Sous-Comité pour la prévention de la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants
Visite au Burkina Faso menée du 3 au 9 décembre 2017 : observations et recommandations adressées à l’État partie
Rapport établi par le Sous-Comité * , **
Table des matières
Page
I.Introduction3
II.Facilitation de la visite et coopération4
III.Méthodologie et plan du rapport 4
IV.Mécanisme national de prévention4
A.Cadre institutionnel4
B.Principes à respecter dans la mise en œuvre du mécanisme national de prévention5
C.Recommandations5
V.Visites de terrain6
A.Commissariats de police et gendarmeries6
B.Établissements pénitentiaires12
C.Santé16
VI.Réforme législative19
VII.Étapes suivantes20
Annexes
Annexe I – Liste des entités rencontrées par le Sous-Comité21
Annexe II – Lieux de privation de liberté visités par le Sous-Comité23
I.Introduction
1.Conformément au mandat que lui confère le Protocole facultatif, le Sous-Comité a effectué sa première visite au Burkina Faso du 3 au 9 décembre 2017. Le Burkina Faso est devenu partie à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants le 4 janvier 1999, et au Protocole facultatif s’y rapportant le 7 juillet 2010.
2.La délégation du Sous-Comité était composée de Gnambi Garba Kodjo (chef de la délégation), Catherine Paulet (rapporteuse du Sous-Comité pour le Burkina Faso), Abdallah Ounnir et Emilio Ginés Santidrián, et assistée de deux spécialistes des droits de l’homme du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme ainsi que de deux agents de sécurité de l’Organisation des Nations Unies.
3.Les objectifs principaux de la visite, conformément au Protocole facultatif, étaient les suivants :
a) Visiter divers lieux de privation de liberté, afin de renforcer la protection des personnes privées de liberté contre le risque de torture et de mauvais traitements ;
b) Fournir conseils et assistance technique au Burkina Faso, concernant la mise en place de son mécanisme national de prévention, conformément aux Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention (CAT/OP/12/5) du Sous-Comité.
4.La délégation a rencontré des personnes et des représentants d’institutions (voir annexe I), a visité des lieux de privation de liberté (voir annexe II) et s’est entretenue avec des personnes privées de liberté, des membres des forces de l’ordre, des agents pénitentiaires, des membres du personnel médical et d’autres personnes. Le Sous-Comité tient à remercier toutes ces personnes et institutions pour leur précieuse collaboration.
5.À la fin de sa visite, la délégation a présenté oralement ses observations préliminaires confidentielles aux représentants du Gouvernement.
6.Le présent rapport contient des observations, des conclusions et des recommandations.
7. Le Sous-Comité a la faculté de formuler des observations complémentaires au présent rapport, dans le cadre de ses échanges avec le Burkina Faso. L’absence d’observations sur une institution ou un lieu de détention donné que le Sous-Comité a visité ne doit nullement être interprétée comme un avis favorable ou défavorable sur l’institution ou le lieu en question.
8. Le Sous-Comité recommande que le présent rapport soit diffusé auprès de tous les organes, services et établissements concernés , notamment ceux qu’il mentionne expressément.
9.Conformément au paragraphe 2 de l’article 16 du Protocole facultatif, le présent rapport demeurera confidentiel jusqu’à ce que le Burkina Faso décide de le rendre public. Le Sous-Comité est convaincu que la publication du présent rapport contribuerait positivement à la prévention de la torture et des mauvais traitements au Burkina Faso.
10. Le Sous-Comité recommande au Burkina Faso de demander la publication du présent rapport conformément au paragraphe 2 de l’article 16 du Protocole facultatif.
11.Le Sous-Comité attire l’attention du Burkina Faso sur le Fonds spécial créé par le Protocole facultatif, en son article 26, et rappelle à l’État partie que les recommandations formulées dans ses rapports de visite rendus publics servent de fondement pour la soumission de demandes au Fonds spécial, conformément aux critères publiés par celui-ci.
12.Le Sous-Comité tient à remercier les autorités pour l’aide et l’assistance qu’elles lui ont apportées pendant la planification et la réalisation de sa visite, particulièrement Yakouma Jean de Dieu Bambara, l’agent de liaison désigné, dont la diligence et la disponibilité ont contribué à faciliter la visite. Le Sous-Comité exprime également sa reconnaissance au Bureau du Programme des Nations Unies pour le développement au Burkina Faso pour son soutien.
II.Facilitation de la visite et coopération
13. Le Sous-Comité note avec satisfaction que le Gouvernement lui a accordé l’accès sans restriction aux lieux de détention, conformément au Protocole facultatif. Il a apprécié que les autorisations nécessaires pour accéder à tous les lieux de privation de liberté, établies en accord avec le modèle du Sous-Comité, ainsi que les textes de lois pertinents et les informations relatives aux postes de gendarmerie, aux postes de police et aux centres de détention, requis préalablement à la visite, aient été fournis en temps opportun, ce qui a grandement facilité la visite.
14. Le Sous-Comité a apprécié le dialogue franc et constructif engagé avec les autorités. Il prend acte de l’engagement des pouvoirs publics à remplir leurs obligations résultant du Protocole facultatif.
15. La délégation regrette cependant de ne pas avoir pu visiter le commissariat de police de Wemtenga en raison du refus catégorique de son chef. Ce refus constitue une violation grave des dispositions des articles 4, 11, alinéa a), 12, alinéas a) et b), et 14, paragraphe 1, du Protocole facultatif. Bien que ce cas isolé ne remette pas en cause la bonne foi de l’État partie dans l’exécution de ses obligations, le Sous-Comité souligne la gravité de cet incident, qui renforce les allégations selon lesquelles des actes de torture et de mauvais traitements seraient souvent pratiqués dans ce commissariat durant les gardes à vue, et sape l’effort de coopération exemplaire fourni par l’État partie lors de la visite.
16. Le Sous-Comité recommande à l’ É tat partie de diligenter une inspection du commissariat de police de Wemtenga et de lui en communiquer les conclusions.
III.Méthodologie et plan du rapport
17. Le présent rapport comporte trois parties : la première a trait à la mise en place du mécanisme national de prévention, la deuxième est consacrée aux conditions de détention observées lors des visites de terrain et la troisième est relative à la réforme législative au Burkina Faso.
18.Le Sous-Comité souligne que le présent rapport traite de problèmes structurels intrinsèquement liés, dont l’examen commun est de nature à rendre efficiente la prévention de la torture et des mauvais traitements.
IV.Mécanisme national de prévention
A.Cadre institutionnel
19. Le Burkina Faso a ratifié le Protocole facultatif le 7 juillet 2010 et s’est engagé à mettre en place un mécanisme national de prévention dans un délai d’un an, conformément à l’article 17. Cependant, au moment de la visite, l’État partie n’avait pas encore mis en place son mécanisme, se retrouvant ainsi sur la liste des États parties ne remplissant pas leurs obligations découlant de l’article 17 du Protocole facultatif.
20. Pendant sa visite, le Sous-Comité a pris connaissance des réformes constitutionnelle, législative et juridique en cours. La loi no 022-2014/AN du 27 mai 2014 portant prévention et répression de la torture et des pratiques assimilées a institué un Observatoire national de prévention de la torture et autres pratiques assimilées. Toutefois, au moment de la visite, l’Observatoire n’était pas opérationnel. L’État partie a informé la délégation de sa volonté de réviser cette loi pour adosser le mécanisme national de prévention à la Commission nationale des droits humains nouvellement réformée, mais pas encore opérationnelle.
