Nations Unies

CMW/C/SR.102

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr. générale

20 avril 2010

Français

Original: anglais

C omité pour la protection des droits de tous les travailleurs

migrants et des membres de leur famille

Dixième session

Compte rendu analytique de la 102 e séance

Tenue au Palais Wilson à Genève,le mercredi, 22 avril 2009, à 10 heures.

Président: M. El Jamri

Sommaire

Exam en des rapports soumis par les É tats parties en appl ication de l’article 73 de la C onvention ( suite )

Rapport initial de l’ Azerbaïdjan (suite)

La séance est ouverte à 10 h 5.

Examen des rapports pré sent é s par les É tats parties en application de l’article 73 de la Convention (suite)

Rapport initial de l’Azerbaïdjan (suite) (CMW/C/AZE/1; CMW/C/AZE/Q/1 et Add.1)

Sur l’invitation du Président, les membres de la délégation d’Azerbaïdjan reprennent place à la table du Comité.

M. Natiq Mammadov (Azerbaïdjan), note que le rapport périodique remonte àfévrier 2007 et constate qu’un certain nombre d’initiatives importantes ont été mises en oeuvre depuis. En mars 2007, le Président de l’Azerbaïdjan a signé un décret portant création d’un Service national des migrations et des modifications notoires ont été apportées à la législation et aux procédures en vue d’améliorer les droits des travailleurs migrants.

M. Vahab Mammadov (Azerbaïdjan) signale que les données relatives au secteur informel sont recueillies au moyen d’études périodiques réalisées par la Commission nationale des statistiques, par la Confédération des syndicats et par un certain nombre d’instituts de recherche. On estime généralement que le secteur informel représente de 15 à 18 pour cent de l’activité économique. Bien qu’à l’heure actuelle l’on ne dispose pas de statistiques fiables sur le nombre de travailleurs migrants dans ce secteur, le Gouvernement prévoit en 2009 de mener une enquête auprès de 18 000 ménages en vue d’obtenir des informations sur les activités économiques, et un nouveau recensement est en cours qui inclut des questions relatives aux immigrants et à leur travail. La Commission nationale des statistiques élabore actuellement une méthodologie ayant trait aux études relatives à l’immigration,qui fournira un tableau plus clair de la situation de l’emploi des migrants. En 2007 et 2008, l’Inspection nationale du travail a constaté l’existence de plus de 3000 migrants employés illégalement; la majorité d’entre eux ont vu ensuite leur situation régularisée. Au cours des deux dernières années, plus de 5000 personnes sans papiers ont bénéficié d’une légalisation de leur situation.

Les syndicats sont créés librement et il est exact que la direction de certaines multinationales limite ce droit dans leurs entreprises. La délégation azerbaïdjanaise a soulevé ce problème à la Conférence internationale du travail et la Confédération des syndicats a pris des mesures pour corriger la situation. Certains travailleurs étrangers sont syndiqués dans leur pays d’origine. La loi ne prévoit aucune restriction aux activités syndicales des travailleurs migrants.

En réponse à une question relative à l’existence d’éventuelles différences régionales dans la mise en oeuvre de la Convention, il signale que l’occupation par l’Arménie de 20 pour cent du pays a entraîné une situation dans laquelle l’État partie est incapable d’assurer le respect de la Convention sur une portion importante de son territoire.

Les organisations non gouvernementales (ONG) participent à la rédaction des rapports destinés aux organes conventionnels, conformément au plan national de protection des droits de l’homme. Un certain nombre d’ONG ont participé à l’élaboration du rapport initial destiné au Comité pour les travailleurs migrants, notamment celles présentes à la séance en cours. Les sections du rapport relatives à la traite des personnes, à la protection sociale et à l’assistance judiciaire aux travailleurs migrants ont été rédigées avec l’aide de 35 ONG. Le Gouvernement tiendra compte des recommandations du Comité préconisant de faire participer davantage les ONG à la rédaction des futurs rapports.

