NATIONS UNIES

CMW

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr.GÉNÉRALE

CMW/C/SR.9015 mai 2009

Original: FRANÇAIS

NATIONS UNIESCOMITÉ POUR LA PROTECTION DES DROITS DE TOUS LES TRAVAILLEURSMIGRANTS ET DES MEMBRES DE LEUR FAMILLE

Neuvième session

COMPTE RENDU ANALYTIQUE DE LA 90e SÉANCE

tenue au Palais Wilson, à Genève,le mardi 25 novembre 2008, à 10 heures

Président: M. EL JAMRI

SOMMAIRE

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 73 DE LA CONVENTION (suite)

Rapport initial d’El Salvador (suite)

La séance est ouverte à 10 heures .

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 73 DE LA CONVENTION (point 3 de l’ordre du jour) (suite)

Rapport initial d’El Salvador (CMW/C/SLV/1, CMW/C/SLV/Q/1, CMW/C/SLV/Q/1/Add.1) (suite)

1.Le PRÉSIDENT invite la délégation salvadorienne à reprendre place à la table du Comité.

2.M. LARIOS LÓPEZ (El Salvador) passe en revue un certain nombre de plans et programmes sociaux mis en œuvre par son pays depuis 2005 afin de garantir à chaque Salvadorien des conditions de vie décentes. La plupart de ces plans et programmes comprennent trois volets. Le premier porte sur la lutte contre la pauvreté, y compris des mesures visant à combler les inégalités entre zones urbaines et zones rurales, la priorité étant accordée jusqu’en 2009 à 100 municipalités considérées comme les plus pauvres, et à garantir l’accès universel à l’enseignement primaire et à des soins de santé de base dans les zones reculées et défavorisées. Le deuxième volet a trait au développement des services de base, en particulier l’approvisionnement en eau et l’assainissement, et à l’électrification des zones rurales. Le troisième volet concerne la mise en place de projets productifs, notamment en faveur de 100 000 familles extrêmement pauvres. À ce jour, plus de 6 000 microcrédits ont déjà été accordés, dans la majorité des cas à des femmes afin qu’elles créent des petites entreprises et subviennent aux besoins fondamentaux de leurs familles. Le programme «Alianza por la familia», dans le cadre duquel le Gouvernement prévoit d’investir 54 millions de dollars, comprend 19 mesures, les plus importantes étant notamment la suppression des frais de scolarité pour les lycéens depuis janvier 2008, l’embauche massive d’enseignants, l’octroi d’un plus grand nombre de bourses afin de lutter contre l’abandon scolaire des adolescents qui sont contraints de travailler pour subvenir aux besoins de leurs familles, et l’obligation pour les employeurs de continuer à verser l’intégralité de leur salaire aux femmes qui prennent un congé de maternité. Par ailleurs, afin de lutter contre les effets de la crise, l’État salvadorien a notamment décidé de geler toute augmentation des tarifs d’électricité et d’autres sources d’énergie.

3.Mme RIVAS POLANCO (El Salvador), répondant aux questions posées par les membres du Comité à la séance précédente, dit que le Vice‑Ministère des relations extérieures pour les Salvadoriens de l’étranger, qui a été créé en 2004, est chargé de venir en aide aux personnes handicapées ou blessées à la suite d’un accident survenu pendant leur voyage vers le pays de destination, et ce quel que soit leur statut migratoire. Le Vice‑Ministère intervient auprès de l’État de transit ou de destination pour prêter une assistance concrète aux personnes handicapées, y compris leur fournir des prothèses. L’État salvadorien entretient des liens étroits avec le Mexique où la plupart des accidents sont enregistrés. À leur retour en El Salvador, toutes les personnes ont évidemment accès aux soins de santé et aucun effort n’est épargné pour faciliter leur accès au marché du travail. En ce qui concerne les accidents de travail concernant des migrants salvadoriens à l’étranger, le Vice‑Ministère prend contact avec le consulat d’El Salvador dans le pays de destination pour que les travailleurs puissent être indemnisés par leurs employeurs. En 1999, avec le concours de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), El Salvador a mis en place un fonds national pour le rapatriement des migrants salvadoriens à l’étranger. Il existe aussi un fonds régional de rapatriement et d’assistance à l’intention des migrants qui se trouvent dans des situations de grande vulnérabilité.

