Nations Unies

CAT/C/KEN/3

Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants

Distr. générale

26 décembre 2018

Français

Original : anglais

Anglais, espagnol et français seulement

Comité contre la torture

Troisième rapport périodique soumis par le Kenya en application de l’article 19 de la Convention, selon la procédure facultative d’établissement des rapports, attendu en 2017 * , ** , ***

[Date de réception : 3 août 2018]

Table des matières

Page

Sigles et abréviations3

Introduction4

Articles 1er et 44

Article 25

Article 314

Articles 5 à 815

Article 1016

Article 1117

Articles 12 et 1319

Article 1423

Article 1523

Article 1624

Autres questions25

Renseignements d’ordre général26

Sigles et abréviations

ACCIKAssociation des œuvres de bienfaisance pour enfants au Kenya

ATPUUnité de police antiterroriste

CNSEConseil national des services à l’enfance

DRADépartement des réfugiés

EACCCommission pour la déontologie et la lutte contre la corruption

IPOAAutorité indépendante de contrôle de la police

KDHSEnquête sur la démographie et la santé au Kenya

KNCHRCommission nationale des droits de l’homme au Kenya

KPSAdministration pénitentiaire kényane

MGFMutilations génitales féminines

NGECCommission nationale pour l’égalité des sexes

Introduction

1.La République du Kenya se félicite de cette opportunité de présenter son troisième rapport périodique sur l’application de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (ci-après, « la Convention ») au Comité contre la torture (ci-après, « le Comité »).

2.Le présent rapport contient les réponses du Gouvernement à la liste de points (CAT/C/KEN/QPR/3) établie par le Comité avant la soumission du rapport périodique du Kenya. Le rapport examine en outre les diverses difficultés rencontrées par le Kenya dans ses efforts pour assurer la pleine mise en œuvre de ses obligations.

3.Pour élaborer ce rapport, un vaste processus de concertation a été mené avec les ministères, départements et organismes publics, la Commission nationale des droits de l’homme, la Commission nationale pour l’égalité des sexes, les organisations de la société civile et d’autres parties prenantes.

Articles 1er à 4

Réponse aux questions posées aux paragraphes 1 à 4 de la liste de points (CAT/C/KEN/QPR/3)

4.Le droit de ne pas être soumis à la torture ni à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est un droit absolu et intangible protégé par la Constitution du Kenya. La loi de 2017 sur la prévention de la torture donne effet aux obligations de l’État énoncées dans la Convention ainsi que dans les dispositions constitutionnelles relatives au droit à la protection contre la torture et peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. La législation donne une définition exhaustive de la torture et des autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, qui est conforme à celle figurant dans la Convention.

5.La loi relative à la prévention de la torture sanctionne ce crime plus lourdement que la loi de 2001 sur l’enfance et la loi sur la Police nationale. La sanction encourue pour cette infraction est une peine d’emprisonnement d’une durée maximale de vingt-cinq ans, sans possibilité de commutation en amende. Les actes de torture ayant entraîné la mort d’une personne sont passibles d’une peine d’emprisonnement à vie. Pour les infractions que sont les peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, l’article 7 de ladite loi prévoit une peine d’une durée maximale de quinze ans ou une amende de 1 million de shillings kényans, ou les deux.

6.La loi relative à la prévention de la torture abroge d’autres lois pour assurer la cohérence des sanctions en matière de torture et de traitements cruels, inhumains et dégradants. Les préoccupations exprimées par le Comité au paragraphe 8 de ses observations finales, concernant les courtes peines d’emprisonnement imposées aux auteurs d’actes de torture ou de mauvais traitements infligés à des enfants, sont traitées à l’article 31 de la loi relative à la prévention de la torture, qui dispose qu’en cas de conflit entre ladite loi et toute autre loi sanctionnant ces actes, les dispositions de la loi relative à la prévention de la torture prévales. Enfin, la loi impose à la Commission nationale des droits de l’homme (KNCHR) l’obligation d’enquêter sur les allégations de violations des dispositions de cette loi dès réception d’une plainte ou de sa propre initiative, et confère à la KNCHR le pouvoir de s’assurer que l’État respecte les obligations que lui imposent les instruments internationaux relatifs à la torture et aux peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

7.La loi sur l’enfance est en cours de révision pour assurer sa conformité avec les nouvelles dispositions de la Constitution. Plusieurs modifications ont été proposées. Toutefois, en raison du grand nombre de modifications requises, le Gouvernement a décidé de revoir l’intégralité de la loi et de mettre en place un cadre exhaustif qui donne effet aux droits des enfants au Kenya et qui soit conforme à la Constitution et aux autres traités internationaux et régionaux pertinents. Il convient de noter que le projet de loi propose de sanctionner plus lourdement les actes de torture infligés aux enfants, conformément à la loi relative à la prévention de la torture.

8.En ce qui concerne le paragraphe 3 de la liste de points, il est également à noter que la loi relative à la prévention de la torture est une loi relativement récente. En conséquence, la police, les procureurs et les magistrats considèrent encore aujourd’hui qu’il est plus facile d’engager et de mener des poursuites en se fondant sur le Code pénal et le Code de procédure pénale, pour ce qui concerne les infractions telles que les meurtres et les coups et blessures commises par des policiers, plutôt que sur la loi relative à la Police nationale et la loi relative à la prévention de la torture. En outre, ils estiment que le Code pénal prévoit des peines plus lourdes pour les meurtres et les coups et blessures graves. Toutefois, des séminaires et des stages de formation sont dispensés aux policiers, procureurs et enquêteurs concernant l’engagement de poursuites fondées sur la loi sur la Police nationale et la loi relative à la prévention de la torture. Ils sont aussi formés au Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

9.En ce qui concerne le paragraphe 4, tous les agents des forces de l’ordre soupçonnés d’exécutions extrajudiciaires, de disparitions forcées ou d’usage excessif de la force font rapidement l’objet d’une enquête et, s’ils sont reconnus coupables, sont inculpés et poursuivis pour l’infraction commise. Les tribunaux continuent en outre à faire preuve de fermeté dans la protection des droits fondamentaux de toutes les personnes résidant au Kenya. Dans la procédure civile Titus Barasa Makhanu c .  Agent de police Simon Kinuthia Gitau & 3 autres (2016) eKLR, la Cour a accordé au requérant des dommages-intérêts généraux correspondant à environ 2 500 dollars des États-Unis pour les souffrances infligées par le premier accusé qui l’avait frappé avec une matraque. Dans Kenneth Stanley Njindo Matiba c .  Procureur général, requête n o  94 de 2014 eKLR, la Cour a jugé que le droit du requérant de ne pas être soumis à la torture et à des traitements cruels et inhumains, inscrit à l’article 74 (par. 1) de la Constitution modifiée, avait été violé par des fonctionnaires de l’État. Le requérant a été indemnisé pour ces violations.

10.De plus, en l’affaire République c .  Elly Waga Omondi, affaire pénale n o  24 de 2012 eKLR, la Cour a rendu une décision dans un procès selon laquelle des aveux de l’accusé concernant le procès étaient irrecevables du fait qu’ils avaient été obtenus après que l’accusé avait été menacé et torturé par les enquêteurs.

11.Au cours de la période considérée, les procédures pénales CR. 207/2016 et HC 67/2016 ont été ouvertes, concernant quatre policiers inculpés de meurtre. Ces policiers ont été accusés d’avoir torturé et tué l’avocat Willie Kimani, défenseur des droits de l’homme, son client, M. Josephat Mwenda, et leur chauffeur de taxi, M. Joseph Muriuki, après les avoir détenus illégalement dans un commissariat le 23 juin 2016.

12.Dans l’affaire République c .  Inspecteur de police Veronicah Gitahi & autre [2016] eKLR,les deux accusés, qui étaient des policiers, ont été inculpés d’homicide sanctionné par l’article 202 du Code pénal. Ils étaient accusés d’avoir tué une écolière de 14 ans dans le comté de Kwale. Cette infraction pénale avait été commise dans l’exercice de leurs fonctions. La Cour les a reconnus coupables de l’infraction et les a condamnés à une peine d’emprisonnement de 7 ans.

13.Face aux plaintes qui dénonçaient l’usage excessif de la force et des brutalités imputés à des gardes municipaux, l’assemblée du comté de Nairobi, en juin 2017, a présenté le projet de loi sur les services d’inspection du comté de la ville de Nairobi, qui vise à ériger en infraction pénale l’usage excessif de la force par les gardes municipaux (City askaris ). Le projet de loi dispose que tout askari qui inflige un traitement cruel ou inhumain à une personne commet une infraction pénale sanctionnée par la réclusion criminelle à perpétuité. Il sera interdit aux agents de l’inspection de soumettre quiconque à la torture ou à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Article 2

Réponse aux questions posées au paragraphe 5 a) à d) de la liste de points

14.Les impératifs constitutionnels offrent des garanties aux personnes qui se trouvent en garde à vue ou en prison. La loi relative aux personnes privées de liberté, adoptée en 2014, garantit les libertés et droits fondamentaux des personnes placées en garde à vue ou incarcérées. Toutes les personnes placées en garde à vue ou incarcérées ont la possibilité de communiquer avec toute personne de leur choix, y compris avec un avocat et un membre de leur famille. Une personne privée de liberté a droit en outre aux soins médicaux et aux soins de santé. Tous les détenus peuvent déposer plainte auprès du responsable du lieu de détention, ou du Secrétaire du Gouvernement, s’ils considèrent que leurs droits ont été violés. Il est également possible de former un recours auprès de la Commission de la justice administrative (Bureau du Médiateur) rattachée à la Commission nationale des droits de l’homme.

15.Les forces de l’ordre et les gardiens de prison sont tenus de participer à divers forums de sensibilisation sur le traitement des personnes arrêtées, placées en garde à vue ou incarcérées.

16.Les personnes privées de liberté bénéficient également d’une aide juridictionnelle à un coût abordable, fournie par le Service national d’aide juridictionnelle mis en place par la loi de 2016 sur l’aide juridictionnelle. De plus amples renseignements sur l’aide juridictionnelle, en tant que composante de l’accès à la justice, sont donnés au paragraphe 15 du présent rapport.

17.Le Gouvernement kényan, par l’intermédiaire de l’administration pénitentiaire kényane, en collaboration avec le Centre national de lutte contre le terrorisme et l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime, a mis en place plusieurs programmes destinés à aider les délinquants à haut risque détenus pendant plus d’un an. Ces personnes doivent suivre des programmes de déradicalisation. Le nombre de personnes détenues entre 2013 et 2016, en application de la loi de 2012 sur la prévention du terrorisme telle que modifiée par les lois de 2014 relatives à la sécurité, s’élève à 146, comme le montre le tableau 1 ci-après.

Tableau 1 Nombre de détenus inculpés pour terrorisme

N o

Durée de la détention

Nombre de détenus inculpés pour terrorisme

1

Moins d’un an

1

2

Plus d’un an mais moins de trois ans

139

3

Plus de trois  ans

6

Total

146

Source  : A dministration pénitentiaire, 2016 .

