Nations Unies

CCPR/C/GBR/CO/6/Add.1

Pacte international relatif aux droits civils et politiques

Distr. générale

3 novembre 2009

Français

Original: anglais

Comité des droits de l ’ homme

Examen des rapports soumis par les États parties conformément à l’article 40 du Pacte

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlandedu Nord

Renseignements reçus du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord sur la suite donnée aux observations finales du Comité des droits de l’homme (CCPR/C/GBR/CO/6) *

[11 août 2009]

Introduction

1.Au paragraphe 31 de ses observations finales (adoptées le 18 juillet 2008) sur le sixième rapport périodique du Royaume-Uni, le Comité des droits de l’homme a prié le Royaume-Uni de présenter, dans le délai d’un an, des informations sur les questions visées aux paragraphes 9, 12, 14 et 15 de ces observations. Les informations requises par le Comité sont présentées ci-après. Les renseignements sur les autres questions soulevées par le Comité figureront, comme l’a demandé le Comité, dans le septième rapport périodique du Royaume-Uni.

Paragraphe 9

2.La question de savoir comment porter remède aux séquelles du passé violent de l’Irlande du Nord demeure l’un des plus grands défis auxquels doit faire face le Gouvernement, et une série de mesures ont été prises pour revoir la question des décès non élucidés en Irlande du Nord.

3.Comme le Comité en a été informé, des enquêtes publiques ont été ouvertes le 12 novembre 2004 sur la mort de Robert Hamill, Billy Wright et Rosemary Nelson, et ces enquêtes sont en cours. Chaque enquête est diligentée par une commission indépendante et impartiale composée de trois personnes et présidée par un haut magistrat à la retraite. Deux de ces enquêtes − concernant Robert Hamill et Billy Wright − sont menées en vertu de la loi sur les enquêtes. Ouvertes initialement sur la base d’une autre législation, elles sont désormais menées en vertu de la loi sur les enquêtes à la demande expresse des magistrats indépendants chargés de présider les commissions d’enquête. Le Gouvernement ne pense pas que le fait que ces deux enquêtes sont conduites en vertu de la loi sur les enquêtes soit un sujet de préoccupation.

4.La conduite et le calendrier de ces enquêtes relèvent des commissions indépendantes qui en sont chargées. Les enquêtes ont pris plus de temps que prévu initialement en raison des difficultés liées au rassemblement et au traitement des preuves, notamment l’accroissement du volume et de la complexité des pièces qu’il a fallu analyser, et du surcroît de travail causé par des recours juridiques. La procédure orale dans le cas de Billy Wright s’est terminée le 2 juillet 2009. Celle concernant le cas de Rosemary Nelson a pris fin le 24 juin 2009. La procédure orale dans le cas de Robert Hamill s’est ouverte le 13 janvier 2009. L’interrogatoire des témoins devrait durer jusqu’à fin septembre 2009, les dernières conclusions orales et écrites étant attendues pour le 18 décembre 2009. Dans les trois cas, les rapports devraient être publiés en 2010.

5.Il faut noter qu’il reste une quatrième enquête publique en cours en ce qui concerne l’Irlande du Nord. L’enquête relative au dimanche sanglant (Bloody Sunday) a été ouverte le 29 janvier 1998. Elle vise à déterminer, autant que possible, ce qui s’est véritablement passé à Londonderry le 30 janvier 1972, lorsque l’armée a ouvert le feu lors d’une émeute, tuant 13 personnes et en blessant 13 autres, dont une mourut de ses blessures. Le tribunal d’enquête est présidé par Lord Saville of Newdigate, assisté d’un magistrat canadien, M. Hoyt, et d’un magistrat australien, M. Toohey. La procédure publique a pris fin en novembre 2004 et le tribunal rédige actuellement le rapport de ses constatations.