4.Tous les enfants de migrants, quelle que soit leur situation migratoire, ont accès à l’école. En ce qui concerne les mineurs non accompagnés interceptés sur le territoire national, c’est principalement l’Institut salvadorien de protection de l’enfance et de l’adolescence (ISNA) qui est chargé d’assurer leur protection et de garantir le respect de leurs droits lors de leur rapatriement. La première mesure consiste à établir l’identité et l’âge du mineur non accompagné. Dans la plupart des cas, c’est l’État d’origine qui prend en charge les frais de rapatriement mais la famille peut aussi être sollicitée lorsqu’elle en a les moyens. Si le mineur est âgé de plus de 12 ans, on lui demande s’il souhaite être rapatrié ou non car les autorités salvadoriennes ont constaté que dans de nombreux cas, les enfants étaient victimes d’exploitation au sein de leur famille. En tout état de cause, l’ISNA établit un rapport sur l’état psychologique et la situation sociale de l’enfant, rapport qui est transmis aux autorités compétentes. De manière générale, les autorités salvadoriennes sont très attentives aux difficultés auxquelles peuvent être confrontés les enfants de migrants.

5.Il existe actuellement neuf «consulats de protection» et il est prévu d’en créer sept autres, principalement sur l’itinéraire que suivent les migrants pour se rendre aux États‑Unis. Ces consulats, dont huit se trouvent au Mexique et un aux États‑Unis, sont chargés de fournir une protection aux migrants salvadoriens en situation irrégulière pour la plupart, de s’assurer que leurs droits sont respectés, et d’accompagner les migrants lors de leur rapatriement vers El Salvador. Il est à noter que les consulats de protection s’occupent aussi, dans les cas d’urgence, de migrants non salvadoriens.

6.Les plans et programmes sociaux évoqués par M. Larios López sont exécutés dans les localités pauvres connaissant un fort taux d’émigration et dont les habitants sont susceptibles de devenir des migrants clandestins. Une stratégie de communication a été mise en œuvre, qui met l’accent sur les problèmes que peuvent susciter les migrations clandestines. Des spots d’informations sur le sujet sont notamment diffusés à la radio et à la télévision. Le Ministère de l’éducation a également lancé une campagne intitulée «Les dangers de la route du Nord» (Los peligros de la ruta del norte). Une étude, soutenue par le groupe interinstitutions composé de l’UNICEF, du Fonds des Nations Unies pour la population (FNUAP), du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD) et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), et coordonnée par le Vice-Ministère des relations extérieures pour les Salvadoriens de l’étranger, a été entreprise afin d’évaluer les incidences de la migration des enfants. Les répercussions des migrations en El Salvador sont visibles notamment dans la structure familiale, les relations interpersonnelles et les habitudes de consommation. Les 2,5 millions de Salvadoriens émigrés entretiennent des liens sociaux et culturels très étroits avec leur famille restée au pays et envoient régulièrement des fonds, qui ont représenté, en 2007, près de 3,7 milliards de dollars, soit 18 % du PIB. L’importance du phénomène migratoire dans la société salvadorienne est telle que l’on peut qualifier celle‑ci de société «transnationale».

7.Mme FLAMENCO (El Salvador) dit qu’El Salvador n’a, à l’heure actuelle, aucun accord de réadmission avec des pays étrangers. Un accord avec l’Union européenne est en cours de négociation, et s’il aboutit, des accords bilatéraux devront être conclus avec l’Italie et l’Espagne. Les rapatriements qui ont lieu aujourd’hui ne sont pas des rapatriements volontaires, mais plutôt des rapatriements forcés. C’est pour cette raison qu’a été créé le programme «Bienvenue à la maison», lequel comporte aujourd’hui une seconde phase qui permettra progressivement de résoudre les problèmes des Salvadoriens qui reviennent au pays et de favoriser leur réinsertion. El Salvador a signé deux mémorandums d’accord bilatéraux portant sur le rapatriement, l’un avec le Guatemala et l’autre avec le Mexique. En outre, un mémorandum d’accord régional a été signé entre les Gouvernements du Mexique, d’El Salvador, du Guatemala, du Honduras et du Nicaragua, qui concerne le rapatriement digne, ordonné et sûr par voie terrestre des migrants d’Amérique centrale. Ce mémorandum, signé en 2006, prévoit de réserver un traitement différencié aux filles, aux garçons et aux adolescents non accompagnés et aux femmes. Le 8 novembre 2008, les pays signataires ont effectué un réexamen de ce texte et envisagé une série de modifications; des négociations ont été entamées en vue d’appliquer ce mémorandum aux déplacements par voie aérienne des mineurs non accompagnés qui arrivent en El Salvador. Sur la base de ces différents mémorandums, un grand nombre de Salvadoriens notamment des enfants, ont été rapatriés par voie terrestre entre 2005 et 2008. Aujourd’hui, El Salvador travaille en étroite collaboration avec le Mexique et d’autres pays de la région à l’élaboration d’un manuel de procédures qui vise à améliorer le rapatriement des ressortissants des pays d’Amérique centrale.

