Nations Unies

CCPR/C/PER/CO/5

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

29 avril 2013

Français

Original: anglais

Comité des droits de l’homme

Observations finales concernant le cinquième rapport périodique du Pérou, adoptées par le Comitédes droits de l’homme à sa 107e session(11-28 mars 2013)

Le Comité des droits de l’homme a examiné le cinquième rapport périodique du Pérou (CCPR/C/PER/5) à ses 2964e et 2965e séances (CCPR/C/SR.2964 et 2965), les 19 et 20 mars 2013. À sa 2975e séance (CCPR/C/SR.2975), le 27 mars 2013, il a adopté les observations finales ci-après.

A.Introduction

Le Comité accueille avec satisfaction le cinquième rapport périodique du Pérou et les renseignements qu’il contient. Il apprécie l’occasion qui lui a été offerte d’établir un dialogue constructif avec la délégation de haut niveau au sujet des mesures prises par l’État partie pendant la période considérée pour mettre en œuvre les dispositions du Pacte. Le Comité remercie l’État partie des réponses écrites (CCPR/C/PER/Q/5/Add.1) qu’il a apportées à la liste de points à traiter (CCPR/C/PER/Q/5) et qui ont été complétées oralement par la délégation, ainsi que des renseignements supplémentaires apportés par écrit.

B.Aspects positifs

Le Comité accueille avec satisfaction la ratification par l’État partie des instruments internationaux suivants ou son adhésion auxdits instruments:

a)La Convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, le 26 septembre 2012;

b)La Convention relative aux droits des personnes handicapées et le Protocole facultatif s’y rapportant, le 30 janvier 2008;

c)Le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, le 14 septembre 2006;

d)La Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille, le 14 septembre 2005.

Le Comité accueille également avec satisfaction les mesures législatives et autres prises par l’État partie et énumérées ci-après:

a)L’adoption de la loi générale no 29973 relative aux personnes handicapées, le 13 décembre 2012;

b)L’adoption de la loi no 28983 relative à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes, le 12 mars 2007;

c)L’adoption du Plan intégral de réparation (loi no 28592), le 20 juillet 2005;

d)La création d’un vice-ministère des droits de l’homme et de l’accès à la justice relevant du Ministère de la justice et des droits de l’homme, par la loi no 29809 du 5 décembre 2011.

C.Principaux sujets de préoccupation et recommandations

Le Comité prend acte des améliorations que l'État partie a apportées au cadre prévu pour le suivi des constatations adoptées à l’issue de l’examen des communications émanant de particuliers ainsi que des mesures qu’il a prises à la suite de ces constatations, mais note avec préoccupation que lesdites constatations n’ont toujours pas été mises en œuvre de manière appropriée (art. 2).

Le Comité invite l’État partie à redoubler d’efforts pour donner pleinement effet à toutes les recommandations figurant dans les constatations adoptées au titre du Protocole facultatif dans lesquelles le Comité a conclu à des violations du Pacte par l’État partie. Il encourage également l’État partie à poursuivre sa collaboration avec le Rapporteur spécial chargé du suivi des constatations.

Le Comité prend acte des informations communiquées par la délégation de l’État partie au sujet du projet de plan national relatif aux droits de l’homme, mais regrette que ce plan soit encore à l’examen (art. 2).

L’État partie devrait accélérer l’adoption d’un plan national complet relatif aux droits de l’homme et veiller à ce qu’il réponde de manière adéquate et efficace aux problèmes soulevés par la société civile, le Comité lui-même et d’autres mécanismes relatifs aux droits de l’homme. L’État partie devrait également veiller à ce que, une  fois adopté, le plan soit mis en œuvre efficacement, notamment en allouant des ressources humaines et matérielles suffisantes à cette fin et en mettant en place des mécanismes de contrôle et des dispositifs imposant de rendre compte des actes accomplis, avec la participation des représentants de tous les secteurs de la société civile.

Le Comité prend note des mesures adoptées par l’État partie pour lutter contre la discrimination raciale, mais relève avec préoccupation que les peuples autochtones et les Afro-Péruviens continuent d’être victimes de discrimination (art. 2, 26 et 27).