L’Inspection nationale du travail est chargée de veiller au respect du droit du travail et en 2008 seulement, elle a régularisé la situation de l’emploi de plus de 90 000 personnes dont 3 000 migrants, et elle a reçu et traité 38 plaintes de travailleurs migrants, dont 32 ont été jugées en leur faveur. Afin de garantir un emploi décent, les contrats de travail doivent obligatoirement énoncer les conditions de rémunération, comme celles ayant trait àla sécurité et à l’hygiène du travail. Le Code du travail inclut une disposition qui permet aux travailleurs migrants de porter plainte auprès des organes chargés de l’application de la loi et des organes judiciaires, en cas de violation de leurs droits du travail.

En vertu de la loi, les travailleurs migrants employés légalement dans le pays paient des impôts. Aucune disposition ne limite le montant des envois de fonds vers les pays d’origine et le Gouvernement ignore le volume de ces transferts. Aucune taxe n’est perçue sur les biens personnels des travailleurs migrants lorsqu’ils entrent dans le pays et lorsqu’ils le quittent. En vertu de la loi sur les étrangers, du droit du travail et de la Constitution, les travailleurs migrants disposent des mêmes droits du travail que les ressortissants nationaux. Il n’y a ainsi aucune différence dans la manière dont ils sont traités dans le cadre des contrats d’emploi.

L’Azerbaïdjan a ratifié 56 conventions de l’Organisation internationale du travail (OIT), dont les huit conventions fondamentales, et en 2004, elle a ratifié la Charte sociale européenne révisée. Compte tenu de la croissance socio-économique rapide du pays, le Gouvernement envisage de ratifier cinq articles supplémentaires de la Charte, la Convention sur les travailleurs migrants (révisée) de l’OIT, de 1949 (N°97), et la Convention sur les travailleurs migrants (dispositions complémentaires), de 1975 (N° 143). Les rapports soumis par le Gouvernement conformément aux instruments de l’OIT et à la Charte, comprennent des informations sur la situation des migrants.

Le Gouvernement s’efforce de mettre en oeuvre les dispositions de la Convention en améliorant la législation nationale et les bases institutionnelles en faveur des droits des travailleurs migrants, en assurant l’application de la loi, et en menant des activités de sensibilisation et d’information du public.

Mme Rasulova (Azerbaïdjan) signale qu’en vertu de la Constitution, tous les traités internationaux et les accords intergouvernementaux auxquels accède l’Azerbaïdjan et qui incluent des normes en désaccord avec la loi nationale, doivent être soumis par le Président au Parlement pour approbation. Les accords internationaux auxquels le pays accède sont considérés comme faisant partie intégrante de la loi nationale. En cas de conflit entre un accord international et une loi nationale, à l’exclusion de la Constitution elle-même et des lois adoptées par référendum, l’accord international prévaut. Les dispositions de la Convention relatives au droit des migrants de participer aux élections n’obligent en rien l’État à autoriser une telle participation, mais stipulent seulement que celle-ci est possible si l’État partie choisit de l’autoriser. En Azerbaïdjan, les ressortissants étrangers qui résident dans le pays depuis cinq ans ou plus, ont le droit de voter aux élections municipales, à condition que le pays dont ils sont ressortissants accorde un droit similaire aux citoyens d’Azerbaïdjan. Ils ne peuvent toutefois se présenter aux élections. Aux termes du Code électoral, seules les personnes qui détiennent la citoyenneté azerbaïdjanaise ont le droit d’être élues ; mêmes celles ayant la double nationalité ne sont pas autorisées à postuler pour un mandat. En vertu de la Loi sur les étrangers et les personnes apatrides (statut légal), les non ressortissants ont, au même titre que les citoyens, droit d’accès aux logements financés par les pouvoirs publics, sauf disposition légale contraire. Les membres du Comité ont demandé quel type dedispositions pouvaient être invoquées pour restreindre ce droit: en fait, il n’en existe aucune. La clause en question ne vise pas à autoriser de telles restrictions,

mais à les rendre plus difficiles à adopter. L’emploi du mot zakon (loi) en Russe indique que toute restriction analogue doit procéder d’un texte législatif et non d’un règlement tel une décision administrative prise par un organe exécutif national ou local.

