Observations finales concernant les septième et huitième rapports périodiques (présentés en un seul document) du Honduras*

Le Comité a examiné le rapport unique valant septième et huitième rapports périodiques du Honduras (CEDAW/C/HND/7-8) à ses 1447e et 1448e séances, le 3 novembre 2016 (voir CEDAW/C/SR.1447 et 1448). La liste des points et questions soulevés par le Comité figure dans le document CEDAW/C/HND/Q/7-8 et les réponses du Honduras figurent dans le document CEDAW/C/HND/Q/7-8/Add.1.

A.Introduction

Le Comité se félicite de la présentation par l’État partie de son rapport unique valant septième et huitième rapports périodiques. Il apprécie les réponses écrites de l’État partie à la liste des points et questions soulevés par le groupe de travail d’avant-session, ainsi que la présentation orale de la délégation et les réponses aux questions posées oralement par le Comité durant l’échange de vues.

Le Comité félicite l’État partie pour sa délégation, qui était dirigée par la Présidente exécutive de l’Institut national des femmes, Mme Ana Aminta Madrid Paz, et comprenait également des représentants du Congrès national et de la Présidence, l’adjoint au maire de San Pedro Sula et des représentants de la Mission permanente du Honduras au Bureau des Nations Unies et d’autres organisations internationales à Genève.

B.Aspects positifs

Le Comité salue les progrès réalisés, depuis son examen en 2007 du rapport unique valant quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques de l’État partie (CEDAW/C/HON/6), dans la réalisation des réformes législatives, en particulier l’adoption des documents ci-après :

a)Loi sur l’égalité des salaires, décret no 27-2015;

b)Loi sur la protection des défenseurs des droits de l’homme, des journalistes, des communicateurs sociaux et des travailleurs du secteur juridique (décret no 34-2015) et les réglementations y afférentes (2016);

c)Décret exécutif PCM-057-2015 concernant la Commission nationale pour l’élimination du travail des enfants;

d)Loi pour la protection des revenus et la régularisation de l’emploi informel (décret no 318-2013) incorporant les travailleurs du secteur informel, qui sont principalement des femmes, dans les systèmes de santé publique et de sécurité sociale;

e)Décret no 23-2013 qui ajoute spécifiquement le fémicide en tant que délit au Code pénal;

f)Décret no 54-2012 établissant les quotas électoraux en vue de renforcer la participation politique des femmes; et,

g)Loi contre la traite des personnes (décret no 59-2012) et les réglementations y afférentes.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour améliorer son cadre institutionnel et stratégique visant à accélérer l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes et de promouvoir l’égalité des sexes, par exemple, en adoptant les documents ci-après :

a)Deuxième plan pour l’égalité des sexes et l’équité des sexes, 2010-2022;

b)Plan national contre la violence envers les femmes, 2014-2022; et

c)Politique et plan d’action national contre l’exploitation sexuelle commerciale et la traite des personnes, 2016-2022.

Le Comité se réjouit du fait qu’en 2008, au cours de la période qui a suivi l’examen du précédent rapport, l’État partie ait adhéré au Protocole visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants, additionnel à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée.

C.Congrès national

Le Comité souligne le rôle crucial que doit jouer le pouvoir législatif pour assurer la mise en œuvre intégrale de la Convention (voir la déclaration du Comité sur ses rapports avec les parlementaires, adoptée à la quarante-cinquième séance, en 2010). Il invite le Congrès national à prendre, conformément à son mandat, les mesures nécessaires concernant la mise en œuvre des présentes observations finales entre maintenant et la prochaine période de présentation de rapport au titre de la Convention.

D.Principaux domaines de préoccupation et recommandations

Notoriété de la Convention

Le Comité reconnait à leur juste valeur les différentes initiatives visant à sensibiliser aux droits des femmes. Néanmoins, il continue de se préoccuper de la notoriété limitée de la Convention dans la société en général et parmi les femmes en particulier. Il se préoccupe aussi du fait que les professionnels du droit et les agents publics connaissent peu la Convention et les recommandations générales du Comité, ce qui, à son tour, est aggravé par la succession rapide des administrations publiques et la rotation des agents de la fonction publique, des agents de police et autres agents de maintien de l’ordre.

Le Comité réitère sa précédente recommandation ( CEDAW/C/HON/CO/6 , par. 11) que l ’ État partie sensibilise à la Convention et aux recommandations générales du Comité, et veille à ce que les programmes de formation dans le domaine de la sensibilisation à l ’ égalité des sexes pour les professionnels du droit couvrent les droits et les dispositions de la Convention. Il recommande également que l ’ État partie mette en œuvre d ’ autres initiatives de renforcement des capacités pour les juges, les avocats, les agents de police et d ’ autres professionnels concernés dans le secteur judiciaire touchés par la restructuration institutionnelle incessante, en vue de garantir une prise de conscience suffisante des droits découlant de la Convention .

Définition de la discrimination à l’égard des femmes

Le Comité se félicite du fait que les principes de l’égalité et de la non­discrimination soient enchâssés dans la Constitution et que le système juridique hondurien garantisse la primauté des traités internationaux, notamment la Convention, dans le droit national. Néanmoins, il est préoccupé par le fait que la législation de l’État partie contrevient à l’article premier de la Convention en restreignant sa portée à la discrimination directe.

Le Comité recommande que l ’ État partie adopte dans la législation nationale une définition globale de la discrimination à l ’ égard des femmes, conformément à l ’ article premier de la Convention, pour faire en sorte que les femmes soient protégées contre la discrimination directe et indirecte par les acteurs étatiques et non étatiques. Il recommande également que l ’ État partie veille à ce que l ’ interdiction de la discrimination à l ’ égard des femmes s ’ accompagne des mécanismes d ’ application appropriés et de sanctions.