6.Le Comité a auparavant demandé ce qu’il en était de l’enquête sur la mort de Patrick Finucane. Le Gouvernement du Royaume-Uni a annoncé en 2005 qu’une enquête serait ouverte en vertu de la nouvelle loi sur les enquêtes. Or, la famille de M. Finucane s’est clairement opposée à ce que l’enquête soit menée sur la base de ce texte et aucune enquête n’a été ouverte. Le Gouvernement britannique a toujours clairement indiqué que s’il doit yavoir une enquête publique sur la mort de M. Finucane, elle devra être diligentée sur la base de la loi sur les enquêtes. Le Gouvernement est en relation avec la famille Finucane à propos des conditions dans lesquelles une enquête pourrait être ouverte. Le résultat de ces discussions sera pris en considération pour décider s’il est dans l’intérêt public d’ouvrir une enquête.

7.Quelle que soit l’issue de ces discussions, le Gouvernement considère que la longue enquête Stevens III sur le meurtre de Patrick Finucane et les décisions qui sont intervenues par la suite sur les poursuites engagées en toute indépendance par le Directeur des poursuites pénales (DPP(NI)) ont permis un examen approfondi et efficace des circonstances de la mort de M. Finucane. Les trois enquêtes indépendantes conduites par Lord Stevens comptent parmi les plus vastes et les plus minutieuses investigations policières jamais entreprises au Royaume-Uni. Lord Stevens a rassemblé une énorme quantité d’éléments de preuve et ce sont plus de 10 000 pages de dossier qui ont été soumises à l’examen du DPP(NI) durant l’enquête Stevens III. C’est au terme de cette enquête que Ken Barrett a été reconnu coupable et condamné pour le meurtre de Patrick Finucane en septembre 2004.

8.L’enquête sur la mort de M. Finucane a fait l’objet d’une requête soumise à la Cour européenne des droits de l’homme, laquelle, en 2003, a conclu qu’il y avait eu violation de l’article 2 de la Convention européenne des droits de l’homme en raison des déficiences des procédures d’enquête relatives au décès. Le Gouvernement britannique note que le 19 mars 2009, le Comité des Ministres du Conseil de l’Europe, après avoir évalué les mesures prises par les autorités du Royaume-Uni pour appliquer l’arrêt de la Cour, a décidé de clore l’examen de l’affaire en ce qui concerne les mesures de caractère individuel (résolution intérimaire CM/ResDH(2009)44).

9.Il faut noter que les enquêtes publiques sont le seul mécanisme dans le cadre duquel les décès attribuables aux «Troubles» ont été examinés en Irlande du Nord. L’équipe d’enquête sur les faits du passé (Historical Enquiries Team (HET)) du Service de police d’Irlande du Nord (PSNI) a entrepris ses activités en janvier 2006 et doit réaliser une réévaluation approfondie et indépendante des 3 268 cas de décès non élucidés imputables aux «Troubles» entre 1968 et 1998. Le HET a trois objectifs:

Contribuer à apporter une «forme de conclusion» aux familles de victimes touchées par les décès imputables aux «Troubles»;

Réexaminer tous les cas de décès attribuables aux «Troubles» et faire en sorte que toutes les pistes d’enquête et preuves éventuelles soient examinées et exploitées d’une manière conforme à l’obligation incombant au PSNI de conduire une «enquête efficace» (art. 2, Code d’éthique du PSNI); et

S’acquitter de ces tâches d’une manière qui suscite la confiance de la communauté dans son ensemble.

10.Un réexamen d’une affaire par le HET comporte les cinq étapes suivantes:

Collecte;

Évaluation;

Réexamen;

Réouverture ciblée de l’enquête;

Conclusion.

11.Au mois de mars 2009, 1 421 affaires avaient été ouvertes et 513 d’entre elles avaient été conclues. Le HET s’engage à traiter avec les familles en toute honnêteté, confiance et confidentialité. Une telle approche «centrée sur la famille» est au cœur du projet du HET, dont l’objectif principal est de traiter, autant que possible, l’ensemble des problèmes non résolus que soulèvent les familles. Vu l’ampleur de son mandat, un système d’établissement des priorités dans l’examen des affaires est nécessaire. Afin d’assurer une égalité de traitement entre elles, le HET les classe par ordre chronologique en commençant par celles qui remontent à 1968. Dans un certain nombre de cas cependant, il est nécessaire de s’écarter de cette approche chronologique, s’agissant notamment des enquêtes déjà ouvertes, des affaires où interviennent des considérations humanitaires ou de celles qui posent de graves questions d’intérêt public, et des séries de meurtres.

