Nations Unies

CMW/C/JAM/CO/1

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr. générale

23 mai 2017

Français

Original : anglais

Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Observations finales concernant la Jamaïque en l’absence de rapport *

1.En l’absence de rapport de l’État partie, le Comité a examiné la situation concernant la mise en œuvre de la Convention en Jamaïque à ses 345e et 346e séances (voir CMW/C/SR.345 et 346), les 4 et 5 avril 2017. À la lumière des réponses apportées par la délégation de l’État partie et des informations reçues, notamment d’autres organismes et mécanismes des Nations Unies, le Comité a adopté les observations finales ci-après à sa 358e séance, le 13 avril 2017.

A.Introduction

2.La Jamaïque a adhéré à la Convention le 25 septembre 2008. L’État partie était tenu de soumettre son rapport initial, conformément à l’article 73, paragraphe 1, de la Convention, au plus tard le 1er janvier 2010. En l’absence de rapport, conformément à l’article 31 bis de son règlement intérieur (voir A/67/48, par. 26), à sa vingt-troisième session, tenue en août-septembre 2015, le Comité a adopté une liste de points établie avant la soumission du rapport initial (CMW/C/JAM/QPR/1), transmise à l’État partie le 29 septembre 2015.

3.Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas apporté de réponses à la liste de points, réponses qui auraient constitué son rapport au titre de l’article 73 de la Convention, en dépit de nombreuses demandes formelles et informelles en ce sens. Le Comité considère que l’État partie n’a pas respecté ses obligations au titre de l’article 73 de la Convention.

4.Le Comité sait gré à la délégation des efforts qu’elle a consentis pour fournir les renseignements demandés pendant le dialogue. Il regrette que celle-ci, qui était composée de représentants de la Mission permanente de la Jamaïque auprès de l’Office des Nations Unies et autres organisations internationales à Genève, n’ait pas été en mesure d’apporter tous les renseignements détaillés demandés. Le Comité souligne que les délégations doivent compter des experts techniques parmi leurs membres afin que des réponses précises puissent être données aux questions soulevées pendant le dialogue.

5.Le Comité a conscience que la Jamaïque, qui est principalement un pays d’origine des travailleurs migrants et des membres de leur famille, a fait des progrès dans la protection des droits de ses nationaux à l’étranger. Toutefois, il note que l’État partie rencontre des difficultés pour protéger les droits de ses nationaux rentrés au pays.

6.Le Comité relève également que certains des pays dans lesquels des travailleurs migrants jamaïcains sont employés ne sont pas parties à la Convention, ce qui peut constituer un obstacle à l’exercice par les intéressés des droits qu’ils tiennent de la Convention.

7.Le Comité constate en outre que les processus migratoires dans l’État partie reposent sur des flux tant intrarégionaux qu’interrégionaux ayant pour principales destinations l’Amérique du Nord et l’Europe, ainsi que l’existence d’une population migrante majoritairement originaire des pays du Commonwealth.

B.Aspects positifs

8.Le Comité salue les efforts consentis par l’État partie pour lutter contre la pauvreté et les inégalités, qui comptent parmi les principales causes d’émigration, et la mise en œuvre du Plan national de développement Vision 2030 Jamaïque.

9.Le Comité relève avec satisfaction que la Jamaïque a ratifié les instruments ci-après ou y a adhéré :

a)La Convention sur la réduction des cas d’apatridie, en janvier 2013 ;

b)Le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l’enfant concernant la vente d’enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, en août 2011 ;

c)La Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et deux des protocoles y relatifs, à savoir le Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, et le Protocole contre le trafic illicite de migrants par terre, air et mer, en 2003.

10.Le Comité salue l’adoption des mesures législatives ci-après :

a)La loi de 2014 relative à la justice pénale (élimination des organisations criminelles) ;

b)La loi de 2007 relative à la traite des personnes (prévention, élimination et répression), telle que modifiée en 2013 ;

c)L’ordonnance 2011 relative au salaire minimum national (telle que modifiée) ; et

d)La loi de 2009 relative à la pornographie mettant en scène des enfants (prévention).

11.Le Comité se félicite également de l’adoption des mesures institutionnelles et de politique générale ci-après :

a)Le Plan d’action national de lutte contre la traite des personnes (2015-2018) ;

b)Le Plan d’action national sur le travail des enfants (2013) ;

c)Le Programme jamaïcain d’urgence pour l’emploi (2012) ;

d)La Politique nationale relative aux réfugiés (2009).

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

1.Mesures d’application générale (art. 73 et 84)

Législation et application

12.Le Comité salue l’adoption par l’État partie d’une loi relative à la traite et aux réfugiés qui contribue à la mise en œuvre de la Convention. Il est néanmoins préoccupé par le fait que plusieurs lois relatives aux migrations sont dépassées et n’ont pas été alignées sur la Convention par l’État partie. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que la loi relative à l’expulsion (citoyens du Commonwealth), la loi relative aux étrangers (chap. 9) et la loi relative aux restrictions à l’immigration (citoyens du Commonwealth) incriminent l’immigration clandestine.

13. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D’engager une réforme législative pour abroger les lois obsolètes et aligner sa législation relative aux migrations sur la Convention et les autres instruments relatifs aux droits de l’homme ;

b) De dépénaliser l ’ immigration clandestine et de prendre les mesures nécessaires pour veiller à ce que ses politiques et lois nationales, en particulier la loi relative à l ’ expulsion (citoyens du Commonwealth), la loi relative aux étrangers et la loi relative aux restrictions à l ’ immigration (citoyens du Commonwealth), ne portent pas atteinte aux droits de l ’ homme des migrants et des membres de leur famille, conformément à la Convention.

Articles 76 et 77

14. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de faire les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention visant à reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant d ’ États parties et de particuliers concernant la violation de droits établis par la Convention.

Ratification des instruments pertinents

15. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager de ratifier les instruments suivants ou d ’ y adhérer le plus rapidement possible : Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées et Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Politique et stratégie globale

16.Le Comité prend note des mesures prises par l’État partie pour combattre la pauvreté et les inégalités, principales causes d’émigration. Le Comité prend note de la réponse de la délégation selon laquelle l’État partie a élaboré une politique et un plan d’action relatifs aux migrations. Il regrette toutefois le manque d’information précisant dans quelle mesure cette politique et ce plan d’action national permettent de faire respecter les droits garantis par la Convention.

17. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que sa politique et son plan d ’ action relatif aux migrations mettent pleinement en œuvre les dispositions de la Convention. Le Comité invite l ’ État partie à inclure, dans son prochain rapport périodique, des renseignements actualisés, accompagnés de statistiques, sur les mesures précises prises pour mettre en œuvre les droits des travailleurs migrants tels qu ’ ils sont énoncés dans la Convention, tant en droit que dans la pratique, y compris les mesures économiques, sociales et autres visant à s ’ attaquer aux causes profondes des migrations en Jamaïque, notamment celles de l ’ immigration clandestine.

Coordination

18.Le Comité salue la création par l’État partie, en 2010, de trois comités de coordination interorganismes, à savoir le comité du permis de travail, le comité de la libre circulation des personnes, et l’Équipe spéciale nationale de lutte contre la traite des personnes. Le Comité est néanmoins préoccupé par le fait que le rôle de coordination du Ministère des affaires étrangères et du commerce extérieur ne concerne que les droits de l’homme en général et par le manque d’informations sur la coordination des principaux organismes s’occupant de questions relatives aux migrations. Le Comité est également préoccupé par l’interaction insuffisante entre ces organismes et les organisations de la société civile.

19. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que le Comité interministériel sur les droits de l ’ homme existant soit doté d ’ un mandat clairement défini et investi d ’ une autorité suffisante pour coordonner toutes les activités relatives à la mise en œuvre de la Convention dans tous les secteurs, tant aux plans national, régional que local. L ’ État partie devrait veiller à ce que cette instance de coordination dispose des moyens humains, techniques et financiers nécessaires pour fonctionner efficacement et coordonner les organismes susmentionnés.

Collecte de données

20.Le Comité se félicite de la création de l’Institut statistique de la Jamaïque et de l’élaboration d’une politique nationale relative à la diaspora, dont l’objet est de recenser la diaspora jamaïcaine, ainsi que du projet relatif à la collecte de données établi avec l’appui de l’Organisation internationale pour les migrations. Le Comité regrette toutefois l’absence d’informations statistiques ventilées qui lui permettraient d’évaluer dans quelle mesure les droits énoncés dans la Convention sont mis en œuvre dans l’État partie, y compris en ce qui concerne les travailleurs migrants jamaïcains à l’étranger et la situation de ceux qui sont rentrés au pays. Le Comité regrette également l’absence de données statistiques et qualitatives sur les travailleurs migrants originaires de pays du Commonwealth et autres, qui sont en situation irrégulière dans l’État partie, principalement parce qu’ils ont dépassé leur période officielle de séjour, ainsi que l’absence d’informations sur le rôle de coordination de l’Institut statistique de la Jamaïque en ce qui concerne la collecte et le partage d’informations sur les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille, y compris ceux en situation irrégulière, ainsi que prévu par la Convention.

21. Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que l’Institut statistique de la Jamaïque recueille des données complètes sur tous les aspects de la Convention, y compris sur les travailleurs migrants dans l’État partie, en particulier ceux en situation irrégulière, et sur les nationaux travaillant à l’étranger. Il encourage l’État partie à compiler des informations et des statistiques ventilées par sexe, âge, nationalité, motifs d’entrée et de départ du pays et type de travail accompli pour pouvoir évaluer efficacement les effets des politiques pertinentes, conformément à la cible 17.18 des objectifs de développement durable. Lorsqu’il n’est pas possible d’obtenir des renseignements précis, par exemple en ce qui concerne les travailleurs migrants en situation irrégulière , le Comité prie l’État partie de fournir des données fondées sur des études ou des estimations. Le Comité recommande également à l’État partie de veiller à ce que l’Institut statistique de la Jamaïque dispose des moyens humains et financiers nécessaires et à renforcer la collaboration avec les ambassades et les consulats de l’État partie, de façon à faciliter la compilation de données sur les Jamaïcains qui travaillent à l’étranger, y compris l’évaluation systématique de la situation des travailleurs migrants en situation irrégulière et des travailleurs migrants rentrés au pays.

