Communication présentée par :

G. D. (représentée par un conseil, Milena Kadieva)

Victime(s) présumée(s) :

L’auteure

État partie :

Bulgarie

Date de la communication :

5 mars 2019 (date de la lettre initiale)

Références  :

Communiquées à l’État partie le 24 mai 2019 (non publiées sous forme de document)

Date de la décision :

25 octobre 2021

Objet :

Violence domestique ; discrimination à l’égard des femmes ; égalité devant la loi

Question(s) de procédure :

Griefs insuffisamment étayés

Article(s) de la Convention :

1, 2 [al. c)], 5 [al. b)], 15 et 16

Article(s) du Protocole facultatif :

4 [par. 2 c)]

* Adoptée par le Comité à sa quatre-vingt-huitième session (18 octobre-12 novembre 2021).

** Les membres du Comité dont le nom suit ont participé à l ’ examen de la communication  : Gladys Acosta Vargas, Hiroko Akizuki, Tamader Al-Rammah, Nicole Ameline, Marion Bethel, Leticia Bonifaz Alfonzo, Louiza Chalal, Corinne Dettmeijer-Vermeulen, Naéla Gabr, Hilary Gbedemah, Nahla Haidar, Dalia Leinarte, Rosario G. Manalo, Aruna Devi Narain, Ana Peláez Narváez, Bandana Rana, Rhoda Reddock, Natasha Stott Despoja, Franceline Toé-Bouda, Lia Nadaraia et Elgun Safarov. Conformément au paragraphe 1) de l ’ article 60 du Règlement intérieur du Comité, Genoveva Tisheva n ’ a pas pris part à l ’ examen de la communication.

L’auteure de la communication est G. D., de nationalité bulgare, née en 1976. L’auteure et son ex-mari, V. Z., sont les parents de deux enfants mineurs, D. Z. et M. Z., nés en 2004 et en 2008, respectivement. Sa plainte porte sur la violation par la Bulgarie de l’alinéa c) de l’article 2, de l’alinéa b) de l’article 5 ainsi que des articles 15 et 16, lus conjointement avec l’article premier, de la Convention. L’auteure affirme qu’en omettant de la traiter avec égalité devant la loi, l’État partie ne leur a pas garanti, à elle et à ses enfants, une protection effective contre la violence domestique et que, par conséquent, ses droits de garde à l’égard de ses enfants ont été révoqués et ont été attribués au père prétendument violent. L’auteure demande au Comité d’exiger de l’État partie qu’il suspende la procédure judiciaire engagée pour faire appliquer la décision finale du tribunal accordant la garde de ses enfants à leur père, et qu’il veille à ce que les rencontres de ses enfants avec leur père se déroulent dans un environnement sûr, par exemple sous la supervision d’un spécialiste de l’enfance dans un centre de contact. Le Protocole facultatif est entré en vigueur en Bulgarie le 20 décembre 2006. L’auteure est représentée par un conseil, Milena Kadieva.

Rappel des faits présentés par l’auteure

2.1Le 3 octobre 2012, la Cour de district de Sofia a confirmé l’accord conclu par l’auteure et son mari dans le cadre de la procédure de divorce, à l’issue de laquelle leur mariage a été dissous et les droits de garde concernant leurs enfants mineurs ont été attribués à la mère. Le père s’est vu accorder un droit de visite et ordonner de verser chaque mois une pension alimentaire.

2.2À une date non précisée, l’ex-mari de l’auteure a intenté une procédure judiciaire contre cette dernière pour obtenir les droits de garde de leurs deux enfants mineurs et l’obliger à lui verser une pension alimentaire. Il a affirmé dans sa requête que l’auteure avait épousé un autre homme et commencé à vivre avec lui juste après leur divorce, sans laisser le temps aux enfants de s’adapter à la nouvelle situation. Selon lui, le nouveau mari logeait dans la chambre des enfants et le couple obligeait ces derniers à l’appeler « papa ». Il a ajouté que l’auteure éloignait ses enfants de lui et faisait obstacle au déroulement de ses rencontres régulières avec eux. Il a soutenu, en outre, que leur fille M. Z. a été victime d’« actes obscènes » de la part de son grand-père maternel.

2.3Le 28 avril 2016, l’auteure a présenté par écrit son plaidoyer à la Cour, dans lequel elle a déclaré que durant son mariage avec V. Z., elle et les enfants ont subi des violences physiques et psychologiques de la part de son ex-mari, ce qui explique sa demande de divorce. La violence s’est poursuivie après le divorce lors des rencontres prévues entre les enfants et leur père, mais l’auteure continuait malgré tout de dire à ses enfants qu’il était important qu’ils restent en contact avec ce dernier. Cependant, à un moment donné, elle ne voulait plus obliger ses enfants à se rendre aux rencontres, car ils s’y opposaient et en revenaient toujours affligés. Pour ces raisons, l’auteure a fait une demande de soutien psychologique auprès de la Fondation de l’Association Animus afin de surmonter le traumatisme prétendument causé par son ex-mari pendant et après leur mariage.

2.4Le 1er juin 2016, la Cour de district de Sofia s’est prononcée en faveur de V. Z., lui accordant la garde des enfants et ordonnant à l’auteure de lui verser une pension alimentaire. La Cour a estimé que des changements importants étaient survenus dans la situation des parties, qui nécessitaient de revoir les dispositions du jugement initial, daté du 3 octobre 2012, en ce qui concerne l’exercice des droits de garde. La Cour a notamment fait valoir que l’auteure n’avait pas respecté la décision judiciaire établissant les droits de visite du père, qu’elle avait éloigné les enfants de leur père, qu’elle avait contracté un nouveau mariage et que l’environnement des enfants n’était pas sûr à cause des actes de leur grand-père maternel.