Accès à la justice

Le Comité reconnait les ressources allouées à l’unité d’enquête sur les morts violentes des femmes comme une mesure pour améliorer l’accès des femmes à la justice. Néanmoins, le Comité se préoccupe des obstacles existants, spécialement dans les cas de violence sexiste. Il craint que le manque d’indépendance et d’impartialité du système de justice ne soit renforcé par l’insuffisance de ressources, l’infrastructure laissant à désirer et le manque d’unités et de personnel spécialisés, notamment les agents de police, les magistrats et les juges formés sur les questions d’égalité des sexes, se traduisant par un système judiciaire dysfonctionnel et corrompu et une culture générale de l’impunité. Le Comité se préoccupe également de l’absence de processus approprié d’enquête, de collecte de preuves et d’installations et de moyens médico-légaux, ce qui cause des retards prolongés dans les poursuites judiciaires et la « revictimisation » des femmes. Il est préoccupé par la réticence des femmes à porter plainte en raison des attitudes discriminatoires parmi les agents de maintien de l’ordre. Le Comité note en outre avec préoccupation le manque d’un programme efficace de protection des témoins et le fait que le modèle de prise en charge intégrée des victimes ne soit disponible qu’à titre pilote. Il note également avec regrets que les femmes ne soient pas au courant de leurs droits aux termes de la Convention et que leur capacité à revendiquer ces droits soit limitée, notamment l’accès limité à l’aide judiciaire gratuite et à des médicaments efficaces.

Le Comité, rappelant sa précédente recommandation générale ( CEDAW/C/HON/CO/6 , par. 13) et sa recommandation générale n o  33 (2015) sur l ’ accès des femmes à la justice, recommande que l ’ État partie  :

a) Renforce le système judiciaire, notamment par une augmentation des ressources financières, techniques et humaines spécialisées pour permettre de traiter les cas de manière rapide, tenant compte de la différence entre les sexes, non discriminatoire et compétente;

b) Favorise le professionnalisme, l ’ indépendance et la responsabilisation des juges, des magistrats et des agents de police, notamment dans les procédures de sélection, de promotion et de licenciement;

c) Veille à ce que tous les cas de violence sexiste à l ’ égard des femmes fassent l ’ objet d ’ une enquête rapide et efficace, que les auteurs soient poursuivis et punis comme il se doit, et que l ’ impunité soit combattue en enquêtant sur les cas de corruption signalés;

d) Veille à ce que les femmes et les filles aient accès à des programmes différenciés d ’ aide et de protection des victimes et des témoins et favorise l ’ expansion et l ’ institutionnalisation du modèle de prise en charge intégrée des victimes, qui n ’ est actuellement qu ’ un programme pilote;

e) Veille à ce que la Convention, les recommandations générales du Comité et la législation nationale pertinente fassent partie intégrante de l ’ éducation et de la formation juridiques obligatoires des juges, magistrats, avocats et agents de maintien de l ’ ordre, pour permettre de faire convenablement face à l ’ inégalité des sexes et à la violence sexiste;

f) Garantisse l ’ accès des services d ’ aide juridique aux femmes et aux filles, mène des campagnes de sensibilisation pour informer les femmes et les filles de leurs droits aux termes de la Convention, et diffuse l ’ information sur les moyens de recours juridiques disponibles pour porter plainte, y compris contre les agents de l ’ État.

Mécanisme national de promotion de la femme

Le Comité note avec préoccupation que l’Institut national des femmes n’a pas le rang, le statut et les ressources nécessaires pour promouvoir efficacement la mise en œuvre de la Convention et prendre systématiquement en compte l’égalité des sexes dans tous les départements et secteurs. Le Comité prend acte des efforts déployés pour introduire la budgétisation tenant compte de la problématique hommes-femmes. Il est cependant préoccupé par le fait que la décentralisation ait donné lieu à un manque d’harmonisation des politiques de promotion de l’égalité des sexes et des allocations budgétaires y afférentes, spécialement au niveau local, et la dépendance continue à l’égard du financement des donateurs internationaux. Le Comité est plus particulièrement préoccupé par :

a)L’absence d’institutionnalisation du deuxième plan national pour l’égalité et l’équité hommes-femmes et l’insuffisance de l’information disponible sur sa mise en œuvre;

b)Le manque de services chargés de l’égalité des sexes qui fonctionnent dans les secteurs de prise de décisions de l’administration publique et l’impact néfaste de la rotation du personnel sur les dispositifs nationaux, imputable aux changements et à la restructuration de l’administration publique, en particulier au niveau local;

c)L’incertitude concernant le rôle et la division des responsabilités des bureaux municipaux pour les femmes.

Le Comité réitère sa précédente recommandation ( CEDAW/C/HON/CO/6 , par. 17) que l ’ État partie renforce l ’ Institut national des femmes en augmentant sensiblement ses ressources humaines, financières et techniques de façon à lui donner les moyens de s ’ acquitter efficacement de son mandat et d ’ attirer efficacement l ’ attention sur les questions d ’ égalité des sexes dans toutes les lois et politiques et les plans d ’ action nationaux et assurer la coordination efficace des politiques gouvernementales sur l ’ égalité des sexes. Le Comité recommande également que l ’ État partie adopte une stratégie de prise en compte systématique de l ’ égalité des sexes à tous les niveaux de l ’ administration publique, avec des échéanciers précis et des indicateurs mesurables. Le Comité recommande en outre que l ’ État partie  :

a) Veille à ce que chaque ministère affecte un budget spécial pour la mise en œuvre efficace du Deuxième Plan national pour l ’ égalité et l ’ équité hommes-femmes et mette en place des mécanismes d ’ évaluation de l ’ impact pour suivre convenablement et évaluer le plan;

b) Assure le renforcement continu des capacités dans le domaine des droits des femmes et mette en place des services permanents de l ’ égalité des sexes pour empêcher que les changements dans l ’ administration n ’ aient une incidence négative sur les connaissances institutionnelles et la continuité des activités du mécanisme national et des organismes pouvant lui succéder;

c) Clarifie le rôle, la composition et la division des responsabilités des bureaux municipaux pour les femmes et l ’ égalité des sexes au sein de chaque département ministériel et des mécanismes de coordination entre le niveau national et les niveaux locaux.

Institution nationale des droits de l’homme

Le Comité est préoccupé par le fait que la Commission nationale des droits de l’homme n’ait pas les ressources et l’indépendance nécessaires pour s’acquitter efficacement de son mandat. Il relève que la Commission a été rétrogradée au statut de catégorie B par le Sous-comité de l’accréditation de l’Alliance globale des institutions nationales des droits de l’homme.

Le Comité recommande que l ’ État partie adopte les mesures législatives et administratives nécessaires pour la mise en œuvre des recommandations de l ’ Alliance globale des institutions nationales des droits de l ’ homme pour permettre à la Commission nationale des droits de l ’ homme de jouer un rôle de premier plan dans la protection et la promotion des droits des femmes et la promotion de l ’ égalité des sexes.