L’État partie devrait redoubler d’efforts pour prévenir et éliminer la discrimination à l’égard des peuples autochtones et des Afro-Péruviens, notamment au moyen de campagnes d’éducation et de sensibilisation de grande envergure visant à promouvoir la tolérance et le respect de la diversité. L’État partie devrait également veiller à la pleine application des dispositions législatives dans lesquelles sont énoncées les obligations que lui impose le Pacte au regard du principe de la non-discrimination. Il devrait en outre prendre des mesures appropriées pour faire en sorte que tout acte de discrimination donne lieu à une enquête et que les victimes reçoivent réparation.

Le Comité est préoccupé par les informations relatives à la discrimination et aux actes de violence dont les personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres sont l’objet en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre (art. 2, 3, 6, 7 et 26).

L’État partie devrait faire savoir clairement et officiellement qu’il ne tolère aucune forme de stigmatisation sociale de l’homosexualité, de la bisexualité et de la transsexualité, ni aucun acte de discrimination ou de violence à l’égard de personnes en raison de leur orientation sexuelle ou de leur identité de genre. Il devrait également modifier sa législation de façon à interdire la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle ou l’identité de genre. L’État partie devrait offrir une protection efficace aux personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres et veiller à ce que tout acte de violence motivé par l’orientation sexuelle ou l’identité de genre de la victime donne lieu à une enquête et que les auteurs soient traduits en justice et condamnés.

Le Comité prend acte des mesures prises par l’État partie pour promouvoir l’égalité des sexes ainsi que des progrès accomplis dans ce domaine, mais il note avec préoccupation que les femmes sont sous-représentées aux postes de décision dans le secteur public (art. 2, 3, 25 et 26).

L’État partie devrait intensifier ses efforts pour garantir l’égalité effective des hommes et des femmes dans toutes les régions du pays, en adoptant au besoin des mesures temporaires spéciales. Il devrait en particulier prendre des mesures concrètes pour accroître la représentation des femmes aux postes de décision dans le secteur public. L’État partie devrait également élaborer des stratégies pour combattre les stéréotypes sur le rôle des femmes, notamment en sensibilisant la population à la nécessité de permettre aux femmes d’exercer pleinement leurs droits.

Le Comité prend note des mesures prises pour prévenir et combattre la violence à l’égard des femmes, mais demeure préoccupé par la persistance de ce phénomène (art. 3, 6 et 7 du Pacte).

L’État partie devrait redoubler d’efforts pour prévenir et combattre toutes les formes de violence à l’égard des femmes, notamment en veillant à l’application effective des lois et politiques pertinentes en vigueur. Il devrait adopter une loi qui érige en infraction toutes les formes de violence dans la famille. L’État partie devrait également faciliter le dépôt de plaintes par les victimes; veiller à ce que tous les cas de violence signalés donnent lieu à une enquête et à ce que les responsables soient traduits en justice; et faire en sorte que les victimes aient accès à des moyens effectifs de protection, notamment en mettant à leur disposition un nombre suffisant de centres d’accueil à travers le pays.

Le Comité reconnaît les efforts que fait l’État partie pour enquêter sur les violations des droits de l’homme commises pendant le conflit armé, entre 1980 et 2000, ainsi que les obstacles que celui-ci rencontre dans ce domaine, mais il est préoccupé par:

a)Le faible nombre de condamnations et le nombre élevé d’acquittements;

b)Les difficultés auxquelles se heurtent les femmes qui ont subi des violences sexuelles pendant le conflit lorsqu’elles veulent porter plainte, ainsi que le faible nombre d’enquêtes ouvertes et de condamnations prononcées dans ce type d’affaires;

c)La lenteur des opérations d’exhumation, d’identification et de restitution des dépouilles aux familles des victimes;

d)L’obligation établie par la Chambre pénale nationale selon laquelle, dans les affaires de violations des droits de l’homme, les preuves doivent être directes et dûment étayées, ce qui exclut les témoignages des victimes et de leurs proches;

e)Les informations selon lesquelles le Ministère de la défense et des forces armées ne coopère pas pleinement;

f)Les informations données par la délégation selon lesquelles, pendant le conflit, les unités des forces de sécurité qui participaient à des opérations armées n’étaient pas tenues de faire rapport sur la manière dont elles avaient conduit ces opérations, mesure dont le Comité craint qu’elle n’ait été prise dans le but de garantir l’impunité pour les violations des droits de l’homme (art. 2, 6 et 7).