12.Le HET collabore étroitement avec le Médiateur de la police d’Irlande du Nord (OPONI). En cas d’allégations concernant l’action de fonctionnaires de police, les affaires sont transmises par le HET à l’OPONI et font l’objet d’enquêtes parallèles distinctes. Le HET et l’OPONI organisent chaque mois des réunions stratégiques et tactiques. Un Mémorandum d’accord a été adopté entre les deux parties est régulièrement réexaminé. Au mois de mai 2009, le HET a transmis 62 affaires à l’OPONI.

13.Le mécanisme de l’enquête judiciaire peut contribuer aux recherches sur les circonstances d’un décès. Son but est d’établir la personnalité du défunt ainsi que les causes, le moment et le lieu de son décès. Il appartient au coroner de déterminer la portée de l’enquête judiciaire et de décider quels sont les éléments pertinents à cette fin.

14.En 2007, le coroner d’Irlande du Nord a rouvert/repris plusieurs enquêtes judiciaires à la suite d’une décision de la Chambre des lords confirmant que le chef de la police est tenu de communiquer des renseignements au coroner. Vingt-deux de ces enquêtes judiciaires concernent 32 décès liés à l’état d’insécurité durant les «Troubles» (y compris des décès résultant de l’action des forces de sécurité).

15.On se demande actuellement comment traiter plus généralement les séquelles du passé violent de l’Irlande du Nord. C’est pour répondre à cette question qu’a été créé en juin 2007 le Groupe consultatif sur le passé. Celui-ci avait pour mandat de mener des consultations élargies sur la manière dont la société nord-irlandaise pouvait tourner la page de quatre décennies de violence, et de faire des recommandations, selon le cas, sur les mesures susceptibles d’être prises pour aider la société nord-irlandaise à construire un avenir commun libéré du poids du passé.

16.Ce groupe a constitué une tribune où les gens ont pu exprimer leur point de vue sur la manière de traiter les séquelles de la violence liée aux «Troubles», dont avaient souffert tant de personnes dans toute la société. Coprésidé par Lord Robin Eames et Denis Bradley, le Groupe a réuni un grand nombre de personnes de toute l’Irlande du Nord. L’ancien Président finlandais Martti Ahtisaari et l’expert en matière de médiation Brian Currin ont joué le rôle de conseillers internationaux et proposé pour l’Irlande du Nord des conseils impartiaux tirés de leur vaste expérience du traitement des suites d’un conflit dans d’autres pays.

17.Lors de ces consultations, le Groupe a reçu au total 245 contributions écrites, a rencontré plus de 100 organisations et a tenu sept réunions publiques dans toute l’Irlande du Nord. Il a présenté son rapport le 28 janvier 2009 à Belfast.

18.Le rapport comporte 31 recommandations. L’une d’elles − tendant à verser 12 000 livres sterling au parent survivant le plus proche de toute personne décédée durant les «Troubles» − a provoqué des réactions considérables, notamment une vive opposition de nombreuses personnes. Le 25 février 2009, le Secrétaire d’État pour l’Irlande du Nord a noté qu’il n’y avait pas consensus sur la question du versement de 12 000 livres à titre de «reconnaissance» et indiqué clairement que le Gouvernement n’y donnerait pas suite. Il a également noté que les 30 autres recommandations méritaient d’être examinées avec une grande attention et a exhorté à élargir le débat sur ces autres propositions. Constatant qu’il n’y avait pas encore eu de débat approfondi à propos des autres recommandations contenues dans le rapport, le Secrétaire d’État a annoncé le 24 juin une consultation publique sur ces recommandations. Dans le cadre de cette consultation, chacun a été invité à étudier soigneusement toutes les recommandations et à faire part aux autorités de son point de vue. La consultation doit s’étendre jusqu’au 2 octobre 2009. Quel qu’en soit le résultat, le Gouvernement continuera à aider l’Irlande du Nord sur la voie de la réconciliation.