En 2003, l’Azerbaïdjan a ratifié la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des êtres humains, en particulier des femmes et des enfants. Pour se conformer aux obligations afférentes à ces instruments, elle a adopté en 2005 la Loi contre la traite des êtres humains et les sanctions pénales encourues par les auteurs de ce type de délit ont été alourdies. Des poursuites administratives et pénales peuvent être engagées en cas de travail forcé et de transport de passagers sans papiers. Un service de police spécialisé au Ministère de l’Intérieur est chargé des questions de traite des personnes et un coordinateur national de haut niveau a été recruté au sein du Ministère pour travailler dans ce domaine. Le Président a publié deux plans d’action visant à lutter contre la traite des personnes pour les périodes 2004-2008 et 2009-2013. Le premier vise à la supprimer, tandis que le second s’attache davantage à fournir aux victimes des services de réinsertion, et à prévenir le phénomène par une meilleure information du public.

La Loi contre la traite des personnes fait appel à la coopération entre le Gouvernement et les ONG, par exemple par le versement de subventions pour certains programmes. Elle prévoit des abris temporaires et des centres spéciaux pour les victimes, et également la création de permanences téléphoniques, qui permettent à celles-cide dénoncer les trafiquants et d’obtenir aide et conseils. L’assistance est en fait accordée à quiconque la demande. Les statistiques sont éloquentes ; depuis 2004, le nombre d’individus poursuivis et reconnus coupables de traite de personnes a nettement augmenté, tout comme le nombre de victimes qui ont reçu de l’aide, notamment de mineurs se livrant à la prostitution, et le nombre de femmes arrêtées en transit vers d’autres pays qui traversent l’Azerbaïdjan munies de faux passeports.

L’Azerbaïdjan a ratifié en 2004 la Convention de la Haye sur la protection des enfants et la coopération en matière d’adoption internationale, ce qui permet aux autorités de suivre les cas d’enfants azerbaïdjanais adoptés dans d’autres pays pour assurer qu’ils ne font pas l’objet de traite, ou autre abus. Depuis l’entrée en vigueur de la Convention en Azerbaïdjan, l’adoption étrangère est devenue un processus long et difficile qui implique de vérifier que l’enfant n’a aucune famille désireuse de l’adopter en Azerbaïdjan. En 2005 et 2006, il y a eu 213 adoptions à l’étranger, et en 2007 et 2008, il n’y en a eu que sept. De nombreux étrangers ne peuvent plus adopter d’enfants azerbaïdjanais car leur pays n’a pas ratifié la Convention.

Le Gouvernement coopère étroitement avec la société civile. Ses relations avec les ONG reposent sur un modèle de partenariat et il soutient celles qui offrent des services à la population. Les ONG jouent donc un rôle très actif dans la défense des droits de l’homme, la protection de l’environnement et le travail avec les femmes, les enfants et les personnes handicapées. Le Président a créé un conseil attaché à l’aide publique aux ONG, qui étudie les projets et détermine quels en seront les bénéficiaires.

M. Musayev (Azerbaïdjan) estime que son pays attire les migrants en raison de son taux de croissance économique, l’un des plus élevés du monde. La migration a une incidence sur la vie économique et sociale du pays car la majorité des migrants travaillent et, correctement réglementée, elle est très profitable au pays.

Certaines régions d ‘Azerbaïdjan disposent de bureaux régionaux des migrations dans lesquels les migrants illégaux peuvent être détenus. Des installations distinctes sont également en cours de construction pour héberger de leur plein gré cette catégorie de migrants. Parallèlement, le Service national des migrations met en oeuvre un plan d’action concerté pour relever et poursuivre les infractions au droit des migrations, en conjonction avec le Ministère de l’Intérieur et avec le Service national des frontières. Un plan similaire est en cours d’élaboration avec le Ministère du travail et de la protection sociale, et des mesures sont prises en vue d’harmoniser les différentes lois et réglementations nationales relatives aux migrationsavec la législation des États membres de l’Union Européenne et avec les conventions internationales afférentes.

