Trente-huitième session

14 mai-1er juin 2007

Observations finales du Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes : Mozambique

Le Comité a examiné le rapport unique du Mozambique, valant rapport initial et deuxième rapport périodique (CEDAW/C/MOZ/1-2) à ses 783e et 784e séances, le 23 mai 2007 (voir CEDAW/C/SR.783 et 784). La liste des points et questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/MOZ/Q/2, et les réponses du Mozambique dans le document CEDAW/C/MOZ/Q/2/Add.1.

Introduction

Le Comité félicite l’État partie d’avoir ratifié la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes sans formuler de réserves, et le remercie pour son rapport unique (valant rapport initial et deuxième rapport périodique) qui, bien que présenté avec retard, est conforme aux directives en la matière. Le Comité constate que le rapport est franc et donne un aperçu instructif de la situation des femmes au Mozambique, mais ne fait pas référence à ses recommandations générales et ne contient pas de données statistiques détaillées.

Le Comité félicite l’État partie d’avoir envoyé une délégation de haut niveau, dirigée par le Ministre des femmes et de l’action sociale, et composée de représentants d’autres ministères et institutions spécialisées chargés de la mise en œuvre des mesures relatives aux domaines visés par la Convention. Le Comité apprécie la qualité de l’exposé liminaire de l’État partie, ses réponses écrites aux points et questions soulevées par le groupe de travail présession et les éclaircissements donnés en réponse aux questions qu’il lui a posées oralement.

Aspects positifs

Le Comité félicite l’État partie d’avoir incorporé dans sa Constitution une disposition spécifique énonçant le principe de l’égalité entre les femmes et les hommes, ainsi que des dispositions relatives aux principes généraux de l’égalité, et d’avoir engagé des réformes juridiques visant à éliminer la discrimination à l’encontre des femmes, en particulier dans la loi de 2004 sur la famille, qui établit l’égalité des droits et des obligations pour l’ensemble des membres de la famille et entre époux; la loi foncière de 1997, qui stipule explicitement que les femmes ont les mêmes droits à la propriété que les hommes; et le Code du commerce de 2005, qui prévoit l’égalité des droits pour les hommes et les femmes dans l’exercice de toute activité commerciale.

Le Comité félicite l’État partie pour son Plan national de promotion des femmes pour 2002-2006 et pour l’adoption en 2005 de la politique d’égalité des sexes et de la stratégie de mise en œuvre, ainsi que pour l’inclusion de l’objectif de l’égalité des sexes dans le plan quinquennal du Gouvernement pour 2005-2009 et dans certains plans et programmes sectoriels.

Le Comité note en s’en félicitant l’établissement au niveau des pouvoirs publics, y compris le Ministère des femmes et de l’action sociale et le Conseil national pour la promotion de la femme, d’un mécanisme institutionnel de haut niveau conçu aux fins d’instaurer l’égalité des sexes, réunissant différentes parties prenantes représentant le Gouvernement aussi bien que la société civile, et des mécanismes en place au niveau parlementaire.

Le Comité se réjouit des progrès accomplis quant à l’accès des femmes aux postes de décision dans la sphère politique, et en particulier de la nomination d’une femme au poste de premier ministre et de plusieurs femmes à des postes de ministre et de vice-ministre. Il note également en s’en félicitant vivement que le pourcentage de femmes parlementaires au Mozambique compte parmi les plus élevés au monde.

Le Comité félicite l’État partie pour sa coopération avec les organisations de la société civile, en particulier les organisations de femmes, prévoyant la représentation officielle d’organisations de la société civile dans le mécanisme national ainsi que la coopération des pouvoirs publics avec ces organisations dans le cadre de programmes et de projets spécifiques.

Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Tout en rappelant à l ’ État partie qu ’ il est tenu d ’ appliquer toutes les dispositions de la Convention systématiquement et en permanence, le Comité fait observer que les préoccupations et les recommandations formulées dans les présentes observations finales nécessiteront qu ’ il leur accorde une attention prioritaire jusqu ’ à la présentation de son prochain rapport périodique. Il lui demande, en conséquence, de privilégier les domaines d ’ activité correspondants dans ses activités de mise en œuvre et de rendre compte dans son prochain rapport périodique des mesures qu ’ il aura prises et des résultats qu ’ il aura obtenus. Il lui demande de soumettre les présentes observations finales à tous les ministères concernés et au Parlement de façon à en assurer la pleine application .

