NATIONS UNIES

E

Conseil économique et social

Distr.GÉNÉRALE

E/C.12/1/Add.102

14 décembre 2004

FRANÇAIS

Original: ANGLAIS

COMITÉ DES DROITS ÉCONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELSTrente‑troisième session8‑26 novembre 2004

EXAMEN DES RAPPORTS PRÉSENTÉS PAR LES ÉTATS PARTIES CONFORMÉMENT AUX ARTICLES 16 ET 17 DU PACTE

Observations finales du Comité des droits économiques, sociaux et culturels

DANEMARK

1.Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels a examiné le quatrième rapport périodique du Danemark sur l’application du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (E/C.12/4/Add.12) à ses 34e, 35e et 36e séances, tenues les 10 et 11 novembre 2004 (E/C.12/2004/SR.34 à 36), et a adopté à sa 56e séance, tenue le 26 novembre 2004 (E/C.12/2004/SR.56), les observations finales qui suivent.

A. Introduction

2.Le Comité se félicite de la présentation dans les délais prescrits du quatrième rapport périodique de l’État partie, qui a été établi conformément à ses directives, ainsi que des réponses écrites à la liste des points à traiter.

3.Le Comité se félicite également du dialogue franc et constructif qu’il a eu avec la délégation de l’État partie, composée d’experts des différents domaines visés par le Pacte ainsi que d’un représentant du Gouvernement autonome du Groenland.

B. Aspects positifs

4.Le Comité prend note avec satisfaction des efforts constants de l’État partie pour s’acquitter de ses obligations en vertu du Pacte, et de la protection globale accordée aux droits économiques, sociaux et culturels au Danemark.

5.Le Comité prend note avec reconnaissance de l’engagement du Danemark en faveur de l’aide publique au développement (APD) et du niveau de ses contributions, qui représentent 0,85 % de son produit intérieur brut (PIB) (2004), le Danemark étant ainsi l’un des rares pays à avoir dépassé l’objectif de 0,7 % du PIB fixé par l’ONU.

6.Le Comité se félicite des mesures législatives et administratives en vigueur destinées à lutter contre les actes de racisme et de xénophobie dans l’État partie, et accueille avec satisfaction la promulgation en juillet 2003 de la loi sur l’égalité de traitement sans distinction d’origine ethnique. À cet égard, il relève également avec satisfaction qu’un plan national d’action pour la promotion de l’égalité de traitement et de la diversité et la lutte contre la discrimination a été établi pour donner suite à la Déclaration et au Programme d’action de Durban.

7.Le Comité se félicite des efforts accomplis par l’État partie pour renforcer la promotion de l’égalité des sexes au Danemark par le biais de la législation, des politiques et des programmes, et notamment par la nomination d’un ministre pour l’égalité des sexes, en juillet 1999, et l’adoption de la loi no 388 sur l’égalité des sexes, en mai 2000.

8.Le Comité constate avec satisfaction que, grâce aux politiques d’emploi efficaces mises en œuvre par l’État partie, le taux de chômage est en recul au Danemark.

9.Le Comité salue l’adoption, en mars 2003, de la loi sur la lutte contre la pornographie mettant en scène des enfants, l’exploitation sexuelle des enfants et la vente d’enfants, ainsi que l’élaboration, en août 2003, d’un plan d’action contre les violences sexuelles à l’égard des enfants.

10.Le Comité se félicite des mesures prises par l’État partie pour lutter contre la traite d’êtres humains, notamment l’adoption, en juin 2002, de la loi sur la traite des êtres humains et la ratification, en septembre 2003, de la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée et de son Protocole additionnel visant à prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants.

11.Le Comité prend note avec satisfaction de la diminution du nombre de fumeurs, grâce à la campagne soutenue menée par l’État partie en vue de promouvoir un mode de vie sain, axée notamment sur la sensibilisation aux effets néfastes du tabagisme.

C. Facteurs et difficultés entravant l’application du Pacte

12.Le Comité ne relève aucun facteur ni difficulté notable empêchant le Danemark d’appliquer effectivement les dispositions du Pacte.

D. Principaux sujets de préoccupation

13.Le Comité s’inquiète de ce que l’augmentation du nombre des immigrants et des réfugiés arrivés au Danemark ces dernières années ait suscité des attitudes négatives et hostiles à l’égard des étrangers. Il est également préoccupé par les incidents xénophobes survenus dans l’État partie.

14.Tout en se félicitant des mesures prises par l’État partie pour promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes, le Comité demeure préoccupé par les inégalités persistantes entre les sexes au Danemark, en particulier en ce qui concerne les salaires (écart salarial de 12 à 19 %) et la faible participation des femmes à certains niveaux de la prise de décisions.