Mesures temporaires spéciales

Le Comité est préoccupé par le fait que les informations fournies par l’État partie indiquent une connaissance insuffisante de la nature, de la portée et de la nécessité des mesures temporaires spéciales visant à accélérer la réalisation de l’égalité réelle entre les femmes et les hommes, conformément à l’article 4 1) de la Convention. Il se préoccupe également de l’absence de mesures temporaires spéciales dans des domaines autres que les quotas électoraux, en particulier celles qui portent sur les formes de discrimination qui s’entrecroisent à l’égard des femmes des communautés autochtones ou des femmes des communautés d’ascendance africaine, ou des femmes des zones rurales ou des femmes handicapées.

Rappelant sa recommandation générale n o  25 (2004) sur les mesures temporaires spéciales, le Comité recommande que l ’ État partie prenne des mesures spécifiques, notamment les mesures temporaires spéciales conformément à l ’ article 4 1) de la Convention, pour accélérer la réalisation de l ’ égalité réelle des femmes et des hommes, en particulier concernant les femmes des communautés autochtones, des femmes des communautés d ’ ascendance africaine ou des femmes rurales ou des femmes handicapées, notamment dans la vie politique et dans les domaines de la santé, de l ’ éducation, de la formation professionnelle et de l ’ emploi.

Stéréotypes et pratiques néfastes

Le Comité est préoccupé par l’inefficacité des mesures visant à éliminer les attitudes patriarcales et les stéréotypes discriminatoires profondément ancrés concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la famille et dans la société, qui entravent la mise en œuvre de la Convention et constituent la cause profonde de la violence à l’égard des femmes. Le Comité s’inquiète également que ces mesures ne s’appliquent pas aux formes de discrimination croisées à l’égard des femmes. Il craint également que le fait de compter sur le financement des donateurs internationaux pour les campagnes de sensibilisation et les programmes d’éducation et de formation ne puisse avoir une incidence néfaste sur la viabilité de ces initiatives.

Le Comité recommande que l ’ État partie adopte des mesures coordonnées et bénéficiant de financements suffisants pour éliminer les attitudes patriarcales et les stéréotypes discriminatoires concernant les rôles et les responsabilités des femmes et des hommes dans la société et dans la famille. Il recommande également que l ’ État partie mette fin aux formes croisées de discrimination à l ’ égard des femmes, fondée sur leur âge, leur origine ethnique, leur statut socioéconomique et autre, leur emplacement rural ou urbain ou le fait d ’ être lesbiennes, bisexuelles, transgenres ou intersexuées.

Violence sexiste à l’égard des femmes

Le Comité prend acte du processus continu de réforme du Code pénal en cours. Il déplore, cependant, la persistance des niveaux élevés de violence domestique, spécialement à l’égard des filles. Il est aussi préoccupé par l’incidence croissante de la violence sexiste à l’égard des femmes, notamment la forte prévalence de la violence sexuelle, des enlèvements, des disparitions et des meurtres, ainsi que le fémicide. Le Comité est en outre préoccupé par le manque de stratégies de prévention suffisantes ainsi que par :

a)L’impunité persistante des actes de violence à l’égard des femmes, de violence sexuelle et de fémicide, ainsi que de violence à l’égard des femmes perpétrée par les responsables publics et les militaires, en dépit de l’existence d’un plan national contre la violence à l’égard des femmes, couvrant la période 2014­2022;

b)Le manque de procédures, protocoles et ressources clairement définis et harmonisés pour fournir la protection aux femmes qui sont victimes de violence sexistes;

c)La corrélation entre la prolifération et l’utilisation des armes à feu et le fémicide, qui représenteraient la deuxième cause principale de décès parmi les femmes en âge de procréer dans l’État partie;

d)Le sous-signalement de la violence à l’égard des femmes, attribuable à la peur des représailles et au manque de confiance à l’égard des autorités;

e)L’absence de protocoles harmonisés dans une perspective de genre pour les enquêtes sur les cas de violence à l’égard des femmes et de fémicide et les poursuites contre ces cas;

f)Le manque de données actualisées et ventilées par sexe, y compris un registre officiel cohérent des disparitions ou un protocole pour le suivi des cas de disparition, et l’échange limité d’informations entre les agents de maintien de l’ordre et le ministère public.

Le Comité, rappelant ses précédentes recommandations ( CEDAW/C/HON/CO/6 , par. 19) et sa recommandation générale n o  19 (1992) sur la violence à l ’ égard des femmes, recommande que l ’ État partie fasse en sorte que toute réforme du Code pénal respecte les normes internationales relatives aux droits de l ’ homme, notamment la Convention. Il recommande également que l ’ État partie  :

a) Applique les lois en vigueur pour ériger en infraction toutes les formes de violence à l ’ égard des femmes et faire en sorte que les cas fassent l ’ objet d ’ enquêtes et que les auteurs soient poursuivis et punis convenablement et garantir des mécanismes de responsabilisation et de contrôle appropriés pour la mise en œuvre du plan national contre la violence à l ’ égard des femmes pour la période 2014-2022;

b) Veille à ce que les femmes et les filles aient accès aux moyens efficaces de réparation et de protection, notamment un nombre suffisant de centres d ’ accueil, en particulier dans les zones rurales, qui offrent une prise en charge spécialisée aux victimes de violence sexuelle et des programmes d ’ aide judiciaire et de réadaptation et de réintégration psychosociales, en coopération avec des organisations de la société civile;

c) Renforce son cadre législatif concernant la possession des armes à feu et accélère l ’ adoption du projet de loi sur l ’ accès à une vie indemne de violence ( Ley Integral para el Acceso a una vida libre de violencia ), soumis au Congrès national;

d) Fournisse une formation obligatoire aux agents de maintien de l ’ ordre, aux agents du secteur judiciaire et aux professionnels des domaines comme la santé et l ’ action sociale, sur l ’ application rigoureuse des dispositions du droit pénal ayant trait aux enquêtes sur les actes de violence sexiste et à l ’ application de sanctions appropriées pour ces actes;

e) Veille à ce que la définition du délit de fémicide dans le nouveau Code pénal soit alignée sur les normes internationales, en particulier la Convention interaméricaine sur la prévention, la répression et l ’ élimination de la violence contre les femmes et élabore et adopte des protocoles types pour enquêter sur les cas de disparition de femmes et de fémicide dans l ’ ensemble du pays;

f) Adopte des protocoles précis pour unifier les procédures de signalement des cas de violence à l ’ égard des femmes et centraliser la collecte régulière des données sur la violence à l ’ égard des femmes, ventilées par type de violence et de relations entre les auteurs de violence et les victimes.