Suite à l’instauration du “guichet unique” ou du “système unique d’information” pour les questions de migration, les ressortissants étrangers pourront soumettre et recevoir tous les documents nécessaires auprès du Service national des migrations à compter du 1er juillet 2009. Le site web officiel du service donnera également accès aux formulaires nécessaires à une demande de migration,et des demandes en ligne seront également possibles. Les détenteurs de permis de séjour temporaires ou permanents peuvent d’ores et déjà entrer et sortir librement du pays munis d’un passeport, de documents d’identité ou des documents officiels délivrés par le Service national des migrations. Les pièces nécessaires à l’obtention d’un permis de résidence comprennent un certificat de santé et un justificatif de domicile.

Les migrants illégaux se voient accorder les mêmes droits au titre de la loi azerbaïdjanaise que les migrants légaux, si ce n’est qu’en vertu de l’article 27 de la Loi sur les étrangers et les personnes apatrides ( statut légal), les migrants illégaux qui ont commis un délit grave doivent quitter le pays dans un délai spécifié par la décision de l’autorité ou du tribunal compétent, être placés en détention ou soumis à un retour forcé.

Un système commun de données a été mis en place au sein du Service national des migrations pour améliorer les statistiques et assurer une plus grande transparence. S’agissant de migrants, les données nécessaires, notamment le nombre d’immigrants illégaux, peuvent à présent être classées avec l’aide de ce système. Les migrants illégaux qui se trouvent déjà en Azerbaïdjan sont également en cours de régularisation. Pour ce qui est du nombre de migrants qui souhaitent travailler en Azerbaïdjan, en 2008 le Service national des migrations a reçu environ 9000 demandes de permis de travail individuels et de prorogations. Les quotas d’immigration pour les personnes qui entrent en Azerbaïdjan ont été abolis par décret présidentiel en 2008.

M. Taghiyev (Azerbaïdjan) signale que les ressortissants étrangers peuvent se voir refuser un permis de travail dans trois cas: s’ils ont présenté de faux documents lors de la demande; si des travailleurs locaux sont disponibles pour occuper l’emploi auquel ils postulent; ou s’ils ont moins de 18 ans. Un permis de travail individuel peut être reconduit jusqu’à quatre fois, pour une durée d’un an à la fois, sur présentation des documents nécessaires, notamment un justificatif délivré par l’employeur de la nécessité de proroger le permis.

Les ressortissants azerbaïdjanais peuvent,en vertu de la Constitution, choisir librement leur lieu de résidence et de travail et chercher un emploi à l’étranger, soit par le biais de personnes intermédiaires, ou par celui d’une agence agréée à cette fin. En aucun cas, la personne engagée ne doit verser une somme quelconque à l’État ou à l’intermédiaire. Cet intermédiaire est payé par l’entreprise qui emploie le ressortissant azerbaïdjanais ; il est en outre tenu de fournir à la personne engagéeune copie du contrat de travail qui doit inclure les détails de la protection ainsi offerte.

Les ressortissants étrangers et les personnes apatrides ne peuvent être employés par les services publics, ni par ceux chargés du pouvoir de police, ou par le système judiciaire. Une demande de permis de travail individuel doit inclure un certain nombre de documents, notamment les antécédents professionnels des cinq dernières années du travailleur migrant, des copies de ses titres,et un justificatif de l’employeur qui précise les raisons pour lesquelles le recours à un étranger est nécessaire pour le poste. Le permis de travail individuelne peut être retiré que si le contrat entre le travailleur migrant et l’employeur s’achève de manière anticipée, si des faux documents ont été présentés pour l’obtenir, ou par décision judiciaire. Lorsque le contrat de travail d’un travailleur migrant s’achève, le permis de travail doit être renvoyé au Ministère du travail et de la protection sociale. Si l’employeur met un terme au contrat, il doit assumer les frais de retour du travailleur migrant et de sa famille vers leur pays d’origine.

Mme Rasulova (Azerbaïdjan) ajoute que le contrat d’un travailleur migrant peut être rompu en cas de faillite ou de décès de l’employeur.

M. Gahramanov (Azerbaïdjan) signale que les ressortissants étrangers et les personnes apatrides ne peuvent résider dans certaines régions, telles les zones frontalières, les zones d’installations militaires ou les zones de guerre; les mêmes restrictions s’appliquent aux citoyens azerbaïdjanais. L’Azerbaïdjan accorde aux migrants illégaux les mêmesdroits fondamentaux et libertés qu’aux migrants légaux et aux ressortissants azerbaïdjanais.

