l’immigration, par l’intermédiaire du Système fédéral des communications policières.

77.Le Système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées dispose d’une équipe interdisciplinaire, composée d’avocats, de psychologues et de sociologues, qui examine les cas dont elle est saisie à des fins d’assistance et évalue les moyens de recherche à déployer. À cet égard, il peut s’agir de géoradars, d’enquêteurs spécialisés, d’unités cynophiles, de personnels spécialisés dans le ratissage, d’experts et d’équipements scientifiques, de drones, de bateaux, de spécialistes des technologies de communication, ou encore de l’octroi de récompenses dans le cadre du programme de coordination des activités de recherche de personnes disparues ordonnées par la justice (programme BUSCAR), établi par la résolution no 1552/12 du Ministère de la justice et des droits de l’homme.

78.Il faut aussi mentionner l’existence de directives concernant la réception des déclarations de disparition, la restitution des enfants ou adolescents retrouvés par les forces de police, la prise des empreintes digitales des personnes retrouvées et non identifiées, et la communication de la découverte d’une personne non identifiée.

79.Les directives susmentionnées sont destinées aux membres des forces de sécurité et de police des provinces participant au Système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées.

80.En ce qui concerne l’application des mesures de protection, il existe un programme national de protection des témoins et des accusés, qui relève de la compétence du Sous-Secrétariat à la politique pénale du Ministère de la justice et des droits de l’homme.

81.L’objectif du programme est de préserver la sécurité des accusés et des témoins qui ont coopéré, substantiellement et efficacement, à une enquête judiciaire relevant de la compétence des instances fédérales et dont la vie ou l’intégrité physique sont menacées.

82.En 2013, un programme en faveur des personnes ayant coopéré dans des affaires de trafic de drogues, d’enlèvement contre rançon, de terrorisme, de crimes contre l’humanité commis entre 1976 et 1983 et de traite des personnes a été créé en application de la loi no 25764.

83.La loi no 27304, portant modifications du Code pénal, régit la procédure et les aménagements de peines qui sont applicables aux auteurs de certaines infractions et à leurs complices lorsqu’ils fournissent des informations ou des données exactes, vérifiables et crédibles. Les personnes qui coopèrent dans le cadre de ces dispositions sont admissibles au bénéfice du programme précité.

84.Sur demande des autorités judiciaires, le Ministère de la justice et des droits de l’homme peut étendre le bénéfice de la loi à d’autres cas, pour autant qu’il s’agisse d’infractions liées à la criminalité organisée ou à la violence institutionnelle et que l’importance et l’intérêt de l’enquête d’un point de vue politico-pénal le rendent souhaitable.

85.À partir de 2016, un plan d’action a été engagé pour mettre la structure, le fonctionnement et les moyens opérationnels du programme en conformité avec les normes internationales, dans une optique de réforme et dans le but de contribuer plus efficacement à la réalisation des objectifs fixés.

86.En l’absence d’une structure organisationnelle qui définisse les niveaux opérationnels, en juin 2017, les travaux de la Direction nationale du Programme national de protection des témoins et des accusés ont fait l’objet d’une répartition sectorielle, par la voie de la décision no 2017-468-APN-MJ, qui vise à établir les responsabilités selon les procédures et à définir des méthodes de prise de décisions plus efficaces et plus efficientes, qui permettent d’améliorer la gestion et la qualité du service rendu.

87.La Direction nationale du Programme national de protection des témoins et des accusés, placée sous la responsabilité d’un directeur, est composée d’un service de coordination des opérations, d’un service de coordination technique et administrative, d’un service d’analyse du risque et d’une unité de coopération avec le pouvoir judiciaire et les ministères publics. Le service de coordination des opérations est composé d’une unité de suivi des affaires, d’une unité de sécurité et d’une unité interdisciplinaire d’évaluation. Le service de coordination technique et administrative est composé d’une unité des affaires juridiques et d’une unité des affaires administratives et comptables.

88.La Direction nationale du Programme national de protection des témoins et des accusés, conjointement avec la Direction générale de la gestion informatique, a conçu, développé et mis en service un nouveau logiciel conforme aux principes de sécurité, d’intégration et d’opérabilité.