18.L’opération « Usalama Watch », menée en mars 2014, visait à lutter contre le terrorisme à la suite des attentats perpétrés à Nairobi et ailleurs au Kenya. L’un des objectifs de cette opération était l’expulsion des immigrants en situation irrégulière dans le pays. Le Gouvernement kényan, par l’intermédiaire de l’ancien Département des réfugiés créé par la loi de 2006 relative aux réfugiés pour assurer la protection de ces personnes dans le pays, a mobilisé tous ses fonctionnaires pour garantir la protection des droits des réfugiés. Le Département a pris part au filtrage des personnes retenues dans le stade de Kasarani afin de s’assurer que les réfugiés de bonne foi ne soient pas expulsés mais transférés vers des zones prévues à cet effet. Cette procédure a été menée en vérifiant les documents de tous les demandeurs d’asile et de toutes les personnes concernées.

Réponse aux questions posées au paragraphe 6 de la liste de points

19.L’aide juridictionnelle est une composante clef de l’amélioration de l’accès à la justice. Avec l’adoption de la loi de 2016 sur l’aide juridictionnelle, le Kenya a réalisé de grands progrès pour permettre aux personnes pauvres et vulnérables de se tourner vers les institutions de justice informelles et officielles en vue de demander et d’obtenir réparation de leurs préjudices. Cette loi porte création d’un Service national d’aide juridictionnelle, géré par le Conseil national de l’aide juridictionnelle. Le Conseil fournit une représentation juridique officielle mais offre également des conseils et renseignements juridiques ainsi que des informations liées au droit. Il impulse des réformes juridiques et mène des activités de sensibilisation au nom de la communauté, et apporte un soutien psychosocial.

20.Cette loi porte également création d’un Fonds d’aide juridictionnelle pour financer des programmes dans ce domaine. Le Gouvernement a alloué environ un million de dollars É.-U. au Fonds d’aide juridictionnelle pour l’exercice 2017/18.

21.Afin de renforcer l’accès à la justice, l’appareil judiciaire s’attelle à la résorption des affaires en souffrance. Des salles d’audience supplémentaires sont aménagées pour permettre à plus de citoyens d’accéder facilement à la justice, même dans les zones reculées du pays. Le système judiciaire s’efforce en outre d’améliorer sa gestion des dossiers pour permettre une administration efficace de la justice. Ces efforts s’inscrivent dans le cadre du plan « Pérenniser la transformation du système judiciaire » qui met l’accent sur le traitement des affaires en suspens depuis cinq ans ou plus, en tant que service essentiel, conformément aux meilleures pratiques internationales. Le système judiciaire a recruté plus de 200 nouveaux juges et magistrats, et créé 25 antennes de tribunaux depuis 2011 en vue d’accroître sa capacité et son accès dans les zones reculées.

Réponse aux questions posées au paragraphe 7 de la liste de points

22.Le Gouvernement n’a pas ratifié le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture. Cette situation est due au fait que la Constitution a transformé le système kényan, qui était dualiste, en système moniste. L’article 2 (par. 6) de la Constitution dispose que « [t]out traité ou convention ratifié par le Kenya sera incorporé dans la législation kényane conformément à la présente Constitution ». De même, l’article 94 (par. 5) de la Constitution prévoit ce qui suit : « Aucun individu ou organe autre que le Parlement n’est habilité à prendre des dispositions ayant force de loi au Kenya sauf en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par la Constitution ou la législation. ». La ratification d’un instrument est régie par cette disposition compte tenu de l’article 2 (par. 6) de la Constitution. Bien que tous les efforts soient déployés pour ratifier le Protocole, il faut comprendre que ces dispositions constitutionnelles ont institué une procédure de ratification des instruments internationaux qui est très rigoureuse. Cela étant, divers ateliers ont été organisés pour sensibiliser les parties prenantes, principalement les acteurs publics, aux dispositions du Protocole facultatif et aux obligations qui en découlent.

Réponse aux questions posées au paragraphe 8 de la liste de points

23.Le Kenya applique la loi de 2010 relative à la lutte contre la traite des personnes. Cette loi donne effet aux obligations contractées par le Kenya au titre de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et surtout de son Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants et à définir les infractions liées à la traite.

24.Le Comité consultatif pour la lutte contre la traite des personnes est chargé de renforcer la mise en œuvre des programmes de prévention, de protection et de réadaptation des victimes de la traite. Le Comité consultatif a mis au point le Plan d’action national de lutte contre la traite des personnes − cadre stratégique 2013-2017. Ce Plan d’action met l’accent sur la coopération entre les différentes parties prenantes de tous les secteurs au Kenya ainsi que sur la coopération avec les autres pays de la région et au-delà. D’autres initiatives incluent : les Directives sur le mécanisme national d’orientation des victimes de la traite des personnes au Kenya, publiées le 15 décembre 2016, la Politique de lutte contre la violence sexuelle et sexiste au niveau des comtés (2017), qui définit un cadre global pour éliminer progressivement la violence sexuelle et sexiste grâce à l’instauration d’un environnement de prévention, de protection, de soutien et de transformation ; et les Directives nationales sur la gestion des violences sexuelles (2014), qui fournit un cadre directeur pour les procédures et services à l’intention des personnes ayant subi des violences sexuelles. Ce cadre reconnaît que la violence sexuelle constitue une atteinte grave aux droits de l’homme de même qu’un problème de santé majeur, qui appelle impérativement l’attention de tous les intéressés. En outre, ce cadre guide les professionnels de la santé sur les étapes à suivre concernant la prise en charge des personnes ayant subi des violences sexuelles, la conservation des éléments de preuve en vue de leur utilisation au procès, le soutien psychosocial et les autres questions éthiques liées à la gestion des problèmes de santé découlant de la violence sexuelle et sexiste.

25.Le manuel de formation en matière de violences sexuelles et sexistes à l’intention des procureurs est utile pour les enquêteurs, les professions médicales et les organisations de la société civile, entre autres parties prenantes. Ce manuel constitue une importante ressource à laquelle les procureurs se réfèrent lors de la préparation des affaires judiciaires. En outre, ce manuel détaille les éléments constitutifs des infractions sanctionnées par la loi de 2006 sur les infractions sexuelles. Le manuel explique la procédure à suivre pour signaler une infraction sexuelle, la procédure d’enquête, en particulier les étapes cruciales devant faire l’objet d’une attention particulière comme le recueil des dépositions, la manière d’intervenir sur une scène de crime, l’expertise médicale, l’identification des délinquants, les témoins experts et les contre-expertises. Le manuel explique en outre la procédure d’arrestation et la procédure préalable au jugement, en rappelant les droits de l’accusé énoncés dans notre Constitution.

26.Les modifications proposées à la loi sur les infractions sexuelles portent notamment sur : la définition des infractions sexuelles, la prévention et la protection de toutes les personnes contre les actes sexuels illicites, les peines planchers pour les infractions sexuelles ; l’interdiction des différents types de violence sexuelle commis contre les hommes, les femmes et les enfants, dont la tentative de viol, le viol, l’agression sexuelle, les actes indécents, le viol sur mineur, le viol collectif, le harcèlement sexuel, la pédopornographie, la prostitution enfantine, le tourisme pédophile, l’exploitation de la prostitution, l’inceste, la transmission délibérée du VIH, y compris d’autres maladies sexuellement transmissibles mettant en danger la vie d’autrui, et les infractions fondées sur la culture et la religion.

27.Le Gouvernement a instauré de nouvelles mesures visant à mettre fin aux mauvais traitements infligés aux domestiques kényans dans les pays du Moyen-Orient, au moyen d’un programme de contrôle et d’octroi d’agréments pour toutes les agences qui recrutent des employés de maison pour les pays du Golfe. Seules les agences autorisées et accréditées seront autorisées à recruter des travailleurs. Le Gouvernement a également déployé des attachés chargés des questions d’emploi auprès des missions kényanes implantées dans trois pays du Golfe – Émirats arabes unis, Qatar et Arabie saoudite. Les attachés seront chargés d’aider les travailleurs kényans à s’établir dans ces pays, et de traiter les plaintes des travailleurs qui dénoncent les mauvais traitements infligés par leurs employeurs.

28.En septembre 2014, le Parlement a adopté la loi relative à la protection des victimes, qui améliore l’assistance apportée aux victimes d’infractions, notamment avec la création d’un fonds de protection des victimes. Environ 600 000 dollars É.-U. ont été alloués au fonds de protection des victimes. Les textes d’application de la loi ainsi que les règles régissant le fonds sont en cours d’élaboration.

29.Le tableau ci-après fournit des statistiques sur les poursuites engagées et les condamnations prononcées dans les affaires de traite des personnes pour la période comprise entre juin 2013 et juin 2016.

Tableau 2 Poursuite s engagées pour des infractions de traite des personnes

Catégorie d ’ infractions

2013/14

2014/15

2015/16

Nouvelles poursuites engagées

Condamnations prononcées

Nouvelles poursuites engagées

Nouvelles poursuites engagées

Condamnations prononcées

Traite des personnes

57

18

31

4

Traite des enfants

4

0

9

1

Traite des personnes pour la criminalité organisée

29

14

2

1

Autres infractions liées à la traite des personnes

77

52

114

71

Total

526

436

167

84

156

77

Source  : Bureau du Procureur général .

Réponse aux questions posées au paragraphe 9 de la liste de points

30.Le Kenya est signataire d’un grand nombre d’instruments juridiques internationaux qui obligent l’État à prendre des mesures contre la violence sexiste. Se fondant sur l’engagement national en faveur de la défense et de la protection des droits de l’homme et de l’égalité des sexes, le Gouvernement kényan a élaboré une série de politiques et d’instruments juridiques qui mettent l’accent sur la prévention de la violence sexiste et sur l’atténuation de ses conséquences.

31.Le Gouvernement a également pris d’autres mesures administratives visant à lutter contre la violence sexiste. Ces mesures sont notamment les suivantes :

a)Création de centres de réadaptation pour les personnes victimes de violences sexistes, dans les plus grands hôpitaux publics de Nairobi (Kenyatta National Hospital), Mombasa, Nakuru, Kisumu et Eldoret. Ces centres sont très actifs et aident les femmes victimes de violences sexuelles et sexistes qui le plus souvent ne bénéficient d’aucun service ;

b)Fourniture d’une prophylaxie postexposition et d’une contraception d’urgence aux victimes de violences sexuelles qui les signalent auprès des services sanitaires ;

c)Mise en place du numéro d’urgence 1195 pour les victimes de violences sexistes et d’un mécanisme d’orientation. Cette permanence téléphonique gratuite, ouverte le 21 février 2013, a été attribuée à « Health-care Assistance Kenya » par l’Autorité nationale kényane des communications. Le numéro d’urgence gratuit 1195 améliore l’aide aux victimes de viols, y compris sur mineur, de mutilations génitales féminines et d’agressions physiques ;

d)Élaboration d’une politique nationale de prévention et de réponse à la violence sexiste. Cette politique fournit un cadre pour l’élimination de la violence fondée sur le genre dans le pays. Elle énonce les principaux objectifs qui visent à garantir une approche coordonnée et une élaboration efficace des programmes ainsi qu’une amélioration des lois et des politiques de prévention et d’intervention en matière de violence sexiste.