21. Aux termes de l’article 21 du projet de loi portant modification de la loi no 022-2014/AN, la Commission nationale des droits humains est habilitée à visiter les lieux de privation de liberté sans restriction, à prévenir la torture et les pratiques assimilées en tenant compte des normes internationales, et à examiner régulièrement la situation des personnes privées de liberté. Cependant, la délégation a noté que les dispositions dudit avant-projet n’étaient pas suffisantes pour satisfaire les garanties requises par l’article 18 du Protocole facultatif, à savoir l’indépendance, les ressources suffisantes, la compétence et la conformité aux règles relatives aux institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme.
22. Le Sous- C omité recommande à l’État partie de veiller à ce que le mécanisme national de prévention soit doté, par un texte législatif, d’un budget suffisant et autonome ainsi que d’un personnel suffisant et compétent , et de s’assurer de l’indépendance de se s membres.
B.Principes à respecter dans la mise en œuvre du mécanisme national de prévention
23. Toute structure servant de mécanisme national de prévention doit être conforme aux dispositions du Protocole facultatif, telles qu’elles sont développées dans les Directives concernant les mécanismes nationaux de prévention, et aux Principes concernant le statut des institutions nationales pour la promotion et la protection des droits de l’homme (Principes de Paris).
24. Le choix institutionnel du mécanisme national de prévention doit faire l’objet d’une consultation élargie, transparente et inclusive.
25. Le mandat du mécanisme national de prévention quant aux visites doit être défini dans un texte législatif, lequel doit prévoir que ledit mandat couvre tous les lieux où se trouvent ou pourraient se trouver des personnes privées de liberté sur l’ordre d’une autorité publique ou avec son consentement exprès ou tacite, conformément à l’article 4 du Protocole facultatif et à l’avis émis par le Sous-Comité en la matière.
26. La durée du mandat des membres du mécanisme national de prévention doit être spécifiée, conformément aux dispositions du Protocole facultatif. Les membres et le personnel doivent jouir de privilèges et d’immunités liés à l’exercice de leurs fonctions, et des dispositions doivent être prises pour prévenir les représailles contre les membres du mécanisme et les personnes qui lui fournissent des informations.
27.Le mécanisme national de prévention doit jouir d’une autonomie financière et fonctionnelle. L’État partie doit veiller à ce qu’une allocation spécifique soit versée au mécanisme afin de lui permettre d’exécuter son mandat, son programme de visites et ses activités de suivi.
28.Le mécanisme national de prévention doit décider, en toute autonomie, de l’affectation de ses ressources.
29. Les méthodes de travail et garanties d’indépendance du mécanisme national de prévention, ainsi que la coopération et l’échange d’informations avec la Commission nationale des droits humains, doivent être régis par des règlements internes. Le rapport annuel du mécanisme doit être distinct de celui de la Commission et faire l’objet d’une publication, conformément à l’article 23 du Protocole facultatif.
C.Recommandations
30. La loi modificative de la l oi n o 022-2014/AN portant prévention et répression de la torture et des pratiques assimilées doit intégrer les critères du Protocole facultatif et des Principes de Paris , faire référence au Protocole facultatif et au Sous- C omité, mentionner explicitement la création ou la désignation du m écanisme n ational de p révention, et faire référence à la publication de son rapport annuel.
31. Le choix du modèle et de la structure du mécanisme national de prévention doit faire l’objet d’une procédure transparente, inclusive et participative pour déterminer la configuration institutionnelle la plus efficace , et éviter le chevauchement des mandats et la duplication des efforts.
32. Il doit en être de même pour le processus de nomination et de sélection des membres du mécanisme, lequel doit assurer l’équilibre des genres et tenir compte du pluralisme ethnique. Les membres doivent posséder les compétences et connaissances requises pour l’exercice de leur mandat, notamment des connaissances médicales et juridiques, et ne doivent pas occuper de postes susceptibles de donner lieu à des conflits d’intérêt s .
33. Le mécanisme national de prévention doit pouvoir effectuer des visites inopinées dans tous les lieux de privation de liberté , à la fréquence qu’il décide , ce qui implique la possibilité de mener des entretiens privés avec les personnes privées de liberté.
34. L’indépendance financière et opérationnelle du mécanisme national de prévention doit être garantie par la loi et de facto. Les ressources nécessaires doivent être allouées pour permettre son bon fonctionnement.
35. Des efforts de sensibilisation et de communication doivent être déployés pour assurer la visibilité du mécanisme national de prévention ainsi que sa distinction de la Commission nationale des droits humains .
V.Visites de terrain
A. Commissariats de police et gendarmeries
36. La délégation a visité deux commissariats de la Police nationale et trois postes de la Gendarmerie nationale (voir annexe II).
1. Conditions matérielles et sanitaires de détention
37. La délégation a constaté que les conditions de détention des personnes gardées à vue dans les commissariats de police n’étaient pas conformes à l’Ensemble de règles minima des Nations Unies pour le traitement des détenus (Règles Nelson Mandela), notamment les règles 12 à 17.
38. Les cellules du commissariat central de la police de Ouagadougou étaient dans un état de délabrement et de saleté inacceptable. La cellule de détention principale et les autres cellules manquaient d’aération et de lumière naturelle, étaient infestées d’insectes et de rats, et leurs sols étaient jonchés de détritus. Une autre cellule de 16 mètres carrés non utilisée et adjacente à la cellule principale servait de dépotoir.
39.Les personnes gardées à vue manquaient de produits d’hygiène personnelle, dormaient torse nu, à même le sol, sans matelas, couverture ou protection contre les moustiques. Les cellules dégageaient une odeur d’urine et d’excréments.
40.La cellule principale, mesurant 42 mètres carrés pour une capacité de 50 personnes, selon les autorités, était équipée de trois latrines, mais dépourvue de douche et d’eau potable. Les conditions d’hygiène étaient inacceptables. À proximité, une cellule plus petite (9 mètres carrés) réservée aux femmes, tout aussi insalubre, ne disposait ni de toilettes, ni de douche, ni d’eau potable.
41.Le commissariat de Ouagadougou a été visité à deux reprises. Lors de la première visite, les 12 hommes – dont 2 mineurs – gardés à vue dans la grande cellule étaient vêtus de sous-vêtements uniquement, et pieds nus. Lors de la deuxième visite (deux jours plus tard), certains détenus avaient été libérés, y compris les mineurs. Les nouveaux détenus portaient tous des vêtements.
42.Le commissariat ne disposait d’aucun lieu de dépôt des vêtements et objets personnels des personnes gardées à vue, leurs vêtements étant jetés au sol à l’extérieur du bâtiment. De même, aucun espace n’était mis à leur disposition comme lieu de promenade.
43.La délégation a constaté que la nourriture et l’eau n’étaient ni de bonne qualité ni présentes en quantité suffisante. Les personnes gardées à vue préparaient elles-mêmes leur unique repas quotidien à base de riz et de haricots. Les repas étaient pris à même le sol, dans un grand récipient, dans des conditions d’hygiène déplorables. L’entretien des personnes gardées à vue était pris en charge par les familles, et celles qui ne disposent d’aucun soutien familial dépendent de la solidarité de leurs codétenus. Enfin, les personnes gardées à vue ne recevaient qu’une faible quantité d’eau par jour, soit deux litres pour boire et se laver.
44.La situation semblait bien pire au commissariat de Wemtenga, que la délégation n’a pu visiter. En effet, de nombreux détenus interrogés à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou ont témoigné de la saleté, de l’exiguïté et de l’absence d’eau et de lumière dans trois des quatre cellules. Il a aussi été rapporté qu’une cellule d’une superficie de 1 mètre carré servait à enfermer des détenus durant un certain temps, avant ou après les interrogatoires.