15.Le Comité est préoccupé par l’ampleur du chômage de longue durée, qui touche les hommes âgés de 55 à 59 ans, et le taux de chômage élevé parmi les immigrés, les réfugiés, les nouveaux diplômés et les femmes, qui est bien supérieur à la moyenne nationale.

16.Le Comité note avec préoccupation que la modification apportée en 2002 à la loi sur l’intégration des étrangers, selon laquelle le droit au regroupement des conjoints ne peut être exercé désormais que par les conjoints âgés de 25 ans au moins, constitue une entrave à l’obligation de l’État partie de garantir l’exercice du droit à la vie familiale au Danemark.

17.Le Comité regrette qu’aucune disposition juridique particulière dans la législation de l’État partie n’érige en infraction pénale la violence familiale, en particulier celle qui vise les femmes.

18.Le Comité est également préoccupé par les informations faisant état de mauvais traitements infligés aux femmes, en particulier les migrantes, par leur conjoint ou leur compagnon, traitements qui ne sont que rarement signalés pour des raisons de dépendance économique et par crainte d’expulsion. Le Comité note que la situation s’est aggravée avec la modification apportée en 2002 à la loi sur l’intégration des étrangers, qui a porté à sept ans le délai de résidence nécessaire pour qu’une migrante mariée à un Danois obtienne un permis de séjour permanent.

19.Le Comité note avec préoccupation que l’État partie, en dépit des mesures qu’il a adoptées, continue de connaître des problèmes liés à la pornographie enfantine, à l’exploitation sexuelle des enfants, et à la traite de femmes et d’enfants.

20.Le Comité regrette l’absence, dans le rapport du Danemark, de statistiques désagrégées sur l’ampleur de la pauvreté, en particulier parmi les réfugiés et la population immigrée, et observe que l’État partie n’a pas encore adopté de seuil de pauvreté officiel qui lui permettrait de cerner l’importance du problème et de suivre et d’évaluer les progrès réalisés dans la lutte contre la pauvreté.

21.Le Comité est préoccupé par l’absence de dispositions constitutionnelles ou législatives dans l’État partie garantissant le droit au logement. Il s’inquiète également de voir que les groupes défavorisés et marginalisés, en particulier les immigrés, rencontrent des difficultés pour louer ou obtenir un logement social, en raison de pratiques discriminatoires. Le Comité observe également avec inquiétude l’augmentation du nombre de sans‑abri parmi la population immigrée dans l’État partie.

22.Le Comité est préoccupé par la consommation élevée de stupéfiants et d’alcool dans l’État partie, et par la situation des personnes qui souffrent de maladies mentales liées à l’abus de ces substances.

E. Suggestions et recommandations

23.Le Comité se félicite qu’un nouveau mécanisme ait été mis en place au sein de l’Institut danois pour les droits de l’homme afin de recevoir les plaintes de personnes victimes de discrimination fondée sur la race, et il encourage l’État partie à continuer de prendre des mesures effectives en vue de renforcer les activités de cet organisme, notamment en lui accordant des ressources suffisantes, ainsi qu’à envisager d’étendre ses compétences afin qu’il puisse recevoir des plaintes concernant les violations d’un ensemble plus vaste de droits de l’homme, notamment les droits économiques, sociaux et culturels.

24.Le Comité recommande à l’État partie de surveiller étroitement l’incidence du racisme et de la xénophobie et de combattre ces phénomènes, et de continuer à promouvoir la compréhension interculturelle et la tolérance parmi tous les groupes de la société. Il lui recommande en outre de prendre des mesures pour assurer la mise en œuvre effective du Plan national d’action pour la promotion de l’égalité de traitement et de la diversité et la lutte contre la discrimination, afin de donner suite à la Déclaration et au Programme d’action de Durban, et de rendre compte des progrès réalisés à cet égard dans son prochain rapport périodique.

25.Le Comité invite l’État partie à adopter des mesures efficaces pour assurer l’égalité entre les hommes et les femmes, comme le prévoient les articles 2 (par. 2) et 3 du Pacte, notamment en mettant en œuvre le principe d’une rémunération égale pour un travail de valeur égale et en veillant à ce que les femmes participent à la prise de décisions. Le Comité demande à l’État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les progrès réalisés en matière de discrimination entre les sexes, notamment sur les mesures d’action positive.

26.Le Comité recommande à l’État partie de continuer à consolider les programmes visant à réduire le chômage parmi les groupes les plus touchés, notamment les immigrés, les réfugiés, les hommes dans la tranche d’âge 55‑59 ans, les jeunes diplômés et les femmes. Il l’invite en outre à prendre davantage de mesures pour aider les hommes et les femmes à concilier leur vie professionnelle et leur vie familiale.