89.Les informations traitées dans le cadre du Programme national de protection des témoins et des accusés étant très sensibles, plusieurs mesures ont été prises, notamment l’évaluation de la protection des données, l’élaboration d’un portail utilisateurs à partir des données figurant dans le système des ressources humaines du Ministère de la justice et des droits de l’homme, et la mise au point d’un procédé de cryptage de toutes les informations traitées par le système, dont celles qui sont issues de bases de données et de documents, et les photographies des témoins. Il existe en outre un journal d’audit, dans lequel tous les changements apportés au systèmesont enregistrés et classés par date, heure, auteur de la modification et donnée modifiée.

90.Le Programme national de protection des témoins et des accusés repose sur le principe que les différents services doivent collaborer entre eux, notamment en partageant les données dont ils disposent, à savoir les données personnelles, les données de santé, les données administratives, les journaux des appels, les calendriers des rendez-vous et les informations sur les mesures de protection et les interventions psychosociales.

91.Les autorités ont également cherché à se doter d’un outil informatique simple, qui contribue à un partage souple, efficace et sûr des renseignements tirés du Programme national de protection des témoins et des accusés.

92.L’objectif principal est de conserver une trace du contenu de chacun des dossiers d’inscription et de ses mises à jour, des différents types de mesures de sûreté, des appels effectués pour le suivi du témoin et des rapports et graphiques statistiques.

93.Afin d’adapter et de moderniser l’infrastructure et les équipements, et de garantir la sécurité et le meilleur fonctionnement du Programme national de protection des témoins et des accusés, des démarches ont été engagées en vue de l’acquisition de véhicules supplémentaires pour le transfert ou l’exfiltration de témoins placés sous protection, de gilets pare-balles, de drones, de téléphones satellites, de dispositifs de brouillage, d’appareils de suivi par satellite, de caméras de surveillance, d’ordinateurs et d’imprimantes portables, et d’éléments de mobilier.

94.Le Programme national de protection des témoins et des accusés joue un rôle central dans les enquêtes sur les actes de criminalité organisée et dans le jugement et la répression de leurs auteurs, en ce qu’il garantit un moyen de preuve en offrant une protection aux citoyens qui collaborent avec la justice. En avril 2017, la décision no RESOL-2017-338-APN-MJ a porté création de l’Unité de protection des témoins et des accusés, qui relève de la Direction principale de la sécurité de la Direction nationale du Service pénitentiaire fédéral. Cette unité est chargée de s’acquitter efficacement et rapidement des tâches qui lui sont confiées par le Directeur national du Programme national de protection des témoins et des accusés, en concertation avec le Directeur national du Service pénitentiaire fédéral, de manière à renforcer les capacités opérationnelles.

D.Mesures de prévention des disparitions forcées

1.Renseignements sur la suite donnée aux paragraphes 25, 27 et 29 des observations finales

95.Engagée dans le cadre du programme Justicia 2020 du Ministère de la justice et des droits de l’homme, la révision du Code de procédure pénale a abouti en 2019 à l’adoption de la loi no 27482 portant modification du Code de procédure pénale.

96.Le nouveau Code établit que les victimes comme les accusés doivent bénéficier des garanties d’un procès équitable, rapide et impartial, et prévoit l’abandon de la procédure pénale mixte au profit d’un système accusatoire.

97.En outre, la victime peut participer activement à la procédure, a le droit d’être entendue et peut demander un complément d’enquête, une assistance psychologique ou la prise de mesures de sûreté.

98.Le nouveau Code de procédure pénale dispose également que l’accusé jouit des droits de la défense suivants : le droit d’être informé des raisons de son arrestation ou de son placement en détention et de l’autorité qui l’a ordonné ; le droit de recevoir, si elle existe, une copie de l’ordonnance judiciaire émise contre lui ; le droit d’être présenté sans délai à un juge pour que celui-ci statue sur la légalité de l’arrestation ou du placement en détention. Il en découle que les personnes arrêtées doivent immédiatement être présentées à un juge.