8.Des directives régionales pour la protection des enfants et adolescents victimes de la traite qui font l’objet d’un rapatriement ont aussi été adoptées. Sur le plan interne, El Salvador a élaboré en 2007 un manuel de procédures pour le rapatriement des mineurs victimes de la traite, qui concerne aussi bien les enfants étrangers renvoyés dans leur pays que des mineurs salvadoriens qui reviennent en El Salvador. La procédure relative au rapatriement des enfants de 12 ans et plus est la même que celle appliquée aux adultes, ce qui signifie que, lorsque l’enfant a été localisé par la police nationale civile (PNC), par des agents des services des migrations ou par l’Institut salvadorien de protection de l’enfance et de l’adolescence (ISNA), il est informé de la procédure qui va lui être appliquée. Le consulat du pays d’origine de l’enfant est également informé afin qu’il puisse lui délivrer les documents nécessaires. Des enfants originaires du Nicaragua et du Guatemala ont ainsi été renvoyés dans leur pays dans le cadre de cette procédure. Lorsque les enfants sont victimes d’une infraction, une collaboration est mise en place avec le Bureau du Procureur, mais celui-ci n’a pas compétence pour déterminer si l’enfant peut ou non être rapatrié. Les enfants qui ont commis un délit ne sont pas passibles de poursuites pénales s’ils sont âgés de moins de 12 ans, tandis que ceux âgés de 12 à 18 ans sont soumis à la législation pénale relative aux mineurs et leur affaire est renvoyée devant les tribunaux pour mineurs. À l’issue de la procédure, l’enfant est remis aux autorités chargées du rapatriement. Au niveau national, 89 mineurs ont ainsi été rapatriés en 2007 et 51 en 2008. Le manuel administratif et de procédure juridique du centre d’aide aux migrants (centro de atencion integral) a été élaboré en coordination avec la police nationale civile. La première partie énumère les principes, la portée et les objectifs du manuel, et définit l’organisation du centre et les fonctions et responsabilités des collaborateurs, tandis que la seconde porte essentiellement sur la procédure. Ce document a été signé par le Ministre de la sécurité publique, dont dépendent la PNC et la Direction générale des migrants et des étrangers.

9.M. GUERRA(El Salvador), répondant à la question posée par M. Alba au sujet des statistiques relatives à la traite des migrants, dit que la Division des frontières de la PNC s’occupe du problème de la traite depuis février 2004. La Division, qui est aujourd’hui chargée d’aider le Bureau du Procureur à enquêter sur les cas de traite, travaille aussi bien sur le plan local qu’international. Jusqu’en 2007, 154 affaires concernant 208 victimes au total ont été ouvertes et donné lieu à la mise en détention de 140 personnes. La différence qui existe entre les données du Bureau du Procureur et celles de la Division des frontières est due au fait que le Bureau du Procureur de San Salvador se concentre sur le niveau régional, tandis que la Division des frontières doit se coordonner avec les autres services du Bureau du Procureur du pays.