Traite des personnes et exploitation de la prostitution

Le Comité se félicite de la création d’une commission interinstitutions de la lutte contre l’exploitation sexuelle et la traite des personnes. Néanmoins, il continue de se préoccuper de l’incidence élevée de la traite des personnes, en particulier des femmes et des filles, aux fins d’exploitation sexuelle. Il note avec préoccupation que les femmes et les filles des zones rurales, des communautés indigènes et des communautés d’ascendance africaine courent un risque élevé de devenir victimes de la traite à des fins d’exploitation sexuelle ou de travail forcé. Le Comité est en outre préoccupé par :

a)L’insuffisance des ressources humaines, techniques et financières affectées à la mise en œuvre des mesures juridiques et autres de lutte contre la traite d’êtres des personnes;

b)Le manque de programmes et de centres spécialisés pour la réinsertion et la prise en charge des victimes, et le fait de compter énormément sur les organisations de la société civile pour fournir des services de réinsertion et l’hébergement aux victimes de la traite;

c)Le manque de données ventilées sur l’étendue et les causes de la traite dans l’État partie, ainsi que les lacunes de l’enregistrement des plaintes, de la poursuite des cas et de l’échange d’informations entre institutions, notamment entre le ministère public et la Commission interinstitutions de lutte contre l’exploitation sexuelle commerciale et la traite des personnes;

d)L’attention limitée accordée aux liens entre la traite à des fins d’exploitation sexuelle et la criminalité organisée dans les quartiers, ainsi que la complicité de la police;

e)Le manque de programmes de sortie et d’autres possibilités de réalisation de revenus pour les femmes qui abandonnent la prostitution et le manque de protection contre le harcèlement par la police et la violence des clients à leur égard.

Rappelant sa précédente recommandation ( CEDAW/C/HON/CO/6 , par. 21), le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) Mette effectivement en œuvre la législation de lutte contre la traite des personnes et renforce la coordination entre la Commission interinstitutions de lutte contre l ’ exploitation sexuelle commerciale et la traite des personnes, le ministère public et la police, en vue de garantir la protection des femmes et des filles qui sont victimes de la traite;

b) Veille à ce que les victimes de la traite aient un accès libre et immédiat aux centres d ’ accueil, aux soins médicaux, aux conseils psychosociaux, à l ’ assistance judiciaire et aux services spécialisés de réadaptation et de réinsertion;

c) Réalise des études et des enquêtes pour mieux comprendre la nature, les causes et les conséquences de la traite et de l ’ exploitation de la prostitution dans l ’ État partie et recueille des données sur sa prévalence parmi les femmes et les filles, en vue de s ’ attaquer à leurs causes profondes;

d) Renforce les capacités et la responsabilisation de la police et des agents de maintien de l ’ ordre pour leur permettre de lutter contre la criminalité organisée liée à la traite des personnes, notamment par le biais de la coopération internationale, régionale et bilatérale en vue de prévenir la traite par l ’ échange d ’ information et de pratiques et l ’ harmonisation éventuelle des procédures juridiques suivies pour poursuivre et punir les auteurs de la traite;

e) Offre des programmes de sortie et d ’ autres possibilités de création de revenus aux femmes qui souhaitent quitter la prostitution et adopte les mesures nécessaires pour mettre fin à la violence perpétrée par les clients contre les femmes dans le cadre de la prostitution.

Participation à la vie politique et publique

Le Comité demeure préoccupé par le fait que les femmes, notamment les femmes des groupes défavorisés et marginalisés, continuent d’être considérablement sous-représentées dans tous les domaines de la vie politique et publique, aux postes élus comme nommés. Il est aussi préoccupé par le fait que les longs retards subis dans l’adoption de la réglementation pour la mise en œuvre du décret no 54-2016 établissant les quotas électoraux de 50 % de femmes candidates risquent d’avoir une incidence négative sur leur application effective, en particulier concernant les élections internes des partis politiques actuellement en cours et l’inclusion effective des femmes aux processus électoraux nationaux. Le Comité note qu’un projet de loi sur le « harcèlement et la violence politique à l’égard des femmes » est en cours. Le Comité est cependant préoccupé par le fait que les femmes, en particulier dans les communautés rurales et paysannes soient exposées à la répression, à la discrimination et à la violence en tant qu’une conséquence de leur participation à la vie politique et publique.

Le Comité réitère sa précédente recommandation ( CEDAW/C/HON/CO/6 , par. 23) que l ’ État partie adopte des dispositions juridiques pour l ’ emploi des mesures temporaires spéciales, comme les programmes de sensibilisation ou d ’ aide, la réaffectation de ressources ou l ’ adoption d ’ objectifs chiffrés et de cibles assortis d ’ échéances, conformément à l ’ article 4 1) de la Convention et les recommandations générales n o  25 (2004) du Comité sur les mesures temporaires spéciales et n o  23 (1997) sur les femmes dans la vie politique et publique, qui  :

a) Accroîtraient la participation des femmes à la vie politique et publique, en particulier au Congrès national, à des postes de décision dans l ’ administration publique, le système judiciaire et le service diplomatique;

b) Garantiraient que les quotas de 50 % de représentation de femmes établis par la loi soient pleinement mis en œuvre dans toutes les consultations électorales aux niveaux national et local;

c) Prendraient en compte l ’ étude de l ’ Union interparlementaire sur le thème « sexisme, harcèlement et violence à l ’ égard des femmes parlementaires », d ’ accélérer l ’ adoption du projet de loi sur le « Harcèlement et violence politique à l ’ égard des femmes » et appliquer les lois sur l ’ égalité des sexes et l ’ élimination de la violence et de la discrimination à l ’ égard des femmes dans la vie politique et publique; et

d) Mettraient en œuvre des activités pour sensibiliser à l ’ importance de la participation des femmes à la prise de décisions pour la société dans son ensemble.

Défenseurs des droits des femmes

Le Comité est préoccupé par :

a)Les mesures de plus en plus répressives, les attaques, la violence sexuelle, le harcèlement, l’intimidation, les représailles et les campagnes de diffamation contre les défenseurs des droits des femmes, spécialement dans les contextes des projets de mise en valeur des terres, de sensibilisation et de protection de l’environnement et la défense des droits des femmes issues des communautés autochtones et des communautés d’ascendance africaine;

b)Le manque de protection efficace des défenseurs des droits des femmes contre l’impunité dont jouissent les auteurs de violence, en l’absence d’enquêtes efficaces, de poursuites et de condamnation pour crimes contre les défenseurs des droits des femmes;

c)Les décès des défenseurs des droits de l’homme, en particulier Margarita Murillo en 2014 et Berta Cáceres en 2016, nonobstant les dénonciations répétées de la situation de risque et de harcèlement dans laquelle ils se trouvaient et des mesures de protection publiées par la Commission interaméricaine des droits de l’homme; et

d)Le fait d’ériger en infraction les manifestations sociales et les restrictions du droit à la réunion pacifique des défenseurs des droits des femmes.