Le Comité a conscience que la Convention est directement applicable selon le droit mozambicain, mais constate qu’il n’a pas encore été procédé à un examen juridique complet. Le Comité est donc préoccupé par la possibilité d’un conflit entre les dispositions constitutionnelles et d’autres dispositions d’une part et les dispositions de la Convention d’autre part.

Le Comité engage l ’ État partie à veiller à ce que les dispositions de la Convention soient respectées et appliquées, et priment sur toute autre disposition contraire de la législation.

Le Comité est préoccupé par le fait que des dispositions discriminatoires existent toujours dans certains textes de loi mozambicains, y compris le Code pénal et les lois relatives aux droits de succession.

Le Comité engage l ’ État partie à engager et accélérer sans retard, conformément à l ’ article 2 de la Convention, une révision complète de sa législation dans tous les domaines, à s ’ employer effectivement avec le Parlement à ce que toutes les dispositions discriminatoires soient amendées ou abrogées de manière à se conformer pleinement aux dispositions de la Convention, et à prévoir des voies de recours et des sanctions juridiques pour faire valoir l ’ interdiction de la discrimination à l ’ encontre des femmes, telle que définie à l ’ article premier de la Convention.

Le Comité juge préoccupant que, bien le pays soit partie à la Convention depuis 1997, la société mozambicaine en général, notamment les magistrats, en particulier au niveau des tribunaux communautaires, n’est toujours pas suffisamment informée des droits des femmes énoncés dans la Convention. Il constate avec préoccupation aussi que les femmes ne sont pas au fait des droits que leur garantit la Convention, et ne sont donc pas en mesure de les revendiquer.

Le Comité exhorte l ’ État partie à veiller à ce que la Convention et la législation nationale connexe deviennent partie intégrante de l ’ éducation et de la formation des membres du barreau et de la législature. Il recommande que l ’ État partie garantisse que les magistrats des tribunaux communautaires reçoivent la formation voulue dans le domaine des droits de l ’ homme et des dispositions de la Convention, et que les femmes aient accès à ces tribunaux sur un pied d ’ égalité avec les hommes. Il exhorte en outre l ’ État partie à veiller à ce que les femmes et les chefs communautaires aient connaissance de la Convention, grâce aux médias appropriés, et à ce que les femmes qui en ont besoin, notamment celles qui sont en prison, reçoivent une aide juridique leur permettant d ’ accéder à la justice.

Le Comité s’inquiète de l’absence d’une démarche holistique pour parvenir au respect de jure et à l’application de facto de la Convention.

Le Comité exhorte l ’ État partie à utiliser la Convention comme un cadre global et un instrument pour l ’ élaboration de ses politiques et de ses stratégies visant à instaurer la parité et à promouvoir les droits fondamentaux des femmes, de manière à garantir l ’ application effective du principe de l ’ égalité des femmes et des hommes conformément à l ’ article 2 a) de la Convention.

Tout en se félicitant du rang élevé occupé par le mécanisme national en faveur des femmes, et de la création du Conseil national pour la promotion de la femme, le Comité craint que le Ministère des femmes et de l’action sociale ne dispose pas des ressources humaines, financières et techniques voulues. De telles défaillances pourraient empêcher ce ministère de s’acquitter efficacement de ses fonctions s’agissant d’appuyer certains programmes de promotion des femmes, de coordonner efficacement les initiatives des différentes institutions relevant du mécanisme national, à divers niveaux, et de veiller à l’intégration du souci de la parité dans tous les domaines de l’action des pouvoirs publics.

Le Comité exhorte l ’ État partie à doter le mécanisme national en place des ressources humaines, financières et techniques voulues, à tous les niveaux, pour lui permettre de s ’ acquitter efficacement de ses fonctions, s ’ agissant notamment du suivi de la mise en œuvre de la Convention. Le Comité exhorte aussi l ’ État partie à dispenser aux coordonnateurs nationaux et locaux chargés des questions de parité une formation axée sur la condition féminine, qui présente explicitement des informations sur la Convention .

Le Comité exprime sa préoccupation générale quant à la persistance des stéréotypes discriminatoires et des pratiques et traditions culturelles à caractère patriarcal relatifs aux rôles et aux responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, car ils compromettent gravement les perspectives offertes aux femmes en matière d’éducation et d’emploi et pour ce qui est de l’exercice de leurs droits fondamentaux et contribuent à perpétuer la violence dirigée contre les femmes.