10.M. CASTRO GRANDE (El Salvador) dit que les travailleurs migrants en situation régulière ont le droit de former des associations et d’être membres d’un syndicat, conformément au paragraphe 1 de l’article 47 de la Constitution et à l’article 204 du Code du travail. El Salvador ne dispose pas de données précises sur le nombre de travailleurs migrants syndiqués. Le paragraphe 4 de l’article 47 de la Constitution dispose qu’il faut remplir certaines conditions pour être membre des organes dirigeants d’un syndicat, et notamment être salvadorien de naissance. El Salvador, qui a ratifié les conventions de l’Organisation internationale du Travail (OIT) n° 87, sur la liberté syndicale et la protection du droit syndical, et n° 98, sur le droit d’organisation et de négociation collective en 2006, est donc aujourd’hui partie aux huit conventions fondamentales de l’OIT. Les dispositions des instruments internationaux ratifiés par El Salvador sont transposées dans la législation interne. Il convient de noter que la Commission d’experts pour l’application des conventions et recommandations de l’OIT, dans l’étude générale qu’elle a réalisée en 1994 sur les conventions n° 87 et n° 98, a considéré, s’agissant des conditions d’éligibilité et en particulier de la question de la nationalité, qu’il faudrait autoriser l’accès des travailleurs étrangers aux fonctions de dirigeants syndicaux, tout au moins après une période raisonnable de résidence dans le pays d’accueil. Le rapport soumis par El Salvador sur l’application de ces deux conventions sera examiné par la Commission d’experts en novembre et décembre 2008, et le Gouvernement sera très attentif aux conclusions et recommandations qui lui seront faites à cette occasion. El Salvador n’est pas partie à la convention de l’OIT n° 118, sur l’égalité de traitement (sécurité sociale). Toutefois, il a adhéré en juin 2008 à la Convention multilatérale latino-américaine sur la sécurité sociale, qui permet aux travailleurs migrants de bénéficier dans leur pays d’origine des droits aux prestations sociales acquis alors qu’ils travaillaient à l’étranger, qu’il s’agisse de la retraite ou d’une éventuelle pension d’invalidité. Ces dispositions s’appliquent aux travailleurs salariés ou indépendants ainsi qu’aux membres de leur famille. La Convention prévoit également qu’une personne qui a travaillé dans plusieurs pays d’Amérique latine pourra percevoir sa pension dans n’importe lequel de ces pays. La coopération administrative entre les différents systèmes de sécurité sociale est encouragée, l’objectif étant d’éviter tout retard et discrimination dans le versement des prestations.

11.Mme ALFARO (El Salvador) dit que les effets personnels et le matériel de travail des personnes qui arrivent en El Salvador ne sont pas soumis à des droits de douane, ce afin de faciliter les possibilités de travail des intéressés. Par ailleurs, ces personnes ont le droit d’importer en franchise des biens personnels neufs pour une valeur maximale de 1 000 dollars des États-Unis. Un Salvadorien qui a résidé à l’étranger plus de trois années et qui revient définitivement en El Salvador peut réimporter ses effets personnels sans acquitter de droits de douane si leur valeur ne dépasse pas 15 000 dollars des États-Unis.

12.M. KARIYAWASAM souhaiterait savoir si, comme dans de nombreux autres pays et par méconnaissance des dispositions de la Convention, la police des frontières de l’État partie sanctionne pénalement les migrants en raison de leur seul statut, qu’ils soient demandeurs d’asile, sans papiers, en situation irrégulière ou victimes de la traite des êtres humains, et si des cours de formation aux droits des travailleurs migrants sont dispensés aux gardes frontière. Il demande aussi si, comme indiqué dans les réponses au point 6 de la liste des points à traiter, des ateliers de formation consacrés à la traite des êtres humains à l’intention des agents de police et des employés des services d’immigration sont encore organisés à ce jour et, si tel n’est pas le cas, s’il est prévu de former les policiers et les gardes frontière afin qu’ils respectent les droits des migrants. Enfin, il attend les commentaires de la délégation sur l’expulsion dont il est question dans les réponses écrites au point 12 de la liste des points à traiter, intervenue alors que le résultat de la procédure d’ habeas corpus entamée par le migrant n’était pas encore connu.

13.M. TAGHIZADE dit que différents chiffres sont donnés concernant la population totale d’El Salvador, qui s’élèverait à 5 ou 6 millions voire, selon certains rapports, à 7 millions d’habitants. Il souhaiterait savoir si les données recueillies lors du recensement de 2007 sont précises et si, dans ce recensement, les Salvadoriens émigrés ont été pris en compte.

