Nations Unies

CERD/C/BWA/CO/17-22

Convention internationale sur l’élimination de toutes les formes de discrimination raciale

Distr. générale

14 décembre 2022

Français

Original : anglais

Comité pour l’élimination de la discrimination raciale

Observations finales concernant le rapport du Botswana valant dix-septième à vingt-deuxième rapports périodiques *

1.Le Comité a examiné le rapport du Botswana valant dix-septième à vingt-deuxième rapports périodiques, à ses 2937e et 2938e séances, les 21 et 22 novembre 2022. À ses 2949e et 2950e séances, les 29 et 30 novembre 2022, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

2.Le Comité accueille avec satisfaction le rapport de l’État partie valant dix-septième à vingt-deuxième rapports périodiques, mais regrette qu’il ait été soumis avec seize ans de retard. Le Comité se félicite du dialogue constructif qu’il a eu avec la délégation multisectorielle de haut niveau de l’État partie et remercie la délégation pour les renseignements fournis pendant et après le dialogue.

B.Aspects positifs

3.Le Comité se félicite des mesures législatives et stratégiques ci-après que l’État partie a prises depuis l’examen du rapport précédent :

a)La loi sur la cybercriminalité et les délits informatiques, en 2018 ;

b)La stratégie nationale de développement (Vision 2016, remplacée par Vision 2036) ;

c)La loi relative à la lutte contre la traite des personnes, en 2014 ;

d)Le programme de développement des zones reculées et son cadre d’action palliative pour les communautés vivant dans des zones reculées, en 2014 ;

e)La loi établissant l’aide juridictionnelle au Botswana, en 2013 ;

f)La loi sur la chefferie traditionnelle (loi Bogosi), en 2008 ;

g)La création du Groupe des droits de l’homme au Ministère des affaires présidentielles, de la gouvernance et de l’administration publique ;

h)La création du Comité interministériel des traités, conventions et protocoles, au Ministère des affaires internationales et de la coopération.

C.Préoccupations et recommandations

Statistiques

4.Malgré les données que l’État partie a fournies concernant le nombre de langues parlées au Botswana et les explications qu’il a données dans son rapport sur les raisons qui l’empêchent de recueillir des données relatives à l’appartenance ethnique des personnes composant sa population, le Comité regrette de ne toujours pas disposer de statistiques complètes sur la structure ethnique de la population.

5. Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer à mettre au point et appliquer d ’ autres méthodes et outils, tels que des enquêtes, afin de recueillir , dans le respect des principes d ’ auto-identification et d ’ anonymat, des données et des informations qui permettraient d ’ évaluer avec précision les progrès accomplis en ce qui concerne l ’ exercice, dans des conditions d ’ égalité, par tous les groupes, sans discrimination, des droits protégés par la Convention, et de lui fournir les informations pertinentes dans son prochain rapport périodique.

Définition de la discrimination raciale

6.Le Comité est préoccupé par l’absence d’une définition harmonisée et complète de la discrimination raciale dans la législation de l’État partie, qui soit pleinement conforme à l’article premier de la Convention. Le Comité note en particulier que les motifs de discrimination prohibés ne sont pas les mêmes selon qu’il s’agit de l’article 3 de la Constitution, des articles 92 et 94 (par. 2) du Code pénal et de la loi sur la cybercriminalité et les délits informatiques (art. 1er).

7. Le Comité recommande à l ’ État partie de revoir les dispositions susmentionnées de la Constitution en vue d ’ adopter une définition de la discrimination raciale qui soit pleinement conforme à l ’ article premier de la Convention, y compris en ce qui concerne les lois et les pratiques qui peuvent ne pas être discriminatoires dans leur but, mais dans leurs effets.