99.La Direction générale du régime pénitentiaire, qui relève du Service pénitentiaire fédéral, décide du transfert des personnes privées de liberté et accorde, dans ce contexte, une attention particulière aux critères du traitement (selon les risques et les besoins) et de la sécurité (catégorisation). Toute décision de transfert doit être communiquée au juge compétent, conformément aux dispositions de l’article 72 de la loi no 24660 relative à l’exécution des peines privatives de liberté.

100.Dans le même ordre d’idées, les transferts depuis les établissements pénitentiaires de la zone métropolitaine et de la province de Buenos Aires vers des établissements situés à l’intérieur du pays doivent être signalés non seulement à l’organe juridictionnel sous la responsabilité duquel sont placés les détenus, mais aussi aux services du Défenseur général de la nation.

101.S’agissant de l’enregistrement des détenus, le Service pénitentiaire fédéral dispose d’un système informatisé de gestion des dossiers personnels qui fournit en temps réel des informations précises et cohérentes sur la situation des personnes détenues dans des établissements pénitentiaires.

102.Le système informatique sécurisé permet d’enregistrer des données biométriques, telles que les empreintes digitales ou les traits du visage, et des données relatives à l’identité et au statut juridique du détenu, à son lieu de détention, aux visites qu’il reçoit et aux transferts intervenus. Il permet aussi d’avoir accès à des données concernant l’éducation, l’assistance sociale et médicale, l’emploi et les antécédents judiciaires.

103.Le système susmentionné permet d’obtenir des informations fiables et utiles à la prise de décisions, d’améliorer la sécurité et le contrôle des données, d’harmoniser les procédures entre établissements et d’enregistrer automatiquement les opérations effectuées.

104.Il convient en outre de préciser que le Département des affaires de violence institutionnelle établit des rapports périodiques dans lesquels figurent des données actualisées et détaillées sur les détenus des établissements pénitentiaires fédéraux et sur les personnes à disposition de la justice fédérale qui sont détenues dans les principales prisons provinciales.

105.En 2016, le Département des affaires de violence institutionnelle a commencé à prendre part à un processus de coopération interinstitutionnelle visant à élaborer un projet de loi relatif à la création et à la mise en place d’un registre unique des détenus. Le projet de loi prévoit également la création d’un système unifié d’information qui permettra d’établir et de publier des données statistiques ventilées selon certains indicateurs pertinents, et de concevoir des politiques publiques fondées sur des données fiables.

106.En outre, le Service de l’exécution des peines du Ministère public de la nation est chargé d’harmoniser les interventions de celui-ci pour ce qui est de l’exécution des peines. Le Service, qui est compétent dans la ville de Buenos Aires, s’occupe principalement du suivi de la situation judiciaire des personnes condamnées.

2.Renseignements sur la suite donnée au paragraphe 31 des observations finales

107.Organe directeur du Système national de prévention de la torture créé par la loi no 26827, le Comité national pour la prévention de la torture est un mécanisme de surveillance, de contrôle et de suivi des centres de privation de liberté, notamment des établissements pénitentiaires, des centres de détention, des installations des forces de sécurité et des commissariats.

108.Le Comité national a été créé le 28 décembre 2018 par le Sénat. Conformément aux dispositions de la loi no 26827, le Comité se compose de 13 membres : 6 représentants parlementaires, 3 représentants d’organisations non gouvernementales, 2 représentants de mécanismes locaux de prévention de la torture, 1 représentant du Secrétariat aux droits de l’homme du Ministère de la justice et des droits de l’homme et le Procureur pénitentiaire de la nation.

109.Les membres du Comité national jouissent de l’immunité que la Constitution confère aux membres du Congrès.

110.La procédure de sélection du Secrétaire exécutif ou de la Secrétaire exécutive du Comité national est en cours (art. 28 de la loi no 26827).

111.Le Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel mène diverses activités de promotion et de collaboration, afin d’encourager la mise en place de mécanismes locaux de prévention de la torture dans les provinces, conformément aux obligations internationales qui incombent à l’État.