Suivi indépendant

22.Le Comité s’inquiète de ce que l’État partie n’ait pas encore mis en place une institution ayant une compétence étendue dans le domaine des droits de l’homme, y compris les migrations, conformément aux principes concernant le statut et le fonctionnement des institutions nationales pour la protection et la promotion des droits de l’homme («Principes de Paris»).

23. Le Comité recommande à l ’ État partie de créer une institution nationale des droits de l ’ homme dotée d ’ un large mandat pour promouvoir et protéger efficacement les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille au titre de la Convention, y compris de pouvoirs d ’ enquête sur toutes les questions relatives aux droits de l ’ homme des travailleurs migrants et des membres de leur famille quel que soit leur statut, et pour effectuer des visites inopinées dans tous les lieux où des travailleurs migrants et des membres de leur famille sont susceptibles d ’ être privés de liberté. Le Comité recommande également à l ’ État partie de créer une institution nationale des droits de l ’ homme pleinement conforme aux Principes de Paris.

Formation à la Convention et diffusion d’informations sur celle-ci

24.Le Comité se félicite que l’État partie dispense des formations générales sur les droits de l’homme au personnel judiciaire et aux fonctionnaires. Le Comité est cependant préoccupé par le fait que l’État partie ne diffuse que les lois nationales et non la Convention. Le Comité est particulièrement préoccupé par le fait que les attributions précises du Ministère du travail et de la sécurité sociale concernant l’information des travailleurs migrants et des membres de leur famille sur leurs droits au titre de la Convention ne soient pas clairement établies.

25. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer des programmes d ’ éducation et de formation sur les dispositions de la Convention. Il lui recommande également de veiller à ce qu ’ une telle formation soit offerte à tous les fonctionnaires et à tout le personnel s ’ occupant des questions relatives aux migrations, y compris à l ’ échelon local. Le Comité recommande également à l ’ État partie de faire en sorte que les travailleurs migrants et les membres de leur famille aient accès à l ’ information concernant leurs droits au titre de la Convention à la fois en Jamaïque et dans les pays de destination où ils résident.

Participation de la société civile

26.Le Comité est préoccupé par l’absence de mécanismes permettant à la société civile et aux représentants des principales organisations et institutions s’occupant des questions relatives aux migrations de participer à la planification et à la mise en œuvre de la politique migratoire, des politiques visant à protéger les migrants à l’étranger et des politiques visant à s’attaquer aux causes de la migration.

27. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De faciliter les activités menées par les organisations de la société civile avec les travailleurs migrants, quel que soit leur statut migratoire, lorsque ces activités visent à fournir une aide humanitaire aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille, à protéger leurs droits et à leur fournir une assistance dans le cadre de la Convention ;

b) De resserrer la coopération avec les organisations de la société civile pour qu’il s’acquitte de ses obligations au titre de la Convention, y compris celles relatives à la formation à la Convention et à sa diffusion auprès de toutes les parties prenantes pertinentes, en particulier les travailleurs migrants et les membres de leur famille ;

c) D’associer systématiquement la société civile et les organisations non gouvernementales à la mise en œuvre de la Convention et à l’élaboration de son prochain rapport périodique.

2.Principes généraux (art. 7 et 83)

Non-discrimination

28.Le Comité prend note des mesures qui ont été prises pour prévenir la discrimination dans l’État partie. Cependant, il est préoccupé par les dispositions discriminatoires de l’article 4 de la loi relative aux restrictions à l’immigration (citoyens du Commonwealth), qui énumère les catégories d’immigrants interdits d’entrée sur le territoire, et de l’article 6 de la loi relative aux étrangers, qui fixe les critères à remplir pour être autorisé à entrer sur le territoire, lesquels excluent notamment les personnes handicapées, malgré l’affirmation de la délégation selon laquelle ces dispositions ne sont pas appliquées.

29. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures législatives et de politique générale nécessaires, notamment de modifier les lois susmentionnées, pour garantir que tous les travailleurs migrants et les membres de leur famille se trouvant sur son territoire ou sous sa juridiction, qu ’ ils soient pourvus de documents ou non, jouissent sans discrimination des droits consacrés par la Convention, conformément à l ’ article 7 de celle-ci.

Droit à un recours utile

30.Le Comité constate que l’État partie a diffusé des notes et des directives par le biais des médias électroniques et de la presse écrite pour informer les travailleurs migrants des voies de recours qui leur sont ouvertes. Cependant, le Comité est préoccupé par l’absence d’exemples concrets de cas dans lesquels des travailleurs migrants et des membres de leur famille se sont prévalu de recours administratifs, judiciaires et autres dans l’État partie. Le Comité est également préoccupé par le fait que les informations fournies aux travailleurs migrants concernant les recours disponibles ont une portée générale, de sorte que les travailleurs migrants et les membres de leur famille ignorent peut-être que des voies de recours spécifiques leur sont ouvertes.

31. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que, dans la loi comme dans la pratique, les travailleurs migrants et les membres de leur famille, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, aient les mêmes possibilités que l es nationaux de porter plainte et de demander réparation devant les tribunaux lorsque les droits qui leur sont reconnus par la Convention sont violés. Il lui recommande également de prendre des mesures supplémentaires pour informer les travailleurs migrants et les membres de leur famille, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, des recours judiciaires et autres qui leur sont ouverts en cas de violation des droits qu ’ ils tiennent de la Convention, et en particulier du rôle de la Commission des salaires et des conditions d ’ emploi.

3.Droits de l’homme de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 8 à 35)

Exploitation par le travail et autres formes de mauvais traitements

32.Le Comité accueille avec satisfaction la ratification de la convention (no 189) de l’Organisation internationale du Travail (OIT) sur les travailleuses et travailleurs domestiques (2011), en octobre 2016, de la convention (no152) de l’OIT concernant la sécurité et l’hygiène du travail dans les manutentions portuaires (1979), en novembre 2005, et de la convention (no182) de l’OIT sur les pires formes de travail des enfants (1999), en 2003, mais est préoccupé par les informations faisant état de l’exploitation par le travail de travailleurs migrants tant en situation régulière qu’en situation irrégulière. Le Comité est également préoccupé par les informations faisant état de cas de « tourisme sexuel », de servitude domestique, de travail forcé, de travail des enfants et d’exploitation sexuelle à des fins commerciales ainsi que par le manque d’information sur les mesures prises pour lutter contre de telles violations.

33. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les travailleurs migrants, en particulier de faire respecter leurs droits en matière de travail et de les protéger contre toutes les formes d ’ exploitation, notamment l ’ exploitation sexuelle et l ’ exploitation par le travail ;

b) D ’ accroître le nombre d ’ inspections du travail et de poursuivre, de punir et de sanctionner les personnes ou les groupes qui exploitent les travailleurs migrants ou les soumettent au travail forcé et à d ’ autres abus, en particulier dans le secteur informel, conformément à la cible 8.8 des objectifs de développement durable  ;

c) De faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur l ’ exploitation des travailleurs migrants, y compris ceux en situation irrégulière.

34.Le Comité est préoccupé par le manque de renseignements sur les mesures prises pour combattre le racisme, la xénophobie, les comportements discriminatoires, les mauvais traitements et la violence à l’égard des travailleurs migrants et des membres de leur famille. Le Comité est particulièrement préoccupé par le manque de renseignements sur la situation des travailleurs migrants étrangers dans l’État partie, notamment les travailleurs migrants d’origine africaine, en particulier ceux provenant d’Afrique de l’Ouest.

35. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De fournir des données ventilées par âge, sexe et nationalité sur les actes de xénophobie, les mauvais traitements et les violences dont sont victimes les travailleurs migrants et les membres de leur famille, ainsi que des renseignements sur la situation des travailleurs migrants dans l ’ État partie, notamment ceux d ’ origine africaine, qui viennent principalement d ’ Afrique de l ’ Ouest ;

b) De redoubler d ’ efforts pour combattre le racisme et la xénophobie, notamment en poursuivant les auteurs de tels faits et en menant des campagnes de sensibilisation, et d ’ apport er une assistance aux victimes.

Régularité de la procédure, détention et égalité devant les tribunaux

36.Le Comité regrette qu’en vertu de l’article 9 de la loi relative aux étrangers, le placement en détention de migrants en situation irrégulière ne constitue pas une mesure exceptionnelle utilisée en dernier ressort et que cet article donne toute latitude au ministre responsable pour déterminer les modalités de la détention. Il regrette également l’absence de renseignements sur la pratique de la détention de travailleurs migrants arrêtés dans les eaux internationales. Le Comité regrette également le manque de renseignements sur les garanties d’une procédure régulière dont bénéficient les travailleurs migrants et les membres de leur famille dans le cadre des procédures pénales et administratives portant sur des questions de migration ainsi que l’absence de renseignements sur les procédures relatives au placement en détention de travailleurs migrants ou de membres de leur famille dans l’État partie.

37. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que ses lois, ses politiques et ses pratiques nationales respectent comme il se doit le droit à la liberté des travailleurs migrants et des membres de leur famille et l ’ interdiction de détenir arbitrairement ces personnes, et en particulier :

a) De modifier la loi relative aux étrangers afin que celle-ci prévoie, à titre priorit aire face aux migrations irrégulières, des mesures de substitution à la détention pour les infractions administratives liées à la migration, et de veiller à ce que la détention de migrants ne soit qu ’ une mesure exceptionnelle utilisée en dernier ressort, conformément à l ’ observation générale n o  2 (2013) du Comité sur les droits des travailleurs migrants en situation irrégulière et des membres de leur famille ;

b) Garantir le respect d ’ une procédure régulière dans toutes les procédures de détention à l ’ intérieur de l ’ État partie, y compris dans les eaux internationales  ;

c) De veiller à ce que les membres de la famille et les enfants de travailleurs migrants ne soient pas détenus en raison de leur statut migratoire ou de celui de leurs parents et d ’ adopter des mesures de substitution à la détention qui permettent aux enfants de rester avec les membres de leur famille ou avec leur tuteur ;

d) De dépénaliser la migration irrégulière et de veiller à ce que les travailleurs migrants et les membres de leur famille aient accès à l ’ aide juridictionnelle, à des recours utiles et à la justice, ainsi qu ’ à des services consulaires, et à ce que les garanties énoncées dans la Convention soient respectées, en pleine conformité avec les articles 16 et 17 de la Convention ;

e) De fournir des renseignements sur le nombre de travailleurs migrants arrêtés, placés en détention et expulsés pour des infractions liées à l ’ immigration, sur les motifs de leur détention et de leur expulsion et sur leurs conditions de détention, y compris la durée de cette détention.

