NATIONS UNIES

CERD

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr.GÉNÉRALE

CERD/C/IND/CO/195 mai 2007

FRANÇAISOriginal: ANGLAIS

COMITÉ POUR L’ÉLIMINATIONDE LA DISCRIMINATION RACIALE

Soixante‑dixième session19 février‑9 mars 2007

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT À L’ARTICLE 9 DE LA CONVENTION

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

INDE

1.Le Comité a examiné les quinzième à dix‑neuvième rapports périodiques de l’Inde, présentés en un seul document (CERD/C/IND/19), à ses 1796e et 1797e séances (CERD/C/SR.1796 et 1797), tenues les 23 et 26 février 2007. À sa 1809e séance (CERD/C/SR.1809), tenue le 6 mars 2007, il a adopté les observations finales suivantes.

A. Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport soumis par l’Inde et l’occasion qui lui est ainsi donnée de renouer le dialogue avec l’État partie. Il se félicite en outre des réponses que la délégation a fournies à certaines de ses questions et exprime l’espoir que le dialogue avec l’État partie se poursuivra dans un esprit d’ouverture et de coopération.

B. Aspects positifs

3.Le Comité note avec satisfaction que la Constitution et la législation de l’État partie contiennent des dispositions détaillées visant à lutter contre la discrimination, notamment celle qui est fondée sur la race et le système des castes.

4.Le Comité se félicite des mesures spéciales que l’État partie a adoptées pour promouvoir l’égalité des membres des castes et tribus «énumérées» dans l’exercice de leurs droits, notamment en leur réservant des sièges au Parlement et dans les assemblées législatives des États ainsi que des postes dans la fonction publique.

5.Le Comité se félicite de la création d’institutions responsables de la mise en œuvre des lois interdisant la discrimination, notamment la loi de 1989 relative à la prévention des atrocités à l’égard des castes et des tribus «énumérées», et chargées de suivre les actes de discrimination et de violence commis contre des membres de castes et de tribus «énumérées», comme le Ministère de la justice sociale et de l’autonomie, les commissions parlementaires de la justice sociale de l’Union et des États, le Ministère des affaires tribales et les commissions nationales pour les castes et les tribus «énumérées».

6.Le Comité prend note avec satisfaction de la déclaration faite par le Premier Ministre indien devant la Conférence internationale sur la minorité dalit à New Delhi le 27 décembre 2006, selon laquelle le système des «intouchables» ne peut être rapproché que de celui de l’apartheid en Afrique du Sud. Cette déclaration témoigne de la volonté des autorités de s’attaquer plus énergiquement au problème de la discrimination liée à ce système.

7.Le Comité note avec satisfaction que l’État partie accueille un nombre important de réfugiés de différentes origines nationales et ethniques, notamment des Tibétains, des Sri‑Lankais et des Chakmas, ainsi que des réfugiés d’Afghanistan et du Myanmar placés sous la supervision du HCR.

C. Sujets de préoccupation et recommandations

8.Le Comité prend note de la position adoptée par l’État partie selon laquelle la discrimination fondée sur la caste ne relève pas de l’article premier de la Convention. Toutefois, après de longues discussions avec l’État partie, il maintient la position qu’il a exprimée dans sa recommandation générale XXIX, à savoir que «la discrimination fondée sur “l’ascendance” comprend la discrimination contre les membres des communautés reposant sur des formes de stratification sociale telles que la caste et les systèmes analogues de statut héréditaire qui empêchent ou entravent leur jouissance égale des droits de l’homme». En conséquence, il réaffirme que la discrimination fondée sur le système des castes relève pleinement de l’article premier de la Convention.

9.Le Comité regrette que le rapport de l’État partie ne contienne guère d’informations sur les dispositions concrètes qui auraient été prises pour mettre en œuvre les lois interdisant la discrimination et prévoyant des mesures palliatives ainsi que sur l’exercice effectif par les membres des castes et des tribus «énumérées», des droits qui leur sont garantis par la Convention. (art. 2 et 5)

En dépit de l’argument juridique invoqué par l’État partie (voir supra ), le Comité invite ce dernier à fournir dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les dispositions qu’il a prises pour appliquer les lois interdisant la discrimination et prévoyant des mesures palliatives, ventilées par caste, tribu, sexe, État/district et population rurale/urbaine. L’État partie devrait en outre fournir des données ventilées concernant la part des budgets de l’Union, des États et des districts qui est affectée à ces activités et les effets de ces dispositions sur l’exercice, par les membres des castes et des tribus «énumérées», des droits qui leur sont garantis par la Convention.