Parmi les efforts visant à régulariser la migration illégale, les dernières technologies sont employées pour effectuer les analyses statistiques et classer les résultats de la recherche inter-institutions relative aux sorties et aux entrées d’Azerbaïdjan. Un travail est également réalisé pour uniformiser les bases de données des divers services chargés des questions migratoires, créer un système de données unique et organiser un recensement de la population. Ces mesures pourront contribuer à prévenir ou à réduire l’immigration non autorisée.

Le Programme national des migrations 2006-2008 a été établi en vue d’identifier les objectifs de la politique d’immigration du pays et de déterminer la manière de la mettre en oeuvre. La plupart des mesures énoncées dans le programme ont déjà été appliquées : elles comprennent l’élaboration d’une politique de migration cohérente; l’instauration d’un Service national des migrations; des dispositions permettant d’éviter le chevauchement des travaux; la coordination avec les responsables dans d’autres pays; l’aide accordée aux étrangers et aux personnes apatrides pour s’intégrer à la société azerbaïdjanaise, et des mesures visant à empêcher la traite des personnes. Le Service national des migrations coordonne le travail de l’ensemble des services publics impliqués dans les questions afférentes et un nouveau programme national de migration est actuellement en cours d’élaboration.

M. Sevim (Rapporteur de pays) souligne qu’il se félicite de la déclaration formulée par la délégation selon laquelle les travailleurs migrants en situation irrégulière jouissent des mêmes droits que ceux en situation régulière, notamment compte tenu du fait que l’information contenue dans le rapport, par exemple au paragraphe 20, en suggère autrement. Un traitement égal des deux catégories de travailleurs migrants est particulièrement important au regard des articles 16, 17 et 18 de la Convention. Il souhaiterait avoir des éclaircissements sur l’éventuelle possibilité pour les travailleurs migrants illégaux d’invoquer directement les dispositions des traités internationaux devant les tribunaux azerbaïdjanais.

Aux dires de la délégation, les ressortissants étrangers peuvent voter aux élections locales après cinq ans de résidence en Azerbaïdjan, mais ce droit n’est pas stipulé dans la législation nationale; il souhaiterait avoir l’explication d’un tel hiatus. Il serait en outre heureux de savoir si les travailleurs migrants employés par des entreprises appartenant à des étrangers ont les mêmes droits en matière de sécurité sociale que les autres travailleurs migrants.

M. Alba dit qu’il aimeraitobtenir davantage d’informations sur la manière dont le Service national des migrations coordonne les différentes institutions nationales chargées des questions de migration, et dans quelle mesure il définit une politique générale des migrations. Il demande si l’État partie a conclu des accords bilatéraux avec les pays voisins ou au niveau régional dans la zone de migration. Notant qu’un nouveau programme national de migrations est en cours d’élaboration, il demande si le programme 2006-2008 est encore valide. Il précise que si l’État partie décide de reconnaître au Comité la compétence pour recevoir et étudier les communications, en application des articles 76 et 77 de la Convention, une déclaration spécifique à cet effet sera nécessaire.

M. Kariyawasam estime que du fait de la crise économique mondiale, de nombreux travailleurs migrants rentrent dans leur pays d’origine ou subissent une dégradation de leurs conditions d’emploi. Il souhaite savoir si l’État partie a pris des dispositions pour assurer des conditions de travail décentes aux ressortissants azerbaïdjanais à l’étranger, et quelles mesures met-il en oeuvre pour assurer une intégration sociale réussie des travailleurs migrants azerbaïdjanais qui rentrent au pays. L’État partie envisage-t-il d’éventuelles répercussions sociales en cas de retour à grande échelle ?

M. El-Borai signale qu’il souhaiterait en savoir plus sur l’éventuel droit de vote des ressortissants étrangers aux élections municipales. Il se dit préoccupé par le fait que les migrants aient à payer pour obtenir un permis de travail, et que ces permis puissent être révoqués si l’employeur résilie le contrat de travail; à ce sujet, il attire l’attention sur l’article 49 de la Convention. Notant qu’un permis de travail d’un an peut être renouvelé quatre fois, il demande ce qui se passe au terme de la période de quatre ans.