45.Les conditions matérielles de travail du personnel de police et de gendarmerie étaient déplorables. Ainsi, la délégation a constaté l’état de délabrement des locaux de la Brigade de recherche et d’intervention de la Gendarmerie nationale de Paspanga, notamment des bureaux des officiers de police judiciaire.
46.Un bâton et une corde à nœud était déposés dans le bureau destiné aux interrogatoires, ce qui pouvait laisser penser à une utilisation inappropriée à l’encontre des personnes gardées à vue (intimidation ou violences).
47.Les cellules de garde à vue, aussi bien celles des hommes que celles réservées aux femmes et aux mineurs, étaient utilisées conjointement par la Brigade de recherche et d’intervention et la Brigade territoriale de la Gendarmerie nationale. Ces installations étaient propres et disposaient d’une cour avec toilettes et salle d’eau.
48. Le Sous- C omité recommande aux autorités du Burkina Faso :
a) D’ améliorer les conditions d’hygiène et de salubrité dans les locaux de garde à vue ;
b) De fournir des matelas, couchages et moustiquaires aux personnes gardé e s à vue ;
c) De doter les commissariats et gendarmeries d’un budget alloué à l’achat de nourriture su ffisante pour les personnes gardé e s à vue ;
d) De s’assurer que les personnes gardé e s à vue disposent de vêtements ainsi que d’ un accès à l’eau potable, à des toilettes , à une douche et à des produits d’hygiène personnelle ;
e) De réserver un espace au rangement des effets personnels des personnes gardées à vue , et de mettre en place un système permettant leur enregistrement et leur consignation ;
f) D’ assurer un éclairage et une aération suffisants dans les cellules de g arde à vue ;
g) De s’assurer que chaque détenu dispose d’ au moins une heure par jour de p romenade en plein air ;
h) De prévoir des cellules séparées réservées aux femmes et aux mineurs ;
i) De s’assurer qu’aucun objet contondant non référencé et non réglementaire ne se trouve dans un bureau d’interrogatoire.
2.Garanties juridiques fondamentales
i.Droit à être informé de ses droits et des motifs de son arrestation
49.Le Code de procédure pénale ne comporte pas de dispositions sur le droit de la personne gardée à vue à être informée de ses droits et des motifs de son arrestation. Toutefois, ces droits sont indiqués dans le procès-verbal, rédigé en français par l’officier de police judiciaire. Conformément à l’article 61 dudit Code, les personnes gardées à vue procèdent à la lecture du procès-verbal, sauf si elles déclarent ne pas savoir lire ; dans ce cas, la lecture et la traduction leur en sont faites par un interprète ou par un officier de police judiciaire dans leur langue. Toutefois, il ressort des entretiens que plusieurs personnes détenues et gardées à vue ont signé, parfois contraintes, leur procès-verbal sans en connaître le contenu. La plupart des personnes interrogées par la délégation ont déclaré n’avoir été informées ni de leurs droits ni de leur situation pénale.
50.Lors de sa visite, la délégation a reçu de nombreuses allégations de personnes privées de liberté concernant le non-respect des garanties fondamentales de leurs droits lors de la détention, y compris l’accès à un avocat, le droit à un examen médical ainsi que le droit de contacter la famille et/ou la représentation diplomatique pour les étrangers.
51. Le Sous- C omité recommande à l’ É tat partie :
a) D’adopter les mesures législatives et administratives nécessaires pour garantir que toute personne privée de liberté est informée, dès son arrestation, de ses droits et des motifs de son arrestation , oralement , dans une langue qu’elle comprend , avec recours à un interprète si nécessaire, ainsi que par écrit ;
b) De placer de manière visible des affiches indiquant les droits des détenus dans les commissariats et les postes de gendarmerie.
ii.Droit à l’assistance d’un avocat
52.Le Sous-Comité est préoccupé par l’inexistence, dans le Code de procédure pénale, de la garantie de la présence d’un avocat dès l’interpellation d’une personne. Cette garantie n’est prévue, à l’article 111 dudit Code, que lors de la première comparution devant un magistrat, ce qui est contraire au Règlement no 05/CM/UEMOA relatif à l’harmonisation des règles régissant la profession d’avocat dans l’espace de l’Union économique et monétaire ouest-africaine, lequel prévoit la présence d’un avocat dès la phase de l’interpellation. Les entretiens menés par la délégation révèlent que la plupart des personnes gardées à vue n’avaient pas été informées de leur droit d’être assistées par un avocat et n’avaient pas fait valoir ce droit.
53.Les informations reçues par la délégation renseignent sur l’insuffisance du nombre d’avocats (137 avocats inscrits et 28 avocats stagiaires en 2014) pour tout le pays. Cette insuffisance, particulièrement hors de Ouagadougou, et la difficulté d’accès à un défenseur dès les premiers moments de la garde à vue constituent des sources de préoccupation.
54.La délégation a été informée de l’existence d’un fonds d’assistance judiciaire. Une commission d’assistance, créée à cette fin au sein de chaque tribunal de grande instance, délivre des certificats d’indigence afin de permettre aux demandeurs de bénéficier du fonds. Les entretiens menés avec les détenus ont cependant révélé que ces fonds ne seraient pas effectivement utilisés à leur profit.
55. Le Sous- C omité recommande à l’ É tat partie :
a) De mettre en place une réforme législative garantissant aux personnes gardées à vue le droit à l’assistance d’un avocat de leur choix ou commis d’office dès l’arrestation et durant le premier interrogatoire ;
b) De créer un système d’aide judiciaire efficace pour les indigents.
iii.Droit à un examen médical
56.Le Code de procédure pénale garantit le droit à un examen médical de la personne gardée à vue, si elle le demande après soixante-douze heures. Cependant, selon l’article 63 dudit Code, c’est le procureur qui peut désigner un médecin qui examinera cette personne à n’importe quel moment de sa garde à vue. Le Sous-Comité est préoccupé par le fait qu’aucun examen médical n’est effectué durant les soixante-douze premières heures de la garde à vue, et qu’après ce délai, le droit à l’examen médical dépend aussi d’une décision judicaire.
57.Le Burkina Faso ne dispose pas d’un système de couverture maladie universelle. Les médicaments sont à la charge des détenus et de leur famille. La plupart des personnes gardées à vue rencontrées n’avaient pas été informées de leur droit à un examen médical et certaines ont déclaré que leurs demandes de voir un médecin avaient été rejetées.
58. Le Sous- C omité recommande à l’État partie :
a) D e réformer sa législation pour garantir aux personnes gardées à vue le droit à un examen médical dès leur arrestation ;
b) D e veiller à l’effectivité de cet examen médical et de son caractère systématique en début de garde à vue ;
c) De garantir que l’e xamen médical est effectué par un médecin choisi par la personne gardée à vue , ou par un médecin indépendant formé pour déceler les cas de torture et de mauvais traitements conformément au Manuel pour enquêter efficacement sur la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants (Protocole d’Istanbul).
iv.Information de la famille
59.Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que le Code de procédure pénale ne prévoit pas le droit pour la personne gardée à vue d’informer sa famille de sa détention, ce que corroborent dans la pratique les entretiens menés par la délégation.
60. Le Sous- C omité recommande à l’ É tat partie de garantir à toute personne gardée à vue le droit de contacter sa famille ou d’autres personnes de son choix dès le début de la privation de liberté . Cette mesure contribuerait efficacement à la prévention de la torture et des mauvais traitements.
v. Durée de la garde à vue et garanties fondamentales
61.Le Code de procédure pénale prévoit aux articles 62 et 75 une durée de garde à vue allant jusqu’à soixante-douze heures, avec possibilité de prolongation de quarante-huit heures par le procureur ou le juge d’instruction, ce qui constitue une source de préoccupation pour le Sous-Comité. La délégation a constaté, lors des entretiens et dans les registres, la prolongation quasi systématique de la garde à vue, sans possibilité de savoir si elle avait été autorisée par le procureur.