2.5En 2016, à une date non précisée, l’auteure a interjeté appel devant la Cour municipale de Sofia, faisant principalement valoir que la Cour s’était montrée sélective en se fondant uniquement sur les éléments de preuve produits par son ex-mari. L’auteure a soutenu que la décision de première instance avait négligé les déclarations des enfants, qui étaient étayées par des rapports psychologiques, selon lesquelles ils avaient été victimes de violence domestique de la part de leur père. Elle a déclaré avoir systématiquement respecté les droits de visite du père. Cependant, à certains moments, le père n’avait pas pu voir les enfants parce qu’eux-mêmes refusaient d’avoir des contacts avec lui en raison de son comportement violent à leur endroit. L’auteure a également ajouté que les problèmes de communication entre le père et les enfants étaient causés par le comportement du père, et non le sien. Elle a affirmé entretenir un lien affectif très fort avec ses enfants, ce que les avis d’experts avaient corroboré. Elle a déclaré à la Cour que son ex-mari avait engagé une action en justice contre elle par vengeance, car elle s’était remariée et avait eu un autre enfant avec son nouveau mari. Son ex-mari avait également réussi à faire prononcer contre elle une ordonnance de protection immédiate, selon laquelle les enfants auraient dû être confiés à leur père, étant donné que l’auteure et son nouveau conjoint étaient soupçonnés d’user de violence contre les enfants. Comme l’auteure devait continuellement composer avec les fausses allégations, les insultes et la violence domestique de son ex-mari, elle s’était réfugiée dans un centre d’aide aux victimes pour femmes et enfants, alors que l’action contre elle et son nouveau mari était en cours. Bien que l’ordonnance de protection ait été révoquée ultérieurement, l’ex-mari de l’auteure a continué à s’en prévaloir devant les différentes institutions sociales. En outre, l’auteure a indiqué que son père était délirant à cause d’un traumatisme subi dans son enfance et que, même si sa culpabilité n’avait pas été prouvée, elle avait tout fait pour protéger ses enfants dès qu’elle eut pris connaissance du comportement présumé de son père, et les avait éloignés de lui.

2.6L’auteure a invoqué son droit de contracter mariage, qui lui est garanti par l’article 12 de la Convention européenne des droits de l’homme et l’article 16 de la Convention, pour contester la conclusion du tribunal de première instance selon laquelle son nouveau mariage avait eu un impact négatif sur la vie des enfants. Elle a également déclaré que le tribunal national n’avait pas tenu compte de l’intérêt supérieur des enfants, qui souhaitaient rester avec elle et seraient traumatisés s’ils en étaient séparés.

2.7Le 7 novembre 2017, la Cour municipale de Sofia a confirmé la décision rendue par la Cour de district. La Cour d’appel a admis les faits tels qu’ils lui ont été présentés par le tribunal de première instance, mais aurait omis d’évaluer les éléments de preuve produits par l’auteure ou de tenir dûment compte de la déclaration de D. Z. devant le tribunal concernant la violence domestique dont lui et sa sœur avaient été victimes. L’auteure a formé un pourvoi en cassation contre cette décision.

2.8L’audience à huis clos devant la Cour suprême de cassation a été fixée au 9 septembre 2018. À la demande de V. Z., qui a affirmé que les enfants n’étaient pas en sécurité avec l’auteure, l’audience a été avancée au 15 mai 2018. L’auteure n’a pas été avisée de la demande de V. Z. et n’a donc pas eu la possibilité de faire valoir ses prétentions à cet égard. Le 7 juin 2018, la Cour suprême a rejeté le pourvoi de l’auteure. La Cour a estimé, entre autres, que contrairement à ce que l’auteure avait avancé, le tribunal d’instance inférieure ne s’était pas écarté de la jurisprudence de la Cour suprême dans son évaluation du possible éloignement des enfants de leur père, de l’allégation de non-respect par la mère de la décision établissant les droits de visite du père, ainsi que de l’intérêt supérieur des enfants, compte tenu des circonstances particulières de l’espèce.

2.9L’auteure a ensuite déposé un recours privé demandant qu’il soit fait droit au pourvoi en cassation. Toutefois, le tribunal n’a pas examiné cette requête. Le 22 octobre 2018, l’auteure a réitéré sa demande, invoquant le risque présumé de suicide des enfants.

2.10À deux reprises, V. Z. a tenté d’emmener les enfants loin de l’auteure, conformément à la décision finale du tribunal, mais les enfants ont refusé de la quitter.