Le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) Adopte et applique, sans délai, des mesures efficaces pour la protection des défenseurs des droits des femmes en vue de leur permettre de s ’ acquitter librement de leur tâche importante, sans peur ou menace de violence ou de harcèlement;

b) Applique la loi sur la protection des défenseurs des droits de l ’ homme, des journalistes, des communicateurs sociaux et des fonctionnaires de la justice et élabore un protocole prenant en compte le principe de l ’ égalité des sexes pour les enquêtes, les poursuites et les sanctions concernant les attaques et autres formes d ’ agressions commises contre les défenseurs des droits des femmes;

c) Mène des enquêtes, poursuive et punisse comme il se doit tous les cas de violence à l ’ égard des défenseurs des droits des femmes, notamment les cas de violence à l ’ égard des femmes défendant le droit à la terre et autres ressources naturelles; et

d) Dépénalise les manifestations sociales et la réunion pacifique et mette fin aux poursuites engagées contre les défenseurs des droits de femmes pour les activités menées dans l ’ exercice de leurs droits humains.

Nationalité

Le Comité félicite l’État partie pour sa loi sur la nationalité et les efforts qu’il déploie en vue d’enregistrer les naissances. Néanmoins, le Comité est préoccupé par les obstacles persistants auxquels se heurte l’enregistrement des naissances, en particulier dans les zones rurales et parmi les communautés autochtones et les communautés d’ascendance africaine. Il est aussi préoccupé par le manque d’information fournie sur les mesures prises pour permettre aux enfants des zones frontalières et aux enfants en situation de migration, y compris les enfants non accompagnés participant à des programmes de retour dans leurs foyers, d’avoir accès à l’enregistrement des naissances et aux documents personnels. Le Comité est en outre préoccupé par l’absence d’information sur le suivi des processus de retour des enfants de migrants et leur réintégration et leur effet sur la réunification familiale.

Le Comité recommande que l ’ État partie veille à ce que toutes les naissances soient enregistrées dans le pays, notamment dans les zones rurales, dans les communautés autochtones et les communautés d ’ ascendance africaine. Il recommande également que l ’ État partie veille à ce que tous les enfants nés dans des situations exceptionnelles, y compris dans un contexte de migration ou dans les zones frontalières, soient enregistrés dans le Registre national des personnes et qu ’ il leur fournisse les documents personnels. Le Comité recommande par ailleurs que l ’ État partie inclue une perspective de l ’ égalité des sexes dans les mécanismes de suivi des processus de retour pour les enfants de migrantes et leur effet sur la réunification de la famille.

Éducation

Le Comité salue les efforts visant à améliorer l’accès des filles et des femmes dans l’enseignement interculturel bilingue. Le Comité est cependant préoccupé par l’insuffisance des mesures prises pour garantir l’accès à l’éducation pour toutes les filles et améliorer la qualité de l’enseignement. Il est également préoccupé par le fait que les taux d’analphabétisme et les abandons scolaires au niveau du secondaire pour les filles des zones rurales et reculées et dans les communautés indigènes et les communautés d’ascendance africaine demeurent excessivement élevés par rapport au reste de la population, situation souvent imputable à la pauvreté, aux grossesses précoces et mariages précoces et au travail des enfants. Le Comité est par ailleurs préoccupé par le taux élevé de violence sexuelle et le harcèlement des filles sur le chemin de l’aller et du retour de l’école et relève l’absence de mécanismes efficaces de traitement des plaintes. Il note également avec préoccupation l’enseignement intégré limité de la santé sexuelle et reproductive dans le programme scolaire. Le Comité relève en outre avec préoccupation l’absence d’information sur l’accès à l’éducation, notamment l’enseignement général, pour les filles handicapées.

Le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) Veille à ce que les filles des zones rurales et reculées et des communautés autochtones et des communautés d ’ ascendance africaine aient un accès égal à l ’ éducation de haute qualité aux niveaux du primaire comme du secondaire;

b) Mette en place des mécanismes efficaces d ’ établissement de rapports et de responsabilisation pour faire en sorte que les auteurs de violence sexuelle ou de harcèlement des filles dans le milieu scolaire fassent l ’ objet de poursuites et de sanctions appropriées;

c) Redouble les efforts visant à retenir les filles à l ’ école et fasse en sorte que les jeunes mères puissent effectivement retrouver le chemin de l ’ école après l ’ accouchement;

d) Veille à l ’ intégration dans le programme d ’ enseignement à tous les niveaux de l ’ information et de l ’ éducation sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, tenant compte de l ’ âge, à l ’ intention des filles et des garçons, et forme les enseignants pour leur permettre d ’ aborder ces sujets d ’ une manière prenant en compte des différences entre les sexes;

e) Fournisse dans son prochain rapport des informations sur l ’ inclusion des femmes et des filles handicapées dans le système normal d ’ éducation, notamment grâce à des campagnes de sensibilisation et des médias.

Emploi

Le Comité réitère sa préoccupation au sujet du taux de chômage excessivement élevé parmi les femmes, leur concentration dans les emplois peu rémunérés du secteur du travail informel et de la persistance de la ségrégation professionnelle horizontale et verticale. Il constate avec préoccupation :

a)Le manque de mesures ciblées pour faciliter l’entrée des femmes dans le secteur du travail formel;

b)Les différences salariales persistantes selon le sexe, l’insécurité de l’emploi liée à des tests de grossesse et du VIH sans le consentement formel dans les procédures de recrutement et de recyclage dans le secteur des maquilas et les conditions de travail laissant à désirer, essentiellement dans le secteur des maquilas et les situations du travail des enfants;

c)Le manque de réglementation concernant les conditions de travail décentes et les droits du travail pour protéger les femmes des pratiques d’exploitation des travailleurs, notamment le travail domestique dans les maisons privées;

d)L’absence d’information sur les inspections du travail dans les entreprises et les ménages privés qui emploient essentiellement les femmes et sur le signalement de la violence et du harcèlement contre les femmes sur le lieu de travail;

e)L’exploitation des femmes dans le secteur agro-industriel dans le sud de l’État partie, où elles sont exposées à des produits chimiques dangereux et des pesticides dangereux pour leur santé, spécialement leur santé procréative.