L’État partie devrait redoubler d’efforts pour faire en sorte que les graves violations des droits de l’homme commises pendant le conflit armé, entre 1980 et 2000, y compris les actes de violence sexuelle, ne demeurent pas impunies. L’État partie devrait prendre les mesures voulues pour accélérer les enquêtes judiciaires et les opérations d’exhumation, d’identification et de restitution des dépouilles aux proches des victimes. Le Comité invite également l’État partie à réexaminer les critères de la preuve applicables dans les affaires de violations et demande instamment à l’État partie de veiller à ce que le Ministère de la défense et des forces armées collabore pleinement aux enquêtes et communique sans délai aux autorités requérantes toutes les informations dont il dispose. L’État partie devrait également faire en sorte que les responsabilités soient établies en ce qui concerne la pratique consistant à ne pas faire rapport sur les opérations à l’époque du conflit.

Le Comité salue les efforts déployés par l’État partie pour accorder réparation aux victimes de violations commises pendant le conflit armé entre 1980 et 2000, en particulier le Plan intégral de réparation. Toutefois, le Comité est préoccupé par le retard pris dans la mise en œuvre du Plan et par le fait que toutes les victimes d’actes de torture ou de violences sexuelles ne sont pas admises au bénéfice du Programme de réparations financières. Le Comité constate également avec préoccupation qu’il a été mis fin au processus de recensement et d’identification des bénéficiaires du Programme de réparations financières le 31 décembre 2011, en application du décret suprême no 051‑2011-PCM (art. 2).

L’État partie devrait intensifier ses efforts pour faire en sorte que toutes les victimes de violations commises pendant le conflit armé entre 1980 et 2000, y compris les victimes d’actes de torture et de violences sexuelles, obtiennent réparation. L’État partie devrait également veiller à ce que les indemnisations accordées soient adéquates et que le processus de recensement et d’identification des bénéficiaires du Programme de réparations financières soit rouvert de sorte que toutes les victimes du conflit puissent être indemnisées.

Le Comité accueille avec satisfaction la réouverture en 2012 des enquêtes concernant plus de 2 000 femmes stérilisées de force entre 1996 et 2000, mais il est préoccupé par le fait que, malgré les nombreuses années écoulées depuis les faits, les victimes n’ont toujours pas obtenu réparation et les responsables n’ont toujours pas été condamnés (art. 2, 3 et 7).

Le Comité demande instamment à l’État partie d’accélérer l’enquête; d’allouer des ressources financières, humaines et techniques suffisantes aux autorités chargées de l’enquête; et de faire en sorte que les responsables soient traduits en justice et condamnés à des peines appropriées et que toutes les victimes obtiennent sans plus tarder une réparation adéquate.

Rappelant ses précédentes observations finales (CCPR/CO/70/PER, par. 20), le Comité se dit préoccupé par le taux élevé de décès maternels liés à l’avortement; par le fait que l’avortement continue d’être réprimé pénalement, même dans les cas où la grossesse résulte d’un viol ou d’un inceste; et par l’absence de protocole national régissant la pratique de l’avortement pour raison médicale. Le Comité est également préoccupé par les taux élevés de mortalité maternelle dans les zones rurales et de grossesses chez les adolescentes. En outre, le Comité regrette la décision par laquelle la Cour constitutionnelle a interdit la distribution gratuite de pilules contraceptives d’urgence (art. 2, 3, 6, 17 et 26).