Paragraphe 12

19.Le Gouvernement du Royaume-Uni ne renvoie pas une personne vers un pays s’il existe des motifs sérieux de craindre qu’elle risque d’y être soumise à la torture ou à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Étant l’un des premiers signataires du nombre de conventions internationales relatives aux droits de l’homme et ayant incorporé la Convention européenne des droits de l’homme dans sa législation interne, le Royaume-Uni est profondément conscient de ses obligations dans le domaine des droits de l’homme et entend s’y conformer.

20.Le Gouvernement britannique n’accepte pas l’idée que plus la torture ou les traitements cruels, inhumains ou dégradants ont un caractère systématique, moins l’on peut espérer prévenir le risque d’un tel traitement par des assurances diplomatiques; il croit qu’en cas de renvoi d’une personne, il est possible de recourir, au cas par cas, à des assurances convenues entre gouvernements afin de garantir la sécurité de l’intéressé, en particulier en cas de menace à la sécurité nationale. La demande et l’obtention d’assurances n’entraînent pas automatiquement le renvoi de l’individu. Ce n’est que lorsque tous les renseignements ont été évalués qu’une décision est prise sur l’opportunité, au regard du respect de nos obligations en matière de droits de l’homme, de renvoyer ou non l’intéressé.

21.Tout en sachant que l’expression «assurances diplomatiques» est souvent employée comme une définition générique, le Royaume-Uni est conscient qu’elle recouvre des pratiques très différentes de la part des États. S’agissant de la propre pratique du Royaume-Uni, les autorités s’emploient à conclure des accords-cadres avec un certain nombre de pays qui leur permettent de demander et d’obtenir des plus hautes instances de l’État des assurances dans les domaines particuliers intéressant la personne dont le renvoi est envisagé. Par exemple, s’il ressort des enquêtes que la personne, à son retour, risque une arrestation, des poursuites pénales ou un procès, il est procédé à une évaluation précise de ce que prévoit la législation du pays dans ces domaines, de sa mise en œuvre dans la pratique, des normes existantes et de la manière exacte dont elles seront appliquées à la personne en cause. Un suivi approprié des personnes renvoyées est mis en place pour assurer le respect des assurances générales et particulières convenues.

22.Toute mesure d’expulsion du Royaume-Uni est susceptible d’un recours légal devant un tribunal indépendant (le tribunal de l’asile et de l’immigration) ou, dans certains cas mettant en cause la sécurité nationale, la Commission spéciale de recours en matière d’immigration, qui est une instance supérieure. Le tribunal peut examiner l’affaire sous l’angle du renvoi de la personne et de sa sécurité après son renvoi. En février 2009, dans sa décision concernant les affaires Othman (OO) et RB & U, la Chambre des lords a reconnu la validité des assurances diplomatiques obtenues par le Gouvernement de la part de la Jordanie et de l’Algérie. Ce faisant, la Chambre des lords a estimé que la Commission spéciale de recours en matière d’immigration avait appliqué les critères juridiques appropriés pour déterminer la valeur des assurances obtenues de l’Algérie et de la Jordanie, et qu’il était loisible à la Commission d’en tirer les conclusions de fait pertinentes. La Commission avait procédé à une analyse rigoureuse des assurances et pour chacun de ces pays, les décisions de principe (fondées sur un examen détaillé des assurances) comportaient chacune plus de 100 pages.

23.Outre la procédure mise en place avec les gouvernements de certains pays pour obtenir des assurances au regard des droits de l’homme, le Royaume-Uni a prévu dans tous les accords existants un dispositif de suivi du traitement réservé à toute personne expulsée et du respect des assurances données. Dans certains pays, le suivi sera effectué par un organe indépendant nommé à cette fin. Dans d’autres cas, il sera assuré par l’intermédiaire de l’ambassade du Royaume-Uni dans le pays considéré.

