Nations Unies

CRPD/C/MUS/CO/1

Convention relative aux droits des personnes handicapées

Distr. générale

30 septembre 2015

Français

Original : anglais

Comité des droits des personnes handicapées

Observations finales concernant le rapport initial de Maurice *

I.Introduction

Le Comité a examiné le rapport initial de Maurice (CRPD/C/MUS/1) à ses 214e et 215e séances (CRPD/C/SR.214 et 215), tenues respectivement les 24 et 25 août 2015, et a adopté les observations finales ci-après à sa 225e séance, le 1er septembre 2015.

Le Comité accueille avec satisfaction le rapport initial de Maurice, qui a été rédigé conformément aux directives du Comité concernant l’établissement des rapports, et remercie l’État partie de ses réponses écrites (CRPD/C/MUS/Q/1/Add.1) à la liste de points élaborée par le Comité.

Le Comité se félicite du dialogue fructueux qu’il a eu avec la délégation de l’État partie, au cours duquel de nombreuses questions ont été soulevées, et salue l’esprit d’initiative et d’ouverture de la délégation.

II.Aspects positifs

Le Comité félicite l’État partie des progrès suivants :

a)La loi de 2008 sur les droits en matière d’emploi, qui interdit expressément le harcèlement en raison d’un handicap sur le lieu de travail ;

b)La mise en service en 2012 d’une base de données sur le handicap ;

c)L’accroissement conséquent du budget social en faveur des personnes handicapées ;

d)La création d’un Comité national de surveillance et de mise en œuvre des mesures en faveur des personnes handicapées, sous la houlette du Ministère de la sécurité sociale.

III.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

A.Principes généraux et obligations générales (art. 1 à 4)

Le Comité s’inquiète de constater que les définitions figurant dans la loi sur l’égalité des chances et la loi sur la formation et l’emploi des personnes handicapées traduisent toujours une vision médicale du handicap et sont par conséquent incompatibles avec la notion de handicap consacrée par la Convention. Il s’inquiète également de l’utilisation d’un langage péjoratif à l’égard des personnes handicapées dans les lois, les politiques et les discours. Il regrette en outre de constater que les progrès obtenus grâce à l’application du plan d’action de 2007 sur le handicap sont incertains et que les personnes handicapées n’ont pas été consultées lors de l’élaboration du projet de loi sur le handicap et du document stratégique et plan d’action relatifs au handicap pour la période 2015-2020.

Le Comité recommande à l’État partie de modifier la loi sur l’égalité des chances et la loi sur la formation et l’emploi des personnes handicapées afin qu’elles rendent compte d’une vision du handicap inspirée des droits de l’homme , ainsi que de cesser d’employer des termes péjoratifs à l’égard de ces personnes dans ses lois, politiques et discours. Le Comité prie l’État partie de consulter régulièrement, concrètement et dans un esprit de transparence, les organisations de personnes handicapées et de les associer pleinement à la conception, la mise en œuvre et le suivi des lois, politiques et plans d’action qui les concernent, en particulier le projet de loi sur le handicap et le document stratégique et plan d’action sur le handicap pour la période 2015 - 2020, afin que ce document énonce des objectifs, repères et indices clairs et que les ressources nécessaires à son application concrète soient allouées.

Le Comité relève que l’État partie s’est engagé à retirer les réserves qu’il a exprimées à l’égard des articles 9 (par. 2), 11 et 24 (par. 2) de la Convention (voir A/HRC/25/8, par. 129.10, 129.11 et 129.12) mais il constate que ce processus n’a pas encore été engagé. Il regrette également que l’État partie assujettisse la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits des personnes handicapées au retrait de ces réserves.

Le Comité recommande à l’État partie de retirer toutes les réserves qu’il a exprimées à l’égard de la Convention et de ratifier le Protocole facultatif dans les meilleurs délais.

B.Droits spécifiques (art. 5 à 30)

Égalité et non-discrimination (art. 5)

Le Comité s’inquiète de constater que la législation de l’État partie, notamment la loi sur l’égalité des chances, traduit encore une vision médicale du handicap, et que la notion d’aménagement raisonnable n’est pas encore définie et intégrée à la législation de l’État partie.

Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que l’ensemble de sa législation soit mise en conformité avec la Convention, qu’elle définisse la notion d’aménagement raisonnable conformément à l’article 2 de cet instrument et qu’elle reconnaisse le refus d’aménagement raisonnable comme une forme de discrimination fondée sur le handicap, de discrimination croisée et de discrimination par association.

Femmes handicapées (art. 6)

Le Comité constate avec préoccupation que les relations entre le « Forum des femmes handicapées » et l’État partie sont toujours ambiguës. Il regrette aussi que la situation particulière des femmes et des filles handicapées ne soit pas convenablement prise en compte dans la législation et dans les politiques de l’État partie, ce qui ressort notamment de l’absence de dispositions les concernant dans la loi sur la protection contre la violence familiale.

Le Comité recommande à l’État partie d’intégrer, en coopérant pleinement avec les organisations de femmes et de filles handicapées, les droits de celles-ci dans toutes les lois, politiques et programmes et de prendre toutes les mesures nécessaires pour les protéger contre les discriminations multiples et croisées et contre la violence afin qu’elles puissent jouir pleinement de tous les droits que leur confère la Convention. Il lui recommande en outre de veiller à ce que les lois relatives à la lutte contre la discrimination et la violence sexistes prévoient des sanctions exécutoires et proportionnées et des recours utiles.

Enfants handicapés (art. 7)

Le Comité partage la préoccupation exprimée par le Comité des droits de l’enfant (CRC/C/MUS/CO/3-5, par. 49), selon lequel l’État partie donne la priorité à une démarche d’intégration au lieu de s’efforcer d’éliminer les obstacles physiques, socioéconomiques et culturels qui freinent la pleine insertion des intéressés dans les écoles et la société. De plus, le Comité s’inquiète de voir que l’État partie s’appuie excessivement sur les organisations non gouvernementales pour offrir des services spécialisés aux enfants handicapés sans pour autant apporter à ces organisations le soutien, le suivi et l’orientation en matière de réglementation dont elles ont besoin. Il s’inquiète également de l’insuffisance des mesures visant à prévenir le placement d’enfants handicapés dans des « centres de sauvegarde » (« abris des enfants en détresse ») et du rejet et de la stigmatisation auxquels ceux-ci sont confrontés.

Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures concrètes pour que des services de qualité inclusifs soient offerts aux filles et aux garçons handicapés, tant dans le secteur public que dans le secteur privé, conformément à la Convention, et d’allouer à ces services les ressources dont ils ont besoin. Il recommande de plus à l’État partie de veiller à ce que les programmes gérés par des organisations non gouvernementales soient réglementés et étroitement suivis et à ce que le personnel de ces organismes bénéficie d’un suivi spécifique. Le Comité recommande également à l’État partie de modifier la politique nationale relative à l’enfance et la stratégie nationale de protection de l’enfance afin d’y intégrer des mesures spécifiques qui permettront aux enfants handicapés de jouir de leurs droits de la même manière que les autres enfants.

Sensibilisation (art. 8)

Le Comité constate avec préoccupation que les campagnes de sensibilisation concernant la Convention et le Protocole facultatif s’y rapportant destinées au public, y compris aux personnes handicapées, demeurent limitées.

Le Comité recommande à l’État partie de concevoir, de développer et de mener, en collaboration avec les personnes handicapées et les organismes qui les représentent  :

a) Des campagnes portant sur des questions de discrimination spécifiques destinées à faire évoluer la culture du public en général, avec l’appui des médias  ;

b) Des formations à l’intention des personnes handicapées, de leur famille et des organismes qui les représentent, ainsi que des fonctionnaires pertinents et des entités concernées du secteur privé, afin que ceux-ci appliquent une vision du handicap inspirée des droits de l’homme.

Accessibilité (art. 9)

Le Comité constate avec inquiétude que les personnes handicapées rencontrent divers obstacles pour accéder à leur environnement physique, aux services d’information et de communication, aux transports et aux autres services publics, et ne peuvent par conséquent pas exercer leurs droits sur un pied d’égalité avec les autres personnes, parce que l’État partie ne prend pas suffisamment de mesures concrètes pour lever ces obstacles.