32.La loi de 2015 sur la protection contre la violence familiale contient des dispositions visant à protéger et aider les victimes, conjoints et enfants ou autres personnes à charge.

33.Aucune loi n’érige le viol conjugal en infraction pénale autonome au Kenya. Toutefois, l’article 45 de la Constitution reconnaît que les deux époux sont égaux dans le mariage. Cette disposition signifie que tout doit être fait en toute connaissance et avec le consentement des parties dès lors qu’elles sont mariées. En outre, l’article 29 garantit à tous, y compris aux époux, le droit de ne pas être soumis à des traitements inhumains et dégradants.

34.Le tableau ci-après donne des statistiques sur les poursuites engagées et les condamnations prononcées dans les affaires de violence sexuelle et sexiste pour la période comprise entre juin 2013 et juin 2016.

Tableau 3 Poursuites engagées dans les affaires de violence sexuelle et sexiste (violence contre les femmes et les filles)

Catégorie d ’ infractions

2013/14

2014/15

2015/16

Nouvelles procédures engagées

Condamnations prononcées

Nouvelles procédures engagées

Nouvelles procédures engagées

Condamnations prononcées

Viol

922

76

669

104

491

95

Tentative de viol

149

49

187

42

Viol sur mineur

74

43

2 652

180

2 827

562

Tentative de viol sur mineur

221

36

320

68

Viol en réunion

48

4

75

25

Agression sexuelle

144

27

331

85

77

11

Traite à des fins d’exploitation sexuelle

9

10

15

1

12

0

Prostitution enfantine/ tourisme pédophile/ pédopornographie

182

14

7

1

8

2

Attentat à la pudeur sur mineurs

198

36

302

66

Total

1 331

170

4 290

496

4 299

871

Source  : Bureau du Procureur général .

Réponse aux questions posées au paragraphe 10 de la liste de points

35.La Kenya a accompli d’énormes progrès dans la lutte contre les mutilations génitales féminines. Selon l’Enquête sur la démographie et la santé au Kenya réalisée en 2014 (KDHS), le taux national de prévalence des mutilations génitales féminines était de 21 %, contre 27 % en 2008/09 et 32 % en 2003. Malgré cette diminution, le taux de prévalence reste élevé dans certaines communautés, notamment parmi les communautés somalienne, kisii, samburu et masai. Les plus grandes difficultés rencontrées en matière de prévention des mutilations génitales féminines sont notamment les pratiques culturelles profondément ancrées et le faible niveau d’instruction dans certaines des communautés pratiquantes ainsi que la pauvreté chez les femmes dans les zones où les mutilations sont pratiquées. Toutefois, malgré ces difficultés, le Gouvernement a mis en place diverses mesures pour lutter contre la pratique des mutilations génitales féminines. Ces initiatives sont notamment les suivantes :

a)Un Conseil pour la lutte contre les mutilations génitales féminines, qui est un organisme public semi-autonome créé en décembre 2013 à la suite de la promulgation de la loi de 2011 portant interdiction des mutilations génitales féminines. La mission du Conseil est de défendre la dignité et l’autonomisation des filles et des femmes au Kenya grâce à la coordination des initiatives, aux activités de sensibilisation et à la mobilisation contre les mutilations génitales féminines ;

b)Depuis sa création, le Conseil a mené des campagnes de sensibilisation et d’éducation. Dans le cadre de ses efforts déployés auprès des groupes locaux et des communautés, le Conseil, en collaboration avec d’autres partenaires opérationnels, a conduit une campagne de sensibilisation visant à protéger les filles et les femmes des mutilations génitales féminines dans plusieurs comtés du pays, dont Tharaka Nithi, Narok, Kajiado, West Pokot, Baringo, Nakuru, Kisii, Nyamira, Migori (Kuria), Bungoma (Mont Elgon), Samburu, Isiolo, Elgeyo Marakwet et Marsabit ;

c)La création, par le Bureau du Procureur général, d’une unité de lutte contre les mutilations génitales féminines et le mariage d’enfants afin d’accélérer les poursuites dans ce type d’affaires ;

d)Des procureurs ont été formés à la prévention et à la lutte contre les mutilations génitales féminines afin de traiter correctement ces affaires. La mise en service d’une ligne directe pour dénoncer les mutilations génitales féminines (0770 610 505) a également permis de renforcer la réponse des procureurs ;

e)Avec l’appui d’organismes des Nations Unies, tels que le Programme conjoint FNUAP-UNICEF sur les mutilations génitales féminines/l’excision, le Gouvernement encourage les rites de passage alternatifs. Il s’agit de remplacer les mutilations génitales féminines par des rites traditionnels non préjudiciables de passage des filles à l’âge adulte. Ces rites sont un moyen pour la famille et la communauté de célébrer ce moment important dans la vie d’une adolescente, sans modifier le corps des jeunes filles de quelque manière que ce soit ;

f)Les médias ont joué un rôle crucial en appelant l’attention sur les mutilations génitales féminines, en tant que problème national, et en fournissant une plateforme pour le dialogue communautaire sur les mutilations génitales féminines.

36.Le tableau ci-après fournit des statistiques sur le nombre de poursuites engagées et de condamnations prononcées dans les affaires de mutilations génitales féminines pour les exercices 2013/14, 2014/15 et 2015/16.

Tableau 4 Poursuites engagées et condamnations prononcées dans les affaires de mutilations génitales féminines

Catégorie d ’ infractions

2013/14

2014/15

2015/16

Nouvelles poursuites engagées

Condamnations prononcées

Nouvelles poursuites engagées

Nouvelles poursuites engagées

Condamnations prononcées

Réalisation de mutilations génitales féminines

13

0

10

Réalisation de mutilations génitales féminines

13

0

Complicité de réalisation

5

Complicité de réalisation

Mise à disposition d’une personne en vue de pratiquer une mutilation

6

Mise à disposition d’une personne en vue de pratiquer une mutilation

Autres infractions relatives aux mutilations génitales féminines

1

Autres infractions relatives aux mutilations génitales féminines

Total

13

0

22

Total

13

0

Source  : Bureau du Procureur général .

Réponse aux questions posées au paragraphe 11 a) à d) de la liste de points

37.Le Gouvernement a pris plusieurs mesures depuis la dernière période à l’examen pour garantir la protection des droits des femmes en matière de santé procréative au Kenya. Ces mesures sont notamment les suivantes :

a)Lancement de la politique de gratuité des services de maternité en 2013 pour s’attaquer au problème de la mortalité maternelle élevée et des femmes placées en détention après avoir accouché parce qu’elles n’avaient pas les moyens de payer leurs factures médicales. Depuis lors, le Gouvernement a alloué plus de 30 milliards de shillings kényans (environ 300 millions de dollars É.-U.) à la santé maternelle. Il a également engagé des fonds pour accroître les effectifs de manière à garantir que la qualité des soins de santé fournis soit la plus élevée possible ;

b)Achat de 99 conteneurs (servant de dispensaires mobiles) utilisés pour apporter des services de santé aux régions les plus reculées du pays. Ceux-ci permettront de réduire les complications et la mortalité maternelle, car les mères vivant dans des zones reculées n’auront pas à parcourir de longues distances pour se rendre dans les hôpitaux/dispensaires.

38.De décembre 2014 à mars 2015, la Commission nationale pour l’égalité des sexes (NGEC) a procédé à un audit de la mise en œuvre de la directive présidentielle relative au programme de soins de santé maternelle gratuits dans un échantillon d’établissements de santé publique au Kenya afin d’évaluer l’application des principes de l’égalité et de l’inclusion dans le programme. L’audit, qui a été réalisé dans 4 comtés (Laikipia, Nyeri, Kilifi et Busia) a montré, entre autres résultats, que la gratuité des services de santé maternelle avait permis d’accroître l’accès des femmes et des filles aux services de maternité au Kenya ainsi qu’en témoigne la multiplication du nombre d’accouchements dans les établissements de santé publique. Environ 43 % des établissements de santé publique ont rapporté que le nombre d’accouchements pratiqués chaque jour avait doublé à la suite des directives présidentielles. L’audit a également montré une très bonne connaissance du programme de services de maternité gratuits chez les répondants dans les quatre comtés. Un nombre élevé de femmes et de filles ont pu accéder à des services de maternité gratuits. Cependant, ce programme continue de se heurter à l’insuffisance des ressources humaines et à l’absence de cadre de financement approprié.

39.Les tribunaux ont également renforcé la protection des droits liés à la procréation des femmes. Dans l’affaire MA & autre c .  Procureur général et 4 autres [2016] eKLR(requête constitutionnelle no 562 de 2012), la Cour a jugé que la détention des femmes enceintes pour non-paiement de leurs factures médicales était non seulement illégale mais également contraire à la Constitution. La Cour a considéré en outre que la détention des requérantes violait leur droit à ne pas subir de discrimination. Dans cette affaire, deux femmes avaient été arrêtées et soumises à des violences mentales et physiques à la maternité de Pumwani en raison du non-paiement des services de maternité. Les deux femmes avaient été détenues à des moments différents. La Haute Cour du Kenya à Nairobi a jugé que cette détention constituait une privation arbitraire de liberté et une violation du droit à la liberté de circulation.

40.Le Kenya est également partie à plusieurs instruments régionaux concernant la santé et la santé procréative. Il a signé le Protocole de Maputo relatif aux droits de la femme (2003), qui reconnaît les droits de la procréation et impose aux États parties de mettre en place des services de santé et de nutrition prénataux, à l’accouchement et postnataux pour les femmes, et de renforcer les services existants. En tant que membre de l’Union africaine, le Kenya a lancé en novembre 2010 la campagne visant à accélérer la réduction de la mortalité maternelle en Afrique sous le slogan « aucune femme ne doit mourir en donnant la vie ».

41.L’avortement est illégal au Kenya. L’article 26 (par. 4) de la Constitution, relatif au droit à la vie, dispose que l’avortement n’est pas autorisé, sauf si, de l’avis d’un professionnel de santé qualifié, un traitement urgent s’impose ou si la vie de la mère est en danger ou encore si une autre loi écrite l’autorise. Les articles 158 à 160 et 228 du Code pénal érigent l’avortement en infraction pénale au Kenya. Toutefois, malgré ces dispositions juridiques, les avortements non médicalisés continuent d’être pratiqués. L’un des plus grands problèmes s’agissant des soins postavortement est l’absence de directives pour guider les professionnels de la santé sur la prise en charge des personnes ayant eu recours à un avortement non sécurisé ou sur la manière de procéder à des avortements lorsque la loi les y autorise, c’est-à-dire lorsque la vie ou la santé de la mère est en danger. Les normes et directives pour réduire la mortalité et la morbidité maternelles résultant d’avortements non médicalisés, adoptées en 2012 pour donner des consignes aux professionnels de la santé, ont été abrogées en décembre 2013. Il est prévu de procéder à la révision de ces documents.

42.Mesures en place concernant les avortements non sécurisés. Les directives nationales sur la gestion de la violence sexuelle au Kenya, publiées par le Ministère de la santé en 2009, autorisent l’avortement en cas de viol sur adulte ou mineur. La politique de santé sexuelle et procréative des adolescents, adoptée en 2015, reconnaît qu’il existe un taux élevé d’avortements non médicalisés chez les adolescentes. L’une de ses priorités est la prévention des grossesses précoces et non désirées. Cependant, elle ne fait aucune mention de l’avortement en tant que domaine prioritaire.