14.M. ALBA (Rapporteur) voudrait connaître la portée réelle des accords de libre circulation conclus entre les pays appartenant au groupe «CA‑4» (Guatemala, Honduras, El Salvador, Nicaragua) et le nombre approximatif de travailleurs originaires de ces pays qui, tirant parti des facilités de transit qui leur sont offertes, viennent travailler illégalement dans l’État partie à titre temporaire, saisonnier ou permanent. Compte tenu du fait que comme indiqué dans les réponses écrites, le centre d’accueil pour les migrants n’héberge actuellement que cinq personnes alors que sa capacité maximale est de 80 places, toute estimation générale du nombre de personnes en situation irrégulière dans le pays serait d’ailleurs la bienvenue. Il serait aussi intéressant de savoir si l’État partie est réellement devenu un pays de transit important et de connaître la politique du Gouvernement salvadorien face à l’un et l’autre des phénomènes migratoires susmentionnés.

15.La délégation pourrait en outre fournir des éclaircissements sur le délai exact accordé aux personnes disposant d’un permis de travail pour quitter le territoire lorsque leur contrat de travail arrive à expiration et sur l’octroi, dans la pratique, de la nationalité salvadorienne aux enfants nés de travailleurs migrants en situation irrégulière dépourvus de papiers d’identité. Enfin, il serait utile de savoir si le Gouvernement de l’État partie entend lever les réserves qu’il a émises à l’égard des articles 46, 47, 48 et 61 4) de la Convention.

La séance est suspendue à 11 h 25; elle est reprise à 11 h 50.

16.Mme ALFARO (El Salvador) précise que le Gouvernement salvadorien n’a pas formulé de réserves mais des déclarations au sujet des articles 46, 47, 48 et 61 de la Convention. Ainsi, tous les travailleurs migrants présents sur le territoire ont le droit de transférer leurs gains et leurs économies, ainsi que leurs biens et effets personnels, vers leur pays d’origine, sous réserve du paiement préalable des impôts dont ils sont redevables.

17.Mme FLAMENCO (El Salvador) indique qu’en 2008, divers modules de formation, consacrés notamment à l’étude de la Convention et au rapatriement, ont pu être organisés à l’intention des agents des migrations, en particulier des nouvelles recrues, avec l’aide et le concours du Bureau du Procureur chargé de la défense des droits de l’homme. Elle reconnaît toutefois que les agents des migrations, qui sont postés aux frontières ou travaillent dans les diverses antennes de la Direction générale des migrations et des étrangers ou au sein de patrouilles, ont un besoin accru et permanent de formation aux droits des migrants. Il est prévu, en 2009, de proposer des formations approfondies spécifiquement consacrées à l’analyse des différentes parties de la Convention à l’intention de toutes les parties et entités intéressées, à savoir les agents des migrations, mais aussi ceux de la police nationale civile, du ministère public et du Ministère du travail. À cet égard, Mme Flamenco souligne que toutes les propositions, suggestions et offres de collaboration sont les bienvenues.

18.El Salvador applique depuis juin 2006 le principe de la libre circulation avec les pays membres du groupe «CA‑4» pour ce qui touche au transit par les frontières périphériques et intermédiaires, mais pas au droit au travail. Ainsi un ressortissant guatémaltèque, hondurien ou nicaraguayen peut se rendre en El Salvador ‑ et inversement ‑, y séjourner de façon temporaire ou permanente et sortir du pays avec de simples documents d’identité, c’est-à-dire sans passeport (à l’exception des enfants mineurs), mais n’a pas le droit d’y travailler. Des projets d’accords sont actuellement à l’étude ou progressivement adoptés; ils concernent la mise en place de restrictions aux migrations communes aux quatre pays concernés, d’un visa et d’un passeport uniques centraméricains et d’un permis de résidence centraméricain. Dans ce processus, les pays de la région se heurtent aux mêmes obstacles en matière d’intégration que les pays de l’Union européenne.

19.Faute de recensement spécifique, la délégation salvadorienne n’est actuellement pas en mesure de donner d’estimations fiables concernant le nombre de personnes en situation irrégulière présentes sur le territoire national. Les seules données dont elle dispose sont le nombre de titulaires de permis de résidence toutes catégories confondues enregistrés auprès des services compétents (32 104 personnes).