Le Comité recommande à l’État partie de procéder à la révision annoncée de la loi sur la construction, de la loi sur les routes, de la loi sur le morcellement et de la loi sur l’aménagement du territoire , ainsi que d’adopter un plan d’action relatif à l’accessibilité juridiquement contraignant, comportant des niveaux de référence, des indicateurs et des échéances, pour couvrir tous les aspects du cadre bâti, des services publics, de l’information et des communications, y compris l’interprétation en langue des signes, les systèmes d’assistance auditive et les transports aériens et maritimes, comme mentionné dans l’observation générale n o 2 (2014) du Comité portant sur l’accessibilité. Une évaluation et un suivi réguliers du plan, avec la participation d’organisations de personnes handicapées, devraient être effectués dans des délais définis et des sanctions devraient être infligées en cas de non-respect.

Situations de risque et situations d’urgence humanitaire (art. 11)

Le Comité regrette le manque de clarté du régime juridique que l’État partie intégrera à son projet de loi relatif à la réduction des risques et à la gestion des catastrophes afin de répondre aux obligations que lui impose l’article 11 de la Convention.

Le Comité recommande à l’État partie de consulter étroitement et de faire participer activement les personnes handicapées, par l’intermédiaire des organisations qui les représentent, au processus de rédaction du projet de loi relatif à la réduction des risques et à la gestion des catastrophes, en vue d’instaurer une gestion des risques de catastrophe qui tienne compte des handicapés et leur soit accessible.

Reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité (art. 12)

Le Comité est préoccupé par le fait que l’institution permettant la prise de décisions par substitution et la tutelle pour les personnes handicapées, conformément aux critères dérogatoires énumérés dans le Code civil mauritanien, et que les personnes handicapées placées en institutions soient privées des droits de signer des contrats, de voter, de se marier, de prendre des décisions concernant leur santé et d’avoir accès à la justice, violent l’article 12 de la Convention.

Le Comité recommande à l’État partie d’abolir les mesures de tutelle en droit et en pratique, de veiller à ce que les personnes handicapées jouissent de la même capacité juridique que les autres et d’établir des mécanismes d’aide à la prise de décisions, conformément à l’observation générale n o 1 (2014) du Comité sur la reconnaissance de la personnalité juridique dans des conditions d’égalité.

Accès à la justice (art. 13)

Le Comité regrette l’absence d’informations claires sur les résultats des mesures de conciliation et sur les réparations offertes aux victimes. Il s’inquiète également de constater qu’aucune information n’a été donnée sur les mesures prises pour garantir que les auteurs de violations des droits des personnes handicapées rendent des comptes.

Le Comité recommande à l’État partie de prévoir des aménagements adaptés aux handicaps et à l’âge des intéressés dans toutes les procédures judiciaires. L ’État partie devrait veiller à ce que des mesures −  assorties de mécanismes d’exécution  − favorisant l’accessibilité, comme l’utilisation du Braille, l’interprétation en langue des signes, des modes de communication différents et des formats aisément lisibles, soient disponibles gratuitement dans toutes les juridictions et à ce que le personnel des systèmes judiciaire et pénitentiaire soit convenablement formé à l’application des normes relatives aux droits de l’homme propres aux personnes handicapées.

Liberté et sécurité de la personne (art. 14)

Le Comité s’inquiète de ce que la législation de l’État partie autorise l’hospitalisation et le placement en institution de personnes handicapées, y compris d’enfants, contre leur gré, en raison de leur handicap ou parce qu’elles sont considérées comme représentant un danger pour elles-mêmes ou pour la société. Il regrette l’absence de données sur ce sujet.

Le Comité recommande à l’État partie de modifier sa législation de façon à interdire le placement en institution d’individus contre leur gré et de promouvoir des mesures de substitution conformes à la Convention.

Droit de ne pas être soumis à l’exploitation, à la violence et à la maltraitance (art. 16)

Le Comité constate avec inquiétude que peu de mesures ont été prises pour prévenir et combattre la violence et la maltraitance à l’égard des personnes handicapées, en particulier les sévices sexuels sur des enfants handicapés, y compris au sein de la famille. Il s’inquiète également d’informations faisant état de maltraitance et de négligence à l’égard de garçons et de filles placés dans certaines institutions gérées par des organisations non gouvernementales. Il s’inquiète enfin de constater que les personnes handicapées victimes de violences, en particulier les garçons et les filles, ne reçoivent quasiment aucune aide pour sortir des situations de maltraitance dans lesquelles elles se trouvent et que ces actes ne donnent pas lieu à des poursuites.