43.La Haute Cour du Kenya, dans les Requêtes 605 et 606 de 2014,procède actuellement à l’audition et à l’examen d’une affaire de stérilisation inconstitutionnelle par ligature des trompes de quatre femmes vivant avec le VIH. Ces requêtes ont été déposées le 10 décembre 2014 pour contester la stérilisation inconstitutionnelle, par ligature des trompes, de cinq femmes vivant avec le VIH. La Cour ne s’est pas encore prononcée sur cette affaire.

Réponse aux questions posées au paragraphe 12 de la liste de points

44.La Constitution du Kenya (art. 53) reconnaît la nécessité pour tous les enfants d’être protégés contre la maltraitance, la négligence, les pratiques culturelles préjudiciables, toutes les formes de violence, les traitements et châtiments inhumains et les travaux dangereux ou relevant de l’exploitation par le travail. La Constitution dispose que les enfants ont des droits fondamentaux, notamment le droit à l’éducation, à la nutrition, au logement, aux soins de santé et aux soins parentaux. Ces dispositions sont conformes à celles énoncées dans la Convention relative aux droits de l’enfant et la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant, auxquelles le Kenya a adhéré.

45.Le Gouvernement kényan est conscient que la protection de l’enfance est une question multisectorielle et multidisciplinaire qui nécessite la participation de tous. Deux documents essentiels pour orienter les parties prenantes dans la mise en place d’un système plus solide et plus efficace ont donc été élaborés. Le premier document, le Cadre pour le système national de protection de l’enfance au Kenya (2011), vise à promouvoir l’établissement de liens entre les différents acteurs et à fournir des interventions et des réponses coordonnées par le biais de mécanismes statutaires. Le second, les Directives pour les systèmes de protection de l’enfance au niveau des comtés, énonce un programme pour une action coordonnée à l’échelle des comtés et fournit des instructions de procédure pour tous les acteurs formels et informels.

46.En 2014, la Commission nationale pour l’égalité des sexes (NGEC) a procédé à un audit des établissements caritatifs qui accueillent des enfants au Kenya afin de déterminer leur statut général et d’évaluer le niveau d’intégration des principes d’égalité et d’inclusion ainsi que l’application de mesures d’action positive. Cette étude visait en outre à identifier les facteurs qui amènent les enfants à être accueillis dans des établissements caritatifs. L’étude a été réalisée à l’échelle de quatre comtés, à savoir Meru, Nyandarua, Siaya et Bungoma, dans 16 foyers agréés pour enfants des secteurs public et privé. L’étude a montré que les facteurs qui amènent les enfants à être accueillis dans des établissements caritatifs incluent : le VIH/sida, l’exhérédation, les grossesses précoces, la culture et les croyances, la négligence parentale et la pauvreté. Les auteurs de l’étude ont recommandé la refonte du Règlement de 2005 relatif à l’accueil caritatif des enfants pour y inclure des directives sur l’adéquation du cadre de vie et des normes de développement des infrastructures. Ils ont également recommandé de multiplier les inspections des établissements afin de s’assurer que seuls ceux qui offrent une prise en charge et une protection globales des enfants sont agréés.

47.Le Gouvernement s’est attaché à réglementer le fonctionnement des établissements caritatifs accueillant des enfants. À cet égard, la création et la gestion des établissements caritatifs pour enfants sont régies par diverses dispositions législatives, dont le Règlement de 2005 relatif à l’accueil caritatif des enfants et la Constitution kényane de 2010. En 2013 et 2014, les Normes nationales en matière de pratiques optimales dans les établissements caritatifs pour enfants et les Lignes directrices relatives à la protection familiale de remplacement pour les enfants au Kenya ont été respectivement élaborées. Les critères d’agrément ont également été relevés. Jusqu’à présent, 854 établissements caritatifs pour enfants ont été agréés dans le cadre d’une procédure d’agrément qui doit être renouvelée à expiration tous les trois ans.

48.Le Département des services à l’enfance et le Conseil national pour les services aux enfants assurent un suivi régulier des établissements caritatifs pour enfants dans le pays afin d’évaluer la qualité des services fournis. La loi sur l’enfance (maintenant le projet de loi sur l’enfance) est en cours de révision et contient des dispositions visant à garantir la qualité des soins en établissements et la réinsertion des enfants au moyen d’une protection familiale de remplacement et d’autres programmes. Le Département des services à l’enfance a entrepris de traiter les données sur les enfants placés en institutions et procède actuellement, à ce titre, à la cartographie des établissements caritatifs pour enfants dans le pays pour l’exercice 2017/18. Le Département travaille aussi en collaboration avec l’Association des œuvres de bienfaisance pour enfants au Kenya, entre autres parties prenantes, pour assurer l’amélioration des services.

49.Des unités de protection de l’enfance ont également été créées dans certains commissariats afin de répondre aux besoins des enfants en conflit avec la loi et de ceux qui ont besoin de protection durant l’instruction de l’affaire qui les concerne. Ces unités veillent à la protection des droits des enfants dans les commissariats et à ce que les enfants ne soient pas mélangés avec des adultes. La première unité de police kenyane spécialisée dans la lutte contre l’exploitation sexuelle des enfants et les violences sexuelles sur enfants a été créée en octobre 2016. Les unités de protection de l’enfance, composées de 12 fonctionnaires de la Police nationale ainsi que d’un membre des services à l’enfance, sont opérationnelles depuis avril 2016 et ont déjà joué un rôle essentiel dans la protection de 150 enfants. Avec le soutien de l’agence britannique de lutte contre la criminalité organisée (National Crime Agency), le Gouvernement, par l’intermédiaire de la Police nationale, entend créer une unité interorganisations autonome pour développer des unités de protection de l’enfance analogues dans tout le pays. En juin 2017, le pays comptait 15 unités de protection de l’enfance, établies avec le soutien de partenaires.

50.Pour protéger les enfants contre la maltraitance, la violence, la traite et l’exploitation, le Gouvernement a mis en place un service national d’assistance téléphonique, le 116, qui est une ligne téléphonique gratuite pouvant être appelée par tous pour signaler les cas de maltraitance d’enfants. Le service répond en moyenne à entre 5 000 et 7 000 appels par an. Le principal centre d’appel est situé dans la localité de Lower Kabete (comté de Nairobi). Deux autres centres d’appel se trouvent à Eldoret et dans le comté de Garissa.

Réponse aux questions posées au paragraphe 13 de la liste de points

51.Le Gouvernement kényan ne tolère ni les meurtres ni aucune forme de violence commise sur une personne au motif que celle-ci pratique la sorcellerie. Les lynchages et les violences subséquentes visant les personnes accusées de pratiquer la sorcellerie sont dûment réprimés par le Code pénal dans ses dispositions relatives aux infractions pénales que sont les meurtres, les homicides et les voies de fait.

Article 3

Réponse aux questions posées au paragraphe 14 de la liste de points

52.Les articles 25 et 29 de la Constitution du Kenya prévoient que la protection contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants est un droit fondamental qui ne saurait être restreint, suspendu ou supprimé dans aucune circonstance. L’article 28 reconnaît la dignité inhérente à la personne humaine et le droit de chacun à ce que sa dignité soit respectée et protégée. Le Kenya dispose d’un cadre juridique solide pour faire en sorte que les actes de torture ne soient pas commis et que les étrangers ne soient pas extradés vers des pays où il existe de sérieux motifs de croire qu’ils risquent d’être soumis à la torture. Parmi les textes législatifs figurent la loi sur les réfugiés, la loi sur la lutte contre la traite des personnes et la loi relative à la prévention de la torture.

53.La loi sur la lutte contre la traite des personnes dispose en son article 18 que, lorsqu’une victime de la traite est susceptible d’être exposée à des risques en cas de rapatriement, l’État peut permettre à la victime de rester au Kenya aussi longtemps que le Secrétaire du Gouvernement compétent le considérera nécessaire.

54.La loi relative à la prévention de la torture vise également à assurer la prévention, l’interdiction et la répression des actes de torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants et à prévoir des réparations pour les victimes de ces actes. La loi, dans son article 22, interdit en outre l’extradition d’une personne vers un pays où elle risquerait d’être soumise à la torture ou à des traitements cruels, inhumains ou dégradants.

55.La loi sur les réfugiés, en son article 18, interdit le refoulement, disposant que « nul ne peut être bloqué à l’entrée du territoire, expulsé ou extradé du Kenya vers un autre pays ou soumis à une mesure similaire » s’il risque en conséquence d’être persécuté ou de mettre sa vie, son intégrité physique ou sa liberté en danger.

56.En 2013, le Kenya, la Somalie et le HCR ont signé un accord pour le rapatriement des réfugiés somaliens dans le pays. L’une des dispositions de l’accord exige que le rapatriement soit volontaire, prévoyant que les parties réaffirment que le rapatriement des réfugiés somaliens qui ont cherché refuge en République du Kenya, prévu par l’Accord, doit s’effectuer en conformité avec le droit international relatif au rapatriement librement consenti. Cette disposition est conforme à l’article 3 de la Convention contre la torture.

57.Le Gouvernement s’est également engagé à veiller à ce que tous les demandeurs d’asile bénéficient des garanties d’une procédure régulière. La loi sur les réfugiés et ses textes d’application (réglementation relative aux réfugiés élaborée en 2009) dispose que quiconque souhaite rester au Kenya en tant que réfugié doit se présenter devant le Département des réfugiés pour y déposer une demande en ce sens. La légalité de la manière dont la personne est entrée au Kenya n’a aucune importance pour demander le statut de réfugié. Une fois sa demande enregistrée, le demandeur se voit remettre une « carte de demandeur d’asile » (par le Département des réfugiés).

Réponse aux questions posées au paragraphe 15 de la liste de points

58.Le Gouvernement kényan continue d’accueillir des réfugiés venant de tous les pays. En février 2017, le nombre de réfugiés et de demandeurs d’asile au Kenya s’établissait à 487 688. Sur ce nombre, 286 093 personnes venaient de Somalie.

59.Le rapatriement volontaire des réfugiés vers la Somalie, prévu par l’accord tripartite signé en 2013 avec la Somalie et le Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés, est actuellement en cours. À la date du 28 février 2017, 52 591 réfugiés somaliens avaient été rapatriés dans ce cadre. Le retour volontaire, qui est une décision devant être prise en toute connaissance de cause, doit être envisagé en tenant compte de la situation dans l’État d’origine. Le rôle du Gouvernement dans le processus de rapatriement est de donner aux bénéficiaires des informations objectives, exactes et actualisées pour leur permettre de prendre une décision éclairée sur la question de leur retour. Au total 72 613 réfugiés somaliens ont été rapatriés de manière librement consentie vers la Somalie.

60.Le projet de loi sur le droit écrit (diverses modifications) a été adopté par le Parlement en 2016 et publié au Journal officiel, supplément no 185 (projets de loi de l’Assemblée nationale no 45). Il est en attente d’approbation par le Président.