20.La Direction générale des migrations et des étrangers est bien consciente du fait que toute ordonnance d’expulsion ou de rapatriement concernant un migrant qui a eu recours à la procédure d’habeas corpusest suspendue jusqu’au prononcé de la décision finale. Le cas mentionné dans les réponses écrites reste exceptionnel: il s’agit d’un Colombien qui se prétendait de nationalité guatémaltèque lors de son arrestation et qui a formé un recours devant la chambre constitutionnelle de la Cour suprême de justice, entité indépendante de l’organe exécutif en la matière. Les instances chargées des migrations n’ont ainsi été notifiées de la suspension de la procédure par la chambre constitutionnelle qu’après l’expulsion du ressortissant colombien en question. À ce jour, la Cour suprême n’a toujours pas rendu sa décision.

21.El Salvador accorde systématiquement dans un premier temps un permis de résidence d’un an aux étrangers qui viennent travailler dans le pays, ce permis pouvant ensuite être prorogé, sur demande. Même si la loi sur les migrations dispose qu’en cas de rupture du lien professionnel, la Direction générale des migrations et des étrangers doit immédiatement signifier à l’intéressé qu’il doit quitter le territoire, dans les faits, et conformément aux dispositions de la Convention, l’étranger dispose de quatre‑vingt‑dix jours pour faire une nouvelle demande de permis de résidence (accordé en cas de mariage avec une Salvadorienne, de nouveau contrat de travail, etc.) ou pour s’organiser en vue de quitter le territoire.

22.La loi sur les migrations ne contient pas de dispositions spécifiques sur la situation des enfants nés de travailleurs migrants en situation irrégulière en El Salvador. En ce qui concerne la situation familiale, elle n’établit aucune distinction entre les Salvadoriens et les non‑Salvadoriens, qu’ils possèdent ou non des papiers d’identité. Aussi, un étranger en situation irrégulière dans le pays peut parfaitement enregistrer son enfant aux fins de l’acquisition de la nationalité salvadorienne, pour autant qu’il puisse présenter un quelconque document d’identité avec une photographie.

23.Récemment, El Salvador est peu à peu devenu un pays de transit, situé sur l’itinéraire qu’empruntent les migrants, essentiellement sud-américains et chinois, cherchant à se rendre aux États-Unis d’Amérique ou au Canada. La Direction générale des migrations et des étrangers n’a pas de politique répressive à leur égard: elle n’effectue aucun contrôle migratoire lorsque le transit est effectué par voie aérienne; en cas de transit par voie terrestre, la police nationale civile procède aux contrôles d’identité habituels et n’arrête que les passeurs et les «mules» et laisse le bénéfice du doute aux migrants, même pourvus de faux documents d’identité, afin qu’ils puissent poursuivre leur chemin. El Salvador a signé récemment un protocole relatif à la traite des êtres humains, qu’il applique aux victimes se trouvant sur son territoire.

24.Mme RIVAS POLANCO (El Salvador) indique que, d’après le recensement de 2007, la population du pays est de 5 743 103 habitants, sans compter les 2,3 millions de Salvadoriens vivant à l’étranger (aux États-Unis pour 90 % d’entre eux). Rappelant qu’El Salvador est partie au Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, Mme Rivas Polanco précise qu’en 2006 a été créé le Comité national contre la traite des personnes, et qu’il existe une politique nationale visant à éliminer ce fléau. De plus, un plan stratégique a été mis sur pied pour la période 2008-2012, qui comporte notamment un volet consacré à la prévention. À ce titre, une formation systématique a été mise au point avec les organisations de la société civile et d’autres institutions sur les questions de traite des personnes, à l’intention des personnels de la police nationale civile, de la Direction générale des migrations et des étrangers, et du ministère public, mais aussi des magistrats. Conscient de l’importance de la formation portant sur la traite des personnes, El Salvador est déterminé à poursuivre ses activités dans ce domaine, et n’hésite pas à s’associer aux pays voisins (Guatemala, Mexique) pour mener cette tâche à bien.

25.M. GUERRA (El Salvador), répondant à la question posée sur la criminalisation des migrants, indique que les dispositions énoncées au paragraphe 12 de l’article 4 de la loi organique sur la police nationale civile déterminent les attributions de la police en matière de surveillance des frontières et de toutes les voies de communication du pays. Par ailleurs, conformément au paragraphe 2 de l’article 60 de la loi sur les migrations, les agents de la sécurité publique et les autres autorités administratives sont tenus d’informer la Direction générale des migrations et des étrangers des cas d’infraction, et de lui communiquer tous les éléments d’information lui permettant de déterminer s’il y a lieu d’établir une ordonnance de rapatriement. Cette autorité doit pour sa part veiller au bon déroulement de la procédure de rapatriement, dans le respect des garanties applicables.