Mme Cubias Medina demande dans quelle mesure les travailleurs migrants en situation irrégulière, qui selon certaines sources, représentent 90 pour cent de l’ensemble des travailleurs migrants en Azerbaïdjan, peuvent exercer leurs droits d’accès aux services de santé et à l’éducation.

Mme Poussi demande si la législation relative à l’enregistrement des migrants contient une définition du terme “travailleur migrant”, et dans l’affirmative, cette dernière est-elle conforme à celle contenue dans la Convention; dans le cas contraire, l’État partie envisage-t-il d’harmoniser sa législation avec la Convention ?

M. Sevim demande quelles sont les mesures adoptées par l’État partie pour lutter contre la migration irrégulière et s’il existe des accords de réadmission avec d’autres pays.

Le President souligne qu’il souhaiterait entendre le point de vue de la délégation sur les réalisations du Service national des migrations en matière de politique migratoire. Il apprécierait d’avoir des explications quant à l’écart entre les mesures d’envergure adoptées pour lutter contre la traite des personnes et le faible nombre de victimes enregistrées. Il serait par ailleurs heureux d’en apprendre davantage sur les centres de guichet unique sur la migration, notamment leur situation géographique, et il demande si des centres similaires existent pour les migrants d’origine azerbaïdjanaise qui rentrent en Azerbaïdjan.

M. Vahab Mammadov assure qu’en vertu de l’article 13 du Code du travail, les ressortissants étrangers et les personnes apatrides jouissent des mêmes droits du travail que les ressortissants azerbaïdjanais et des mêmes droits sociaux. Bien que les conditions d’emploi et de rémunération soient les mêmes pour les citoyens azerbaïdjanais et pour les ressortissants étrangers, les questions de pensions sont régies par des accords bilatéraux. Le Gouvernement adopte toutes les mesures possibles pour assurer la régularisation des travailleurs migrants sans papiers, notamment par l’intermédiaire d’ activités d’information destinées aux travailleurs migrants eux-mêmes, à leurs employeurs etaux services consulaires des ressortissants étrangers concernés. L’Azerbaïdjan, qui coopère activement avec les pays de destination potentiels de ses propres ressortissants, tels la Chine et les Philippines, a réglé toutes les questions relatives à la régularisation des travailleurs migrants de ces pays qui résident en Azerbaïdjan.

De son point de vue, les incidences de la crise économique mondiale sur les travailleurs migrants de retour en Azerbaïdjan seraient négligeables, compte tenu de la stabilité de la croissance économique et du taux de chômage relativement faible de l’Azerbaïdjan par rapport à d’autres pays. En tout état de cause, il n’y a pas eu d’augmentation notable du nombre de travailleurs migrants de retour en Azerbaïdjan. Ceux qui rentrent n’ont néanmoins pas à faire face à des problèmes sociaux particuliers. Les victimes de traite de personnes sont peu nombreuses en raison de la qualité élevée du dispositif de protection du pays; il s’agit en l’occurrence de ressortissants étrangers, et toutes les mesures possibles sont prises pour les protéger.

M. Natiq Mammadov indique des chiffres qui illustrent la croissance économique stable et le taux de chômage relativement faible de l’Azerbaïdjan. Il signale que le Programme national relatif aux migrations 2006-2008 est encore en cours de validité et que les fondements réglementaires de la politique migratoire ont été améliorés. L’évaluation des résultats obtenus par le Service national des migrations n’incombe pas à la délégation, mais plutôt au Chef de l’État ou au Comité lui-même. A son avis cependant, elle a accompli un travail essentiel.

MmeRasulova (Azerbaïdjan) signale qu’il s’est révélé extrêmement difficile de repérer et de condamner les individus impliqués dans la traite de personnes. Toutefois, au cours des dernières années, plusieurs groupes criminels ont été identifiés et éliminés.