Paragraphe 14

24.Les obligations du Royaume-Uni en matière de droits de l’homme ont un caractère principalement territorial, et sont dues par les autorités à la population du Royaume-Uni. Le Gouvernement considère donc que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques s’applique à l’intérieur du territoire d’un État, et que le Pacte ne pourrait avoir d’effets hors du territoire du Royaume-Uni que dans des circonstances très exceptionnelles. Nous sommes prêts à admettre que les obligations incombant au Royaume-Uni en vertu du Pacte puissent en principe s’appliquer à des personnes appréhendées par les forces britanniques et maintenues dans des centres de détention militaires hors du Royaume-Uni. Néanmoins, toute éventuelle décision en ce sens devrait être prise à la lumière des circonstances et des faits propres à chaque cas.

25.Nous réaffirmons au Comité que nous condamnons tous les actes de violence et avons toujours traité les allégations d’actes illicites portés à notre attention avec un très grand sérieux. Nous avons déjà donné l’assurance au Comité que des enquêtes de police sont ouvertes dès qu’il existe des raisons de soupçonner qu’un acte criminel a été ou a pu être commis par un membre des forces armées, et/ou lorsque les règles d’engagement ont été violées. Lorsqu’ils ont à répondre de tels faits, les intéressés sont poursuivis devant un tribunal militaire. La procédure devant un tribunal militaire est pratiquement analogue à celle applicable devant une Crown Court et les débats sont publics.

26.Les membres des forces armées sont pleinement informés des obligations que leur impose le droit international. Ils reçoivent une formation obligatoire comportant notamment des instructions spécifiques sur le traitement des prisonniers de guerre. La formation pratique désormais dispensée aux militaires affectés à des opérations leur permet d’être sensiblement mieux préparés qu’auparavant au traitement de civils en détention. L’armée a déjà reconnu certaines déficiences et a pris des mesures spécifiques pour y remédier dans le cadre de la formation professionnelle continue. Les autres personnels britanniques envoyés sur des théâtres d’opérations qui sont susceptibles de participer à des activités exigeant une connaissance de ces obligations internationales reçoivent également les instructions appropriées.

27.Il est versé une réparation aux victimes ou à leur famille lorsqu’il existe juridiquement une obligation à cet égard en raison des activités illicites d’un membre des forces armées britanniques. Les demandes de réparation pour décès et dommages corporels peuvent être fondées sur la common law britannique et une indemnisation peut être due pour des violations des droits de l’homme en application, le cas échéant, de la loi sur les droits de l’homme. Des indemnités peuvent aussi être dues en vertu des dispositions de la loi britannique relatives à l’indemnisation des victimes d’actes criminels lorsqu’elles sont applicables. Des précisions sur les paiements à titre de réparation peuvent être trouvées sur le site Web ci-après: http://www.mod.uk/DefenceInternet/AboutDefence/CorporatePublications/FinanceandProcurementPublications/Claims/ModClaimsAnnualReports.htm.

Paragraphe 15

28.Le niveau de menace terroriste au Royaume-Uni est «important», c’est-à-dire qu’un attentat terroriste est tout à fait possible et qu’il pourrait survenir sans autre avertissement. Cela peut se produire à tout moment. Depuis les attentats perpétrés par des terroristes britanniques en juillet 2005 dans les transports publics londoniens, qui ont tué 52 personnes, il y a eu de nombreux complots visant des citoyens britanniques, notamment à Londres et à Glasgow en juin 2007 et à Exeter en mai 2008.

29.La sécurité du public est primordiale et il incombe au Gouvernement et aux services de sécurité et de police de protéger les citoyens contre les menaces posées par le terrorisme. Les responsables de ces services ont signalé la complexité des enquêtes dans la lutte antiterroriste. Cela est dû en partie au recours accru à des ordinateurs et téléphones mobiles cryptés; à la complexité croissante des réseaux terroristes sur lesquels il faut enquêter; et à l’internationalisation croissante des réseaux terroristes qui aggrave les difficultés liées à la langue et rend de plus en plus nécessaire de recueillir des preuves à l’étranger.

30.Les suspects arrêtés en vertu de l’article 41 de la loi sur le terrorisme de 2000 peuvent être détenus pour une durée maximum de vingt-huit jours avant d’être libérés ou inculpés. La détention de tout suspect au-delà de quarante-huit heures doit être approuvée par un juge.