Migrants placés en détention et autres violations

38.Le Comité est préoccupé par les mauvaises conditions de détention dans les lieux de privation de liberté de l’État partie, notamment par le surpeuplement et l’hygiène déplorable. Le Comité est également préoccupé par les informations faisant état d’un usage excessif de la force par les agents des forces de l’ordre lors des arrestations. Il est particulièrement préoccupé par l’absence de renseignements sur le traitement réservé aux travailleurs migrants et aux membres de leur famille qui ont été arrêtés et placés en détention.

39. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) D ’ enquêter efficacement sur tous les cas d ’ usage excessif de la force et les autres violations des droits de l ’ homme commises à l ’ encontre de migrants en détention et de dispenser régulièrement une formation obligatoire aux droits de l ’ homme à tous les agents des forces de l ’ ordre en vue de prévenir de telles violations ;

b) De veiller à ce que les migrants et les membres de leur famille qui sont arrêtés ne soient pas soumis à un usage excessif de la force de la part des agents des forces de l ’ ordre qui procèdent à leur arrestation et à ce qu ’ ils soient promptement informés des motifs de leur arrestation au moment où elle a lieu , de leurs droits et des faits qui leur sont reprochés, dans une langue qu ’ ils comprennent ;

c) De faire en sorte que les migrants ne soient détenus que dans des lieux officiellement prévus à cette fin ;

d) De veiller à ce que des services de base adéquats, notamment en ce qui concerne l ’ alimentation, les soins de santé, les conditions d ’ hygiène et l ’ accès à des espaces extérieurs, soient assurés dans tous les lieux de détention.

Expulsion

40.Le Comité est préoccupé par le manque de renseignements sur les procédures régulières en place, en particulier les procédures applicables lorsqu’un travailleur migrant ou un membre de sa famille conteste une décision d’expulsion. Le Comité est également préoccupé par :

a)Le manque de données statistiques ventilées sur les travailleurs migrants et les membres de leur famille sans papiers et en situation irrégulière qui ont été expulsés ou qui font l’objet d’une procédure d’expulsion dans l’État partie ;

b)Le manque de renseignements sur le nombre de migrants haïtiens qui sont entrés dans l’État partie ou qui y sont restés après le tremblement de terre de 2010, et sur le rapatriement de 62 Haïtiens, environ une semaine après leur arrivée, à la suite du séisme ;

c)Le manque de renseignements sur le nombre de Jamaïcains qui ont été expulsés du Canada, des États-Unis d’Amérique et de Trinité-et-Tobago.

41. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements sur :

a) Les mesures prises pour faire en sorte que les travailleurs migrants soumis à une mesure administrative de reconduite à la frontière ou d ’ expulsion soient informés de leur droit de faire appel de cette mesure et puissent exercer ce droit ;

b) Les travailleurs migrants sans papiers ou en situation irrégulière et les membres de leur famille qui ont été expulsés ou qui font l ’ objet d ’ une procédure d ’ expulsion dans l ’ État partie, en indiquant si les recours prévus en la matière ont un effet suspensif, conformément à l ’ article 22 de la Convention, et si les travailleurs migrants ont accès à des mécanismes administratifs comme à des mécanismes judiciaires ;

c) Le processus de rapatriement des migrants haïtiens qui sont entrés dans l ’ État partie ou qui y sont restés après le tremblement de terre de 2010 ;

d) Les mesures en place visant à garantir que les pays de destination respectent pleinement les garanties procédur al es en ce qui concerne tous les travailleurs migrants jamaïcains et les membres de leur famille, notamment le droit à une aide juridictionnelle gratuite et à un recours utile, ainsi que les garanties de fond, dont le droit à la vie de famille et le principe de non-refoulement.

Assistance consulaire

42.Le Comité a conscience des efforts consentis par l’État partie visant, entre autres choses, à promouvoir les initiatives en matière de protection consulaire dans les pays de destination. Tout en relevant l’existence de services de représentation diplomatique et consulaire dans la plupart des pays de destination pour les travailleurs migrants jamaïcains, comme, notamment le Canada et les États-Unis d’Amérique, ainsi que l’existence de bureaux de liaison, le Comité est préoccupé par le manque d’informations concernant des cas précis dans lesquels une assistance consulaire a été offerte à des travailleurs migrants et aux membres de leur famille pour garantir la protection de leurs droits.

43. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures nécessaires pour que ses services consulaires puissent répondre efficacement aux besoins des travailleurs migrants jamaïcains et aux membres de leur famille en ce qui concerne la protection de leurs droits et la prestation d ’ une assistance. En particulier, il recommande à l ’ État partie :

a) D ’ élaborer une politique de protection consulaire conçue pour protéger les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille à l ’ étranger ;

b) De consacrer des ressources humaines et financières suffisantes à la mise en œuvre effective des mesures de protection  ;

c) De renforcer les programmes du Ministère des affaires étrangères et du commerce extérieur visant à offrir une formation sur la Convention et d ’ autres instruments relatifs aux droits de l ’ homme au personnel consulaire des bureaux de liaison ;

d) De mettre au point un mécanisme normalisé pour la collecte de données quantitatives et qualitatives par les consulats jamaïcains, visant expressément à montrer dans quelle mesure les droits des travailleurs migrants jamaïcains et des membres de leur famille qui sont détenus dans les pays de destination ou expulsés de ces pays sont protégés ou violés, et à consigner les raisons pour lesquelles les personnes qui sollicitent l ’ assistance des consulats ont émigré.

Rémunération et conditions d’emploi

44.Le Comité constate que le Ministère du travail et de la sécurité sociale contrôle les conditions de travail et, notamment, qu’il protège les travailleurs migrants contre la publicité trompeuse des agences de recrutement privées. Tout en relevant que la loi relative à l’emploi (égalité de rémunération entre hommes et femmes) va être modifiée, le Comité est préoccupé par le manque d’informations sur le suivi et l’application du principe de l’égalité de rémunération pour un travail de valeur égale en ce qui concerne les travailleurs migrants. Il est également préoccupé par le manque de données concernant des cas effectifs de non-respect par les employeurs de travailleurs migrants dudit principe et les conditions de travail des travailleurs migrants.

45. Le Comité engage l ’ État partie :

a) À collecter des données sur les cas de non-respect du principe de l ’ égalité de rémunération pour un travail de valeur égale, y compris sur les sanctions infligées aux employeurs contrevenants  ;

b) À veiller à ce que les travailleurs migrants bénéficient d ’ un traitement qui ne soit pas moins favorable que celui qui est réservé aux nationaux en matière de rémunération et à faire en sorte que ce principe soit strictement respecté en veillant à ce que l ’ inspection du travail procède à des visites régulières et inopinées dans les secteurs d ’ activité qui emploient des migrants, conformément à la cible 8.8 des objectifs de développement durable ;

c) À garantir l ’ accès à la justice pour les travailleurs domestiques migrants et à renforcer la capacité des services d ’ inspection du travail de surveiller efficacement les conditions d ’ exécution du travail domestique et de recevoir, examiner et traiter les plaintes concernant des violations alléguées .

Éducation

46.Le Comité salue la ratification par l’État partie, en 2006, de la Convention de l’Organisation des Nations Unies pour l’éducation, la science et la culture (UNESCO) concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement. Il note qu’en vertu de la loi sur la protection et la prise en charge des enfants, de 2004, tous les enfants de moins de 18 ans sont tenus d’aller à l’école quel que soit leur statut migratoire, mais il regrette de manquer d’informations sur la situation générale des enfants de travailleurs migrants dans l’État partie s’agissant de l’accès à l’éducation.

47. Le Comité recommande à l ’ État partie de donner, dans son prochain rapport périodique, des renseignements sur la situation générale en matière d ’ accès des enfants des travailleurs migrants à l ’ éducation, indépendamment de leur statut migratoire.

4.Autres droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille pourvus de documents ou en situation régulière (art. 36 à 56)

Informations avant le départ et droit d’être informé

48.Le Comité relève qu’un nombre important de travailleurs saisonniers ou temporaires jamaïcains se rendent aux États-Unis d’Amérique et au Canada au titre du Programme des travailleurs étrangers temporaires et du Programme des travailleurs agricoles saisonniers. Il note que l’État partie prépare les candidats à leur travail dans les pays de destination, mais il est préoccupé par le manque de renseignements sur le contenu de l’information donnée avant le départ et sur d’autres programmes de sensibilisation destinés à faire connaître les droits des travailleurs migrants et des membres de leur famille en vertu de la Convention.

49. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ élaborer des programmes ciblés de préparation au départ et de sensibilisation, notamment en consultation avec les organisations non gouvernementales compétentes, les travailleurs domestiques migrants et les membres de leur famille, et des agences de recrutement reconnues et fiables. L ’ État partie devrait également établir des programmes de suivi pour protéger les droits des travailleurs migrants dans le cadre d ’ accords bilatéraux. À la lumière de son observation générale n o  1 (2011) sur les travailleurs domestiques migrants, le Comité recommande à l ’ État partie de prendre les mesures voulues pour diffuser des informations sur les droits que la Convention leur reconnaît, sur les conditions de leur admission et de leur emploi, ainsi que sur leurs droits et obligations en vertu de la législation et des usages des États d ’ emploi.

Droit de voter et d’être élu dans l’État d’origine

50.Le Comité prend note des efforts que fait l’État partie pour faciliter l’exercice du droit de participer aux affaires publiques et du droit de vote des travailleurs migrants jamaïcains à l’étranger en lançant des discussions sur ce sujet. Il relève toutefois avec préoccupation que la réalisation de ces droits a très peu progressé.

51. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures, notamment d ’ ordre législatif, pour que les travailleurs migrants jamaïcains résidant à l ’ étranger puissent exercer leur droit de vote dans l ’ État partie.