Teneur de la plainte

3.1L’auteure soutient que l’État partie a violé les droits qu’elle tient de l’alinéa c) de l’article 2, de l’alinéa b) de l’article 5 et des articles 15 et 16, lus conjointement avec l’article premier de la Convention, compte tenu également de la recommandation générale no 19 (1992) sur la violence à l’égard des femmes, de la recommandation générale no 21 (1994) sur l’égalité dans le mariage et les rapports familiaux, de la recommandation générale no 28 (2010) sur les obligations fondamentales des États parties découlant de l’article 2 de la Convention, de la recommandation générale no 33 (2015) sur l’accès des femmes à la justice et de la recommandation générale no 35 (2017) sur la violence à l’égard des femmes fondée sur le genre, portant actualisation de la recommandation générale no 19 du Comité. Elle affirme que l’État partie a manqué aux obligations positives qui lui incombent en vertu de la Convention, en ne leur garantissant pas, à elle et à ses enfants, une protection effective contre la violence domestique. Elle fait valoir, plus particulièrement, qu’elle n’a pas reçu un traitement égalitaire devant la loi et que, par conséquent, ses droits de garde à l’égard de ses enfants ont été révoqués et ont été attribués au père prétendument violent.

3.2L’auteure demande au Comité d’exiger de l’État partie qu’il suspende la procédure judiciaire engagée pour faire appliquer la décision finale du tribunal accordant la garde de ses enfants à leur père, et qu’il veille à ce que les rencontres de ses enfants avec leur père se déroulent dans un environnement sûr, par exemple sous la supervision d’un spécialiste de l’enfance dans un centre de contact.

Observations de l’État partie sur la recevabilité et sur le fond

4.1L’État partie a présenté ses observations dans une note verbale datée du 1er juillet 2019. Il soutient que la Direction régionale de l’action sociale de la ville de Sofia a été invitée à procéder à une enquête et à fournir des informations au sujet des allégations de l’auteure concernant la violence domestique et le comportement violent perpétrés par son ex-mari. Les organes chargés du dossier des deux enfants, à savoir les Départements de la protection de l’enfance de la Direction de l’action sociale de Lozenets et de la Direction de l’action sociale de Slatina, ont pris des mesures en vue d’offrir soutien, conseils et assistance, selon leurs compétences respectives. Des services de consultation et de soutien psychologique ont été fournis aux parents et aux enfants par l’intermédiaire d’un prestataire de services sociaux.

4.2En réponse aux nombreuses plaintes, demandes d’aide et requêtes de l’auteure et de son ancien mari, les travailleurs sociaux ont mené l’enquête qui s’imposait, sous réserve des dispositions de l’article 14 du règlement d’application de la loi sur la protection de l’enfance, en recueillant des renseignements auprès d’un large éventail de sources. Ils n’ont trouvé aucune preuve d’une quelconque forme de violence du père à l’égard des deux enfants.

4.3Le 1er juin 2016, la Cour de district de Sofia a attribué les droits de garde des deux enfants à leur père. La Cour municipale de Sofia a confirmé le jugement de première instance, contre lequel l’auteure a par la suite formé un pourvoi devant la Cour suprême de cassation. L’arrêt du 7 juin 2018 de la Cour suprême de cassation interdit tout autre recours. L’auteure n’a pas respecté le jugement, puisqu’elle omet de se présenter au Département de la protection de l’enfance de Lozenets et qu’elle correspond avec les travailleurs sociaux par courriel seulement.

4.4Le tribunal de première instance a exposé de manière exhaustive les motifs qui sous-tendent l’attribution au père des droits de garde des enfants, en prenant en considération les intérêts des enfants, ainsi que tous les éléments de preuve au dossier recueillis au cours des procédures en première instance. Les évaluations des deux experts en psychologie judiciaire présentées dans le cadre de la procédure d’appel, combinées aux éléments de preuve recueillis en première instance, ont confirmé la légitimité de la décision du 1er juin 2016. La Cour d’appel s’est dite parfaitement d’accord avec l’avis du témoin expert selon lequel les deux parents devraient revoir leur comportement antérieur et déployer tous les efforts possibles pour maintenir une communication suffisamment bonne entre eux pour que les enfants puissent communiquer pleinement avec chacun d’eux ; il s’agit là d’un facteur important pour le développement d’individus matures sur le plan émotionnel.

4.5Les trois tribunaux ont jugé raisonnable de supposer que la situation a changé et de modifier en conséquence les droits de garde des enfants. Leur conclusion tenait compte de l’éloignement des enfants de leur père, de l’interruption des contacts entre eux et les proches de ce dernier et du non-respect du mode de contact depuis plus de deux ans. Parallèlement, le père a les ressources nécessaires pour répondre aux besoins de ses enfants ; il leur a offert de bonnes conditions de vie qui respectent leurs préférences et leurs intérêts et il n’empiète pas sur leur espace personnel.

4.6Dans la grande majorité des procès relatifs à la garde des enfants où aucun accord préalable n’a été établi entre les parents, la garde est confiée à la mère, comme ce fut le cas après le divorce de l’auteure et de V. Z. Le transfert des droits parentaux au père était une décision objective, dans la mesure où la mère contrevenait sans cesse aux décisions de la justice. Les allégations d’inégalité de traitement des femmes et des hommes devant la loi négligent le fait que le comportement de l’auteure a été jugé malsain et préjudiciable pour les enfants, tant par les services sociaux que par les psychologues, et que cette dernière enfreint constamment les prescriptions de la cour.

4.7L’État partie prête une attention particulière à l’égalité devant la loi et déploie depuis longtemps des efforts pour assurer l’égalité entre les sexes. La législation de base garantit la pleine parité entre les femmes et les hommes et traite ceux-ci sur un pied d’égalité dans toutes les sphères de la vie. La priorité est toujours accordée aux femmes, aux filles et aux mères. Toutefois, l’engagement de l’État partie à faire prévaloir l’intérêt supérieur de l’enfant prime, comme le démontrent les décisions des tribunaux dans cette affaire.