26.En ce qui concerne les services de police, il existe plusieurs plans qui visent tous à informer les policiers sur les droits des migrants mais aussi à prévenir le trafic et la traite de personnes et à lutter contre ces phénomènes. Dans ce cadre, le personnel affecté à la surveillance des frontières a reçu une formation sur les dispositions de la Convention, les questions relatives aux réfugiés, la traite des personnes, les problèmes spécifiques des femmes, les droits de l’homme et le trafic et la traite de personnes. Une telle formation a été dispensée à 480 personnes en 2007, et en 2008, 180 ont reçu un enseignement sur les principes énoncés dans la Convention. Le personnel de la police nationale civile a en outre reçu une formation portant notamment sur l’analyse et le traitement de l’information, ainsi que sur la détection des faux papiers d’identité.

27.M. ALBA (Rapporteur) félicite la délégation salvadorienne pour la compétence et le grand professionnalisme dont elle a fait preuve dans ses réponses, démontrant la détermination de l’État partie à respecter et défendre les droits de tous les travailleurs migrants, sans distinction. Il se félicite en particulier de la présence de représentants de décideurs et de responsables de l’application des politiques nationales en matière de migrations. L’échange très fructueux qui s’est tenu aide incontestablement le Comité dans sa tâche, qui consiste à prendre connaissance de la façon dont les États mettent en œuvre la Convention et à suivre et accompagner les efforts déployés dans ce sens.

28.Saluant les orientations prises par le Gouvernement salvadorien en matière de migration, qui constituent de bonnes pratiques dont les autres pays pourront s’inspirer, M. Alba évoque notamment le rôle des coopératives dans les envois de fonds. Il est heureux que le Gouvernement ait bien compris qu’une réforme du cadre législatif et des normes nationales est un processus continu, qui vise à la perfection sans jamais véritablement l’atteindre. Les réformes engagées sont une première étape, qui sera suivie par d’autres. Le Rapporteur indique pour conclure que le Comité s’attachera à formuler ses observations de sorte qu’elles puissent aider l’État partie dans sa tâche.

29.M. KARIYAWASAM félicite lui aussi la délégation salvadorienne pour la qualité des informations communiquées et les efforts que le pays a déployés en vue de mettre en œuvre la Convention. Il dit que le Comité, pleinement conscient des difficultés que le Gouvernement rencontre du fait que les pays de destination des Salvadoriens émigrés ne sont pas parties à la Convention, va formuler ses observations et recommandations de façon à encourager l’État partie à mieux appliquer la Convention, pour le bien des travailleurs migrants qui jouent un rôle important dans l’économie du pays.

30.Le PRÉSIDENT remercie la délégation salvadorienne pour le dialogue franc qui s’est tenu avec le Comité, tout en regrettant que les réponses écrites à la liste de questions lui soient parvenues trop tard pour pouvoir être traduites dans d’autres langues. Il salue les compétences des membres de la délégation et se félicite de la présence d’un représentant de la police nationale, doté d’une connaissance approfondie des problèmes migratoires. Tout à la fois pays d’origine, de transit et de destination des migrants, confronté en outre à des défis en matière de développement, El Salvador fait preuve d’un grand dynamisme sur les questions de migration et offre un excellent exemple en matière de bonnes pratiques. Le Comité l’encourage à poursuivre ses efforts et veillera, dans ses observations finales, à formuler un certain nombre de recommandations dans ce sens, en vue d’aider l’État partie à mettre en œuvre plus complètement la Convention.

31.M. LARIOS LÓPEZ (El Salvador) conclut en remerciant le Comité du temps qu’il a consacré à l’examen du rapport initial de son pays et dit que toute l’attention voulue sera accordée aux observations et recommandations du Comité. Il ajoute qu’El Salvador compte assumer toutes ses responsabilités, et confirme que les mesures mises en place jusqu’à présent étant des mesures dites «de première génération», la délégation devrait pouvoir présenter au Comité, à la faveur d’une prochaine réunion, les résultats des mesures «de deuxième génération».

La séance est levée à 12 h 40.

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