112.À cette fin, le Secrétariat se rend dans les provinces, visite les institutions locales et organise des réunions de travail avec des acteurs clefs (fonctionnaires des autorités provinciales, parlementaires, représentants d’organisations de la société civile, universitaires, victimes de la violence institutionnelle et membres de leur famille, membres des forces de sécurité, responsables et agents pénitentiaires, etc.). Il mène aussi des activités de formation et de sensibilisation, assure le suivi des projets et rédige des rapports et des recommandations en vue de la mise en place effective des mécanismes locaux de prévention de la torture.

113.À l’échelle locale, la situation est la suivante :

a)En 2010, la province de Chaco s’est dotée d’un mécanisme provincial de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créé par la loi provinciale no 6483. Un nouveau projet de loi a ensuite été présenté pour rendre ce mécanisme pleinement conforme au Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants. Le projet de loi a été adopté en 2015 (loi no 7682) et le mécanisme est actuellement opérationnel ;

b)La province de Mendoza dispose d’une commission provinciale de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créée par la loi provinciale no 8284 de 2011 et régie par le décret d’application no 2207/2011. La commission est actuellement opérationnelle ;

c)La province de Misiones dispose d’un système provincial de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créé par la loi no 4378 de 2007 et régi par la loi no IV-65 de 2014. La mise en place du système s’est achevée en 2016 et celui-ci est actuellement opérationnel ;

d)En 2010, la province de Río Negro s’est dotée d’un comité d’évaluation du suivi et de l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créé par la loi no 4621. Par la suite, un nouveau projet de loi a été présenté afin de mettre le comité en conformité avec les normes énoncées dans le Protocole facultatif, puis adopté en 2014 (loi no 4964). Comme le comité se compose actuellement de six représentants, et non de huit comme le prévoit la loi, il n’est pas encore opérationnel ;

e)La ville autonome de Buenos Aires dispose de son mécanisme local de prévention de la torture et autres peines et traitements cruels ou dégradants, créé en 2016 par la loi no 5787 et placé sous l’égide du bureau du Défenseur du peuple de Buenos Aires. La loi no 5787 n’ayant pas encore de décret d’application, le bureau du Défenseur du peuple a créé, par sa décision no 065/2017, le Service de mise en œuvre du mécanisme de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui exerce actuellement les fonctions, pouvoirs et attributions du mécanisme créé en 2016 ;

f)En 2012, la province de Salta s’est dotée d’un système provincial de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créé par la loi no 7733. De nouveaux projets de loi ont été présentés par la suite afin d’aligner le système sur les normes énoncées dans le Protocole facultatif, ce qui a été fait par l’adoption de la loi no 8024 de 2017 régie par le décret no 1139/2018. Le système n’est pas opérationnel, car il ne compte pas encore de membres ;

g)La province de Entre Ríos dispose de son mécanisme provincial de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créé par la loi no 10563 de 2018 et qui tient compte des principes énoncés dans le Protocole facultatif. Le mécanisme n’est pas encore opérationnel, car la nomination de ses membres est en cours ;

h)La province de Corrientes dispose d’un comité provincial chargé de l’évaluation du suivi et de l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créé par la loi no 6280 de 2014. Le comité n’est pas pleinement conforme aux normes internationales pour ce qui est de l’indépendance et des garanties budgétaires mais il est opérationnel et remplit déjà ses fonctions ;

i)La province de Tucumán dispose d’une commission provinciale de prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, créée par la loi no 8523 de 2012 et régie conformément aux normes internationales par le décret no 3956/2016. La commission n’est pas opérationnelle, car elle ne compte pas encore de membres ;

j)Les provinces de Buenos Aires, Terre de Feu, Jujuy, Catamarca, Santa Fe, Córdoba et Neuquén n’ont pas de mécanisme local de prévention de la torture, mais il existe plusieurs projets de loi à ce sujet. Le Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel a mené plusieurs campagnes de promotion et a fourni un appui technique afin d’orienter le processus parlementaire ;

k)Les provinces de Santiago del Estero, San Luis, La Pampa, Formosa, San Juan, La Rioja, Santa Cruz et Chubut ne disposent pas encore d’un mécanisme local de prévention de la torture et aucun projet de loi sur le sujet n’a été présenté au Sénat ou à la Chambre des députés. Le Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel a mené plusieurs visites et a formulé des conseils en vue de la rédaction d’avant-projets de loi.