62.Un détenu de la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou a indiqué avoir été gardé à vue au commissariat de Wemtenga pendant quarante jours. Au commissariat central, quatre détenus étaient en garde à vue depuis douze jours. La délégation a reçu de nombreux autres témoignages de personnes dont la garde à vue avait duré bien au-delà du délai légal, soit plus d’un mois dans certains cas.
63.Le Sous-Comité est également préoccupé par le fait que la garde à vue peut durer jusqu’à quinze jours, comme le prévoit la loi no 017-2009/AN du 5 mai 2009 portant répression du grand banditisme.
64. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie de veiller à ce que la durée maximale de la garde à vue n’excède pas soixante-douze heures . E n cas de prolongation, celle-ci ne doit pas dépasser quarante-huit heures . L a durée totale de la garde à vue ne d o it donc en aucun cas excéder cent vingt heures, et cette durée maximale d oit être dûment justifié e par des circonstances exceptionnelles , confirmé e par écrit et inscrit e dans les registres . Le Sous-Comité encourage l’ État partie , lors de ses travaux de réforme législative en cours, à considérer d’établir la durée maximale de garde à vue à quarante-huit heures , en accord avec les instruments internationaux , notamment les Lignes directrices sur les conditions d’arrestation, de garde à vue et de détention provisoire en Afrique ( L ignes directrices de Luanda ) .
65.En outre, le Sous-Comité recommande à l’ État partie de prendre toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que, dans la pratique, tou te s les personnes gardé e s à vue jouissent de toutes les garanties juridiques fondamentales énoncées supra, dès le début de la privation de liberté, notamment l’accès à un avocat et le droit d’être informé es de leurs garanties fondamentales.
vi. Indépendance judiciaire
66. Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que le contrôle juridictionnel de la garde à vue est exercé par le procureur, affilié au Ministère de la justice, et non par une autorité judiciaire indépendante.
67. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie de faire en sorte que l’autorité judiciaire de contrôle de la garde à vue soi t indépendante du pouvoir politique , afin que son indépendance fonctionnelle soit pleinement garantie.
vii. Habeas corpus
68.Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que les personnes placées en détention provisoire n’ont pas le droit de contester la légalité de leur détention devant une autorité judiciaire indépendante (habeas corpus).
69.Rappelant qu’il est impératif que tout détenu soit présenté devant un juge indépendant et impartial afin qu’il puisse exercer un recours relatif à la légalité de sa détention , le Sous-Comité encourage les autorités à prendre les mesures effectives en vue de l’ét ablissement de l’habeas corpus.
viii.Droit d’informer les autorités consulaires de sa détention
70.La délégation a rencontré des détenus ressortissants d’autres États, principalement de pays voisins. Tous affirmaient n’avoir pas été informés de leur droit de contacter les autorités consulaires afin de les informer de leur détention. Le Code de procédure pénale ne garantissant pas ce droit, aucun des détenus étrangers interrogés n’avait été autorisé à prendre contact avec son ambassade, que ce soit pendant la garde à vue ou après celle-ci.
71. Le S ous- C omité recommande à l’ É tat partie de prendre les mesures nécessaires afin que les autorités consulaires soient systématiquement informées de la mise en détention de leurs ressortissants et que cette information soit inscrite dans le registre de s garde s à vue.
3.Registres
72.Le Sous-Comité est préoccupé par les décalages existants entre le nombre de personnes gardées à vue et celui qui est consigné dans le registre des gardes à vue. En effet, la délégation a constaté que deux personnes étaient gardées à vue dans les locaux de la Brigade de recherche sans être inscrites dans le registre, ce qui peut laisser supposer que les délais de garde à vue ne sont pas respectés.
73.La délégation a aussi constaté que les personnes gardées à vue ne signaient jamais la colonne du registre relative à la liste des effets personnels saisis par l’autorité ayant procédé à l’arrestation, et qu’il n’existait aucun registre concernant les plaintes, l’utilisation de moyens de contrainte, les mesures disciplinaires, les visites de proches ou d’avocats, les décès et les transferts vers un hôpital ou un lieu de détention.
74.Dans les locaux de la Brigade de recherche et d’intervention de la Gendarmerie nationale de Paspanga, la délégation a constaté que le registre des gardes à vue et le registre des événements présentaient des incohérences. Le registre des gardes à vue – consulté par le Procureur lorsqu’il visite l’établissement deux ou trois fois par an – comportait moins de personnes gardées à vue que le registre des événements (visé par le commandant de brigade, mais jamais par le Procureur), dans lequel elles étaient scrupuleusement inscrites. Au commissariat central, un système de garde et de contrôle visuel des personnes gardées à vue était assuré par deux policiers armés installés dans la cour, face aux cellules. Les policiers géraient le déplacement des personnes arrêtées des cellules vers le lieu de l’interrogatoire. Les registres tenus par le « violon » ne comportaient que le nom des personnes gardées à vue, aucune mention n’apparaissait quant à la finalité ou aux dates et heures de début et de fin de la garde à vue.
75. Le Sous- C omité recommande à l’ État partie de faire en sorte que les postes de police et gendarmeries soient dotés de registres plus détaillés sur les visites médicales des arrivants, les consultations, les extractions médicales et les décès , et que ces registres soient scrupuleusement tenus et harmonisés afin d’être conformes aux norme s nationales et internationales .
4. Allégations de torture et de mauvais traitements
76.Le Sous-Comité est préoccupé par les allégations de détenus qui auraient subi des actes de torture et de mauvais traitements commis surtout par des agents de la police au moment de leur arrestation, pendant leur transport vers le poste pour la garde à vue, et pendant leur garde à vue, notamment des coups de poing ainsi que des coups assénés avec des câbles électriques. Certains détenus se sont plaints aussi d’avoir fait l’objet d’un menottage très serré, y compris des mineurs, pour des cas de vol simple.
77.À Ouagadougou, un individu aurait été arrêté par des policiers en civil, sans identification préalable, qui auraient recouru à un usage excessif de la force et à des violences. Ceux-ci l’auraient de suite menotté, les mains dans le dos, et placé à l’intérieur de la voiture de police, où il aurait été frappé durant le trajet jusqu’à son arrivée au commissariat de Wemtenga. Il aurait ensuite été interrogé pendant deux jours, menotté et à genoux, et continuellement frappé sur tout le corps. Le détenu en question a rapporté qu’à l’entrée du commissariat, il existait une cellule (deuxième porte à gauche) où les détenus seraient enfermés pour y être frappés notamment avec des bâtons et des câbles électriques. Plusieurs détenus d’autres lieux de détention ont fait les mêmes descriptions.
78.Selon les témoignages, dans ce même commissariat de Wemtenga, il serait fait usage de musique à très haut volume pour couvrir les cris des détenus. Le but de ces actes de torture serait d’obtenir des aveux. Les détenus concernés n’auraient été ni examinés ni soignés par un médecin, malgré leurs blessures.
79. Le Sous- C omité recommande à l’État partie :
a) D’organiser de s formations régulières au profit des agents de l’État autorisés à procéder à des arrestations , afin de les sensibiliser au non-recours à la torture et de leur rappeler avec vigueur le caractère absolu de l’interdiction des pratiques de torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants ;
b) De diligenter des enquêtes impartiales chaque fois qu’il existe des indices concordants laissant supposer que des actes de torture ou de mauvais traitements ont été commis ;
c) D’interdire le recours au menottage comme outil de violence policière et l’usage non approprié et prolongé des menottes ;
d) D’inspecter d’urgence le commissariat de Wemtenga et de transmettre le rapport de cette inspection au Sous-Comité .