Le Comité recommande à l’État partie:

a) De réviser sa législation sur l’avortement et de prévoir d’autres exceptions à l’interdiction de l’avortement pour couvrir les cas où la grossesse résulte d’un viol ou d’un inceste;

b) D’adopter rapidement un protocole national régissant la pratique de l’avortement pour raison médicale;

c) De redoubler d’efforts pour réduire le nombre de grossesses chez les adolescentes et le taux de mortalité maternelle, en particulier dans les zones rurales, et de veiller à ce que des services de santé génésique et sexuelle, notamment des pilules contraceptives d’urgence, soient accessibles dans toutes les régions du pays;

d) D’étendre les programmes d’éducation et de sensibilisation aux niveaux formel (établissements d’enseignement primaire et secondaire) et informel (médias) sur l’importance de l’utilisation d’une contraception et sur les droits à la santé génésique et sexuelle, et de veiller à leur mise en œuvre effective.

Le Comité note avec préoccupation la fréquence à laquelle l’État partie a déclaré l’état d’urgence et dérogé aux droits consacrés par le Pacte, notamment en réaction à de simples manifestations, alors que ces droits ne sont susceptibles de dérogation que dans des situations véritablement exceptionnelles. Il prend également note avec inquiétude des graves violations des droits de l’homme qui auraient été commises pendant les périodes d’état d’urgence, notamment des cas de détention arbitraire, de meurtre et de torture. À ce sujet, il regrette que l’État partie n’ait pas donné d’informations concrètes concernant les mesures prises en application des dérogations susmentionnées (art. 4, 6, 7 et 9).

L’État partie devrait limiter le recours à l’état d’urgence et garantir le strict respect des droits de l’homme consacrés par le Pacte ainsi que l’application systématique de toutes les conditions définies à l’article 4 du Pacte. Il devrait également veiller à ce que les informations faisant état de violations graves des droits de l’homme commises pendant les périodes d’état d’urgence donnent lieu sans délai à une enquête approfondie, et à ce que les responsables soient traduits en justice.

Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles les membres des forces de l’ordre et des forces de sécurité ont fait un usage excessif et disproportionné de la force, y compris d’armes meurtrières, lors de manifestations, causant dans certains cas la mort de plusieurs personnes (art. 6 et 7).

L’État partie devrait continuer à prendre des mesures pour prévenir efficacement et l’usage excessif de la force par les forces de l’ordre et les forces de sécurité en vue de le faire cesser définitivement, notamment en faisant en sorte que le personnel concerné reçoive une formation régulière et approfondie dans le domaine des droits de l’homme qui mette l’accent sur les moyens d’éviter l’usage de la force et des armes à feu. L’État partie devrait en outre faire en sorte que toutes les allégations dénonçant des cas d’usage excessif de la force donnent lieu sans délai à une enquête impartiale et approfondie, et que les responsables soient traduits en justice.

Le Comité note avec satisfaction que selon ce qu’a indiqué l’État partie les enquêtes sur les violations des droits de l’homme, les crimes contre l’humanité et autres crimes internationaux sont systématiquement du ressort des tribunaux civils, mais il est préoccupé par les informations selon lesquelles le décret législatif no 1095 pourrait avoir pour effet d’étendre la compétence des tribunaux militaires qui pourraient alors connaître des affaires d’usage excessif de la force ou de violations des droits de l’homme. Il note également avec préoccupation que la définition du terme «groupe hostile» donnée dans les décrets législatifs nos 1094 et 1095 est si générale qu’elle pourrait être interprétée de façon à viser les personnes ayant pris part à des manifestations ou à des mouvements sociaux, ce qui pourrait porter atteinte aux droits de l’homme consacrés par les articles 19 et 21 du Pacte et dissuader les individus de les exercer (art. 2, 6, 7, 19 et 21).

Le Comité recommande à l’État partie de réexaminer ses décrets législatifs n os  1094 et 1095 afin de les mettre en conformité avec les obligations relatives aux droits de l’homme qui lui incombent en vertu du Pacte, et de veiller à ce que, ainsi qu’il l’a lui-même expliqué, les violations des droits de l’homme demeurent hors de la compétence des tribunaux militaires.

Le Comité est préoccupé par le fait qu’il n’existe pas de cadre législatif pour la protection des migrants qui ne répondent pas à la définition internationale du «réfugié» mais qui courent un risque réel d’être tués ou torturés, ou encore d’être victimes de mauvais traitements s’ils sont expulsés du territoire de l’État partie (art. 6 et 7).