Le Comité recommande que l ’ État partie réalise une enquête sur le nombre de femmes qui travaillent et les caractéristiques de leur travail et adopte des politiques et des mesures spécifiques pour éliminer la ségrégation professionnelle. Il recommande également que l ’ État partie  :

a) Garantisse des possibilités égales pour les femmes et les hommes sur le marché du travail, notamment en utilisant des mesures ciblées pour promouvoir l ’ accès ou la transition des femmes au secteur formel;

b) Renforce les mesures visant à réduire la différence de rémunération entre les hommes et les femmes, en appliquant le principe du salaire égal pour un travail de valeur égale et applique les lois de sorte que les femmes et les filles dans le secteur informel soient couvertes par la législation du travail et la protection sociale ( décret n o  318-2013), accélère l ’ adoption et la mise en œuvre de la carte de route pour l ’ élimination des pires formes du travail des enfants présentée au Conseil des ministres et applique effectivement les lois contre le travail des enfants, plus spécialement dans les zones géographiques reculées et des secteurs de l ’ emploi comme l ’ agriculture, le travail domestique et le secteur des maquilas ;

c) Adopte et applique les mesures juridiques et autres nécessaires pour promouvoir le travail décent pour les femmes dans le secteur informel, notamment les employées de maison, applique des sanctions aux employeurs qui violent les droits des femmes au travail et ratifie la Convention sur les travailleuses et travailleurs domestiques, 2011 (n o  189) de l ’ Organisation internationale du Travail;

d) Augmente les ressources humaines, techniques et financières de l ’ inspectorat du travail pour lui permettre d ’ enquêter et de suivre les conditions de travail décentes et les droits au travail des femmes et des filles et détecte les pratiques discriminatoires à l ’ égard des femmes dans divers domaines de l ’ emploi, plus spécialement dans le secteur informel, et poursuive et punie comme il convient les cas de violence sexuelle et de harcèlement contre les femmes sur le lieu de travail et renforce les mécanismes de collecte de données;

e) Adopte des mesures pour faire face aux risques sanitaires et professionnels, en particulier pour les femmes employées dans le secteur agro-industriel.

Santé

Le Comité salue les efforts visant à réduire le taux de mortalité maternelle, mais il est préoccupé par le fait que les femmes aient un accès limité aux services de santé sexuelle et procréative dans l’État partie. Il est aussi préoccupé par :

a)Le fait d’ériger l’avortement en infraction sans exception, qui se traduit par un nombre élevé de femmes et de filles recherchant l’avortement non médicalisé, ce qui augmente la mortalité maternelle;

b)L’interdiction de la promotion, de l’utilisation, de la vente et de l’achat de la contraception d’urgence, toute politique ou tout programme connexes et la distribution gratuite ou payante et la commercialisation de la contraception d’urgence, y compris lorsque la grossesse résulte du viol ou de l’inceste, et le fait que la Cour suprême ait déclaré la constitutionnalité de cette interdiction en 2012;

c)Le manque d’études évaluant l’impact du fait d’ériger l’avortement en infraction et l’interdiction de délivrer une ordonnance pour la contraception d’urgence, de vendre celle-ci et de l’utiliser, y compris dans les cas de viol et d’inceste;

d)Le manque d’accès adéquat pour les femmes à l’information sur leur santé et leurs droits en matière de sexualité et de procréation, y compris le comportement sexuel responsable et le manque d’accès raisonnable et abordable aux services de planification familiale et aux méthodes contraceptives, spécialement dans les zones rurales où une proportion de femmes estimée à 71 % n’utilisent pas la contraception;

e)L’insuffisance de l’information sur les mesures de prévention des infections sexuellement transmissibles.

Tenant compte de sa déclaration sur la santé et les droits en matière de sexualité et de procréation, adoptée à sa cinquante-septième session, en février 2014, le Comité note que l ’ avortement non médicalisé représente une des causes principales de la morbidité et de la mortalité maternelles. De ce fait, le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) Étudie les expériences et pratiques positives des pays de la région, notamment les pays qui ont des visions culturelles et religieuses similaires, et ceux à travers le monde qui ont revu leur interprétation restrictive de l ’ avortement thérapeutique et ont accepté les circonstances dans lesquelles l ’ avortement doit être dépénalisé, à savoir, au moins dans les cas de viol et d ’ inceste, de menaces contre la vie et/ou la santé de la mère et de grave malformation fœtale;

b) Évalue l ’ impact sur la santé physique et mentale des femmes et des filles de l ’ incrimination totale de l ’ avortement et de l ’ interdiction de la contraception d ’ urgence, en plus de la distribution gratuite ou payante et de la commercialisation de la contraception d ’ urgence, en particulier sur les femmes et les filles qui sont victimes d ’ abus sexuel, en vue de mettre fin à l ’ interdiction et à l ’ incrimination;

c) Veille à ce que les femmes, plus particulièrement les femmes qui vivent dans la pauvreté et les femmes rurales, aient accès à des services de santé sexuelle et reproductive de haute qualité, couvrant la planification familiale, la prévention des grossesses précoces et des infections sexuellement transmissibles et les soins d ’ urgence après l ’ avortement; et

d) Renforce les initiatives visant à faire en sorte que les adolescents et les jeunes femmes et jeunes hommes, en particulier ceux qui ne sont pas scolarisés, aient accès à l ’ information exacte sur leurs santé et droits en matière de sexualité et de procréation, notamment le comportement sexuel responsable.

VIH/sida

Le Comité salue le plan stratégique national de lutte contre le VIH et le sida au Honduras couvrant la période 2015-2019. Néanmoins, il continue de se préoccuper des taux élevés d’infection au VIH parmi les femmes et du fait que les lois et politiques en vigueur pour lutter contre ce fléau ne tiennent pas compte des différences entre les sexes. Le Comité est également préoccupé par la stigmatisation persistante des personnes vivant avec le VIH/sida, qui affecte surtout les femmes, en particulier les femmes enceintes, les femmes pratiquant la prostitution et les femmes d’ascendance africaine.