5. Personnel
80.La délégation a noté le manque de formations périodiques visant à sensibiliser les agents de police et de sécurité à la question des droits de l’homme. Elle a toutefois remarqué que, généralement, les directeurs des lieux de détention visités avaient une bonne connaissance des Règles Nelson Mandela.
81.La délégation a noté que la loi no 022-2014/AN n’était pas connue, notamment par de hauts responsables de la police.
82.La délégation déplore les conditions de travail des agents de police, obligés de travailler à plusieurs dans des bureaux trop exigus. Elle déplore par ailleurs que les responsables des postes de police soient obligés d’utiliser leurs propres subsides afin d’acheter des médicaments et de la nourriture pour les personnes gardées à vue, en raison de l’absence de toute allocation budgétaire à cet effet.
83. Le Sous- C omité recommande à l’État partie :
a) D’ organise r , en application des articles 10 et 11 de la C onvention contre la torture , des formations périodiques pour les officiers chargés de l’exécution de la loi , afin qu’ils assimilent correctement et appliquent efficacement les dispositions juridiques national es et international es, notamment les Règles Nelson Mandela, la Convention et le Protocole facultatif ;
b) D’ alloue r aux postes de police les ressources financières suffisantes pour disposer de locaux appropriés pour leur personnel , en vue du bon fonctionnement des services, ainsi que pour fournir la nourriture et l es soins nécessaires aux détenus.
B. Établissements pénitentiaires
1.Conditions matérielles de détention
i.Prison de haute sécurité de Ouagadougou
84.La prison de haute sécurité de Ouagadougou accueille des condamnés pour terrorisme, des condamnés à mort et des mineurs.
85.Bien que cet établissement ne souffre pas de surpopulation carcérale, le Sous-Comité est préoccupé par le fait que les mineurs y étaient détenus sans être séparés des adultes.
86.Les visites y avaient souvent lieu en fin de semaine (quinze minutes en contact direct et en présence d’un gardien). Cependant, ces visites étaient rares : 30 détenus tout au plus recevaient des visites régulières de leur famille et moins encore recevaient la visite d’avocats. En raison des risques d’évasion, la cour de promenade n’était pas utilisée ; les détenus ne bénéficiaient donc pas d’exercice en plein air. Ils se promenaient dans les couloirs des blocs.
87.L’alimentation des détenus y était insuffisante (un repas par jour, principalement du riz et des haricots), non équilibrée (jamais de légumes ou de fruits) et de mauvaise qualité.
ii.Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou
88.En novembre 2017, la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou abritait 2 369 détenus, avec un taux de surpopulation carcérale d’environ 316 %. Quatre condamnés à mort y étaient détenus en cellule individuelle. Les condamnés n’y étaient pas séparés des prévenus.
89.Une partie de l’ancien bâtiment était fermée en raison de son délabrement, tandis que le nouveau bâtiment était mal conçu en termes d’espace et d’aération. L’autre partie de l’ancien bâtiment, bien qu’inadaptée à l’accueil des détenus, demeurait ouverte en raison de la surpopulation qui touchait les autres bâtiments. Le Sous-Comité est préoccupé par cette surpopulation.
90.L’ancien bâtiment consacré à l’internement collectif était marqué par l’insuffisance de l’espace accordé à chaque détenu (entre 1,4 et 2 mètres carréspar détenu) et des toilettes collectives auxquelles les détenus n’avaient pas accès durant la nuit. Les cellules du dernier étage ne disposaient que de trous minuscules en guise de fenêtre.
91.Les détenus dormaient sur un mince tapis posé au sol, dans des conditions d’hygiène déplorables (toilettes non fonctionnelles pour certaines et sales, ordures diverses sur le sol, eau stagnante, odeurs pestilentielles).
92.Le quartier des femmes connaissait les mêmes problèmes (eau et nourriture insuffisantes et de mauvaise qualité). Les femmes interrogées ont fait état de mauvaises conditions d’hygiène, du manque de médicaments et de services sociaux pour leurs enfants, et du fait qu’elles dépendaient grandement de l’aide d’associations, à la fois pour la nourriture et l’assistance juridique.
93.Le quartier des mineurs, séparé des autres, disposait d’une petite cour et d’une salle de classe délabrée et sale.
94.Le Sous-Comité a remarqué que la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou disposait de divers espaces où les détenus auraient pu réaliser des activités – salle de sport, classes et ateliers –, mais que ces espaces n’étaient pas exploités faute de moyens.
95.La délégation a pu constater que la nourriture fournie par l’établissement était insuffisante en quantité et en qualité ; c’étaient les familles des détenus qui pourvoyaient donc à l’alimentation de ces derniers. De même, les détenus ne disposaient pas toujours de produits d’hygiène de base, notamment de savon. Les femmes n’avaient pas accès à des produits d’hygiène intime.
96. Le Sous- C omité recommande à l’État partie d’ améliore r les conditions de détention dans la prison de haute sécurité et la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou , notamment :
a) En faisant en sorte que les détenus aient un espace suffisant dans les cellules et qu’ils soient séparés par catégorie ;
b) En fournissant des matelas, des couchages et des moustiquaires ;
c) En veillant à ce que les cellules soient aérées et suffisamment éclairées par la lumière naturelle et artificielle ;
d) En améliorant les conditions d’hygiène et de salubrité des cellules et des cours ;
e) En permettant l’accès des détenus aux toilettes le jour comme la nuit .
97. L’État partie doit assurer l’accès à une no urriture adéquate et suffisante , à l’eau potable et aux articles d’hygiène nécessaires, en répondant, notamment, aux besoins des femmes et des enfants qui son t en détention avec leur mère .
98. L’État partie doit procéder à la rénovation de la partie délabrée de l’ancien bâtiment de la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou .
99. Le Sous-Comité encourage l’État partie à adopter une politique de mesures de substitution à l’incarcération et d’aménagement des peines , afin de réduire la surpopulation carcérale. À cet égard, il souhaite attirer son attention sur la prise en considération des Règles minima des Nations Unies pour l ’ élaboration de mesures non privatives de liberté (Règles de Tokyo).
100. L’État partie doit s’assurer de la bonne application de la l oi n o 010-2017/AN du 10 avril 2017 portant régime pénitentiaire au Burkina Faso quant à l’enseignement, à la formation professionnelle et à la réinsertion sociale des détenus. Il doit garantir la mise en place effective d’un programme éducatif continu en prison, et faciliter l’accès à la formation profes sionnelle et à une bibliothèque .
101. Des activités récréatives, sportives et culturelles doivent ê tre organisées plus fréquemment , et le travail des détenus doit ê tre rémunéré de façon équitable .
2.Torture et mauvais traitements, et système de plaintes
102.Le Sous-Comité note que la loi no 010-2017/AN interdit en son article 24 la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants contre les détenus.
103.La délégation a reçu des témoignages de tortures et de mauvais traitements de détenus, qui auraient été frappés ou fouettés par des gardiens à l’aide de bâtons ou de cordelettes. De même, il a été fait état d’un climat de violence verbale entre les détenus et le personnel. Selon plusieurs détenus, certaines punitions infligées sous la forme de châtiments physiques seraient administrées en présence de tous les détenus, pour servir d’exemple.
104.Des détenus ont également mentionné que les mauvais traitements et actes de torture se produisaient le plus souvent durant l’arrestation, le transport, la garde à vue et l’interrogatoire.