3.Renseignements sur la suite donnée au paragraphe 33 des observations finales

114.Rattachée au Ministère public de la nation, la Direction générale de la formation a mené à bien vingt-neuf activités de formation selon diverses modalités (cours en présentiel, cours à distance et journées spéciales).

115.Les activités de formation étaient axées sur des thèmes tels que la violence institutionnelle, les enquêtes sur les violations des droits de l’homme, la recherche et l’identification des personnes, les droits des personnes privées de liberté et les droits des victimes.

116.Parmi ces activités, il convient d’en mentionner deux en particulier : la diffusion d’un programme réalisé par le Ministère public de la nation et la chaîne de télévision Encuentro dans lequel la sœur de Franco Ezequiel Casco raconte la disparition forcée dont son frère a été victime, l’objectif étant d’émettre des recommandations et d’expliquer au grand public comment déposer plainte ; et la tenue d’un atelier sur les stratégies d’enquête pour les infractions complexes, fondé sur l’affaire « Ayotzinapa » et organisé par la Direction des droits de l’homme du Bureau du Procureur général de la nation.

117.Comme mentionné plus haut, le Système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées, qui relève du Ministère de la sécurité, est notamment chargé d’exécuter les programmes de formation continue destinés à ses propres membres, ainsi qu’aux forces de police et de sécurité, aux juges et aux procureurs de toutes les provinces et juridictions.

118.Depuis la création du Système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées, trois conférences internationales, qui ont chacune réuni plus de 300 participants venant de tout le pays, ont été organisées à Buenos Aires. Des experts nationaux et internationaux spécialisés dans les enquêtes sur les disparitions ou dans l’identification de personnes inconnues y ont également pris part.

119.En outre, des groupes de travail sont organisés avec des services spécialisés du Ministère public de la nation, par exemple les services chargés de la lutte contre la traite et l’exploitation sexuelle, et les organisations de la société civile qui travaillent dans ce domaine sont mises à contribution.

120.Le Système fédéral de recherche des personnes disparues ou désorientées fait partie du Centre international pour les enfants disparus et victimes d’exploitation, avec 27 autres pays, et a accueilli la neuvième réunion de son réseau mondial en novembre 2017. Il travaille aussi en coordination avec Interpol.

121.En outre, la Direction nationale des politiques de lutte contre la violence institutionnelle et la Direction nationale chargée de l’éducation aux droits de l’homme, qui dépendent toutes deux du Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel, mènent ensemble des activités de formation destinées aux fonctionnaires (forces de sécurité, parlementaires, agents provinciaux et municipaux, promoteurs locaux, etc.) et qui portent sur les moyens de prévenir la violence institutionnelle.

E.Mesures de réparation et mesures de protection des enfants contre les disparitions forcées

1.Renseignements sur la suite donnée aux paragraphes 35, 37 et 39 des observations finales

122.S’agissant des mesures de réparation offertes aux victimes, en 2011, le Centre Fernando Ulloa d’aide aux victimes de violations des droits de l’homme, qui relève du Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel, a étendu ses compétences ainsi que les activités qu’il menait en faveur des victimes du terrorisme d’État. Il a notamment commencé à venir en aide aux victimes de violations des droits de l’homme commises dans un contexte démocratique (décret no 141/2011), car en démocratie, mettre au jour le problème de société que constitue la violence d’État est un devoir.

123.Au Centre Ulloa, la violence institutionnelle se définit comme tout usage arbitraire ou illégitime de la force par les différents organismes d’État ou toute permission donnée en ce sens.

124.Dans la brochure Los Derechos Humanos frente a la violencia institucional (Les droits de l’homme face à la violence institutionnelle), élaborée en 2015 par le Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel, la violence institutionnelle est définie comme toute pratique structurelle de violation des droits par des fonctionnaires appartenant aux forces de sécurité, aux forces armées et aux services pénitentiaires ou par des professionnels de santé dans des contextes de restriction de l’autonomie ou de la liberté. Pour qu’il y ait violence institutionnelle, ces trois éléments sont donc indispensables : des comportements particuliers, attribuables à des fonctionnaires et observés dans un contexte de restriction de l’autonomie et de la liberté.