31.Le juge peut approuver la prolongation de la détention pour une durée maximale de sept jours à chaque fois, mais peut l’autoriser pour une durée inférieure. Le juge peut naturellement ne pas autoriser la prolongation de la détention, auquel cas le suspect doit être libéré. Le juge ne peut approuver la prolongation de la détention que s’il estime:

a)Qu’il existe des motifs raisonnables de croire que la prolongation de la détention est nécessaire à l’obtention, l’analyse ou la préservation des preuves; et

b)Que l’enquête est menée avec diligence et rapidité.

32.Des suspects terroristes ne peuvent donc être détenus pour plus de quarante-huit heures que lorsque cela est jugé nécessaire par un juge indépendant. Le service des poursuites de la Couronne (CPS) a pour politique d’inculper dès que possible. Le moment de l’inculpation est un aspect qui est suivi de très près et est discuté entre le CPS et l’enquêteur.

33.Le suspect et son représentant légal peuvent présenter des observations dans le cadre des audiences sur la prolongation de la détention. Les demandes de prolongation de la détention au-delà du quatorzième jour sont présentées par le CPS et examinées par un juge de la High Court, suivant une procédure rigoureuse. Un membre du CPS présente la demande en présence du responsable de l’enquête (Senior Investigating Officer). Chaque demande de prolongation est communiquée aux avocats de la défense en même temps qu’un exposé écrit des motifs de la demande. Celle-ci suscite généralement une vive opposition et l’audience peut durer plusieurs heures. L’avocat de la défense peut poser des questions sur tous les aspects de l’affaire.

34.En 2009, l’Inspection générale du service des poursuites (HMCPSI) a procédé à une inspection indépendante approfondie de la Division de la lutte antiterroriste au siège du CPS (rapport publié le 16 avril 2009). Le rapport passe en revue les affaires ayant donné lieu à une détention avant inculpation. Dans une affaire au moins, la détention a été prolongée au-delà de quatorze jours (Opération Seagram relative aux attentats à la bombe Londres/Glasgow en 2006). Dans tous les cas, il ressortait clairement du dossier que la détention avant inculpation avait été dûment contrôlée et réexaminée et que la demande de prolongation était totalement régulière.

35.S’agissant de l’inculpation, la norme à appliquer est celle du critère intégral (full test) prévu par le Code des procureurs de la Couronne, qui consiste à établir, après examen du dossier, que les éléments de preuve sont suffisants pour permettre d’envisager une condamnation et qu’il est dans l’intérêt public de poursuivre.

36.Lorsque l’on estime qu’il serait inopportun de libérer l’intéressé sous caution après son inculpation et que tous les éléments de preuve requis pour l’inculpation ne sont pas encore disponibles mais qu’il y a des raisons de croire qu’ils le seront à bref délai, le procureur évalue l’affaire par rapport au critère préliminaire (threshold test) et une date d’examen par rapport au test intégral du Code est fixée dans le cadre d’un plan d’action.

37.Cet exercice a constitué une évaluation indépendante importante, qui a clairement montré que de l’avis du HMSPCSI, l’inculpation par le CPS intervient dès que possible sur la base des éléments de preuve disponibles.

38.Les dernières statistiques de la police montrent que 46 % des personnes arrêtées en vertu de l’article 41 de la loi sur le terrorisme de 2000 ont été maintenues en détention avant inculpation pour moins d’une journée et 66 % pour moins de deux jours, après quoi elles ont été inculpées, libérées ou ont fait l’objet d’autres mesures. Depuis que la durée maximale de la détention avant inculpation a été portée à vingt-huit jours à compter du 25 juillet 2006, six personnes ont été maintenues en détention pour cette durée, au terme de laquelle trois ont été inculpées et trois ont été libérées sans aucune charge.

39.Il faut aussi noter que toute personne arrêtée en vertu de l’article 41 de la loi de 2000 se voit communiquer à compter de son arrestation autant de renseignements que possible, compte tenu de la nécessité de protéger et de conduire efficacement l’enquête en cours, à propos des faits qui lui sont reprochés.