Nations Unies

CMW/C/SR.216

Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Distr. générale

19 avril 2013

Original: français

NATIONS UNIES Comité pour la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille

Dix-huitième session

Compte rendu analytique de la 216 e séance

Tenue au Palais Wilson, à Genève, le mardi 16 avril 2013, à 15 heures

Président:M. Taghizade (Vice-Président)

Sommaire

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 73de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique de la Bolivie

La séance est ouverte à 15 h 5.

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 73de la Convention (suite)

Deuxième rapport périodique de la Bolivie (CMW/C/BOL/2)

1. Sur l’invitation du Président, la délégation bolivienne prend p lace à la table du  Comité.

2.M. Cox Mayorga (Bolivie) explique qu’aux fins de l’élaboration du deuxième rapport périodique, des ateliers d’information ont été organisés dans plusieurs villes du pays, auxquels ont participé des représentants de l’État et de la société civile.

3.La nouvelle Constitution, adoptée le 7 février 2009, reconnaît un ensemble de droits nouveaux et de normes progressives en faveur des citoyens et de l’environnement. Le nouvel État, qui est plurinational, se caractérise par une structure politique non exclusive. Conformément à l’article 256 de la Constitution, les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme qui ont été ratifiés et qui consacrent des droits plus favorables aux personnes que les dispositions de la législation interne priment sur celles-ci. C’est le cas de la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille. Conformément à l’article 14 de la Constitution, toute forme de discrimination est interdite. L’adoption de la nouvelle Constitution a eu pour conséquence l’abrogation d’un certain nombre de dispositions non conformes aux principes énoncés dans le texte fondamental. Depuis 2010, l’Assemblée législative plurinationale a adopté plus de 340 lois, parmi lesquelles la loi no 045 sur la lutte contre le racisme et toute forme de discrimination, la loi no 251 sur la protection des réfugiés, la loi no 263 sur la lutte contre la traite et le trafic d’êtres humains et la loi no 348 sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes. Actuellement, l’Assemblée collabore avec la société civile à l’élaboration de plusieurs projets de loi, dont un sur la migration, qui devrait servir de cadre pour la protection des migrants conformément à la Constitution et aux traités ratifiés par l’État. La migration est également prise en compte dans des plans nationaux tels que le Plan national d’action en faveur des droits fondamentaux, «Bolivia Digna Para Vivir Bien (2009-2013)», qui prévoit la protection des droits des groupes vulnérables, notamment les travailleurs migrants en général, ainsi que les migrants et les réfugiés présents en Bolivie.

4.Sur le plan administratif, des efforts ont été accomplis pour renforcer les capacités et moderniser les institutions compétentes. Parmi les mesures qui ont été prises ces dernières années, on peut citer le programme permanent d’inspections auprès des directions de districts, la formation de hauts fonctionnaires, la mise en œuvre d’un système intégré pour l’émission des passeports, la diffusion de nouvelles cartes d’identité pour les étrangers, la formation de fonctionnaires, la création du site Web officiel de la migration, www.migracion.gob.bo, la mise en place d’un nouveau service personnalisé d’assistance et la priorité accordée au contrôle des entrées et sorties des mineurs afin de lutter contre la traite et le trafic dont sont victimes les enfants et les adolescents.

5.S’agissant des statistiques sur la migration, bien que des progrès aient été enregistrés en ce qui concerne le recensement des étrangers, le suivi des entrées et des sorties, et la comptabilisation des délits, des plaintes et des affaires, il est néanmoins nécessaire de mieux ventiler les données. Le dernier recensement de la population date du 21 novembre 2012 et ses résultats pourront être consultés courant 2013. Par ailleurs, plus d’une cinquantaine de nouveaux consulats ont été ouverts dans le monde pour les besoins des Boliviens expatriés. En outre, des accords bilatéraux ont été signés avec le Brésil, l’Argentine et l’Espagne afin de régulariser la situation des Boliviens vivant dans ces pays. En 2009, les Boliviens de l’étranger, principalement installés en Espagne, en Argentine et au Brésil, ont pu participer pour la première fois aux élections nationales boliviennes.