10.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie ne considère pas ses peuples tribaux comme autant de groupes distincts ayant droit à une protection spéciale en application de la Convention. (art. 1, par. 1 et 2)

Le Comité recommande à l’État partie de reconnaître officiellement ses peuples tribaux en tant que groupes distincts ayant droit à une protection spéciale en vertu du droit national et international , y compris de la Convention, et de fournir des renseignements sur les critères utilisés pour déterminer l’appartenance à des tribus «énumérées» et autres tribus, de même que sur la politique nationale en faveur des peuples tribaux. À cet égard, le Comité renvoie l’État partie à sa recommandation générale XXIII .

11.Le Comité est préoccupé par le fait que les tribus nomades et les tribus dites «non répertoriées», qui étaient stigmatisées pour leurs prétendues «tendances criminelles» dans les dispositions de l’ancienne loi sur les tribus criminelles (1871), conservent cette caractéristique dans les dispositions de la loi de 1952 sur les récidivistes. (art. 2, par.1, al. c)

Le Comité recommande à l’État partie d’abroger la loi sur les récidivistes et de réhabiliter effectivement les tribus nomades et «non répertoriées» en question.

12.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie n’a pas tenu compte de la recommandation faite par la Commission chargée d’examiner la loi de 1958 relative aux pouvoirs spéciaux des membres des forces armées, à l’effet d’abroger cette loi en vertu de laquelle les membres des forces armées ne peuvent faire l’objet de poursuites que sur autorisation du Gouvernement central et disposent de pouvoirs étendus pour la fouille et l’arrestation de suspects sans mandat ainsi que pour l’usage de la force à l’encontre de personnes ou de biens dans l’État du Manipur ou d’autres États du nord‑est où vivent des peuples tribaux. (art. 2, par. 1, al. c, 5, al. b et d, et 6)

Le Comité engage l’État partie à abroger la loi relative aux pouvoirs spéciaux des membres des forces armées et de la remplacer par une loi plus humaine conformément à la recommandation contenue dans le rapport établi en 2005 par la Commission d’examen susmentionnée qui a été mise en place par le Ministère de l’intérieur. Il demande en outre à l’État partie de publier ce rapport.

13.Le Comité note avec préoccupation que, bien que le statut d’«intouchable» ait été officiellement aboli par l’article 17 de la Constitution, les Dalits font toujours l’objet d’une ségrégation de facto, en particulier dans les zones rurales, en ce qui concerne l’accès aux lieux de culte, au logement, aux hôpitaux, à l’éducation, aux points d’eau, aux marchés et à d’autres lieux publics. (art. 3 et 5)

Le Comité engage l’État partie à intensifier ses efforts en vue de garantir l’application de la loi de 1955 relative à la protection des droits civils, en particulier dans les zones rurales, notamment en veillant à ce que les actes commis contre des personnes en raison de leur ancien statut d’«intouchable» soient dûment sanctionnés, à lutter résolument contre la ségrégation exercée dans les établissements d’enseignement publics et en ce qui concerne les lieux de résidence et à assurer aux Dalits l’égalité d’accès aux lieux de culte, aux hôpitaux, aux points d’eau et à d’autres lieux ou services publics.

14.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles la police soumettrait les membres de castes «énumérées» ou de tribus «énumérées» et autres à des arrestations arbitraires à la torture et à des exécutions extrajudiciaires et s’inquiète de ce que ces groupes ne sont pas suffisamment protégés contre les actes de violence communautaire. (art. 5, al. b, et 6)

Le Comité engage l’État partie à assurer une protection efficace aux membres des castes «énumérées» et des tribus «énumérées» et autres contre les actes de discrimination et de violence auxquels ils sont exposés, à introduire une formation obligatoire des policiers, des juges et des procureurs à l’application de la loi de 1989 relative à la prévention des atrocités à l’égard des castes et tribus «énumérées» et à prendre des mesures disciplinaires ou pénales contre les policiers et autres agents des forces de l’ordre qui violent leur devoir de protection des membres de castes «énumérées» ou de tribus «énumérées» et autres et/ou d’enquête sur les crimes dirigés contre eux.