Place de la Convention dans l’ordre juridique interne

8.Le Comité prend note des explications de l’État partie sur son système dualiste, mais il regrette que peu de lois nationales et d’affaires judiciaires fassent référence à la Convention. Il regrette également l’absence d’informations sur les mesures qui ont été prises pour faire mieux connaître la Convention auprès de la population, des membres de l’appareil judiciaire et des agents de la force publique de l’État partie (art. 2).

9.Le Comité recommande à l’État partie de prendre des mesures appropriées, notamment en ayant recours à la formation, pour veiller à ce que les juges, les procureurs, les avocats et les agents de la force publique connaissent suffisamment les dispositions de la Convention. Il demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des exemples précis de l’application de la Convention par les tribunaux nationaux.

Mesures destinées à réduire les inégalités

10.Le Comité prend note des mesures que l’État partie a prises pour réduire la pauvreté et assurer l’accès aux services sociaux de base dans les zones reculées. Le Comité note que, parmi les groupes thématiques chargés de l’application de ces mesures, le groupe de travail thématique sur la gouvernance, la sûreté et la sécurité traite directement des questions liées à la discrimination raciale. Toutefois, en l’absence de renseignements détaillés, le Comité reste préoccupé par les effets concrets de ces mesures sur les communautés défavorisées ou éloignées (art. 2 et 5).

11. Le Comité prend note des efforts que l ’ État partie a déployés pour améliorer les moyens de subsistance des groupes défavorisés, mais il rappelle sa recommandation générale n o 32 (2009) et recommande à l ’ État partie de prendre toutes les mesures spéciales nécessaires afin de remédier à la discrimination structurelle à laquelle se heurtent tous les groupes ethniques dans l ’ exercice de leurs droits, conformément aux articles 1 er (par. 4), 2 (par. 2) et 5 de la Convention. Le Comité recommande également à l ’ État partie de tenir dûment compte de la Convention dans la mise en œuvre des mesures susmentionnées et dans l ’ évaluation de leur s effets sur les communautés visées , en particulier en ce qui concerne les Basarwa /San, les Basubiya , les Bayeyi , les Mbukushu , les Ovambo, les Herero et les Kalanga .

Institution nationale des droits de l’homme

12.Le Comité prend note des efforts que l’État partie a déployés pour transformer le Bureau du Médiateur en institution nationale des droits de l’homme, efforts qui se sont achevés en novembre 2021, mais constate toujours avec préoccupation que l’institution n’est toujours pas opérationnelle. Le Comité constate également avec préoccupation que, selon les informations fournies par la délégation de l’État partie, le Bureau du Médiateur sera placé sous la supervision du Ministère de la justice, ce qui ne garantira pas son indépendance (art. 2).

13. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que l ’ institution nationale des droits de l ’ homme soit pleinement opérationnelle, notamment en lui allouant les ressources humaines et financières nécessaires à l ’ accomplissement de son mandat. Il lui recommande également de garantir la pleine indépendance de l ’ institution conformément aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l ’ homme (Principes de Paris) . En outre, le Comité invite l ’ État partie à envisager d ’ inclure les questions relatives à l ’ interdiction de la discrimination raciale et à la promotion de la tolérance entre les groupes ethniques dans le mandat de cette nouvelle institution.

Discours et crimes de haine à caractère raciste

14.Le Comité constate avec préoccupation que les lois de l’État partie incriminant la diffusion d’idées fondées sur la supériorité ou la haine raciale et l’incitation à la discrimination raciale, en particulier l’article 94 (par. 2) du Code pénal, ne couvrent pas les questions relatives à l’origine ethnique et à l’ascendance (art. 4).

15. À la lumière de sa recommandation générale n o 35 (2013), le Comité recommande à l ’ État partie de mettre sa législation relative aux discours et aux crimes de haine à caractère raciste en pleine conformité avec l ’ article 4 de la Convention. À cette fin, il réitère sa recommandation à l ’ État partie d’incriminer la diffusion de telles idées en intégrant l’ origine ethnique et l’ ascendance dans la définition de la discrimination visée à l ’ article 94 ( par. 2) du Code pénal. Le Comité recommande en outre à l ’ État partie de fournir, dans son prochain rapport périodique, des renseignements détaillés sur l ’ application de la législation interdisant les discours et les crimes de haine, y compris des données ventilées sur les plaintes déposées , les enquêtes menées , les poursuites engagées et les peines prononcées.