4.8Le travail des responsables des services sociaux et des tribunaux fait l’objet d’un contrôle et d’une vérification, et aucune violation de la loi ou des procédures n’a été constatée.

4.9En ce qui concerne le bien-fondé de la communication, l’État partie soutient que la promotion de l’égalité entre les femmes et les hommes et la non-discrimination sont des objectifs clés du programme directeur du gouvernement en matière de développement durable. L’État partie contribue grandement aux efforts conjoints déployés par l’Union européenne pour favoriser l’égalité des genres, le respect des droits de l’homme, l’autonomisation des femmes et des filles et l’élimination de la violence fondée sur le genre. Il poursuit les efforts qu’il déploie depuis longtemps déjà pour promouvoir l’égalité des genres en mettant constamment à jour sa législation interne, conformément aux normes et aux critères les plus élevés de l’Union européenne. À cet égard, une nouvelle loi portant spécialement sur l’égalité des sexes a été adoptée. La nouvelle loi garantit l’intégration des questions de genre dans l’ensemble des politiques, des stratégies et des programmes, ce qui constitue une autre condition préalable importante à la pleine réalisation des droits fondamentaux des femmes et des filles.

4.10D’après la Banque mondiale, dans son rapport intitulé Women, Business and the Law 2019, l’État partie figure parmi les pays qui affichent les meilleurs résultats au monde, avec un score de 93,75 points sur un maximum de 100. Il occupe, en outre, le premier rang mondial sur l’indice lié aux cadres juridiques et institutionnels qui définissent les possibilités économiques des femmes et qui conduisent à l’amélioration de l’égalité des genres.

4.11La même priorité est accordée à la défense et à la protection des droits de l’enfant. L’État partie défend fermement le principe selon lequel la famille est le meilleur environnement qui soit pour le développement de l’enfant, mais toujours après que l’intérêt supérieur de l’enfant a été dûment considéré, avec impartialité et professionnalisme.

4.12La famille de l’auteure requiert les services du système de protection de l’enfance depuis 2013. Initialement, le dossier des deux enfants a été traité par le Département de la protection de l’enfance de la Direction de l’action sociale de Serdika. Les services de protection de l’enfance ont pris en charge leur dossier à la suite d’un signalement fait par la Fondation de l’Association Animus, après que l’auteure eut rapporté qu’elle et les enfants avaient subi des violences physiques et psychologiques de la part de son ex-mari pendant leur mariage et après sa dissolution. L’ex-mari de l’auteure a également signalé, à son tour, que les enfants avaient été victimes de violences psychologiques de la part de leur mère. Pendant un certain temps, l’auteure et les enfants ont séjourné dans un centre d’aide aux enfants victimes de violence, sans y avoir été aiguillés.

4.13Depuis le 11 juillet 2015, le dossier est sous la responsabilité du Département de la protection de l’enfance de la Direction de l’action sociale de Lozenets. Le 30 juillet 2015, une rencontre a été organisée dans les locaux du Département en présence de D. Z., M. Z., l’auteure, son mari actuel et leur nouveau-né. L’auteure, D. Z. et M. Z. ont déclaré vouloir continuer à bénéficier des services sociaux offerts par la Fondation de l’Association Animus, et l’auteure a présenté une demande à cet effet. V. Z. utilisait les services du centre d’aide sociale de l’Institut d’activités et de pratiques sociales et ne voulait pas que la Fondation de l’Association Animus intervienne auprès de lui ou de ses enfants. Une ordonnance relative aux services sociaux a été délivrée à l’auteure afin qu’elle et ses enfants se prévalent des services d’assistance sociale du Département de la protection de l’enfance, mais a par la suite été annulée à l’issue d’une décision rendue le 28 février 2018 par le tribunal administratif de la ville de Sofia, après que l’auteure en eut fait appel. La Direction de l’action sociale de Slatina a interjeté appel devant la Cour suprême administrative, mais une requête de la Direction régionale de l’action sociale de la ville de Sofia a révélé qu’aucune décision n’a encore été rendue. À l’heure actuelle, l’auteure et son ex-mari n’utilisent aucun service social, puisqu’ils ne parviennent pas à s’entendre sur la question.

4.14En ce qui concerne les procédures judiciaires (affaires civiles no 11745/2015 et no 12502/2016 inscrites au rôle de la Cour de district et de la Cour municipale de Sofia, respectivement), l’enquête réalisée a démontré que les Directions de l’action sociale de Lozenets et de Slatina ont été appelées à produire des rapports sociaux, conformément à l’article 15 de la loi sur la protection de l’enfance.

4.15Le rapport social concernant l’affaire civile no 11745/2015 a été produit par la Direction de l’action sociale de Lozenets à partir des rencontres et des entretiens tenus avec l’auteure et les enfants. Dans ce rapport, la Direction conclut que [traduction] « la mère est capable de répondre adéquatement aux besoins et aux intérêts des enfants, tout en respectant leur personnalité et les attributs de chacun ; les enfants sont attachés à la mère sur le plan affectif ; les contacts entre les enfants et le père ont été interrompus ». Il est en outre précisé, dans le rapport social, que la mère et le père affirment tous deux vouloir et pouvoir fournir des soins adéquats aux enfants, et que les parents ne se rendent pas compte que leur comportement compromet le développement mental et affectif de ces derniers. Selon l’avis émis dans le rapport, il n’est pas dans l’intérêt des enfants que la relation parent-enfant soit rompue ni que les enfants soient séparés d’un de leurs parents, et les parents doivent être orientés vers la médiation.