105.La délégation a, en outre, été informée que les magistrats du parquet refuseraient de prendre en considération les plaintes pour torture qui leur sont adressées par les détenus et les personnes interpellées. Par ailleurs, des avocats du barreau ont fait part au Sous-Comité de leur extrême difficulté à rendre visite, même en qualité d’avocat, aux personnes interpellées dans le cadre des infractions relatives au terrorisme, à la prison de haute sécurité de Ouagadougou.
106. Le Sous- C omité recommande à l’ État partie :
a) De faire en sorte que l es autorités judiciaires (juges d’instruction, juges d’ application des peines et procureurs) visitent régulièrement les lieux de détention , à la fréquence exigée par la l oi n o 010-2017/AN , afin de pouvoir répondre aux requêtes des détenus ;
b) De dispenser périodiquement au personnel pénitentiaire des formations ainsi que des instructions claires et précises rappelant l’interdiction absolue de toute forme de torture et de mauvais traitements ;
c) De veille r au bon fonctionnement d’un mécanisme permettant à toute personne détenue de porter plainte de manière confidentielle auprès d’organes de contrôle indépendants, comme le prévoit la l oi n o 010-2017/AN ;
d) D’intégrer l ’examen de ces plaintes dans le cadre des mécanismes de visite instaurés ;
e) D’instituer des procédures de protection contre les représailles des auteurs de plaintes ;
f) D ’assurer que le mécanisme en place diligente d es enquêtes indépendantes et impartiales de toutes ces plaintes dans un délai raisonnable, conformément aux articles 12 et 13 de la Convention contre la torture ;
g) De renforcer l ’accès à un avocat et à l’aide juridique.
3.Registres
107.Le Burkina Faso entreprend actuellement la mise en place du système d’informatisation des données en matière pénitentiaire (projet IRAPOL) à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou. Cette expérience n’en est qu’à ses débuts, la maison d’arrêt et de correction et la prison de haute sécurité de Ouagadougou disposent donc de registres journaliers (« main courante ») relatifs à leur fonctionnement quotidien. La délégation a constaté avec préoccupation des défaillances dans la tenue de ces registres. Les deux établissements disposent de registres des décès, mais ceux-ci ne sont que très sommairement remplis, puisqu’ils ne mentionnent notamment ni la cause ni les circonstances de la mort.
108. Le Sous- C omité recommande à l’ État partie :
a) D e doter les établissements pénitentiaires de registres relatifs aux visites médicales des arrivants, aux consultations, aux extractions médicales et aux décès ;
b) D ’harmoniser tous les registres de manière à se conformer aux normes nationales et internationales .
4.Procédure et sanctions disciplinaires en prison
109.Le Sous-Comité est préoccupé par le fait que des détenus de la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou seraient placés dans des cellules disciplinaires exiguës (5 mètres carrés) et sans ventilation autre que des trous percés dans les portes.
110.Selon les détenus, la durée des séjours dans la cellule disciplinaire pouvait atteindre un mois, alors que la direction affirmait que la durée maximale ne dépassait pas dix jours. D’autres mesures disciplinaires comme la réduction de dotation en vivres et de visites étaient également appliquées.
111.Des personnes souffrant de troubles mentaux étaient soumises à l’isolement, ce qui était de nature à aggraver leur pathologie.
112.Aucun texte ne réglementait la procédure disciplinaire.
113. Le Sous- C omité émet les recommand ations suivantes :
a) L es autorités pénitentiaires ne d oiv ent recourir à l’isolement que dans les cas strictement nécessaires , en conformité avec les Règles Nelson Mandela ;
b) L a personne visée par la mesure d oit être immédiatement informée et pouvoir contester cette décision par voie interne et/ou judiciaire ;
c) Les personnes souffrant de troubles mentaux ne d oiv ent jamais être soumises à l’isolement disciplinaire ;
d) Les cellules d’isolement de la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou d oiv ent être réaménagées conformément aux normes internationales, ventilées et exposées à la lumière, avec un accès aux toilettes et à l’eau potable.
5.Personnel de la prison de haute sécurité de Ouagadougou
114.Selon sa direction, la prison de haute sécurité de Ouagadougou ne pouvait pas correctement fonctionner avec le personnel qui y était affecté au moment de la visite (250 agents).
115.Le Sous-Comité note avec satisfaction la création de l’École nationale de la garde de sécurité pénitentiaire, assurant la formation d’un corps d’agents pénitentiaires dans le complexe de la prison de haute sécurité de Ouagadougou.
116.Cependant, les entretiens que la délégation a effectués avec certains membres du personnel révèlent que ces derniers manquaient de connaissances sur les Règles Nelson Mandela et les normes internationales, et qu’ils n’avaient pas reçu de formation spécifique pour exercer en prison de haute sécurité.
117.De nombreux détenus ont fait état de l’existence de corruption, tant au sein de la prison qu’à l’extérieur de celle-ci, pour l’obtention de certains services comme les soins médicaux ou l’accès à l’hôpital.
118. Le Sous- C omité recommande à l ’État partie :
a) De veiller à ce que l’enseignement et l’information concernant l’interdiction de la torture et des mauvais traitements fassent partie intégrante de la format ion du personnel pénitentiaire ;
b) D’organiser de s formations périodiques , notamment pour le personnel d’encadrement, relatives aux normes internationales (Règles Nelson Mandela, Convention contre la tort ure et Protocole facultatif ) ;
c) De mettre en place une politique efficace de lutte contre la corruption dans les établissements pénitentiaires.
C. Santé
1. Soins de santé en milieu pénitentiaire
i.Remarques préliminaires
119.Le Sous-Comité note avec satisfaction que le personnel de santé et le personnel socioéducatif exerçant dans les établissements pénitentiaires relevaient respectivement du Ministère de la santé et du Ministère des affaires sociales. Cela ne peut que contribuer à renforcer la qualité et la coordination de la prise en charge sanitaire et socioéducative des personnes détenues.
120.Cependant, la situation des détenus défavorisés qui ne peuvent assumer le coût de leurs soins est très préoccupante, puisque les soins, y compris urgents, sont payants – en dehors du soutien des organisations non gouvernementales et de programmes nationaux ciblés (tuberculose, paludisme, VIH/sida).
121. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie d’assurer l’accès aux traitements pour tous les détenus , y compris les indigents , et l’encourage à envisager un régime de protection sociale et un système d e couverture maladie universelle.
ii.Personnel
122.À la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou, le personnel de santé soignait les détenus et le personnel, ce qui pourrait entraîner un conflit de loyauté, notamment en cas d’allégation de mauvais traitements.
iii.Locaux
123.À la prison de haute sécurité de Ouagadougou, l’infirmerie disposait de deux lits d’observation (inoccupés le jour de la visite). À la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou, l’infirmerie disposait de huit lits, dont quatre étaient occupés par des détenus menottés au lit, mesure coercitive systématique qui générait à l’évidence un inconfort pour les patients.
124. Le Sous-Comité recommande que toute mesure coercitive ne soit utilisée qu’en dernier recours et sur la base d’une évaluation du risque individualisée.
iv.Examen médical d’entrée
125.À la prison de haute sécurité de Ouagadougou, chaque détenu bénéficiait d’un examen médical à l’entrée et disposait d’un dossier médical régulièrement tenu. En revanche, à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou, il n’y avait pas de visite systématique des arrivants.
126. Le Sous-Comité recommande qu’une visite systématique des arrivants soit mise en place à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou .
v.Accès aux soins et gestion des urgences
127.Les demandes de consultation transitaient par le personnel pénitentiaire ou les détenus auxiliaires d’infirmerie, par l’intermédiaire des chefs de cellule. Dans les quartiers des hommes de la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou, il a été fait état de difficultés d’accès à la consultation.