Accès à la justice

16.Le Comité regrette que l’aide juridictionnelle prévue par la législation de l’État partie adoptée en 2013, y compris les services d’interprétation pour les personnes appartenant aux groupes ethniques les plus défavorisés, ne soit fournie qu’en matière civile et qu’elle soit encore en phase pilote en matière pénale. Il regrette également que l’État partie n’applique pas le principe du renversement de la charge de la preuve dans les affaires de discrimination raciale. Il regrette en outre que la prise en compte de la discrimination raciale comme circonstance aggravante ne soit pas inscrite dans la loi. Par ailleurs, le Comité constate avec préoccupation que, selon les informations fournies par l’État partie, aucune réparation n’a jamais été accordée dans des affaires liées à la discrimination raciale, alors que l’article 316 (par. 1) de la loi sur la procédure pénale et les preuves prévoit de telles réparations (art. 6 et 7).

17. Le Comité appelle l ’ attention de l ’ État partie sur son observation générale nº 31 (2005). Il recommande à nouveau à l ’ État partie de fournir des services d ’ aide juridictionnelle et d ’ interprétation appropriés, en particulier aux personnes appartenant aux groupes ethniques les plus défavorisés, afin qu’elles puissent avoir pleinement accès à la justice, y compris en matière pénale . Il recommande également à l ’ État partie de faire de la motivation raciale une circonstance aggravante pour tous les actes incriminés par le Code pénal . Il recommande en outre à l ’ État partie d ’ envisager le renversement de la charge de la preuve dans toutes les affaires liées à la discrimination raciale et d ’ accorder aux victimes une réparation juste et équitable.

Plaintes pour discrimination raciale

18.Le Comité regrette que le nombre de plaintes enregistrées, de poursuites engagées et de condamnations prononcées dans des affaires de discrimination raciale impliquant des autorités policières et judiciaires de l’État partie soit relativement limité. Il regrette également l’explication fournie par la délégation de l’État partie selon laquelle le nombre limité de plaintes est justifié par la culture de tolérance qui existe au Botswana (art. 6 et 7).

19. Le Comité rappelle à l’État partie que l ’ absence d ’ affaires ou de plaintes ne signifie pas qu ’ il n ’ y a pas de discrimination raciale dans l ’ État partie, mais peut être révélateur de difficultés à invoquer en justice les droits consacrés par la Convention et du fait, par exemple, que le grand public ne connaît pas bien ces droits et ne sait pas comment les faire valoir devant les tribunaux. Le Comité recommande à l’État partie de mener des campagnes d’information sur les droits garantis par la Convention et sur la manière de porter plainte pour discrimination raciale, ainsi que sur les recours disponibles, et de fournir ces informations dans son prochain rapport périodique.

Terres, territoires et ressources naturelles

20.Le Comité constate avec préoccupation que les informations figurant dans les rapports parallèles diffèrent des informations fournies par l’État partie au sujet de l’application de la décision de la Haute Cour relative à la réserve animalière du Kalahari central. En particulier, les groupes qui n’étaient pas parties à l’affaire Roy Sesana and others v. Attorney General n’ont pas été autorisés à retourner dans la réserve pour s’y installer. En outre, ceux qui sont autorisés à revenir doivent obtenir un permis à l’avance et rencontrent des difficultés pour reprendre et mener leurs activités traditionnelles. Contrairement aux affirmations de l’État partie selon lesquelles la réserve animalière du Kalahari central n’est pas destinée à l’habitation humaine, les rapports des titulaires de mandat de l’ONU indiquent que la réserve a été créée à l’origine en 1961 pour permettre aux San, habitants d’origine du désert du Kalahari, d’y vivre selon leurs traditions de chasse et de cueillette tout en respectant la vie sauvage. Dans ces rapports, les titulaires indiquent également que l’exécution restrictive de la décision de la Haute Cour, et notamment l’obligation de quitter la réserve à l’âge de 18 ans, a pour but qu’il n’y ait plus d’habitants après le décès des aînés (art. 5).