15.Le Comité est préoccupé par le nombre inquiétant d’allégations d’actes de violence sexuelle commis contre des femmes dalits, principalement par des hommes de castes dominantes, notamment de viols, et par l’exploitation sexuelle dont font l’objet les femmes dalits ou tribales, qui sont victimes de la traite et contraintes à se prostituer. (art. 5, al. b)

Le Comité engage l’État partie à faire en sorte que ceux qui abusent sexuellement de femmes dalits et tribales et les exploitent à des fins sexuelles soient poursuivis et châtiés, que toute personne, notamment les policiers et autres agents des forces de l’ordre, qui empêche ou cherche à dissuader les victimes de tels actes de porter plainte soit dûment sanctionnée, à adopter des mesures de prévention telles que l’organisation d’une formation de la police et de campagne d’éducation du public afin d’appeler l’attention sur la nature criminelle de tels actes, et à fournir aux victimes une aide juridique, médicale et psychologique ainsi qu’une indemnisation. L’État partie devrait en outre envisager d’adopter des règles de preuve tenant compte de l’intérêt des victimes, semblables à celles qui figurent à l’article 12 de la loi de 1955 relative à la protection des droits civils, et de constituer des chambres judiciaires spéciales et des équipes spéciales pour s’occuper de ces problèmes.

16.Eu égard à l’afflux massif de réfugiés en Inde, le Comité est préoccupé par le fait que l’État partie n’a pas adhéré à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et au Protocole de 1967 à cette Convention et qu’il n’a pas encore adopté de dispositions législatives portant spécifiquement sur les réfugiés. (art. 5, al. b)

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager d’adhérer à la Convention de 1951 relative au statut des réfugiés et au Protocole de 1967 à cette Convention et d’adopter un cadre législatif global régissant le traitement des réfugiés.

17.Le Comité note avec préoccupation que des Dalits, en particulier des femmes, seraient souvent empêchés par la force de se présenter à des élections, ou contraints de démissionner après avoir été élus à des conseils de village ou d’autres organes ou de renoncer à exercer leur mandat. Il est en outre préoccupé d’apprendre que bon nombre de Dalits ne sont pas inscrits sur les listes électorales ou se voient dénier leur droit de voter de quelque autre manière et que les postes de la fonction publique réservés à des membres de castes et tribus «énumérées» sont presque exclusivement les emplois les plus modestes (par exemple celui de balayeur). Le Comité est aussi préoccupé par la sous‑représentation des castes «énumérées» ainsi que des tribus «énumérées» et autres tribus dans les instances exécutives et législatives de l’Union, des États et des municipalités, ainsi que dans la fonction publique. (art. 5, al. c, et 2, par. 2)

Le Comité recommande à l’État partie d’appliquer effectivement les dispositions prévoyant la réservation de sièges et de postes; de veiller au respect des droits des membres des castes «énumérées» ainsi que des tribus «énumérées» et autres de voter et de se porter candidats à des élections en toute liberté et en toute sécurité et d’exercer leur mandat s’ils sont élus aux postes qui leur sont réservés; d’appliquer la politique de réservation à toutes les catégories de postes de la fonction publique, y compris les fonctions les plus hautes, et de l’étendre à la fonction judiciaire; de veiller à ce que les castes «énumérées», les tribus «énumérées» et autres ainsi que les minorités ethniques soient correctement représentées dans les organes exécutifs et législatifs de l’Union, des États et des municipalités; et de fournir des données statistiques actualisées sur cette représentation dans son prochain rapport périodique.

18.Le Comité est préoccupé par la persistance des normes sociales de pureté et de pollution qui ont pour effet d’empêcher des mariages entre Dalits et non‑Dalits. Il s’inquiète aussi de la violence et des sanctions sociales dont font l’objet les couples formés de personnes de castes différentes et de la persistance de la pratique du mariage d’enfants et du système de la dot de même que de celui des devadasi, en vertu duquel des filles, pour la plupart dalits, sont consacrées à des déesses du temple et contraintes à se livrer à la prostitution ritualisée. (art. 5, al. d iv) et b)

Le Comité engage l’État partie à veiller à ce que soient respectées dans la pratique l’interdiction du mariage d’enfants, les dispositions de la loi de 1961 interdisant le système de la dot et la législation des États interdisant la pratique du système des devadasi . L’État partie devrait sanctionner de tels actes ainsi que tous actes de discrimination ou de violence à l’égard des couples formés de personnes de castes différentes et réhabiliter les personnes qui en sont victimes. En outre, il devrait entreprendre des activités de formation et des campagnes de sensibilisation à l’intention des policiers, des procureurs, des juges, des politiciens, des enseignants et du grand public pour appeler leur attention sur la nature criminelle de tels actes.