Articles 5 à 8

Réponse aux questions posées au paragraphe 16 de la liste de points

61.L’article 6 de la loi sur l’extradition (pays du Commonwealth) (1968) dispose qu’une personne en fuite ne peut pas être remise à un pays, ni placée ou maintenue en détention aux fins de sa remise : si le tribunal compétent pour juger son affaire, la Haute Cour chargée d’examiner son recours en habeas corpus ou le Procureur général considère que l’infraction dont l’intéressé est accusé ou a été reconnu coupable est de caractère politique ou si la demande de remise (bien qu’invoquant une infraction donnant lieu à extradition) est en fait présentée aux fins de poursuivre ou de punir cette personne en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de ses opinions politiques ; ou si l’intéressé risque, s’il fait l’objet d’une procédure de remise, de ne pas être jugé équitablement, ou d’être puni ou détenu, ou de voir sa liberté individuelle restreinte, en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité ou de ses opinions politiques.

62.Au cours de la période considérée, le Kenya n’a pas reçu ni envoyé de demandes d’extradition de personnes soupçonnées d’avoir commis des actes de torture. Toutefois, il a reçu des demandes d’extradition émanant de pays au sein de la communauté de l’Afrique de l’Est visant des personnes soupçonnées d’avoir commis d’autres délits, et ces demandes sont récapitulées dans le tableau ci-dessous.

N o

Pays requérant

Type d ’ infraction

Nombre de demandes d ’ extradition accordées entre 2014 - 2016

1

Rwanda

Infractions liées au génocide

10

2

Rwanda

Infractions liées aux stupéfiants

1

3

Tanzanie

Vols

5

4

Tanzanie

Infractions liées aux stupéfiants

1

5

Ouganda

Vols

4

Source  : Bureau du Procureur général, 2017 .

Article 10

Réponse aux questions posées au paragraphe 17 de la liste de points

63.La Constitution kényane de 2010 et divers instruments juridiques régionaux et internationaux exigent que les droits de l’homme soient respectés, protégés, appliqués et promus par l’État de même que par les individus. Les responsables de l’application des lois sont les principaux débiteurs d’obligations chargés de veiller à ce que les droits de l’homme ne soient pas violés ; ils sont également tenus de respecter l’état de droit et les droits de l’homme. Les programmes actuels de formation des forces de police et des personnels pénitentiaires comportent des modules consacrés aux droits de l’homme, tandis qu’un guide et manuel sur les droits de l’homme à l’intention des fonctionnaires a été mis au point.

64.La Commission nationale des droits de l’homme est une institution nationale indépendante pour la promotion et la protection des droits de l’homme, établie conformément à l’article 59 de la Constitution et par la loi de 2011 portant sa création.

65.Au cours de l’exercice financier 2014/15, la Commission nationale des droits de l’homme a formé les agents de l’unité de police antiterroriste au respect des droits de l’homme afin de diffuser ces principes dans les mesures de lutte contre le terrorisme. Cette initiative de renforcement des capacités a concerné 18 agents des comtés de Mandera, Wajir et Nairobi. Ces agents de l’unité ont suivi une formation sur les droits de l’homme appliqués aux techniques de police démocratique, et pris part à des discussions qui ont porté sur le respect des droits fondamentaux dans leurs activités et ont permis d’expliquer les cadres locaux, régionaux et internationaux qui régissent les pratiques de police démocratique.

66.La Commission a organisé en outre des ateliers de formation sur les droits de l’homme pour les fonctionnaires supérieurs de police dans la province occidentale et la province de Nyanza. La formation a renforcé les capacités de 39 fonctionnaires responsables de services de police (OCPD) et de 44 fonctionnaires responsables de commissariats (OCS) au Kenya occidental (anciennement, province occidentale et province de Nyanza) dans les domaines suivants : les normes et principes fondamentaux des droits de l’homme consacrés par la Constitution et par les instruments régionaux et internationaux ; les activités de police dans une démocratie et l’application d’une approche fondée sur les droits de l’homme dans les opérations de sécurité. Les droits fondamentaux de la personne humaine dans les activités de police ont également été examinés, et les liens entre police et droits de l’homme ont été expliqués.

67.Le Gouvernement est déterminé à faire en sorte que tous les services de police disposent des connaissances et des compétences policières appropriées et acceptables. Les fonctionnaires de police doivent régulièrement suivre des cours pertinents pour entretenir, développer ou accroître leurs connaissances et compétences et se tenir informés des nouvelles questions liées à leur vie professionnelle. Tous les candidats recrutés pour rejoindre la police et l’administration de la police doivent suivre une formation intensive de quinze mois, dont trois mois de stage en lien avec le programme de formation. Le programme de formation comporte des modules sur le bon usage de la force et des armes à feu dans le respect des Principes de base sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois.

68.Tous les agents des forces de l’ordre reçoivent une formation sur le respect des droits de l’homme qui permet un traitement équitable, juste et humain du public, ce qui est essentiel pour les activités de la police, en particulier celles relatives aux arrestations, détentions, perquisitions, saisies de biens et surveillances ainsi qu’à l’emploi de la force et des armes à feu. Les fonctionnaires de police sont tenus de suivre périodiquement des cours de révision sur l’utilisation des armes à feu. Le programme de formation des agents de police examine adéquatement les dispositions du Protocole d’Istanbul.

69.Tous les fonctionnaires de police doivent étudier et comprendre parfaitement le règlement interne de la police et veiller à sa bonne application. Le règlement interne de la police a été élaboré pour fournir à tous les fonctionnaires de la Police nationale assermentés des directives relatives à l’emploi approprié de la force, des armes à feu et de la force non létale ainsi qu’à l’utilisation et au déploiement sans danger des armes à feu autorisées par le Service.

70.Le Gouvernement fait appel en outre à un appui technique pour approfondir la formation des agents de police aux droits de l’homme et à l’importance de respecter ces droits.

Article 11

Réponse aux questions posées au paragraphe 18 de la liste de points

71.La Commission nationale des droits de l’homme procède à des exercices de suivi et d’évaluation postformation afin de mesurer les changements apportés par les activités mises en place. Au cours de la période considérée, la Commission a également évalué les résultats de la formation aux droits de l’homme, en collaboration avec l’administration pénitentiaire et la Police nationale. Des visites d’inspection ont été effectuées dans les prisons de Kodiaga et Kibos et dans l’établissement Shikusa Borstal. L’exercice de suivi a montré que les crédits budgétaires limités et la surpopulation constituaient les principaux obstacles empêchant la Police nationale de respecter comme il convient les normes relatives aux droits de l’homme. Ces problèmes sont réglés progressivement.

72.Suite au programme de renforcement des capacités des policiers mené à bien au Kenya occidental en juillet 2014, la Commission nationale des droits de l’homme a entrepris un exercice de suivi dans cette région afin d’évaluer l’impact de ce programme sur les activités policières et toute autre mesure prise pour améliorer les pratiques après la formation dispensée aux fonctionnaires supérieurs de police sur les normes relatives aux droits de l’homme dans le maintien de l’ordre. L’exercice a montré que les relations entre la police et la population s’étaient améliorées à Kisumu, Kakamega et Malava, comme confirmé par la diminution des plaintes de particuliers contre la police qui sont passées de 30 plaintes, avant la formation, à une moyenne de 4, après la formation.

73.Au cours de l’exercice 2014/15, la Commission nationale des droits de l’homme a réalisé des visites d’inspection et de contrôle de l’établissement rural pénitentiaire de Shikusa à la suite de plaintes invoquant des sévices et des mauvais traitements infligés aux détenus. Ces problèmes ont été portés à l’attention du Commissaire des détenus. Une visite de suivi, le 19 juin 2015, a permis de constater que les détenus victimes de violences avaient été conduits à l’hôpital, que les horaires de travail avaient été normalisés et que les détenus recevaient trois repas par jour.

74.Au cours de l’exercice 2016/17, la Commission a tenu des réunions avec l’administration pénitentiaire afin de présenter à celle-ci les conclusions de l’enquête relative à l’exercice du droit de grâce présidentiel, pour ce qui concerne notamment les détenus handicapés mentaux et mineurs et la détention illimitée qu’ils encourent en dépit de leur vulnérabilité. L’administration pénitentiaire s’est montrée ouverte à une plus grande collaboration avec les parties prenantes pour examiner ces questions, car la protection de ces groupes relève du mandat de plusieurs agences et départements publics. Les recommandations de la Commission sont à l’examen et des discussions sont en cours pour réformer l’exercice du droit de grâce présidentiel. En outre, la Commission a mené 10 visites d’inspection dans des prisons en concentrant son attention sur le droit à la santé des détenus et leur droit à être inscrits sur les listes électorales. Les principales conclusions en matière de santé concernent notamment la surpopulation, les mauvaises conditions d’hygiène, l’aération et la lumière insuffisantes et les difficultés d’accès à une eau potable saine et à une alimentation suffisamment nutritive. La plupart de ces problèmes sont essentiellement liés à l’insuffisance des crédits budgétaires alloués à l’administration pénitentiaire.

Réponse aux questions posées au paragraphe 19 de la liste de points

75.L’Autorité indépendante de contrôle de la police est un organe officiel indépendant créé pour assurer un contrôle civil du travail de la police. Au cours de la période considérée, l’Autorité a procédé à 507 inspections initiales de locaux de la police sur l’ensemble du pays, 199 inspections de suivi et 5 inspections d’écoles/établissements supérieurs de formation de la police. Il s’agit d’un total de 711 inspections réparties comme suit selon les exercices financiers : 25 inspections pour 2012/13 ; 40 inspections pour 2013/14 ; 196 inspections pour 2014/15 ; 237 inspections pour 2015/16 et 209 inspections pour 2016/17.

76.Un tableau présentant les recommandations que l’Autorité a présentées à la police à l’issue des visites d’inspection est joint en annexe.

Réponse aux questions posées au paragraphe 20 a) à g) de la liste de points

77.Les organismes publics chargés de contrôler le respect des droits de l’homme dans les établissements pénitentiaires incluent la Commission nationale des droits de l’homme et la Commission de la justice administrative (Bureau du Médiateur). La Commission nationale des droits de l’homme est habilitée à effectuer des visites inopinées dans les lieux de détention et à formuler des recommandations.

78.Certaines des réformes mises en œuvre dans l’administration pénitentiaire comprennent le détachement de spécialistes des droits de l’homme auprès des établissements pénitentiaires. Un Comité départemental des droits de l’homme a également été créé au cours de l’exercice 2014/15, composé des directeurs et de représentants des prisons. Un manuel à l’intention des spécialistes des droits de l’homme a été élaboré. Ces spécialistes suivent une formation de cinq semaines consacrée aux normes internationales et au respect des droits de l’homme, et ils effectuent une mission de contrôle de deux semaines dans une prison.

79.Le Gouvernement, par l’intermédiaire de l’administration pénitentiaire, a pris diverses mesures pour remédier au problème de la violence entre détenus dans les lieux de détention. Ces mesures comprennent l’évaluation des risques présentés par chaque détenu à son arrivée dans un établissement pénitentiaire puis périodiquement pendant la durée de son incarcération, ainsi que la séparation des différentes catégories de détenus selon leur âge, leur sexe, leur casier judiciaire et les motifs de leur incarcération.