Le Comité prie instamment l’État partie de prendre d’urgence des mesures destinées à prévenir la violence envers les femmes, les hommes, les filles et les garçons handicapés, à protéger ceux qui sont victimes de violences et à garantir que les auteurs de tels actes soient traduits en justice. L’État partie devrait en particulier  :

a) Mettre en place des lignes téléphoniques d’urgence et des foyers d’accueil entièrement financés et accessibles aux personnes handicapées victimes de violences, que ce soit à leur domicile ou non  ;

b) Dispenser à l’ensemble du personnel concerné une formation spécifique afin qu’il soit à même d’identifier et de signaler les actes de violence envers les personnes handicapées  ;

c) Veiller à ce que les personnes handicapées victimes de violences aient accès à des recours utiles et reçoivent tout le soutien nécessaire à leur rétablissement mental et physique.

Protection de l’intégrité de la personne (art. 17)

Le Comité est préoccupé par l’absence de mécanismes destinés à prévenir le traitement forcé de personnes handicapées dans les hôpitaux et les institutions, en particulier la stérilisation forcée des femmes et des filles handicapées.

Le Comité recommande à l’État partie d’interdire expressément les traitements forcés à l’égard de personnes handicapées et la stérilisation forcée de femmes et de filles handicapées sans le consentement libre et éclairé des intéressés.

Autonomie de vie et inclusion dans la société (art. 19)

Le Comité s’inquiète de constater que les familles, qui sont souvent le seul soutien des personnes et des enfants handicapés, en particulier ceux qui sont atteints d’un handicap psychosocial ou intellectuel, ne reçoivent qu’une aide limitée de l’État. Il constate également avec préoccupation que des enfants sont retirés d’un milieu familial pour être placés dans des institutions où ils manquent de soins et de soutien psychologique et sont parfois soumis à des traitements cruels, inhumains ou dégradants. Il s’inquiète enfin de voir que les centres d’accueil de jour privés où des enfants handicapés sont placés ne sont ni réglementés ni contrôlés par l’État et que des enfants handicapés sont encore placés dans des centres de sauvegarde (« abris des enfants en détresse »).

Le Comité recommande à l’État partie de retirer d’urgence les enfants handicapés résidant dans des centres de sauvegarde ( «  abris des enfants en détresse  » ) et d’élaborer des solutions de remplacement de type familial et communautaire pour les enfants privés de milieu familial. L’État partie devrait passer dès que possible du système des centres d’accueil de jour privés non réglementés à une éducation inclusive de la petite enfance et un cadre éducatif inclusif  ; il devrait, pendant la période transitoire, réglementer et surveiller étroitement ces centres. L’État partie devrait adopter d’urgence des mesures en faveur de la désinstitutionalisation des personnes handicapées et élaborer, au niveau communautaire, des mécanismes destinés à promouvoir l’autonomie et l’inclusion des personnes handicapées et les possibilités pour celles-ci de faire leurs propres choix. Le Comité recommande également à l’État partie de créer des services d’appui efficaces et de qualité pour les parents qui s’occupent d’enfants handicapés et pour permettre aux personnes handicapées de vivre de façon autonome dans la communauté, et d’instaurer des systèmes de protection efficaces.

Éducation (art. 24)

Le Comité s’inquiète de la lenteur de la mise en œuvre de la politique officielle de 2006 sur l’éducation inclusive, avec pour conséquence que les enfants handicapés sont encore, dans la plupart des cas, séparés des autres et que nombre d’entre eux sont complétement privés de toute forme d’éducation. Il s’inquiète également de la onzième disposition du projet de loi sur le handicap, qui prévoit une exception générale à l’éducation inclusive et la création planifiée de 14 unités « intégrées » dans le système d’enseignement général, ce qui pérenniserait la ségrégation entre les élèves et retarderait la création d’une école pleinement inclusive. Le Comité s’inquiète en outre de voir que des enfants handicapés âgés de 2 ou 3 ans sont inscrits dans des écoles spécialisées gérées par des organisations non gouvernementales, ce qui touche particulièrement les enfants souffrant d’un handicap sensoriel et les empêche dès le départ d’être inclus dans l’enseignement général. Le Comité est préoccupé par la situation des élèves handicapés qui n’ont pas accès aux transports publics dans les zones rurales et qui ne perçoivent aucune indemnisation pour les autres modes de transport qu’ils pourraient emprunter.

Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de revoir la onzième disposition du projet de loi sur le handicap et de renoncer à la création d’unités intégrées dans les écoles  ; il lui recommande plutôt de s’engager promptement à mettre en place un système éducatif de qualité entièrement financé et inclusif , auquel ceux qui ont été privés d’éducation pourront accéder tout au long de leur vie et bénéficier de formations professionnelles. L’État partie devrait offrir des plans d’enseignement sur mesure à tous les élèves handicapés, dispenser aux enseignants des formations obligatoires avant leur entrée en fonctions et durant leur carrière concernant l’éducation inclusive, y compris les outils d’assistance, le soutien individuel dans la classe, le matériel et les programmes pédagogiques accessibles, et mettre en place des transports, équipements et milieux scolaires accessibles, en débloquant les ressources budgétaires voulues. L’État partie devrait enfin promouvoir l’inscription de tous les enfants handicapés dans une éducation inclusive de qualité.

Santé, adaptation et réadaptation (art. 25 et 26)

Le Comité regrette l’absence d’informations sur les services de santé et d’intervention rapide disponibles, parmi lesquels des services sur la santé sexuelle et procréative et des services d’adaptation et de réadaptation adaptés à l’âge des personnes handicapées concernées. Le Comité s’inquiète de l’insuffisance des mesures sociales destinées à financer les frais liés au handicap en faveur des enfants handicapés.

Le Comité recommande à l’État partie d’adopter des procédures claires concernant les services d’intervention précoce en faveur des personnes handicapées et l’offre de services d’adaptation et de réadaptation appropriés et accessibles , y compris à l’intention des parents handicapés, en accordant une attention particulière aux parents de tous les enfants handicapés. Le Comité recommande également à l’État partie de faire en sorte que les frais de santé et de réadaptation et les autres frais encourus par les enfants handicapés soient pris en charge.

Travail et emploi (art. 27)

Le Comité regrette de constater qu’une grande partie des personnes handicapées ne sont pas considérées comme adaptées au marché du travail ordinaire et font l’objet d’une forte discrimination dans l’accès au travail. Il regrette en outre que la règle selon laquelle 3 % de la main-d’œuvre doit être constituée de personnes handicapées ne s’applique qu’au secteur privé et n’est pas correctement mise en œuvre. Il s’inquiète enfin de la fréquence des ateliers protégés et de l’absence de programmes officiels de transition qui permettraient aux jeunes handicapés de trouver un emploi sur le marché du travail ordinaire.

Le Comité recommande à l’État partie d’élaborer des mesures législatives et politiques efficaces pour permettre aux personnes handicapées de passer d’un emploi protégé à un emploi sur le marché du travail ordinaire et de veiller à ce que les intéressés ne soient pas soumis à des discriminations dans leur emploi, y compris en reconnaissant expressément l’obligation de prévoir des aménagements raisonnables. L’État partie devrait étendre les mesures d’action positive au secteur public et en surveiller l’application, élaborer des programmes destinés à favoriser l’insertion des jeunes handicapé s sur le marché du travail ordinaire, en coopération étroite avec les organisations de personnes handicapées, et veiller à ce que des sanctions soient infligées aux employeurs qui ne respecteraient pas le quota applicable.

Participation à la vie politique et à la vie publique (art. 29)

Le Comité constate avec préoccupation que les articles 34 (par. 1) et 43 de la Constitution, tout comme certaines règles électorales et certains règlements, restreignent le droit des personnes handicapées de voter et d’être élues.

Le Comité recommande à l’État partie d’abroger la disposition discriminatoire figurant aux articles 34 ( par.  1) et 43 de la Constitution ainsi que les règlements correspondants et de veiller à ce que toutes les personnes handicapées jouissent de leur droit de voter et d’être élues.

Participation à la vie culturelle et récréative, aux loisirs et aux sports (art. 30)

Le Comité regrette que l’État partie n’ait pas encore adhéré au Traité de Marrakech visant à faciliter l’accès des aveugles, des déficients visuels et des personnes ayant d’autres difficultés de lecture des textes imprimés aux œuvres publiées. Il s’inquiète aussi de l’absence de politiques sur l’accessibilité dans les secteurs du tourisme et du voyage.