L’État partie devrait adopter des lois garantissant le respect du principe de non-refoulement et veiller à leur application effective dans les cas où les intéressés ne répondent pas à la définition du «réfugié» mais risquent d’être tués ou torturés ou de subir des mauvais traitements, et devrait faire en sorte que le personnel chargé de contrôler les migrations, en particulier le long de la frontière nord, reçoive une formation appropriée dans ce domaine.

Le Comité est préoccupé de noter que des cas de torture et de mauvais traitements imputés à des agents de l’État sont toujours dénoncés et que les faits de torture sont parfois considérés par les enquêteurs comme des infractions du type «coups et blessures». Il prend note des projets de lois conférant au Service du Défenseur du peuple les fonctions de mécanisme national de prévention aux fins du Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, mais regrette que ce mécanisme n’ait pas encore été mis en place (art. 7).

L’État partie devrait redoubler d’efforts pour prévenir et éliminer la torture et les mauvais traitements, notamment en renforçant la formation dispensée aux membres des forces de l’ordre et des forces de sécurité dans le domaine des droits de l’homme. Il devrait également faire en sorte que tous les cas présumés de torture et de mauvais traitements donnent lieu sans délai à des enquêtes approfondies et indépendantes, que les responsables soient traduits en justice et que les victimes obtiennent une réparation adéquate, comprenant des services de santé et de réadaptation. L’État partie devrait en outre veiller à ce que les juges, les procureurs et les autres professionnels, notamment du secteur de la santé, qui participent aux enquêtes sur les cas de torture et de mauvais traitements reçoivent une formation suffisante sur le Protocole d’Istanbul et les normes internationales relatives à la torture et aux mauvais traitements, qui leur apprenne en particulier comment distinguer les cas de torture. Il devrait également prendre sans tarder les mesures législatives nécessaires à la mise en place d’un mécanisme national de prévention indépendant, comme le prévoit le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, et veiller à ce que des ressources humaines et financières suffisantes soient allouées à ce mécanisme afin qu’il puisse fonctionner efficacement.

Le Comité prend note des mesures que l’État partie a prises pour lutter contre la traite des êtres humains, le travail forcé et la servitude domestique et de son intention, selon ce qu’a indiqué la délégation, de donner suite aux recommandations formulées par la Rapporteuse spéciale sur les formes contemporaines d’esclavage, y compris leurs causes et leurs conséquences (A/HRC/18/30/Add.2), mais il est préoccupé par le fait que ces pratiques subsistent dans l’État partie (art. 8).

L’État partie devrait redoubler d’efforts pour prévenir et éliminer la traite des êtres humains, le travail forcé et la servitude domestique, notamment en assurant l’application effective des politiques et des textes de loi pertinents en vigueur. Il devrait également prendre des mesures législatives propres à interdire et réprimer le travail forcé et la servitude domestique, conformément à l’article 8 du Pacte. Le Comité recommande en outre à l’État partie de faire en sorte que les allégations dénonçant ce type de pratiques donnent lieu à des enquêtes approfondies, que les responsables soient traduits en justice et que les victimes reçoivent des soins appropriés, bénéficient de l’aide juridictionnelle, et obtiennent réparation, notamment sous la forme de mesures de réadaptation.

Le Comité note avec préoccupation qu’en dépit des mesures prises ou annoncées pour remédier à ce problème le taux de surpopulation dans les lieux de détention reste très élevé et les conditions carcérales, en particulier les conditions de sécurité et l’accès aux soins médicaux, laissent encore beaucoup à désirer. Rappelant ses précédentes observations finales (CCPR/CO/70/PER, par. 14), le Comité note que les conditions carcérales dans les prisons de Yanamayo et, plus encore, de Challapalca demeurent particulièrement préoccupantes (art. 10).

L’État partie devrait redoubler d’efforts pour réduire la surpopulation dans les lieux de détention, notamment en recourant à des mesures de substitution à l’emprisonnement, et pour améliorer les conditions de détention, en particulier les conditions de sécurité et l’accès aux soins médicaux, conformément au Pacte et à l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus. Rappelant ses précédentes observations finales, le Comité recommande à l’État partie de fermer les prisons de Yanamayo et Challapalca.