4.16En ce qui concerne l’affaire civile no 12502/2016 inscrite au rôle de la Cour municipale de Sofia, la Direction de l’action sociale de Lozenets a produit un rapport social en s’appuyant sur des renseignements concernant les enfants qui datent d’avril 2017, étant donné que ces derniers habitaient à Slatina avant cette date. Ce rapport fait état des renseignements recueillis lors des rencontres avec les parents et les enfants, ainsi que des visites au domicile où ces derniers ont été élevés. Il comprend toute l’information relative au dossier de D. Z. et de M. Z., décrit leur attachement affectif à leur mère et à son second mari et précise que la communication avec V. Z. et la famille élargie du côté paternel a été interrompue. Dans ce rapport social, il est également indiqué que la mère est tenue de respecter le mode de contact entre le père et les enfants qui lui a été ordonné, et qu’il n’est pas dans l’intérêt des enfants de les impliquer dans le conflit des parents. Le rapport a été notifié à l’auteure et à son ex-mari, comme en font foi leurs signatures. V. Z. a indiqué que le rapport ne reflétait pas suffisamment [traduction] « la manipulation et l’éloignement des enfants ». L’auteure a indiqué que [traduction] « les enfants voient régulièrement leur père selon le mode de contact ordonné. Lors de ces rencontres, des conflits surviennent, provoqués par V. Z. »

4.17Une décision rendue dans l’affaire civile no 11745/2015 a ordonné la tenue de trois rencontres distinctes de deux heures et demie entre le père et chacun des deux enfants (soit six rencontres au total) en présence d’un tiers. Ces rencontres ont été décrites dans un rapport social rédigé par la Direction de l’action sociale de Slatina dans l’affaire civile no 12502/2016. Il est indiqué dans ce rapport qu’il est du ressort de la cour de se prononcer sur les droits de garde, le mode de contact entre les parents et les enfants et la pension alimentaire. Il y est aussi indiqué que [traduction] « la mère nie fermement avoir empêché les contacts selon le mode ordonné ». Le rapport décrit également les rencontres entre le père et les enfants, qui ont été ordonnées par le tribunal, et souligne que le père a fait preuve de tendresse et d’une attitude paternelle envers eux, et qu’aucun geste ou parole du père lors de ces rencontres ne peut être interprété comme un risque pour les enfants. Le rapport conclut que les enfants semblaient calmes durant les rencontres et qu’ils ont profité de l’occasion pour discuter normalement avec leur père.

4.18L’État partie fait valoir, en outre, qu’au moment où ces observations ont été formulées, l’auteure continuait de contrevenir à la décision du tribunal et ne coopérait pas avec les travailleurs sociaux. L’État partie souligne que dans les affaires de séparation, les parents ne devraient pas impliquer leurs enfants dans leur conflit et ne devraient pas donner une fausse image de la personnalité de l’autre parent aux enfants. Dans de telles situations, il incombe à l’État de soutenir les enfants et leur famille afin d’empêcher que le problème ne s’aggrave ou d’aider, en fait, à le résoudre, et toute action entreprise devrait être dans l’intérêt supérieur de l’enfant. Soutenir les parents et les enfants afin de maintenir des conditions optimales et de veiller ainsi à ce que ces derniers grandissent dans un environnement familial est l’une des principales tâches des organismes de protection de l’enfance, et les autorités compétentes s’efforcent avant tout de faire prévaloir les droits de l’enfant.

4.19Les responsables du dossier de M. Z. et de D. Z. ont pris des mesures pour offrir soutien, conseils et assistance aux parents et aux enfants concernés, en faisant appel aux ressources du prestataire de services sociaux. Dans le cadre du travail réalisé auprès des parents, des conseils leur ont été donnés sur les questions entourant l’éducation des enfants, les responsabilités parentales et le droit des enfants de rester en contact avec le parent qui n’a pas la garde. Lors de toutes leurs enquêtes, les responsables des Départements de la protection de l’enfance des Directions de l’action sociale de Lozenets et de Slatina, respectivement, ont pris des mesures pour offrir soutien, conseils et assistance aux enfants, à l’auteure et au père des enfants. Les interventions des représentants des Directions de l’action sociale et des membres de la magistrature ont tenu compte avant tout des intérêts généraux des enfants, vu la nécessité de trouver un juste équilibre et de donner la primauté au droit et au besoin naturel des enfants de communiquer avec leurs deux parents.

Commentaires de l’auteure sur les observations de l’État partie concernant la recevabilité et le fond

5.1L’auteure a fait part de ses commentaires le 16 mars 2020. De manière générale, elle souligne que l’État partie n’a pas réfuté ses allégations, notamment celle concernant la violation des droits qu’elle tient de l’alinéa c) de l’article 2, de l’alinéa b) de l’article 5 et des articles 15 et 16, lus conjointement avec l’article premier de la Convention, compte tenu également des recommandations générales nos 19, 21, 28, 33 et 35 du Comité, en raison du défaut de l’État partie de s’acquitter des obligations positives que lui impose la Convention et de garantir à elle et à ses enfants une protection effective contre la violence domestique en lui offrant un traitement égalitaire devant la loi. L’auteure affirme que l’État partie a aidé à ce que persiste une situation dans laquelle elle et ses enfants étaient victimes de violence domestique.