19.Le Comité note que le droit de propriété collective ou individuelle des membres des communautés tribales sur les terres qu’ils ont occupées traditionnellement n’est pas pleinement respecté dans la pratique par l’État partie. Il s’inquiète en outre de ce que de vastes projets tels que la construction de plusieurs barrages dans l’État du Manipur et d’autres États du nord‑est sur des territoires où vivent principalement des communautés tribales, ou la construction d’un axe routier sur les îles Andaman, sont réalisés sans que le consentement éclairé de ces populations ait été sollicité au préalable. Ces projets ont pour effet de nécessiter la réinstallation forcée des communautés concernées ou de mettre en danger leurs modes de vie traditionnels. (art. 5, al. d v) et e)

Le Comité engage l’État partie à veiller à ce que le droit de propriété, collective ou individuelle, des membres des communautés tribales sur les terres qu’ils ont occupées traditionnellement soit pleinement respecté et mis en œuvre, conformément à la Convention n o  107 de l’OIT de 1957 sur les peuples indigènes et tribaux. L’ État partie devrait solliciter au préalable le consentement éclairé des communautés affectées par la construction de barrages dans la région du nord ‑est ou de projets similaires sur leurs terres traditionnelles dans le cadre du processus de décision relatif à ces projets et veiller à ce que ces communautés soient dûment indemnisées et se voient offrir des terres et des logements de remplacement. En outre, l’État partie devrait protéger les tribus telles que celle des Jarawa contre le pillage de leurs terres et de leurs ressources par des colons, des braconniers, des entreprises privées ou d’autres tiers et mettre en œuvre l’ordonnance de 2002 de la Cour suprême relative à la fermeture des tronçons de l’axe routier des îles Andaman qui traversent la réserve jarawa .

20.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les Dalits se verraient souvent refuser l’accès à la terre ou seraient chassés de leurs terres par les castes dominantes, surtout lorsque ces terres sont voisines de celles qui appartiennent à ces dernières, outre que, en vertu de la loi de 1980 sur les forêts, les communautés tribales auraient été chassées de leurs terres au profit de sociétés privées d’exploitation minière (art. 5, al. d v) et e i) et iii)).

Le Comité recommande à l’État partie de garantir aux Dalits , y compris aux femmes dalits , la possibilité d’acquérir des terrains qui leur conviennent à des prix abordables et de sanctionner les actes de violence dirigés contre les Dalits lors de conflits fonciers, en application de la loi de 1989 relative à la prévention des atrocités à l’égard des castes et tribus «énumérées». L’État partie devrait en outre veiller à ce que les communautés tribales ne soient pas chassées de leurs terres sans que leur consentement éclairé ait été sollicité et que d’autres terrains susceptibles de leur convenir et une compensation leur soient proposés, que l’interdiction de louer les terres tribales à des tiers ou à des sociétés soit bien appliquée dans la pratique et que des garanties adéquates interdisant l’acquisition de terres tribales soient inscrites dans la loi de 2006 sur la reconnaissance des droits forestiers ainsi que dans d’autres textes législatifs.

21.Le Comité a appris avec préoccupation que les Dalits qui se convertissent à l’islam ou au christianisme pour échapper à la discrimination fondée sur les castes n’auraient plus droit aux mesures palliatives, contrairement à ceux qui deviennent bouddhistes ou sikhs (art. 5, al. d vii) et 2, par. 2).

Le Comité recommande à l’État partie de restaurer le bénéfice des mesures palliatives pour tous les membres des castes et tribus «énumérées» qui se convertissent à une autre religion.

22.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les Dalits n’auraient pas eu accès à l’aide d’urgence dans des conditions d’égalité au lendemain du tsunami, même si, d’après l’État partie, cela n’aurait été le cas que de quelques individus isolés (art. 5, al. e et 2 , par. 1, al. a).

Le Comité recommande à l’État partie d’enquêter sur tous les cas dans lesquels des Dalits n’auraient pas bénéficié de la même aide ou des mêmes prestations que les membres de la caste des pêcheurs ou auraient été victimes d’une autre forme de discrimination lors des opérations de secours d’urgence et de relèvement à la suite du tsunami et d’indemniser les victimes de ces actes de discrimination ou de leur fournir ces prestations à titre rétroactif.