Le Comité exhorte l ’ État partie à considérer la culture comme un élément dynamique du tissu social du pays et de la vie en société, qui peut par conséquent évoluer, et l ’ encourage à adopter une stratégie globale pour promouvoir le changement culturel et éliminer les stéréotypes discriminatoires relatifs au rôle des femmes et des hommes, conformément aux obligations qui lui incombent en vertu des articles 2 f) et 5 a) de la Convention. Le Comité recommande qu ’ une telle stratégie inclue des activités d ’ éducation et de sensibilisation des femmes et des hommes à tous les niveaux de la société, soit mise en œuvre en collaboration avec la société civile et les organisations de femmes, et tende à l ’ instauration d ’ un environnement propice au changement culturel .

Le Comité s’inquiète de la persistance de pratiques traditionnelles dangereuses, telles que le mariage précoce ou forcé, ainsi que de la polygamie, dans certaines régions, bien qu’elles soient interdites par la nouvelle loi sur la famille. Le Comité se dit également préoccupé par des informations qu’il a reçues selon lesquelles certains acteurs de la société mozambicaine feraient la promotion de vues conservatrices contestant les droits fondamentaux des femmes, en invoquant les valeurs culturelles et la préservation de l’identité nationale.

Le Comité engage l ’ État partie à redoubler d ’ efforts pour élaborer et appliquer des mesures globales d ’ éducation et à mener des campagnes de sensibilisation à la nouvelle loi sur la famille visant tous les secteurs de la société, y compris les magistrats, les juristes, les agents des services de police, les fonctionnaires et les organisations communautaires et de la société civile, avec la participation des médias et en coopération avec eux. Le Comité recommande en outre que, toutes les fois qu ’ il le faut, l ’ État partie prenne clairement position quant à la question des pratiques traditionnelles néfastes, en reconnaissant explicitement qu ’ elles ne devraient violer les droits de l ’ homme en aucune circonstance.

Tout en ayant conscience des mesures déjà en place, notamment les services de conseil aux victimes, les numéros de téléphone d’urgence, les activités de formation organisées à l’intention des policiers et la mise en place d’une base de données, le Comité s’inquiète de la forte prévalence de la violence familiale et de la violence sexuelle dirigée contre les femmes, que la société semble légitimer et qui s’accompagne d’une culture du silence et de l’impunité, et s’inquiète aussi de l’action encore insuffisante des services sociaux et du système d’administration de la justice. Le Comité est en outre préoccupé par la vulnérabilité des femmes victimes de violences pour ce qui est de l’accès à la justice.

Le Comité exhorte l ’ État partie à accorder une attention prioritaire à l ’ adoption de mesures systématiques pour réprimer la violence à l ’ encontre des femmes et des filles conformément à sa recommandation générale 19 à cet égard. Le Comité engage l ’ État partie à adopter dès que possible le projet de loi sur la violence familiale, et à veiller à ce que la violence dirigée contre les femmes et les filles, notamment la violence familiale, le viol conjugal, le harcèlement sexuel et toutes les formes d ’ abus sexuel, soit érigée en infraction pénale; à ce que les coupables soient poursuivis en justice, punis et réhabilités; et à ce que les femmes et les filles victimes de violences aient immédiatement accès à des moyens de recours et de protection. Le Comité recommande aussi de dispenser une formation aux sexospécificités au personnel judiciaire, aux fonctionnaires, aux agents de la force publique, ainsi qu ’ aux prestataires de soins de santé afin de s ’ assurer qu ’ ils sont sensibilisés à toutes les formes de violence contre les femmes et peuvent apporter aux victimes l ’ aide appropriée. Il recommande en outre de mettre en place des services de conseil destinés aux victimes de violences et de lancer des campagnes de sensibilisation, qui s ’ adressent aussi aux hommes, sur toutes les formes de violences dont les femmes sont victimes. Le Comité demande à l ’ État partie de lui fournir dans son prochain rapport des informations sur les lois et les mesures adoptées pour mettre fin à la violence dirigée contre les femmes et sur leur utilité, ainsi que sur les données et les tendances relatives à la prévalence des diverses formes sous lesquelles cette violence se manifeste.

Tout en prenant acte de la ratification par l’État partie du Protocole additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, le Comité s’inquiète de la traite des femmes et des enfants ainsi que de la prostitution de plus en plus répandue des enfants, notamment des filles. Il se déclare particulièrement inquiet de la traite et de l’exploitation sexuelle des filles pauvres et qui doivent soutenir leur famille.