21.Le Comité exhorte l ’ État partie à appliquer pleinement la décision de la Haute Cour dans l ’ affaire Roy Sesana and others v. Attorney General, en autorisant tous les groupes ethniques originaires de la réserve animalière du Kalahari central à y retourner et à s ’ y installer sans condition. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que ces groupes puissent avoir accès aux services sociaux de base et reprendre sans entrave leurs activités traditionnelles.

22.Le Comité est préoccupé par les effets de l’inscription de plusieurs sites du pays sur la Liste du patrimoine mondial sur les conditions de vie des habitants de ces sites, notamment ceux du delta de l’Okavango et du mont Tsodilo (art. 5).

23. Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que le mode de vie et les structures traditionnelles des groupes qui vivent sur d es sites du patrimoine mondial ne soient pas touchés par l ’ inscription de ces sites sur la Liste du patrimoine mondial.

24.Le Comité prend note de la modification de la loi sur les terres tribales et du fait que, selon les déclarations de la délégation de l’État partie, tout citoyen du Botswana peut, sans distinction fondée sur l’origine ethnique, acquérir des terres là où il veut dans le pays. Toutefois, le Comité reste préoccupé par les différents statuts des terres appartenant aux différents groupes et par l’absence de démarcation collective et de procédures de plainte pour les peuples autochtones (art. 5).

25. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir une égalité pleine et entière entre les différents groupes en ce qui concerne l ’ accès à la terre et la propriété foncière, ainsi que les procédures juridiques ou judiciaires y afférentes. Il lui recommande également d ’ organiser des campagnes d’information auprès des groupes minoritaires concernant les procédures administratives et juridiques liées à l ’ attribution des terres.

26.Le Comité prend note du lancement de plusieurs projets d’exploration minière, notamment dans le delta de l’Okavango et la réserve animalière du Kalahari central, où une société d’exploration est autorisée à exploiter une mine depuis plusieurs décennies, employant environ 1 200 travailleurs. Le Comité prend note de la déclaration de l’État partie selon laquelle les populations concernées par ces projets ont été consultées, mais il est préoccupé par les effets de ces projets sur le mode de vie et les structures traditionnelles de ces groupes ethniques (art. 5).

27. Le Comité recommande à l ’ État partie de protéger les zones d ’ importance culturelle des communautés touchées par d es projets menés par les industries extractives et manufacturières. Il lui recommande également de prendre des mesures appropriées pour prévenir les effets préjudiciables des activités économiques sur les droits et les modes de vie des groupes minoritaires et des peuples autochtones. En outre, le Comité invite l ’ État partie à l ’ informer de l ’ adoption et de l’application de la loi prévue sur la gestion communautaire des ressources nationales.

Participation des minorités à la vie politique et publique

28.Le Comité constate que les articles 77 à 79 de la Constitution concernant la représentation des tribus à la Chambre des chefs ont été révisés et que la loi Bogosi a remplacé la précédente loi sur la chefferie (1933). Toutefois, le Comité reste préoccupé par le fait qu’un nombre limité de tribus non tswanas ont été admises à la Chambre des chefs. Il constate également avec préoccupation que les chefs tswanas sont « nommés » membres de droit avec le statut de chefs suprêmes alors que les chefs non tswanas doivent être élus, non pas selon leurs coutumes, mais au sein de collèges électoraux régionaux, et occupent des postes subalternes à la Chambre des chefs (art. 5).