Le Comité recommande à l’État partie  :

a) D’adhérer au Traité de Marrakech dès que possible  ;

b) De veiller à ce que les bibliothèques, les supports audiovisuels et les services de diffusion soient accessibles aux personnes handicapées  ;

c) De s’assurer que les politiques et les pratiques suivies en matière de tourisme tiennent compte des personnes handicapées et leur soient accessibles, et de diffuser les recommandations de l’Organisation mondiale du tourisme en faveur d’un tourisme accessible à tous auprès de l’ensemble des agents de voyage et agences de tourisme.

C.Obligations spécifiques (art. 31 à 33)

Statistiques et collecte des données (art. 31)

Le Comité s’inquiète de constater que les chiffres de l’État partie en matière de handicap sont bien inférieurs aux estimations de l’Organisation mondiale de la Santé, ce qui peut laisser penser qu’il existe certains problèmes dans la collecte de données, en particulier eu égard à la terminologie ambiguë actuellement employée dans l’État partie au sujet des handicaps liés à la communication. Le Comité regrette en outre qu’il n’existe pas de données relatives à tous les domaines couverts par la Convention.

Le Comité recommande à l’État partie de renforcer le système, mis en place en 2012, de collecte de données concernant les personnes handicapées afin de rassembler des données ventilées par sexe, âge, lieu de vie (zone rurale ou urbaine) et type de handicap, dans tous les domaines couverts par la Convention, d’élaborer des politiques cohérentes et de contrôler que les personnes handicapées peuvent exercer leurs droits fondamentaux .

Application et suivi au niveau national (art. 33)

Le Comité constate avec préoccupation que, même si la mise en œuvre de la Convention est coordonnée, aucun mécanisme adéquat de suivi auquel participeraient les personnes handicapées et les organisations qui les représentent n’a été instauré.

Le Comité recommande à l’État partie de désigner un mécanisme indépendant de suivi conforme aux Principes de Paris, en veillant à ce que les personnes handicapées et les organisations qui les représentent participent pleinement à la désignation du mécanisme et au suivi de l’application de la Convention, comme l’exige le paragraphe 3 de l’article 33.

Suivi et diffusion

Le Comité demande à l’État partie de soumettre, dans un délai de douze mois et conformément au paragraphe 2 de l’article 35 de la Convention, des informations sur les mesures prises pour donner suite aux recommandations figurant aux paragraphes 8 et 42 des présentes observations finales, qui concernent le retrait des réserves formulées par l’État partie, la ratification du Protocole facultatif se rapportant à la Convention et l’adhésion au Traité de Marrakech.

Le Comité demande à l’État partie de mettre en œuvre les recommandations formulées dans les présentes observations finales. Il lui recommande de transmettre celles-ci, pour examen et suite à donner, aux membres du Gouvernement et du Parlement, aux responsables des ministères compétents, aux autorités locales, aux membres des professions concernées, tels que les professionnels de l’éducation, de la santé et de la justice, ainsi qu’aux médias, en recourant pour ce faire aux stratégies de communication sociale modernes.

Le Comité encourage vivement l’État partie à associer les organisations de la société civile, en particulier les organisations de personnes handicapées, à l’élaboration de son rapport périodique.

Le Comité prie l’État partie de diffuser largement les présentes observations finales, tout particulièrement auprès des organisations non gouvernementales et des organisations représentant les personnes handicapées ainsi qu’auprès des personnes handicapées elles-mêmes et des membres de leur famille, dans les langues nationales et les langues des minorités, y compris en langue des signes, dans des formats accessibles, et de les afficher sur le site Internet du Gouvernement dédié aux droits de l’homme.

Prochain rapport

Le Comité demande à l’État partie de soumettre ses deuxième et troisième rapports périodiques en un seul document au plus tard le 8 février 2020, et d’y faire figurer des renseignements sur la mise en œuvre des présentes observations finales. Il invite l’État partie à envisager de soumettre ces rapports selon la procédure simplifiée de présentation des rapports, dans le cadre de laquelle le Comité établit une liste de points au moins un an avant la date à laquelle les rapports doivent lui être soumis. Les réponses de l’État partie à cette liste constituent son rapport.