Le Comité prescrit d ’ adopter et d ’ appliquer promptement le projet de loi contre la traite qui doit prévoir des mesures de prévention, la poursuite et le châtiment des trafiquants et la fourniture aux victimes d ’ une protection et de secours. Il recommande d ’ informer de la nouvelle loi et d ’ y former la magistrature, les forces de police (y compris aux frontières), les fonctionnaires et les travailleurs sociaux. Il recommande aussi que l ’ État partie renforce ses interventions et programmes visant les causes profondes de la traite, notamment par la création d ’ activités rémunérées afin de soustraire les femmes et les filles à la prostitution et à la traite.

Tout en reconnaissant l’importante présence de femmes dans les postes politiques décisionnels, le Comité note que, dans d’autres domaines de la vie publique et professionnelle, dont la diplomatie, la magistrature et la fonction publique, surtout aux niveaux supérieurs, les mêmes progrès n’ont pas été accomplis et que des obstacles à l’avancement des femmes subsistent.

Le Comité recommande que l ’ État partie s ’ emploie systématiquement à favoriser la participation pleine et égalitaire des femmes aux décisions, impératif démocratique pour tous les domaines de la vie publique et professionnelle, en prenant, s ’ il y a lieu, d ’ autres mesures temporaires spéciales conformément au paragraphe 1 de l ’ article 4 de la Convention et à la recommandation générale 25 du Comité en la matière .

Tout en reconnaissant les efforts de l’État partie visant à élargir l’accès des filles à l’éducation, et notamment les mesures prises et les résultats atteints au niveau primaire, le Comité s’inquiète de la faible participation des filles aux niveaux secondaire et supérieur et dans les filières techniques, ainsi que de leurs taux élevés d’échec et d’abandon. Il se déclare en outre inquiet des conditions actuelles qui gênent leur accès à l’éducation de tous niveaux, que ce soit la pauvreté, l’implantation scolaire clairsemée, les responsabilités familiales ou le mariage et la grossesse précoces. En outre, le Comité a appris avec inquiétude que les filles enceintes seraient transférées aux cours du soir, ce qui crée d’autres difficultés de fréquentation pour des raisons de sécurité.

Le Comité invite l ’ État partie à affecter davantage de ressources aux programmes visant les obstacles à l ’ égalité de participation des deux sexes aux études secondaires et supérieures. Il encourage l ’ État partie à favoriser activement la diversification des choix pédagogiques et professionnels et des débouchés pour les femmes. Il recommande que, pour les filles, des mesures soient prises afin de recenser et d ’ attaquer les causes des taux élevés d ’ échec et d ’ abandon; enfin, il recommande que les filles enceintes soient épaulées et encouragées à continuer leurs études.

Le Comité s’inquiète de ce qu’une bonne éducation sexuelle, essentielle pour bien comprendre la sexualité, manque dans les programmes scolaires. Il s’inquiète surtout de ce que, paradoxalement et malgré les disposition légales en vigueur, les écolières soient parfois victimes d’abus sexuels de la part d’enseignants, de condisciples, etc.

Le Comité invite l ’ État partie à veiller à ce qu ’ une éducation sexuelle adaptée à leur âge soit donnée aux filles et aux garçons pour leur donner une idée saine et rationnelle de la sexualité. Il l ’ invite aussi à veiller à ce que les auteurs de harcèlements ou d ’ abus sexuels d ’ écolières ou d ’ étudiantes soient sévèrement punis, à ce que ces actes soient considérés comme une atteinte aux droits de l ’ homme et à ce que les filles soient encouragées à les signaler. De plus, le Comité invite l ’ État partie à prendre des mesures pour créer un environnement positif qui empêchera de telles situations de survenir, notamment en encourageant les familles à ne pas accepter de régler ces affaires en mariant leur fille à l ’ agresseur.

Le Comité se déclare inquiet de la situation préjudiciable et discriminatoire des femmes sur le marché du travail structuré, où elles sont surreprésentées au bas de l’échelle des secteurs privé et public et, au niveau administratif, lésées par l’écart salarial et par un moindre accès que les hommes aux compensations financières et aux prestations. Le Comité s’inquiète également de l’exécution molle des dispositions égalitaires des lois du travail. Il s’inquiète enfin du grand nombre de travailleuses du secteur non structuré où elles n’ont ni sécurité de l’emploi ni accès aux prestations sociales.