Selon l’Article 151 de la Constitution, la loi internationale prévaut sur la loi nationale, à l’exception de la Constitution elle-même et des lois adoptées par référendum. Les tribunaux sont donc tenus d’appliquer les normes internationales. En outre, bien que la loi nationale ne comporte aucune disposition exigeant des autorités qu’elles délivrent des permis de résidence aux membres des familles de migrants dotés de permis de travail, dans de tels cas le Service national des migrations reconnaît et applique le droit à la réunification des familles.

Jusqu’à ce jour, la République d’Azerbaïdjan n’a conclu aucun accord sur la réadmission des migrants, mais elle en envisage la possibilité et élabore une stratégie appropriée. Il s’agit d’une question complexe, car elle peut entraîner la réadmission de ressortissants étrangers qui ont utilisél’Azerbaïdjan comme pays de transit vers l’ouest. La Fédération de Russie et l’Ukraine, qui ont signé des accords de réadmission avec l’Union Européenne, se sont vus accorder deux ou trois ans pour mettre en œuvre les dispositions adoptées.

Les familles des immigrants illégaux ont accès aux soins de santé, notamment aux services spécialisés ou à l’aide médicale d’urgence, au même titre que les ressortissants d’Azerbaïdjan. Les enfants peuvent aller à l’école et bénéficier d’un enseignement secondaire gratuit. Les parents aisés peuvent envoyer leurs enfants dans des écoles privées payantes.

M. Asadov (Azerbaïdjan) signale que son pays reconnaît déjà la compétence d’un certain nombre d’organes conventionnels pour examiner les plaintes de particuliers. Il étudie actuellement la possibilité de reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et analyser les communications émanant de, ou formulées au nom de particuliers soumis à sa juridiction au titre de l’article 77 de la Convention.

M. Taghiyev (Azerbaïdjan) dit que, conformément à une décision adoptée en Conseil des Ministres le 6 octobre 2000, en Azerbaïdjan, les personnes morales qui servent d’intermédiaires pour le recrutement de personnes à l’étranger ne sont pas habilitées à imposer à celles-ci une taxe pour de tels services.

Lorsque le permis d’un travailleur migrant a été prorogé à quatre reprises pour une période d’un an, il ou elle doit quitter le territoire de l’Azerbaïdjan. Après un délai de 12 mois, la personne concernée pourra à nouveau chercher un emploi dans le pays. Si un employeur décide de mettre fin à un contrat de travail, le permis du travailleur migrant est résilié. Toutefois, cela n’implique pas qu’il ou elle doive quitter immédiatement le pays.

MmeRasulova (Azerbaïdjan) souligne que les citoyens azerbaïdjanais qui vivent à l’étranger ne perdent pas leurs droits politiques. Ils peuvent s’inscrire auprès de leur mission consulaire locale et les représentants diplomatiques de l’Azerbaïdjan sont tenus, au titre de l’article 2 du Code électoral, de les aider dans l’exercice de leurs droits constitutionnels lors d’une élection ou d’un référendum. En outre, tout citoyen temporairement absent du pays lors d’une élection pourra présenter une carte d’électeur au consulat local et faire enregistrer son vote.

M. Musayev (Azerbaïdjan) signale que le Service national des migrations organise une fois par mois des séances de coordination avec les organes responsables des questions de migration dans les autres États. Les questions relatives tant aux migrants légaux qu’illégaux sont étudiées et les décisions appropriées sont prises. En outre, le Service coopère étroitement avec les organisations internationales telles le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH), l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), le Conseil de l’Europe, l’Union Européenne et le Centre européen des politiques migratoires. Des projets communs sont en cours d’élaboration sous les auspices de l’OIM. Des accords bilatéraux de coopération ont été adoptés avec un certain nombre d’États, notamment l’Allemagne, les Pays-Bas, la Fédération de Russie et d’autres pays de la Communauté des États indépendants.

Le principe du “guichet unique” ou “système unique d’information” sera appliqué dans tout le pays et prendra effet le 1er juillet 2009.

MmePoussi réitère sa question concernant la conformité de la définition du travailleur migrant dans la législation azerbaïdjanaise avec celle contenue dans la Convention. Bien que les normes internationales prévalent sur les dispositions nationales, les tribunaux et les requérants ont probablement tendance à invoquer spontanément la législation nationale.