5.2L’auteure apporte plusieurs précisions et joint des documents à titre de preuve. Selon elle, l’État partie fait erreur lorsqu’il affirme [traduction] qu’« aucun document attestant d’une quelconque forme de violence du père à l’égard des deux enfants n’a été trouvé à l’issue des enquêtes réalisées ». Tous les avis émis concernant l’auteure, en tant que mère, et ses deux enfants par les psychologues qui ont travaillé auprès d’eux de 2013 à 2018 au Département de la protection de l’enfance de Serdika, au Département de la protection de l’enfance de Slatina, au Département de la protection de l’enfance de Lozenets, au Département de la protection de l’enfance de Plovdiv, à la Fondation de l’Association Animus et au centre d’aide aux victimes de violence domestique de la ville de Plovdiv corroborent et prouvent les violences domestiques commises par son ex-mari.

5.3Les Départements de la protection de l’enfance ont exigé qu’un soutien psychologique soit offert aux deux enfants pour traiter leur traumatisme causé par les violences domestiques qu’ils ont subies et ont demandé, notamment, une [traduction] « consultation psychologique pour enfants victimes de violence et leur famille » ; cependant, ils n’ont pas fourni aux tribunaux les avis écrits des psychologues.

5.4Le prestataire de services sociaux a envoyé des rapports d’activité réguliers aux Départements de la protection de l’enfance pour les informer des progrès accomplis dans le dossier des enfants. Cependant, les Départements de la protection de l’enfance ont caché l’information, tolérant ainsi les violences domestiques perpétrées par le père à l’encontre de ses enfants. Le prestataire de services sociaux a également envoyé des lettres d’avis à la Cour municipale de Sofia et à la Cour suprême de cassation, mais ces dernières ont fait fi de la violence domestique rapportée et ont traité l’affaire en dehors de ce contexte, la présentant plutôt comme un cas d’aliénation parentale.

5.5L’auteure a présenté aux tribunaux tous les documents relatifs aux violences domestiques perpétrées par le père à l’encontre de ses deux enfants. Elle soutient que les tribunaux ont ignoré complètement ces documents.

5.6L’auteure réfute, en outre, l’affirmation de l’État partie selon laquelle elle [traduction] « n’a pas respecté les jugements, puisqu’elle omet de se présenter au Département de la protection de l’enfance de Lozenets et qu’elle correspond avec les travailleurs sociaux par courriel seulement », et soutient que tous les documents appuient ses allégations : les travailleurs sociaux communiquent régulièrement avec elle et ses deux enfants et leur rendent visite à leur domicile. Ces visites sont rapportées dans les protocoles de visite et les comptes rendus pertinents, ainsi que dans les documents transmis aux différentes institutions.

5.7L’auteure conteste l’allégation de l’État partie voulant qu’elle soit coupable [traduction] « de l’éloignement des enfants de leur père, de l’interruption des contacts entre eux et leurs proches parents et du non-respect du mode de contact depuis plus de deux ans » puisque celle-ci n’est étayée d’aucune preuve. Elle explique qu’au contraire, les enfants et leur père entrent en contact régulièrement et respectent les dates des rencontres, et qu’elle n’assiste pas à ces dernières. Cependant, chaque fois, le père frappe les enfants, les menace de mort, les insulte, dénigre leur mère, et puis s’en va. Chaque fois, l’auteure signale immédiatement la situation aux institutions d’inspection, et leurs vérifications prouvent que les rencontres entre les enfants et leur père ont lieu et que le père les menace, les frappe et les insulte.

5.8L’auteure souligne qu’il existe des documents démontrant que le père s’est vu offrir à maintes reprises la possibilité, par les services sociaux, de rencontrer ses deux enfants dans un centre de contact. Le père a décliné ces offres, affirmant que le contact qu’il a avec ses enfants lui convient parfaitement. Cela dément l’affirmation de l’État partie selon laquelle la mère tente d’empêcher les contacts et éloigne les enfants. L’auteure s’efforce d’améliorer le contact des enfants avec leur père et demande que ce dernier soit dirigé vers un service social qui l’aidera à composer avec son agressivité et que ses rencontres avec les enfants aient lieu dans un centre de contact en présence d’un spécialiste agissant comme médiateur.

5.9L’auteure conteste l’allégation de l’État partie selon laquelle son comportement a été jugé [traduction] « malsain et préjudiciable pour les enfants ». Cette assertion n’est corroborée ni par les avis des psychologues des enfants, ni par les enquêtes de la police et du parquet, ni par les avis d’experts sur la capacité parentale de la mère, qui prouvent que les enfants sont élevés dans un excellent environnement et que la mère leur apporte des soins adéquats. Le bien-être des enfants est en outre attesté par leur réussite à l’école, leur participation à des activités périscolaires et les enquêtes des travailleurs sociaux. Les rapports sociaux indiquent que la mère a une excellente capacité parentale et que les enfants sont élevés avec grand soin et dévouement.

5.10En ce qui concerne l’affirmation de l’État partie selon laquelle [traduction] « il n’est pas dans l’intérêt des enfants d’être séparés d’un de leurs parents, et les parents doivent être orientés vers la médiation », l’auteure fait observer que depuis le début des procédures judiciaires, elle insiste pour que de telles rencontres de médiation aient lieu afin d’aider le père des enfants à composer avec son agressivité. Son ex-mari est celui qui refuse toute rencontre dans un espace protégé et toute médiation par un spécialiste. Il ne veut pas améliorer le contact qu’il a avec ses enfants ni travailler sur son problème d’agressivité. L’auteure s’étonne que les institutions de l’État partie ignorent cette réalité et lui reprochent à elle le fait que les enfants ont peur de leur père et ne veulent pas vivre avec lui.