Le Comité invite l ’ État partie à renforcer l ’ exécution des dispositions égalitaires des lois du travail, notamment celles qui concernent l ’ égalité des possibilités d ’ accès au marché du travail et aux professions libérales, l ’ égalité de traitement et de rémunération pour un travail égal ou de valeur égale et à garantir l ’ égalité d ’ accès aux prestations pour les femmes et les hommes. Il engage l ’ État partie à promouvoir la progression de la carrière des femmes et à recourir à des mesures temporaires spéciales pour accélérer leur progrès vers l ’ égalité dans les domaines du travail et de l ’ emploi. Il encourage l ’ État partie à donner aux travailleuses du secteur non structuré un vigoureux appui notamment en créant des possibilités de formation, en assurant leur accès au crédit et en prenant des mesures de sécurité et de protections sociales .

Le Comité s’inquiète des multiples problèmes en matière de santé auxquels sont confrontées les femmes, dont le taux de mortalité maternelle qui, malgré sa baisse, reste élevé, et est préoccupé par le taux élevé des grossesses précoces, lié au manque d’informations et de mesures préventives, à l’avortement illégal et à la mortalité maternelle. Le Comité s’inquiète aussi de ce que les femmes sont encore lésées par le manque d’accès aux services de santé, notamment génésique, par le manque d’informations sur la santé sexuelle et génésique, et par les difficultés liées entre autres au manque de ressources, aux aménagements insuffisants et à l’état des routes et des transports.

Le Comité invite l ’ État partie à aborder globalement les soucis de santé des femmes. Il l ’ invite à prendre des mesures pour améliorer leur accès aux services de santé, pour améliorer la fourniture des renseignements et de l ’ éducation sur la santé sexuelle et génésique et pour s ’ attaquer aux causes connues de la mortalité maternelle. Il recommande aussi que les mesures visant la prévention des grossesses involontaires, notamment précoces, soient renforcées en faisant mieux connaître les services de planification familiale.

Le Comité s’inquiète beaucoup du niveau alarmant et de la propagation rapide du VIH/sida chez les femmes, notamment jeunes et enceintes, et des conséquences omniprésentes de la pandémie au Mozambique, notamment le nombre élevé d’orphelins.

Tout en prenant note avec satisfaction des programmes mondiaux établis face à la pandémie du sida et de la priorité déjà accordée à la question, le Comité recommande que les efforts se poursuivent pour tenir compte de tous les aspects pertinents de l ’ effet du VIH/sida sur les femmes ainsi que de ses conséquences sociales et familiales.

Le Comité s’inquiète de la situation des femmes des zones rurales et isolées qui est caractérisée par la pauvreté, l’analphabétisme, les difficultés d’accès aux services sanitaires et sociaux et le manque de participation aux décisions communautaires. Il se déclare inquiet de la situation particulièrement difficile des femmes chefs de famille. Il constate que, malgré l’existence de dispositions juridiques à cet égard, les rurales n’ont souvent guère accès à la propriété foncière. Enfin, le Comité se déclare inquiet de l’effet spécifique de la dégradation de l’environnement sur leur situation.

Le Comité recommande que l ’ État partie prenne des mesures pour accroître et renforcer la participation des femmes à la conception et à l ’ exécution des plans locaux de développement et qu ’ il se soucie particulièrement des besoins des rurales, notamment chefs de famille, afin qu ’ elles participent aux processus décisionnels et qu ’ elles aient un meilleur accès aux services de santé, d ’ éducation, d ’ adduction d ’ eau potable et d ’ assainissement, aux terres fertiles et à des travaux rémunérateurs. Le Comité recommande en outre que l ’ on évalue les conséquences de la dégradation de l ’ environnement pour les femmes en particulier et qu ’ il soit tenu compte de ces évaluations dans les politiques et les solutions adopté e s. Il recommande aussi que l ’ État partie diffuse largement les renseignements relatifs aux droits des femmes selon la loi foncière .

Tout en reconnaissant les efforts entrepris, le Comité se déclare inquiet de la situation vulnérable de certains groupes de femmes, notamment handicapées, qui, sur le marché du travail, souffrent de marginalisation et d’exclusion sociales. Il s’inquiète notamment de la situation sociale des femmes âgées que lèsent la pauvreté, l’isolement, le manque de carte d’identité, et les croyances culturelles sur les femmes âgées et les accusations de sorcellerie dont elles sont l’objet. Enfin, le Comité se déclare inquiet des vulnérabilités particulières des réfugiées et des femmes déplacées.