125.À cet égard, le Centre Ulloa a travaillé à la planification et à l’application d’une politique de réparation intégrale en matière de santé destinée aux victimes de violations des droits de l’homme. Il a fait appel à des équipes interdisciplinaires composées de divers professionnels de la santé, tels que des psychologues, des psychiatres et des travailleurs sociaux. Les missions du Centre sont les suivantes : aider et accompagner de manière globale les victimes de graves violations des droits de l’homme commises dans des contextes démocratiques ; orienter les victimes vers les professionnels de santé appropriés afin de garantir leur prise en charge ; accompagner les victimes de violence institutionnelle et les membres de leur famille dans les instances judiciaires et assurer la liaison avec le personnel judiciaire ; collaborer avec des organismes publics et des organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine ; dispenser à des équipes interdisciplinaires des formations sur la constitution de réseaux d’orientation et la sensibilisation du public ; recueillir des informations pour rédiger des publications sur le sujet.

126.Comme indiqué dans le rapport national (CED/C/ARG/1) et dans le rapport sur la suite donnée aux observations finales (CED/C/ARG/CO/1/Add.1), la Direction chargée des politiques de réparation du Secrétariat aux droits de l’homme et au pluralisme culturel a pour tâche de coordonner les activités liées aux programmes de réparation destinés aux victimes de disparition forcée pendant la dictature civile et militaire, et dans ce contexte, elle continue d’appliquer les lois de réparation nos 24043, 24411, 25192 et 25914, ainsi que toute autre loi qui pourrait être adoptée dans ce domaine.

127.S’agissant des mesures de réparation et des mesures de protection des enfants, il convient de mentionner l’adoption, en juin 2017, de la loi no 27372 sur les droits et garanties reconnus aux victimes d’infractions.

128.La loi susmentionnée a porté modification du Code de procédure pénale en étendant les droits des victimes même lorsque celles-ci ne se sont pas constituées partie au procès, l’objectif étant que ces victimes aient la possibilité d’être informées de l’état d’avancement de la procédure et de ses conséquences, en particulier qu’elles sachent si les accusés sont en liberté ou non, et de communiquer des informations et des éléments de preuve susceptibles de contribuer à la résolution des affaires.

129.Le décret d’application de la loi no 27372 détaille la protection fournie aux victimes de différents types d’infraction et porte création du Centre d’aide aux victimes d’infractions, rattaché au Ministère de la justice et des droits de l’homme.

130.Les principales missions du Centre sont les suivantes : prendre immédiatement en charge les victimes grâce à son service d’urgence ; offrir un hébergement temporaire et une aide alimentaire d’urgence ; proposer une prise en charge médicale et psychologique ; assurer la défense et la représentation juridique des victimes.

131.Dans la nouvelle loi, la notion de victime est élargie pour couvrir non seulement la personne directement touchée par l’infraction mais aussi son conjoint, son partenaire, ses parents, ses enfants, ses frères et sœurs, son tuteur ou sa famille d’accueil lorsque l’infraction commise a entraîné la mort de la personne ou lui a causé des dommages physiques ou psychologiques graves.

132.Le nouveau Code civil et commercial, modifié par la loi no 26994, est entré en vigueur le 1er août 2015.

133.L’article 2561 du nouveau Code dispose qu’en matière civile, les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles. Il établit donc que les victimes d’un crime contre l’humanité, y compris de disparition forcée, peuvent demander réparation sans qu’aucun délai de prescription s’applique.

134.Il convient de rappeler qu’en adoptant la loi no 24584, la République argentine a octroyé le statut de norme constitutionnelle (par. 22 de l’article 75 de la Constitution) à la Convention sur l’imprescriptibilité des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité, dont l’article premier dispose que les crimes de guerre et les crimes contre l’humanité sont imprescriptibles, quelle que soit la date à laquelle ils ont été commis.

135.Les crimes contre l’humanité étant imprescriptibles, le nouveau Code civil établit qu’en matière civile, les victimes de ces crimes peuvent demander réparation sans qu’aucun délai de prescription s’applique.