23.Le Comité note avec préoccupation qu’un très grand nombre de Dalits sont contraints de travailler comme pilleurs des décharges d’ordures ménagères ou, dès le plus jeune âge, dans des conditions extrêmement malsaines et dans le cadre d’arrangements d’exploitation abusive du travail d’autrui, y compris la servitude pour dette (art. 5, al. e i) et iv)).

Le Comité recommande à l’État partie de garantir l’application effective de la loi de 1948 sur le salaire minimum, de la loi de 1976 sur l’égalité de rémunération, de la loi de 1976 sur l’abolition du système de la servitude pour dette, de la loi de 1986 sur l’interdiction et la réglementation du travail des enfants et de la loi de 1993 sur l’interdiction de l’emploi de personnes pour le pillage de décharges publiques et la construction de latrines sèches. L’État partie devrait aussi adopter des mesures en vue d’améliorer l’accès des Dalits au marché du travail, notamment en étendant la politique de réservation d’emplois au secteur privé et en délivrant des carnets de travail aux Dalits qui en font la demande, conformément au Programme national de garantie de l’emploi dans les zones rurales, et rendre compte dans son prochain rapport périodique des effets des mesures adoptées sur les conditions d’emploi et de travail des Dalits.

24.Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles la prévalence de la faim et de la malnutrition, de la mortalité maternelle et infantile, des maladies sexuellement transmissibles, y compris le VIH/sida, la tuberculose, la diarrhée, le paludisme et d’autres maladies à transmission hydrique, serait plus élevée parmi les membres des castes «énumérées» ainsi que des tribus «énumérées» et autres tribus, outre que, dans les zones tribales, les structures de soins de santé seraient soit inexistantes soit nettement plus précaires que dans les autres régions (art. 5, al. e iv)).

Le Comité recommande à l’État partie de garantir aux membres des castes «énumérées» ainsi que des tribus «énumérées» et autres tribus l’égalité d’accès aux points de distribution des rations, ainsi qu’à des établissements de soins de santé, des services de santé génésique et des points d’eau potable satisfaisants, et d’augmenter le nombre de médecins et de centres de soins de santé primaires et de dispensaires correctement équipés dans les zones tribales et rurales.

25.Tout en prenant note des garanties constitutionnelles relatives à l’enseignement gratuit et obligatoire pour tous les enfants jusqu’à l’âge de 14 ans et de la progression rapide du taux d’alphabétisation parmi les Dalits, en particulier les filles, le Comité demeure préoccupé par le taux élevé d’abandons scolaires chez les élèves dalits dans le primaire et dans le secondaire, par les informations selon lesquelles des mesures de ségrégation et de discrimination seraient appliquées dans les établissements scolaires à l’encontre des élèves, des enseignants et même des cuisiniers dalits, par la précarité de l’infrastructure et des équipements ainsi que par l’insuffisance des effectifs et la qualité médiocre de l’enseignement dans les établissements publics fréquentés par des enfants dalits et tribaux (art. 5, al. e v)).

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des mesures efficaces pour abaisser le taux d’abandons scolaires et relever le taux de scolarisation parmi les enfants et les adolescents dalits , à tous les niveaux de l’enseignement, par exemple en octroyant des bourses ou autres aides financières et en sensibilisant les parents à l’importance de l’éducation, de lutter contre la ségrégation et la discrimination exercées dans le cadre de l’école à l’encontre des élèves dalits et de garantir à tous les élèves, dans des conditions d’égalité, l’accès à la cantine et à des équipements adéquats, des effectifs d’enseignants suffisants et un enseignement de qualité dans les écoles publiques ainsi que la possibilité pour les élèves dalits et tribaux de fréquenter des établissements scolaires situés dans des quartiers où la population appartient majoritairement à des castes dominantes, et dans des zones de conflit armé.

26.Le Comité note avec préoccupation les informations selon lesquelles il arriverait fréquemment que la police refuse d’enregistrer des plaintes pour actes de violence et de discrimination à l’encontre des membres de castes et de tribus «énumérées» et d’enquêter sur les faits. Il s’inquiète du pourcentage élevé d’acquittements et de la faible proportion de condamnations prononcés dans les affaires concernant des plaintes déposées au titre de la loi de 1989 relative à la prévention des atrocités à l’égard des castes et des tribus «énumérées», comme du nombre inquiétant d’affaires de ce genre qui sont en instance devant les tribunaux (art. 6).