6.Condamnant toute politique d’exclusion, la Bolivie a, par l’intermédiaire de son président, publié en 2008 une lettre ouverte contre la Directive de l’Union européenne de 2008 sur le retour des étrangers en situation irrégulière, considérée comme une violation des droits de l’homme en général. Dans le contexte actuel de crise du système capitaliste, qui affecte principalement les économies européennes, la Bolivie fait tout son possible pour faciliter le retour volontaire et la réinsertion des Boliviens travaillant en Europe.

7.M.  Nuñez-Melgar Maguiña fait remarquer que la Bolivie n’a pas encore présenté les déclarations prévues aux articles 76 et 77 de la Convention, qui reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications soumises par des États parties ou des particuliers, et demande si elle envisage de le faire. Il observe également que la Bolivie n’a pas adapté sa législation interne aux dispositions des Conventions nos 97 et 143 de l’Organisation internationale du Travail (OIT) et souhaite savoir si elle compte le faire. S’agissant de la discrimination, les efforts nécessaires n’ont pas été pleinement accomplis, notamment vis-à-vis des Péruviens qui sont victimes d’abus commis par des représentants de l’État, en particulier des policiers. Un accord a-t-il été passé avec le Pérou dans ce domaine? Sur le plan administratif, quels sont les délais de délivrance par les consulats des documents de voyage nécessaires aux migrants boliviens et aux membres de leur famille qui partent à l’étranger ou qui rentrent au pays? Lorsque des migrants subissent des préjudices, quelle action en réparation peuvent-ils engager et quels efforts sont faits pour les en informer?

8.M. Kariyawasam, notant qu’un grand nombre de Boliviennes travaillent dans des pays voisins, voire en Espagne, demande si des dispositions ont été prises pour assurer leur protection. Si ce n’est pas le cas, la Bolivie prévoit-elle d’en prendre?

9.M.  Sevim, constatant que le rapport ne contient pas d’informations sur la sécurité sociale et la retraite en Bolivie pour les travailleurs migrants réguliers et irréguliers, aimerait savoir quelles dispositions sont prises dans ces deux domaines. Il s’enquiert également de l’action de la Bolivie en matière de regroupement familial.

10.M me Dicko souhaite savoir quel mécanisme a été mis en place, le cas échéant, pour coordonner les actions menées par les différentes administrations dans le domaine de la migration. S’agissant des Boliviens de l’étranger, le rapport ne donne pas d’informations sur la question du retour. Existe-t-il un dispositif d’accompagnement ou d’incitation au retour sous la forme d’octroi de prêts destinés à faciliter la création d’entreprises, par exemple? La délégation bolivienne peut-elle en outre donner davantage d’informations sur les étrangers qui travaillent en Bolivie?

11.M.  Carrión Mena demande quand la loi sur les migrations sera promulguée et mise en œuvre. Il souhaite savoir de quelle manière l’État partie prévoit de recueillir des données sur les immigrés et les émigrés, de telles statistiques étant indispensables à la mise en œuvre de politiques publiques axées sur la protection des droits fondamentaux des migrants. Faisant observer que le fait d’être en situation irrégulière ne constitue pas une infraction, il demande pour quels motifs les autorités boliviennes placent des travailleurs migrants en rétention administrative. Il regrette que le rapport ne contienne pas beaucoup de renseignements sur la façon dont les travailleurs migrants en Bolivie sont informés de leurs droits et obligations. Par ailleurs, il souhaiterait savoir si l’État partie a conclu des accords bilatéraux avec les pays qui accueillent de nombreux travailleurs migrants boliviens et sollicite des précisions sur les services offerts aux ressortissants boliviens par les consulats boliviens.