128.Le Sous-Comité recommande à l’ État partie une vigilance particulière pour que toutes les demandes soient transmises au personnel de santé.
129.Un registre journalier des consultations demandées et effectuées était tenu à la prison de haute sécurité comme à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou. Le centre hospitalier universitaire Yalgado-Ouédraogo et la clinique d’Aouissa étaient référents pour les consultations spécialisées et hospitalisations (sous garde pénitentiaire). Aucun de ces deux établissements ne disposait d’une ambulance.
130. Le Sous-Comité recommande que chaque établissement pénitentiaire soit doté d’un véhicule de transport adapté.
vi.Traitements
131.Les crises aiguës de paludisme et la protection contre les moustiques, le diagnostic et le traitement de la tuberculose, le dépistage du VIH ainsi que le diagnostic et le traitement du sida faisaient l’objet de programmes nationaux de prise en charge.
132.Les pathologies en lien avec des carences vitaminiques sévères d’origine alimentaire étaient nombreuses (109 cas de béribéri à la maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou, par exemple).
133. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie d’améliorer la qualité nutritionnelle des repas fournis aux détenus.
134.La fourniture des médicaments de base (antibiotiques, antalgiques, vitamines, etc.) connaissait de fréquentes ruptures d’approvisionnement.
135. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie de veiller à l’approvisionnement régulier en médicaments.
136.Les violences entre détenus, ou entre gardiens et détenus, ne faisaient pas l’objet d’une consignation et d’un signalement systématiques par le personnel de santé, qui se limitait aux soins nécessaires, le cas échéant.
137. Le Sous-Comité recommande que le personnel de santé soit sensibilisé à l’intérêt préventif de la démarche de consignation systématique des allégations de violences et des constats de lésions .
138.Il n’existe pas de prise en charge spécifique pour les condamnés à de longues peines, les personnes âgées, les femmes, les mineurs, les toxicomanes ou les enfants de moins de deux ans placés auprès de leur mère.
139. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie d’ utiliser une approche différenciée sur les plans sanitaire , éducati f et pénitentiaire, en fonction des vulnérabilités particulières de la population carcérale .
2. Service psychiatrique du centre hospitalier universitaire Yalgado-Ouédraogo
i.Remarques préliminaires
140.Hôpital de proximité pour la région de Ouagadougou, le centre hospitalier universitaire Yalgado-Ouédraogo est aussi une référence pour l’ensemble du territoire national. Seule l’unité d’hospitalisation a été visitée.
141.Le séjour et les soins délivrés à l’hôpital sont payants, sauf pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans. La situation est donc très préoccupante pour la population indigente.
142. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie de garantir l’accès aux soins pour les indigents , et l’encourage à envisager l’extension du régime de protection sociale et la mise en place d’ un système d e couverture maladie universelle.
ii.Conditions de séjour
143.Chaque patient était généralement hospitalisé avec un accompagnant. Les chambres individuelles comme doubles étaient payantes (de 500 à 4 500 francs CFA par jour, en fonction de l’équipement de la chambre), et les familles devaient s’arranger comme elles le pouvaient pour payer. Or, la majorité des patients accueillis étaient considérés comme indigents.
144. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie de garantir l’accès aux soins des patients indigents , qu’il s’agisse du séjour ou des soins proprement dits.
145.Les deux chambres d’isolement par lesquelles passait tout nouvel entrant, sauf exception, étaient des cellules dépourvues de natte, de matelas, de toilettes et de lavabo, fermées par des portes en fer (dont l’une était coupante et dangereuse) et munies d’une petite fenêtre grillagée ne dispensant qu’une faible aération.
146. Le Sous-Comité recommande la rénovation immédiate des deux chambres d’isolement .
147.Lorsqu’un détenu était hospitalisé (un cas en 2016, un autre en 2017), un garde pénitentiaire était présent. La durée moyenne de séjour était brève, soit d’environ quinze jours.
iii.Personnel
148.Le personnel était constitué de 42 membres pour les unités du service, dont 8 psychiatres en exercice et 13 en formation, 3 psychologues et 16 attachés de santé, c’est-à-dire des infirmiers diplômés d’État spécialisés, ayant une capacité de diagnostic et de prescription, et susceptibles de compenser partiellement le manque de psychiatres.
iv.Traitements
149.Les soins et traitements médicamenteux étaient payants. Néanmoins, le service disposait de médicaments de base (diazépam, halopéridol, chlorpromazine) fournis par des organisations non gouvernementales ou un fonds propre, pour traiter les épisodes de crise des indigents.
v.Moyens de contrainte
150.Le recours à l’isolement était fréquent, notamment pour les arrivants, pour une période d’observation qui pouvait durer plusieurs jours. Les vigiles pouvaient parfois prêter main forte. Les séjours n’étaient répertoriés ni dans le dossier du patient, ni dans un registre ad hoc. En revanche, le recours à la contention était exceptionnel.
151. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie de définir et de mett r e en place une politique de recours à la contention et à l’isolement, en les limitant strictement à des situations de dernier recours et en les accompagnant de garanties , notamment la tenue d’un registre ad hoc et son contrôle régulier .
vi.Garanties
152.La très grande majorité des patients étaient hospitalisés sans leur consentement, amenés par la famille ou la police sur réquisition. L’hospitalisation était décidée par le psychiatre de garde ou l’assistant de santé, de même que la sortie. Les articles 108 à 110 du Code de la santé publique relatifs aux hospitalisations sans consentement n’ayant pas été complétés par des décrets d’application, il n’existait pas de réglementation régissant ces hospitalisations ou encore la notification des droits, l’examen périodique de la situation et le recours judiciaire qui y étaient liés.
153. Le Sous-Comité recommande à l’ État partie d’inclure dans le programme de réforme législative engagé une réforme de la législation en santé mentale , évoquant notamment les conditions et garanties relatives à l’ hospitalisation sans consentement .
VI.Réforme législative
154.Le Sous-Comité a bien noté que le Burkina Faso avait engagé une réforme législative importante, notamment la révision de la Constitution, du Code pénal et du Code de procédure pénale.
155. Le Sous- C omité encourage l’État partie à effectuer cette ré forme en conformité avec les normes internationales.
156.L’avant-projet de nouvelle constitution contient des changements positifs concernant la prévention de la torture et des traitements inhumains, cruels, dégradants et humiliants. La protection de la vie, la sûreté et l’intégrité physique y sont garanties ; la peine de mort y est abolie ; et les traitements inhumains, cruels, dégradants et humiliants ainsi que la torture physique ou morale, entre autres, sont interdits et punis par la loi (art. 5). Bien qu’un moratoire sur la peine de mort soit en place depuis 1988, celle-ci continue à être prononcée par les tribunaux (16 condamnés à mort au pays en 2017). Le Sous-Comité félicite l’État partie de prévoir l’abolition de la peine de mort dans l’avant-projet de nouvelle constitution, de protéger les personnes privées de leur liberté (art. 6), et de garantir le droit à la défense et à être entendu par une juridiction indépendante et impartiale (art. 7). Le Sous-Comité note aussi positivement l’existence de dispositions relatives à l’indépendance du pouvoir judiciaire (art. 146 à 156) et des magistrats (art.157 à 159).
157.Le Sous-Comité félicite l’État partie pour la définition de la torture et des pratiques assimilées à la torture adoptée dans la loi no 022-2014/AN, en accord avec celle de l’article premier de la Convention contre la torture. Il note également avec satisfaction l’avant-projet de loi portant sa modification (art. 2), qui comprend aussi une section sur la répression des actes de torture et des pratiques assimilées, punis par des peines d’emprisonnement (art. 4 à 10), et une disposition selon laquelle aucune circonstance exceptionnelle ne peut être invoquée pour justifier la torture ou des pratiques assimilées (art. 3).