27.Le Comité demande à l’État partie de fournir dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur la réforme intitulée «Nouveau Danemark», notamment en ce qui concerne l’impact de cette initiative sur les groupes marginalisés de la société, de façon à lui permettre d’apprécier si le niveau des prestations offertes suffit pour garantir à tous un niveau de vie satisfaisant.

28.Le Comité recommande à l’État partie d’envisager de ratifier la Convention (no 117) sur la politique sociale (objectifs et normes de base), 1962, et la Convention (no 174) sur la prévention des accidents industriels majeurs, 1993, de l’OIT.

29.Le Comité invite l’État partie à prendre des mesures appropriées pour abroger ou modifier la règle dite des 24 ans figurant dans la loi de 2002 sur l’intégration des étrangers, conformément à l’obligation qui lui incombe de garantir l’exercice du droit à la vie familiale de toutes les personnes vivant au Danemark, sans distinction. À cet égard, le Comité encourage l’État partie à envisager d’autres moyens pour lutter contre le phénomène des mariages forcés qui touche les femmes immigrées.

30.Le Comité demande à l’État partie de fournir dans son cinquième rapport périodique des informations détaillées sur l’ampleur du problème de la violence familiale au Danemark, en particulier celle qui vise les femmes, ainsi que sur les mesures prises pour lutter contre ce phénomène. À cet égard, le Comité encourage l’État partie à envisager d’adopter une législation particulière érigeant la violence familiale en infraction pénale, et à dispenser une formation aux agents de la force publique et aux juges pour les sensibiliser au caractère criminel de la violence familiale.

31.Le Comité recommande que des mesures efficaces soient prises pour que les victimes de violence familiale reçoivent les soins et l’appui nécessaires à leur réadaptation, et que des mécanismes appropriés soient mis en place pour que la crainte d’être reconduites à la frontière ou expulsées du Danemark n’empêche pas les victimes de demander de l’aide.

32.Le Comité encourage l’État partie à poursuivre et à renforcer sur son territoire la lutte contre la traite d’êtres humains, en particulier de femmes et d’enfants, et contre l’exploitation sexuelle à des fins commerciales, et il l’invite à fournir dans son prochain rapport périodique des informations détaillées sur les progrès réalisés et les difficultés rencontrées dans ce domaine, et notamment à rendre compte des résultats du plan d’action contre les violences sexuelles à l’égard des enfants.

33.Le Comité engage l’État partie à redoubler d’efforts pour lutter contre la pauvreté et l’exclusion sociale, et à mettre en place un mécanisme permettant de mesurer le niveau de pauvreté et d’en suivre attentivement l’évolution. À ce propos, le Comité renvoie l’État partie à sa Déclaration sur la pauvreté et le Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, adoptée le 4 mai 2001 (E/C.12/2001/10). Le Comité prie l’État partie d’inclure dans son prochain rapport périodique des données désagrégées et comparatives sur le nombre de personnes vivant dans la pauvreté, ainsi que sur les progrès accomplis dans la lutte contre ce problème.

34.Le Comité encourage l’État partie à envisager d’adopter une législation spécifique en faveur du droit au logement. Conformément à son Observation générale no 4, il lui recommande également d’adopter une politique nationale visant à assurer un logement convenable à toutes les familles, et de consacrer des ressources suffisantes à la construction de logements sociaux, en particulier en faveur des groupes défavorisés et marginalisés tels que les immigrés. Le Comité encourage en outre l’État partie à prendre des mesures pour remédier au problème des sans‑abri, en particulier parmi la population immigrée.

35.Le Comité recommande à l’État partie de veiller à ce que les programmes de prévention de la consommation de drogues, du tabagisme et de l’alcoolisme continuent d’être mis en œuvre efficacement, et de faire rapport au Comité sur ce point dans son prochain rapport périodique.

36.Le Comité demande à l’État partie d’assurer une large diffusion des présentes observations finales à tous les niveaux de la société, et en particulier parmi les fonctionnaires et les agents de l’appareil judiciaire, et de l’informer dans son prochain rapport périodique de toutes les mesures qu’il aura prises pour mettre en œuvre ces observations. Il encourage également l’État partie à associer des organisations non gouvernementales et d’autres membres de la société civile au processus de discussion au niveau national avant la présentation de son cinquième rapport périodique.

37.Enfin, le Comité demande à l’État partie de présenter son cinquième rapport périodique au plus tard le 30 juin 2009.

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