29.Le Comité recommande à l ’ État partie de veiller à ce que les tribus non tswanas soient admises à la Chambre des chefs dans le respect du principe d’inclusion et conformément à leurs propres mécanismes de prise de décision s . Il recommande également que les chefs de tribus soient traités sur un pied d ’ égalité à la Chambre des Chefs. Il recommande en outre à l ’ État partie de redoubler d ’ efforts pour que le s minorités ethniques aient les mêmes chances d ’ être représentées à tous les niveaux de gouvernement, aux niveaux national et local. Par ailleurs, le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique des statistiques actualisées sur la représentation des groupes minoritaires aux postes de responsabilité et dans les institutions représentatives.

30.Le Comité constate que selon la loi Bogosi, c’est après consultation d’une communauté tribale dans son Kgotla que le Gouvernement reconnaît cette communauté comme une tribu. Il regrette que cette disposition ne concerne que les tribus non tswanas et que l’État partie n’a pas fourni d’informations sur le nombre de communautés reconnues comme tribus depuis l’entrée en vigueur de la loi Bogosi en 2008, ni d’explications sur le blocage de la nomination du chef Wayeyi à Gumare et du chef Basubiya à Chobe (art. 5).

31. Le Comité recommande à l ’ État partie de garantir la pleine application de la loi Bogosi en traitant toutes les tribus sur un pied d ’ égalité en termes de reconnaissance et de respect des rituels et des pratiques culturelles qui leur sont propres.

Langue des minorités ethniques

32.Le Comité salue la décision de l’État partie de dispenser un enseignement dans les langues minoritaires au niveau du primaire à compter de 2023, mais il reste préoccupé par le fait qu’une telle décision ne concerne que 13 des langues parlées dans l’État partie (art. 1er à 7).

33. Le Comité recommande à l ’ État partie d ’ envisager la généralisation de l ’ enseignement dans la langue maternelle, au moins dans les régions habitées traditionnellement ou en grand nombre par des personnes appartenant à des tribus non tswanas, et de veiller à ce que les représentants des groupes concernés soient consultés afin d ’ inclure dans le programme scolaire des références à l eur histoire, à leur culture et à leurs traditions.

34.Le Comité prend note de la volonté de l’État partie de faire en sorte que les médias soient plus ouverts aux langues des groupes défavorisés, mais il regrette le manque d’informations sur les mesures prises dans ce domaine. Le Comité constate toujours avec préoccupation que la loi sur l’Autorité de régulation des communications (2012) ne prévoit pas l’existence de stations de radio et de télévision communautaires, qui permettraient aux minorités linguistiques de s’exprimer sur leurs sujets d’intérêt (art. 7).

35. Le Comité invite l ’ État partie à inclure dans son prochain rapport périodique des informations concernant les mesures visant à prendre en compte les langues et les intérêts des minorités dans sa politique des médias.

Réfugiés, demandeurs d’asile et migrants

36.Le Comité rappelle avec préoccupation que certaines exceptions à l’interdiction de la discrimination prévues à l’article 15 de la Constitution ne sauraient être justifiées au regard de la Convention. En particulier, l’article 15 (par. 4 b)) autorise des exceptions en ce qui concerne les non-ressortissants dont la portée n’est pas compatible avec sa recommandation générale no 30 (2004) du Comité (art. 5).

37. Le Comité recommande à l’État partie de réviser l’article 15 de la Constitution pour le mettre en pleine conformité avec l’article premier et avec l’article 2 (par. 1 c ) ), de la Convention. Dans ce contexte, l ’ État partie devrait prendre en considération le principe selon lequel, aux termes de la Convention , un traitement différencié constitue une discrimination si les critères de différenciation, jugés à la lumière des objectifs et des buts de la Convention, ne visent pas un but légitime et ne sont pas proportionnels à la réalisation de ce but.