Le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) Garantisse l ’ accès libre pour les femmes et les hommes au traitement et à la prévention du VIH et du sida, le libre accès pour les femmes et les filles aux médicaments antirétroviraux en vue de prévenir la transmission de la mère à l ’ enfant;

b) Favorise les tests volontaires du VIH et la sensibilisation parmi les femmes et les hommes, notamment ceux qui ont des comportements à risque et ceux qui vivent avec le VIH et d ’ autres infections sexuellement transmissibles à leurs partenaires;

c) Réalise une étude dans les diverses régions géographiques de l ’ État partie pour obtenir des données actualisées ventilées sur la prévalence du VIH.

Avantages économiques et sociaux et autonomisation économique des femmes

Le Comité note les divers plans et programmes adoptés pour promouvoir le développement social. Néanmoins, il s’inquiète du niveau élevé de l’inégalité dans la société hondurienne, ce qui constitue un obstacle à la réalisation des droits humains des femmes. Il regrette le manque d’information sur l’impact que les divers programmes de protection sociale ont sur la vie des femmes, car les informations sont ventilées au niveau de la « famille », ainsi que sur les mesures visant à garantir l’accès à ces programmes par les groupes de femmes les plus marginalisés, notamment les femmes autochtones et les femmes d’ascendance africaine. Il se préoccupe du fait que l’approche au coup par coup en matière de programmes de développement et de protection au plan social et de réduction de la pauvreté ne soit pas efficace pour l’autonomisation économique durable des femmes.

Le Comité recommande que l ’ État partie décentralise et garantisse l ’ accès aux programmes de protection sociale et d ’ autres programmes visant l ’ autonomisation économique des femmes qui en ont le plus besoin, en particulier dans les zones rurales et parmi les communautés autochtones et les communautés d ’ ascendance africaine. Il recommande également une approche plus systématique et fondée sur les droits en matière de programmes de protection sociale et de réduction de la pauvreté. Le Comité recommande par ailleurs que l ’ État partie mette en place un système de collecte adéquate de données ventilées et d ’ analyse des questions de genre portant sur l ’ impact des programmes de protection sociale sur la jouissance de leurs droits humains.

Femmes rurales

Le Comité note les efforts déployés pour l’enregistrement conjoint facultatif des terres, mais il est préoccupé par la discrimination persistante à l’égard des femmes rurales, en particulier les femmes autochtones et les femmes d’ascendance africaine, ainsi que par :

a)Les nombreux obstacles à l’accès des femmes à la terre et à la protection de leurs ressources naturelles, notamment en raison de l’absence de consultations sur les grands projets de développement, les projets de tourisme, les projets agro-industriels et hydroélectriques réalisés par des investisseurs étrangers et des entreprises privées ainsi que de l’impact défavorable des changements climatiques sur les femmes, y compris la sécheresse intense, les pertes de récoltes et la rareté de l’eau et des denrées alimentaires;

b)L’impact négatif sur le contrôle exercé par les femmes sur la terre et les ressources naturelles découlant des projets commerciaux et d’aménagement qui se traduisent par les déplacements internes des femmes et des filles, l’éviction forcée, l’exploitation par le travail, les conséquences graves pour la santé, la violence sexuelle et la traite;

c)L’intimidation des femmes rurales, notamment les paysannes et les dirigeantes des communautés, participant à des manifestations pacifiques pour protéger leurs terres et la pénalisation de leurs activités;

d)Les rapports relatifs à des cas où les ressources, notamment les programmes alimentaires et d’aide sociale d’urgence, ont été détournés par la corruption et liés à des fins politiques au lieu des bénéficiaires visés.

Rappelant l ’ article 14 de la Convention et sa recommandation générale n o  34 (2016) sur les droits des femmes rurales, le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) Respecte la Convention sur les peuples indigènes et tribaux, 1989 (n o  169) de l ’ Organisation internationale du Travail en demandant le consentement libre et éclairé obtenu par le biais de consultations avec les peuples autochtones et en veillant à ce qu ’ ils profitent des activités extractives et des projets de développement sur leurs terres et inclue les femmes en tant que participantes actives à l ’ élaboration et la mise en œuvre des politiques et des plans d ’ action nationaux sur les changements climatiques, l ’ intervention en cas de catastrophe et la réduction des risques; élargisse et facilite l ’ accès des femmes rurales à la propriété terrienne, notamment par le biais de l ’ enregistrement obligatoire des terres sous les noms conjoints du couple marié et en fixant des cibles pour leurs titres conjoints, et inclue une perspective tenant explicitement compte de l ’ égalité des sexes dans les politiques, initiatives et programmes nationaux favorisant les activités agricoles, en particulier pour les femmes autochtones et les femmes d ’ ascendance africaine;

b) Adopte des mesures visant à protéger les droits des femmes rurales, notamment en tenant les entreprises responsables des pratiques qui ont une incidence négative sur la santé, le bien-être et la sécurité des femmes qui travaillent, et affecte des ressources suffisantes à l ’ Institut agraire national pour garantir la conformité au protocole établi pour les évictions ordonnées par les tribunaux compétents afin qu ’ elles soient exécutées sans utilisation excessive de la force ou de la violence et soient soumises à des mesures de procédure rigoureuses;

c) Mette en place un mécanisme juridique pour faire en sorte que les grands projets de développement, les projets agro-industriels et autres industries ne compromettent pas davantage les droits des femmes rurales à la propriété foncière et aux moyens de subsistance et garantisse que les projets d ’ aménagement ne soient exécutés qu ’ après la réalisation des évaluations d ’ impact selon le sexe associant les femmes rurales; et

d) Renforce les mécanismes, y compris les audits effectifs, pour l ’ identification adéquate des femmes dans les situations d ’ urgence qui ont droit aux programmes d ’ aide alimentaire et sociale.

Groupes de femmes défavorisés

Femmes déplacées, réfugiées et chercheuses d’asile

Le Comité est préoccupé par la situation des enfants, plus particulièrement les filles, laissés derrière dans l’État partie par les membres de famille migrants. Il se préoccupe aussi de la situation des femmes et des enfants déplacés et dont le déplacement est directement lié aux taux élevés de la violence et de la criminalité dans l’État partie, notamment par des gangs ou des réseaux transnationaux de criminalité organisée, et il est particulièrement préoccupé par la situation des femmes dans le couloir de la drogue et de la violence le long de la région frontalière.