Le Comité est préoccupé par les informations selon lesquelles des actes de violence auraient été commis contre des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes. Il est également préoccupé par le fait que la diffamation demeure une infraction au regard du droit interne, ce qui constitue une menace pour l’exercice de la liberté d’expression et l’accès à la pluralité de l’information (art. 9, 14 et 19).

Rappelant son Observation générale n o 34 (2011) sur la liberté d’opinion et la liberté d’expression, ainsi que ses précédentes observations finales (CCPR/CO/70/PER, par. 16), le Comité recommande à l’État partie de garantir pleinement le droit à la liberté d’opinion et d’expression sous toutes ses formes. Il lui recommande également de faire en sorte que des enquêtes efficaces soient menées sur les plaintes dénonçant des agressions ou d’autres actes de violence commis contre des défenseurs des droits de l’homme et des journalistes et que les responsables soient traduits en justice. Il prie instamment l’État partie d’envisager d’adopter le projet de loi visant à dépénaliser la diffamation, actuellement examiné par le Parlement.

Le Comité est préoccupé par le fait que le pourcentage d’enfants qui travaillent demeure élevé (art. 8 et 24).

L’État partie devrait redoubler d’efforts pour assurer l’application effective, dans toutes les régions du pays, des politiques et des lois en vigueur visant à interdire le travail des enfants. Il devrait en outre faire en sorte que les violations de ces lois donnent lieu à des enquêtes efficaces et que les responsables soient poursuivis et condamnés, et tenir des statistiques fiables sur ce phénomène.

Le Comité accueille avec satisfaction l’adoption de la loi no 29785 relative au droit à la consultation préalable des peuples autochtones. Il n’est toutefois pas certain de comprendre quelles sont les communautés autochtones qui pourront se prévaloir de ce droit. Il note que la loi no 29785 exige l’obtention préalable du consentement des peuples autochtones avant qu’ils ne soient transférés hors de leurs terres sur lesquelles des opérations d’entreposage et de manutention de matières dangereuses vont être menées, mais il est préoccupé par le fait que la législation en vigueur n’oblige pas à rechercher le consentement libre et éclairé des communautés autochtones avant d’exécuter toutes mesures qui menacent ou entravent sérieusement les activités économiques importantes pour leur culture (art. 27).

L’État partie devrait veiller au respect des dispositions législatives en vigueur qui prévoient la consultation préalable des communautés autochtones en vue d’obtenir leur consentement éclairé aux décisions concernant des projets qui ont une incidence sur leurs droits, conformément à l’article 27 du Pacte, et notamment faire en sorte que toutes les communautés autochtones concernées participent au processus de consultation et que leurs opinions soient dûment prises en compte. Il devrait aussi veiller à ce que le consentement libre et éclairé des communautés autochtones soit obtenu avant l’adoption de mesures qui menacent ou entravent sérieusement les activités économiques importantes pour leur culture.

L’État partie devrait diffuser largement le texte du Pacte, du Protocole facultatif se rapportant au Pacte, du cinquième rapport périodique, des réponses écrites à la liste des points à traiter établie par le Comité et des présentes observations finales afin de sensibiliser davantage les autorités judiciaires, législatives et administratives, la société civile et les organisations non gouvernementales actives dans le pays, ainsi que le grand public. Le Comité suggère également que le rapport et les observations finales soient traduits dans toutes les langues officielles de l’État partie. En outre, il demande à l’État partie, lorsqu’il élaborera son sixième rapport périodique, d’engager de larges consultations avec la société civile et les organisations non gouvernementales.

Conformément au paragraphe 5 de l’article 71 du Règlement intérieur du Comité, l’État partie devrait faire parvenir, dans un délai d’un an, des renseignements sur la suite qu’il aura donnée aux recommandations figurant dans les paragraphes 11, 16 et 20.

Le Comité demande à l’État partie de faire figurer dans son prochain rapport périodique, qui devra lui parvenir d’ici au 28 mars 2018, des renseignements précis et à jour sur la suite qu’il aura donnée aux autres recommandations et sur l’application du Pacte dans son ensemble.