12.M me Poussi demande quelles sont les mesures concrètes prises par l’État pour assurer la réalisation des droits des travailleurs migrants, qu’il s’agisse des migrants étrangers travaillant en Bolivie ou des Boliviens travaillant à l’étranger. Elle souhaite savoir si des organes ou des mécanismes ont été mis en place à cet effet et, dans l’affirmative, comment ils fonctionnent et s’ils sont dotés de ressources suffisantes. Constatant que la Constitution bolivienne consacre le principe de non-discrimination, elle s’enquiert des mesures qui ont été prises pour faciliter l’accès à l’emploi des travailleurs étrangers. MmePoussi souhaiterait également savoir si des personnes ont déjà formé un recours en privation de liberté et, dans l’affirmative, quel en a été le résultat. Notant qu’en 2010, le Ministère de la justice a établi un diagnostic sur la situation de la torture en Bolivie, elle demande quelles ont été les conclusions de cet examen et si certaines d’entre elles concernent en particulier les travailleurs migrants. Elle demande à la délégation de fournir des précisions sur le droit d’adhérer librement à un syndicat, en indiquant notamment si des travailleurs migrants sont membres de syndicats en Bolivie et si les émigrés boliviens peuvent exercer ce droit.

13.M.  Ibarra Gonzalez, faisant observer que lorsqu’un travailleur migrant bolivien décède à l’étranger, le rapatriement de son corps est souvent pris en charge par sa famille, demande si l’État partie a prévu un budget à cet égard. Il souhaite également savoir si les consulats boliviens fournissent des conseils et une assistance aux travailleurs migrants boliviens dont les droits ont été bafoués.

14.Le Président note que le rapport contient très peu d’exemples concernant la mise en œuvre des dispositions de la Convention. Constatant que près de 60 % des Boliviens qui émigrent se rendent en Argentine, il dit que des accords spécifiques portant sur la protection sociale des migrants devraient être conclus entre les deux pays. Des structures et des mécanismes visant à protéger les droits des travailleurs migrants en Argentine devraient également être mis en place.

La séance est suspendue à 16 heures; elle est reprise à 16 h 50.

15.M me Navarro Llanos (Bolivie) dit que le Gouvernement étudie la possibilité de faire la déclaration prévue aux articles 76 et 77 visant à reconnaître la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications de particuliers et d’États parties et envisage d’adhérer aux Conventions no 97 et no 143 de l’OIT. La Bolivie a apporté de nombreuses modifications à sa législation pour la mettre en conformité avec la nouvelle Constitution adoptée en 2009.

16.M me Llanos Sangüesa (Bolivie) dit que le projet de loi sur les migrations, qui réglemente l’entrée, le transit et le séjour des migrants en Bolivie et prévoit des politiques migratoires garantissant les droits des migrants, a été adopté en 2012 par la Chambre des députés et que la loi sera prochainement promulguée.

17.M me Navarro Llanos (Bolivie) dit que les migrants étrangers ont le droit, au même titre que les Boliviens, d’adhérer à un syndicat. S’agissant des prestations sociales fournies par l’État, les migrants qui résident en Bolivie depuis plus d’un an peuvent bénéficier gratuitement de l’assurance universelle maternelle et infantile (SUMI) destinée aux enfants de moins de 5 ans, aux femmes enceintes et aux femmes en âge de procréer, ainsi que de l’assurance universelle pour les personnes âgées (SSPAM). Le Code de la sécurité sociale prévoit que toute personne, étrangère ou bolivienne, qui travaille sur le territoire de la République doit avoir une couverture sociale obligatoire. Les personnes qui n’ont pas d’emploi relèvent du régime général de la sécurité sociale à court ou à long terme. De plus, pour lutter contre l’abandon scolaire, le Gouvernement accorde, pour chaque enfant scolarisé, une allocation jusqu’à la huitième année d’enseignement primaire, sans distinction de nationalité, sous réserve que l’enfant achève l’année scolaire.

La séance est levée à 17 heures.