80.L’administration pénitentiaire dispose de procédures officielles pour permettre aux détenus de déposer des plaintes sur tous les aspects de leur traitement ou de leurs conditions de détention. Ces procédures contribuent à promouvoir la confiance dans le système, à assurer le respect des règles et des droits et à éviter que les problèmes ne dégénèrent en crimes notamment en violence sexuelle.

81.La surpopulation est un problème majeur dans la gestion des prisons et la cause de la détérioration des conditions de base dans les établissements pénitentiaires. Toutefois, le Gouvernement a pris diverses mesures pour réduire la surpopulation carcérale. Ces mesures consistent notamment à : augmenter l’aide juridictionnelle ; faire appel à des assistants juridiques pour conseiller les accusés ; tenir des audiences foraines dans les prisons afin de réduire la charge de travail des tribunaux ; mobiliser les comités d’usagers des tribunaux pour faire en sorte que les affaires soient examinées et menées à leur terme plus rapidement ; encourager les parties prenantes, et en particulier les tribunaux et le service de probation, à envisager des peines non privatives de liberté pour les petits délinquants ; et faciliter le travail du Comité consultatif sur l’exercice du droit de grâce chargé d’examiner les affaires dans lesquelles les accusés sont susceptibles de bénéficier d’une libération.

82.Le pouvoir judiciaire a également pris diverses mesures pour remédier aux détentions provisoires de longue durée et au nombre élevé de personnes détenues dans l’attente de leur jugement. L’article 159 de la Constitution fait obligation au pouvoir judiciaire de promouvoir le recours à des mécanismes substitutifs pour le règlement des différends portés devant la justice. Ces recours sont définis dans la loi de procédure civile (chap. 21 du Recueil des lois). Conformément à son cadre de transformation, le pouvoir judiciaire a adopté des mécanismes substitutifs de règlement des différends afin de résorber l’arriéré judiciaire tout en rendant la justice plus accessible. L’entrée en vigueur, le 4 avril 2016, des Règles relatives à la médiation (projet pilote) de 2015 (Journal officiel no 197 de 2015), en application de la loi de procédure civile, a marqué le début de la mise en œuvre de leur phase pilote au sein de la Division des affaires familiales et commerciales de la Haute Cour du palais de justice de Milimani, à Nairobi.

83.La médiation rattachée aux institutions judiciaires est un processus placé sous la supervision des cours et tribunaux. Pour piloter ce projet, le Comité d’accréditation des médiateurs, le Comité d’opérationnalisation des autres voies de règlement des différends et un secrétariat (Groupe de travail technique) ont été créés. Le Comité d’accréditation des médiateurs est composé de 13 membres désignés par diverses institutions aux côtés de la magistrature. Le Comité a élaboré des normes d’accréditation afin de guider le processus d’accréditation et de réaccréditation des médiateurs. En mars 2017, le Comité d’accréditation avait accrédité 65 médiateurs, et 82 affaires portées devant la Division des affaires familiales et commerciales avaient été résolues grâce à la médiation.

Articles 12 et 13

Réponse aux questions posées au paragraphe 21 de la liste de points

84.Le Gouvernement kényan n’autorise pas et ne tolère pas les exécutions extrajudiciaires, les détentions arbitraires ou les disparitions forcées de son peuple, imputées aux forces de police ou à toute autre personne agissant à titre personnel ou dans le cadre d’une fonction publique.

85.De plus, le Gouvernement respecte les obligations juridiques que lui font divers traités de respecter et de protéger le droit à la vie, le droit à la sécurité et le droit de ne pas être soumis à des tortures et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants. Cette protection trouve sa pleine expression dans la Constitution du Kenya.

86.La Constitution garantit en particulier la liberté et la sécurité de la personne, protège le droit à la vie et interdit la torture ainsi que les traitements cruels, inhumains ou dégradants. L’article 49 (par. 1) c)) de la Constitution garantit le droit de l’accusé en matière de communication. La Constitution garantit également le droit à la vie en son article 26 (par. 1). Ce droit est nuancé en son article 26 (par. 3), comme suit : « Nul ne sera privé intentionnellement de sa vie, sauf dans les circonstances prévues par la Constitution ou toute autre loi écrite. ».

87.Le Gouvernement s’emploie à diligenter des enquêtes rapides, impartiales et efficaces sur toutes les allégations de violations des droits de l’homme, lesquelles font systématiquement l’objet d’enquêtes et de poursuites. Les personnes reconnues coupables sont condamnées ou s’exposent à des peines lourdes.

88.Le Gouvernement se félicite du rôle joué par les défenseurs des droits de l’homme et par les organisations de la société civile dans le pays. Tout accusé dont les droits ont été violés doit rapidement déposer plainte dans un commissariat pour faciliter les enquêtes. En outre, les accusés peuvent se tourner vers l’Autorité indépendante de contrôle de la police pour signaler tout grief qu’ils peuvent avoir à l’égard de la police. En ce qui concerne la protection des témoins, nous disposons désormais d’un service de protection des témoins indépendant.

89.Le Bureau des affaires internes est chargé d’enquêter sur les plaintes dénonçant des violations des droits de l’homme commises par la police. Toutefois, l’Autorité indépendante de contrôle de la police examine également les plaintes contre les manquements de la police déposées par les particuliers. Lorsque les enquêtes montrent qu’un fonctionnaire de police doit répondre de ses actes, la plainte est transmise au Bureau du Procureur général. La loi sur le service national du coroner renforce encore davantage les enquêtes sur les décès causés par des actes de violence criminels ou des exécutions extrajudiciaires ou encore survenus en prison ou en garde à vue. Les victimes de ces crimes ou leurs proches ont maintenant droit aux réparations prévues par la loi de 2014 relative à la protection des victimes.

90.La loi relative à la prévention de la torture définit également le cadre juridique nécessaire à la prévention, l’interdiction et la répression des actes de torture et des mauvais traitements dans le respect de la Constitution et de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Réponse aux questions posées au paragraphe 22 a) à e) de la liste de points

91.La Commission vérité, justice et réconciliation a été créée en 2009 pour enquêter sur les violations flagrantes des droits de l’homme et les injustices historiques qui se sont produites au Kenya entre l’indépendance le 12 décembre 1963 et l’Accord de coalition signé le 28 février 2008. La Commission a mené ses travaux et adopté un certain nombre de recommandations. Il convient de noter que la plupart des recommandations formulées par cette Commission ont déjà été mises en œuvre ou sont en train de l’être. Par exemple, la reconnaissance et les excuses publiques présentées à l’ensemble des victimes et des survivants, par le Président du Kenya − M. Uhuru Kenyatta, en mars 2015, pendant son discours sur l’État de la nation. Ces excuses ont marqué une étape importante dans la reconnaissance des victimes et des survivants des violations commises dans le passé, et souligné la nécessité de panser les blessures de la nation et d’examiner ces violations.

92.La création d’un fonds de réparation pour les victimes et les survivants des injustices historiques est une mesure positive pour assurer une réparation à ces personnes. Le Président a alloué 10 milliards de shillings kényans (96 571 800 dollars É.-U.) au Fonds pour la justice réparatrice, étalés sur trois ans, afin d’octroyer une réparation aux victimes, en particulier aux survivants des violations commises par le passé. Pour l’exercice budgétaire 2016/17, 6 milliards de shillings kényans (près de 60 millions de dollars É.-U.) ont été mis en réserve pour alimenter le Fonds. Les règles de 2017 relatives à la gestion des finances publiques (réparations pour les injustices historiques) ont été élaborées pour permettre au Fonds de fonctionner de manière systématique et efficace. Ces règles ont été approuvées par les parties prenantes. Les renseignements sur les violences postélectorales de 2007 figurent dans le quatrième rapport périodique du Kenya sur l’application du Pacte international relatif aux droits civils et politiques.

93.Des centres pour les victimes de violences sexistes ont été mis sur pied dans les principaux hôpitaux du Kenya, afin de fournir des soins médicaux et psychosociaux à ces personnes. Le Bureau du Procureur général et le Groupe de travail sur l’application de la loi relative aux infractions sexuelles ont organisé des forums publics dans tout le pays afin de sensibiliser la population aux problèmes des infractions sexuelles et de la violence sexiste.

94.Le Kenya a pleinement coopéré aux enquêtes du Procureur de la Cour pénale internationale sur les violences postélectorales.

Réponse aux questions posées au paragraphe 23 a) à d) de la liste de points

95.Au 31 décembre 2016, l’Autorité enquêtait sur 391 affaires, avait mené à terme 465 enquêtes et avait transmis 67 dossiers au Bureau du Procureur général avec des recommandations. À l’heure actuelle, 46 dossiers transmis par l’Autorité se trouvent devant le Tribunal, et l’Autorité a obtenu la condamnation de deux agents accusés d’homicide.

96.Entre juillet 2015 et juin 2016, l’Association a transmis 60 dossiers au Bureau du Procureur général concernant des accusations de meurtre, voies de fait et recours excessif à la force. L’Autorité a reçu 2 592 plaintes durant cette période, en augmentation par rapport aux 1 792 plaintes reçues pendant l’exercice 2014/15. Les plaintes reçues au 31 décembre 2016 pour l’exercice 2016/17 étaient au nombre de 1 254.

97.Au cours de la période considérée, les membres de la Police nationale ont fait l’objet d’un contrôle renforcé afin de veiller à ce qu’ils respectent la loi dans l’exercice de leurs fonctions. L’Autorité indépendante de contrôle de la police, dans le cadre de son mandat consistant à assurer un contrôle civil de l’action policière, a mené des enquêtes et recommandé d’engager des poursuites concernant des policiers accusés d’exécutions extrajudiciaires, de recours excessif à la force et de torture. En juin 2017, l’Autorité avait mené à bien 566 enquêtes. Les affaires menées à terme ou classées ont fait l’objet d’une enquête préliminaire ou d’enquêtes complètes et n’ont pas nécessité d’enquêtes complémentaires sauf avis contraire. En juin 2017, 258 dossiers faisaient l’objet d’une enquête en cours, 89 dossiers avaient été transmis au Bureau du Procureur général et 50 dossiers étaient en cours d’examen par un tribunal. Les recommandations étaient variées mais ont généralement porté sur les chefs de meurtre, de voies de fait ou d’emploi excessif de la force et sur des procédures non pénales telles que des enquêtes à caractère public et des mesures disciplinaires.

98.L’Autorité a reçu au total 8 042 plaintes entre sa création en 2012 et le 30 juin 2017. Il y a eu une augmentation constante du nombre de plaintes reçues, et un nombre croissant de plaintes a été enregistré pendant trois ans. L’année 2016/17 a enregistré une légère baisse. En 2012/13, 594 plaintes ont été reçues ; 860 en 2013/14 ; 1 792 en 2014/15 ; 2 529 en 2015/16 ; et 2 267 en 2016/17.