158.Cependant, il ressort des entretiens menés par la délégation que les magistrats de l’État partie prennent en considération les aveux obtenus sous la torture, et que cette pratique n’est pas interdite par la loi.
159. Le Sous- C omité recommande à l’État partie d’ interdi r e par disposition légale l’utilisation de toute déclaration obtenue par la torture comme élément de preuve dans une procédure judiciaire, et de veille r à l’application de cette disposition en conformité avec l’article 15 de la Convention contre la torture.
160.Le Sous-Comité félicite l’État partie pour l’adoption de la loi no 010-2017/AN, qui réglemente le régime pénitentiaire jusque-là régi par le décret no AN VI-103/FP/MIJ du 1er décembre 1988.
161. Le Sous- C omité encourage l’État partie à veiller à ce que la loi n o 010 - 2017/AN soit effectivement appliquée , afin d’améliorer les conditions en milieu pénitentiaire.
162.Le Sous-Comité a été informé de la révision du Code pénal et du Code de procédure pénale conformément aux recommandations formulées par le Comité contre la torture aux paragraphes 8 et 11, alinéa b), de ses observations finales concernant le rapport initial du Burkina Faso (CAT/C/BFA/CO/1).
163. Le Sous- C omité encourage l’État partie à veiller à l’harmonisation du Code pénal et du Code de procédure pénale avec les normes internationales , et à garantir le droit d’accès à un avocat dès les premiers instants de la garde à vue , le droit de prévenir sa famille ou ses proches ainsi que le droit d’avoir accès à un médecin.
164.Le Sous-Comité prend note de la préoccupation de l’État partie relative aux « groupes d’autodéfense » qui pratiquent régulièrement et impunément la torture et les mauvais traitements. Il salue les tentatives de l’État partie de réglementer les activités de ces groupes, qui sévissent dans certaines zones du pays, notamment par le décret no 2016-1052/PRES/PM/MATDSI/MJDHPC/MINEFID/MEEVCC portant définition des modalités de participation des populations à la mise en œuvre de la police de proximité. Ce dernier interdit entre autres en son article 12, au niveau de la structure communautaire locale de sécurité, la détention, les sévices corporels et les traitements cruels, inhumains, dégradants et humiliants.
165. Le Sous- C omité recommande à l’État partie d’ adopter toutes les mesures nécessaires pour faire cesser les activités des « groupes d’autodéfense » et rétablir l’ordre dans les zones du pays où ces groupes opèrent , afin de mettre fin aux actes de torture et aux mauvais traitement s qu’ils pratiquent , et de traduire en justice ceux qui pratiquent de tel s actes.
VII.Étapes suivantes
166. Le Sous-Comité demande qu’une réponse lui soit communiquée dans les six mois à compter de la date de transmission du présent rapport à la Mission permanente du Burkina Faso auprès de l’Office des Nations Unies et des autres organisations internationales à Genève.
167. Dans ce document, l’État partie doit répondre directement à toutes les recommandations et demandes de renseignements complémentaires formulées dans le présent rapport, et rendre compte en détail des mesures déjà prises ou prévues (accompagnées de calendriers d’exécution) pour donner suite aux recommandations.
168. La réponse de l’État partie doit contenir des renseignements sur la mise en œuvre des recommandations portant spécifiquement sur certaines institutions ainsi que sur les politiques et pratiques en général .
169. L’article 15 du Protocole facultatif interdit toutes les sanctions et représailles, quelles qu’en soient la forme et la source, visant une personne qui a été en contact ou a tenté d’être en contact avec le Sous-Comité. Le Sous-Comité rappelle au Burkina Faso l’obligation qui lui incombe de prévenir de telles sanctions ou représailles , et le prie de fournir, dans sa réponse, des renseignements détaillés sur les mesures qu’il aura prises pour s’acquitter de cette obligation .
170. Le Sous-Comité rappelle que la prévention de la torture et des mauvais traitements constitue une obligation continue et de large portée de l’État partie .
171. Le Sous-Comité considère que sa visite et le présent rapport font partie d’un dialogue continu. Il reste à la disposition du Burkina Faso en vue de l’aider à s’acquitter des obligations qui lui incombent en vertu du Protocole facultatif.
172. Le Sous-Comité recommande aux autorités nationales du Burkina Faso , conformément à l’article 12 , alinéa d), du Protocole facultatif , d’engager le dialogue avec le Sous-Comité au sujet de la suite donnée à ses recommandations , dans les six mois qui suivront la réception par le Sous-Comité de la réponse au présent rapport. Il recommande également au Burkina Faso d’entamer des discussions avec le Sous-Comité sur les modalités de ce dialogue , au moment où il soumettra sa réponse au présent rapport .
Annexes
[Français seulement]
Annexe I
Liste des entités rencontrées par le Sous-Comité
1. Autorités gouvernementales
Ministère de la justice, des droits humains et de la promotion civique
•Secrétaire général
•Directeur général de la défense des droits humains
•Conseiller en droits humains du Cabinet
•Directeur du suivi des accords internationaux
•Direction générale de la garde de sécurité pénitentiaire
•Inspection technique des services
•Direction générale de la politique criminelle et du sceau
•Direction générale de la promotion des droits humains
Ministère de l’administration territoriale, de la décentralisation et de la sécurité intérieure
•Direction générale de la Police nationale
Ministère de la femme, de la solidarité nationale et de la famille
Ministère de la défense nationale et des anciens combattants
2.Commission des affaires générales, institutionnelles et des droits humains de l’Assemblée nationale
•Député-Président
•Députée adjointe du Président
•Cinq députés
3. Cour d’appel de Ouagadougou
•Procureur général
4.Organismes des Nations Unies
•Coordonnatrice résidente et représentante résidente du Programme des Nations Unies pour le développement
•Directeur de pays et troisième personne du Programme des Nations Unies pour le développement
•Organisation mondiale de la Santé
•Programme alimentaire mondial
•Haut-Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés
5.Commission nationale des droits humains
•Président
•Secrétaire général
•Conseiller
•Attaché
6. Société civile
Ordre des avocats du Burkina Faso
•Deux représentants
Ordre national des médecins du Burkina Faso - Conseil régional de l’ordre des médecins de Ouagadougou
•Président et deux médecins
Organisations non gouvernementales
•Association SOS Pénitencier
•Centre pour la qualité du droit et la justice
•Centre d’information et de formation en matière de droits humains en Afrique
•ACAT
•Mouvement burkinabé des droits de l’homme et des peuples
•Association Semfilms
•Femmes et prisons d’Afrique
•Amnesty International Burkina Faso
7.Organisations internationales
•Délégation de l’Union européenne au Burkina Faso
Annexe II
Lieux de privation de liberté visités par le Sous-Comité
Gendarmeries
•Groupe départemental de la Gendarmerie nationale de Ouagadougou
•Brigade de recherche et d’intervention de la Gendarmerie nationale de Paspanga
•Brigade territoriale de la Gendarmerie nationale de Paspanga
Commissariats de police
•Commissariat central de la police de Ouagadougou
•Commissariat de police de Wemtenga - Brigade de recherche et d’intervention de la Police nationale
Maisons d’arrêt
•Prison de haute sécurité de Ouagadougou
•Maison d’arrêt et de correction de Ouagadougou
Hôpital
•Service psychiatrique du Centre hospitalier universitaire Yalgado-Ouédraogo