Le Comité engage l’État partie à veiller à ce que les personnes appartenant à des castes «énumérées» ou à des tribus «énumérées» et d’autres tribus, qui sont victimes d’actes de violence et de discrimination, aient accès à des recours effectifs et, à cet effet, à s’assurer que les victimes et les témoins sont encouragés à dénoncer de tels actes et qu’ils sont protégés contre toutes représailles et tous actes de discrimination; à veiller à ce que les plaintes déposées au titre de la loi de 1989 relative à la prévention des atrocités à l’égard des castes et des tribus «énumérées» et d’autres dispositions pénales soient dûment enregistrées et donnent lieu à une enquête, que les coupables soient poursuivis et condamnés et que les victimes soient indemnisées et réhabilitées; et à instituer et rendre opérationnels des tribunaux spéciaux chargés de juger des cas d’atrocités ainsi qu’à nommer des commissions de surveillance de la mise en œuvre de la loi relative à la prévention des atrocités à l’égard des castes et des tribus «énumérées» dans tous les États et districts, en application de cette loi. À cet égard, l’État partie devrait fournir dans son prochain rapport périodique des informations sur le nombre et la nature des plaintes enregistrées, les condamnations prononcées et les peines imposées aux coupables ainsi que les voies de recours et les mesures d’assistance dont ont bénéficié les victimes de ces actes.

27.Le Comité note avec préoccupation que les préjugés de caste, tout comme les préjugés et idées reçues fondés sur l’appartenance raciale et ethnique, sont encore profondément enracinés dans de larges secteurs de la société indienne, en particulier dans les zones rurales (art. 7).

Le Comité recommande à l’État partie de déployer des efforts accrus en vue d’éradiquer l’acceptation sociale de la discrimination fondée sur la caste et des préjugés raciaux et ethniques, par exemple en intensifiant les campagnes d’éducation et de sensibilisation du public, en incorporant dans les programmes d’études des objectifs éducatifs de tolérance entre les castes et de respect pour les autres ethnies et l’enseignement des cultures des castes «énumérées» ainsi que des tribus «énumérées» et autres tribus, et en veillant à ce que les questions relatives aux castes, tribus et minorités ethniques soient dûment traitées dans les médias, de manière à instaurer une véritable cohésion sociale entre tous les groupes ethniques, castes et tribus d’Inde.

28.Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention no 169 de l’OIT concernant les peuples indigènes et tribaux dans les pays indépendants.

29.Le Comité recommande à l’État partie, lorsqu’il applique dans son ordre juridique interne les dispositions de la Convention, en particulier celles des articles 2 à 7, de tenir compte des passages pertinents de la Déclaration et du Programme d’action de Durban, et d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements sur les plans d’action et autres mesures supplémentaires adoptés pour appliquer cette déclaration et ce programme d’action au niveau national.

30.Le Comité note que l’État partie n’a pas fait la déclaration facultative prévue à l’article 14 de la Convention et l’invite à envisager de la faire.

31.Le Comité recommande vivement à l’État partie de ratifier la modification du paragraphe 6 de l’article 8 de la Convention, adoptée le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvée par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111. À cet égard, il appelle l’attention de l’État partie sur la résolution 59/176 de l’Assemblée générale, du 20 décembre 2004, dans laquelle celle‑ci a demandé instamment aux États parties de hâter leurs procédures internes de ratification de la modification et d’informer par écrit le Secrétaire général dans les meilleurs délais de leur acceptation de cette modification.

32.Le Comité recommande à l’État partie de rendre ses rapports périodiques aisément accessibles au public dès qu’ils sont soumis et de traduire en hindi, ainsi que dans d’autres langues officielles de l’Inde, autant que faire se peut, et de publier les observations du Comité relatives à ces rapports.

33.Le Comité invite l’État partie à présenter son document de base en tenant compte des exigences applicables au document de base commun, qui sont énoncées dans les Directives harmonisées pour l’établissement de rapports, que les organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme ont récemment approuvées (HRI/MC/2006/3 et Corr.1).

34.En application du paragraphe 1 de l’article 9 de la Convention et de l’article 65 du Règlement intérieur du Comité, tel qu’il a été modifié, le Comité demande à l’État partie de lui fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations formulées aux paragraphes 12, 15, 19 et 26 ci‑dessus.

35.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre ses vingtième et vingt et unième rapports périodiques en un seul document, attendu le 4 janvier 2010.

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