Le Comité recommande que l ’ État partie accorde une attention particulière à la situation précaire des femmes âgées, des handicapées, des réfugiées et des femmes déplacées pour qu ’ elles puissent avoir un accès total aux services sanitaires et sociaux et aux processus décisionnels, et qu ’ elles aient des emplois convenables sur le marché du travail. Le Comité invite aussi l ’ État partie à adopter des programmes spéciaux pour atténuer la pauvreté chez ces groupes de femmes et pour combattre toutes les formes de discrimination à leur égard. Enfin, le Comité invite l ’ État partie à réfuter les idées traditionnelles sur les femmes âgées, notamment les accusations de sorcellerie, et à fournir à ces femmes une carte d ’ identité gratuite pour garantir leur accès complet aux services sociaux et à la protection sociale.

Tout en se félicitant du grand progrès que représente la nouvelle loi sur la famille, le Comité s’inquiète de la persistance de pratiques coutumières discriminatoires concernant le mariage et les relations familiales. Il s’inquiète aussi de ce que les femmes en union libre (chose courante au Mozambique) et leurs enfants ne jouissent pas d’une protection légale suffisante.

Le Comité invite l ’ État partie à suivre de près l ’ application de la nouvelle loi sur la famille pour garantir aux femmes l ’ égalité de droits dans le mariage et les relations familiales et à veiller à ce que, en cas de conflit entre le droit écrit et le droit coutumier, le premier l ’ emporte. Il recommande que l ’ État partie examine avec soin la situation des femmes en union libre et des enfants issus de ces unions et qu ’ il veille à ce qu ’ ils jouissent de protections légales suffisantes.

Le Comité encourage l ’ État partie à ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention sur l ’ élimination de toutes les formes de discrimination à l ’ égard des femmes, et à accepter au plus vite l ’ amendement au paragraphe 1 de l ’ article 20 de la Convention concernant la périodicité de ses réunions.

Le Comité engage l ’ État partie à tenir le plus grand compte, dans l ’ exécution de ses obligations selon la Convention, de la Déclaration et du Programme d ’ action de Beijing qui renforcent les dispositions de la Convention, et il le prie de donner dans son prochain rapport périodique des renseignements à cet égard.

Le Comité souligne que l ’ exécution intégrale et efficace de la Convention est indispensable pour atteindre les objectifs du Millénaire pour le développement. Dans tous les efforts visant à les réaliser, il préconise donc l ’ inclusion d ’ une perspective sexospécifique et la prise en compte explicite des dispositions de la Convention et il prie l ’ État partie de donner des renseignements à cet égard dans son prochain rapport périodique.

Le Comité note que l ’ adhésion des États aux sept grands instruments internationaux concernant les droits de l ’ homme aide les femmes à en jouir ainsi que de leurs libertés fondamentales dans tous les domaines de la vie. Il encourage donc le Gouvernement mozambicain à envisager de ratifier les traités auxquels il n ’ est pas encore partie, à savoir le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille.

Le Comité demande que soient largement diffusées au Mozambique les présentes observations finales afin d ’ y faire connaître à la population et notamment aux fonctionnaires, aux politiques, aux parlementaires et aux organisations de défense des femmes et des droits de l ’ homme, les mesures prises pour instaurer en droit et en fait l ’ égalité des sexes ainsi que les autres mesures voulues à cet égard. Le Comité prie l ’ État partie de continuer de diffuser largement, notamment auprès des organisations de défense des femmes et des droits de l ’ homme, la Convention, son Protocole facultatif, les recommandations générales du Comité, la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing et le texte issu de la vingt-troisième session extraordinaire de l ’ Assemblée générale et intitulé «  Les femmes en l ’ an 2000 : égalité entre les sexes, développement et paix pour le XXI e siècle  ».

Le Comité prie l ’ État partie de tenir compte des préoccupations exprimées dans les présentes observations finales lorsque, conformément à l ’ article 18 de la Convention, il établira son prochain rapport périodique. Il l ’ invite à présenter son troisième rapport périodique, qui était attendu en mai 2006, et son quatrième rapport périodique, attendu en mai 2010, sous forme de rapport unique en 2010.