38.Le Comité prend note des assurances fournies par l’État partie, au cours du dialogue, concernant l’accès de tous les non-ressortissants, y compris les demandeurs d’asile et les réfugiés, au programme de thérapie antirétrovirale, l’amélioration des services dans le camp de réfugiés de Dukwi et la liberté de circulation des demandeurs d’asile. Toutefois, le Comité reste préoccupé par les informations reçues concernant les mauvais traitements infligés aux migrants sans papiers, en particulier ceux du Zimbabwe et les femmes détenues. Le Comité est également préoccupé par le renvoi de toutes les personnes qui ont fait appel de leur expulsion devant la Haute Cour (art. 5).

39. Rappelant sa recommandation générale n o 30 (2004), le Comité recommande, une fois de plus, à l ’ État partie de veiller à ce que ses autorités compétentes procèdent à une enquête rapide et impartiale sur les plaintes pour mauvais traitements de non ‑ ressortissants et invite l ’ État partie à lui fournir des renseignements détaillés sur les résultats d ’ une telle enquête. Le Comité recommande également à l ’ État partie de veiller à ce que les recours exercés par les demandeurs d ’ asile devant les tribunaux soient effectifs et que les décisions subséquentes soient pleinement appliquées.

Lutte contre la traite des personnes

40.Le Comité prend note des efforts que l’État partie a déployés pour poursuivre les trafiquants, mais il constate avec préoccupation qu’aucune réparation n’a été accordée aux victimes alors que, selon la loi sur la lutte contre la traite des êtres humains, un tribunal peut ordonner à une personne condamnée d’accorder une réparation ou une indemnisation à la victime (art. 5).

41. Le Comité recommande à l ’ État partie de continuer de s’employer à mettre fin à la traite des personnes, notamment en appliquant des lois et d es stratégies visant à garantir que tous les cas de traite fassent l ’ objet d ’ une enquête , que les trafiquants soient poursuivis et dûment punis, et que les victimes obtiennent réparation . Il recommande également à l ’ État partie de fournir aide et assistance aux victimes de la traite.

Formation, éducation et autres mesures visant à combattre les préjugés et l’intolérance

42.Le Comité regrette que le contenu des programmes de formation aux droits de l’homme destinés aux membres de l’appareil judiciaire et aux agents de la force publique reste très général et n’aborde pas expressément la question de la discrimination raciale (art. 7).

43. Le Comité recommande à l’État partie de redoubler d’efforts pour assurer une formation suffisante dans le domaine des droits de l ’ homme aux membres de l ’ appareil judiciaire et aux agents de la force publique, notamment sur l ’ interdiction de la discrimination raciale. Il lui recommande également d’organiser des campagnes d’information sur les dispositions de la Convention et le cadre juridique assurant la protection contre la discrimination raciale, en ciblant en particulier les personnes et les groupes les plus vulnérables face à la discrimination raciale.

E.Autres recommandations

Ratification d’autres instruments

44.Compte tenu du caractère indissociable de tous les droits de l’homme, le Comité engage l’État partie à envisager de ratifier les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme auxquels il n’est pas encore partie, en particulier ceux dont les dispositions intéressent directement les communautés qui peuvent faire l’objet de discrimination raciale, comme le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels et la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille . Le Comité engage l’État partie à adhérer à la Convention relative au statut des apatrides et la Convention sur la réduction des cas d’apatridie.

Amendement à l’article 8 de la Convention

45. Le Comité recommande à l’État partie de ratifier l’amendement à l’article 8 (par. 6) de la Convention, adopté le 15 janvier 1992 à la quatorzième Réunion des États parties à la Convention et approuvé par l’Assemblée générale dans sa résolution 47/111.

Déclaration visée à l’article 14 de la Convention

46. Le Comité engage l’État partie à faire la déclaration facultative visée à l’article 14 de la Convention, par laquelle les États parties reconnaissent la compétence du Comité pour recevoir et examiner des communications émanant de particuliers.