Droit de transférer ses gains et ses économies

52.Le Comité note qu’en vertu du Programme pour l’emploi à l’étranger, les Jamaïcains peuvent transférer une partie de leurs gains sur un plan d’épargne, sous le contrôle du Ministère du travail et de la sécurité. Il est toutefois préoccupé par le manque d’informations sur les flux d’envois de fonds et sur le coût des transferts de fonds dans l’État partie.

53. Le Comité recommande à l ’ État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des informations sur les flux d ’ envois de fonds en provenance de pays où résident des travailleurs migrants jamaïcains et des membres de leur famille, sur le coût de ces transferts et sur les installations dont ils disposent pour transférer des fonds.

5.Promotion de conditions saines, équitables, dignes et légales en ce qui concerne les migrations internationales des travailleurs migrants et des membres de leur famille (art. 64 à 71)

Enfants concernés par les migrations internationales

54.Le Comité salue les efforts globaux faits par l’État partie pour protéger les droits des enfants de migrants jamaïcains qui restent au pays, et sont connus sous le nom de « barrel children ». Il regrette toutefois de manquer d’informations sur le nombre d’enfants revenus dans l’État partie et sur les politiques visant à faciliter leur réinsertion. Il regrette aussi qu’en vertu de la loi relative aux restrictions à l’immigration (citoyens du Commonwealth), les enfants de moins de 16 ans qui sont à la charge d’un immigré en situation irrégulière soient considérés comme étant en situation irrégulière.

55. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De redoubler d ’ efforts pour promouvoir et protéger les droits des enfants et des familles des travailleurs jamaïcains, en particulier au moyen de programmes d ’ enseignement, d ’ entrepreneuriat, de formation et d ’ action sociale, et de resserrer sa coopération à cet effet avec les acteurs de la société civile sur place et dans le pays d ’ origine ;

b) De mener une étude à l ’ échelle nationale sur les enfants de travailleurs migrants sur place et sur ceux qui sont restés dans le pays d ’ origine, afin d ’ établir un profil démographique de cette population qui puisse orienter les politiques et programmes de l ’ État ;

c) De donner des renseignements, dans son prochain rapport périodique, sur les mesures qui auront été prises sur la réinstallation et la réinsertion des travailleurs migrants jamaïcains à leur retour, y compris le regroupement avec leurs enfants qui sont restés au pays ;

d) De modifier la loi relative aux restrictions à l ’ immigration (citoyens du Commonwealth) pour protéger les enfants de migrants en situation irrégulière, y compris les enfants non accompagnés ;

e) De f ournir des renseignements sur l ’ enregistrement des naissances d ’ enfants de travailleurs migrants jamaïcains à l ’ étranger et d ’ enfants de travailleurs migrants en Jamaïque, quel que soit le statut migratoire des parents.

Coopération internationale avec les pays de transit et de destination

56.Le Comité note que les accords bilatéraux et multilatéraux conclus par l’État partie avec des pays de la communauté des Caraïbes promeuvent uniquement la libre circulation des personnes qualifiées. S’il accueille avec satisfaction les statistiques fournies par la délégation concernant le nombre de Jamaïcains qui ont bénéficié du Programme pour l’emploi à l’étranger, le Comité reste préoccupé par l’absence d’informations sur l’évaluation par l’État partie de la conformité de ce programme avec ses obligations au titre de la Convention.

57. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De tirer pleinement parti des mécanismes bilatéraux et régionaux afin de promouvoir les droits des travailleurs migrants jamaïcains et des membres de leur famille au titre de la Convention ;

b) De nouer des dialogues au sein de la communauté des Caraïbes en vue d’établir des initiatives régionales concernant tous les travailleurs migrants, y compris ceux qui sont en situation irrégulière, sur la base des droits qui leur sont reconnus par la Convention et par d’autres instruments relatifs aux droits de l’homme et au travail ;

c) D ’ évaluer l ’ efficacité du Programme pour l ’ emploi à l ’ étranger et sa conformité au regard des obligations contractées par l ’ État partie au titre de la Convention, de manière à protéger les droits des travailleurs migrants jamaïcains, et de fournir des informations à cet égard dans le prochain rapport périodique.

Agences de recrutement

58.Le Comité note que les agences de recrutement sont régies par la loi de 1957 sur les agences de recrutement et que des inspections sont menées pour garantir le respect de la loi. Toutefois, il est préoccupé par le manque d’informations sur les cas dans lesquels des agences de recrutement qui imposent des frais excessifs pour leurs services ou servent d’intermédiaire à des recruteurs étrangers qui pourraient soumettre les salariés à des conditions de travail abusives ont fait l’objet d’enquêtes et ont été sanctionnées.

59. Le Comité recommande à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts, y compris en veillant à ce que des inspections soient faites à intervalles réguliers, pour empêcher les agences de recrutement privées de percevoir des commissions excessives pour leurs services et de servir d ’ intermédiaire à des recruteurs étrangers indélicats. Il l ’ encourage également à donner des informations, dans son prochain rapport périodique, sur les mesures prises pour enquêter sur les pratiques illégales des recruteurs et pour engager des poursuites, en vue de punir les personnes qui se livrent à des pratiques abusives.