Réponse aux questions posées au paragraphe 24 de la liste de points

99.L’Autorité indépendante de contrôle de la police a élaboré un projet de règlement dont l’objectif principal est de fournir des procédures et des mécanismes visant à faciliter le traitement prompte, efficace, impartiale et équitable des plaintes. Son texte est en cours d’examen par la Commission de la réforme législative. De plus, l’Autorité a mis en place un système complet d’examen des plaintes grâce à la création d’un comité de tri des dossiers. L’Autorité a fixé des délais pour tenir les plaignants informés, et elle élabore actuellement un système de gestion des contenus électroniques pour améliorer la saisie des données et le suivi des dossiers.

Réponse aux questions posées au paragraphe 25 de la liste de points

100.L’Autorité indépendante de contrôle de la police a été créée par une loi du Parlement, ce qui signifie qu’il s’agit d’une autorité indépendante à succession perpétuelle. Cette Autorité a pour but de permettre le contrôle civil de l’action de la police au Kenya.

101.L’indépendance de l’Autorité est garantie par l’article 249 de la Constitution kényane. En outre, l’article 4 de la loi portant création de l’Autorité indépendante de contrôle de la police impose au Parlement de veiller à ce que l’Autorité bénéficie de ressources suffisantes pour s’acquitter efficacement de toutes ses fonctions. Ladite loi dispose en outre qu’aucune personne ni aucun organe ne peut intervenir dans la prise de décisions, le fonctionnement ou les activités de l’Autorité.

102.Au fil des ans, le Gouvernement n’a cessé d’augmenter le financement de l’Autorité. Pour l’exercice financier 2014/15, l’Autorité a été dotée de 291 millions de shillings kényans (environ 2,9 millions de dollars É.-U.), portés ensuite à 491 millions de shillings kényans (environ 4,9 millions de dollars É.-U.) en 2015/16.

Réponse aux questions posées au paragraphe 26 de la liste de points

103.L’obtention du formulaire « P3 » est un service gratuit. Ces formulaires sont remis par le commissariat de police lorsqu’une personne dépose une plainte. Ils peuvent aussi être téléchargés à partir du site Internet de la Police nationale et remplis au commissariat de police.

Réponse aux questions posées au paragraphe 27 de la liste de points

104.L’administration pénitentiaire dispose de procédures officielles pour permettre aux détenus de déposer des plaintes sur tous les aspects de leur traitement ou de leurs conditions de détention. Ces procédures contribuent à promouvoir la confiance dans le système, à assurer le respect des règles et des droits et à éviter que les problèmes ne dégénèrent en actes très graves notamment en violence sexuelle. Ces procédures dissuadent les personnes de commettre des exactions. Les procédures de plainte bénéficient aux détenus, au personnel et aux autorités pénitentiaires. À leur arrivée en prison, les détenus sont informés des procédures permettant de porter plainte (de même que de leurs droits ainsi que des règles et procédures régissant la vie carcérale).

105.En outre, les commissions indépendantes des droits de l’homme, telles que la Commission nationale des droits de l’homme, sont habilitées à recevoir des plaintes concernant toute forme de violation des droits de l’homme. La plateforme du mécanisme intégré de transmission des plaintes du public a permis de rapprocher quatre commissions, à savoir la Commission d’éthique et de lutte contre la corruption (EACC), la Commission de la justice administrative (CAJ), la Commission nationale des droits de l’homme (KNCHR) et la Commission nationale pour la cohésion et l’intégration, pour recevoir les plaintes des citoyens relatives à la corruption, à la mauvaise administration et aux violations des droits de l’homme, et favoriser la cohésion. Grâce à cette plateforme, les plaintes sont facilement reçues et transmises à l’entité compétente au sein de la plateforme pour suite à donner.

Réponse aux questions posées au paragraphe 28 de la liste de points

106.La loi sur les personnes privées de liberté dispose que toute personne privée de liberté a droit à ce que l’intégralité de ses droits et libertés fondamentaux soient protégés sous réserve des restrictions qui pourraient être autorisées par la Constitution. Une personne privée de liberté doit en toutes circonstances être traitée avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine. Quiconque soumet une personne privée de liberté à un traitement cruel, inhumain ou dégradant commet une infraction et est passible d’une amende ne dépassant pas 500 000 shillings (environ 5 000 dollars É.-U.) ou d’une peine d’emprisonnement d’une durée maximale de deux ans, ou les deux.

107.Dans l’affaire Anthony Njenga Mbuti & 5 autres c .  Procureur général & 3 autres [2015] eKLR, la Cour a jugé que les dispositions du système d’engagement à ne pas troubler l’ordre public étaient indéfendables. Les dispositions du système d’engagement à ne pas troubler l’ordre public, prévues par le Code de procédure pénale, ont été jugées non conformes à la Constitution. La Cour a déclaré que les articles 43 à 61A du Code de procédure pénale étaient anticonstitutionnels et donc nuls et non avenus, en ce qu’ils violaient les dispositions des articles 27, 28, 49 et 50 (par. 2) de la Constitution. En outre, la Cour a fait observer que l’article 61A du Code de procédure pénale, qui permet aux juges d’imposer à une personne de ne pas quitter un district donné (assignation), était contraire au droit des citoyens à la liberté de circulation consacré à l’article 39 de la Constitution.

Réponse aux questions posées au paragraphe 29 de la liste de points

108.La loi de 2006 relative à la protection des témoins constitue le cadre juridique de la protection des témoins au Kenya. Cette loi prévoit la protection des témoins dans les affaires pénales et autres procédures, et porte création d’un Service de protection des témoins. Le chapitre 79 de la loi relative à la protection des témoins est entré en vigueur le 1er septembre 2008. Les textes réglementaires visant à faciliter la mise en œuvre efficace et efficiente de cette loi ont été publiés au Journal officiel no 99 de 2011 et sont entrés en vigueur le 5 août 2011. Afin de renforcer l’administration de la justice, le Service de protection des témoins, la Commission internationale de juristes (Kenya) et le pouvoir judiciaire ont formulé des Règles de protection des témoins qui sont entrées en vigueur le 30 novembre 2015. Ces règles fournissent un cadre qui guide les cours, les tribunaux et les parties aux procès sur les mesures et les procédures judiciaires à appliquer pour assurer la protection des témoins. Certaines des mesures prises pour faire en sorte que les dispositions de la loi relative à la protection des témoins soient respectées sont à la charge des autorités judiciaires, par exemple en permettant que les témoins protégés déposent selon une procédure accélérée, en changeant le lieu du procès ou les dates d’audience, en supprimant les renseignements permettant d’identifier les témoins protégés dans les dossiers judiciaires et en entendant les témoins protégés à huis clos. Les autres mesures de protection accordées aux témoins menacés sont notamment, mais pas uniquement, la réinstallation, la protection physique et armée, le changement d’identité et le recours à des mesures visant à cacher l’identité des témoins.

109.La loi relative à la protection des témoins a été modifiée en 2016 afin d’assurer sa conformité avec la Constitution. Ainsi, la définition d’un témoin a été modifiée comme suit : « une personne qui a fait une déclaration ou accepté de témoigner au sujet d’une infraction ou dans le cadre d’une procédure pénale au Kenya ou à l’étranger et qui nécessite une protection compte tenu d’une menace ou d’un danger existants ». Le Gouvernement a autorisé ces modifications pour assurer le bon fonctionnement du Service et pour prévoir des arrangements de protection réciproque avec d’autres États ou organisations étrangères et des juridictions internationales.

110.Le Service, entre les années financières 2016/17 et 2017/18, a reçu 299 nouvelles demandes d’admission au programme de protection des témoins, dont 132 ont été accordées et 131 closes à l’issue d’une intervention et de conseils appropriés ; 112 témoins ont témoigné dans le cadre du programme de protection, et 101 témoins ont quitté le programme de protection et ont été réinstallés. En outre, le Service a amélioré son efficacité en organisant des campagnes et des ateliers de sensibilisation par l’intermédiaire des cours, des tribunaux et des autres acteurs de l’administration de la justice. Ces initiatives ont entraîné une augmentation des signalements et des demandes de protection des témoins.

111.En 2016/17, les dépenses du Service se sont élevées à 394 530 943 shillings kényans (environ 3,8 millions de dollars É.-U.) selon la comptabilité d’exercice, et 370 617 567 shillings kényans (environ 3,7 millions de dollars É.-U.) pour l’année 2014/15. Pour l’exercice 2016/17, l’Agence a été dotée d’environ 4,1 millions de dollars É.-U. Les fonds ne sont toutefois pas suffisants pour permettre la décentralisation et l’expansion des services de protection des témoins.

Article 14

Réponse aux questions posées au paragraphe 30 a) à h) de la liste de points

112.La loi relative à la protection des victimes a été promulguée en 2014 pour mettre en œuvre les dispositions constitutionnelles sur la protection des victimes de crimes et d’abus de pouvoir. Cette loi prévoit en outre des réparations et des indemnisations pour les victimes, y compris pour les victimes de tortures et de mauvais traitements. Les victimes doivent avoir accès à de meilleures informations et à des services d’aide et doivent obtenir des réparations et des indemnités de la part des auteurs des infractions. Son article 13 garantit aux victimes le droit de saisir la justice en tant que plaignants. Conformément à son article 15, les victimes ont droit à la justice réparatrice.

113.Un conseil de protection des victimes a été créé en 2017, en application de l’article 31 (par. 1) de la loi y relative. Le Conseil coordonne les activités entre les institutions chargées de protéger les victimes de crimes, et met en œuvre des programmes de prévention, de protection et de réadaptation à l’intention des victimes de la criminalité. Des projets de règles et de règlements ont été rédigés pour rendre opérationnel le cadre juridique et guider les tribunaux dans le traitement des affaires de victimes de crimes et d’abus de pouvoir.

114.Une charte des droits des victimes, qui énonce de manière exhaustive tous les droits reconnus à celles-ci, a été établie par le Conseil. La Charte décrit les rôles des forces de police, des agents de probation, des procureurs et des victimes, depuis le stade du signalement, en passant par l’enquête, et jusqu’au procès ou à l’engagement de poursuites. La Charte a été approuvée par les parties prenantes et est en attente de publication au Journal officiel.

Article 15

Réponse aux questions posées au paragraphe 31 de la liste de points

115.Tout élément de preuve obtenu par le biais d’aveux recueillis de manière illicite est irrecevable devant les tribunaux. En outre, dans la pratique, la plupart des procureurs ne se fondent plus sur les aveux comme seuls éléments de preuve dans une affaire, car ces éléments sont très peu fiables. Le pouvoir judiciaire ne possède pas de données concernant les affaires rejetées au motif que les aveux avaient été obtenus illégalement. Cette lacune peut être résolue en organisant davantage de séances de formation et de sensibilisation à l’intention des membres de l’appareil judiciaire sur les données spécifiques à recueillir notamment en ce qui concerne les affaires de torture.

Article 16

Réponse aux questions posées au paragraphe 32 de la liste de points

116.Le Gouvernement kényan accepte les obligations juridiques que lui font divers traités de respecter et de protéger le droit à la vie, le droit à la sécurité et le droit de ne pas être soumis à des tortures et autres peines ou traitements cruels, inhumains et dégradants. Cette protection trouve sa pleine expression dans la Constitution du Kenya. La Constitution garantit en particulier la liberté et la sécurité de la personne, protège le droit à la vie et interdit la torture ainsi que les traitements cruels, inhumains ou dégradants. L’article 49 (par. 1) c)) de la Constitution garantit le droit de l’accusé en matière de communication.