Le President note qu’un séjour d’une durée minimum de cinq ans est exigé pour obtenir le droit de vote aux élections municipales, mais que les permis de travail d’un an ne peuvent être renouvelés que quatre fois; il demande combien d’étrangers ont ainsi réellement voté lors des récentes élections.

M. Natiq Mammadov(Azerbaïdjan) annonce que le Code des migrations actuellement en cours de rédaction reflètera scrupuleusement toutes les dispositions de la Convention.

M. Vahab Mammadov (Azerbaïdjan) signale que les données relatives au nombre d’étrangers qui votent en Azerbaïdjan seront communiquées par écrit au Comité. Selon la Commission électorale centrale de l’Azerbaïdjan, 10 130 ressortissants azerbaïdjanais vivant à l’étranger ont voté au référendum tenu le 18 mars 2009.

M. Sevim (Rapporteur de pays) souligne que les deux jours d’échanges de vues avec la délégation se sont révélés instructifs et fructueux. Beaucoup a été fait en Azerbaïdjan depuis la soumission du rapport en 2007. Grâce à son développement économique soutenu et à sa stabilité politique, l’Azerbaïdjan est à présent à la fois un pays d’accueil, d’origine et de transit. Toutefois, l’occupation de la région de Nagorny Karabakh et l’afflux de plus d’un million de réfugiés ne lui ont pas permis de remplir toutes ses obligations au titre de la Convention.

L’application du principe du guichet unique est une étape importante, tout comme l’est le nouveau système de collecte des données sur les migrants qui fournira des informations utiles aux autorités. Il approuve en outre la création du Service national des migrations et les récentes améliorations des normes juridiques, bien que la jouissance par les migrants illégaux de la totalité des droits et protections énoncés dans la partie III de la Convention ne soit toujours pas évidente. La légalisation des migrants illégaux par des négociations engagées avec d’autres pays tels les Philippines, constitue une étape très importante. Le Comité se félicite en outre d’entendre que l’Azerbaïdjan prévoit de ratifier davantage d’accords internationaux, notamment les conventions de l’OIT relatives aux travailleurs migrants.

Le Comité espère recevoir davantage d’informations sous forme écrite de la part de l’Azerbaïdjan, avant d’achever ses observations de conclusion.

Le President signale que le Comité a reçu de la délégation quantité d’informations nouvelles qu’il pourra utiliser pour évaluer la situation sur le terrain. Il est toutefois dommage que les réponses à la liste des questions aient été reçues trop tard pour être traduites dans toutes les langues de travail du Comité.

La création du Service national des migrations a jeté les bases d’une saine coordination et d’une bonne gestion des affaires publiques. Il espère que l’Azerbaïdjan décidera de reconnaître la compétence du Comité au titre des articles 76 et 77 de la Convention, de manière à ce que les autres États parties ou des particuliers puissent lui soumettre des communications. Il espère en outre que le pays continuera à rester épargné par la crise économique mondiale.

Le Comité n’a pas encore décidé si le deuxième rapport périodique de l’Azerbaïdjan serait soumis quatre ans après la date d’examen de son rapport initial par le Comité, ou quatre ans après la date de soumission. Quoi qu’il en soit, il encourage les responsables à le tenir informé des mesures adoptées suite à ses recommandations. Le Président invite en outre l’Azerbaïdjan à participer aux rencontres organisées par le Comité, telle la réunion-débat sur le droit d’association des migrants qui doit se tenir le 1er mai 2009, de manière à rester informé de ce qui se passe dans d’autres pays et régions. Par ailleurs, il presse instamment l’État partie à promouvoir la Convention chez ses voisins et dans les pays d’accueil des migrants, et à encourager les organisations de la société civile à s’engager dans des activités de soutien.

M. Natiq Mammadov (Azerbaïdjan) souligne qu’il est persuadé que les recommandations du Comité à son pays contribueront à améliorer sa politique migratoire et sa mise en oeuvre de la Convention. Les autorités responsables resteront en contact avec le Comité pour lui faire part des progrès accomplis.

La séance est levée à 12 h. 40 .