Suite donnée à la Déclaration et au Programme d’action de Durban

47.À la lumière de sa recommandation générale n o 33 (2009) sur le suivi de la Conférence d’examen de Durban, le Comité recommande à l’État partie de donner effet à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, adoptés en septembre 2001 par la Conférence mondiale contre le racisme, la discrimination raciale, la xénophobie et l’intolérance qui y est associée, en tenant compte du document final de la Conférence d’examen de Durban, tenue à Genève en avril 2009, quand il applique la Convention. Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des renseignements précis sur les plans d’action qu’il aura adoptés et les autres mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre la Déclaration et le Programme d’action de Durban au niveau national.

Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine

48.À la lumière de la résolution 68/237 de l’Assemblée générale proclamant la Décennie internationale des personnes d’ascendance africaine pour 2015-2024 et de la résolution 69/16 sur le programme d’activités de la Décennie, le Comité recommande à l’État partie d’élaborer et de mettre en œuvre un programme adapté de mesures et de politiques Le Comité demande à l’État partie d’inclure dans son prochain rapport des renseignements précis sur les mesures concrètes qu’il aura adoptées dans ce cadre, compte tenu de sa recommandation générale n o 34 (2011) sur la discrimination raciale à l’égard des personnes d’ascendance africaine.

Consultations avec la société civile

49. Le Comité recommande à l’État partie de poursuivre et d’élargir le dialogue avec les organisations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la protection des droits de l’homme, en particulier celles qui luttent contre la discrimination raciale, dans le cadre de l’élaboration du prochain rapport périodique et du suivi des présentes observations finales.

Diffusion de l’information

50. Le Comité recommande à l’État partie de mettre ses rapports à la disposition du public dès leur soumission et de diffuser également les observations finales du Comité qui s’y rapportent auprès de tous les organes de l’État chargés de l’application de la Convention, y compris les municipalités, et de les publier sur le site Web du Ministère des affaires étrangères ou sur tout autre site Web accessible au public, dans les langues officielles et les autres langues couramment utilisées, selon qu’il conviendra.

Document de base commun

51. Le Comité demande à l’État partie de soumettre son document de base commun conformément aux directives harmonisées pour l’établissement de rapports au titre des instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme, en particulier celles concernant le document de base commun, adoptées à la cinquième réunion intercomités des organes créés en vertu d’instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme tenue en juin 2006 . À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité exhorte l’État partie à respecter la limite de 42 400 mots fixée pour ce document.

Suite donnée aux présentes observations finales

52. Conformément à l’article 9 (par. 1) de la Convention et à l’article 65 de son règlement intérieur, le Comité demande à l’État partie de fournir, dans un délai d’un an à compter de l’adoption des présentes observations finales, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 12 (institution nationale des droits de l ’ homme) et 20 (terres, territoires et ressources naturelles) .

Paragraphes d’importance particulière

53. Le Comité souhaite appeler l’attention de l’État partie sur l’importance particulière des recommandations figurant dans les paragraphes 6 (définition de la discrimination raciale), 8 (place de la Convention dans l ’ ordre juridique interne) et 30 (participation des minorités à la vie politique et publique), et lui demande de faire figurer dans son prochain rapport périodique des renseignements détaillés sur les mesures concrètes qu’il aura prises pour y donner suite.

Élaboration du prochain rapport périodique

54.Le Comité recommande à l’État partie de soumettre son rapport valant vingt ‑ troisième à vingt-quatrième rapports périodiques , d’ici au 22 mars 2026 , en tenant compte des directives pour l’établissement du document se rapportant spécifiquement à la Convention adoptées par le Comité à sa soixante et onzième session et en traitant de tous les points soulevés dans les présentes observations finales. À la lumière de la résolution 68/268 de l’Assemblée générale, le Comité exhorte l’État partie à respecter la limite de 21 200 mots fixée pour les rapports périodiques.