5.11L’auteure dément également l’observation de l’État partie selon laquelle les parents des enfants n’ont pas recours aux services sociaux à l’heure actuelle. De 2013 à aujourd’hui, l’auteure a invariablement fait appel à un service social pour obtenir de l’accompagnement psychologique. Elle utilise ce service sur une recommandation du Département de la protection de l’enfance. Cependant, son ex-mari refuse de travailler sur son problème d’agressivité et ne veut pas accepter d’aide psychologique.

5.12L’auteure conteste et considère comme « totalement erronée » l’appréciation de l’État partie selon laquelle le père a les ressources nécessaires pour répondre aux besoins des enfants, leur a offert de bonnes conditions de vie qui respectent leurs préférences et leurs intérêts et n’empiète pas sur leur espace personnel. Dans le cadre des procédures relatives aux droits de garde, son ex-mari a affirmé en cour qu’il n’offrait pas aux enfants les conditions de vie nécessaires à leur éducation, mais qu’une fois que ceux-ci seraient à sa charge, il envisagerait alors la façon de leur aménager un espace. Il a donc admis que sept ans après le divorce, il n’avait pas encore fourni aux deux enfants un espace personnel. Les enfants, qui sont adolescents, ont besoin de leur espace, et il est inacceptable qu’ils partagent un lit avec leur père. Le père vit dans l’appartement de sa mère avec cette dernière et son frère aîné (âgé de 55 ans). L’appartement comprend deux chambres à coucher, occupées par sa mère et son frère, respectivement. Il n’a même pas sa propre chambre et dort sur le canapé du salon, où mange la famille. Lorsque les enfants lui rendent visite, ils sont obligés de dormir dans le même lit que leur grand-mère ou sur le canapé avec leur père.

5.13L’allégation voulant que l’ex-mari de l’auteure ait eu recours à un service social de l’Institut d’activités et de pratiques sociales est fausse. En fait, cette assertion cache la vérité, soit que ce n’est qu’à la Fondation de l’Association Animus que le père a consulté un psychologue qui a déclaré que ce dernier avait une capacité parentale très limitée et qui lui a recommandé de continuer à travailler avec un psychologue pour tâcher de s’améliorer.

5.14Selon l’auteure, il n’est pas vrai que les six rencontres prévues par la cour ont eu lieu dans une salle de l’Institut d’activités et de pratiques sociales et que [traduction] « les enfants semblaient calmes durant les rencontres et qu’ils ont profité de l’occasion pour discuter normalement avec leur père ». Après que les six premières rencontres eurent pris fin prématurément parce que les enfants étaient bouleversés par l’agressivité de leur père, ce dernier a refusé de se conformer à l’ordonnance de la cour et de participer aux six rencontres restantes avec ses enfants dans un environnement protégé, comme l’avait ordonné le tribunal.

5.15L’auteure juge immorale et totalement contraire à la réalité la déclaration de l’État partie voulant qu’il [traduction] « prête une attention particulière à l’égalité devant la loi [et que la] priorité est toujours accordée aux femmes, aux filles et aux mères ». Elle fait référence, à cet égard, aux observations finales du Comité concernant le huitième rapport périodique de la Bulgarie (CEDAW/C/BGR/CO/8).

Délibérations du Comité

Examen de la recevabilité

6.1Conformément à l’article 64 de son règlement intérieur, le Comité doit déterminer si la communication est recevable en vertu du Protocole facultatif. En application du paragraphe 4 de l’article 72 de son règlement intérieur, il doit prendre cette décision avant d’examiner la communication quant au fond.

6.2Le Comité rappelle qu’en vertu du paragraphe 1 de l’article 4 du Protocole facultatif, il ne peut examiner aucune communication sans avoir vérifié que tous les recours internes ont été épuisés, à moins que la procédure de recours n’excède des délais raisonnables ou qu’il soit improbable que le requérant obtienne réparation par ce moyen. À cet égard, le Comité prend note de l’affirmation de l’auteure selon laquelle elle a épuisé tous les recours internes disponibles. Tout en considérant cette condition juridique comme essentielle à la recevabilité d’une communication, il note également que l’État partie n’a pas avancé d’argument contraire et n’a pas contesté la recevabilité de la communication pour quelque motif que ce soit. Le Comité considère que, dans les circonstances particulières de cette affaire, les recours internes disponibles ont été épuisés. Par conséquent, en l’espèce, rien dans les dispositions du paragraphe 1 de l’article 4 du Protocole facultatif ne l’empêche d’examiner la présente communication.

6.3Le Comité s’est assuré, comme il est tenu de le faire conformément à l’alinéa a) du paragraphe 2 de l’article 4 du Protocole facultatif, que la même affaire n’avait pas déjà été examinée ou n’était pas en cours d’examen devant une autre instance internationale d’enquête ou de règlement.