Le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) Collecte les données ventilées sur la situation spécifique des enfants, en particulier les filles, laissés derrière par les membres migrants de la famille dans l ’ État partie;

b) Intensifie et accélère ses efforts visant à éliminer les causes des déplacements et à répondre aux besoins précis de protection des femmes déplacées dans le pays;

c) Adopte de nouvelles mesures d ’ urgence, notamment l ’ adoption d ’ une politique intégrée pour fournir la protection et de l ’ aide aux femmes déplacées;

d) Intensifie ses efforts, notamment par l ’ accroissement de la coopération bilatérale, régionale et internationale, en vue de faire efficacement face à la violence liée à la drogue et aux gangs entrainant des déplacements.

Femmes en détention

Le Comité est préoccupé par le grand nombre de femmes en détention préventive et le manque de mesures pour garantir que les femmes aient accès à la justice. Il se préoccupe également des conditions de santé et d’hygiène laissant à désirer des femmes en détention, notamment les femmes enceintes et les femmes détenues avec leurs enfants.

Le Comité recommande que l ’ État partie réduise la durée de la détention préventive, en trouvant des solutions de remplacement de la détention et en renforçant l ’ efficacité et l ’ indépendance du système judiciaire. Il recommande également que l ’ État partie veille à ce que les femmes en détention aient des conditions de santé et d ’ hygiène adéquates.

Mariage et relations familiales

Le Comité prend note des modifications apportées au Code de la famille concernant le régime économique du mariage. Toutefois, il est préoccupé par le fait que des dispositions du Code continuent de permettre les mariages des filles de moins de 16 ans, et note que ces mariages ont de graves conséquences pour les filles, notamment sur leur santé et leur éducation. Il note avec préoccupation que les couples de même sexe ne peuvent pas enregistrer leur partenariat dans l’État partie. Le Comité est aussi préoccupé par l’absence de règlement d’application de la loi sur la procréation responsable

Rappelant sa recommandation générale n o  29 (2013) sur les conséquences économiques du mariage, les relations familiales et leur dissolution, le Comité recommande que l ’ État partie  :

a) Fournisse, dans son prochain rapport, des informations concernant l ’ incidence sur les femmes du régime économique de la communauté des biens;

b) Adopte et applique la loi pour interdire le mariage des enfants et unifier à 18 ans l ’ âge légal minimum pour les femmes et les hommes;

c) S ’ attaque aux causes profondes du mariage des enfants et renforce les programmes de promotion du droit des femmes de choisir librement un époux et de ne se marier qu ’ avec leur libre et plein consentement, sur une base égale avec les hommes;

d) Étudie les pratiques des pays de la région qui autorisent l ’ enregistrement du mariage entre partenaires de même sexe;

e) Accélère l ’ adoption de la réglementation de la loi sur la procréation responsable.

Collecte et analyse de données

Le Comité est préoccupé par le manque d’informations statistiques exactes ventilées par sexe, âge, emplacement géographique, origine ethnique et situation socioéconomique dans de nombreux domaines couverts par la Convention.

Le Comité réitère sa précédente recommandation ( CEDAW/C/HON/CO/6 , par. 31) et recommande que l ’ État partie améliore la collecte et l ’ analyse des données ventilées par sexe, âge, emplacement géographique, origine ethnique et situation socioéconomique, indiquant l ’ incidence des mesures prises et les résultats obtenus dans la réalisation pratique de l ’ égalité véritable pour les femmes. Le Comité recommande également à l ’ État partie d ’ élaborer des indicateurs mesurables pour évaluer les tendances de la situation des femmes et les progrès accomplis vers la réalisation de l ’ égalité véritable pour les femmes dans tous les domaines couverts par la Convention. À cet égard, il attire l ’ attention de l ’ État partie sur sa recommandation générale n o  9 (1989) concernant les données statistiques relatives à la situation des femmes et encourage l ’ État partie à élaborer des indicateurs sexospécifiques pouvant servir à formuler, mettre en œuvre, suivre et évaluer et, le cas échéant, revoir les politiques d ’ égalité des sexes.

Protocole facultatif et amendement de l’article 20 1) de la Convention

Le Comité encourage l ’ État partie à ratifier le Protocole facultatif à la Convention et à accepter au plus vite l ’ amendement de l ’ article 20 1) de la Convention concernant la périodicité de ses réunions.

Déclaration et Programme d’action de Beijing

Le Comité demande à l ’ État partie de s ’ appuyer sur la Déclaration et le Programme d ’ action de Beijing pour la mise en œuvre des dispositions de la Convention .

Programme de développement durable à l’horizon 2030

Le Comité préconise la réalisation de l ’ égalité réelle des sexes, conformément aux dispositions de la Convention, tout au long du processus de mise en œuvre du Programme de développement durable à l ’ horizon 2030 .

Diffusion

Le Comité demande à l ’ État partie de veiller à la diffusion rapide des présentes observations finales, dans la/les langue(s) officielle(s) de l ’ État partie, auprès des institutions pertinentes de l ’ État à tous les niveaux (national, régional et local), en particulier auprès du Gouvernement, des ministères, du Congrès national et du pouvoir judiciaire, pour permettre leur mise en œuvre intégrale .

Assistance technique

Le Comité recommande que l ’ État partie lie la mise en œuvre de la Convention à ses efforts de développement et qu ’ il fasse appel, à cet égard, à l ’ assistance technique régionale et internationale.

Ratification d’autres traités

Le Comité note que l ’ adhésion de l ’ État partie aux neuf principaux instruments internationaux relatifs aux droits de l ’ homme améliorerait la jouissance par les femmes de leurs droits humains et libertés fondamentales dans tous les aspects de la vie. Le Comité encourage par conséquent l ’ État partie à ratifier le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l ’ enfant sur une procédure de communication et le Protocole facultatif au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, auquel il n ’ est pas encore partie.

Suivi des observations finales

Le Comité demande à l ’ État partie de lui fournir, dans un délai de deux ans, des informations écrites sur les mesures qu ’ il aura prises pour donner suite aux recommandations énoncées aux paragraphes 13, a) et d) et 29, a) et b) ci­dessus.

Établissement du prochain rapport

Le Comité invite l ’ État partie à soumettre son neuvième rapport périodique en novembre 2020. En cas de retard, le rapport devra couvrir toute la période allant jusqu ’ à la date de sa soumission.

Le Comité demande à l ’ État partie de suivre les directives harmonisées pour l ’ établissement de rapports au titre des traités internationaux relatifs aux droits de l ’ homme, y compris les directives relatives à un document de base commun et à des documents spécifiques aux différents traités (voir HRI/GEN/2/Rev.6 , chap. I).