117.Au cours de la période considérée, trois ONG ont été interdites dans le cadre de la lutte contre les organisations de la société civile accusées d’opérer en marge de la loi et de financer le terrorisme. Les organisations Muslim for Human Rights (Muhuri), Haki Africa et Agency for Peace and Development ont été radiées des registres d’immatriculation et interdites au Kenya après que le Conseil de coordination des ONG a annulé leur certificat d’agrément. Les noms de ces trois organisations ont été publiés au Journal officiel par l’Inspecteur général de la police comme étant soupçonnées de soutenir les activités d’Al-Shabaab. La décision de publier leurs noms a été prise après l’attentat terroriste perpétré en avril 2016 contre l’Université de Garissa, dans lequel 148 personnes ont trouvé la mort.

Réponse aux questions posées au paragraphe 33 de la liste de points

118.La loi portant modification des lois relatives à la sécurité a été adoptée en 2014 à la suite de la vague d’attentats terroristes sur des cibles civiles et de la montée de la pression de l’opinion publique pour mettre fin à ces attaques. En 2016, certains articles de la loi ont été déclarés inconstitutionnels au motif qu’ils constituaient une violation de la liberté d’expression et des médias, des droits de l’accusé et du principe de non-refoulement consacré par la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés. La loi fait actuellement l’objet d’une révision pour trouver un point d’équilibre entre les impératifs de la sécurité et ceux des libertés civiles à l’ère du terrorisme.

119.L’article 27 de la Constitution protège les citoyens contre tout type de discrimination. Une réforme du Code pénal est en cours afin de l’aligner sur les dispositions de la Constitution kényane de 2010.

120.La loi de 2014 relative aux personnes privées de liberté reconnaît les besoins particuliers des personnes intersexuées. En son article 10, elle prévoit expressément qu’une personne intersexe privée de liberté a le droit de choisir d’être fouillée par un homme ou une femme. Afin de veiller à ce que les personnes intersexuées restent protégées, la loi prévoit en outre que celles-ci doivent être placées dans des cellules séparées.

121.En mai 2017, le Procureur général (Attorney General) a constitué un groupe de travail chargé des réformes politiques, juridiques, institutionnelles et administratives relatives aux personnes intersexes au Kenya. L’une des principales tâches de ce groupe de travail est de formuler des recommandations sur des réformes approfondies pour protéger les intérêts des personnes intersexes.

Réponse aux questions posées au paragraphe 34 de la liste de points

122.La stigmatisation est un problème majeur pour les personnes souffrant de maladie mentale, car elle les empêche de demander des soins et contribue à des relations difficiles avec les amis, les collègues, les employeurs, les propriétaires de leur logement et les forces de l’ordre. Le Gouvernement tient donc à lutter contre la stigmatisation associée à la maladie mentale, en tant qu’étape essentielle dans la prévention et l’intervention précoce en matière de troubles mentaux et dans l’amélioration de la qualité de vie des personnes souffrant de ces troubles. La santé mentale est un élément déterminant de la santé en général et du développement socioéconomique ; elle requiert une approche multidisciplinaire et intersectorielle, car les interventions menées en matière de santé mentale touchent d’autres secteurs.

123.La Politique de santé mentale a été lancée en mai 2016 pour faire reculer significativement ce type de maladie au Kenya, conformément au plan national « Kenya Vision 2030 » et à la Constitution du pays. Cette politique fournit un cadre d’interventions pour l’adoption de réformes en matière de santé mentale et vise à répondre aux difficultés systématiques et aux nouvelles problématiques et à alléger le fardeau des problèmes de santé mentale et des troubles mentaux. En outre, les deux documents élaborés par le Kenya, à savoir Stratégie pour la santé mentale 2017-2021 (« Kenya Mental Health Strategy 2017-2021 ») et Politique mentale 2015-2030 (« Kenya Mental Health Policy 2015-2030 »), sont conformes au plan « Kenya Vision 2030 », à la Constitution kényane et au Plan d’action global pour la santé mentale 2013-2020 ; ils aideront à guider le pays vers la réalisation du troisième objectif de développement durable.

Autres questions

Réponse aux questions posées au paragraphe 35 de la liste de points

124.L’un des problèmes mondiaux les plus graves aujourd’hui est celui du terrorisme. Le Kenya a connu une vague d’attentats terroristes contre des cibles civiles, et l’opinion publique a accentué sa pression pour mettre fin à ces attaques. La question s’est posée de savoir si les personnes soupçonnées de terrorisme pouvaient bénéficier d’une libération sous caution, les procureurs faisant valoir que celles-ci risquent de prendre la fuite. Toutefois, les impératifs constitutionnels sont tels que toutes les personnes arrêtées ont le droit d’être libérées sous caution dans des conditions raisonnables dans l’attente de leur procès. Il n’en reste pas moins que ce droit n’est pas absolu, et la Constitution précise « […] à moins qu’il n’existe des raisons impérieuses » justifiant de ne pas accorder le droit à la mise en liberté sous caution. La jurisprudence relative à la libération sous caution reflète la mise en balance des droits fondamentaux de la personne, des droits des victimes et de la sécurité de l’État. Ce qui constitue des raisons impérieuses est une question laissée à l’appréciation des juges. Le juge doit trancher cette question au cas par cas en tenant compte de la situation qui prévaut dans le pays et de l’intérêt public. Dans l’affaire Hassan Mahat Omar & autre c .  République, Haute Cour de Nairobi, révision pénale no 31 de 2013, les auteurs du recours (un couple marié) étaient accusés de posséder des grenades qui auraient été découvertes dans leur maison. Le juge de première instance a rejeté toutes les raisons invoquées par le ministère public pour démontrer que les accusés ne pouvaient pas bénéficier d’une libération sous caution. Le juge a considéré que les raisons avancées par le ministère public n’étaient pas suffisamment impérieuses pour justifier le refus de libération sous caution.

125.Dans l’affaire Abdikadir Aden Alias Tullu & autres c .  République, Haute Cour de Meru, requête pénale no 16 de 2014, les demandeurs étaient accusés de possession d’articles liés au terrorisme. Le juge, en concluant qu’il n’existait aucune raison impérieuse justifiant de refuser leur libération sous caution, a déclaré que « l’article 19 (par. 3) a)) de la Constitution dit très clairement que les droits et libertés fondamentales inscrits dans la Charte des droits sont garantis à toute personne et que chacun peut les exercer. L’article 49 (par. 1) h)) de la Constitution énonce les limitations auxquelles ces droits et libertés sont soumis et qui peuvent être ainsi résumées : « à moins qu’il n’existe des raisons impérieuses justifiant de refuser la libération sous caution ». Il incombe au ministère public d’établir l’existence de raisons impérieuses. Dans cette affaire, le ministère public a seulement avancé que les demandeurs avaient à répondre d’accusations liées au terrorisme. Le mot « terrorisme » suscite sans aucun doute la peur voire la terreur. Toutefois, le ministère public doit être en mesure de démontrer ce qui constitue précisément une raison impérieuse. Ses arguments en ce sens doivent reposer sur un fondement convaincant ou tangible. En l’espèce, aucun fondement convaincant ou tangible n’a été démontré ou présenté devant la Cour. Pour cette seule raison, le juge a considéré qu’il n’existait aucune raison impérieuse justifiant de refuser la libération sous caution demandée par les accusés.

126.En 2014, les lignes directrices régissant la libération sous caution sont entrées en vigueur pour éliminer les disparités en matière de mise en liberté sous caution des personnes accusées d’infraction et pour guider les policiers et magistrats dans l’application de lois prévoyant la libération sous caution.

Réponse aux questions posées au paragraphe 36 de la liste de points

127.Le Bureau du Procureur général/Ministère de la justice a communiqué la demande du Rapporteur spécial sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants aux organismes compétents.

Renseignements d’ordre général

Réponse aux questions posées au paragraphe 37 de la liste de points

128.Au fil des ans, le Gouvernement kényan a pris diverses mesures afin de prévenir les violations commises par la police. À cet égard, les réformes globales recommandées par le Groupe de travail national sur la réforme de la police constitué par le Président en 2009, conformément à la Constitution, ont été concrétisées par les mesures suivantes :

a) Autorité indépendante de contrôle de la police

129.La surveillance civile sur la police est impérative pour garantir que le secteur de la sécurité est soumis au contrôle et à la gouvernance démocratiques. L’Autorité indépendante de contrôle de la police, créée par la loi de 2011 y relative, revêt donc une importance cruciale en ce qu’elle exerce des fonctions indispensables de surveillance et de responsabilisation de la police. Cette Autorité est autorisée à effectuer des visites d’inspections dans les locaux de la police, y compris dans les lieux de détention placés sous le contrôle de la Police nationale. L’Autorité est également habilitée à enquêter sur tous les décès et préjudices graves survenus ou présumés être survenus du fait d’actes policiers. En tant que de besoin, elle fournit des renseignements pertinents pour permettre aux victimes d’agissements illicites de la police d’engager une action civile afin d’obtenir une indemnisation pour les blessures, préjudices et pertes de revenus subis. Elle joue un rôle majeur dans la restauration de la confiance du public dans la police.

b) Service de la Police nationale

130.Le service de la Police nationale a été créé par la loi de 2011 sur la Police nationale. Le service a l’obligation constitutionnelle de former son personnel au respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de la dignité de la personne humaine. La police doit se conformer aux normes constitutionnelles concernant les droits de l’homme et les libertés fondamentales. La loi afférente définit et pénalise les actes de torture, ainsi que toutes les peines et tous les traitements cruels, inhumains ou dégradants commis par les policiers, et fixe les sanctions applicables.

131.À cette fin, un programme de formation comportant des sujets d’examen relatifs à la torture et aux mauvais traitements a été préparé, et plus de 18 000 policiers ont suivi ce module.

c) Code de conduite de la police kényan e

132.Ce code définit les règles de déontologie applicables aux policiers.

d)Loi de 2017 sur la prévention de la torture

133.Cette loi met en place un cadre complet et cohérent visant à prévenir, interdire et réprimer les actes de torture et les autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, et à permettre aux victimes de la torture d’obtenir réparation, conformément à la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

e)Loi sur le service national du Coroner

134.La loi de 2017 sur le service du Coroner a été promulguée. Cette loi porte création du service national du Coroner, qui aura pour mission d’enquêter dans les meilleurs délais sur les causes des décès survenus dans les cas suivants : lorsque la victime est décédée de mort violente ou non naturelle ; lorsque les causes d’un décès soudain sont inconnues ; en cas de décès en garde à vue ou en prison ; lorsque le décès intervient en un lieu ou dans des circonstances tels qu’il convient d’ouvrir une enquête, conformément à d’autres lois en vigueur. Cette loi prévoit en outre que chaque fois qu’une personne décède en détention ou en garde à vue, le responsable du lieu informe aussitôt le coroner compétent dans le secteur duquel le décès est survenu, le corps ne pouvant être inhumé sans une autorisation délivrée par ce coroner.