6.4Le Comité note que l’auteure affirme qu’elle et ses enfants ont été victimes de discrimination de la part de l’État partie qui, en ne lui accordant pas un traitement égal devant la loi, ne leur a pas garanti une protection effective contre la violence domestique étant donné que ses droits de garde à l’égard de ses enfants ont été révoqués et ont été attribués au père prétendument violent. Le Comité prend note également de l’affirmation de l’État partie selon laquelle, en réponse aux nombreuses plaintes, demandes d’aide et requêtes de l’auteure et de son ancien mari, les travailleurs sociaux ont mené l’enquête qui s’imposait, sous réserve des dispositions de l’article 14 du règlement d’application de la loi sur la protection de l’enfance, en recueillant des renseignements auprès d’un large éventail de sources, et aucune preuve attestant d’une quelconque forme de violence du père à l’égard des deux enfants n’a été trouvée à l’issue des inspections réalisées. Le Comité constate, en outre, qu’aucune procédure pénale n’a été engagée par l’auteure, durant ou après le mariage, contre le père des enfants en raison de son comportement prétendument violent. Il prend note de l’argument de l’État partie selon lequel les allégations de l’auteure concernant les violences physiques et psychologiques subies par les enfants ont été examinées par les tribunaux, mais leur bien‑fondé n’a pas été démontré dans le cadre des procédures. Il note également qu’une ordonnance de protection d’urgence a été délivrée contre l’auteure et son nouveau mari, en vertu de laquelle les enfants auraient dû être confiés au père, et qu’entre le 17 janvier 2015 et le 11 juillet 2015, l’auteure a emmené les enfants vivre dans un centre de protection pendant six mois, au cours desquels le père n’a pas pu voir ces derniers. Le Comité estime que les preuves et les circonstances invoquées par l’auteure n’ont pas fourni de motifs suffisants pour lui permettre de conclure que l’État partie a manqué à l’obligation de diligence raisonnable qui lui incombe de les protéger, elle et les enfants, contre la violence domestique.

6.5Le Comité rappelle qu’il ne se substitue pas aux autorités nationales dans l’appréciation des faits et des preuves, à moins que cette appréciation ne soit manifestement arbitraire ou ne constitue un déni de justice.

6.6Le Comité prend note, en outre, de l’allégation de l’auteure selon laquelle elle a été victime de discrimination fondée sur le genre au cours de la procédure relative à la garde des enfants, car elle n’a pas été traitée avec égalité devant la loi par les autorités judiciaires. À cet égard, il observe que le 3 octobre 2012, la Cour de district de Sofia a confié la garde des enfants à l’auteure et accordé des droits de visite au père, à qui elle a ordonné de verser une pension alimentaire. Le Comité observe également que le 1er juin 2016, la Cour de district de Sofia a modifié sa décision antérieure en raison d’un changement de situation et s’est prononcée en faveur de l’ex-mari de l’auteure ; elle a accordé à ce dernier la garde des enfants pour s’assurer que les enfants gardent contact avec leurs deux parents, étant donné que l’auteure avait éloigné les enfants de leur père et fait entrave aux relations personnelles entre eux en ne respectant pas la décision de la cour ni l’ordonnance de protection d’urgence, et que l’environnement de soutien des enfants était jugé risqué du fait de la présence du grand-père maternel. La Cour a également ordonné à l’auteure de verser une pension alimentaire. Le 7 novembre 2017, la Cour municipale de Sofia a confirmé la décision rendue par le tribunal de première instance. La Cour suprême de cassation a confirmé cette décision le 7 juin 2018.

6.7Le Comité note que la Cour d’appel et la Cour suprême ont jugé que le fait que le parent ayant la garde fasse obstacle aux contacts personnels entre les enfants et leur autre parent et limite les rapports des enfants avec celui-ci avait un impact négatif, et que les qualités parentales étaient évaluées dans le contexte de la rivalité entre les parents et du conflit de loyauté des enfants de manière à confier la garde dans l’intérêt supérieur des enfants. Il note également que bien que le tribunal de première instance ait insisté notamment sur le fait que l’auteure s’était remariée, les juridictions supérieures n’ont pas suivi le même raisonnement. Le Comité note en particulier qu’elles n’ont pas interprété au détriment de l’auteure son droit de se remarier et son droit à la vie familiale, puisqu’elles ne lui ont pas reproché de s’être remariée, mais bien d’avoir nui aux relations personnelles entre le père et les enfants et éloigné les enfants de lui, et ont considéré l’environnement de soutien comme étant à risque compte tenu des actes obscènes qu’aurait perpétrés le grand-père maternel à l’endroit de M. Z. Il relève en outre qu’elles se sont largement appuyées sur les expertises psychologiques pour évaluer l’intérêt supérieur des enfants. Bien que la garde en l’espèce ait effectivement été confiée au père, le Comité estime qu’à la lumière de toutes les informations recueillies, l’auteure n’a pas réussi à étayer, aux fins de la recevabilité, ses allégations de discrimination fondée sur le genre et d’inégalité de traitement devant la loi dans le cadre de la procédure relative à la garde des enfants.

7.Le Comité considère donc qu’aux fins de la recevabilité, l’auteure n’a pas étayé ses allégations au titre des articles 1, 2, 5, 15 et 16 de la Convention et que la communication devrait donc être déclarée irrecevable en vertu du paragraphe 2 c) de l’article 4 du Protocole facultatif, parce qu’elle n’a pas été suffisamment étayée.

8.En conséquence, le Comité décide :

a)que la communication est irrecevable en vertu du paragraphe 2 c) de l’article 4 du Protocole facultatif ;

b)que la présente décision sera communiquée à l’État partie et à l’auteure.