Retour au pays et réinsertion

60.Le Comité prend note du grand nombre de Jamaïcains qui ont été rapatriés, soit volontairement, soit de force, en particulier en provenance des États-Unis d’Amérique, du Canada et de pays européens. Il est toutefois préoccupé par le manque de renseignements sur les mesures spécifiques prises par l’État partie pour protéger les droits des travailleurs migrants jamaïcains et des membres de leur famille qui reviennent au pays et pour faciliter leur réinsertion.

61. Le Comité recommande à l ’ État partie de prendre des mesures pour créer des conditions sociales, économiques et autres qui soient propres à faciliter le retour et la réinsertion durable des travailleurs migrants jamaïcains et des membres de leur famille dans l ’ État partie, notamment par l ’ offre d ’ emplois décents pour tous les travailleurs migrants rentrés au pays, y compris ceux qui relèvent des programmes de migration circulaire, conformément aux dispositions de l ’ article 67 de la Convention et à la cible 10.7 des objectifs de développement durable.

Causes des migrations et prévention des migrations irrégulières

62.Le Comité note avec préoccupation les informations selon lesquelles l’émigration est principalement due à la pauvreté, au chômage, à l’exclusion et à la discrimination sociales, y compris à la violence à l’égard des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres, qui peuvent faire basculer les travailleurs migrants jamaïcains dans des situations précaires et/ou dans l’insécurité.

63. Le Comité recommande à l’État partie d’investir dans des systèmes de protection sociale suffisants afin d’éviter que la pauvreté et d’autres facteurs sociaux ou la discrimination ne poussent les personnes à émigrer pour travailler dans des conditions précaires, et de promouvoir, dans le contexte du Programme de développement durable à l’horizon 2030 et d’autres initiatives internationales et nationales, des possibilités de travail décent dans le pays .

Traite des personnes

64.Le Comité salue les importantes mesures législatives et réglementaires adoptées par l’État partie pour lutter contre la traite des personnes, par exemple la loi de 2007 relative à la traite des personnes (prévention, élimination et répression) telle que modifiée en 2013, le Plan d’action national de lutte contre la traite des personnes (2015-2018) et la désignation, en 2015, d’un Rapporteur national sur la traite des personnes. Le Comité salue également la coopération engagée par l’État partie avec les organisations de la société civile dans le cadre du Projet Theodora afin de réinsérer les femmes victimes de la traite. Le Comité est néanmoins préoccupé par :

a)L’absence d’études, d’analyses et de données ventilées disponibles pour évaluer l’ampleur de la traite dans l’État partie ;

b)L’absence d’informations sur le financement des centres d’accueil pour les victimes de la traite ;

c)L’absence d’informations sur les mesures prises pour lutter contre l’exploitation sexuelle, en particulier le tourisme sexuel.

65. Le Comité recommande à l ’ État partie :

a) De systématiser davantage la collecte de données ventilées par sexe, âge et origine pour lutter efficacement contre la traite des êtres humains et toutes les formes d ’ exploitation, y compris l ’ exploitation sexuelle à des fins commerciales , ainsi que le travail et les services forcés ;

b) D ’ intensifier les campagnes de prévention de la traite des travailleurs migrants et de les protéger contre l ’ exploitation par le travail ou l ’ exploitation sexuelle, conformément à la cible 5.2 des objectif s de développement durable ;

c) D ’ améliorer la formation des agents des forces de l ’ ordre, des garde s ‑ côtes , des juges, des procureurs, des inspecteurs du travail, des enseignants, des prestataires de soins de santé ainsi que du personnel de ses ambassades et consulats, de diffuser largement l ’ information pour prévenir et combattre la traite des personnes et de fournir une assistance technique aux victimes ;

d) De fournir une aide, une protection et des services de réadaptation adéquats à toutes les victimes de la traite, en particulier au moyen de centres d ’ accueil et de projets de réinsertion et de rapatriement ;

e) De renforcer les mécanismes compétents pour enquêter sur les cas d ’ exploitation sexuelle, en particulier dans le contexte du tourisme sexuel et de la traite de personnes, et pour poursuivre et sanctionner les contrevenants ;

f) De resserrer la coopération internationale, régionale et bilatérale pour prévenir et combattre la traite des personnes.

6.Suivi et diffusion

Diffusion

66. Le Comité prie l ’ État partie de communiquer en temps voulu les présentes observations finales, dans les langues officielles de l ’ État partie, aux institutions publiques concernées, y compris les ministères, le Parlement , l ’ appareil judiciaire et les autorités locales pertinentes, ainsi que les organisations non gouvernementales et autres acteurs de la société civile.

7.Assistance technique

67. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ avoir recours à l ’ assistance internationale pour mettre en œuvre les recommandations figurant dans les présentes observations finales, conformément au Programme de développement durable à l ’ horizon 2030.

8.Prochain rapport périodique

68. Le Comité invite l ’ État partie à lui soumettre son rapport valant rapport initial et deuxième rapport périodique au plus tard le 1 er mai 2019. À cette fin, l ’ État partie peut opter pour la procédure simplifiée de soumission de rapports. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur ses directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports (HRI/GEN.2/Rev.6).